Impacts socio économiques des pistes rurales dans la region de l'Est du Burkina Fasso( Télécharger le fichier original )par Mamady DIANE EIER - Master en Développement 2004 |
2 Programme de Pistes Rurales à l'Est2.1 Politiques de développement en matière de pistes ruralesLes interventions en matière de pistes rurales et de désenclavement s'intègrent à trois niveaux dans la stratégie de développement du Burkina Faso : · Le Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP). Selon son axe stratégique n°3, place la mobilité et la création de richesse comme issues de première importance. L'amélioration du transport en milieu rural est considérée comme un des outils privilégiés de développement socio-économique et de lutte contre la pauvreté. · La Stratégie Nationale du Transport Rural (SNTR). Elaborée en 2003, cette stratégie vise l'amélioration de la mobilité en milieu rural. L'absence et/ou la mauvaise qualité du transport représente une des principale contrainte au développement en ce sens qu'elle entrave le stockage et l'écoulement de la production, le déroulement des activités commerciales et l'accès aux services socio-économiques confinant ainsi les résidents ruraux dans une agriculture de subsistance, dans des conditions de vie précaires et l'isolement.
Dans ce cadre, la Direction Générale des Pistes Rurales, rattachée au Ministère des Infrastructures, des Transports et de l'Habitat est chargée de la définition et de l'application de la politique en matière de pistes rurales. · Le processus de décentralisation et de déconcentration en cours. Il représente l'axe fondamental d'impulsion du développement et de la démocratie au Burkina Faso. La constitution de Commissions Villageoises de Gestion du Terroir (CVGT) préfigure et prépare les futures communautés locales. Le programme de la Suisse au Burkina Faso se focalise actuellement sur la lutte contre la pauvreté. Les axes prioritaires définis dans le cadre du Programme par Pays (PpP) touchent le développement local, l'éducation de base, l'appui à des organisations socio-professionnelles, à l'artisanat, aux PME et finalement à la décentralisation. Le Département du développement et de la Coopération Suisse (DDC) intervient au Burkina Faso selon un principe de subsidiarité, c'est-à-dire que les interventions se concentrent uniquement sur les domaines que les capacités locales existantes ne peuvent réaliser seules. 2.2 Présentation de PrEstDans une optique de décentralisation, le programme PrEst a été mis sur pied en 2002 avec comme finalité la création dans la région d'un réseau de pistes de proximité carrossables, gérées localement et de façon durable. Il s'inscrit dans le cadre d'un accord bilatéral entre la Suisse et le Burkina Faso. Mandataire L'ONG Helvetas Burkina Faso, mandatée par le programme de la Coopération Suisse est chargé de l'exécution. Elle assure la maîtrise d'oeuvre du programme, la coordination des activités au niveau national et supervise les actions de la cellule PrEst basée à Fada. Cette dernière est responsable pour l'organisation, l'administration, la gestion et l'appui technique des programmes de pistes dans les provinces du Gourma, de la Gnagna et de Tapoa. Services techniques Le programme travaille en étroite collaboration avec un ministère de tutelle - le Ministère de l'économie et du développement (MED) et un ministère technique représenté par le ministère des infrastructures, des transports et de l'habitat (MITH) dont dépend la Direction générale des Pistes Rurales (DGPR) et le Cadre de Concertation Technique Provincial (CCTP) chargé d'examiner les programmes et rapports d'activités à l'échelle provinciale avant leur validation au niveau régional. Bailleur La Suisse, de son côté, est représentée au niveau du programme par le Bureau de coordination de la DDC (BuCo) en tant que bailleur de fonds. Comité de pilotage Un comité de pilotage représente le dispositif décisionnel. Il sert de cadre de concertation entre partenaires du programme, qui se prononce sur le programme annuel proposé et statue sur les textes fondamentaux qui régissent le programme. Il réunit les partenaires institutionnels : BUCO, Helvetas, et l'ordonnateur national (Direction Générale de la Coopération, du ministère technique et de la société civile) et des représentants locaux : administration, secteur privé et associatif, corporation socio-professionnelles. 2.2.2 Les acteurs du terrain et les étapes du programme Mise en oeuvre des interventions Ce sont les villages qui sont les promoteurs des projets d'aménagement de pistes. Il leur appartient de soumettre à PrEst un dossier présentant l'importance de l'aménagement de pistes pour le village ainsi que leurs motivations. Une fois la demande retenue, une équipe de trois animateurs représentant l'Intermédiation Sociale du Gourma (ISG)4(*) ainsi que les ingénieurs du programme établissent le diagnostic conjoint. Ce dernier comprend :
- une analyse socio-économique du village - les caractéristiques et le transect sur le plan de la piste - l'analyse des sols et des contraintes de la piste permettant de déterminer la faisabilité de la piste. Sur la base du diagnostic conjoint, un projet de piste est réalisé et soumis pour avis technique au Cadre de Concertation Technique Provincial (CCTP). Si le projet est agréé, les études d'avant projets détaillées (ADP) sont lancées. Une fois la faisabilité technique confirmée, le processus de réalisation de la piste peut alors être mis en place.
