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La protection des logiciels en droit ivoirien


par Ariel Maixent KOUADIANE
Université des Lagunes - Master 2 2024
  

Disponible en mode multipage

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REMERCIEMENTS

Ce mémoire incarne l'aboutissement de ce que l'on pourrait appeler un voyage initiatique. La réalisation de ce voyage a été rendue possible grâce au soutien d'un grand nombre de personnes, et à celles-ci, je veux témoigner ma gratitude.

Dès l'entame, je voudrais remercier sincèrement mon directeur de mémoire, Maître COULIBALY Ibrahim, pour ses conseils éclairés et son expertise inestimable. Ses précieuses remarques et sa disponibilité ont grandement contribué à l'aboutissement de ce travail.

Ensuite, mes remerciements vont également à mes camarades de promotion, et plus singulièrement à Marie-Colombe, pour leur soutien moral et leurs encouragements tout au long de cette aventure académique.

Enfin, je suis infiniment reconnaissant envers ma Mère pour son soutien indéfectible tout au long de mes études. À n'en point douter, elle a été ma source de motivation.

SOMMAIRE

INTRODUCTION 3

Partie 1 : UNE PROTECTION EXPRESSE DES LOGICIELS 14

Chapitre 1 : L'accès du logiciel à la protection par le droit d'auteur 14

Section 1 : La détermination de l'objet de protection du droit d'auteur 14

Section 2 : Le respect par le logiciel de la condition d'originalité 21

Chapitre 2 : Les prérogatives accordées à l'auteur du logiciel 27

Section 1 : L'attribution d'un monopole à l'auteur du logiciel 28

Section 2 : La défense des auteurs de logiciels par l'action en contrefaçon 35

PARTIE 2 : UNE PROTECTION PERFECTIBLE DES LOGICIELS 44

Chapitre 1 : Les insuffisances de la protection du logiciel par le droit d'auteur 44

Section 1 : Les limites internes du droit d'auteur et la protection des logiciels 44

Section 2 : La mise à mal des développeurs de logiciels par le droit d'auteur 52

Chapitre 2 : Les moyens de consolidation des droits des auteurs de logiciels 60

Section 1 : Les moyens complémentaires de consolidation du droit d'auteur 61

Section 2 : Les moyens supplémentaires de protection des auteurs de logiciels 69

SIGLES ET ABREVIATIONS

ABR : Accord de Bangui instituant une organisation africaine de la propriété intellectuelle, acte du 14 décembre 2015

ADPIC : Accord portant sur les aspects des droits de la propriété intellectuelle qui touchent au commerce

BURIDA : Bureau ivoirien du droit d'auteur

CJUE : Cour de justice de l'Union européenne

GOTIC CI : Groupement des Opérateurs du Secteur des Technologies de l'information et de la Communication de Côte d'ivoire

OAPI : Organisation africaine de la propriété intellectuelle

UEMOA : Union économique et monétaire ouest-africaine

OMPI : Organisation mondiale de la propriété intellectuelle

OCDE : Organisation pour la Coopération et le Développement Economique

Loi ivoirienne sur le droit d'auteur : Loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publiée au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016

AVERTISSEMENT

L'Université des Lagunes n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire. Celles-ci doivent être considérées comme personnelles à leur auteur.

· INTRODUCTION

Il ne fait plus aucun doute qu'en plus du monde physique et sensible, il existe également un monde immatériel, informatique. L'accès à cet univers requiert, outre les composants matériels, un outil intangible : le logiciel. Quiconque souhaite accéder à ce monde numérique ne saurait éluder le recours au logiciel.

Pris comme le chemin menant à un territoire toujours plus prisé, sa prégnance sur la société ne saurait être remise en cause. À ce sujet, L'OCDE considère que le logiciel est déjà le « secteur le plus important économiquement, et qu'il est à l'économie fondée sur le savoir ce que les secteurs de l'acier et de l'automobile étaient à l'économie industrielle. »1(*)

« L'importance prise par les logiciels est le reflet de la logicialisation de l'activité économique et sociale »2(*). Par là, François HORN décrit la combinaison de deux phénomènes : le rôle croissant des technologies de l'information et de la communication d'une part ; et le développement du secteur informatique de l'autre.

À l'origine, les ordinateurs étaient vendus, de manière indissociable, avec les logiciels, ce qui limitait fortement le piratage. Mais à partir de 1968, IBM commençait la vente autonome de logiciels, qui devint alors un standard3(*). Cela a rendu nécessaire, puisque le logiciel devenait un produit en lui-même, la recherche d'un moyen de sécurisation.

L'étude que nous envisageons mener aborde l'un des nombreux enjeux, défis que soulève l'essor des logiciels : celui de leur protection juridique. En effet, cette question invite le regard du juriste au vu de la part de marché que représente le marché du logiciel, mais aussi celui de sa contrefaçon.

Selon le GOTIC CI, le chiffre d'affaires de l'industrie ivoirienne des logiciels et des services IT estimé à environ 300 millions d'euros4(*), soit 197?008?788?810 de francs CFA. Et l'on évaluait le taux de piratage de programmes d'ordinateur à 79%5(*). Et il est donné de constater que le taux d'utilisation de logiciels contrefaits n'est pas en baisse.

Pour notre part, nous espérons contribuer à la réflexion sur cette question en nous bornant toutefois au droit privé en général. De son intitulé « La protection des logiciels en droit ivoirien », certains vocables de notre sujet méritent d'être précisés.

Historiquement, le mot logiciel émergeait en 1969 en tant que traduction de l'anglais software6(*). La traduction française provient étymologiquement du nom commun logique. « Cette idée de logique pure se manifeste dans la forme initiale du logiciel alors défini comme n'étant que des  séries d'instructions pour faire fonctionner une machine calculatrice »7(*).

En langage informatique, le logiciel peut se saisir comme un ensemble de programmes, d'instructions et de données conçus pour effectuer des tâches spécifiques sur un ordinateur ou un système informatique. Il forme l'âme de l'ordinateur, sans lui, celui-ci ne serait qu'une masse de ferrailles.

Il est formé partir de programmes fonctionnant sur la base de consignes données et se distingue donc du programme d'ordinateur. En fait, contrairement au logiciel qui s'identifie par son aspect fonctionnel, le programme d'ordinateur n'est qu'une suite ordonnée d'instructions écrites dans un langage de programmation spécifique8(*). De ce fait, le logiciel est une notion plus large et inclusive que le programme d'ordinateur.

Cela dit, le droit ne s'est guère embarrassé de cette subtilité technique. C'est ainsi que les textes font généralement référence au programme d'ordinateur, pour parler du logiciel.

À cet égard, il y a lieu de souligner que le droit ivoirien emploie indifféremment les termes logiciel et programme d'ordinateur9(*), qu'il définit comme l'ensemble d'instructions exprimées par des mots, des codes, des schémas ou par toute autre forme pouvant, une fois incorporés dans un support déchiffrable par une machine, faire accomplir ou faire obtenir une tache ou un résultat particulier par un ordinateur ou par un procédé électronique capable de faire du traitement de l'information.

En ce qui nous concerne, attendu que ubi lex non distinguit nec nos distinguere debemus, nous emploierons indifféremment, pour la suite de notre étude, les vocables logiciel et programme d'ordinateur.

Concernant la protection, du latin protectio, elle désigne toute forme de précaution qui consiste à prémunir une personne ou un bien contre un risque, à garantir sa sécurité, son intégrité par des moyens tant juridiques que matériels10(*).

Sur le plan juridique, la protection est soit privative, soit non privative11(*). Est privative la protection reposant sur la propriété de la chose concernée. En fait, les avantages de la chose sont réservés à une seule personne qui jouit d'un monopole sur celle-ci; elle exerce un véritable droit privatif sur la chose et est défendue contre les entreprises de quiconque12(*). Quant à la protection non privative, c'est celle qui fait intervenir le jeu de la responsabilité soit pénale soit civile13(*).

La question du choix du mode de protection du logiciel a toujours fait osciller cet objet singulier entre propriété industrielle et propriété littéraire et artistique. Certains ont même pu considérer cette ambivalence comme une anomalie, allant jusqu'à qualifier le logiciel de cumulard de la propriété intellectuelle14(*).

À la vérité, cette controverse peut s'expliquer par la nature duale du logiciel. En effet, le logiciel est un outil pouvant se caractériser aussi bien par sa forme que par sa fonction. L'aspect fonctionnel du logiciel, relevant d'une logique industrielle15(*), l'entraîne entre les griffes du brevet16(*). Par contre, sa forme, son écriture, en tant que mode d'expression d'une personne, le programmeur informatique, le fait également basculer dans la catégorie des oeuvres de l'esprit, ce qui devrait entraîner sa sujétion au droit d'auteur.

La difficulté à rattacher définitivement le programme d'ordinateur au régime soit du droit d'auteur, soit du brevet, dénotant son particularisme, incita d'autres à suggérer l'application d'un droit sui generis au logiciel17(*) en s'inspirant du droit d'auteur.

Un droit sui generis apparaît dans une situation où une institution juridique, en raison de sa nature unique, ne peut être classée dans aucune catégorie existante et constitue ainsi un genre à part entière. Ainsi, une institution, un contrat ou une situation juridique est qualifié de sui generis lorsqu'il convient de reconnaître son unité, justifiée par sa nature originale, et d'adopter un régime juridique approprié et autonome.

Cependant, « le «forcing» américain, qui fit abandonner au Japon et au Brésil leurs propres projets de loi spécifiques, conduisit la France, puis l'Europe, à adopter la protection par le droit d'auteur.18(*) » De plus, la mise en place d'un tel régime se serait révélée chronophage et ardue, tout en laissant sans protection les auteurs de programmes durant l'édiction de ladite norme19(*). La rapide évolution du monde numérique, rendant difficile l'attente d'un régime sui generis, cette option fut écartée.

En outre, les pays de l'UE et les pays de l'OAPI ont choisi d'exclure le logiciel de la liste des créations pouvant donner naissance à un brevet. Pour preuve, l'article 6 de l'annexe 1 de l'ABR20(*) exclut expressément les programmes informatiques de la liste des objets brevetables21(*).

« Cette exclusion a conduit la jurisprudence et le législateur à s'orienter vers une protection au titre du droit d'auteur.22(*) » Le droit d'auteur constituait alors davantage une protection d'opportunité qu'un choix réellement délibéré23(*).

Mais ce choix ne s'est point opéré sans certaines difficultés. Il a été principalement objecté que le logiciel n'était pas une oeuvre de l'esprit, mais plutôt une simple méthode que la loi ne protège pas, et qu'au surplus, la condition d'originalité ne lui était pas applicable. L'arrêt Pachot viendra entériner le rattachement du logiciel à la propriété littéraire et artistique.

De telle sorte que l'état actuel du droit ne laisse plus planer d'incertitudes quant au mode de protection du programme d'ordinateur : tous les logiciels, quelles que soient leur nature et leurs fonctionnalités, sont protégés par le droit d'auteur.

Par ailleurs, à côté de la protection juridique accordée au logiciel, il est reconnu aux auteurs le droit de recourir à des mesures techniques de protection24(*). La mesure technique de protection se définit comme « toute technologie, dispositif ou composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, est destiné à empêcher ou à limiter, en ce qui concerne les oeuvres ou autres objets protégés, les actes non autorisés par le titulaire d'un droit d'auteur ou d'un droit voisin du droit d'auteur prévu par la loi25(*) ». Ces procédés visent à restreindre l'accomplissement, à l'égard du logiciel, d'actes qui ne sont pas autorisés par l'auteur.

Cela étant, il n'en demeure pas moins que le logiciel reste, sur le plan juridique, à titre principal, sous le joug du droit d'auteur. Le droit d'auteur est l'ensemble des droits patrimoniaux et extrapatrimoniaux auxquels donnent prise les oeuvres littéraires et artistiques. Il s'agit du droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous que l'auteur d'une oeuvre de l'esprit détient sur celle-ci.

La reconnaissance aux auteurs de prérogatives sur leurs créations vise à stimuler le développement de l'esprit inventif, tout en leur accordant une récompense. Paul Roubier écrit en ce sens qu'« il est évident que le progrès est surexcité au plus haut point par les inventions ou les créations, et, si l'on veut que celles-ci se multiplient, il faut naturellement récompenser leurs auteurs, la récompense la plus naturelle et la plus heureuse [étant un] monopole temporaire d'exploitation26(*). »

Le droit d'auteur entend donc, à travers la protection de l'intérêt individuel, assurer par ricochet le développement social. La sécurisation juridique des logiciels revêt une importance difficilement contestable.

Ces derniers constituent un levier de développement non négligeable à l'ère du numérique. En fait, « le logiciel est à l'informatique ce que l'oeuvre audiovisuelle est au projecteur et au magnétoscope27(*) ». Non seulement sont-ils devenus incontournables dans presque tous les secteurs : de la finance à la santé, de la fabrication à l'éducation ; mais en plus, ils concourent également à la création d'emplois dans le secteur informatique.

D'ailleurs, leur valeur commerciale ne cesse de croître. C'est pourquoi de nombreuses entreprises telles que MICROSOFT, WAGSYSTEMS ou WHYSOFT AFRIQUE investissent dans l'édition ou la distribution du logiciel.

La protection des programmes d'ordinateur encourage la création de solutions logicielles adaptées aux besoins locaux, qu'il s'agisse de solutions pour l'agriculture, la santé, la gestion, l'éducation ou d'autres secteurs spécifiques, améliorant ainsi les services offerts à la population et la rentabilité des entreprises.  « La contrefaçon de logiciels et de marque est un phénomène planétaire qui impacte aussi bien les éditeurs de logiciels, les entreprises et les économies nationales. La concurrence déloyale que leur imposent les contrefacteurs, entraîne des pertes considérables dont la destruction d'emplois, des pertes de recettes fiscales, un frein à l'innovation informatique.28(*) »  

Dans un pays comme la Côte d'Ivoire où l'industrie logicielle est encore émergeante, la protection des logiciels contre le piratage, si elle est combinée à un plan d'action aux niveaux des universités, pourra stimuler le développement de ce secteur29(*).

Mais, outre ces enjeux économiques et sociaux, l'intérêt de notre sujet peut se trouver dans la nécessité d'approfondir l'étude de ce thème. La jurisprudence ainsi que la doctrine, en l'état actuel, apportent peu ou pas de précisions quant au régime de protection du logiciel. Il est d'ailleurs donné de constater qu'il n'existe aucun mémoire dédié à cette question. Ainsi, du point de vue théorique, notre étude essaie de se positionner à l'avant-garde d'un domaine encore peu exploré en droit ivoirien.

La problématique de notre sujet tient à l'efficacité du régime de protection des programmes d'ordinateur en droit ivoirien et se résume dans les questions suivantes : Le régime de protection des logiciels en droit ivoirien est-il pertinent ? Autrement dit, le droit ivoirien accorde-t-il une protection satisfaisante aux logiciels ?

Pour élucider ces différentes questions, nous fonderons notre analyse sur le droit positif ivoirien sans pour autant exclure, lorsque notre sujet s'y prêtera et l'exigera, les références de droit étranger.

En Côte d'Ivoire, la première loi relative au droit d'auteur ne prévoyait aucune disposition spécifique concernant le logiciel. À cette époque, la protection des logiciels relevait principalement des dispositions de l'Annexe 7 de l'ABR30(*).

Cette situation a évolué avec la loi de 2016 relative au droit d'auteur et aux droits voisins31(*). Cette loi permet à la Côte d'Ivoire de se conformer aux standards internationaux. Le législateur tente par là-même de créer les conditions propices à l'éclosion d'un secteur du logiciel.

À l'examen, l'on peut s'apercevoir cependant que si le programme d'ordinateur bénéficie d'une protection expresse par le droit d'auteur, il n'en reste pas moins qu'elle ne s'étend pas à tous ses constituants. Par ailleurs, son régime juridique, tel qu'il résulte de la loi de 2016 sur le droit d'auteur, nous semble comporter quelques imprécisions. Cela nous permet de postuler que le logiciel bénéficie d'une protection expresse en droit ivoirien (Partie 1), mais que cette dernière, étant insuffisante, mérite d'être améliorée (Partie 2).

Partie 1 : UNE PROTECTION EXPRESSE DES LOGICIELS

Outre qu'il est dans les deux cas question d'écriture, il existe, en vérité, peu de ressemblance entre un tableur Excel et les Fleurs du Mal ; le premier ne sera jamais, au contraire du second, rattaché aux beaux-arts. Le logiciel se démarque des oeuvres littéraires et artistiques classiques par sa nature fonctionnelle et son aptitude à exécuter des tâches programmées, éclipsant ainsi leur caractère narratif et leur subjectivité. Dès lors, bien qu'étant une oeuvre de l'esprit, sa spécificité lui rendrait ardue l'application stricte du droit d'auteur classique. C'est pourquoi il a vite été indispensable d'adapter la propriété littéraire et artistique au logiciel. Cette volonté d'adaptation se ressent tant au niveau de l'accès du logiciel au monde de la propriété littéraire et artistique (Chapitre 1) qu'au niveau des droits reconnus aux auteurs (Chapitre 2).

Chapitre 1 : L'accès du logiciel à la protection par le droit d'auteur

La loi ivoirienne32(*) sur le droit d'auteur qualifie expressément, à tort ou à raison33(*), le logiciel d'oeuvre écrite sur laquelle peut, tout naturellement, s'exercer le droit d'auteur. Le logiciel, comme nous le rappelions, n'est point réductible à son écriture. De par son aspect fonctionnel, il transcende pour ainsi dire la sphère littéraire. Alors, une question demeure : le droit d'auteur doit-il contenir l'entièreté de cette masse mixte ? Voilà posée la question de la détermination de l'assiette de protection du droit d'auteur en matière de programme d'ordinateur (Section 1). En outre, l'accès à cette protection requiert que le logiciel soit original (Section 2).

Section 1 : La détermination de l'objet de protection du droit d'auteur

À la vérité, il est difficile, à partir de la définition du vocable logiciel, d'indiquer les éléments protégés ou plus précisément le moment où le logiciel a obtenu un degré de formalisation suffisant pour être considéré comme oeuvre protégeable34(*). En effet, la technicité et le nombre d'étapes de création rendent difficile l'appréciation du degré de réalisation du programme d'ordinateur35(*). L'on doit alors en référer à l'accord ADPIC qui indique que les formes d'expression du logiciel sont le code source et le code objet.

Toutefois, en pratique, un logiciel ne se réduit pas au code. L'on pense, par exemple, à l'interface du programme d'ordinateur. Cette dernière n'est pas indexée par l'accord ADPIC. Mais, il ne faut pas conclure pour autant qu'elle est non protégée. En revanche, elle ne sera pas envisagée comme partie intégrante du logiciel, mais plutôt comme une oeuvre indépendante de celui-ci. En résumé, certains éléments sont protégés en tant que forme d'expression (Paragraphe 1) du logiciel, et que d'autres sont protégés de façon autonome (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les éléments protégés en tant que forme d'expression du logiciel

Le code source et le code objet constituent les formes d'expression du programme d'ordinateur (A). Par ailleurs, l'on peut également y adjoindre les travaux préparatoires du logiciel (B).

A : La programmation du logiciel

Le choix de protéger les programmes d'ordinateur par le droit d'auteur s'explique en partie par l'expression écrite des codes source et objet. Ces derniers sont qualifiés par l'accord sur les ADPIC d'oeuvres littéraires au sens de la convention de Berne.

En réalité, le code source est la forme première de l'expression du programmeur dans le logiciel36(*). C'est un fichier informatique, non compréhensible par la machine, avec comme extension (.c ) ou (.h )37(*). Il exprime dans un langage de programmation informatique, compréhensible uniquement par un humain initié, les instructions que devra suivre le programme d'ordinateur. Ainsi, est-il assez juste de le considérer comme la base ou l'élément central sur lequel repose le programme38(*), ou encore comme l'âme du logiciel39(*). Le code source représente l'aboutissement d'énormément de travail et de créativité40(*). En plus, la création d'un logiciel requiert l'écriture de plusieurs codes source.

Mais tel quel, il n'est pas exécutable par l'ordinateur. En effet, les machines informatiques ont leur langage propre : le langage binaire dont l'alphabet se résume à 0 et 1. La traduction du code source en langage binaire est nécessaire pour que l'ordinateur puisse comprendre les instructions décrites dans le code source. Donc, il faut exprimer le code source dans un langage binaire, c'est-à-dire formuler les instructions données au programme dans une suite de 0 et de 1. Cette opération s'appelle la compilation du code source et se réalise au moyen d'un logiciel spécifique : le compilateur. Ainsi, chaque code source sera traduit en un code objet par le compilateur. Elle débouche sur l'obtention d'un nouveau code : le code objet qui représente donc la version compilée du code source. Il se matérialise dans un fichier informatique avec comme extension (.o) ou (.obj)41(*).

Bien que ces fichiers ne soient pas compréhensibles par l'homme, ils sont néanmoins protégeables par le droit d'auteur selon l'accord sur les ADPIC. Bien que pouvant surprendre, cette décision n'en demeure pas moins logique puisque le code objet n'est qu'une traduction du code source, or étant donné que ce dernier est protégé, il serait déraisonnable d'exclure sa traduction du champ de la propriété littéraire et artistique.

À ce stade, le logiciel n'est pas encore parfaitement exécutable. Une dernière étape s'avère nécessaire : la liaison des fichiers objet. Elle permet d'obtenir un fichier ou programme exécutable par l'ordinateur qui aura comme extension (.exe), et sera remis à l'utilisateur. Les textes ne prévoient pas expressément la protection du programme exécutable par le droit d'auteur. Cependant, à l'analyse, il faut convenir qu'il ne s'agit que d'un assemblage de codes objet, eux-mêmes susceptibles de protection. Par conséquent, en tant qu'ensemble homogène de codes objet, le fichier exécutable doit également être protégé par le droit d'auteur. C'est ce que retient la jurisprudence en la matière : « le droit d'auteur protège le code source, le code objet et le fichier exécutable des logiciels42(*) ».

La propriété littéraire et artistique couvre également la structure du programme d'ordinateur. On entend par-là, « l'architecture du logiciel qui permet à ce dernier d'être présenté sous un certain ordre, un plan précis, le tout ordonné et agencé de manière cohérente pour l'utilisation de ce logiciel43(*). » Ce plan comprend les relations et l'enchaînement des sous-programmes, c'est-à-dire les différentes fonctionnalités recherchées, comprenant elles-mêmes les algorithmes permettant la réalisation du résultat recherché44(*). Il peut se présenter sous la forme d'un organigramme45(*) décrivant la composition, la structuration et la hiérarchisation du programme46(*). Pour les juges, toute reprise non autorisée de la structure d'un logiciel constitue un acte de contrefaçon.

B : Le matériel de conception préparatoire

Aux termes de l'article L122-2 du Code français de la propriété intellectuelle, le matériel de conception préparatoire du logiciel est aussi protégé par le droit d'auteur, en tant que forme d'expression du logiciel. Cela rejoint également la position du droit communautaire européen, qui a adopté une conception extensive de la notion de logiciel.

