I.3.4.2. Situation actuelle
La crise économique, qui sévit en RDC depuis
plus d'une décennie, a laissé des séquelles sur le
système financier de ce pays :
- la faillite des banques commerciales,
contrôlées par l'Etat, et l'essoufflement de celles à
capitaux privés ;
- la réduction significative des activités des
institutions financières non bancaires ;
- le ralentissement sensible de l'activité des COOPEC
en matière de collecte de l'épargne et de distribution de
crédits.
En outre, un bref aperçu de l'organisation du
système bancaire congolais a permis de dégager deux constats :
une couverture bancaire insuffisante du pays et des distorsions dans
l'implantation provinciale des guichets des banques commerciales. Ces constats
ont rendu pressant la nécessité de promouvoir des structures
alternatives de financement capables d'assurer la mobilisation de la petite
épargne, d'octroyer des microcrédits en milieu rural et urbain
défavorisés, et de créer des conditions d'une insertion
progressive du secteur informel dans l'économie formelle.
Par ailleurs, de nombreux ménages, confrontés au
problème de proximité, ont entrepris des nouvelles
activités capables de générer des revenus. Cette situation
les a amenés à concevoir des microprojets en quête de micro
financements. En réponse à ces attentes, on a assisté
à l'éclosion d'une catégorie d'institutions
chargées de mobiliser des ressources, tant internes qu'externes, et
capables d'octroyer des micros crédits. Ces institutions ont
commencé à offrir des services financiers de crédits et /
ou d'épargne aux personnes les plus démunies et ne pouvant
accéder aux avantages du système bancaire classique.
De manière générale, les acteurs
impliqués dans ce secteur en République Démocratique du
Congo sont :
- des individus ou des groupes de base
bénéficiaires des services de micro finance ; - des
Systèmes Financiers Décentralisés (SFD) formels et semi-
formels ;
- des bailleurs de fonds qui interviennent soit dans la
promotion de ces SFD au niveau du renforcement des capacités, soit dans
les actions desdits SFD sur terrain, par l'octroi de financement ;
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- le gouvernement, en l'occurrence le Ministère de
l'Industrie, Petites et Moyennes entreprises et la Banque Centrale du Congo.
Les institutions du système financier
décentralisé opérant en RDC offrent plusieurs types de
produits financiers et le travail abattu par elles a donné au secteur de
la microfinance une grande ampleur, en raison notamment de sa capacité
de créer des emplois et des revenus.
Pour illustrer ces propos, voyons quelques
éléments structurels tirés de l'enquête menée
par la Banque Centrale Congo auprès des institutions financières
de proximité de la ville-province de Kinshasa et des provinces du
Bandundu et du Bas Congo, au 30 juin 2005. En ce qui concerne la
répartition géographique du crédit, les zones urbaines
sont desservies à concurrence de 97% contre 3% pour les zones rurales.
Quant à la distribution par secteur d'activité, l'enquête
révèle que 66% des crédits sont alloués au secteur
commercial, 16% à l'agriculture et 18% aux autres secteurs.
Enfin, l'approche « gender » donne une
répartition de l'ordre de 39% des crédits aux hommes contre 61%
aux femmes. L'épargne mobilisée par ces institutions au cours de
ce même exercice s'élève à CDF 308.4 millions et le
volume de crédit distribué se chiffre à CDF 665 millions,
dont 415.9 millions au moins provenant des bailleurs de fonds.
Hormis les trois provinces dont il est question dans le
paragraphe précédent, à l'Est de la RDC, la population,
appauvrie par la crise que traverse le pays, a développé de
nouveaux comportements, parmi lesquels des mécanismes financiers, qui
lui ont permettent de survivre.
En effet, à l'Est de la RDC, particulièrement au
Kivu, les acteurs de l'économie populaire s'étaient mis en
intense activité pour résister dans un contexte social et
macroéconomique désastreux.
On peut ainsi remarquer entre autres :
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- de petits marchands qui vendent la journée en monnaie
locale, et apprenant à garder le soir la marchandise en lieu et place de
la monnaie qui, le matin suivant, peut dévaluer. Cet exercice a
été renforcé par la libéralisation du dollar, une
monnaie stable, qui a succédé au stockage des produits ou de la
marchandise. Aujourd'hui, dans certains milieux, les prix se fixent en dollar
;
- de petits commerçants qui s'organisent en tontines
pour s'octroyer des crédits rotatifs ; - des groupes qui mettent sur
pied un système de « Likelemba » ou « Kinkudimba
»
(ristourne) pour des avances rotatives et pour la constitution
d'une petite caisse
commune gardée par un membre ;
- le recours au système de troc et de crédit en
nature a pris de l'ampleur au sein des groupes et des associations dans
plusieurs milieux (ex : crédit tôle remboursable en café,
crédit chèvre remboursable en chèvre, crédit
matériel remboursable en nature...) ;
- des ONG, associations et églises introduisent des
crédits sociaux dans les milieux frappés par des calamités
(ex : habitat à Goma, femmes violées, sidéens,
démobilisés et les enfants de la rue) ;
Ces multiples initiatives de lutte quotidienne de la
population pour la survie sont devenues propices au développement des
microsystèmes financiers. Différents acteurs bâtissent des
mécanismes (monétaires et non monétaires) réalistes
et ajustés aux activités économiques et financières
de la population à la base.
