II.2. La formation par la pratique
Dès le début des années 1990, le
débat sur l'impact de la formation initiale sur l'efficacité de
l'enseignement a été posé suite aux recrutements massifs
des enseignants en Afrique subsaharienne pour répondre à la forte
demande en matière d'éducation. En effet, des études
menées par le programme d'analyse des systèmes éducatifs
de la confemen12 (PASEC), ont fait le constat que
la formation professionnelle initiale a souvent peu d'effet et que dans la
plupart des cas, des enseignants sans formation professionnelle initiale
feraient autant progresser les élèves que des enseignants
formés. Certains trouvent même que la formation professionnelle
initiale n'était pas un investissement rentable et qu'on pouvait
parfaitement se limiter à des formations de très courte
durée plutôt que de dépenser des sommes importantes dans
des formations longues.
Le critique littéraire français
Brunetière, cité par Meirieu (2005, p.14) à propos de la
formation pédagogique des enseignants, pense que « Nos jeunes
professeurs n'ont pas besoin qu'on leur enseignât la pédagogie,
car ils l'ont eux-mêmes découverte dans le sentiment de la
dignité de leur profession ». Ainsi, selon cet
académicien l'enseignant s'est déjà formé par la
pratique de son métier, donc nul besoin encore de le former.
Le problème de moyens surtout financiers sont mis en
avant dans les pays de l'Afrique subsaharienne pour escamoter la formation
initiale des enseignants. On présente la formation continue comme une
panacée, alors que ce type de formation dans le domaine éducatif
ne saurait être utile si elle n'est sous-tendue par des théories.
En effet, quand bien même l'enseignant doit se former de façon
continue, il lui faudra acquérir au préalable des connaissances,
des prérequis qui lui permettront d'assurer et de rendre utile cette
formation continue afin de renforcer ses capacités et ses
compétences pédagogiques.
12 Conférence des ministres de
l'éducation des pays africains et malgache d'expression
française.
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II.3. L'intérêt de la formation
professionnelle initiale
La formation initiale des enseignants a toujours fait l'objet
de réflexion des chercheurs, des pédagogues, des didacticiens,
des encadreurs pédagogiques, et de tous ceux qui s'intéressent
à la question de l'éducation et de l'enseignement-apprentissage.
Ainsi, les notions d'acquisition du savoir, de construction du savoir, de
réinvestissement des connaissances ont été au centre des
préoccupations liées aux enseignements-apprentissages. Les
nombreux défis auxquels fait face le système éducatif
burkinabé commandent un égard particulier sur la formation de
ceux-là qui ont la charge d'assurer la bonne éducation des
élèves. Selon Compaoré (2011, p.80), « la
formation initiale des enseignants est devenue une exigence qui participe
à la professionnalisation du métier d'enseignant ». En
effet, toute professionnalisation, toute formation continue reposent sur un
substrat qu'on ne saurait occulter d'où la nécessité de la
formation initiale qui, selon Fonkani (2007, p.72), « doit être
le soubassement sur lequel s'édifient les apports de la formation
continue et de l'expérience ».
La formation initiale des enseignants est un gage de
réussite des élèves. En effet, les savoirs
académiques que le professeur a acquis durant son cursus universitaire
ne sont pas tous profitables à l'élève. Comment distiller
ses savoirs savants de sorte à les rendre bénéfiques pour
un apprenant selon son niveau et selon sa classe ? IL s'agit selon Meirieu
(1999, p.85) «d'interroger résolument les savoirs sous l'angle
de leur constitution et non de leur restitution, de s'intéresser tout
autant à la manière dont ils sont acquis qu'au contrôle de
cette acquisition ». Il est donc clair, qu'un enseignant doit se
préoccuper plus de l'apprentissage que de l'enseignement. Il doit
apprendre à ses élèves à apprendre plutôt
qu'à réciter. Ce savoir-faire de l'enseignant ne s'acquiert que
par une formation initiale. Malgré les connaissances académiques
d'un enseignant, s'il n'est au préalable formé à la
transmission du savoir, les élèves n'apprendront pas. En effet,
comme l'a si bien dit Ouédraogo (2009, p.59), « Si un
enseignant doit bien maîtriser les savoirs et savoir-faire correspondants
à la ou aux discipline(s) qu'il sera amené à enseigner, si
en outre, il a besoin de se familiariser avec la façon dont ces
connaissances peuvent être transmises aux apprenants, alors une formation
disciplinaire et scientifique de qualité devrait lui être
donnée, dans le meilleur des cas, avant qu'il n'aille dans une classe
».
Perrenoud (1994, p.12), décrit le métier
d'enseignant comme étant un métier difficile et complexe,
d'où la nécessité de former ceux qui doivent l'exercer.
Pour lui, « Il est évident qu'une pratique professionnelle
complexe exige des compétences et que la formation a pour principale
vocation d'en permettre le développement». Ainsi, l'enseignant
qui bénéficie d'une formation initiale sera plus aguerri à
faire face aux problèmes qui surviendraient et
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auxquels il pourrait être confronté dans
l'exercice de son métier. Perrenoud pense effectivement que «
la formation initiale, loin d'être une simple réponse aux besoins
de qualification, peut être un levier de changement, une stratégie
d'innovation ». En effet, vu l'évolution de nos
sociétés et des savoirs, l'enseignant doit être au diapason
de cette évolution s'il veut que son action soit en phase avec les
transformations du moment. D'ailleurs, comme l'a signifié
Kaboré-Ouédraogo (2003, p.41), « La tendance actuelle
est à la conception d'un enseignant professionnel qui maitrise un corps
de savoirs formels, mais qui soit capable de l'interpréter et de
l'adapter à des cas particuliers par ses capacités de
réflexion et d'analyse.».
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