Le matériel de conception préparatoire « s'entend des documents, établis en principe avant le démarrage du développement du logiciel, mais aussi au cours du développement et à l'occasion des évolutions du logiciel, qui décrivent les fonctionnalités du logiciel, son fonctionnement technique, la structure des données qu'il exploite et qu'il génère, etc. »47(*) De ce point de vue, quiconque détient ces documents est potentiellement en mesure de réaliser le logiciel, en cela ils en sont indétachables. Cela justifie amplement qu'ils soient considérés comme une partie intégrante du logiciel.

Alors se pose le problème de l'étendue de ce concept. En effet, aucune législation n'en fournit une définition légale de telle sorte que la portée de cette notion reste à préciser. Il est cependant admis que le cahier des charges, qui peut émaner de personnes autres que les programmeurs, ne vaut pas matériel préparatoire48(*).

C'est pourquoi, Alain BENSOUSSAN propose que l'analyse fonctionnelle marque le départ des travaux préparatoires49(*). De ce point de vue, le matériel de conception préparatoire doit regrouper les analyses fonctionnelle et organique.

Cela correspond à la définition que Bertrand LIAUDET donne de la phase de conception du logiciel50(*). L'analyse fonctionnelle sert à déterminer les algorithmes nécessaires pour mettre en place les fonctions que le logiciel offre à ses utilisateurs. L'analyse organique s'attache à « la façon dont sera construit le système pour répondre aux attentes de l'analyse fonctionnelle51(*) ».

Nous nous inscrivons dans la même ligne de pensée, d'autant qu'elle correspond à la définition dégagée par la jurisprudence : « l'ébauche informatique du programme dès lors qu'elle est suffisamment avancée pour contenir en germe les développements ultérieurs52(*) ».

Le législateur ivoirien ne prévoit pas expressis verbis que le matériel de conception préparatoire du logiciel peut être protégé par le droit d'auteur. Mais cela peut se déduire de l'article 5 alinéa 1 de la loi ivoirienne53(*) sur le droit d'auteur. En effet, le droit d'auteur s'applique aux oeuvres inachevées. Ainsi, le fait que le logiciel soit inachevé ou en cours d'élaboration n'est pas un obstacle à sa protection par le droit d'auteur. Sous ce rapport, il y a tout lieu de penser que le matériel de conception préparatoire des logiciels, en ce qu'il contient les germes du programme d'ordinateur, est également protégé par le droit d'auteur.

Nous avons montré comment le droit d'auteur s'appliquait aux formes d'expression du logiciel. Il convient, à présent, d'analyser l'application du droit d'auteur aux éléments autonomes du logiciel.

Paragraphe 2 : Les éléments protégés en tant que partie autonome

Ces éléments « doivent être protégés de façon autonome du logiciel et ce nonobstant leur dépendance ou intégration aux logiciels54(*) ». Dans la mesure où ces éléments peuvent constituer en eux-mêmes des oeuvres de l'esprit à part entière, ils peuvent se voir protégés par le droit d'auteur. Il s'agit de l'interface graphique du logiciel (B) et de certains éléments littéraires (B).

A : Les éléments littéraires

Il s'agit essentiellement du cahier des charges, de la documentation ainsi que du titre du logiciel.

D'abord, le fait que la jurisprudence se refuse à analyser le cahier des charges comme travaux préparatoires ne signifie aucunement que ce dernier est dépourvu de toute forme de protection. En fait, il est question, en tout état de cause, d'une oeuvre écrite qui, même si elle est n'est pas protégée au même titre que le logiciel, peut cependant bénéficier d'une protection à condition qu'elle remplisse les critères du droit d'auteur. C'est ce qu'affirme implicitement le juge dans cette affaire : « les services attendus du logiciel, la définition des besoins, les précisions apportées au cours de l'élaboration par le profane qui a souhaité voir créer un logiciel, à partir d'une idée, précisé, s'ils peuvent éventuellement constituer par eux-mêmes une oeuvre de l'esprit, n'entrent pas dans le cadre » du régime spécifique au logiciel55(*).

Ensuite, la documentation d'utilisation, en principe exclue de la protection du logiciel, peut se voir attribuée une protection. « Ainsi la documentation, qu'elle soit auxiliaire ou d'utilisation, est protégée en tant qu'oeuvre littéraire de façon autonome56(*) ». Le terme "documentation" désigne tous les documents qui accompagnent le logiciel et qui visent à faciliter son utilisation pour la personne qui doit l'utiliser. Bien qu'étant complémentaire au logiciel, sa rédaction en langage naturel et son support physique distinct du code exécutable en font une oeuvre autonome57(*). En effet, il constitue une oeuvre de l'esprit à part entière, ce qu'affirme le juge : « il n'est pas contestable, ni d'ailleurs sérieusement contesté, que le manuel d'utilisation d'un logiciel constitue, comme le logiciel lui-même, une oeuvre de l'esprit58(*) ». Dès lors, « la reproduction dans un programme d'ordinateur ou dans un manuel d'utilisation de ce programme, de certains éléments décrits dans le manuel d'utilisation d'un autre programme d'ordinateur protégé par le droit d'auteur est susceptible de constituer une violation du droit d'auteur sur ce dernier manuel 59(*)».

Par ailleurs, conformément à l'article 9 de la loi ivoirienne sur le droit d'auteur60(*), le titre d'un logiciel constitue une oeuvre protégeable puisque « le titre d'une oeuvre qui présente un caractère original est protégé indépendamment de l'oeuvre elle-même. » C'est en ce sens que la Cour d'appel a pu constater « la contrefaçon par reproduction du titre du logiciel appartenant à la société intimée61(*) ». Dans la même logique, la Cour de cassation retenait le caractère frauduleux d'un dépôt de marque car celle-ci était identique au titre d'un logiciel antérieur62(*).

B : L'interface graphique du logiciel

L'apparence physique du programme d'ordinateur, telle que visible par l'utilisateur, est également protégée. On désigne par l'anglicisme « look and feel » tous ces éléments : les icônes, écrans des menus, etc63(*). Ils sont protégés par le droit d'auteur propre aux oeuvres graphiques.

Selon la CJUE, « l'interface graphique constitue simplement un élément de ce programme au moyen duquel les utilisateurs exploitent les fonctionnalités dudit programme. Il s'ensuit que cette interface ne constitue pas une forme d'expression d'un programme d'ordinateur [...] et que, par conséquent, elle ne peut bénéficier de la protection spécifique par le droit d'auteur sur les programmes d'ordinateur ;[toutefois, les juges ajoutent qu'] une telle interface peut bénéficier de la protection par le droit d'auteur en tant qu'oeuvre, en vertu de la directive 2001/29, si cette interface constitue une création intellectuelle propre à son auteur64(*)».

Il n'est, cependant, pas certain que le critère d'originalité soit aisément reconnu concernant les interfaces graphiques. En effet, ces dernières se sont globalement standardisées. Or, « si l'interface graphique est dépourvue d'« identité stricte [...] dans la forme ou l'expression [et ne résulte que de] l'exploitation de standards très proches, de concepts extrapolés de l'état de l'art existant au moment de (sa) création de l'analyse normale des produits concurrents à laquelle doit procéder tout développeur pour créer un logiciel susceptible de pénétrer un marché international et concurrentiel65(*) », elle ne pourra bénéficier de la protection de la propriété littéraire et artistique.

En guise d'illustration, le TGI de Paris jugeait que « faute d'établir de manière certaine le périmètre des caractéristiques revendiquées à une date déterminée et leur originalité, la protection par le droit d'auteur ne peut être conférée à l'interface graphique de CuePilot V.5.70.66(*) ».

Cette section a permis de mettre en lumière comment la propriété littéraire et artistique appréhendait la notion de logiciel. Il convient maintenant d'examiner le critère unique de protection : l'originalité.

Section 2 : Le respect par le logiciel de la condition d'originalité

L'unique condition de protection du programme d'ordinateur est l'originalité. Si la forme est le corps de l'oeuvre, l'originalité en constitue l'âme67(*). La paternité de cette notion est souvent attribuée à DESBOIS qui l'envisagea, pour la première fois, dans son traité de 1950. Cet intérêt tardif de la doctrine pour cette notion peut s'expliquer par ceci qu'à une époque où les oeuvres relevaient principalement des arts purs, leur originalité ne posait pas véritablement de problèmes68(*). En tout état de cause, le droit d'auteur ne s'applique qu'aux logiciels originaux ; c'est une condition à la fois nécessaire et suffisante69(*) (Paragraphe 1). En outre, il nous faut également préciser ce que renferme cette notion (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'originalité, condition suffisante et nécessaire de protection

D'un côté, seul le logiciel original peut se voir protégé par le droit d'auteur : l'originalité est donc une condition nécessaire (A). De l'autre côté, l'originalité, seule, garantit la protection du logiciel : elle est effectivement une condition suffisante (B).

A : Une condition nécessaire

Toutes les législations de l'espace OAPI en général, et celle de la Côte d'Ivoire en particulier, exigent que toute oeuvre soit originale, pour bénéficier d'une protection par le droit d'auteur. Elle est un concept identitaire du droit d'auteur70(*) ; à vrai dire, elle sert de filtre. De fait, seuls les composants orignaux d'un logiciel peuvent faire l'objet de la protection par la propriété littéraire et artistique.

L'exigence de l'originalité, s'agissant de la propriété littéraire et artistique, est fondamentale à plusieurs niveaux. D'abord, elle assure l'efficacité du droit d'auteur. En effet, ce dernier n'aurait aucune raison d'être, s'il devait s'appliquer à des créations dépourvues de valeur créative, car il serait malvenu d'accorder un droit privatif à un auteur qui ne se contente que de reproduire, purement et simplement, des créations préexistantes. De plus, l'originalité permet de concilier intérêt privé et intérêt général. En fait, le monopole accordé aux auteurs d'oeuvres originales stimule le monde créatif, tout en garantissant au public l'accès à une diversité d'expressions littéraires et artistiques. Elle favorise un renouveau perpétuel des auteurs ainsi que de leurs oeuvres. En outre, elle prévient la monopolisation éventuelle des idées et expressions créatives puisque si l'on accordait une protection aux oeuvres non originales, l'on assisterait à une évolution géométrique du nombre de monopoles, ce qui entraverait assurément le développement d'idées et d'expressions créatives futures.

De ce fait, l'originalité est examinée avec attention par les juridictions qui ne manquent jamais de rappeler que « la protection d'une oeuvre de l'esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale71(*) ». La Cour de cassation veille au respect par les juges du fond, de cette condition72(*). Il importe de préciser qu'il s'agit bien de l'originalité de la forme, et non de l'idée à la base de cette forme. Autrement dit, un concept banal peut s'incarner dans une création originale, et vice versa.

D'ailleurs, bien qu'il soit vrai que le juge est tenu d'apprécier l'originalité d'une oeuvre, il ne s'agit cependant pas d'une obligation automatique. Effectivement, le juge n'a pas à rechercher d'office si une oeuvre est originale ou non. En l'absence de contestation du défendeur, chaque création est présumée originale. En conséquence, un arrêt ne peut être cassé pour insuffisance de motifs si « devant les juges du fond, le litige a exclusivement porté sur la compétence du tribunal de commerce, sur la validité d'une saisie et sur la réalité de la contrefaçon alléguée, sans qu'à aucun moment, aucune des parties ne mette en doute l'originalité du progiciel73(*) ».

C'est sans doute pourquoi la démonstration de l'originalité de l'oeuvre ne conditionne pas la recevabilité d'une demande en contrefaçon74(*). Mais dès le moment où l'originalité de l'oeuvre est remise en cause par le défendeur, actori incumbit probatio75(*). Le demandeur devra, conformément au droit commun, prouver l'originalité de sa création.

Les juges du fond apprécient souverainement l'originalité de la création, et la juridiction suprême ne peut effectuer de contrôle sur le bien-fondé de cette appréciation76(*). Le juge doit caractériser l'originalité ou l'absence d'originalité, et dans ce dernier cas le logiciel ne sera pas protégé. En outre, il est intéressant de préciser que ni le législateur ni la jurisprudence n'ont prévu de seuil minimum d'originalité. À vrai dire, « peu importe l'ampleur de l'empreinte que la personnalité de l'auteur a laissée dans l'oeuvre, il suffit, selon la conception subjective, que cette empreinte se manifeste dans l'oeuvre pour que le juge puisse l'apprécier77(*) ». Cela est compréhensible dans la mesure où l'originalité, fondamentalement subjective, n'est pas réellement quantifiable.

B : Une condition suffisante

Aucune condition autre que l'originalité ne peut être prise en compte pour juger de la protection ou non d'un logiciel. La loi ivoirienne sur le droit d'auteur78(*), dans son article 5 pris en ses alinéas premier et deuxième, le rappelle nettement. De ce fait, le logiciel original est protégé par le droit d'auteur indépendamment de sa divulgation, son genre, sa valeur, sa destination, son mode ou sa forme d'expression.

Premièrement, même s'il est indispensable que le logiciel soit incarné dans une forme sensible, cela n'implique pas nécessairement sa divulgation. L'oeuvre non divulguée, contrairement au droit des brevets, est toujours protégée par le droit d'auteur, ce qui constitue un avantage majeur. L'auteur n'est pas obligé de révéler son code au public afin d'obtenir une protection privative, de telle sorte qu'il peut bénéficier pour ainsi dire de deux systèmes de protection : et le droit d'auteur, et le secret.

Deuxièmement, « l'oeuvre créée est protégée quels qu'en soient le genre, la valeur, la destination, le mode ou la forme d'expression79(*). » De fait, le logiciel, peu importe sa forme d'expression (code source, code objet...), son genre (logiciel d'exploitation, progiciel, application, etc.), sa valeur ou sa destination (système éducatif, militaire, etc.), est protégé par le droit d'auteur80(*).

Troisièmement, il bénéficie d'une protection même lorsque sa forme est inachevée81(*). En effet, l'état d'inachèvement d'une oeuvre ne fait pas obstacle à sa sécurisation par la propriété littéraire et artistique. A titre illustratif, les travaux préparatoires d'un logiciel donnent effectivement prises au droit d'auteur.

Paragraphe 2 : L'appréciation de l'originalité en droit ivoirien

L'originalité s'entendait comme le reflet de la personnalité du créateur, c'est-à-dire l'empreinte de son talent personnel et créatif. Cette définition éminemment subjective ne prête aucune attention aux caractères de l'oeuvre elle-même. Contrairement au droit sénégalais qui retient la définition traditionnelle, le législateur ivoirien reprend la définition européenne de l'originalité, elle-même un épigone de la définition donnée de l'originalité dans l'arrêt Pachot. À cet égard, le logiciel original se saisit comme une création intellectuelle propre à son auteur.

À notre sens, pour être propre à son auteur, un programme d'ordinateur doit se distinguer des autres sur le marché ; mais il doit aussi résulter des choix faits librement par l'auteur. En résumé, l'originalité, en droit ivoirien, découle du caractère unique du logiciel (A) et des choix personnels faits par le programmeur (B).

A : Le caractère unique du logiciel

Pour être propre à son auteur, le logiciel doit avoir un caractère unique, ce qui suppose qu'il « se distingue dans son expression ou sa composition des autres oeuvres par des différences objectives82(*) ». De ce fait, le logiciel ne doit point constituer une pâle reproduction de créations antérieures, sinon il serait alors propre à un auteur antérieur.

Selon Cherpillod, l'originalité d'une oeuvre devrait se déterminer « par rapport aux biens actuellement ou virtuellement existants [pour la simple et bonne raison que le monopole du droit d'auteur] ne peut être accordé qu'à celui qui enrichit la collectivité par un bien dont elle ne disposait pas auparavant »83(*). Sous cet angle, l'originalité rejoint la nouveauté. D'ailleurs, Le président Jonquères affirmait : « la nouveauté est recherchée officieusement, inconsciemment, en matière de droit d'auteur là où elle l'est officiellement, délibérément, en matière de brevet 84(*)».

Mais la nouveauté seule, ne saurait valablement caractériser l'originalité. En effet, « [s]i tel était le cas, le droit d'auteur pourrait s'attacher à des productions de pure routine, alors qu'il semble juste de laisser au domaine public non seulement les biens déjà existants, mais encore ceux qui ne s'en distinguent que par un apport si modeste qu'il en est banal »85(*).

Il est, en réalité, question d'une nouveauté individualisée, qui peut se rapprocher de la condition d'activité inventive inhérente au droit des brevets. C'est ainsi que Cherpillod conclut qu'une création est originale « si elle diffère de ce qui est connu - nouveauté - et de ce qui en découle directement - individualité ; l'originalité est ainsi un degré supérieur de nouveauté86(*) ». En clair, le caractère unique d'un logiciel implique une nouveauté qui, dans l'état actuel du monde informatique, est « non évidente » pour l'homme du métier.

Le caractère unique se rapproche de ce que retenait la cour de cassation, dans le célèbre arrêt Pachot, à savoir la marque de l'apport intellectuel de l'auteur ; l'apport intellectuel faisant « référence à un ajout ou à un complément d'ordre intellectuel par rapport à un état antérieur des connaissances ou des créations en matière de logiciel »87(*).

De ce qui précède, l'on peut déduire que l'originalité comprend une dimension objective qui devrait amener le juge ivoirien à rechercher si le logiciel est une reprise d'un logiciel antérieur, et s'il se différencie des oeuvres que l'on trouve généralement sur le marché. Mais l'originalité ne se réduit pas à cette dimension objective.

B : Les choix personnels du programmeur

Pour être propre à son auteur, le logiciel doit résulter des choix libres du programmeur au moment de la réalisation du logiciel. Cela signifie que l'originalité s'incarne dans un effort personnalisé du programmeur. L'effort personnalisé se fonde sur « apport raisonné88(*) » de l'auteur à son oeuvre. Mieux dit, il suffirait que l'oeuvre se singularise par des choix propres à l'auteur, même si ceux-ci sont motivés par la logique.

En fait, un programme d'ordinateur, est fondamentalement question d'une suite d'instructions destinés à être décryptées par une machine en vue d'obtenir un résultat. À ce titre, l'auteur est soumis à une double contrainte : en premier lieu, permettre la compréhension des instructions par la machine ; en second lieu, faire produire par la machine le résultat souhaité89(*). Le programmeur est tenu de respecter les règles de programmation ainsi qu'une certaine logique dans son action.

Mais, cet effort personnalisé doit aller au-delà de la simple mise en oeuvre d'une logique automatique et contraignante. En effet, l'auteur ne doit pas avoir été obligé de coder de telle façon. Réciproquement, n'importe qui, placé dans les mêmes conditions, ne doit pas pouvoir réaliser le même logiciel. Sur ce point, dans un arrêt rendu en 2018, les magistrats affirment que l'originalité ne peut être reconnue dans un logiciel qui a été conçu en se conformant aux exigences d'une circulaire administrative ; à cet effet, ils ont souligné que l'originalité ne peut exister si la créativité est bridée par les exigences et usages d'un secteur d'activité90(*).

C'est dire que le programmeur doit effectuer des choix qui lui sont propres sans être enchaîné par une logique contraignante car, comme le précise le Tribunal d'Instance de Tokyo, « naturellement, les pensées logiques du programmeur sont nécessaires pour combiner les instructions 91(*)» que devra suivre le logiciel. Ainsi, le logiciel exprime ainsi l'individualité de l'auteur.

Le juge devrait donc aussi examiner les divers choix de l'auteur au moment de la réalisation de son logiciel. Ceux-ci peuvent se manifester dans :

- « un choix spécifique dans une combinaison de couleurs, de l'adoption d'une police de caractères92(*) ;

-  l'existence de transformations importantes opérées sur un logiciel antérieur qui ont nécessairement généré une valeur ajoutée en termes de travail intellectuel93(*) ;

- le fait que le logiciel a été rédigé dans un langage informatique différent des logiciels précédemment créés, dès lors que ce langage a permis des configurations particulières, d'offres de simulations de prêts, d'une présentation de ses rubriques, d'un agencement de ses titres, d'une architecture de ses fenêtres ;

- le fait de faire fonctionner avec un certain type de processeur, amélioration qui caractérise l'existence d'un apport intellectuel propre et d'un effort personnalisé94(*) ».95(*)

Chapitre 2 : Les prérogatives accordées à l'auteur du logiciel

Sans étaler ici des considérations d'ordre religieux, nous tenons à souligner le lien étriqué unissant le créateur (l'auteur) à la créature (l'oeuvre) ; effectivement, l'auteur donne naissance à l'oeuvre, et réciproquement, l'oeuvre lui confère la qualité d'auteur. Cela justifie, entre autres, que soit reconnu à l'auteur un droit sur sa création.

Ce monopole reconnu au créateur (Section 1) constitue une des raisons d'être du droit d'auteur, et lui permet de jouir des avantages procurés par son programme. Cet aspect non contentieux est économiquement essentiel, mais il ne saurait point, à lui seul, constituer une protection sérieuse. À la vérité, il en va de même pour tous les droits subjectifs ; ceux-ci n'ont de réelle valeur que parce qu'ils sont juridiquement sanctionnés. C'est pourquoi il est indispensable d'assurer un mécanisme de sanction en cas de violation du monopole de l'auteur d'un programme d'ordinateur. En droit de la propriété littéraire et artistique, cela passe par l'exercice d'une action en contrefaçon de logiciel (Section 2).

Section 1 : L'attribution d'un monopole à l'auteur du logiciel

Les attributs du droit d'auteur sont, à quelques détails près, les mêmes dans tous les pays de droit d'auteur. Ceux-ci sont, de manière assez classique et traditionnelle, regroupés en deux grandes catégories. En effet, le droit de l'auteur sur un logiciel comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral, ainsi que des attributs d'ordre patrimonial. La Loi précise le contenu des droits des auteurs sur une oeuvre logicielle, mais assortit ces droits de certaines limitations. De fait, notre analyse visera la mise en lumière des attributs reconnus à l'auteur d'un logiciel, mais aussi des exceptions dont ils sont affublés, et ce qu'il s'agisse des droits patrimoniaux (Paragraphe 2) ou des droits extrapatrimoniaux (Paragraphe 1).

Paragraphe 1 : Les droits extrapatrimoniaux de l'auteur d'un logiciel

Les droits moraux ou extrapatrimoniaux sont l'apanage du droit d'auteur. Ils renvoient à tous les attributs non pécuniaires du droit d'auteur « qui permettent à l'auteur de défendre sa personnalité telle qu'elle s'exprime dans l'oeuvre qu'il a créé96(*). » Ceux-ci ont « pour but de garantir une authentique manifestation de la créativité de l'auteur, l'oeuvre étant perçue comme le prolongement de sa personnalité. 97(*)». Sous ce rapport, les droits moraux sont, conformément à l'article 12 de la loi ivoirienne 98(*) sur le droit d'auteur, attachés à la personne de l'auteur. À ce titre, ils sont perpétuels, inaliénables et imprescriptibles

Aux termes de l'article 12 alinéa 2 de la loi ivoirienne99(*) sur le droit d'auteur : « Les droits moraux sont : - le droit à la paternité et au respect de l'oeuvre ; - le droit de divulgation ; - le droit de repentir ou de retrait et le droit d'accès. » En résumé, l'auteur dispose du droit de communiquer l'oeuvre au public (A) et d'assurer son intégrité (B).

