INTRODUCTION GENERALE
L'agriculture continue d'être un contributeur majeur
à la croissance de l'économie nigérienne. Le secteur
agricole représente environ 34% du PIB et emploi presque 85% de la
population active, essentiellement sous la forme d'une agriculture de
subsistance (INS, 2007). La répartition des terres arables est
limitée à des régions du sud et seulement 12% environ de
la superficie totale du pays est propice à l'agriculture (INS, 2011).
Cette agriculture est essentiellement de régime pluvial
et la production dépend des précipitations, avec les technologies
rudimentaires de production, l'agriculture s'y pratique dans une totale
incertitude. La précarité de ses activités est liée
aux caractéristiques climatiques sévères, faites de
températures élevées toute l'année et d'une
pluviométrie irrégulière sur une période à
peine trois mois dans l'année. Les principales cultures sont le mil et
le sorgho, qui sont cultivés sur les deux tiers environ de la superficie
totale des terres arables (15 millions d'ha) (INS, 2011).
Le mil, Pennisetum glaucum est la
céréale la plus tolérante à la sécheresse et
bien adapté aux sols pauvres. C'est un grain, d'une valeur
nutritionnelle supérieure à celle du riz et du blé
(Andrews et Kumar, 1992). Il se consomme sous la forme de pâte, de
bouillie, de couscous ou de galettes et peut également entrer dans la
fabrication de boissons alcoolisées comme la bière de mil. Le mil
constitue l'aliment de base au Niger et représente 92% de la production
céréalière avec 4.870.000 ha de terre emblavée
(ICRISAT et FAO, 2007). Troisième producteur au monde, avec une
production de 2.781.928 tonnes suivant l'Inde (12.670.000 tonnes) et le
Nigéria (8.090.000 tonnes) (FAO, 2008), le mil a toujours joué le
rôle de soupape de sécurité alimentaire au Niger.
Cette céréale est généralement
plantée au début de la saison des pluies en juin et
récoltée en octobre. Comme mode cultural, le mil est rarement
planté seul, il est très souvent accompagné d'autres
cultures comme le niébé et l'arachide. Le mil est cultivé
dans les régions tropicales arides et semi-arides où la
pluviosité se situe entre 150 et 800 millimètres (Kumar, 1989).
Malgré la position privilégiée de cette
céréale, le Niger, du fait de ses caractéristiques
climatiques marquées par des sécheresses périodiques, mais
de plus en plus fréquentes depuis pratiquement trois décennies,
est devenu structurellement déficitaire. Pour faire face à ce
déficit, différents plans et réformes ont
été conçus et mis en oeuvre pour améliorer les
performances du secteur agricole. Manifestement les efforts n'ont pas pu lever
les contraintes suivantes qui se sont même accentuées:
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? La péjoration climatique avec la descente des
isohyètes de près de 200 km vers le sud transformant des zones
autrefois agricoles, du Nord-Est, du Nord-Ouest et de l'Est en zones pastorales
et même en désert au Nord;
? La baisse de fertilité des terres cultivées
pratiquement sans apports consistants et réguliers d'engrais ou
même de matière organique;
? Le nettoyage des champs avec le ramassage
systématique des résidus des récoltes, notamment les tiges
de mil, qui servent à de nombreux usages, y compris comme source
d'énergie;
? L'extension des superficies, comme seul moyen actuel
d'augmenter la production.
A toutes ces contraintes qui ont accru la
vulnérabilité de nombreux paysans s'est ajouté le
désengagement de l'Etat. Ces contraintes ont fragilisé cette
culture en rendant pratiquement inaccessibles les intrants agricoles, notamment
les engrais alors même que les terres étaient déjà
pauvres exposant les sols dunaires, terres de prédilection du mil,
à l'érosion éoliennes. Dans ces conditions, il ne
paraît point d'affirmer que cette céréale, base de
l'alimentation des nigériens, est cultivée dans des conditions
limites de fertilité, avec des rendements n'excédant pas 400
kg/ha (ICRISAT, 2007). La tendance se poursuit avec la diminution des
superficies et de la durée des jachères dans tout le pays. Ces
données montrent très clairement le caractère
essentiellement extensif de la culture de cette céréale. Cette
dégradation du potentiel productif accentue de plus en plus le
problème alimentaire au Niger. Une amélioration de la
productivité doit être envisagée. Dans ce contexte,
l'adoption des nouvelles technologies agricoles simples et accessibles à
tous, demeure la voie privilégiée.
Pour répondre à cette nécessité
d'améliorer la production nationale, plusieurs travaux ont
été menés pour avoir des variétés
améliorés qui sont à haut rendement. Les objectifs de ces
travaux visent à obtenir des plantes :
- Naines, donc à production limitée de paille, et
résistantes à la verse ;
- A tallage moyen et à port cylindrique pour limiter
l'encombrement et, ainsi, permettre une
forte augmentation de densité ;
- A cycle réduit que celle des variétés
locales ;
- Résistantes aux maladies et à rendement
élevé.