De ces mécanismes naissent de nouvelles formes de
services microfinanciers à la base offertes par des églises, des
organisations d'appui laïque, des fédérations d'organisation
de base, des partenaires extérieurs et même des organismes
humanitaires. Une enquête menée sur 9 organisations
révèle que ces dernières encadrent pour le moment 7.080
groupes emprunteurs clients d'en moyenne 7 personnes. Cela signifie qu'à
l'heure actuelle, plus de 35.400 personnes travaillent avec ces crédits.
Ainsi, 247.800 personnes bénéficient directement des actions de
ces organisations pour un montant de 2.891.159 dollars. Ces chiffres, bien que
partiels, montrent un certain dynamisme dans le secteur de la microfinance et
prouvent à suffisance que ce secteur est porteur d'espoir et qu'il
mérite une attention particulière de tous.
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Structure d'encadrement et encadrement
institutionnel
En vue de trouver des solutions aux problèmes qui leur
sont communs, ces coopératives et d'autres institutions de
microcrédits, ont des réseaux d'encadrement tels que :
- Le réseau groupe d'acteurs de microfinance de
sud-ouest, GAMF en sigle, qui est un réseau local ;
- Le Regroupement des Institutions du système de
Financement Décentralisé au Congo, RIFIDEC en sigle, une
émanation de la coopération technique allemande,
créé en l'an 2000 et qui poursuit deux principaux objectifs,
à savoir :
1. Assurer la défense des intérêts des
opérateurs du système de financement décentralisé
;
2. Renforcer les capacités institutionnelles de ses
membres à travers des formations des échanges d'informations, des
appuis techniques et des conseils. - Le forum de la microfinance du Bas- Congo,
FOMIF Bas- Congo en sigle ; - Le forum de la microfinance du Bandundu, FOMIF
Bandundu en sigle.
Ces deux derniers ont pour but de :
1. Défendre et protéger les intérêts
des systèmes financiers décentralisés ;
2. Fournir un cadre de formation, d'information et
d'étude ;
3. Construire une vision commune et élaborer un plan
pour le développement efficient de la microfinance dans la province ;
4. Améliorer le taux de pénétration.
L'encadrement institutionnel est assuré par la Banque
Centrale du Congo. En effet, le secteur de la microfinance est devenu un outil
d'émancipation économique et social. L'institut
d'émission, par la sous direction chargée de la microfinance,
mise en place au mois de septembre 2000, a résolu d'y porter un
intérêt particulier. C'est ainsi qu'il a été
assigné à cette dernière les missions ci-après :
22 RIFIDEC, Rapport annuel des activités 2007,
kinshasa, juillet 2007, pp. 11-15.
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- Dresser le diagnostic du secteur et constituer une base de
données fiables et actualisées ;
- Vérifier et contrôler la conformité des
opérations aux instructions réglementaires y relatives ;
- S'assurer de la régularité de la gestion
interne et de la conformité des activités des institutions du
système financier décentralisé aux dispositions
légales en la matière.
Par ailleurs, à côté de ses missions de
supervision, de contrôle et de réglementation du secteur, la
Banque Centrale du Congo poursuit entre autres les objectifs spécifiques
suivants :
- La promotion, la rationalisation et la rentabilisation du
secteur de la microfinance en RDC ;
- La création d'un système financier de
proximité capable de collecter la petite épargne et d'octroyer
des micros crédits, sur une base durable, aux micros entrepreneurs et
aux ménages à faibles revenus.
Ainsi, pour remplir valablement ses tâches et atteindre
les objectifs lui assignés, la sous direction de la microfinance a
arrêté un certain nombre de stratégies destinées
à :
- Formaliser le secteur de la microfinance en le dotant d'un
cadre légal et réglementaire
cohérent et adapté à ses exigences ;
- Assurer l'accessibilité au financement à un
nombre élevé de bénéficiaires ;
- Pérenniser les IMF par l'application de pratiques
financières saines ;
- Professionnaliser les acteurs du secteur de la microfinance.
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