A : Le droit de communiquer le logiciel au public

Avant tout, le créateur d'un logiciel a le droit exclusif de décider de la divulgation de son oeuvre et d'en définir les modalités. L'auteur conserve donc la faculté de maintenir son programme dans la sphère privée. En effet, il ne peut être contraint, légalement, judiciairement ou contractuellement, le mettre à disposition du public. En effet, vu qu'il n'existe pas, contrairement en droit des brevets100(*), de contrats forcés en matière de propriété littéraire et artistique, l'auteur d'un logiciel ne peut être obligé d'accorder une licence d'exploitation à un tiers, et ce, même s'il décide de maintenir sa création dans le monde occulte.

De plus, quand bien même il conviendrait de la publier, l'auteur reste maître des modalités de la divulgation. En fait, « le droit de communiquer l'oeuvre au public (aspect positif) confère à l'auteur le pouvoir de décider lui-même si, quand et comment son oeuvre peut être divulguée.101(*) »

La jurisprudence accorde une valeur puissante à ce droit. C'est ainsi qu'un auteur, lié par un contrat de commande, « ne peut pas être obligé de livrer l'oeuvre ou qu'il ne saurait être condamné, sous astreinte, à remettre l'oeuvre réalisée à son cocontractant102(*). » Par contre, violant ses obligations résultant du contrat, il pourra être condamné à payer des dommages-intérêts.

En outre, l'auteur d'un logiciel, même postérieurement à la publication de son oeuvre, jouit d'un droit de repentir ou de retrait vis-à-vis du cessionnaire.

Il est important de noter que la particule « ou », ici employée, ne signifie pas que les termes « retrait » et « repentir » sont synonymes. Au contraire, leur sens diffère : d'une part, le retrait est une mesure radicale qui autorise l'auteur à mettre fin à l'exploitation de son oeuvre, vulgairement à la retirer du marché ; d'autre part, le droit de repentir permet juste à l'auteur, insatisfait de l'état actuel de son logiciel, de modifier celui-ci après la cession.

À n'en point douter, le droit de repentir ou de retrait représente l'envers du droit de divulgation reconnu à l'auteur, car il garde l'oeuvre divulguée sous la maîtrise de ce dernier. Mais une telle prérogative est susceptible de nuire aux intérêts de l'ayant cause de l'auteur, surtout au vu de la valeur économique et commerciale des logiciels.

C'est pourquoi les législations européennes ont simplement choisi de dénier spécifiquement aux programmes d'ordinateur le droit de retrait ou de repentir. Les pays de l'OAPI en général et la Côte d'Ivoire en particulier ont, au contraire, opté pour la voie de l'atténuation, laquelle vaut aussi bien pour les oeuvres classiques que pour le logiciel. C'est ainsi que l'auteur ne peut exercer ce droit qu'à charge d'indemniser préalablement le cessionnaire du préjudice que ce repentir ou ce retrait peut lui causer. Cette indemnisation préalable constitue un contrepoids sérieux au droit de repentir et de retrait, raison pour laquelle, en pratique, le droit de retrait ou de repentir est rarement utilisé.

B : Le droit d'assurer l'intégrité du logiciel

Une fois divulgué le logiciel,  l'auteur a le droit de faire reconnaître sa qualité d'auteur, en particulier, le droit de faire porter la mention de son nom sur les exemplaires de son oeuvre et, dans la mesure du possible et conformément aux usages, en relation avec toute utilisation publique de son oeuvre. En clair, le créateur d'un logiciel peut exiger que soit inscrit son nom sur tout support du programme d'ordinateur, mais peut aussi « empêcher que d'autres personnes apposent leurs noms sur son oeuvre103(*) ».

Cependant, il faut garder à l'esprit qu'il s'agit d'un droit, et non d'une obligation, ce qui explique qu'un créateur puisse librement choisir de divulguer anonymement son oeuvre. Et dans ce cas, il demeure le seul à pouvoir lever l'anonymat. En définitive, ce droit s'accomplit sans limitations, accordant une importance cardinale à la volonté de l'auteur.

L'auteur du logiciel, en outre, le droit de s'opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de son oeuvre ou a toute autre atteinte a la même oeuvre. En effet, « l'oeuvre est perçue comme la matérialisation de la personnalité de l'auteur. La protection de l'oeuvre s'interprète donc comme une protection de la personnalité de l'auteur lui-même.104(*) » Ce qui explique que soit également protégé l'esprit de l'oeuvre.

Cependant, dans le cas du logiciel, puisqu'il incarne l'apport intellectuel résultant d'un effort personnalisé, il est difficile d'entrevoir une possible atteinte de son esprit. C'est pourquoi, à notre sens, le droit au respect du logiciel ne devrait concerner que les attaques matérielles. Ainsi, l'auteur a le droit de contrecarrer toute modification d'un élément de son logiciel, qu'il s'agisse d'une partie intégrante ou d'une partie autonome du programme d'ordinateur. Il peut par exemple s'opposer à l'ajout ou au retrait de caractères dans son code.

Mais, son droit est soumis à condition. De fait, la loi ivoirienne, au contraire d'autres législations105(*), exige pour l'exercice de ce droit que la modification soit préjudiciable à l'honneur ou à la réputation de l'auteur. Autrement formulé, l'auteur ne peut s'opposer à une modification de son oeuvre qui n'entache en rien sa réputation ou son honneur. D'ailleurs, cette atténuation se retrouve renforcée par l'annexe 7 l'ABR106(*), qui prévoit au profit de l'utilisateur d'un logiciel un droit d'adaptation. En conséquence, il faut convenir que le droit au respect du logiciel est limité et édulcoré, puisque l'auteur ne pourra s'opposer à la modification de son logiciel que si elle porte atteinte à sa réputation ; par exemple, si elle est « techniquement désastreuse107(*) ». Pour toutes ces raisons, certains auteurs soutiennent que le droit au respect du logiciel est édulcoré.

Par ailleurs, l'auteur d'un logiciel peut exiger du propriétaire ou du possesseur d'un exemplaire de l'oeuvre qu'il lui donne accès à cet exemplaire dans la mesure où cela se révèle indispensable à l'exercice de son droit d'auteur et à condition qu'aucun intérêt légitime du propriétaire ou du possesseur ne s'y oppose. 

Ce droit d'accès semble être une spécificité du droit ivoirien. À notre sens, son intérêt réside principalement dans le contentieux de la propriété littéraire et artistique. En effet, dans le cadre d'une action en contrefaçon, cette faculté facilite l'obtention, par l'auteur, d'une preuve de ladite contrefaçon. C'est ce qui explique, d'ailleurs, les deux conditions d'exercice de ce droit : la nécessité d'exercer le droit d'auteur et l'absence d'intérêt légitime du possesseur. L'on comprend alors que l'intention du législateur n'était pas d'accorder un droit d'immixtion intempestive à l'auteur, mais plutôt de protéger le droit d'auteur de ce dernier.

Paragraphe 2 : Les droits patrimoniaux ou droits d'exploitation des auteurs de logiciels

Les droits patrimoniaux nous introduisent dans la dimension économique du droit d'auteur, dimension d'autant plus importante que les programmes d'ordinateur ont, de nos jours, une valeur immense. Ils expriment le droit exclusif pour « l'auteur d'autoriser l'exploitation de son oeuvre sous quelque forme que ce soit et d'en tirer un profit pécuniaire. » Si le droit moral s'attache à protéger la personne de l'auteur, le droit d'exploitation vise la sécurisation de son patrimoine ; leur objet étant diamétralement opposé, leurs caractères le sont tout autant. Ainsi, le droit d'exploitation est temporaire, cessible et transmissible.

En tout état de cause, les droits patrimoniaux sont le droit de reproduction, le droit de commercialisation, le droit de représentation108(*) et le droit de suite109(*). Pour synthétiser, l'auteur jouit d'un droit de reproduction (B) et de commercialisation (A).

A : Le droit de commercialisation du logiciel

L'auteur du logiciel dispose d'un droit de commercialisation de sa création. En effet, il a le droit exclusif d'autoriser le prêt, la location ou la distribution du logiciel. Ces droits permettent au public d'utiliser le logiciel.

Le droit de prêt du logiciel permet à l'auteur d'autoriser (et donc d'interdire) à quiconque de réaliser le prêt de son programme. Cela signifie que l'utilisateur d'un logiciel ne peut le prêter à un autre sans autorisation de l'auteur, fût-ce dans un cadre privé.

Relativement au droit de location, l'auteur est seul à pouvoir autoriser la mise à disposition provisoire d'un exemplaire de son logiciel. L'exemple phare est celui des logiciels hébergés dans le Cloud ou encore SaaS110(*). Pour que ce droit s'applique, le programme doit être l'objet principal de la location.

Pour mieux comprendre, prenons au premier abord l'exemple du cybercafé. En effet, dans un tel local, des ordinateurs sont provisoirement mis à disposition de la clientèle. Or sur ces derniers sont installés des logiciels. Dans une pareille conjecture, l'auteur ne peut faire jouer son droit de location puisque l'objet essentiel est l'ordinateur et non le programme. Prenons, dans un second temps, en exemple l'offre de Microsoft 365. Elle est fondée sur la possibilité d'obtenir, grâce à un abonnement renouvelable, l'accès à la dernière version de Microsoft Office ainsi qu'à un ensemble de services Cloud. Dans ce cas, l'objet de la location étant le logiciel lui-même, le droit de location de l'auteur s'applique.

En ce qui concerne le droit de distribution, l'auteur du programme seul peut autoriser la distribution, sur un espace géographique donné, des exemplaires de son oeuvre au public par la vente ou par tout autre transfert de propriété.

Contrairement à la location et au prêt, la distribution du logiciel donne au public le droit perpétuel d'utiliser le logiciel. Par ailleurs, le droit de distribution a une portée limitée. En effet, il ne vaut que pour le premier exemplaire mis à la vente, car, en vertu du droit communautaire, le droit de distribution s'épuise après la première vente. C'est l'article 6 de la directive n°02/2018/CM/UEMOA qui consacre que le droit de distribution « est épuisé par la première vente ou tout autre transfert de propriétés des exemplaires par l'auteur ou avec son consentement dans un pays de l'UEMOA111(*) ».

B : Le droit de reproduction du logiciel

L'auteur a également un droit de reproduction du logiciel. La reproduction fait référence à deux hypothèses différentes : la reproduction stricto sensu ainsi que la transformation du logiciel.

Dans un premier temps, par reproduction stricto sensu, nous entendons signifier la copie servile112(*) ou quasi-servile113(*) du logiciel. À ce sujet, l'auteur du programme d'ordinateur jouit du droit exclusif d'autoriser la reproduction de son oeuvre, de quelque manière et sous quelque forme que ce soit, y compris sa numérisation. Autrement dit, lui seul peut permettre la fixation du logiciel sur tout support (généralement sur un support numérique), en un ou plusieurs exemplaires, qu'il soit exprimé en, code source, code objet ou code exécutable ; ou encore qu'il s'agisse du matériel de conception préparatoire114(*). En pratique, l'auteur est le seul à pouvoir autoriser la copie d'un logiciel sur un support de stockage (Clé USB, disque dur, CD, DVD, Cloud, etc.).

Le droit de protection des créateurs de logiciels se retrouve encore plus renforcé que la libre reproduction à des fins privées, existant en droit d'auteur classique, est interdite en ce qui concerne les programmes d'ordinateur. En effet, l'article 10 de l'annexe 7 de l'ABR115(*) dispose précisément que la libre reproduction pour l'usage privé de l'utilisateur ne s'applique pas  à la reproduction des programmes d'ordinateur.

Toutefois, le droit de reproduction de l'auteur n'est pas absolu. À cet égard, la loi ivoirienne 116(*)sur le droit d'auteur prévoit, au profit de l'utilisateur, le droit d'effectuer une copie sauvegarde. Il s'agit d'un mécanisme destiné à préserver l'utilisation du programme d'ordinateur, en protégeant l'utilisateur du logiciel d'une éventuelle destruction du logiciel ou de son support. Ainsi, au sens de l'article 31 de la loi ivoirienne sur le droit d'auteur, « la personne ayant le droit d'utiliser un programme d'ordinateur peut faire une copie de sauvegarde pour préserver l'utilisation du programme d'ordinateur ».

En ce sens, l'article 17 de l'annexe 7 de l'ABR 117(*)prévoit : « L'utilisateur légitime d'un exemplaire d'un programme d'ordinateur peut, sans l'autorisation de l'auteur et sans paiement d'une rémunération séparée, réaliser un exemplaire [...] à condition que cet exemplaire soit : [...] nécessaire à des fins d'archivage et pour remplacer l'exemplaire licitement détenu dans le cas où celui-ci serait perdu, détruit ou rendu inutilisable. » Cette disposition, beaucoup plus explicite que la précédente, met en lumière la cause de cette exception : le remplacement d'un programme devenu inutilisable.

Dans un second temps, la transformation118(*) du logiciel peut résider dans l'adaptation, l'arrangement ou la traduction d'un logiciel. D'abord, l'adaptation consiste à s'inspirer du code d'un logiciel afin d'en créer un nouveau. Ensuite, l'arrangement du logiciel signifie le changement de disposition des éléments de programmation du logiciel. Enfin, la traduction, c'est l'expression du code du logiciel dans un langage de programmation différent de celui adopté pour le logiciel initial.

Toutes ces opérations, on le constate, ont ceci de commun qu'elles présupposent l'accès au code du logiciel. Or, il serait inconcevable que quiconque puisse librement accéder et transformer le code d'un logiciel. C'est pourquoi  le droit de reproduction comprend également le droit exclusif pour l'auteur d'autoriser l'adaptation, l'arrangement ou la traduction de son oeuvre.

Toutefois, ce droit est tempéré par les intérêts de l'utilisateur. À ce titre, l'article 18 susvisé prévoit également : « le propriétaire légitime d'un exemplaire d'un programme d'ordinateur peut, sans l'autorisation de l'auteur et sans paiement d'une rémunération séparée, réaliser [...] l'adaptation de ce programme à condition que [...] cette adaptation soit nécessaire à l'utilisation du programme d'ordinateur à des fins pour lesquelles le programme a été obtenu ». Autrement dit, l'utilisateur du logiciel est autorisé à procéder à la modification du logiciel (principalement du code source) quand cette opération est nécessaire à son utilisation. Par conséquent, un auteur ne peut s'opposer à ce que l'utilisateur altère le code source de son programme afin d'en corriger les erreurs, ou bien dans l'optique de le rendre compatible avec d'autres logiciels.

Le monopole de l'auteur lui permet d'exploiter le logiciel. Et ce monopole est garantit par l'action en contrefaçon.

Section 2 : La défense des auteurs de logiciels par l'action en contrefaçon

La contrefaçon des programmes d'ordinateur peut revêtir les formes les plus diverses : elle est « polymorphe [et] emprunte tous les interstices laissés par la pratique119(*) ». On peut la définir comme : « toute atteinte120(*) à l'un quelconque des droits moraux et patrimoniaux »121(*).

Les faits de contrefaçon sont réprimés par le législateur. Il s'agit d'un délit pénal pouvant donc être défini par un élément légal, un élément matériel et un élément moral. Toutefois, la contrefaçon ne saurait s'y réduire, car elle est aussi, « et, dans tous les cas, un délit civil122(*) ». Au final, l'auteur du logiciel dispose d'une option : ou se constituer partie civile devant la juridiction répressive, auquel cas la contrefaçon serait analysée en tant qu'infraction ; ou porter son action devant les juges civils, et dans ce cas la contrefaçon serait examinée en tant que faute civile.

Cette dernière proposition nous semble préférable pour plusieurs raisons. D'abord, le juge civil, contrairement au juge répressif, n'aura pas à rechercher l'élément moral de la contrefaçon car, au niveau du droit privé, « la contrefaçon est caractérisée, indépendamment de toute faute ou mauvaise foi123(*) ». Ensuite, la contrefaçon, en tant que faute civile, est bien plus vaste que le délit pénal de contrefaçon qui est bornée par le principe de légalité criminelle. Enfin l'action en contrefaçon peut nécessiter l'examen de divers contrats, à cet égard les juges civils nous paraissent mieux outillés.

En conséquence, nous n'aborderons que la facette civile de la contrefaçon. À ce titre, nous nous emploierons à caractériser le délit civil de contrefaçon (Paragraphe 1) avant d'épiloguer sur les sanctions prévues contre les contrefacteurs (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La caractérisation du délit civil de contrefaçon

Les comportements contrefacteurs peuvent revêtir les formes les plus diverses. De ce fait, des auteurs ont proposé de les catégoriser selon leur fonction ; dès lors, ceux-ci pourraient se distinguer selon qu'ils consistent à la création, à la diffusion ou à l'usage de la création protégée par un droit de propriété intellectuelle124(*). Cela dit, la contrefaçon, pour être caractérisée, suppose l'accomplissement d'actes matériels (B), lesquels doivent être frauduleux (A).

A : Le caractère frauduleux de la contrefaçon

La faute civile de contrefaçon a un caractère illicite, en l'absence duquel elle ne saurait être caractérisée. Autrement dit, il n'y a pas contrefaçon si les actes accomplis sont licites, au regard de la propriété littéraire et artistique. En clair, pour qu'il y ait contrefaçon, le contrefacteur doit avoir agi, sans disposer du droit de le faire.

Cela présuppose, au premier abord, qu'il ait contrefait un programme d'ordinateur protégé par le droit d'auteur. En effet, le logiciel doit être original et exprimé sous une forme. C'est ainsi que la reprise des fonctionnalités ou du langage de programmation d'un logiciel ne peut être qualifiée de contrefaçon, car la reproduction d'un élément non protégé par le droit d'auteur est licite.

De plus, si le logiciel n'est pas original125(*), il ne peut être couvert par le régime de la propriété littéraire et artistique. Dans ce cas, la reprise d'éléments comme le code source ou le code objet ne pourra aucunement caractériser la contrefaçon. En outre, il n'y a pas de contrefaçon lorsque les ressemblances entre deux logiciels résultent du hasard.

Dans la même idée, la contrefaçon des droits patrimoniaux ne peut être caractérisée lorsque le logiciel est tombé dans le domaine public. En effet, les droits patrimoniaux sur un logiciel sont limités dans le temps puisqu'ils durent soixante-dix ans après la mort de l'auteur. Dès lors, à l'expiration de ce délai, n'importe qui est en droit de reprendre des éléments du logiciel anciennement protégés par le droit d'auteur.

Aussi, la contrefaçon ne peut-elle être caractérisée lorsque le droit d'auteur est épuisé sur un territoire. « Conformément au concept d'épuisement, le titulaire perdra son droit de contrôler toute revente ou commercialisation subséquente du support matériel sur lequel l'oeuvre est fixée. Par contre, ses autres droits, comme le droit exclusif d'autoriser la reproduction de l'oeuvre sur un autre support, le droit d'adapter l'oeuvre ou ses droits moraux, ne seront pas affectés »126(*). De fait, il ne peut y avoir violation du droit de distribution du logiciel lorsque l'auteur l'a déjà mis en circulation dans un État de l'UEMOA.

Au second abord, cela suppose que le contrefacteur ait aussi agi sans l'autorisation de l'auteur du logiciel. En fait, le titulaire des droits d'auteur dispose du droit de les exploiter ou d'autoriser leur exploitation par autrui. En conséquence, il n'y a pas contrefaçon si l'auteur avait autorisé l'exploitation de son logiciel ou s'il avait cédé les droits d'exploitation au tiers poursuivi pour contrefaçon.

Dans la même logique, la contrefaçon ne saurait être constatée lorsque l'autorisation de l'auteur ou du titulaire n'était pas nécessaire. À ce titre, une transformation nécessaire à l'utilisation du programme d'ordinateur, notamment en cas de correction des erreurs de programmation, ne peut constituer de contrefaçon.127(*) C'est aussi le cas lorsque la reproduction du logiciel est faite aux fins de copie-sauvegarde.

B : Les actes matériels de contrefaçon

Les actes matériels de contrefaçon nuisent directement au monopole d'exploitation accordé à l'auteur du logiciel. Sous ce prisme, constitue une contrefaçon toute atteinte faite au droit moral ou au droit patrimonial de l'auteur.

Nous l'avons vu, les droits moraux comportent le droit à la paternité et au respect de l'oeuvre, le droit de divulgation, le droit de repentir ou de retrait et le droit d'accès. Tout acte qui porte atteinte à l'une de ces prérogatives est constitutif de contrefaçon.

Cela dit, « dans le domaine du droit d'auteur, l'atteinte au droit moral concerne des hypothèses marginales »128(*). Par exemple, la divulgation d'un logiciel sans le consentement de l'auteur est un acte de contrefaçon. Ainsi, la mise sur le marché d'un programme, alors même que le créateur s'y oppose, caractérise la contrefaçon129(*). De même, la modification, l'altération, la suppression ou la dissimulation du nom de l'auteur du logiciel protégé ou de tout autre signe distinctif qu'il utilise pour désigner son oeuvre porte atteinte au droit de paternité de l'auteur et constitue un acte de contrefaçon. En ce sens, les juges retiennent que la modification du nom de l'auteur d'une oeuvre, sans autorisation, est un acte de contrefaçon130(*).

S'agissant des droits patrimoniaux, la reproduction d'un logiciel peut constituer un acte de contrefaçon. L'appréciation de la reproduction revêtant un caractère technique, la juridiction saisie désigne généralement un expert chargé de comparer les logiciels. Ce dernier devra déterminer si les logiciels sont identiques, c'est-à-dire si l'un dérive de l'autre131(*) ; la reproduction devant s'apprécier en tenant compte des ressemblances et non des dissemblances existant entre les logiciels.132(*)

De ce fait, la fixation, la numérisation, la mémorisation ou le stockage du logiciel sur tout support, en vue de rendre le logiciel accessible ou de le communiquer au public notamment sur les réseaux de communication électronique, constitue un acte de contrefaçon. Cela inclut, entre autres, le téléchargement illicite du logiciel sur internet133(*), la copie servile ou quasi servile du code source d'un programme d'ordinateur134(*) ainsi que l'installation concomitante du même exemplaire d'un logiciel sur plusieurs ordinateurs différents. En ce sens, l'utilisation d'un logiciel sur un ordinateur, sans en avoir acquis les licences d'utilisation, est également un acte de contrefaçon135(*). De même, la copie d'une partie du code source du logiciel constitue un acte de contrefaçon.

La transformation du logiciel d'un logiciel peut être qualifiée de contrefaçon. Ainsi l'adaptation, l'arrangement ou la traduction non autorisée d'un logiciel peut caractériser la contrefaçon. C'est ce que rappelle la CJUE : « l'adaptation ou la transformation du code sous lequel une copie de programme d'ordinateur a été fournie constitue une atteinte aux droits exclusifs de l'auteur, sans aucune précision quant à l'origine, contractuelle ou autre, de cette atteinte.136(*) »

La commercialisation d'un programme d'ordinateur peut être sanctionnée comme contrefaçon. En effet, les auteurs du logiciel disposent du droit exclusif d'en effectuer et d'en autoriser la distribution, la location ou le prêt à titre onéreux ou gratuit. De ce fait, la vente, la location ou le prêt d'un logiciel, sans le consentement de l'auteur, peut être qualifiée de contrefaçon, et ce même si les logiciels sont authentiques. C'est ainsi que la cour de Cassation française qualifie de contrefaçon la mise sur le marché français de logiciels authentiques, régulièrement importés du Canada, lorsque ceux-ci étaient exclusivement destinés au marché canadien137(*).

