Croissance démographique et demande de logements en milieu urbain: cas de la ville de Cotonou( Télécharger le fichier original )par Blandine DANSOU Université d'Abomey Calvi au Bénin - DESS Population et dynamiques urbaines 2005 |
CHAPITRE 1 : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIE DE L'ETUDELe chapitre 1 structuré en trois sections, expose d'une part, le cadre théorique de l'étude et d'autre part, la synthèse documentaire ainsi que la méthodologie adoptée pour cette étude. Section I: Cadre théorique de l'étude Le cadre théorique de l'étude présente son contexte, la justification du thème de recherche, les objectifs et les hypothèses de l'étude. §1: Contexte et justificationL'observation du peuplement aussi bien des pays développés que des pays en développement, fait remarquer une concentration très poussée des populations dans les centres urbains. L'intensité de cette concentration varie d'une région à une autre. Ainsi, en Afrique, le taux de croissance de la population urbaine est de 3,97% contre 0,34% pour l'Europe2(*). Selon Moriconi-Ebrard, (1993) cité par Bocquier (2003)3(*) le nombre de citadins des pays en voie de développement a dépassé celui des pays développés aux environs de 1973, et l'écart ne cesse de se creuser. Ces constats sont renforcés par Lester (2003) qui affirme :"Nous vivons dans un monde qui s'urbanise. C'est la tendance démographique dominante de notre époque. Et si l'évolution actuelle se poursuit, plus de la moitié d'entre nous vivront en ville en 2007. Pour la première fois dans l'histoire, nous serons une espèce humaine"4(*). A ce faible accroissement de l'urbanisation des pays développés, s'oppose une croissance très élevée de ce phénomène dans le monde en développement. Selon Geslin (2003)5(*), la population urbaine des pays les moins développés passera de 1,9 milliards en 2000 à 3,9 milliards en 2030. Les villes (notamment les capitales économiques et/ou politiques) des pays du tiers monde connaissent actuellement un accroissement moyen annuel de plus de 4% de leur population. Cette dynamique de peuplement des villes s'expliquerait par le double effet d'une croissance démographique (accroissement naturel) et d'un exode rural (migration) observés au sein de celle-ci. Des études ont pu montrer qu'en Afrique en général environ 60% de la croissance des villes s'explique par l'exode rural et seulement 40% par l'accroissement naturel de la population (Antoine et Savané, 1990)6(*). Mais quelques années plus tard, Antoine (1997)7(*) trouve que la croissance démographique naturelle (naissance et décès) contribue plus que les migrations. Si les premières migrations ont été en grande partie provoquées par l'attrait des centres urbains, elles le sont désormais par l'absence de perspectives dans les campagnes. Dans la plupart des pays en développement, cet exode rural excède de beaucoup la capacité des métropoles à fournir des emplois, des logements, de l'électricité, de l'eau, des réseaux d'égouts et des services sociaux, le tout aboutissant à des communautés de squatters où des multitudes de personnes vivent en marginaux, souvent dans des conditions inhumaines. Selon les estimations des Nations Unies, il y aurait près de 1 milliard de pauvres dans le monde, dont plus de 750 millions en zone urbaine, sans logements ni services de base adéquats. En Afrique subsaharienne, 60% des unités de logement urbain sont des structures temporaires et la moitié environ n'est pas conforme aux codes de construction8(*). C'était déjà pour pallier ce phénomène notamment dans le tiers monde qu'à la Conférence des Nations Unies sur les établissements humains, qui s'est tenue à Vancouver en juin 1976, il a été décidé d'accorder plus d'attention à la question de l'habitat. Stratégiquement, la Conférence suggérait aux gouvernants de mettre l'accent sur l'amélioration des bidonvilles, plutôt que leur démolition, sur l'aménagement de lotissements à vendre et à louer, ainsi que sur la construction de logements publics pour les économiquement faibles (Kobiané, 1998)9(*). Une évaluation du suivi des recommandations d'Habitat faite auprès de 17 pays en développement dans les années quatre-vingt, révèle que les logements publics ont été soit construits en nombre limité, parce qu'ils étaient fortement subventionnés, soit, dans le cas contraire peu accessibles aux plus démunis parce qu'ils étaient trop chers. Face à ce problème plus décisif en milieu urbain du fait de la forte pression démographique, mais également des difficultés économiques, les autorités publiques et surtout celles chargées de la gestion urbaine, ont du mal à répondre à la demande d'espaces lotis, de logements, d'accès aux réseaux. Pour les ménages, il est encore plus difficile de se procurer un logement dans un espace viabilisé, compte tenu de la flambée des prix du terrain et des matériaux de construction alors que dans le même temps leur pouvoir d'achat s'amenuise de plus en plus. En Afrique plus de la moitié des pauvres n'ont pas les moyens de se procurer une habitation, même à vil prix (Kobiané, 