Paragraphe 2 : Les obligations complémentaires
131 Les conventions régionales suivantes reprennent la
coopération préconisée entre Etats en complétant,
l'obligation de prévention : la convention de l'OEA de 1971(article 8,
a) et celle de 2002 (article 4, paragraphe 1, a et b) ; la convention arabe de
1998(article 3, I, paragraphe 1) ; la convention de l'OCI de 1999(art. 3, A,
§ 1) ; la convention de l'OUA de 1999(art.4, §2, a) ; la convention
de Shanghai de 2001(art. 6, §§ 4 -6).
132Art. 3- I, § 6 de la convention arabe de
1998 relative à la répression du terrorisme ; voir
également la convention de l'OCI de 1999 pour combattre le terrorisme
international (art. 3, § 6) ; la convention de l'OUA de
1999 sur la prévention et la lutte contre le terrorisme
(article 4, paragraphe 2, d)
133Voir l'article 3, I, paragraphe 7 de la
convention arabe ; et l'article 3, A, paragraphe 7 de la convention de
L'OCI.
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En dehors de l'obligation générale contenue
presque dans toutes les conventions antiterroristes, la résolution
1373(2001) du Conseil de Sécurité a mis à la charge des
Etats d'autres obligations de préventions complémentaires (A)
ainsi l'interdiction de tout soutien au terrorisme (B).
A : Les obligations préventives
complémentaires de la résolution 1373(2001)
Adoptée après les attentats du 11 septembre 2001
contre les tours jumelles du World Trade Center, la Résolution
1373 (2001) des Nations Unies134 est un instrument de
référence de lutte contre le terrorisme. Elle très
édifiante en matière de prévention du terrorisme, et
investit un champ de compétence assez élargi. Cette
résolution réaffirme l'obligation qui pèse sur les Etats
de s'abstenir de soutenir, de quelque manière que ce soit, toutes
activités terroristes135. Aussi les Etats se voient-ils
obligés d'interdire à « leurs nationaux ou à toute
personne ou entité se trouvant sur leur territoire de mettre des fonds,
avoirs financiers ou ressources économiques ou services financiers ou
autres services connexes à la disposition, directement ou indirectement,
de personnes qui commettent ou tentent de commettre des actes de terrorisme,
les facilitent ou y participent, d'entités appartenant à ces
personnes ou contrôlées, directement ou indirectement, par elles
et de personnes et entités agissant au nom ou sur instruction de ces
personnes » 136 . Elle impose également à tous les Etats
d'« empêcher que ceux qui financent, organisent, facilitent ou
commettent des actes de terrorisme n'utilisent leurs territoires respectifs
pour commettre de tels actes contre d'autres Etats ou contre les citoyens de
ces Etats (...) ». Le Conseil de sécurité tire de cette
obligation deux mesures corollaires ayant trait à l'infiltration et
à la circulation d'éléments terroristes. Il s'agit
notamment du refus d'accorder l'asile et le statut de réfugiés
aux terroristes et le contrôle aux frontières pour empêcher
l'infiltration ces terroristes.
134 Voir l'avant-dernier considérant du
préambule de la Convention générale sur le terrorisme
internationale, qui énonce déjà que « les
activités des forces armées des Etats sont régies par des
règles de droit international qui se situent hors du cadre de la
présente convention ».
135 Voir le rapport du coordonnateur sur les résultats
des consultations bilatérales officieuses, dans Rapport du
Comité spécial créé par la résolution 51/210
de l'AG en date du 17 décembre 1996, 7ème session (2003),
Documents officiels de l'AG, doc. A/58/37, 2 avril 2003, annexe II, point
B, paragraphes 3-7
136 Cette position doit, néanmoins, être
relativisée au regard de la définition du terrorisme d'Etat
donnée par Mme Kalliopi KOUFA, dans son rapport final de 2004 sur «
Le terrorisme et les droits de l'homme ». Elle en donne deux sens
plausibles : dans une première acception, le terrorisme d'Etat renvoie
à l'application d'une politique de terreur sur le plan interne,
érigée en quelque sorte en système de gouvernement. Dans
un deuxième sens, le terrorisme s'entend du recours à des actes
et méthodes terroristes « parrainés par l'Etat »,
« lorsque le gouvernement planifie, soutient, oriente et contrôle
des opérations terroristes dans un pays tiers ».
