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Déforestation et dégradation de l'environnement au Cameroun 1960-2010.


par Marcel Koviel Songo
Université de Youndé I - Master en histoire 2012
  

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CHAPITRE III : LES ENJEUX DE LA LEGISLATION SUR LA FORET ET
L'ENVIRONNEMENT

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L'indépendance du Cameroun a été marquée en 1960 par une autonomie politique, économique et sociale ; et la prise en main de tous ces domaines. Ainsi, pour lutter contre la déforestation et la dégradation de l'environnement, les autorités camerounaises ont entrepris la mise sur pied d'une politique forestière appropriée à la situation du pays. C'est dans les années 90 que les problèmes environnementaux ont commencé à se poser. Averti par les écologistes sur les causes de ces problèmes dont la déforestation en est l'une, conscient du danger que cette situation représente pour le pays et le monde, l'Etat camerounais se voyait dans l'obligation d'encadrer toutes les activités liées à l'environnement par un cadre juridique quelques années plus tard. Alors cinquante ans plus tard, que pouvons nous dire de l'évolution de cette politique ? Ce chapitre traite la dynamique des normes forestières et environnementales, les mutations qu'ont connues les institutions en charge de ces questions et la dynamique des enjeux de la lutte contre la déforestation entre 1960 et 2010.

I - LA POLITIQUE FORESTIERE AU CAMEROUN (1960-1994)

La mise sur pied des premières lois forestières au Cameroun n'était pas une chose aisée au vue de l'immaturité du jeune Etat à définir une politique forestière adéquate. Plusieurs défis l'attendaient, dont la réglementation de l'exploitation des forêts et la protection et la conservation de celles-ci. C'est ce qui explique un lent décollage entre 1960 et 1994. Ce processus s'était fait en deux étapes : de 1960 à 1981 et de 1981 à 1994.

A- LA REGLEMENTATION SUR LES FORETS DE 1960 A 1981

Après l'indépendance du Cameroun sous tutelle britannique et la réunification avec la République du Cameroun en 1961, la politique forestière de chaque Etat fédéré était restée distinctes de l'autre jusqu'en 19730. C'est au lendemain de l'unification de 1972 que ces différentes politiques se sont vues harmonisées pour devenir une seule.

0 `'Politique forestière du Cameroun, document de politique générale», MINEF, Yaoundé, juin 1995, p. 10

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1 - Deux régimes forestiers distincts au Cameroun entre 1961 et 1973

Au Cameroun oriental, les différentes lois y afférentes étaient calquées sur le modèle de la gestion des forets de l'AEF0. L'exploitation forestière en 1964 n'était pas régie par des régimes spécifiques à cette période. Aucune loi n'avait été établie pendant ce temps au Cameroun jusqu'en 1968. De 1964 à 1968, l'exploitation forestière était subordonnée aux régimes forestiers ultérieurement abrogés au Cameroun oriental avant et après l'indépendance de 1960, notamment la loi forestière n°58/24 du 26 mars 1958, l'ordonnance n°61/OF/14 du 16 novembre 1961 et le décret n°62/2 du 9 janvier 19630. Ces lois visaient à régulariser l'activité forestière et lui donner un caractère légal. Ainsi les articles 33 et 37 de l'ordonnance de 1961 mettaient en exergue le reboisement des forêts et la conservation des sols. Il fallait replanter les essences comme l'ébène qui ne pouvait se régénérer seul. En outre, cette ordonnance intégrait les populations locales0. Celles-ci pouvaient bénéficier des réalisations sociales (écoles, hôpitaux ; etc.) des sociétés exploitantes.