A l'issu de ces travaux, les centres de recherches (INRAN et
ICRISAT) ont mis à la disposition du monde paysan des
variétés à haut rendement et à cycle court. Ces
nouvelles variétés de mil sont (MORO, DAN-GOMBE, TCHININ-BUINI,
HKB, 3/4 HK, ANK ...) (CNEV, 2012).
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En général les rendements sont restés
faibles dus essentiellement à une pluviométrie faible et
aléatoire ainsi que par la pauvreté des sols et l'attaque des
ravageurs. Cependant ces nouvelles variétés n'ont pas fait
l'objet d'évaluation à travers les perceptions des paysans pour
apprécier la contribution et les éventuelles contraintes
liées à leur utilisation.
L'utilisation de semences de qualité et de
variétés adaptées peut être porteuse d'avantages
considérables pour les agriculteurs. L'accès à des
semences de qualité, pour une large gamme de variétés et
de cultures, permettrait aux producteurs d'accroître leur
productivité, d'être moins vulnérables aux infestations de
ravageurs, aux sécheresses et aux maladies.
L'utilisation des nouvelles technologies dans la production
agricole tels que les fertiliseurs organiques ou chimiques, les pesticides, les
semences améliorées est longtemps présentée comme
une voie effective pour l'accroissement de la productivité agricole dans
les pays en développement et plus particulièrement en Afrique
Subsaharienne (Feder et al., 1985; Saka et Lawal, 2009). La
sélection végétale a apporté une contribution
significative aux mesures prises pour relever différents défis
tels que la sécurité alimentaire, la réduction de la
famine, l'accroissement des valeurs nutritives et le renchérissement des
intrants en Asie (ISTA, 2009). Le progrès technique ainsi que la
sélection des variétés a permis au cours des
siècles une forte augmentation des rendements agricoles. La
révolution verte a joué un rôle important dans
l'amélioration considérable des disponibilités
alimentaires au cours des 40 dernières années. Les rendements du
riz, du blé et du maïs dans les pays en développement ont
augmenté de 100 à 200 pour cent depuis la fin des années
1960 (FAO, 2012).
Plusieurs études montrent que l'adoption des
technologies améliorées permet d'accroitre la productivité
agricole, de surmonter la pauvreté et d'améliorer la
sécurité alimentaire (Mendola, 2007 ; Adekambi et al.,
2009). Midingoyi (2003) quant à lui, a montré que les
systèmes de riziculture intégrant les variétés
améliorées ont connu une amélioration de leurs
performances techniques et économiques. Les semences
améliorées jouent un rôle éminent dans ce processus.
Leur utilisation simple dans la production peut contribuer jusqu'à 40%
dans l'accroissement des rendements (PSBA, 2006). Ce qui fait d'elles un des
inputs indispensables pour la transformation du secteur agricole de sa forme de
l'agriculture de subsistance, qui demeure en Afrique de l'Ouest, à un
niveau très élevé. Les variétés
améliorées et les semences de qualité sont donc des
conditions fondamentales d'une agriculture productive.
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Le choix des variétés est donc fonction de
plusieurs critères. Ces critères sont liés non seulement
à des caractéristiques propres aux variétés (le
cycle, la couleur, le goût, le rendement...), mais aussi à des
facteurs liés aux contraintes de production (besoins en eau,
résistance aux maladies...) et de commercialisation (Fagbemissi,
2001).
Ainsi, la maîtrise des caractéristiques
socioéconomiques et institutionnelles des producteurs susceptibles
d'influencer la décision d'adopter une technologie apparait plus que
nécessaire et même un challenge à relever pour la
réussite de toute politique de vulgarisation de ces innovations. La
réussite des programmes de vulgarisation et de diffusion des techniques
de protection intégrée, passe par une bonne compréhension
de la prise de décision et du comportement des paysans face aux
différentes techniques de protection des cultures (Nkamleu et Coulibaly,
2000).
L'adoption des semences améliorées reste
conditionnée par la réponse à plusieurs interrogations :
Qu'est-ce-qui influence l'adoption d'une nouvelle variété du mil
chez les paysans au Niger ? L'adoption des nouvelles variétés du
mil augmente-t-elle la productivité agricole?
Ainsi, l'objectif général de la présente
étude est d'analyser les principaux déterminants de l'adoption
des variétés améliorées chez les producteurs du mil
au Niger.
De façon spécifique, il s'agit :
- D'identifier les différents facteurs
socio-économiques et institutionnels pouvant influencer l'adoption des
variétés améliorées du mil ;
- De mesurer l'impact de cette adoption sur le rendement.
Au vu de ce qui précède, le travail s'articulera
autour de trois sections. La première section traite du cadre
théorique permettant de bien cerner les études empiriques sur
l'adoption des nouvelles technologies. La seconde section examine le
modèle économétrique et la troisième section est
consacrée à l'analyse des données afin de dégager
les déterminants de l'adoption des semences améliorées.
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