Photographie 1 : Main d'oeuvre sur les chantiers Réalisation de la piste L'intermédiation sociale du Gourma (ISG ) Durant toute la durée des travaux, l'ISG intervient sous mandat pour des actions visant : · à renforcer la citoyenneté au niveau villageois · à animer le processus d'appropriation du programme en préparant les populations à se constituer en comité villageois de pistes · à animer le processus de mobilisation et de gestion des contributions financières · à recenser des ressources humaines et matérielles disponibles · à organiser la main d'oeuvre et la gérer · à appuyer les formations théoriques en HIMO · à appuyer le développement du concept d'entretien · à orienter des initiatives villageoises vers la coordination inter-villageoise La cellule technique de PrEst La cellule est composée d'un conseiller en aménagement et entretien de piste et de trois techniciens et un ingénieur. Ils assurent la maîtrise d'oeuvre du programme. Ils ont pour tâche la gestion des chantiers, la coordination et la supervision des travaux. Le suivi s'effectue au moyen de rapports journaliers, de fiches de pointage, de listes de matériels et de listes indiquant les effectifs mobilisés. Ce cadre technique est aussi au coeur du transfert de compétences et la diffusion du concept technique. Figure 4 : Montage du programme Phase 1 2.2.3 Approche méthodologique du programme Le programme travaille selon la méthode HIMO (Haute Intensité de Main d'Oeuvre). Elle fonctionne selon le principe de recherche action misant sur la combinaison optimale de main d'oeuvre, de petits outillages et d'équipement afin de produire à un coût minimum des infrastructures de qualité, de maximiser l'emploi tout en favorisant la distribution des revenus dans les zones rurales et de contribuer ainsi à lutter contre la pauvreté. Sur le mode participatif, cette approche implique les bénéficiaires à toutes les étapes de réalisation de la piste. Elle permet aussi de répondre à l'objectif de gestion locale et durable. Pour se faire des actions favorisant le développement local et la décentralisation ont été menées. Cette sensibilisation se traduit de manière concrète par des actions visant la professionnalisation par l'apprentissage pratique à tous les niveaux de la réalisation et par l'encadrement de services d'appui. Dans cet optique des chantiers-écoles ont été organisés ayant comme objectif l'apprentissage pour les populations du savoir-faire technique à travers la réalisation de pistes rurales. En favorisant de cette façon la maîtrise d'ouvrage locale, le programme entend parvenir à une maîtrise déléguée aux collectivités locale. A moyen ou à long terme, le transfert des compétences devrait passer par des phases à responsabilisation croissante, allant de la régie PrEst - en passant par une co-gestion des contrats et des fonds - vers une auto-gestion accompagnée pour finalement atteindre l'autonomisation des comités villageois de pistes (CVP) et leur coordination au niveau inter-villageois. Photographie 2 : Chantier- école piste de Tantiaka Le programme mène en parallèle des actions sur des thèmes transversaux tels que : · la pauvreté. PrEst a effectué une étude portant sur la perception de la pauvreté dans différentes communautés villageoises à l'Est. · le genre. L'accent a été mis, lors des diagnostics conjoints sur le concept de genre et de développement. Une analyse détaillée se penche sur la place et les contraintes des femmes dans l'agriculture, l'élevage, le commerce, l'appui extérieur et finalement sur le plan des initiatives organisationnelles. · le VIH/SIDA. Le programme a mis sur pied un plan d'action en matière de lutte contre le VIH/SIDA. Ce dernier s'adresse à l'ensemble des collaborateurs, des prestataires et des communautés villageoises. Les actions se traduisent par la distribution de boîte à condoms, des rassemblements d'information et de sensibilisation ainsi que la prise charge des frais médicaux en cas de dépistage. · la décentralisation et la démocratie. · l'équité sociale · la protection de l'environnement 2.2.5 Financement des programmes de pistes En plus de la contribution en investissement humain, la réalisation du projet se fait en partenariat financier avec les villages concernés, les bailleurs. Le principe du partage des coûts est réglementé par le Ministère des Infrastructures, des Transports et de l'Habitat (MITH) dans le "Manuel d'exécution de la Stratégie Nationale du Transport Rural au Burkina Faso"(2003). Il prévoit une répartition des investissements financiers en infrastructures rurales de la manière suivante : En règle générale, la part contractuelle des bénéficiaires est plafonnée à 20'000 FCFA par personne désenclavée. Le niveau d'investissement, comprenant les travaux et le suivi technique doit se situer entre 5 et 7 millions FCFA par kilomètre de piste. La participation de la population bénéficiaire s'élève en règle générale à 150'000 FCFA par kilomètre. De plus, afin d'amorcer le processus d'entretien, un fonds d'entretien est alors instauré. Ce dernier devrait permettre la viabilité du projet sur 2 à 3 ans. 2.2.6 La première phase du programme Réalisation et évaluation La première phase du programme s'est déroulée de juin 2002 à septembre 2004. Elle avait pour objectif opérationnel de développer des mécanismes de gestion rapprochée des questions de désenclavement consistant à · Mettre en place le dispositif du programme · Tester son approche lors des premières réalisations Cette première étape test a permis la réalisation de près de 17 km de piste dans la province du Gourma. Pistes achevées - Tambiga à Diabatou 4,2 km - Tantiaka à Diapangou 8,5 km Pistes partiellement achevées - Balaga à Nayouri 1,7 km / reste 6,5 km - Boumwana à Tanwalbougou 2 km / reste 2,9 km Figure 5 : Réalisation et projets prévisionnels de Pistes Rurales Source : PrEst Un bilan externe, effectué en mars 2004, a permis de valider le dispositif de PrEst. Le programme est reconnu et apprécié des autorités politiques et administratives car il a su s'intégrer rapidement dans son milieu et dans le cadre stratégique du pays. Le concept technique poursuivi par PrEst selon une approche "HIMO souple" - c'est-à-dire le recours à la Haute Intensité de Main d'Oeuvre avec une utilisation minimale et intelligente des moyens mécanisés - est considéré comme une réussite. * 4 L'ISG travaille selon une approche méthodologique basée sur la recherche - action utilisant les outils appropriés de collecte de données de la MARP. Ces outils favorisent les échanges dynamiques avec la population et contribue aussi à la validation et à l'appropriation des résultats du diagnostic. |
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