1998)10(*). Des estimations provenant de divers pays indiquent que les ménages aux revenus faibles devraient économiser entre 30 et 50% de leur revenu pendant 15 à 30 ans pour pouvoir se payer légalement une maison répondant aux normes minimales11(*). La ville de Cotonou, à l'instar des autres villes des pays en développement, a connu en peu de temps une croissance démographique très élevée. On peut observer que de 203.842 habitants en 1979, la population de Cotonou est passée à 536.827 habitants en 1992 puis à 665.100 habitants en 2002, soit un accroissement moyen annuel de 3,9% (1979-1992) et de 2,2% (1992-2002) (INSAE, 2003)12(*). Une telle croissance de la ville engendre une pression démographique qui accroît les problèmes de la ville à savoir la saturation des systèmes d'éducation, de santé, d'assainissement, de logement, des transports et des communications. Elle met en danger les systèmes politiques de gestion urbaine et occasionne divers problèmes sociaux et environnementaux. En effet de part son importance économique, justifiée par la présence du Port et de l'implantation d'un très grand nombre d'entreprises commerciales, et du fait qu'elle constitue le lieu d'implantation de la plupart des services administratifs, Cotonou attire beaucoup de jeunes en quête de travail, et d'expatriés qui viennent dans l'intention d'y mener des activités génératrices de revenu. Au nombre de ces individus, s'ajoutent les fonctionnaires, les étudiants et autres personnes travaillant pour les entreprises. Avec les politiques développées tant par le privé que le public, la demande en logements reste toujours énorme et disparate. La question de logement au Bénin et plus particulièrement à Cotonou demeure un problème dont les paramètres sont plus difficiles à cerner alors que l'accès au logement est un besoin fondamental. Le logement n'est pas seulement un élément de satisfaction des ménages ; c'est également, du fait de sa forte valeur ajoutée, un formidable moteur de la croissance économique. Pour Kobiané (1998)13(*), la propriété d'un logement en ville, permet de survivre car c'est souvent une source importante de revenu grâce à la location d'une partie du logement ; c'est aussi un frein aux migrations de retour. Malheureusement, les divers problèmes auxquels reste confrontée la population sont loin d'être résolus. Ces problèmes ont pour nom: ü difficulté d'obtenir une sécurité d'occupation c'est à dire le droit d'accès légal et d'usage du terrain et des bâtiments qu'ils occupent (surtout pour les pauvres car les coûts d'entrée sont exorbitants). En effet, les méthodes d'enregistrement des propriétés sont inefficaces, compliquées et onéreuses; ü le logement légal est trop cher pour la majorité des habitants des villes ou les unités d'habitation sont rares. La réglementation administrative régissant l'acquisition des terres et la construction de logements est dépassée voire inopérante. Cette situation, associée à une croissance démographique non négligeable et l'acquisition des terres par des opérateurs économiques, ont entraîné une augmentation des prix de logement; ü les habitations illégales sont construites sur des terrains qui ne conviennent pas au logement; Au total, le manque de politique de logement et l'inadéquation entre le taux de croissance des unités d'habitations et celui de la population a engendré des situations qui ne font qu'aggraver les conditions de vie des populations urbaines. Dans cette situation quels sont les éléments qui peuvent permettre d'orienter les besoins en logements de la population : où trouve-t-on le groupe de chef de ménage concerné ? Quelles sont les caractéristiques de ces chefs de ménage ? Quels peuvent être alors les facteurs explicatifs de la demande de logements des ménages ? * 2 Geslin J. D., 2003, `'Peur sur la ville'', Jeune Afrique l'intelligent N°2238 du 30/11/ au 06/12/03, p.92. * 3 Bocquier, P., 2003,"L'urbanisation a-t-elle atteint son niveau de saturation en Afrique de l'Ouest?" in Eggerickx T. et al, Populations et défis urbains, Academia-Bruylant/L'harmattan, p.136. * 4 Lester, R. Brown, 2003, `'Une autre croissance est possible, écologique et durable'', Le seuil, Paris. Cité dans Geslin J. D. op.cit. p.96. * 5 Geslin J. D. op.cit. p.94. * 6 INSAE, 1994, `'RGPH-2'' in Répartition spatiale migration et structure par sexe et par âge, Volume II, Tome 1, p.75. * 7 Antoine, P., 1997, "L'urbanisation en Afrique et ses perspectives", DT/12-97F. * 8 Population Reports, 2002, `' Répondre au défi urbain'', série M, n°16, p..8. * 9 Kobiané, J.F., 1998, "Essai de construction d'un profil de pauvreté des ménages à Ouagadougou à partir des caractéristiques de l'habitat" in Gendreau F., Crises, pauvreté et changements démographiques dans les pays du sud, AUPELEF-UREF, ed. ESTEM, Paris, p.118. * 10 Kobiané, J.F., op. cit. p.118. * 11 Population Reports op.cit. p.9. * 12 INSAE, 2003, "Recensement Général de la Population et de l'Habitat-3" in Synthèse des résultats, p.11. * 13 Kobiané, J. F., op. cit. |
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