De même lorsque l'auteur, après avoir céder ses droits d'auteurs, procède toujours à la vente en ligne du logiciel. Mais, dans ce cas de figure, le demandeur devra rapporter la preuve que les ventes illégales ont été réalisées après ladite cession. Le Tribunal de commerce a rejeté la demande en contrefaçon d'une société éditrice de logiciels, au motif que le demandeur avait fourni les copies d'écran d'un site internet non actualisé, lequel ne pouvait aucunement établir que les ventes étaient postérieures à la cession138(*).

En outre, certains actes peuvent être assimilés à de la contrefaçon. Il s'agit notamment de :

- l'apposition frauduleuse, sur un logiciel quelconque, du nom d'un auteur qui ne l'a point réalisé ou bien de tout signe distinctif qu'il utilise pour désigner ses créations ;

- L'importation, l'exportation, la vente et, plus généralement, la mise en circulation de logiciels contrefaits ;

- La neutralisation des mesures techniques de protection installées sur le logiciel ;

- La fourniture de moyens devant servir à la contrefaçon ;

- Le fait de laisser reproduire dans son établissement un logiciel protégé par le droit d'auteur.

Paragraphe 2 : Les sanctions civiles de la contrefaçon de logiciel

Les sanctions de la contrefaçon, au plan civil, tendent à « l'obtention de la réparation des dommages » infligés à l'auteur du logiciel, c'est-à-dire faire en sorte que le dommage n'ait jamais existé et rétablir la situation antérieure139(*). À cet effet, le juge est assez libre d'ordonner une réparation en équivalent (A) ou une réparation en nature (B).

A : La réparation en équivalent

Conformément à l'article 146 de la loi ivoirienne 140(*)sur le droit d'auteur, la personne responsable d'un acte constitutif ou assimilable à la contrefaçon a l'obligation de réparer le préjudice qu'il fait subir à l'auteur. Pour ce faire, le juge condamne le contrefacteur au paiement de dommages et intérêts. Ce mode de réparation, qui est d'ailleurs le principe en droit ivoirien, est privilégié en matière de contrefaçon141(*).

L'auteur est tenu de prouver un préjudice résultant de la violation de son droit patrimonial (préjudice matériel) ou de son droit moral (préjudice moral) sur sa création.

De plus, il doit quantifier ce préjudice. Cette opération de quantification est plus simple s'agissant du préjudice matériel, car dans cette hypothèse, car le préjudice résulte de données objectivement mesurables comme la perte subie ou le gain manqué. C'est pourquoi le chiffrement du préjudice moral semble une tâche plus ardue car « il est généralement difficile de chiffrer une atteinte, par exemple, au respect de l'oeuvre142(*). » La solution est donc de retenir un montant qui semble juste.143(*)

En tout état de cause, c'est au juge que revient la mission d'évaluer le montant des dommages et intérêts. À ce sujet, l'article 147 de la loi susvisée dispose : « Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : - les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subie par la partie lésée ; - le préjudice moral cause à cette dernière ; - et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l'atteinte aux droits. » De plus, le montant intègre également les frais occasionnés par l'acte de violation, y compris les frais de justice.

Dans le droit commun de la responsabilité, les dommages-intérêts sont bornés par le principe de la réparation intégrale du préjudice, exprimé dans cette formule : tout le dommage, rien que le dommage. En d'autres termes, la réparation n'est pas de nature punitive et n'a pas vocation à enrichir la victime.

Mais, il en va autrement s'agissant de l'action en contrefaçon. En effet, on constate, au vu des éléments cités par le législateur ivoirien, que les dommages et intérêts prennent l'apparence « d'amendes privées144(*) ». Certes, leur fonction réparatrice est conservée, mais ils vont au-delà. En fait, ils visent également à sanctionner le contrefacteur à travers la réduction du bénéfice réalisé au moyen de la contrefaçon.

Il est évident que l'idée est de rendre plus efficace la sanction civile de la contrefaçon, en rendant moins lucratif l'exercice des activités illicites du contrefacteur. En effet, limiter la sanction civile à la seule réparation du préjudice n'est pas assez dissuasif, car le contrefacteur de logiciel pourrait gagner beaucoup d'argent avec la contrefaçon. C'est pourquoi il est judicieux de restreindre le bénéfice qu'il pourrait tirer de son activité, afin de le décourager. Par conséquent, le montant des dommages-intérêts pourra excéder celui qui commanderait la seule réparation du préjudice.

B : La réparation en nature

En sus des dommages-intérêts, le juge peut ordonner une réparation en nature. Elle peut prendre diverses formes, mais il est toujours question « de faire cesser la contrefaçon à l'avenir, mais aussi de décourager le contrefacteur, tout en réparant le préjudice du titulaire des droits145(*). » En fait, le contrefacteur devra cesser la reproduction ou la distribution illicite du logiciel. À titre d'illustration, le juge peut le condamner, sous astreinte, à retirer le logiciel de son établissement, ou bien du site internet où il était illicitement téléchargeable.

Dans la même logique, la confiscation des objets contrefaisants est prononcée dans tous les cas. Bien que qualifiée de sanction pénale dans la loi sur le droit d'auteur, cette mesure n'est pas pour autant une peine146(*). En effet, elle n'est pas liée à l'action publique, puisqu'elle peut être prononcée dans tous les cas. Il nous semble que sa nature découle de son objectif : la cessation de la contrefaçon pour l'avenir.

Sous ce rapport, elle se rapproche de la confiscation, mesure de police, et peut donc être prononcée par le juge civil. Ainsi, celui-ci, lorsqu'il constate la contrefaçon, doit ordonner la confiscation des supports contenant le logiciel contrefait ou bien des recettes engendrées par la contrefaçon.

En outre, il peut ordonner confiscation du matériel ayant permis la contrefaçon. En ce sens, le juge prononçait la confiscation des ordinateurs ayant servi à la contrefaçon des programmes d'un jeu vidéo147(*).

Notons pour conclure que le juge peut ordonner, aux frais du contrefacteur, la publication et l'affichage de la décision. « La publication peut être effectuée, soit dans la presse grand public, soit dans l'une des revues diffusées à l'usage interne des professions : le choix dépendant de la nature et de la diffusion des objets litigieux.148(*) » Par ailleurs, le juge peut également ordonner la publication de la décision sur le site internet où le logiciel était disponible en téléchargement illicite.

Le législateur ivoirien, en incluant le logiciel dans la catégorie des oeuvres littéraires, permet aux développeurs d'exercer un monopole sur leurs créations, lequel monopole est sanctionné judiciairement. Se pose maintenant la question de l'efficacité de ce régime de protection. Nous proposons, dans le cadre des développements à suivre, de vérifier si le droit d'auteur garantit suffisamment les droits des développeurs et dans quelle mesure l'on pourrait renforcer leur protection.

PARTIE 2 : UNE PROTECTION PERFECTIBLE DES LOGICIELS

La protection du droit d'auteur ne s'étend qu'à la forme d'expression de la création. À ce titre, elle est suffisante s'agissant des oeuvres de l'esprit qui se caractérisent par leur esthétisme. Cependant, elle ne suffit pas à assurer une protection efficace aux oeuvres de nature utilitaire et fonctionnelle (Chapitre 1). C'est pourquoi nous mettrons en exergue des moyens de protection complémentaires, afin de renforcer les droits et intérêts des auteurs de logiciels (Chapitre 2).

Chapitre 1 : Les insuffisances de la protection du logiciel par le droit d'auteur

Les insuffisances de la protection du logiciel par le droit d'auteur se manifestent de plusieurs manières. D'un côté, le système du droit d'auteur ne permet pas, en lui-même, une protection efficace des logiciels. Effectivement, les limites internes du droit d'auteur réduisent l'efficacité de la protection des auteurs de logiciels (Section 1). De l'autre côté, certaines exceptions aux droits d'exploitation ont comme effet de fragiliser les droits des auteurs de programmes informatiques (Section 2).

Section 1 : Les limites internes du droit d'auteur et la protection des logiciels

On parle de limite interne lorsqu'un droit est borné par sa définition elle-même, ou dans certains cas par la nature des choses. En d'autres termes, les limites internes sont consubstantielles au droit lui-même ou bien à l'objet auquel il s'applique, contrairement aux limites externes qui résultent de l'intervention d'un autre droit149(*).

Le droit d'auteur, bien qu'aboutissant à l'attribution d'un droit privatif au créateur, diffère cependant des autres modes de protection privative. En effet, contrairement à ces derniers dont l'existence est attestée par un titre, le droit d'auteur n'est soumis à aucune condition de forme. D'où il découle que le créateur a l'obligation de prouver ses droits. L'on est alors fondé à douter de l'existence d'une réelle protection a priori des auteurs de logiciels (Paragraphe 1). En plus, le droit d'auteur, s'agissant des logiciels, ne protège que leur aspect littéraire, excluant de fait leur aspect fonctionnel (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'inexistence d'une réelle protection a priori des auteurs de logiciel

Par protection a priori, nous entendons un système de protection dont l'existence et la portée sont certaines. Cela implique que tous connaissent l'existence de cette protection, en conséquence de quoi le bénéficiaire n'a pas l'obligation de prouver son existence devant les magistrats. La charge de la preuve pèse dès lors sur celui qui entend contester l'existence de ce droit, comme c'est le cas en droit des brevets. Cependant, le droit d'auteur est réputé exister sans formalités de publication, donc sans que son existence soit communiquée au tiers (A). De ce fait, il doit être prouvé judiciairement par le créateur lors d'une action en contrefaçon (B).

A : L'absence de publicité du droit de l'auteur de logiciel

« Contrairement à une idée solidement implantée chez le profane, l'oeuvre de l'esprit n'a pas à être déposée pour être protégée150(*) ». En effet, conformément à l'article 5.2 de la convention de Berne, la jouissance et l'exercice du droit d'auteur ne sont subordonnés à aucune formalité. Ces droits naissent au profit de l'auteur dès la création du logiciel. Ce que rappelle la loi ivoirienne 151(*)sur le droit d'auteur.

Il s'agit là d'une « différence irréductible152(*) » entre le droit d'auteur et le copyright. En matière de copyright, l'auteur qui souhaite défendre son logiciel doit l'avoir déposé au préalable auprès de l'US Copyright Office153(*). Mais, en matière de droit d'auteur, le créateur peut exercer une action en contrefaçon, quand bien même il n'aurait pas déposé son logiciel auprès du BURIDA. De fait, l'auteur ne se retrouve point pénalisé si, d'aventure, il élude ces formalités154(*). Inversement, aucune formalité ne peut attribuer le droit d'auteur. En conséquence, l'apposition des mentions  « (c) » ou « tous droits réservés » est sans incidence sur l'existence ou non des droits d'auteur sur le logiciel.

D'un côté, l'absence de formalités obligatoires, comme c'est le cas en matière de brevet, présente l'avantage de faciliter l'accès d'un plus grand nombre de logiciels à la protection, en épargnant les auteurs des obligations pécuniaires et non pécuniaires qui découleraient d'une demande de protection.

D'un autre côté, le fait que le droit d'auteur existe et soit opposable à tous sans aucune formalité de dépôt ou de publicité n'est pas dépourvu d'inconvénients pour les programmeurs. L'absence d'exigence formelle rend aléatoire la preuve de la qualité de créateur ainsi que de la date de création.

En premier lieu, l'exercice des droits sur le logiciel est fondamentalement lié à la qualité d'auteur. De ce fait, il est impérieux pour le créateur d'apporter la preuve de cette qualité, surtout lorsque l'oeuvre n'est pas divulguée sous son nom. Dans pareil cas, l'auteur sera tenu de fournir au juge des preuves de la qualité qu'il revendique. Mais, dans bien des cas, celles-ci ne suffisent point à fonder la conviction du juge. « Ces dernières années, de plus en plus de décisions de justice ont débouté des demandeurs de leurs actions en contrefaçon au motif qu'ils n'apportaient pas la preuve de leur qualité de titulaire des droits. Les magistrats ont également été de plus en plus stricts dans l'application des dispositions légales et des présomptions issues de la jurisprudence lorsqu'il s'agissait d'établir la titularité des droits. 155(*) »

À titre illustratif, les preuves constituées à soi-même ne suffisent point à établir la qualité d'auteur ; de même, des factures ne comportant aucun renseignement sur les caractéristiques de l'oeuvre n'établissement nullement la qualité d'auteur ; aussi, une attestation, dès lors qu'elle est contestée, n'est pas suffisante à démontrer qu'une personne est bien l'auteur d'une oeuvre156(*).

En second lieu, cette situation pose des difficultés en ce qui concerne la détermination de la date de création ou, du moins, d'existence157(*) du logiciel. Pour diverses raisons, il peut être nécessaire d'imputer une date certaine à la réalisation d'un logiciel. Substantiellement, dans une instance en contrefaçon, la question de l'antériorité est toujours sous-entendue, puisque la contrefaçon implique, au préalable, une oeuvre antérieure à contrefaire.

Dès lors, que ce soit pour le calcul de la durée de protection de ses droits patrimoniaux ou surtout pour examiner l'antériorité de sa création par rapport à une autre158(*), l'auteur a un intérêt immense à accorder une date d'existence certaine à son logiciel.

Or, cela ne peut se faire que par un dépôt159(*) . Mais, le droit d'auteur étant attribué sans formalisme, il peut être « parfois délicat d'apporter la preuve du moment exact de la création160(*). » En cas de copie, l'auteur aura du mal à prouver l'antériorité de son logiciel.

B : La nature défensive du droit d'auteur

Il s'agit d'un corollaire de l'absence de formalités de dépôt. En effet, contrairement aux droits de propriété industrielle dont l'existence et le contenu sont garantis par l'autorité administrative, le droit d'auteur est confirmé par l'autorité judiciaire. En effet, seuls les juges ont pouvoir de décréter l'originalité ou l'absence d'originalité d'une oeuvre.

De ce fait, « le créateur du logiciel n'aura de certitude sur la portée de ses droits qu'en cas de survenance de litige.161(*) » En d'autres termes, avant la consécration contentieuse du droit d'auteur, le programmeur exploite une oeuvre dont on ne sait, à vrai dire, si elle est protégée ou pas. Il peut donc exploiter un logiciel qui, en réalité, n'est pas protégé.

Seul le succès de l'action en contrefaçon taira toutes incertitudes quant à la protection par le droit d'auteur. Malheureusement, un tel système soumet l'auteur de logiciel aux méandres de l'aléa judiciaire. Il est clair qu'un procès constitue un océan d'incertitudes et d'imprévus, car « l'on ne peut jamais préjuger de la décision qui sera rendue par le ou les magistrats, saisis de votre dossier, quand ces derniers statuent à juge unique ou en collégiale, comme c'est le cas pour la plupart des procédures »162(*).

Ainsi, plane constamment sur les auteurs, et ce jusqu'à l'avènement d'une décision de justice définitive, la possibilité que leur création soit exclue du rayon de la propriété littéraire et artistique. Ce risque est d'autant plus renforcé que l'originalité, en ce qui concerne les programmes informatiques, est extrêmement difficile à prouver. À ce titre, le fait que le logiciel apporte une solution particulière à la gestion d'un problème n'établit pas son originalité163(*). Dans la même logique, la supposée créativité des algorithmes et des fonctionnalités d'un logiciel, ne suffit pas à établir l'originalité d'un programme d'ordinateur164(*). En outre, un rapport d'expert non contradictoire ne peut établir l'originalité d'un logiciel165(*).

De plus, l'examen de la jurisprudence française donne de constater que cette notion est examinée avec sévérité par les juges. L'imputation de charge de la preuve de l'originalité aux auteurs de logiciel apparaît éminemment préjudiciable pour la sauvegarde de leurs droits. La protection de leurs intérêts rend donc nécessaire l'instauration par le législateur ivoirien d'une présomption d'originalité des créations logicielles, laquelle « sera attestée du fait de l'existence même du logiciel, preuve de l'activité de l'auteur.166(*)» Effectivement, il s'agit de la seule sécurité véritable : une présomption simple d'originalité qu'il appartiendrait au défendeur de combattre167(*) ; ce qui réduirait un tant soit peu le caractère imprévisible de la protection par le droit d'auteur.

En définitive, nous avons démontré que le système du droit d'auteur accorde une protection à l'existence et à la portée incertaines, ce qui résulte de ce que le droit d'auteur est, par essence, non formaliste. Mais il ne faut pas occulter que son objet est également limité.

Paragraphe 2 : La non-protection de l'aspect fonctionnel des logiciels

De l'examen de la jurisprudence, il ressort que les fonctionnalités du logiciel, mais aussi les algorithmes et le langage de programmation, ne sont pas protégés par le droit d'auteur. Si la non-protection des algorithmes et du langage de programmation nous semble peu préjudiciable aux droits des auteurs de logiciels en ce qu'il s'agit a priori de caractères et de formules connus et utilisés par tous, il en va autrement relativement aux fonctionnalités. Alors, nous montrerons les fondements de cette exclusion (A), avant d'exposer son caractère préjudiciable pour les auteurs de logiciels (B).

A : Le rejet de la protection des fonctionnalités des logiciels

En ce qui concerne les programmes d'ordinateur, Une fonctionnalité est une fonction intégrée dans un système informatique qui permet à l'utilisateur d'effectuer une opération spécifique. Elle désigne les résultats qu'un programme d'ordinateur est susceptible d'atteindre, sa capacité à effectuer une tâche précise. Plus que n'importe quelle autre oeuvre, un programme d'ordinateur est caractérisé par son aspect fonctionnel. C'est, pour l'utilisateur final, l'élément décisif dans la définition du logiciel. Par exemple, Microsoft Office Word est un logiciel de traitement de texte ; Microsoft Office Excel est un tableur ; Adobe Premiere Pro est un programme de montage de vidéos.

Il est alors logique de s'interroger sur la possibilité d'une protection des fonctionnalités d'un logiciel, au même titre que le logiciel lui-même. La tentation est grande de répondre par l'affirmative, puisque les fonctions des programmes résultent principalement d'un code informatique.

Mais, la jurisprudence s'est toujours montrée défavorable à la protection des fonctionnalités d'un logiciel par le droit d'auteur. À cet égard, le Tribunal de grande instance de Paris affirmait : « seule la forme du programme (c'est-à-dire l'enchaînement des instructions) peut être protégé [et] que les fonctionnalités en tant que telles ne sont protégeables168(*) ». La Cour de cassation a confirmé cette position en retenant que les fonctions d'un logiciel « ne bénéficient pas, en tant que telles, de la protection par le droit d'auteur dès lors qu'elles ne correspondent qu'à une idée169(*) ».

Les fonctionnalités sont ainsi classées au rang d'idées et de concepts, ce qui empêche leur protection par le droit d'auteur. De ce fait, le créateur d'un logiciel ne jouit pas d'un droit privatif en vertu duquel il pourrait interdire à un tiers de développer le même type de logiciel « sous une autre forme et sous une autre structure170(*) ».

Insistant sur le risque que constituerait, pour le secteur informatique, l'octroi du droit sur les fonctionnalités, la CJUE a souligné qu'« admettre que les fonctionnalités d'un programme d'ordinateur puissent être protégées par le droit d'auteur reviendrait à offrir la possibilité de monopoliser les idées, au détriment du progrès technique et du développement industriel171(*) ». Au final, l'absence de protection des fonctionnalités du programme ne fait plus aucun doute. La cour d'appel de Montpellier l'a justement rappelé : « les fonctionnalités ne sont pas protégées par le droit d'auteur172(*) ». Cette situation est préjudiciable pour les auteurs de logiciels.

B : Le caractère préjudiciable de l'absence de protection des fonctionnalités

Bien qu'à certains égards, la non-protection des fonctionnalités des logiciels informatiques soit compréhensible, elle n'en demeure pas moins préjudiciable pour les créateurs de programmes d'ordinateurs. En effet, l'intérêt du logiciel repose, pour l'essentiel, dans la palette de fonctions qu'il est à même d'effectuer. Ainsi, les programmeurs apportent-ils un soin tout particulier au codage de fonctionnalités innovantes, ce qui les démarque de leurs concurrents. Cela est d'autant plus visible s'agissant des logiciels spécifiques173(*). Ces derniers, par essence, n'ont pas vocation à être reproduits, puisqu'ils sont conçus dans l'optique de répondre à un problème spécifique et précis.

Malheureusement, le droit d'auteur n'apporte aucune protection à ces fonctionnalités, de telle sorte que l'innovation des programmeurs n'est point valorisée. Concrètement, n'importe qui pourrait reproduire l'ensemble des fonctionnalités d'un programme d'ordinateur, pour peu qu'il n'ait pas eu accès à son code source ou objet. Or, « pour cela, il suffit à un informaticien d'analyser le comportement d'un logiciel puis d'en élaborer un clone [et,] dans cette hypothèse, la copie aura sensiblement les mêmes fonctionnalités que le logiciel imité tout en ayant des codes différents »174(*). C'est ce que constatait la CJUE dans un arrêt de 2012 : « WPL n'a pas eu accès au code source du programme de SAS Institute et n'a pas réalisé de décompilation du code objet de ce programme. Grâce à l'observation, à l'étude et au test du comportement du programme de SAS Institute, WPL a reproduit la fonctionnalité de celui-ci en utilisant le même langage de programmation et le même format de fichiers de donnée175(*)», ce qui lui a permis de créer un produit similaire. À ce sujet, « il ne serait pas illogique de trouver opportun que des entreprises confectionnent, dans le but d'obtenir une position concurrentielle sur le marché, des produits similaires à ceux qui réussissent.176(*) »

Mais l'imitation de logiciel est manifestement encouragée, puisque conformément à l'article 31 alinéa 2 de la loi ivoirienne 177(*)sur le droit d'auteur, « l'utilisateur légitime d'un programme d'ordinateur peut, sans l'autorisation de l'auteur, observer, étudier ou tester le fonctionnement de ce programme afin de déterminer les idées et les principes qui sont a la base de n'importe quel élément du programme d'ordinateur, lorsqu'il effectue toute opération de chargement, d'affichage, d'exécution, de transmission ou de stockage du programme d'ordinateur qu'il est en droit d'effectuer ». Dès lors, l'auteur d'un logiciel ne peut s'opposer à ce que son logiciel soit décortiqué, selon la méthode du « clean room ».

Cela crée une concurrence injuste dans la mesure où l'imitateur reprend les fonctionnalités propres à un logiciel, et ce en profitant d'un coût de réalisation nettement moindre. Une protection efficace des auteurs de logiciel exigent également la sécurisation du comportement du logiciel, car « la seule protection des codes informatiques n'est pas suffisante au regard des risques de piratage178(*) ».

C'est pourquoi certains auteurs recherchent dans le brevet d'invention une protection suffisante des programmes d'ordinateur. En effet, le droit des brevets a l'avantage de protéger plus efficacement l'aspect utilitaire du logiciel179(*). A ce sujet, Le Royaume-Uni et le Japon, entre autres, admettent la brevetabilité des logiciels informatiques.

