Conclusion
L'arbitrage joue un rôle important dans le
règlement hors judiciaire des différends, en particulier dans le
commerce international. En répondant à l'absence d'une
juridiction internationale pour les litiges résultant du commerce
international, l'arbitrage devient une juridiction de droit commun en la
matière. L'arbitrage international s'intéresse, par sa
définition même, aux questions mettant en cause des
intérêts du commerce international. Quant au contrat de
consommation, il se marque essentiellement par un grand écart de la
position entre les parties en litige. Il est important que
l'égalité des parties soit respectée dans
l'opération. Le droit de consommation est donc destiné à
assurer une protection effective du consommateur.
Notre travail peu ou moins approfondi montre que le
régime de l'arbitrage en droit de consommation est à deux
vitesses différentes. Si le régime de l'arbitrage en
matière interne de consommation est plus restrictif, il n'en va pas de
même pour celui de l'arbitrage international.
L'arbitrage n'est pas totalement interdit en matière
interne de consommation. Le compromis d'arbitrage est évidemment
valable. Ce qui est interdit, c'est la clause compromissoire. Celle-ci
amène à une renonciation préalable par le consommateur
à son juge naturel dans le règlement des litiges, et ce, en
l'absence de toute connaissance sur l'étendu du litige à
naître.
La sanction de la clause compromissoire est de nature
différente selon le texte légal applicable. L'état du
droit se marque par une divergence des sanctions entre l'article L. 132-1 du
Code de la consommation et l'article 2061 du Code civil. Il est évident
que l'application des deux articles conduirait à un même
résultat (l'anéantissement de la clause compromissoire), les
mécanismes ne sont toutefois pas les mêmes. Pour le premier, la
clause compromissoire n'est réprimée que si elle est abusive, la
preuve sur le caractère abusif étant à la charge du
consommateur. Pour le deuxième, c'est une nullité automatique.
L'étude sur ce point conduirait à conclure que, dans le but de la
protection du consommateur, c'est la nature de la sanction
énoncée par l'article 2061 du Code civil qui prime. La clause
compromissoire en matière interne de consommation sera frappée
d'une nullité. De plus, cette nullité devrait être une
nullité relative, ce qui permet donc au consommateur d'avoir une option,
laquelle consiste soit à invoquer la nullité de la clause soit
à y renoncer.
En ce qui concerne le principe de
compétence-compétence, la question est de savoir si une
nullité de la clause compromissoire en matière interne est une
nullité manifeste permettant de déroger au principe de
compétence-compétence. Si la nature du caractère abusif
d'une clause compromissoire n'est pas un cas de la nullité manifeste de
la clause compromissoire, la Cour de cassation n'est pas encore intervenue pour
prononcer si la nullité de la clause compromissoire au sens de l'article
2061 du Code civil est une nullité manifeste ou pas. A notre sens, il
est souhaitable de soutenir que la nullité de la clause compromissoire
en la matière relève d'une nullité manifeste. Le
consommateur aurait donc une arme suffisante pour échapper à la
compétence de l'arbitrage.
Pour l'arbitrage international, le recours à
l'arbitrage est très favorisé. Il n'y a pas
d'intérêt à effectuer la distinction entre la clause
compromissoire et le compromis. Ainsi la Cour de cassation a
expressément reconnu la validité de la clause compromissoire en
matière de consommation par deux arrêts principaux :
l'arrêt Jaguar et celui Rado. Il est important que les
contraintes soient réduites en matière du commerce international.
Le recours à l'arbitrage permettrait d'enlever une contrainte
juridictionnelle. Cela est une réponse au besoin du développement
des affaires internationales. De même, la Cour de cassation a
déjà renforcé la validité de la clause
compromissoire même en l'absence d'une condition de commercialité.
L'autonomie de l'arbitrage permet à cette institution d'échapper,
en principe, aux lois étatiques. Ainsi, l'article 2061 du Code civil ne
peut-elle pas s'appliquer en matière internationale. La reconnaissance
de la validité de la clause compromissoire est renforcée par le
principe de compétence-compétence. L'arbitre peut donc statuer
sur des contestations conduisant à mettre en cause sa compétence.
Si au fond, l'arbitrage peut procurer des garanties de justice
comme le juge étatique, l'accès à l'instance arbitrale
sera restrictif pour le consommateur compte tenu du poids financier de la
procédure. Il en va de même pour le cas où le consommateur
doit se déplacer vers l'étranger très loin de sa
résidence. De plus, le consommateur sera traité comme un
professionnel dans le cas de la clause compromissoire par
référence et de la transmission de la clause compromissoire. Le
consommateur découragé ne prendrait pas l'initiative de l'action
contre le professionnel.
Dans l'état actuel de droit, la protection du
consommateur dans l'arbitrage international n'est pas effectivement suffisante.
Il semble que par l'arrêt Rado, la Cour de cassation
ait mis fin à l'éventuelle applicabilité de l'article
2061 du code civil. Il est important que les règles d'ordre public
international soient bien respectées par l'arbitre. Ce dernier doit
également respecter des règles régissant la clause abusive
dans le cas où la loi applicable au fond est celle d'un Etat membre de
l'Union européenne. Il en va de même dans le cas où il
entend que sa sentence puisse faire l'objet d'un exequatur dans l'un
des pays membres de l'Union européenne. En effet, il serait souhaitable
que la clause compromissoire soit inopposable au consommateur, cette solution
étant retenue pour le salarié dans les relations internationales
du travail.
Enfin, on constate un rapprochement progressif entre le
régime de l'arbitrage interne et celui international. Toutefois, le
régime de l'arbitrage en droit de consommation ne s'inscrit pas dans
cette optique. Le problème se pose actuellement à propos de la
pertinence de la distinction en droit français de l'arbitrage interne et
celui international. La question n'est pas définitivement
réglée. Dans le cas où l'on opterait pour le régime
moniste de l'arbitrage, on s'interrogerait sur l'avenir du régime de
l'arbitrage en matière de consommation.
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