CHAPITRE V LEÇONS TIREES D'EXPERIENCES
SIMILAIRES
Jusqu'en 2002 plus d'une trentaine de PMA s'etait
déjà engagé dans le processus de formulation des documents
de stratégies pour la réduction de la pauvreté. Ils sont
à des stades d'avancement différents. Certains élaborent
ou mettent en oeuvre actuellement des versions intérimaires ou
définitifs. Rappelons que ce document appartient au pays qui
l'élabore. En plus de présenter les modalités de
participation à son élaboration, il doit comprendre un diagnostic
de la pauvreté, des objectifs, des indicateurs et des systèmes de
suivi ; les mesures prioritaires que les pouvoirs publics comptent prendre sur
une période minimum de trois ans. On y adjoint, un exposé un
exposé du cadre macroéconomique du pays, un
résumé du programme global de dépenses publiques et de
leur répartition sectorielle, un calendrier des principales mesures et
réformes institutionnelles à mener. A la fin ce document
sera soumis au FMI/BM pour être validé.
1 VERS DE VERITABLES POLITIQUES DE DEVELOPPEMENT ?
Le document ainsi réalisé doit devenir le
texte de référence unique pour l'assistance
extérieure. L'ensemble des agences d'aide sont alors censées
situer leur action dans le cadre de la stratégie ainsi définie,
et canaliser leur aide par le budget national plutôt que par
le financement de projets spécifiques. A partir de
l'expérience d'autres pays se trouvant déjà à un
stade avancé, particulièrement
de celle de la République du Mali103 pays
à régime démocratique depuis 1991 et fortement
dépendant
de l'aide externe, on essayera de tirer quelques enseignements
de la mise en oeuvre de cette nouvelle stratégie, et ceci non pas dans
une tentative de généraliser l'expérience des autres mais
plutôt dans un souci de susciter certaines précautions.
Dans son article Marc Raffinot souligne le premier dilemme des
gouvernements désireux de bénéficier
de ces fonds. Ils doivent choisir entre ``la rédaction
rapide d'un document susceptible de plaire aux créanciers
multilatéraux'' et ``l'élaboration avec les acteurs d'une
véritable stratégie de lutte contre la pauvreté en prenant
le temps nécessaire''. On a noté :
- L'incapacité du gouvernement à exercer
l'autonomie que lui confère la démarche. Déjà
son autonomie est réduite vu que seuls le Fonds et la Banque jugeront
de la recevabilité du document.
- Le tuteurage des IBW dans l'élaboration du document : en
effet ils ont intervenu à tous les stades
du document pour donner des avis, des conseils, etc ;
103 Voir Marc RAFFINOT, « Vite fait ou bien fait
? L'économie politique de la lutte contre la pauvreté au Mali
» L'économie politique, no 16,
4ème trimestre 2002, pp 55-67.
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Crises, réformes économiques et pauvreté
en Haïti
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- Manque de capacités techniques : pénurie de
ressources humaines qualifiées, difficulté d'assurer la
coordination interministérielle et d'obtenir leur collaboration ;
- Instrumentalisation de la participation de la
société civile, et légitimité des organisation
admises :
en raison de son foisonnement, mais surtout de leur
dépendance à l'aide extérieure, chaque partenaire
souligne l'auteur dispose de « sa » société civile.
- Mise à l'écart des élus. Le Parlement, de
même que les élus locaux, n'ont pas été saisi du
CSLP, alors que les politiques retenues concernent l'avenir et le
développement de ce pays.
- Le rejet par le gouvernement malien, sous la pression des IBW,
de certaines demandes issues lors
des consultations locales
L'un des avantages de ce CSLP est que, le Mali « pour la
première fois depuis longtemps, on dispose ainsi d'une synthèse
des politiques sectorielles effectuées sous l'angle de la lutte contre
la pauvreté. de plus, ce plan de développement précise
le cadrage macroéconomiques et budgétaire - cadrage dont
l'absence était une faiblesse majeure de l'ancienne planification
». Ce document favorise un lien essentiel entre politiques, objectifs
et budget.
Marc Raffinot conclut sur ses notes
L'élaboration du CSLP a impulsé des
changement dans la manière de concevoir et de faire la politique de
développement au Mali [et dans les autres pays pauvres]. Rien
d'étonnants à ce que ces changements se heurtent à de
multiples résistances, internes à chacun des acteurs -
gouvernement, société civile et partenaires
multilatéraux et bilatéraux. Le gouvernement malien dispose
maintenant d'une occasion sans précédent pour mener la
politique de développement et de lutte contre la pauvreté qu'il
souhaite.[ ...] Grâce au CSLP, la discussion
au Mali porte désormais sur la recherche de
véritables politiques de développement.
L'expérience malienne interpelle, parmi tant d'autres,
sur la question de la capacité nationale à définir des
stratégies surtout dans un contexte participatif. Elle pose le
problème de la capacité de l'administration à
réagir, de la capacité organisationnelle à définir
des politiques de développement, de
la capacité technique à élaborer des
politiques de développement, de la capacité de la
société civile à participer au processus.
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