Le droit européen, bien qu'opposé à la brevetabilité des logiciels en tant que tels, admet une protection exceptionnelle au profit des logiciels produisant un effet technique et industriel. Il en va de même en droit ivoirien. En effet, l'article premier de l'annexe 1 de l'ABR180(*) dispose que la brevetabilité est impossible lorsqu'elle concerne le logiciel en lui-même. A contrario, cela est possible lorsque le logiciel est intégré à une invention. Dans cette hypothèse, le brevet en recouvrant l'invention entière, protège également le logiciel.

Section 2 : La mise à mal des développeurs de logiciels par le droit d'auteur

La loi ivoirienne 181(*)sur le droit d'auteur, à certains égards, fragilise les droits des auteurs de logiciels salariés (Paragraphe 1) et constitue un frein à l'innovation (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La fragilisation des droits du développeur salarié

Sous l'empire de l'ancienne loi ivoirienne (1996) sur le droit d'auteur, le contrat de travail en vertu duquel untel serait tenu de créer un logiciel ne bouleversait aucunement pas les règles de titularité. En fait, les auteurs d'un logiciel de commande ou d'un logiciel créé suivant contrat de travail conservaient en principe leurs droits patrimoniaux. C'est ainsi que dans un arrêt de 2014, le tribunal de commerce d'Abidjan avait retenu la qualité de coauteur d'un informaticien ayant concouru à la conception du logiciel EASY PHARMA sur la base d'un contrat de commande, au motif que, l'existence d'un contrat de travail ou de louage ne bouleversant aucunement les droits d'auteur, la rémunération perçue par l'informaticien ne pouvait avoir comme conséquence de lui faire perdre sa qualité d'auteur182(*).

Cependant, la loi ivoirienne de 2016 sur le droit d'auteur apporte un bouleversement majeur et désavantageux pour le programmeur salarié (B). Désormais, les droits patrimoniaux sur un logiciel créé en vertu d'un contrat de travail entrent de plein droit dans l'escarcelle de l'employeur (A).

A : La transmission automatique des droits patrimoniaux du programmeur salarié

La loi ivoirienne sur le droit d'auteur prévoit un régime dérogatoire, relativement à la titularité des droits économiques sur un logiciel créé dans le cadre d'un contrat de travail.

Dans un premier temps, il convient de rappeler que les auteurs restent titulaires de droits moraux sur le logiciel créé dans le cadre du contrat. En effet, comme nous le rappelions plus haut, ces derniers, étant attachés à la personnalité de l'auteur, sont par conséquent inaliénables. De fait, le contrat de travail ne peut avoir comme effet leur transfert au patron. On le constate, ce n'est pas ici que repose la dérogation, puisqu'il en va de même pour les autres oeuvres de l'esprit.

Le particularisme du régime des logiciels créés dans un cadre contractuel se trouve au niveau des droits patrimoniaux. En effet, la titularité des droits patrimoniaux, en vertu de l'article 42 de la loi ivoirienne 183(*)sur le droit d'auteur, est dévolue, sauf convention contraire, à l'auteur, s'agissant des oeuvres traditionnelles. Par conséquent, la pratique, s'agissant des oeuvres autres que les logiciels et base de données, consiste à stipuler des clauses de cession des droits patrimoniaux car à « défaut d'une telle clause prévoyant la cession des droits d'auteur 185(*)» l'auteur conserve les droits de propriété intellectuelle.

Cependant, le contraire est consacré, relativement au logiciel. C'est ainsi que l'article 43 de ladite loi dispose : « les droits patrimoniaux sur un programme d'ordinateur [...] créé par un auteur employé en exécution d'un contrat de travail [...] appartiennent à l'employeur [...], sauf convention contraire. » En d'autres termes, les droits patrimoniaux sur un logiciel créé par un salarié sont légalement dévolus à son employeur.

On peut déduire de cette disposition les deux conditions d'application de la dévolution légale des droits patrimoniaux des auteurs de logiciel salariés. La première, qui coule de source, est l'existence d'un contrat de travail valable et non suspendu186(*) au moment de la création du logiciel.

La seconde, plus absconse, exige que le logiciel ait été créé en exécution du contrat de travail. À notre sens, cette expression a deux implications. Au premier abord, le logiciel doit avoir été réalisé durant le temps de travail du salarié. Le temps de travail se saisit comme le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles187(*). Il s'agit, en clair, du temps pendant lequel le salarié agit effectivement selon les instructions de son patron, et ce, même s'il n'est pas présent sur son lieu habituel de travail et qu'il agit en dehors de ses heures de travail habituelles. Le critère déterminant est que le salarié agisse, pendant cette période, conformément aux directives du patron. En conséquence, un logiciel créé par un salarié sur son temps libre, ne saurait appartenir à l'employeur. Au second abord, la création de logiciel doit être une obligation du contrat de travail. En d'autres termes, le salarié doit être tenu par son contrat de travail de réaliser des programmes informatiques. En effet, l'article 43 n'a vocation à jouer que si le logiciel est créé en exécution d'un contrat du travail188(*). C'est dire que le travailleur doit avoir été recruté à titre de créateur de logiciels et que cela fait partie de ses missions habituelles. De telle sorte qu'un logiciel créé par un travailleur recruté à un autre titre, n'appartient pas à l'employeur189(*).

Une fois réunies les conditions susvisées, les droits patrimoniaux sur le logiciel sont automatiquement transférés à l'employeur. Dès lors, nul n'est besoin de rédiger un contrat spécifique à cet effet ou d'observer un formalisme particulier. Il est alors seul habilité à exploiter économiquement le programme. Une telle situation est véritablement désavantageuse pour l'auteur salarié.

B : Une transmission désavantageuse pour l'auteur de logiciel salarié

Aurélien Bamdé déclarait : « Ab initio, la propriété intellectuelle était destinée à protéger, tant les auteurs, que leurs oeuvres en leur reconnaissant un statut juridique. Aujourd'hui, on a le sentiment que celle-ci passe d'un droit d'auteur à un droit du promoteur. On ne cherche plus à protéger l'auteur en tant que tel, mais un investissement financier.190(*) »

Ce sentiment est confirmé par la dévolution automatique des droits patrimoniaux de l'auteur à l'employeur, mécanisme étranger au domaine de la propriété littéraire et artistique. En effet, le droit d'auteur est axé autour de la personnalité du créateur, de sorte que les droits d'auteur ne devraient appartenir qu'à lui. Et s'il est possible qu'un tiers puisse acquérir les droits patrimoniaux appartenant au créateur, cela ne saurait résulter que de la volonté de ce dernier191(*), l'idée étant toujours de lui assurer une protection. Mais, les auteurs de logiciel ont été exclus de cette protection.

De prime abord, « l'argument que le programmeur soit salarié d'une structure et que ladite dévolution automatique en soit la conséquence souffre de la comparaison avec d'autres régimes soumis au droit commun où le salariat n'a pas pour conséquence juridique la transmission des droits automatiquement l'employeur192(*).» Par exemple, les écrivains employés par une société en vue d'écrire des livres, ne perdent pas de plein droit leurs droits patrimoniaux. Cette dérogation ne vaut que pour les auteurs de programme d'ordinateur.

À la vérité, « la doctrine est unanime sur le fait que la dévolution automatique des droits d'auteurs du salarié auteur d'un logiciel à son employeur était une concession faite par le législateur à l'industrie informatique193(*) ». Ce qui nous paraît d'autant plus crédible que cette dérogation ne concerne pas les fonctionnaires qui sont auteurs de logiciels.

On comprend donc que le législateur ivoirien place les intérêts des investisseurs au dessus de ceux de salariés. Or, ces derniers, parties à un contrat d'adhésion, le contrat de travail, ne peuvent discuter librement les modalités de la dévolution de leur droit. On se rappelle la formule de LACORDAIRE : « entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit. » Mais, paradoxalement, la loi ivoirienne 194(*)sur le droit d'auteur « opprime » le développeur salarié. L'effort intellectuel de ce dernier n'est point valorisé, car, compte tenu de la valeur économique d'un logiciel, « l'auteur ne saurait bénéficier des fruits de sa création qu'au travers de la rémunération découlant de son contrat de travail195(*)» L'employeur se retrouve inévitablement « affranchit », puisqu'il décide de manière potestative d'accorder une rémunération supplémentaire ou non à son salarié.

L'idéal eût été, si l'on tient à maintenir la dévolution automatique des droits du salarié à son employeur, de prévoir, au profit du travailleur, le droit à une rémunération spéciale, distincte du salaire. C'est ce qu'a institué le législateur sénégalais196(*) : « l'employeur qui exploite les droits ainsi cédés doit verser une rémunération distincte du salaire. A défaut d'accord entre les parties, le montant de cette rémunération sera fixé par le tribunal compétent. » Un tel mécanisme a l'avantage d'accorder une rémunération juste et proportionnelle à l'effort intellectuel du salarié, tout en laissant au patron le droit d'exploiter le logiciel. Nous pensons donc qu'il saurait opportun d'instaurer ce droit à rémunération spéciale, dans la loi ivoirienne 197(*)sur le droit d'auteur. En outre, il est également possible d'instituer un régime de répartition des droits patrimoniaux sur le logiciel entre le salarié et le patron.

Paragraphe 2 : Le droit d'auteur, frein au processus de création du logiciel

Un système optimal de protection des auteurs de logiciel exige, paradoxalement, que les droits des auteurs soient tempérés, et ce, afin de stimuler la créativité dans le monde informatique. Cela est d'autant plus vrai que les programmes d'ordinateurs sont rapidement surannés. C'est pourquoi les législations européennes prévoient certaines dérogations spécifiques au logiciel, en vue de ne point entraver les mécanismes de création de logiciels.

Malheureusement, la loi ivoirienne sur le droit d'auteur, en la matière, est éminemment laconique. Elle devient alors une pierre d'achoppement pour les développeurs de logiciels : d'une part, en raison de la durée de protection qui est excessive au regard de l'évolution du monde des logiciels (A) ; d'autre part, à cause du silence du droit ivoirien sur la question de l'interopérabilité (B).

A : Une durée excessive de protection des logiciels

« Le choix d'une durée de protection d'une création intellectuelle se situe entre : -une limite inférieure, en deçà de laquelle il n'est pas utile d'accorder une protection parce qu'elle ne permet pas de rentabiliser l'investissement nécessaire à la création ; -une limite supérieure, au-delà de laquelle il n'est plus nécessaire d'accorder une protection car elle excède la durée de vie technologique ou commerciale de la création.198(*) »

La loi ivoirienne 199(*)sur le droit d'auteur ne prévoit pas une durée de protection spécifique aux programmes d'ordinateur. De ce fait, ceux-ci suivent le même régime que toutes les autres oeuvres de l'esprit. Ainsi, conformément à l'article 47 de la loi ivoirienne 200(*)sur le droit d'auteur, les droits moraux sont perpétuels pendant que les droits patrimoniaux durent pendant la vie de l'auteur et les 70 ans suivant l'année de son décès201(*).

Cette durée est justifiée, s'agissant des créations littéraires et artistiques matérielles, dans la mesure où elle assure la protection des intérêts des auteurs, lesquelles, dans cette hypothèse, durent, par définition, toute leur vie202(*). D'ailleurs, Marc Lévy déclarait : « L'art naît du sentiment, c'est ce qui le rend intemporel ». En conséquence, puisque l'art est intemporel, sa protection l'est également.

Toutefois, la durée de protection des oeuvres de l'esprit est excessive et inadaptée aux programmes informatiques. En effet, elle est calquée sur celle des oeuvres matérielles, alors qu'elles ont des cycles d'évolution différents. Dans le domaine des technologies de l'information, l'innovation se produit à un rythme effréné. Et, le logiciel qui est révolutionnaire aujourd'hui peut devenir obsolète en quelques années seulement. Dès lors, la durée de protection prévue par le législateur ivoirien est « nettement disproportionnée par rapport à la durée de vie économique des logiciels 203(*)».

Une telle protection est inutile pour l'auteur. Mais elle constitue en plus une véritable barrière à l'entrée pour les nouveaux développeurs. Les petites entreprises et les startups, qui sont souvent à l'origine d'innovations disruptives, peuvent avoir du mal à rivaliser avec les grandes entreprises qui détiennent les droits exclusifs sur les logiciels depuis des décennies. Ainsi, ces logiciels pionniers constituent une entrave au développement de nouveaux logiciels d'autant qu'en retardant l'entrée des logiciels dans le domaine public, on ralentit le secteur informatique, car l'on oblige les développeurs à réinventer la roue plutôt que de réutiliser des codes d'anciens logiciels.

C'est donc pourquoi il nous paraît nécessaire de rééquilibrer la durée de protection en matière de programme d'ordinateur. Une période plus courte permettrait, tout en assurant le retour sur investissement des créateurs, de retirer un frein au développeur.

Cependant, une telle opération est loin d'être aisée. En fait, en vertu de l'article 7 de la convention de Berne, « la durée de la protection accordée par la présente Convention comprend la vie de l'auteur et cinquante ans après sa mort. » Or, aux termes de l'article 123 de la Constitution ivoirienne : « les traités ou accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque traité ou accord, de son application par l'autre partie. » De fait, il apparaît impensable de prévoir une dérogation propre aux logiciels par le truchement d'une loi.

En l'état actuel du droit, l'unique palliatif serait de modifier la définition légale du logiciel, afin de le faire basculer la catégorie d'oeuvre des arts appliqués. Effectivement, « rien n'empêche de qualifier le logiciel d'oeuvre des arts appliqués, car chaque État a le droit d'adopter la définition légale qui lui convient pour chaque oeuvre.204(*) » Il suffirait de rajouter à la définition légale : les programmes d'ordinateurs sont considérés comme des oeuvres des arts appliqués. Ainsi, la durée de protection basculerait à 25 années, ce qui reste relativement superfétatoire, mais est nettement moindre que la durée normale de protection.

Ayant examiné la question du délai de protection, nous passons à présent à celle de l'interopérabilité.

B : Le silence du droit ivoirien relativement à l'interopérabilité

Un programme d'ordinateur n'est pas destiné à évoluer en autarcie. Alors, il est dans l'intérêt des auteurs de développer un programme compatible avec un ou plusieurs autres logiciels, en ceci que, de nos jours, les systèmes informatiques sont de plus en plus interconnectés. Par exemple, les plateformes de commerce électronique intègrent dans leur application divers systèmes de paiement en ligne. Cela permet aux commerçants d'accepter divers moyens de paiement, selon les préférences de leurs clients, ce qui n'est possible qu'en raison de la compatibilité entre le logiciel de commerce électronique et le programme de paiement électronique.

C'est pourquoi il est nécessaire « de faire parler ces systèmes entre eux, en échangeant des données et des messages.205(*) » On parle alors d'interopérabilité. Elle consiste à permettre à des applications, des plateformes, des systèmes ou des composants différents de se connecter et d'échanger des données entre eux, en clair « de se parler »206(*). Dans un arrêt de 2011, la Cour de cassation définissait cette notion comme « la capacité d'échanger des informations et d'utiliser mutuellement les informations échangées 207(*)».

Cela suppose que le développeur puisse accéder directement aux données des logiciels avec lesquelles il souhaite établir une connexion. Toutefois, en pratique, « le code source n'est pas toujours disponible et l'équipe de développement d'origine a disparu depuis longtemps 208(*)». D'autant qu'en droit ivoirien, les auteurs de logiciel n'ont pas l'obligation légale de rendre leurs logiciels interopérables.

Ainsi, dans l'hypothèse où « l'interopérabilité n'est pas prévue à la conception du logiciel ou que l'auteur ou éditeur ne donne pas accès aux informations essentielles à sa mise en oeuvre »209(*), il est indispensable de permettre aux programmeurs de procéder à l'ingénierie inverse du logiciel. À cet effet, certaines législations prévoient une exception de décompilation210(*) aux fins d'interopérabilité. La décompilation est une opération de transformation de la forme du code d'un programme impliquant une reproduction, même partielle et provisoire, de ce code, ainsi qu'une traduction de la forme de celui-ci. Elle  permet généralement d'obtenir non pas le code source original, mais une troisième version du programme concerné appelée « quasi-code source », qui pourra à son tour être compilée en un code objet

L'article 36 de la loi camerounaise sur le droit d'auteur dispose : « Le titulaire du droit d'auteur ne peut interdire au détenteur légitime d'un logiciel [...] de procéder à la décompilation, c'est-à-dire de reproduire et de traduire ce logiciel, lorsque ces actes permettent d'obtenir les informations nécessaires pour réaliser un logiciel compatible avec ce dernier ou avec un ou plusieurs autres logiciels. » C'est également ce que prévoit l'article L122-6-1 du code français de propriété intellectuelle : « La reproduction du code du logiciel ou la traduction de la forme de ce code n'est pas soumise à l'autorisation de l'auteur lorsque la reproduction ou la traduction au sens du 1° ou du 2° de l'article L. 122-6 est indispensable pour obtenir les informations nécessaires à l'interopérabilité d'un logiciel créé de façon indépendante avec d'autres logiciels ».

En droit ivoirien, conformément à l'article 17 de l'annexe 7 de l'ABR211(*), la décompilation n'est autorisée que lorsqu'elle est nécessaire à l'utilisation d'un programme ou à sa sauvegarde. Toutefois, l'article 17 ne fait aucune mention de l'interopérabilité. De telle sorte que le développeur qui procède à la décompilation d'un logiciel aux fins d'interopérabilité commet en réalité un acte de contrefaçon. En conséquence, il existe un risque de création de systèmes fermés auxquels les nouveaux logiciels ne seront point en mesure de se lier.

Nous avons mis en exergue les insuffisances du droit d'auteur en ce qui concerne la protection des programmes informatiques. Il nous paraît maintenant opportun de présenter des méthodes destinées à consolider les droits des auteurs de logiciel.

Chapitre 2 : Les moyens de consolidation des droits des auteurs de logiciels

Comme expliqué dans le chapitre ci-dessus, la protection conférée par le droit d'auteur comporte certaines failles, lesquelles failles peuvent empêcher, à certains moments, les auteurs de faire valoir leurs droits, d'autant plus que la mise en oeuvre du droit d'auteur peut se montrer ardue.

Heureusement, les auteurs de programmes d'ordinateur disposent de quelques moyens en mesure de consolider leur protection. La première série de moyens vise à renforcer la sécurisation offerte par le droit d'auteur : il s'agit de moyens complémentaires (Section 1). Quant à la seconde série de moyens, elle permet de couvrir des aspects du logiciel qui ne sont pas dans le giron de la propriété littéraire et artistique : il s'agit de moyens de protection supplémentaires (Section 2).

Section 1 : Les moyens complémentaires de consolidation du droit d'auteur

Les mécanismes complémentaires de consolidation du droit d'auteur s'ajoutent au droit d'auteur pour en augmenter l'efficacité. En pratique, l'application du droit d'auteur peut se heurter à certaines difficultés. Par exemple, la difficulté de prouver la paternité du développeur sur le logiciel, ou même les limites découlant des droits des utilisateurs du logiciel. Afin de surmonter ces obstacles, les auteurs de programme d'ordinateur peuvent mettre en oeuvre des mécanismes d'ordre privé. Nous faisons allusion au constat de la création du logiciel par un commissaire de justice (Paragraphe 1) et à la licence d'utilisation du logiciel (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La constatation de la création du logiciel par un commissaire de justice

Au chapitre précédent, nous avions montré les difficultés que posait l'absence de titre en matière de protection par le droit d'auteur. Nous soulignions comment cette situation pouvait complexifier la preuve de la qualité d'auteur ainsi que de la date de création du programme d'ordinateur. Et, pour cette raison, quand bien même la formalité du dépôt est facultative et non attributive d'un droit exclusif, les programmeurs ont un intérêt certain à « déposer » leur logiciel.

En première instance, l'on a pensé à déclarer le logiciel auprès du BURIDA, unique société de gestion collective des droits d'auteur en Côte d'Ivoire. Mais, cette société semble principalement s'attacher à la protection des droits des artistes. De plus, comme le juge ivoirien le soulignait, le dépôt d'un logiciel au BURIDA ne peut que conférer une date certaine à la création du logiciel, sans jamais pouvoir servir de preuve de la paternité du logiciel212(*).

C'est pourquoi, dans cette subdivision, nous porterons l'accent sur la constatation de la création du logiciel par un commissaire de justice, réalisée au moyen d'un procès-verbal (A), puis sur les avantages de ladite constatation (B).

A : Le procès-verbal constat de création d'un logiciel

Prouver sa qualité d'auteur d'un programme d'ordinateur « implique une double démarche cumulative consistant respectivement à établir la création par des actes concrets et puis démontrer que lesdits actes lui reviennent en propre et ne sont pas le fait d'une tierce personne213(*).» En clair, le développeur doit démontrer au magistrat l'existence, à une période donnée, d'un programme d'ordinateur, mais il doit également prouver qu'il est à l'origine de l'acte créateur de ce programme d'ordinateur. Plus concrètement, cela revient à rapporter la preuve de ce qu'il a écrit le code source du logiciel.

Pour faciliter la production de cette preuve, l'auteur du logiciel peut requérir un constat de commissaire de justice. En effet, conformément à la loi portant statut des commissaires de justice, cet officier ministériel a compétence pour réaliser, à la requête de particuliers, des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de faits ou de droit qui peuvent en résulter214(*). C'est dire que le commissaire de justice peut dresser un constat de tout fait juridique, lorsqu'il en est requis.

Dès lors, étant entendu que l'acte de création d'un programme d'ordinateur relève du fait juridique, il peut être constaté par un commissaire de justice.

Nous tenons à préciser que ces constatations devront porter sur le processus de création, et non seulement sur le résultat de ce processus215(*). De plus, elles doivent avoir cours sur le lieu de création du logiciel afin que le procès-verbal puisse déployer son plein et entier effet. De ce fait, l'envoi sous pli du code source à un commissaire de justice ne peut valablement renforcer la protection des auteurs de logiciels.

Cela dit, le développeur devra faire constater au commissaire de justice les différents éléments qui attestent son acte de création. Ces éléments sont généralement conservés sur des ordinateurs. Le commissaire de justice dressera donc un procès-verbal de constat de fichiers informatiques, en prenant soin d'indiquer l'adresse IP des ordinateurs.

L'auteur devra alors présenter à l'officier ministériel, dans un premier temps, les programmes source et objet du logiciel. En outre, il devrait également montrer au commissaire de justice la version exécutée du logiciel ; cela peut être utile pour montrer son comportement et son apparence. Ainsi, le commissaire de justice pourra constater l'existence du programme d'ordinateur.

Dans un second temps, le développeur devra présenter au commissaire de justice le matériel de conception préparatoire du logiciel, notamment déposer toute documentation technique associée au logiciel, telle que des spécifications, des schémas de conception, des diagrammes UML, etc. En effet, constater que ces derniers sont présents sur l'ordinateur du programmeur peut suffire à relier le logiciel au développeur.

En bref, le développeur devra exposer tous les documents attestant qu'il a créé le logiciel au commissaire de justice. Quant à ce dernier, il en dressera procès-verbal conformément aux exigences légales.