Manifestement, d'autres études montrent qu'après l'indépendance, le régime forestier du Cameroun oriental a continué à être régi par le texte français de 1946, car il faut préciser que le texte de 1959 ne fixait que le régime de propriété de la forêt. Il faudra attendre 1961 pour qu'une ordonnance, celle n° 61/OF/14 du16 novembre 19610, abrogeant le décret du 3 mai 1946, fixât le régime forestier sur le territoire du Cameroun oriental.0 Cependant, cette ordonnance n'était qu'une édition modifiée du décret français.0 Pendant cette période, l'exploitation forestière était conditionnée par l'obtention d'une licence. Celle-ci avait une durée de cinq ans. Et une licence donnait accès à une pluralité de permis de coupe. La SFID présente à Dimako dans la région de l'Est depuis 1946, avait obtenu des autorités camerounaises de 1955 à 1983, neuf licences d'exploitation0. Et cette société n'était pas la seule en activité en ce moment. Il y avait d'autres à l'instar de HFC créée en 1960 et agissant dans la forêt de Campo0.

En se basant sur ces informations, il n'y a aucun doute que le Cameroun oriental, jusqu'en 1968, s'était appuyé sur les lois forestières de la période coloniale française. Ceci

0 Ebela, `'L'exploitation forestière et le développement», 2007/2008, p.10.

0 Ibid. pp. 10-11.

0 Ibid.

0 AAN. Décret n°64/34/COR du 04 mars 1964 accordant un permis d'exploitation.

0 Après l'unification, la gestion des forêts a été laissée dans les affaires relevant des Etats fédérés.

0 R. Tene, `' L'aspect juridique de la gestion», 1977-1978, Université de Yaoundé, p. 10.

0 Elong, `'L'impact d'une exploitation forestière», 1984, p. 254.

0 Labrousse, Verschaves, Les pillards de la forêt, 2002, p. 69.

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peut s'expliquer par l'état de jeunesse du nouvel Etat, qui faisait immédiatement face à plusieurs réalités au point où il fallait partir des lois laissées par les colons pour établir ses propres règles sur la gestion du patrimoine forestier. On peut aussi signaler la situation politico-géographique du Cameroun. Le pays était divisé en deux Etats fédérés, le Cameroun oriental et le Cameroun occidental, avec chacun un héritage colonial différent de l'autre qui rendait difficile la mise en place d'une politique forestière unique et fiable pour le jeune Etat. En plus, les nouveaux dirigeants du pays ne s'étaient pas encore bien imprégnés de tous les problèmes des forêts.

Soulignons quand même que la loi de 1961, dans ses articles 33 et 37, a insisté sur le reboisement et la conservation des sols ; ce qui n'était pas le cas des régimes de 1958 qui n'étaient pas stricts en matière de protection de la forêt0.

L'inertie observée allait s'étendre jusqu'en 19680. Il convient de retenir qu'en 1964, l'exploitation forestière était toujours conditionnée par l'obtention d'un titre d'exploitation. Il permettait de déterminer la superficie de forêt dont devait bénéficier l'exploitant et surtout lui signifiait à travers un cahier de charges, ses devoirs envers les populations locales0. Parmi ces titres, on observe le permis de coupe ordinaire, le permis de chantier, le permis de coupe d'ébène et la licence0.

C'est dans cette ambiance qu'a été signé le décret n°68/1 du 11 juillet 1968 rendu applicable par celui n°68/179 du 8 novembre 1968. Cette loi reposait sur la définition de la notion de forêt. L'Etat camerounais s'était rendu compte que les régimes forestiers précédents n'avaient pas mis l'accent sur la définition de la forêt, pourtant c'était sa priorité. Pour lui, la définition de la forêt permettait de mieux cerner ses problèmes.0Il était donc qualifié de forêt, les terrains recouverts d'une formation végétale, soit capable de produire du bois ou des produits ne constituant pas des denrées agricoles, soit exerçant sur le sol, le climat et le régime des eaux, un effet indirect0. Cette loi insistait aussi sur la réglementation forestière et les conditions de la régénération de la forêt. Ce premier point était nécessaire car le secteur

