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Le contrat cadre en droit internationalpar Mohammed Lamhamedi Cherradi Université de Bourgogne - Master Recherche Droit des marchés, des affaires et de l'économie 2006 |
§2: Les mécanismes de substitutionComme on vient de l'expliquer, le contrat cadre tel qu'il existe en France où en Allemagne n'est pas adapté à la conception anglaise du contrat, pourtant, les impératifs économiques et commerciaux sont semblables de part et d'autre de la Manche. La différence principale tient au fait que ni la distinction entre le contrat cadre et les contrats d'application, ni leur hiérarchie ne sont reconnus. Souvent il sera question soit d'un contrat unique de longue durée et à exécution échelonnée, soit d'une série de contrats séparés. Pour mieux comprendre ce système, nous allons donner deux exemples de contrats : les contrat de fourniture en Angleterre (A) et le contrat de longue durée aux Etats-Unis (LONG TERM CONTRACT) (B) A) Les contrats de fourniture en Angleterre Les contrats de fourniture sont les contrats par lesquels une personne s'engage à fournir à un autre le produit dont elle peut avoir besoin, ou à acheter tout ce qui est produit par son cocontractant. Ainsi c'est un contrat qui s'inscrit dans le temps. La solution de principe découlant de la jurisprudence62(*) consiste à considérer que l'accord initial ne peut constituer un contrat valable, à défaut de considération, toutefois il vaut une offre permanente : à chaque commande se forme un contrat de vente. La même analyse est reprise dans des décisions postérieures. Ainsi la décision du Queen's Bench Division : Miller v. FAA Sadd & Son Ltd 63(*) refuse aussi de voir dans un accord portant sur la fourniture de fruits à la demande un contrat valable, y décelant seulement une offre permanente.64(*) II résulte de cette qualification d'offre que celle-ci est révocable à tout moment dès lors que, selon le droit anglais, une offre, même assortie d'un délai, ne peut avoir force obligatoire puisqu'elle est normalement dépourvue de considération. Mais même si le respect de l'accord initial n'est pas assuré par la règle juridique et que l'engagement se forme seulement à chaque contrat ultérieur, cela ne prête pas tellement à conséquences. Les quelques recherches qui ont été réalisées sur la formation des contrats d'affaires65(*) semblent suggérer que les hommes d'affaires se préoccupent peu de savoir si telle convention a ou non des effets juridiques parce que, en dehors de toute autre considération, ils pensent d'abord en termes de sanctions « extra juridiques ». L'absence de force juridique du contrat initial n'aurait donc guère de conséquences pratiques.66(*) B) Le contrat de longue durée aux Etats-Unis La solution de principe adoptée par le droit américain consiste à considérer que les contrats répondant en France à la qualification de contrats cadres ne constituent que de simples contrats de longue durée. Dans la pratique contractuelle, il est courant de rencontrer des accords qui ressemblent aux contrats cadre tels l'accord, avec exclusivité ou non, entre le fabricant (ou fournisseur) et le distributeur (ou détaillant) ; l'accord de franchise entre le franchiseur (éventuellement fabricant) et le franchisé ; ou encore l'accord qualifié de contrat de fourniture selon la production ou selon les besoins. Chacun de ces contrats semble offrir les traits distinctifs du contrat cadre. Le but des parties est d'établir un cadre dans lequel s'inscrivent des relations économiques de longue durée ; il y a une hiérarchie entre l'accord d'origine et les actes d'exécution, et le contrat lui-même incorpore en général une multiplicité d'obligations qui dépassent la seule fourniture d'un produit. Néanmoins, pour des raisons conceptuelles, le juriste américain ne considère pas, normalement, que l'accord d'origine impose une obligation de passer des contrats futurs. Il y verra plutôt un seul contrat, à exécution prolongée. Et même si l'exécution suppose des commandes, des livraisons, des services, des prêts, tout ceci est considéré comme de simples actes d'exécution qui ne sont pas discrétionnaires et qui n'ont pas besoin d'être renégociés.67(*) * 62 Gréât Northern Railway Co v. Witham, LR 9 CP 16 * 63 1918, 3 AII ER 265 * 64 Etude du CREDA, le contrat cadre, Tome 1 op.cit., p : 234. * 65 Voir : J. N. Adams, « consideration in requirements contracts », 1978, LQR, p. 73. * 66 Etude du CREDA, le contrat cadre, T1, op.cit., p 235. * 67 Ibid, p. 236. |
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