Toutefois, n'occultons pas que ledit procès-verbal ne sera pas créateur des droits d'auteur sur le logiciel. Le principe de l'absence de formalités demeure. Cependant, les constatations réalisées par un commissaire de justice présentent un certain avantage pour les auteurs de logiciels.

B : Les avantages de la constatation de la création du logiciel

L'intérêt du procès-verbal de constat de création d'un fichier informatique est purement probatoire. Il représente une précaution que doit prendre l'auteur de programme d'ordinateur afin de faciliter l'exploitation de ses droits. En effet, par ce moyen, le développeur se préconstitue une preuve de sa paternité sur le logiciel ainsi que de l'antériorité de son programme ; ce qui est le point focal des débats dans une instance en contrefaçon216(*).

En plus, contrairement à la déclaration auprès d'une société de gestion collective, le procès verbal dressé par un commissaire de justice constitue un acte authentique217(*). Le caractère authentique sourd des nombreuses précautions entourant le dressement du procès verbal et de la qualité de son rédacteur. C'est pour cette raison que le législateur confère à ce genre d'acte une force probante supérieure à celle de n'importe quelle autre sorte d'actes de même qu'à celle de n'importe quelle autre sorte de preuve218(*). A ce sujet, l'article 2 de la loi portant statut des commissaires de justice précise, à propos des constatations purement matérielles des commissaires de justice, qu'elles font foi jusqu'à preuve du contraire. En fait, « l'acte authentique fait preuve irréfutable jusqu'à ce qu'il soit contredit par une procédure spéciale appelée inscription en faux.219(*)» Outre cette procédure spéciale, l'acte authentique s'impose au juge, tant qu'il respecte le formalisme requis par la loi. En d'autres termes, les débats ne peuvent s'orienter que sur la légalité de l'acte authentique, et non sur sa véracité.

Ce mode de preuve accorde donc plus de sécurité juridique à l'auteur, en cela même qu'il est difficilement contestable. En effet, la partie adverse n'a que deux options : soit établir que le procès-verbal est irrégulier en la forme ; soit démontrer qu'il s'agit d'un faux. Quant au contenu du procès verbal, il fait foi. La constatation de l'acte de création du logiciel par le commissaire de justice ne peut donc être remise en cause.

En plus, les actes authentiques ont une date certaine. C'est dire qu'à partir de la date du procès verbal, l'existence du logiciel ne pourra plus être contestée. Par conséquent, prouver l'antériorité de son logiciel devient plus aisé, ce qui renforce la protection des auteurs de logiciel lors d'une demande en contrefaçon.

Par ailleurs, le dressement d'un procès verbal est une opération relativement rapide. En effet, la réalisation d'un constat est une procédure relativement simple et accessible. Il suffit de préparer les documents puis de requérir le ministère d'un commissaire de justice. En comparaison, pour déclarer une oeuvre au BURIDA, il faut être associé de cette société, laquelle adhésion nécessite la qualité d'auteur d'une oeuvre, une décision d'admission du directeur général du BURIDA, la signature d'un contrat d'affiliation et la souscription d'une part sociale du BURIDA.

En somme, la réalisation d'un constat de création de programme d'ordinateur est une formalité facultative, mais qui revêt une importance cruciale pour les développeurs de logiciels en ce qu'elle permet principalement de prouver plus facilement leur paternité sur le logiciel au cours d'un procès. Mais, en dehors des questions probatoires, nous notons également la nécessité de préciser et limiter les droits des utilisateurs de logiciels ; ce qui est possible avec une licence d'utilisation.

Paragraphe 2 : La licence220(*) d'utilisation du logiciel

Baptisés généralement conditions générales d'utilisation ou contrat de licence de logiciel, le contrat de licence d'utilisation n'est pas habituel en matière de droit d'auteur221(*). D'ailleurs, les textes applicables en Côte d'Ivoire n'abordent pas le régime juridique de cet instrument. Ceux-ci ne visent que la licence d'exploitation de droits d'auteurs ou concession des droits d'auteurs. Or, le contrat de licence d'utilisation, objet de cette subdivision, bien que s'apparentant à un contrat de concession, n'emporte pas de réelles concession de droits222(*). De plus, il ne contient pas d'obligation d'exploitation commerciale, élément essentiel du contrat de concession. Alors, se pose la question de la qualification juridique de la licence d'utilisation de logiciel. Selon la CJUE, le régime juridique du contrat de licence informatique tient de la vente223(*). Mais, cette analyse nous paraît peu séduisante, d'autant plus si l'on considère l'augmentation du nombre de logiciels SaaS. À notre sens, la licence de logiciel constitue un contrat sui generis, dont l'objet est d'organiser l'utilisation d'un logiciel.

Ce paragraphe est dédié à l'analyse des clauses que peut insérer l'auteur du logiciel afin de renforcer ses droits d'auteur. Certaines portent sur la limitation des droits des utilisateurs (A) ; d'autres sur le contrôle de l'utilisation du logiciel (B).

A : La limitation des droits de l'utilisateur du logiciel

Le contrat de licence de logiciel doit préciser, en premier lieu, la nature des droits dont jouit l'utilisateur. À cet égard, la convention doit rappeler qu'elle n'emporte pas cession des droits donnés en jouissance à l'utilisateur, de telle sorte que l'auteur demeure propriétaire de l'entièreté du logiciel. La clause pourrait être stipulée comme suit : La licence d'utilisation du logiciel n'entraîne pas le transfert des droits propriété au profit de l'utilisateur. Le logiciel reste la propriété de son auteur quels que soient la forme, le langage, le support du programme et la langue utilisée.

Le contrat devrait également régler la question de l'exclusivité ou non de la licence. Dans la plupart des contrats de licence, la licence accordée à l'utilisateur est non exclusive224(*). De plus, la licence doit indiquer si elle est simultanée ou non simultanée. La licence est non simultanée lorsqu'elle n'autorise l'installation du logiciel que sur un seul ordinateur. Au contraire, la licence est simultanée quand elle autorise l'installation du programme sur plusieurs ordinateurs. Dans cette dernière hypothèse, il peut être utile de fixer un nombre maximum d'ordinateurs. L'on pourrait rédiger la clause ainsi : L'utilisateur jouit d'un droit personnel d'utilisation du logiciel, non exclusif et non simultané.

Par ailleurs, la licence doit également préciser la durée de l'autorisation d'utilisation du logiciel ainsi que la rémunération de l'auteur du logiciel.

Dans un second temps, la licence d'utilisation doit indiquer tous les actes dont l'accomplissement est prohibé. Il s'agit généralement des actes qui portent directement atteinte aux droits patrimoniaux ou moraux de l'auteur, ou de ceux qui sont destinés à contourner les mesures techniques de protection qu'il a érigées.

La licence doit rappeler que l'utilisateur n'est pas en droit, que ce soit personnellement ou par le moyen d'un intermédiaire, de reproduire, modifier, divulguer, distribuer ou décompiler le logiciel ; et que l'utilisateur a l'interdiction formelle de supprimer toutes indications relatives à la paternité de l'auteur du logiciel.

En outre, le contrat de licence doit interdire à l'utilisateur de réaliser un test de résistance, un test de pénétration ou un balayage de vulnérabilité du logiciel, ou publier ou divulguer l'un des résultats de ces activités ou d'autres données de performance du logiciel.

Enfin, la licence doit aménager, autant que faire se peut, les exceptions que la loi ivoirienne 225(*)sur le droit d'auteur et l'annexe 7 de l'ABR226(*) ont apportées au droit de l'auteur de logiciel. À cette fin, l'auteur peut se réserver le droit de réaliser toute adaptation nécessaire à l'utilisation du programme, notamment la correction d'anomalies dans le fonctionnement du logiciel. Autrement dit, même dans l'hypothèse où la modification du logiciel est nécessaire à son utilisation, l'utilisateur ne sera pas autorisé à y procéder. La clause pourrait se présenter comme suit : L'auteur se réserve, à titre exclusif et gratuit, le droit de corriger toute anomalie dans le fonctionnement du logiciel remis à l'utilisateur.

S'agissant de la réalisation d'une copie de sauvegarde du logiciel, l'article 17 de l'annexe 7 de l'ABR227(*) met l'accent sur le caractère unique, gratuit, mais surtout nécessaire de cette copie de telle sorte que l'auteur, en fournissant une copie de son logiciel, pourrait contractuellement s'opposer la réalisation d'une copie-sauvegarde par l'utilisateur. C'est ce que retient le juge : « dès lors qu'il a reçu du vendeur une copie de sauvegarde, fût-elle unique et protégée contre les reproductions, l'acheteur est rempli de ses droits »228(*).

En outre, l'auteur peut également intégrer une clause de confidentialité dans la licence d'utilisation de son programme ainsi qu'une clause limitative de responsabilité.

La licence d'utilisation limite les droits de l'utilisateur sur le logiciel, renforçant ainsi la protection du logiciel par le droit d'auteur. S'agissant d'un contrat, le non-respect des stipulations de la licence peut engager la responsabilité contractuelle de l'utilisateur. Par ailleurs, elle permet également de contrôler l'utilisation du logiciel.

B : Le contrôle de l'utilisation du logiciel

Par contrôle, nous entendons exprimer les moyens par lesquels le développeur peut vérifier les conditions d'utilisation de son logiciel et la conformité de cette utilisation aux stipulations contenues dans le contrat de licence de logiciel. C'est une opération importante pour l'auteur, en ceci qu'elle permet de constater les violations éventuelles des conditions générales d'utilisation plus rapidement.

À cette fin, « nombre d'éditeurs incluent dans leur contrat de licence une clause d'audit de conformité. 229(*)» Cette clause permet à l'auteur du logiciel de vérifier la conformité de l'utilisation du logiciel aux dispositions légales et stipulations du contrat de licence. Mais, il est préférable que cette opération soit réalisée par un professionnel indépendant, accepté par les deux parties. Cela confèrera au rapport d'audit un caractère contradictoire.

Lorsque l'expert note des écarts entre les droits accordés à l'utilisateur et l'utilisation qu'il en fait réellement, l'auteur du logiciel est alors fondé soit à résilier le contrat, soit à réclamer des paiements « supplémentaires correspondant à l'utilisation effective du logiciel, parfois accompagnées de pénalités pour utilisation abusive et non autorisée du logiciel, et/ou facturation des frais d'audit à la société.230(*) »

La clause d'audit peut être ainsi rédigée : « Dans le cas où le Client refuserait d'activer les dispositifs visés ci-dessus ou de fournir une telle déclaration, Sage pourra procéder à un audit sur Site. Dans l'hypothèse où Sage déciderait de diligenter un audit sur site, les frais de ce dernier seront pris en charge par Sage.

Toutefois dans l'hypothèse où les conclusions de l'audit révéleraient un usage non-conforme aux droits acquis par le Client : les frais de l'audit seront mis à la charge du Client, un complément de redevances sera facturé au Client par Sage, le cas échéant de manière rétroactive en fonction du Mode de commercialisation du Progiciel, au tarif public en vigueur à la date de facturation, une pénalité d'un montant de cinquante pour cent (50 %) du complément de redevance précité sera facturée par Sage.

Par ailleurs, en cas d'utilisation par le Client d'une fonction ou d'une option pour laquelle il n'a pas acquis de droits, Sage facturera le Client pour le complément de redevances conformément au prix public en vigueur au jour de la facturation.231(*) »

D'ailleurs, dans le souci d'éluder les frais requis par un audit, l'auteur du logiciel peut insérer dans la licence une clause de suivi de l'utilisation. Celle-ci a pour effet de permettre à l'auteur d'inclure dans son programme une fonctionnalité chargée de collecter et communiquer au développeur certaines informations d'utilisation afin de vérifier et exécuter les mises à jouer, et s'assurer du respect par l'utilisateur des obligations contractuelles.

En somme, la licence d'utilisation permet aussi à l'auteur du logiciel de contrôler l'utilisation faite par le titulaire de la licence, renforçant ainsi la protection par le droit d'auteur. Cela étant, les auteurs ont également la possibilité de consolider leurs droits en employant des moyens supplémentaires de protection.

Section 2 : Les moyens supplémentaires de protection des auteurs de logiciels

La propriété littéraire et artistique ne s'attache qu'à l'aspect littéraire du logiciel. Or, en réalité, d'autres aspects du programme d'ordinateur méritent également d'être sécurisés. Par exemple, il est primordial de protéger la notoriété de son logiciel, ou même le comportement de son programme d'ordinateur. Dans ce but, l'auteur du logiciel peut mettre en oeuvre des moyens supplémentaires de protection. Les moyens supplémentaires de protection des auteurs de logiciels sont destinés à couvrir des aspects du logiciel qui ne sont pas protégeables par le droit d'auteur. Deux mécanismes semblent se démarquer : le droit des marques (Paragraphe 1) et le droit de la concurrence (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le droit des marques, moyen de sécurisation de la notoriété du logiciel

Aux termes de l'article 2 de l'annexe 3 de l'ABR232(*), la marque est tout signe visible ou sonore utilisé ou que l'on se propose d'utiliser et qui est propre à distinguer les produits ou services d'une personne physique ou morale. Le logiciel, en tant que produit233(*), peut être protégé par le droit des marques. Nous montrerons dans ce paragraphe comment peut être constituée une marque de logiciel (A) et quels sont les effets qui y sont attachés (B).

A : La constitution de la marque de logiciel

La constitution de la marque est subordonnée, dans un premier temps, à des conditions de fond. En effet, la marque, pour être valable, doit être distinctive, disponible, licite et non déceptive.

L'article 3 de l'annexe 3 de l'ABR234(*) ne donne pas de définition positive de la distinctivité de la marque. Ce texte illustre simplement cette notion en précisant qu'une marque « est dépourvue de caractère distinctif notamment du fait qu'elle est constituée de signes ou d'indication constituant la désignation nécessaire ou générique du produit ou la composition du produit ». D'abord, selon Ida JIAZET, par désignation nécessaire, il faut comprendre « un signe dont on a besoin pour nommer les produits ou les services désignés par la marque, dès lors qu'il n'en existe pas d'autre pour désigner d'une manière aussi précise ou aussi concise les produits en question.235(*) » Par exemple, les termes « Software », « logiciel », « progiciel », ne sauraient être déposés comme marque. Ensuite, par désignation générique, l'on entend le signe qui définit non pas un produit ou le service en cause, mais la catégorie, l'espèce ou le genre, auquel appartient ce produit ou service236(*). Par exemple, les vocables « Antivirus », « Logiciel de gestion » ou « Logiciel Comptable » ne saurait constituer des marques valables. Enfin, les signes descriptifs sont des signes qui définissent, indiquent ou évoquent l'objet en cause dans sa nature, dans ses propriétés ou dans ses qualités237(*).

La marque doit être aussi disponible. C'est dire qu'elle ne doit pas être identique à une marque déjà enregistrée pour la commercialisation de logiciels ou une marque notoire, ni ne doit présenter de ressemblance avec une telle marque au point de comporter un risque de confusion ou de tromperie. Par exemple, l'on ne saurait déposer les termes « Microsoft » ou « Mycrosoft ». De même, la marque n'est pas valable quand elle reproduit, imite ou contient parmi ses éléments des armoiries, drapeaux ou autres emblèmes, abréviation ou sigle ou un signe ou poinçon officiel de contrôle et de garantie d'un Etat ou d'une organisation intergouvernementale créée par une convention internationale, sauf autorisation de l'autorité compétente de cet Etat ou de cette Organisation.

En plus, la marque doit être licite. Autrement dit, elle ne doit pas être contraire à l'ordre public ou aux bonnes moeurs.

Par ailleurs, la marque ne doit pas être déceptive. Une marque est déceptive quand elle est susceptible d'induire en erreur le public ou les milieux commerciaux, notamment sur l'origine géographique, la nature ou les caractéristiques des produits ou services considérés. Par exemple, le terme « E-santé » ne saurait être utilisé pour désigner un logiciel d'archivage.

Dans un second temps, la constitution de la marque exige le respect de formalités. Il s'agit du dépôt suivi de l'enregistrement de la marque238(*).

Pour être propriétaire d'une marque, il faut présenter une demande d'enregistrement ou, en d'autres termes, la déposer. Cette formalité peut être accomplie suivant la voie du dépôt direct, et, dans ce cas, la demande est déposée directement à l'OAPI ou transmise par voie postale ; ou par la voie du dépôt indirect, auquel cas la demande est déposée ou adressée par pli postal au ministère chargé de la propriété industrielle.

Le dossier d'enregistrement comprend la demande d'enregistrement comportant les mentions obligatoires (Formulaire M301) ; la pièce justificative du versement à l'Organisation de la taxe de dépôt ; un pouvoir sous seing privé, sans timbre, si le déposant est représenté par un mandataire ; le document de priorité le cas échéant ; enfin, dans le cas d'une marque collective, le règlement d'utilisation.

Le déposant, dans la demande, doit notamment indiquer les produits auxquels s'applique la marque (en l'occurrence un logiciel) ainsi que leurs classes conformément à l'arrangement de Nice. En l'espèce, c'est la classe 9 qui correspond aux « logiciels ». Cela dit, si le logiciel en lui-même est un produit, il peut impliquer également des services annexes. Il convient alors d'étendre la marque aux classes 38 (Services de télécommunications) et 42 (conception et développement d'ordinateurs et de logiciels).

Après le dépôt, le dossier d'enregistrement est examiné par l'OAPI afin d'examiner sa régularité tant au fond qu'en la forme. En cas d'irrégularité, notification est faite au déposant. Un délai de trois mois leur est alors accordé aux fins de régularisation. Ce délai peut être prolongé de 30 jours sur demande justifiée du déposant ou de son mandataire. À l'expiration de ce délai, toute demande non régularisée est rejetée par décision du directeur général de l'OAPI. Le déposant dispose d'une voie unique de recours, la saisine du Conseil Supérieur de Recours.

Si la demande est régulière, le déposant se voit attribué un certificat d'enregistrement, lequel certificat est publié. Dès lors, il jouit d'un monopole sur la marque.

B : Les effets de la marque de logiciel

Conformément à l'article 6.1 de l'annexe 3 de l'ABR239(*), l'enregistrement de la marque confère à son titulaire le droit exclusif d'utiliser la marque, ou un signe lui ressemblant, pour les produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée, ainsi que pour les produits ou services similaires. Autrement dit, le titulaire de la marque jouit d'un monopole d'exploitation sur celle-ci. Mais, « ce monopole ne porte que sur la marque déposée240(*) ». C'est dire qu'il ne s'étend pas au logiciel en lui-même, mais uniquement sur les signes qui l'identifient.

En toute bonne logique, le droit exclusif d'utiliser la marque de logiciel a comme corollaire celui d'en empêcher l'utilisation par un tiers. À ce propos, le titulaire de la marque dispose de deux actions : l'opposition à l'enregistrement et l'action en contrefaçon.

L'opposition est adressée à l'OAPI, dans un délai de 6 mois à compter de la publication du certificat d'enregistrement, et permet au titulaire de faire radier l'enregistrement d'une marque identique ou similaire à la sienne.

Le titulaire a aussi qualité pour exercer l'action en contrefaçon de marque. Elle permet de sanctionner judiciairement les agissements portant atteinte aux droits du titulaire de la marque de logiciel. Ces agissements peuvent se résumer à quatre pratiques : la reproduction, l'imitation et l'apposition de la marque d'autrui ainsi que la contrefaçon par usage.

La contrefaçon par reproduction est la copie identique ou quasi-identique de la marque afin de désigner des produits ou services similaires à ceux désigné dans le certificat d'enregistrement de la marque. En clair, il y contrefaçon par reproduction d'une marque « lorsqu'un signe reproduit, sans modification, ni ajout, tous les éléments constituant la marque, ou lorsque, considéré dans son ensemble, il recèle des différences si insignifiantes qu'elles peuvent passer inaperçues aux yeux d'un consommateur moyen241(*) ». Dans un arrêt de 2009, le Tribunal de Grande Instance de Paris déclarait qu'en « (...) installant les logiciels Excel, Outlook, Powerpoint, Word et Access appartenant à la société Microsoft Corporation sans son autorisation et faisant apparaître sur l`écran de l`ordinateur le signe Microsoft, la société Sarl Inos Innovation Nouvelle Des Ordinateurs et Systèmes a commis des actes de contrefaçon par reproduction de la marque "MICROSOFT"242(*) ».

La contrefaçon par imitation suppose de choisir « un signe proche d'une marque protégée pour identifier des produits identiques ou similaires à celle-ci de telle sorte qu'il en résulte un risque de confusion du public243(*). » Au contraire de la reproduction, l'imitation est un signe qui rappelle la marque authentique, sans pour autant lui être identique. Le tribunal de Grande instance de Paris « a condamné Microsoft pour contrefaçon de marque et a ordonné la cessation de l'exploitation de la dénomination "la boussole du net" sur le site internet encarta.msn.fr ainsi que dans les CD-Rom de l'encyclopédie Encarta. En effet, une autre marque "netboussole" correspondant à un logiciel appartenant à la société Samaris avait été déposée antérieurement244(*). »

La contrefaçon par apposition consiste en l'utilisation frauduleuse par un tiers d'une marque authentique afin de désigner ses produits ou les objets de son commerce. Dans cette hypothèse, la marque n'est pas reproduite ou imitée par le contrefacteur. Elle est authentique, mais apposée sur un produit autre que celui émanant du titulaire de la marque ou sans l'autorisation de ce dernier. L'on peut prendre comme illustration l'apposition d'une marque de logiciel sur une copie contrefaisante ou sur un logiciel différent de celui commercialisé par le titulaire de la marque.

La contrefaçon par usage est l'utilisation, à des fins commerciales, d'une marque frauduleusement apposée, reproduite ou imitée. Elle concerne au-delà de la marque produite ou imitée, tout usage non autorisé d'une marque authentique. En ce sens, la Cour d'appel de Paris a condamné l'association 112 Academy à payer des dommages et intérêts à titre de contrefaçon de marque, motif pris de ce que : « --?fait usage de la marque 'Rescue code' sur son site internet, dont le nom de domaine est 'www.112rescuecode.webs.com', ainsi que sur sa page Facebook, intitulée www.facebook.com/112academy, --?utilise également l'appellation 'Rescue code' pour distribuer son propre produit, à savoir le bracelet muni d'un QR code contenant les informations sur l'état de santé de son porteur.245(*) »

Par ailleurs, la contrefaçon de marque peut s'ajouter à la contrefaçon du logiciel lui-même, augmentant de ce fait le montant de l'indemnisation. Et, outre le paiement de dommages-intérêts, la juridiction ordonne généralement la cessation de l'exploitation illicite de la marque.

Paragraphe 2 : Le droit de la concurrence, moyen de protection non privatif du logiciel

Le droit de la concurrence sanctionne, outre les pratiques anticoncurrentielles et restrictives de concurrence, la concurrence qui s'accomplit de manière déloyale. En effet, « toute concurrence n'est pas permise et doit être sanctionnée la concurrence qui s'avérerait excessive et non loyale.246(*) » Ainsi, afin d'obtenir la sanction de certains agissements déloyaux, l'on peut exercer une action en concurrence déloyale (A) ou en parasitisme (B).