0 Ebela, `' L'exploitation forestière», 12007/2008, p. 12.

0 Ibid. p. 11.

0 Ibid. p. 12.

0 Les différents titres d'exploitation de cette législation de 1964 étaient repartis par apport à la superficie et à la période d'exploitation. Ainsi, le permis de coupe ordinaire était délivré pour une période de 5 ans sur une superficie de 2 500 hectares, pour les permis de chantier, il s'agissait des superficies de moins de 100 hectares dans une période d'un an, quant aux permis de coupe d'ébène ils disposaient de l'exploitation de dix tonnes de bois pour un an, et en ce qui concerne les licences, elles étaient accordées pour une période de cinq ans pour une superficie supérieure à 250 000 hectares.

0Ebela, `' L'exploitation forestière», 2007/2008, p. 13.

0 Ibid.

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des forêts faisait face à une certaine anarchie. Celle-ci se traduisait parfois par le non respect des devoirs des exploitants. Quant à l'appel à la régénération, il encourageait le reboisement afin de remplacer ces énormes forêts détruites pendant l'exploitation forestière0.

Dans l'étude de Tene, la loi n°68/1/COR du 11 juillet 1968 modifiée par la loi n°71/4/COR du 21 juillet 1971 fixant le régime forestier de l'Etat Fédéré du Cameroun Oriental accordait déjà une grande importance à la conservation des ressources forestières en stipulant que certaines zones étaient fermées à l'exploitation0. Les principales dispositions de cette loi reposaient sur la définition de la notion de forêt. En effet, le gouvernement camerounais s'était aperçu qu'avec le premier régime forestier de 1921, l'accent n'avait pas été mis sur cette définition0. Elle insistait sur la régénération afin de remplacer ces énormes forêts détruites pendant leur exploitation. Cette mesure liée à l'exploitation intense de la forêt a donné lieu à la constitution de superficies relativement importantes de forêts fermées à l'exploitation, dont la forêt de Yokadouma de 2.000.000 ha0.

Ce qu'il faut dire est que la loi de 1968 apportait une certaine précision sur la notion de forêt, facilitant ainsi la conservation des produits issus de celle-ci. Mais comme dans les lois précédentes, il fallait avoir une licence pour obtenir une concession forestière. La SEFAC voit le jour en 1968 en même temps que cette loi. Et elle obtenait une licence cette même année pour l'exploitation d'une zone forestière située dans la région du Sud-Est et plus précisément sur le rivage camerounais du fleuve Sangha dont la localité s'appelle aujourd'hui Libongo0. Malgré ses lacunes, l'anarchie et le non respect des devoirs des exploitants, cette norme forestière marquait le début d'un long processus de réformes dans le secteur des forêts du pays.

Pourtant la situation était différente au Cameroun occidental qui, avant son indépendance, formait une union administrative avec le Nigeria et était gouverné comme une partie de ce pays0. Les lois du Nigeria s'étendaient donc à l'ensemble de cette union. Il faut rappeler qu'en matière des forêts, c'est l'ordonnance de 1938 sur la préservation et le contrôle des forêts qui va rester en vigueur même après l'indépendance0. Elle est remplacée plus tard

0 Ibid.

0 Tene, `' L'aspect juridique», 1977/1978, p. 11.

0 Ebela, `'L'exploitation forestière», 2007/2008, p. 13.

0 Ibid.

0`'Groupe sefac», htt:// www. Groupesefac. Com. Consulté le 15 Octobre 2010.

0 V. T. Le Vine, Le Cameroun, volume II, Berkey et Los Angeles, University of California press, 1964, pp. 118-

119.

0 Ibid.

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par la loi n°69/LW/12 du 2 septembre 1969 qui tend déjà à s'harmoniser avec les textes du Cameroun oriental ; elle a certainement été inspirée par la loi n° 68/1/COR du 11 Juillet 19680.

En effet, cette situation de bivalence dans la politique de gestion des forêts au Cameroun était un obstacle dans une politique qui se voulait unique et dynamique. Il fallait donc réagir face à ce problème.

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