Le fondement de ces actions repose sur les articles 1382 et 1383 du Code civil relatifs la responsabilité civile délictuelle, ce qui suppose la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux. Dès lors, l'on peut recourir au droit de la concurrence, chaque fois qu'une violation du droit d'auteur ne peut être invoquée. Par ailleurs, ces demandes, bien que pouvant être adjointes à la demande en contrefaçon, doivent néanmoins découlées de faits distincts de la contrefaçon247(*).

A : L'action en concurrence déloyale

Le droit de la concurrence déloyale est une création d'origine jurisprudentielle qui sanctionne les manquements à la morale économique dans les rapports de concurrence248(*). En effet, toutes les formes de concurrences ne sauraient être tolérées. À cet égard, la concurrence déloyale désigne un « ensemble de procédés commerciaux contraires à la loi ou aux usages, constitutifs d'une faute intentionnelle ou non de nature à causer un préjudice aux concurrents249(*) ».

Sous ce rapport, elle se distingue de la pratique commerciale déloyale qui est interdite par l'article 60 de la loi n°2016-412 du 15 juin 2016 relative à la consommation, et se saisit comme une pratique contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qui altère, ou est susceptible d'altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.

Comme mentionné supra, la concurrence déloyale constitue une faute civile, laquelle « s'apprécie in abstracto par rapport à un modèle d'éthique des affaires250(*) ». À ce sujet, l'on identifie généralement quatre comportements : le dénigrement, l'imitation, la désorganisation de l'entreprise d'un concurrent et la désorganisation du marché.

Nous mettrons, dans le cadre de notre étude, l'accent sur l'imitation. L'imitation constitue un procédé déloyal par le truchement duquel un concurrent vise à usurper le succès d'une entreprise en créant une confusion dans l'esprit de la clientèle. L'objectif final est de profiter de la notoriété d'un concurrent et de détourner une partie de la clientèle251(*).

L'imitation fautive peut porter sur les signes distinctifs ou sur les produits eux-mêmes. Ainsi, les auteurs de logiciels peuvent exercer une action en concurrence déloyale lorsqu'un concurrent met en place un logiciel similaire au leur. Cela étant, l'examen des ressemblances porte sur des éléments non protégés par le droit d'auteur, qu'ils soient non protégeables ou non originaux.

En ce sens, le TGI de paris a condamné pour concurrence déloyale un concurrent qui commercialisait un logiciel similaire à un autre. Les juges retenaient en substance : « S'il ne peut être octroyé un monopole à la société AppiMédia, sur ce type de jeux en ligne et sur l'ergonomie de l'application contenant des fonctionnalités habituelles et communes, il n'en demeure pas moins que la présentation de chacune des applications est sans nécessité particulière, similaire (...). En effet, il est repris un procédé certes différent mais assurant la gratuité du jeu et le financement de la cagnotte, une même fréquence de loteries (par jour, semaine, mois et spéciale), une ergonomie proche, traduisant une démarche volontaire afin de ressembler à l'application développée initialement et caractérisant un comportement fautif contraire aux usages des affaires et générant un risque de confusion dans l'esprit de l'internaute, qui sera amené à associer les applications concurrentes.252(*) » L'arrêt souligne que la similitude entre les logiciels ne doit pas être nécessaire, c'est-a dire dictée par des impératifs techniques ou les tendances actuelles.

S'agissant du préjudice, l'examen de la jurisprudence permet de conclure qu'il se déduit de la faute253(*). En effet, même si un détournement de la clientèle ne peut être prouvé notamment par une diminution du chiffre d'affaires, la concurrence déloyale entraîne toujours un trouble commercial générant un préjudice, fût-il seulement moral254(*).

En somme, l'action en concurrence déloyale peut permettre aux auteurs de logiciels de protéger leurs intérêts. Mais ils peuvent également agir en concurrence parasitaire.

B : L'action en parasitisme

En biologie, le parasite est un être vivant qui tire les substances nutritives d'un être vivant d'une autre espèce (appelée hôte), sur lequel cette association a généralement un effet négatif. Dans le langage courant, ce vocable renvoie à une personne qui vit aux dépens d'une autre ou de la société. On remarque ainsi que le parasite exploite injustement une autre personne.

Cette idée se ressent également dans la notion juridique de parasitisme. Le parasitisme est le « fait pour un commerçant de chercher à profiter, sans créer nécessairement la confusion, de la réputation d'un concurrent ou des investissements réalisés par celui-ci.255(*) » Concrètement, « l'entreprise parasite cherche à utiliser pour son propre profit le succès commercial, la notoriété ou les investissements intellectuels d'autrui.256(*) »

À l'examen, l'on constate que les juridictions combinent généralement la concurrence déloyale et le parasitisme. D'ailleurs, « à l'origine, le parasitisme était considéré par la jurisprudence comme une forme de concurrence déloyale »257(*). Mais, il convient de souligner que ces notions ne sont pas en tous points identiques. La principale différence est que le parasitisme peut être constaté, même lorsque les commerçants n'ont pas de rapport de concurrence258(*), alors que la concurrence déloyale présuppose ce rapport de concurrence.

Cependant, à la vérité, la concurrence déloyale peut se superposer au parasitisme. C'est ce qu'affirmait la Cour de cassation dans un arrêt de 1999 : «  le comportement parasitaire est un acte de concurrence déloyale lorsqu'il concerne, comme en l'espèce, des entreprises en situation de concurrence259(*) ». En d'autres termes, les agissements parasitaires sont également des faits de concurrence déloyale, quand les acteurs entretiennent un rapport concurrentiel.

Les juges ont pu indemniser des éditeurs de logiciels, au motif que leurs logiciels avaient été « parasités ». Ainsi, dans un arrêt de 2018, la cour de Cassation a retenu que la Cour d'appel, tout en rejetant la contrefaçon , avait prononcé, à bon droit, une condamnation pour parasitisme en présence de logiciels au comportement similaire : « Attendu que, relevant que les ressemblances constatées entre les logiciels en présence, relatives aux spécifications fonctionnelles générales ainsi qu'à la présentation des écrans, à leur contenu et à leur séquencement, avaient pour origine les nombreuses captures d'écran du logiciel TSM, l'arrêt retient que de tels actes caractérisent une appropriation du savoir-faire de la société 3DSoft réalisée en trompant la confiance de cette dernière, qui a permis aux sociétés Toyota d'éviter de supporter des investissements financiers et un risque économique ; que la cour d'appel, qui n'a pas relevé d'office un moyen de droit nouveau, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision260(*) ». Suivant la même logique, la société canadienne Softimage Inc. a été condamnée pour parasitisme au motif qu'elle avait conçu un logiciel en utilisant le travail et le savoir-faire d'autrui, et que ce détournement lui avait permis de réaliser des économies importantes au détriment des victimes261(*).

Par ailleurs, « Dans un cas d'espèce similaire, par un jugement rendu le 11 avril 2018, le Tribunal de commerce de Versailles a prononcé la condamnation de la société Wanadev pour des pratiques de « concurrence déloyale et parasitaire » après avoir constaté que celle-ci avait utilisé des éléments de design du logiciel « HomeByMe » créé par la société Dassault Systèmes et avait ainsi tiré indûment profit de son investissement financier et intellectuel en concluant un contrat avec ADEO, société avec laquelle Dassault Systèmes se trouvait simultanément en négociations 262(*)». En résumé, l'action en parasitisme peut permettre de combler certains angles morts de la protection des logiciels par droit d'auteur.

CONCLUSION GENERALE

Comme nous le précisions dès l'entame de cette étude, l'objectif de notre mémoire était de déterminer si le droit d'auteur offrait une protection satisfaisante aux auteurs logiciels. En effet, bien plus que toute autre oeuvre de l'esprit, le logiciel laissait planer des doutes quant à l'efficacité et la pertinence de la propriété littéraire et artistique, en raison de sa nature fonctionnelle.

Il est apparu que la propriété littéraire et artistique protégeait expressément les formes d'expression du logiciel, c'est-à-dire le code source et le code objet. Nous avons également démontré que le droit d'auteur pouvait, à certains égards, couvrir les travaux de conception préparatoire, la documentation d'utilisation et l'interface du logiciel. Le législateur ivoirien, en incluant le logiciel dans la catégorie des oeuvres de l'esprit, permet aux développeurs d'exercer un monopole financier et moral sur leurs créations, lequel monopole est sanctionné judiciairement par l'action en contrefaçon.

Mais nous avons pu constater que cette protection comportait certaines insuffisances. D'abord, s'agissant d'une protection privative sans titre, son existence est incertaine d'autant que l'examen de la jurisprudence permet de constater que la preuve des conditions de protection par le droit d'auteur est examinée avec sévérité par les juridictions. Ensuite, les auteurs salariés sont désavantagés dans la mesure où les droits patrimoniaux sur leur logiciel sont automatiquement transférés à l'employeur, sans contrepartie pour ce dernier de leur verser une rémunération compensatrice. Enfin, la durée de protection que prévoit le droit d'auteur est inutilement excessive, compte tenu des exigences du monde informatique, ce qui en fait un frein. Cependant, le désavantage majeur de la propriété littéraire et artistique est qu'elle est limitée quant à son objet. Certes, elle s'applique parfaitement aux éléments littéraires du logiciel, mais elle délaisse complètement les éléments fonctionnels du logiciel alors que ces derniers constituent le principal intérêt d'un programme d'ordinateur.

Tout cela nous a permis de conclure que la protection des auteurs de logiciels, en l'état actuel, était inadaptée et insatisfaisante au regard des exigences du monde informatique. Ce constat a, dès lors, suscité en nous deux réactions.

La première était de proposer des perspectives d'évolution de la loi ivoirienne sur le droit d'auteur. À ce titre, nous avons envisagé que le législateur ivoirien pourrait, à la faveur d'une éventuelle modification législative, prévoir une indemnité obligatoire de transfert des droits patrimoniaux des auteurs de logiciel salariés. De plus, il nous est apparu nécessaire d'instituer une présomption simple d'originalité afin de donner du sens et de la teneur au droit d'auteur. Par ailleurs, nous avons montré qu'en qualifiant le logiciel d'oeuvre des arts appliqués, l'on pourrait réduire la durée de protection manifestement excessive qui est de nature à freiner l'innovation.

Après, la seconde réaction a été de rechercher des méthodes auxquelles pourraient immédiatement recourir les auteurs de logiciels. Elles sont principalement de deux ordres : les méthodes complémentaires et les méthodes supplémentaires.

Nous avons présenté les méthodes complémentaires comme les techniques qui pouvaient combler certaines failles du droit d'auteur, en facilitant ainsi l'exploitation. Il s'agit, en premier lieu, du constat de création de logiciel qui devrait faciliter la preuve de la paternité des créateurs sur leurs créations, au moyen d'un acte authentique. En second lieu, nous avons envisagé la licence comme moyen de renforcer les droits des auteurs par la limitation et le contrôle de leurs obligations ainsi que des droits des utilisateurs.

Par la suite, nous avons montré des méthodes supplémentaires que les auteurs pouvaient employer afin d'étendre la protection de leurs intérêts. Au premier abord, le droit des marques qui protègent la notoriété et l'image du logiciel. Bien qu'il ne porte pas sur le logiciel en lui-même le droit des marques protège indirectement le logiciel, en permettant d'agir contre toutes les copies du logiciel ne provenant pas de l'auteur. Dans ce cas, l'action en contrefaçon de marque se superpose à l'action en contrefaçon de logiciel.

Au second abord, le droit de la concurrence qui, comme des exemples jurisprudentiels français le montrent, peut servir de moyen de protection des éléments du logiciel non protégés par le droit d'auteur. Ainsi, le comportement du logiciel en général, et ses fonctionnalités en particulier, peuvent être protégés par une action en concurrence déloyale et/ou une action en parasitisme. Cependant, ces actions constituent des moyens de protection non privatifs, dont l'efficacité dépend du résultat d'une instance en justice. À ce titre, ils sont également marqués du seau de l'incertitude.

Par conséquent, il ressort que le seul moyen de protéger efficacement les logiciels dans l'espace OAPI en général, et la Côte d'Ivoire en particulier, serait d'autoriser la brevetabilité des fonctionnalités des logiciels, or, en l'état actuel des choses, ces derniers ne sont pas brevetables en tant que tels.

Pour terminer, nous avons conscience que notre étude était orientée du côté des auteurs de logiciels, et nous n'occultons pas qu'elle pourrait être examinée du point de vue des utilisateurs de logiciels, notamment en ce qui concerne la responsabilité des auteurs de logiciels et la gestion des données personnelles des utilisateurs. Mais, à la vérité, nous n'entendions point épuiser la question de la protection des logiciels. D'ailleurs, vu l'immensité du chantier, cela eût été contreproductif. Alors, nous comptons bien clore notre étude sur ces dernières lignes, en laissant à d'autres la mission d'explorer les méandres de ce sujet.

BIBLIORGAPHIE

Législations :

1. Loi n°2016-886 du 08 novembre 2016 portant Constitution de République de Côte d'Ivoire

2. Accord de Bangui instituant une organisation africaine de la propriété intellectuelle, acte du 14 décembre 2015

3. Directive n°02/2018/CM/UEMOA portant harmonisation des dispositions relatives au droit d'auteur et aux droits voisins dans le domaine de l'image au sein de l'UEMOA

4. Loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publié au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016

Ouvrages généraux :

1. H. ABISSA, Droit du travail, Les éditions ABC, Abidjan, 2ème édition, 2021, 555 p.

2. C. ATIAS, Droit civil les biens, LexisNexis Litec, Paris, 11ème édition, 2011, 440 p.

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2. N. ETRANNY, Propriété littéraire et artistique : 111 clés pour comprendre le droit d'auteur, L'Harmattan, 2012, 112 p.

3. I. M. KOUM DISSAKE, La protection des logiciels par le droit des marques dans l'espace OAPI, Éditions universitaires européennes, 2012, 114 p.

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4. G. BOUVIGNE, Brevet et Open source : combiner l'incombinable, mémoire, Université de Strasbourg, 2019.

5. E. DESHOULIERES, Le droit moral de l'auteur sur les oeuvres numériques, mémoire, Université Panthéon-Assas (Paris II), 2006.

6. E. GAILLARD, La protection des programmes d'ordinateurs : comparaison des systèmes européens et étasuniens, mémoire, Université Toulouse I Capitole, 2018.

7. J. LAOUARI, La brevetabilité des logiciels, mémoire, Université de Montréal, 2005.

Ressources du web :

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2. B. SFEZ, B. DELEPORTE, Droits d'utilisation des logiciels : de la nécessaire gestion des licences au sein de l'entreprise, [10 mai 2024]. Lien

3. A. BAMDE, La protection juridique du logiciel créé au sein d'une entreprise, [16 avr. 2024]. Lien

4. N. ARNAUD, La médiation, un moyen d'éviter l'aléa judiciaire, [21 mars 2024]. Lien

5. C. CHAMPAGNER KATZ, La preuve de la qualité d'auteur : un préalable indispensable à l'action en contrefaçon de droit d'auteur, [21 mars 2024]. Lien

6. C. URMAN, Concepteurs de logiciels : savez-vous si votre création est originale ?, [5 févr. 2024]. Lien

7. La Langue Française, Fonctionnalité, [8 févr. 2024]. Lien

8. Dictionnaire Juridique, Logiciel, [8 févr. 2024]. Lien

9. IONOS, Code source : définition et exemples, [8 févr. 2024]. Lien

10. Informatique en Prépas, Quelle est la différence entre un programme et un logiciel ?, [8 févr. 2024]. Lien

11. Business France, Les Logiciels en Côte d'Ivoire, 2020, p.1 [06.06.2024] : Lien

12. Logiciels - Le taux de piratage s'élève à 79% en Côte d'Ivoire, [06.06.2024] : Lien

TABLES DES MATIERES

INTRODUCTION 6

Partie 1 : UNE PROTECTION EXPRESSE DES LOGICIELS 13

Chapitre 1 : L'accès du logiciel à la protection par le droit d'auteur 13

Section 1 : La détermination de l'objet de protection du droit d'auteur 13

Paragraphe 1 : Les éléments protégés en tant que forme d'expression du logiciel 14

A : La programmation du logiciel 14

B : Le matériel de conception préparatoire 16

Paragraphe 2 : Les éléments protégés en tant que partie autonome 17

A : Les éléments littéraires 17

B : L'interface graphique du logiciel 19

Section 2 : Le respect par le logiciel de la condition d'originalité 20

Paragraphe 1 : L'originalité, condition suffisante et nécessaire de protection 20

A : Une condition nécessaire 20

B : Une condition suffisante 22

Paragraphe 2 : L'appréciation de l'originalité en droit ivoirien 23

A : Le caractère unique du logiciel 23

B : Les choix personnels du programmeur 25

Chapitre 2 : Les prérogatives accordées à l'auteur du logiciel 26

Section 1 : L'attribution d'un monopole à l'auteur du logiciel 27

Paragraphe 1 : Les droits extrapatrimoniaux de l'auteur d'un logiciel 27

A : Le droit de communiquer le logiciel au public 28

B : Le droit d'assurer l'intégrité du logiciel 29

Paragraphe 2 : Les droits patrimoniaux ou droits d'exploitation des auteurs de logiciels 30

A : Le droit de commercialisation du logiciel 31

B : Le droit de reproduction du logiciel 32

Section 2 : La défense des auteurs de logiciels par l'action en contrefaçon 34

Paragraphe 1 : La caractérisation du délit civil de contrefaçon 35

A : Le caractère frauduleux de la contrefaçon 35

B : Les actes matériels de contrefaçon 37

Paragraphe 2 : Les sanctions civiles de la contrefaçon de logiciel 39

A : La réparation en équivalent 39

B : La réparation en nature 41

PARTIE 2 : UNE PROTECTION PERFECTIBLE DES LOGICIELS 43

Chapitre 1 : Les insuffisances de la protection du logiciel par le droit d'auteur 43

Section 1 : Les limites internes du droit d'auteur et la protection des logiciels 43

Paragraphe 1 : L'inexistence d'une réelle protection a priori des auteurs de logiciel 44

A : L'absence de publicité du droit de l'auteur de logiciel 44

B : La nature défensive du droit d'auteur 46

Paragraphe 2 : La non-protection de l'aspect fonctionnel des logiciels 47

A : Le rejet de la protection des fonctionnalités des logiciels 48

B : Le caractère préjudiciable de l'absence de protection des fonctionnalités 49

Section 2 : La mise à mal des développeurs de logiciels par le droit d'auteur 51

Paragraphe 1 : La fragilisation des droits du développeur salarié 51

A : La transmission automatique des droits patrimoniaux du programmeur salarié 51

B : Une transmission désavantageuse pour l'auteur de logiciel salarié 53

Paragraphe 2 : Le droit d'auteur, frein au processus de création du logiciel 55

A : Une durée excessive de protection des logiciels 55

B : Le silence du droit ivoirien relativement à l'interopérabilité 57

Chapitre 2 : Les moyens de consolidation des droits des auteurs de logiciels 59

Section 1 : Les moyens complémentaires de consolidation du droit d'auteur 60

Paragraphe 1 : La constatation de la création du logiciel par un commissaire de justice 60

A : Le procès-verbal constat de création d'un logiciel 60

B : Les avantages de la constatation de la création du logiciel 62

Paragraphe 2 : La licence d'utilisation du logiciel 64

A : La limitation des droits de l'utilisateur du logiciel 64

B : Le contrôle de l'utilisation du logiciel 66

Section 2 : Les moyens supplémentaires de protection des auteurs de logiciels 68

Paragraphe 1 : Le droit des marques, moyen de sécurisation de la notoriété du logiciel 68

A : La constitution de la marque de logiciel 68

B : Les effets de la marque de logiciel 71

Paragraphe 2 : Le droit de la concurrence, moyen de protection non privatif du logiciel 73

A : L'action en concurrence déloyale 73

B : L'action en parasitisme 75

CONCLUSION GENERALE 78

BIBLIORGAPHIE 81

TABLES DES MATIERES 85

* 1Horn, François. « II. L'importance croissante des logiciels : la « logicialisation » de l'activité économique et sociale », François Horn éd., L'économie des logiciels. La Découverte, 2007, pp. 24-40.

* 2Ibid.

* 3A. BERTRAND, Le droit d'auteur et les droits voisins, Masson, 1991, p.470.

* 4 Business France, Les Logiciels en Côte d'Ivoire, 2020, p.1 [06.06.2024] : Lien

* 5 Logiciels - Le taux de piratage s'élève à 79% en Côte d'Ivoire, [06.06.2024] : Lien

* 6Informatique en Prépas, Quelle est la différence entre un programme et un logiciel ?, [8 févr. 2024]. Lien

* 7Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. p.8. NNT : 2017PA100195.tel-01896051

* 8Informatique en Prépas, Quelle est la différence entre un programme et un logiciel ?, [8 févr. 2024]. Lien

* 9Article 1 de la de la loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publié au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016.

* 10G. CORNU, Vocabulaire juridique, PUF, 12? Ed, p.824.

* 11I. M. KOUM DISSAKE, La protection des logiciels par le droit des marques dans l'espace OAPI, Éditions universitaires européennes, 2012, p.4.

* 12C. ATIAS, Droit civil les biens, LexisNexis Litec, Paris, 11ème édition, 2011, p.112.

* 13M. VIVANT, J.-M. BRUGUIERE, Droit d'auteur, Dalloz, 2009, p.5.

* 14Macrez, F. (2011). Logiciel : le cumulard de la propriété intellectuelle. In L'articulation des droits de propriété intellectuelle, Dalloz. pp. 47-63.

* 15Ibid.

* 16M. VIVANT, J.-M. BRUGUIERE, op. cit., p. 88.

* 17Franck Macrez. Vers un droit spécifique pour le logiciel ? Retour vers le futur d'une protection amphibie. Christophe Geiger; Matthieu Dhenne. Les inventions mises en oeuvre par ordinateur : enjeux, pratiques et perspectives, LexisNexis, 2019, Collection du CEIPI. ffhal-04105663f

* 18 Franck Macrez. Vers un droit spécifique pour le logiciel ? Retour vers le futur d'une protection amphibie. Christophe Geiger; Matthieu Dhenne. Les inventions mises en oeuvre par ordinateur : enjeux, pratiques et perspectives, LexisNexis, 2019, Collection du CEIPI. ffhal-04105663f

* 19Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français, NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.59.

* 20 Accord de Bangui instituant une organisation africaine de la propriété intellectuelle, acte du 14 décembre 2015

* 21Article 6 de l'annexe 1 de l'ABR.

* 22 A. AUBERT, « Brevet de logiciel » : quelle portée ?, Mémoire, Université Montpellier I, 2001, p.6.

* 23Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.58.

* 24Article 10 du traité de l'OMPI publié par le Bureau international de l'OMPI.

* 25Article 9-3 de la directive 2001/29/CE sur les droits d'auteurs et droits voisins dans la société de l'information

* 26P. ROUBIER, Le droit de la propriété industrielle, Librairie du Recueil Sirey, 1952, p.3.

* 27A. BERTRAND, Le droit d'auteur et les droits voisins, Masson, Paris, 1991, p.475

* 28 Trois sociétés condamnées pour une contrefaçon de logiciels en Afrique, [06.06.2024], Lien

* 29A. BERTRAND, op. cit., pp.475-476.

* 30 Accord de Bangui instituant une organisation africaine de la propriété intellectuelle, acte du 14 décembre 2015

* 31 Loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publiée au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016.

* 32

* 33M. VIVANT, J.-M. BRUGUIERE, op. cit., p.95. Ces auteurs trouvent ridicule le rattachement du logiciel à la catégorie des oeuvres littéraires, ce qu'ils traduisent dans cette formule ironique : « le logiciel se trouve ainsi placé quelque part entre Proust et Hemingway ».

* 34C. D. DJOMGA, La contrefaçon des logiciels dans l'espace OAPI, Étude comparée de l'ABR révisé et des législations du Sénégal, du Gabon, de la Côte d'Ivoire et du Cameroun, Les Éditions ISIS, 2011, p.30.

* 35Y. BISMUTH, Droit de l'informatique : éléments de droit à l'usage des informaticiens, L'Harmattan, 2011, p.75.

* 36Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.20

* 37Ces extensions, choisies à titre d'illustration, correspondent au langage de programmation C.

* 38C. D. DJOMGA, op. cit., p.31

* 39Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.22.

* 40IONOS, Code source : définition et exemples, [8 févr. 2024]. Lien

* 41Ces extensions, choisies arbitrairement à des fins illustratives, correspondent également au langage de programmation C.

* 42TJ Paris, 25 nov. 2022, 21/01 835

* 43C. D. DJOMGA, op. cit., p.33

* 44Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.23

* 45Ass. Plén, 7 mars 1986, 83-10.477

* 46TGI Paris, 15 avril 2022, 19/8079

* 47Dictionnaire Juridique, Logiciel, [8 févr. 2024]. Lien

* 48Y. BISMUTH, op. cit., p.75

* 49A. BENSOUSSAN, Informatique, télécoms, internet : Réglementation, contrats, fiscalité, communications électroniques, Éditions Francis Lefebvre, 2012 p.25.

* 50 Bertrand LIAUDET, CONCEPTION des SYSTÈMES d'INFORMATION UML, Epitech 3 - Automne 2007, p.2.

* 51 Ibid.

* 52CA Toulouse, 9 octobre 2007, 05/02 806

* 53 Loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publié au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016.

* 54Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.103.

* 55 CA Toulouse, 9 oct. 2007, 05/02 806.

* 56Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.103.

* 57Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.103

* 58CA Paris, 4è Ch., 1er juin 1994. [08/02/2024]. Lien

* 59CJUE, 2 mai 2012, SAS Institute Inc. / World Programming Ltd. [08/02/2024]. Lien

* 60 Op. cit.

* 61CA Paris 4è ch., sect. B, 17 février 2006. [08/02/2024]. Lien

* 62CA Paris, 4è Ch., 6 oct. 1995. [08/02/2024]. Lien

* 63C. D. DJOMGA, op. cit., p.33

* 64CJUE, 22 décembre 2010, affaire Bezpeènostní softwarová asociace. [08/02/2024]. Lien

* 65TC de Meaux, 17 décembre 1996. [08/02/2024]. Lien

* 66TGI Paris, 15 avril 2022, 19/8079

* 67P.-Y. GAUTIER, Propriété littéraire et artistique, PUF, 5ème édition, 2004, p.49

* 68C. CARON, Droit d'auteur et droits voisins, LexisNexis Litec, 2006, p. 65

* 69B. SCHAMING, Le droit du logiciel, LA VILLEGUERIN Éditions, 1990, p.56

* 70C. CARON, op. cit., p. 66

* 71TGI Paris, 13 octobre, 2016, RG 15/15 617.

* 72Ass. Plén, 7 mars 1986, 83-10.477, dit arrêt Pachot

* 73Civ. 19 nov. 1991, n° 90-17031

* 74Civ. 1, 17 mars 2016, n° 14-27990

* 75Civ. 1, 14 nov. 2013, n° 12-20687

* 76Civ. 1, 2 mars 1999, n° 97-10179

* 77M. Rikabi, Les droits de la propriété intellectuelle et l'intérêt général (Approche en droit d'auteur et en droit des brevets), thèse, Université d'Aix-Marseille, 2019, p.152

* 78 Op. cit.

* 79Article 5 alinéa 2 de la loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publié au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016.

* 80 C. D. DJOMGA, op. cit., pp.17-18.

* 81Article 5 alinéa 1 de la loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publié au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016.

* 82B. SCHAMING, op. cit., p.62

* 83Théo Sougy. L'originalité, unique condition à la protection du droit d'auteur : vérification par l'application aux créations audiovisuelles. Droit. Université Jean Moulin - Lyon III, 2022, p.119. Français. NNT : 2022LYO30042. tel-04144622

* 84Rapport sous Ass. Plén., 7 mars 1986, RDPI 1986, n° 3, p. 206.

* 85Théo Sougy. L'originalité, unique condition à la protection du droit d'auteur : vérification par l'application aux créations audiovisuelles. Droit. Université Jean Moulin - Lyon III, 2022, p.119. Français. NNT : 2022LYO30042. tel-04144622

* 86 Théo Sougy. L'originalité, unique condition à la protection du droit d'auteur : vérification par l'application aux créations audiovisuelles. Droit. Université Jean Moulin - Lyon III, 2022, p.120. Français. NNT : 2022LYO30042. tel-04144622

* 87B. SCHAMING, op. cit., p.65

* 88B. SCHAMING, op. cit., p.62

* 89B. SCHAMING, op. cit., p.60

* 90 CA, Douai, 1re ch., 2e sect., 5 Avril 2018 n° 16/04545

* 91Tribunal d'Instance de Tokyo (WA) n°10867 [1978], 6 décembre 1982, 482Hannei Times

* 92 CA Paris, 4? ch., 04 févr. 2004

* 93 CA Versailles, 9? ch., 23 févr. 2005

* 94 Cass, 1?? civ., 22 mars 2011

* 95C. URMAN, Concepteurs de logiciels : savez-vous si votre création est originale ?, [5 févr. 2024]. Lien

* 96C. CARON, op. cit.,p. 188

* 97E. DESHOULIERES, Le droit moral de l'auteur sur les oeuvres numériques, mémoire, Université Panthéon-Assas (Paris II), 2006, p.12

* 98 Op. cit.

* 99 Ibid.

* 100Le Titre IX de l'annexe 1 de l'ABR prévoit un régime de licences non volontaires permettant à un exploitant d'obtenir par voie judiciaire l'autorisation d'exploiter une invention objet d'un brevet.

* 101E. DESHOULIERES, op. cit., p.24.

* 102C. CARON, op. cit., p.200.

* 103C. CARON, op. cit., p.203.

* 104E. DESHOULIERES, op. cit., p.27.

* 105Cette condition n'est pas prévue en droit Allemand.

* 106 Op. cit.

* 107B. SCHAMING, op. cit., p.174.

* 108La représentation s'entend de la communication de l'oeuvre au public par récitation, télédiffusion, exécution publique ou plus généralement par tous moyens. Nous passerons sous silence le droit de représentation du logiciel qui est, à notre sens, peu pertinent au regard du programme d'ordinateur.

* 109Il ne concerne que les oeuvres graphiques et plastiques, par conséquent, il ne s'applique point au logiciel.

* 110 Software as a Service

* 111 Directive n°02/2018/CM/UEMOA portant harmonisation des dispositions relatives au droit d'auteur et aux droits voisins dans le domaine de l'image au sein de l'UEMOA

* 112On entend par copie servile, la copie identique en tous points d'un logiciel ou d'une autre création.

* 113La notion jurisprudentielle de copie quasi servile exprime la copie réalisée avec d'infimes différences, si bien que le public pourrait la confondre avec la création originale.

* 114B. SCHAMING, op. cit., p.174

* 115 Op. cit.

* 116 Op. cit.

* 117 Op. cit.

* 118Nous avons opté pour le terme transformation dans l'optique d'éviter la répétition du vocable adaptation. Mais, en réalité, la traduction et l'arrangement d'un logiciel constitue, à n'en point douter, une adaptation. C'est pourquoi, nous désignerons également par adaptation ces droits, pour la suite.

En ce sens : Loutfi, M.-H. (1989). Réflexions sur la protection juridique des logiciels. Bulletin du droit d'auteur, XXIII(4). p.20

* 119I. BA, op. cit., p.32

* 120Le vocable « atteinte » est polysémique mais pour notre analyse, nous retiendrons cette approche : « action dirigée contre quelque chose ou quelqu'un par des moyens divers : dégradations (atteinte matérielle), injure (atteinte morale), blessure (atteinte corporelle), spoliation (atteinte juridique) ». G. CORNU, Vocabulaire juridique, PUF, 12? Ed, p.100.

* 121Article 138 alinéa 1 de la de la loi n°2016-555 relative au droit d'auteur et aux droits voisins publié au journal officiel du jeudi 20 octobre 2016.

* 122B. BUTR-INDR, La Contrefaçon des droits de propriété intellectuelle : Étude comparative en droits français et thaïlandais, thèse, Université Panthéon-Assas, 2012, p.70

* 123Civ. 1, 29 mai 2001, 99-15

* 124A. SAINT-MARTIN, Créations immatérielles et responsabilité civile : Le recours à la responsabilité civile délictuelle de droit commun pour la protection des créations immatérielles, thèse, Université Montpellier 1, 2006, p.53.

* 125CA Paris, 4? ch., 24 janvier 2007 in M. BUYNS, L'application des droits de propriété intellectuelle : recueil jurisprudence, p. 305

* 126S. VERVILLE, La notion d'épuisement des droits : évolution et rôle actuel en commerce international, Les Cahiers de propriété intellectuelle, 2006, p.555.

* 127Autrement dit, si la modification du programme d'ordinateur n'est pas nécessaire à son utilisation, mais résulte par exemple de la volonté d'améliorer le logiciel, la contrefaçon pourra être retenue

* 128B. SCHAMING, op. cit., p.276

* 129Les juges décident : « caractérise la contrefaçon par diffusion, prévue par l'article L. 335-3 du Code de la propriété intellectuelle, la mise sur le marché de l'art d'une oeuvre originale, même aBAndonnée par son auteur, lorsqu'elle est faite en violation du droit moral de divulgation qu'il détient sur celle-ci en vertu de l'article L. 121-2 de ce Code ». Crim., 13 déc. 1995, 93-85

* 130Crim., 24 sept. 1997, 95-81.954

* 131 TC Abidjan, 4e ch., 1er avr. 2014, n°243/2014

* 132CA Paris, 4? ch., 24 janvier 2007 in M. BUYDENS, L'application des droits de propriété intellectuelle : recueil de jurisprudence, p. 305

* 133Crim., 27 fév. 2018, 16-86.881

* 134TJ Marseille, 23 sept. 2021. [05/03/2024]. Lien

* 135CA Lyon, 30 oct. 2008, 07/05916

* 136CJUE, 5ème ch., 18 déc. 2019. [05/03/2024]. Lien

* 137Crim., 16 déc. 2003, 03-80

* 138 TC Abidjan, 19 juil. 2018, n°1400/2018

* 139F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil les obligations, Dalloz, 7ème édition, 1999, p.858.

* 140 Op. cit.

* 141M. BEHAR-TOUCHAIS, Comment indemniser la victime de la contrefaçon de manière satisfaisante? in L'entreprise face à la contrefaçon des droits de propriété intellectuelle, Actes du colloque de l'IRPI, 2003, p.105.

* 142C. CARON, op. cit., p.422.

* 143Ibid.

* 144Ibid.

* 145C. CARON, op. cit., p.423.

* 146Paris, 13? ch., 25/01/1968, Gaz. Pal. 1968, 1,289 ; Crim. 04/03/1975, Bull. crim., n° 70.

* 147Cour suprême thaïlandaise, arrêt numéro 5306/2550, rendu en. 2007

* 148B. BUTR-INDR, op. cit., p.425

* 149 M. VIVANT, J.-M. BRUGUIERE, op. cit., P369.

* 150 C. CARON, op. cit., p. 85.

* 151 Op. cit.

* 152 C. CARON, op. cit., p. 86.

* 153 E. GAILLARD, La protection des programmes d'ordinateurs : comparaison des systèmes européens et étasuniens, mémoire, Université Toulouse I Capitole, 2018, p.20.

* 154 B. SCHAMING, op. cit., p.52.

* 155[21/03/2024] Prouver l'originalité d'un logiciel.

* 156 CA Bordeaux, 20 septembre 2022,19/05913.

* 157 B. SCHAMING, op. cit., p.53.

* 158 Par exemple, prouver que son logiciel ne peut être une reproduction d'un autre, puisqu'il lui est antérieur.

* 159 « La nécessité des conditions de forme notamment pour établir l'antériorité des droits, qui ne peut se faire que par un dépôt ayant une date certaine. » B. SCHAMING, op. cit., p.52.

* 160 C. CARON, op. cit.,p. 87.

* 161 I. BA, op. cit., p.36.

* 162N. ARNAUD, La médiation, un moyen d'éviter l'aléa judiciaire, [21 mars 2024]. Lien

* 163 Civ. 1, 17 oct. 2012, 11-21.641, Inédit

* 164 Civ. 1, 14 nov. 2013, 12-20.687, Inédit

* 165 CA, Douai, 1re ch., 2e sect., 5 Avril 2018 n° 16/04545

* 166 François Pellegrini. L'originalité des oeuvres logicielles. Revue internationale du droit d'auteur, 2017,

252, pp.31.Hal-01557673

* 167 P.-Y. GAUTIER, op. cit., p.52

* 168TGI Paris, 3e ch. 3e sect., 30 juin 2017. [08/02/2024]. Lien

* 169Civ. 1e, 13 déc. 2005, 03-21.154

* 170S. K. VERMA, L'étendue de la protection de la propriété intellectuelle en matière de logiciel en Inde in Brevet, innovation et intérêt général. Le brevet pourquoi et pour faire quoi ? Actes du colloque Louvain-la-Neuve organisé par la Chaire Arcelor, sous la direction de Bernard Remiche, Larcier, 2006, p.423.

* 171CJUE, 2 mai 2012, SAS Institute Inc. / World Programming Ltd. [08/02/2024]. Lien

* 172CA Montpellier, 2ème Ch., 6 mai 2014. [08/02/2024]. Lien

* 173 En informatique, un logiciel spécifique est un logiciel développé sur commande à l'attention d'un client donné, par opposition à un logiciel standard, qui est un développé sur initiative d'un éditeur, et vendu à de nombreux clients. Les logiciels spécifiques sont des produits créés sur commande, quand il n'existe aucun logiciel standard équivalent, dans des domaines très spécialisés

* 174 J. LAOUARI, La brevetabilité des logiciels, mémoire, Université de Montréal, 2005, p.27

* 175 CJUE, 2 mai 2012, SAS Institute Inc. / World Programming Ltd. [08/02/2024]. Lien

* 176 J. LAOUARI, op. cit., p.27

* 177 Op. cit.

* 178 J. LAOUARI, op. cit., p.26-27

* 179 Par conséquent, on a cherché une protection plus adéquate pour ces éléments fonctionnels. On l'a trouvée dans le brevet. En effet, la protection conférée par le brevet se révèle bien supérieure à celle conférée par le droit d'auteur sur ces éléments. Avec le brevet, on protège des idées appliquées à l'industrie, des concepts, des suites d'étapes. On n'est pas limité exclusivement à un texte ou presque.

* 180 Op. cit.

* 181 Op. cit.

* 182 TC Abidjan, 4e ch., 1er avr. 2014, n°243/2014

* 183184 Op. cit.

* 185TC Abidjan, 7 nov. 2013, N°1561/2013, Lien

* 186 « La suspension des obligations de la relations de travail communément appelée suspension du contrat de travail altère voire met en veilleuse l'exécution des obligations principales incomBAnt aux parties notamment, l'accomplissement du travail pour le salarié et le versement d'un salaire pour l'employeur. H. ABISSA, Droit du travail, Les éditions ABC, 2ème édition, 2021, p.276.

* 187 H. ABISSA, Droit du travail, Les éditions ABC, 2ème édition, 2021, p.226.

* 188 Cela fait écho aux « inventions de mission » existant en droit des brevets.

* 189 Certains systèmes juridiques, notamment celui de la France, admettent que ledit transfert concerne aussi bien le travailleur recruté à titre de créateur de logiciels que le salarié emBAuché à un autre titre ; Voir en ce sens : R. DESY, La protection par le droit d'auteur des logiciels créés par des employés en droit comparé et international in Article de la revue juridique Thémis, Les Éditions Thémis, 1996, pp.43-44.

* 190 A. BAMDE, La protection juridique du logiciel créé au sein d'une entreprise, [16 avr. 2024]. Lien

* 191 J. LAOUARI, op. cit., p.33

* 192Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.258

* 193 Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.257

* 194 Op. cit.

* 195 J. LAOUARI, op. cit., p.33

* 196 Article 18, Loi n°2008-09 du 25 janvier 2008 portant loi sur le droit d'auteur et les droits voisins (Sénégal).

* 197 Op. cit.

* 198 B. SCHAMING, op. cit., p.101

* 199 Op. cit.

* 200 Ibid.

* 201 Article 22 Annexe 7 ABR : « Sauf dispositions contraires du présent chapitre, les droits patrimoniaux sur une oeuvre sont protégés pendant la vie de l'auteur et soixante-dix ans après sa mort. Les droits moraux sont illimités dans le temps. » ; Article 7 Convention de Berne : « La durée de la protection accordée par la présente Convention comprend la vie de l'auteur et cinquante ans après sa mort. »

* 202 B. SCHAMING, op. cit., p.102

* 203 I. BA, op. cit., p.36.

* 204 Loutfi, M.-H. (1989). Réflexions sur la protection juridique des logiciels. Bulletin du droit d'auteur, XXIII(4). p.21

* 205 Interopérabilité : un guide à l'usage des débutants pour comprendre les enjeux de l'interopérabilité, Microsoft, version : 2.2, dernière mise à jour : février 2008, p.4.

* 206 Interopérabilité : un guide à l'usage des débutants pour comprendre les enjeux de l'interopérabilité, Microsoft, version : 2.2, dernière mise à jour : février 2008, p.7.

* 207 Com, 20 octobre 2011, n°10-14069

* 208 Interopérabilité : un guide à l'usage des débutants pour comprendre les enjeux de l'interopérabilité, Microsoft, version : 2.2, dernière mise à jour : février 2008, p.10.

* 209 Synthèse interopérabilité sur wiki.april.org, 26/04/2024.

* 210 En ce sens, CJUE, 5ème chambre, 6 octobre 2021, affaire C-13/20.

* 211 Op. cit.

* 212 TC Abidjan, 4e ch., 1er avr. 2014, n°243/2014

* 213 J.-P. KOSSO OMAMBODI, La preuve de la qualité d'auteur en droit d'auteur, thèse, Université de Nantes, 2017, p.197.

* 214 Article 2, Loi n°2018-974 du 27 décembre 2018 portant Statut des commissaires de justice.

* 215 J.-P. KOSSO OMAMBODI, op. cit., p.183 : « Lorsque le législateur évoque le concept de création, il se réfère non pas à la création comme résultat d'une activité quelconque de l'esprit mais plutôt comme activité elle-même531. Il distingue ainsi l'oeuvre de l'esprit qui est aussi une création (création-résultat) de l'action qui l'engendre (création-acte) sans pouvoir les définir. »

* 216 Et, en pratique, l'accomplissement de formalités ou d'un dépôt est utile pour se pré-constituer la preuve de l'antériorité de la création. Celle-ci jouera un rôle important au moment de déterminer qui a copié qui.

* 217 L'acte authentique est celui qui a été reçu par des officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été rédigé, et avec les solennités requises.

* 218 Cossette, L. (1957). Des actes authentiques. Les Cahiers de droit, 3(1), 76-91. https://doi.org/10.7202/1004115ar

* 219 Ibid.

* 220 Dans cette partie, nous éluderons la question des licences gratuites, libres ou ouvertes, étant donné qu'elles sont les moins répandues.

* 221 M. VIVANT, J.-M. BRUGUIERE, op. cit., p. 560

* 222 Ibid.

* 223 Jonathan Keller. La notion d'auteur dans le monde des logiciels. Droit. Université de Nanterre-Paris X, 2017. Français. NNT : 2017PA100195.tel-01896051, p.408

* 224 Une licence non exclusive autorise son titulaire à accomplir, de la manière qui lui est permise, les actes qu'elle concerne en même temps que l'auteur et d'autres titulaires de licences non exclusives. En revanche, Une licence exclusive autorise son titulaire, à l'exclusion de tout autre, y compris l'auteur, à accomplir, de la manière qui lui est permise, les actes qu'elle concerne.

* 225 Op. cit.

* 226 Op. cit.

* 227 Op. cit.

* 228Com., 22 mai 1991, 89-11.390

* 229 B. SFEZ, B. DELEPORTE, Droits d'utilisation des logiciels : de la nécessaire gestion des licences au sein de l'entreprise, [10 mai 2024]. Lien

* 230 Ibid.

* 231 Article 13.2 des CONDITIONS GENERALES D'UTILISATION ET D'ASSISTANCE DES PROGICIELS SAGE

* 232 Op. cit.

* 233 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.19

* 234 Op. cit.

* 235 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.24

* 236 Ibid.

* 237 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.25

* 238 La marque est facultative. Mieux dit, une personne est en droit d'exploiter une marque sans l'avoir préalablement enregistrée. Cependant, le cas échéant, elle ne jouira d'aucun droit sur la marque et ne pourra, en conséquence, s'opposer ni à son usurpation ni à son enregistrement future par un tiers.

* 239 Op. cit.

* 240 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.51

* 241 CJUE, aff. 91/100, LTJ Diffusion c/Sadas VertBAudet

* 242 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.64

* 243 N. BEN ALI, La lutte contre la contrefaçon des marques au Maroc; quelle perspective?, mémoire, Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, 2008, p.18.

* 244 I. M. KOUM DISSAKE, op. cit., p.65

* 245 CA Nancy, 5e ch., 10 janv. 2018, n° 16/02550. [08/02/2024]. Lien

* 246 M. MENJUCQ, Droit commercial et des affaires, Gualino, 9ème édition, 2015, p.178.

* 247 Com., 15 septembre 2009, 07-19.299

* 248 M. MENJUCQ, op. cit., p.178.

* 249 S. GINCHAUD, T. DEBARD, Lexique des termes juridiques, Dalloz, 26e éd., p.243.

* 250 M. MENJUCQ, op. cit., p.178.

* 251 M. MENJUCQ, op. cit., p.179.

* 252 TGI Paris, 3e ch. 3e sect., 30 juin 2017. [08/02/2024]. Lien

* 253 M. MENJUCQ, op. cit., p.179.

* 254 Com., 28 septembre 2010, 09-69.272, Inédit

* 255 S. GINCHAUD, T. DEBARD, op. cit., p.770.

* 256 M. MENJUCQ, op. cit., p.179.

* 257 Ibid.

* 258 Ibid.

* 259 Com., 26 janvier 1999, 96-22.457, Inédit

* 260 Civ. 1, 3 mai 2018, 16-26.531, Inédit

* 261 Civ.1e, 13 déc. 2005, 03-21.154

* 262 M. Paturel, J. Rondot, Contrefaçon et concurrence déloyale sur le marché français de l'édition de logiciels, [15 mai 2024]. Lien






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