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L'asile en droit international a été
défini par l'Institut de droit international comme « (...) la
protection qu'un Etat accorde sur son territoire ou dans un autre endroit
relevant de certains de ses organes à un individu qui est venu la
chercher »137. Cette protection contre les poursuites par un
autre Etat peut être accordée souverainement par un Etat, dont la
responsabilité internationale ne peut être engagée en
principe : l'asile est une protection accordée dans des
considérations d'humanité par un Etat à un individu
ressortissant d'un autre Etat qui craint des persécutions. Dans son
arrêt du 20 novembre 1950 en l'Affaire Droit d'asile, la CIJ
avait présenté ainsi l'articulation du principe et de l'exception
: « En principe donc l'asile ne peut être opposé à
l'action de la justice. Il n'y a d'exception à ce principe que si, sous
le couvert de la justice, l'arbitraire se substitue au règne de la loi
». Tel serait le cas si l'administration de la justice se trouvait
viciée par des mesures clairement inspirées par l'esprit
politique. L'asile protège le criminel politique contre toutes mesures
que le pouvoir prendrait ou tenterait de prendre contre ses adversaires
politiques et dont le caractère extralégal serait manifeste
»138. L'asile est donc une exception au principe de la
coopération en matière judiciaire liée au caractère
discriminatoire des poursuites. La question connaît une acuité
particulière en matière de crimes politiques. Il est en revanche
reconnu que le droit d'asile ne peut être invoqué dans le cas des
poursuites réellement fondées sur un crime de droit commun ou sur
des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations
Unies139. Or de manière générale et abstraite,
il ne fait désormais aucun doute que les actes terroristes sont
contraires aux buts et principes des Nations Unies, puisqu'ils constituent une
menace contre la paix et la sécurité
internationales140. A cet égard, l'importante
Déclaration contenue dans la Résolution 49/60 (9 décembre
1994) de l'AGNU le confirme. Selon le paragraphe 5 (f ), les Etats «
doivent également remplir les obligations que leur imposent la Charte
des Nations Unies et d'autres dispositions du droit international dans la lutte
contre le terrorisme (...) dont celle de prendre les mesures voulues, avant
d'accorder l'asile, pour s'assurer que le demandeur d'asile n'a pas eu
d'activité terroristes et, après avoir accordé l'asile,
pour s'assurer que le statut de réfugié n'est pas mis à
profit pour
137 Par exemple, la connexité avec le crime de guerre
n'est plus une exigence constitutive du crime contre l'humanité et la
planification du crime n'est plus exclusive d'un gouvernement, mais peut
être celui d'un groupe quelconque. Pour d'autres détails, voir
William A. SCHABAS et Clémentine OLIVIER, « Terrorisme : crime
contre l'humanité ? » in SOS, ATTENTATS, Terrorisme,
victimes et responsabilité pénale internationale,
Calmann-Lévy, Paris, 2003, p. 379 et s. Voir également Marco
SASSOLI et Antoine A. Bouvier, Un Droit dans la guerre ? Volume 1,
CICR, Genève 2003, pp. 307 et 308. Et René DEGNI SEGUI, Le
tribunal pénal international, Cours de DEA, droit public,
Université de Cocody, 2006-2007.
138 Cf. Rapport de la CDI sur les travaux de sa
48ème session, A/51/10, 1996, pp. 114-117
139 Jean Christophe MARTIN, Les règles
internationales relatives à la lutte contre le terrorisme,
Bruylant, Bruxelles, 2006, p. 225.
140 Voir Bruce HOFFMAN, La mécanique terroriste,
Calman Lévy, Paris, 1999, p. 26
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contrevenir aux dispositions de l'alinéa a) ci-dessus
»141. Nous pouvons conclure de cette formulation et en
particulier de l'emploi du mot « obligation » que la norme a une
portée coutumière142. L'exception terroriste à
l'asile et au statut de réfugié relève donc certainement
du droit international général143. Il n'est donc pas
surprenant que la Résolution 1373 impose aux Etats en son paragraphe 2
(c) de ne pas accorder l'asile aux terroristes et à leurs soutiens : les
Etats « refusent de donner l'asile à ceux qui financent,
organisent, appuient ou commettent des actes de terrorisme ou recèlent
les auteurs ». Un Etat pourrait voir sa responsabilité
internationale engagée pour avoir accordé l'asile en
méconnaissance de cette disposition. Ainsi, la mise en oeuvre de cette
obligation suppose en principe l'identification des personnes impliquées
dans le terrorisme et une procédure de vérification pour chaque
demandeur d'asile ou jouissant de l'asile.
La Résolution 1373 contient par ailleurs une autre
obligation, celle de ne pas laisser son territoire être utilisé
par les terroristes. Il s'agit de l'obligation d'exercer un contrôle aux
frontières et un contrôle des documents de voyage. Le paragraphe 2
(g) de la résolution est ainsi formulé : les Etats «
empêchent les mouvements de terroristes ou de groupes de terroristes en
instituant des contrôles efficaces aux frontières, ainsi que des
contrôles lors de la délivrance de documents d'identité et
de documents de voyage et en prenant des mesures pour empêcher la
contrefaçon, la falsification ou l'usage frauduleux de papiers
d'identité et de documents de voyage ». Le Conseil de
sécurité ne faisait que rappeler la nécessité du
renforcement d'un tel contrôle. Cette attitude ne peut être
interprétée pour autant comme une immixtion dans les «
affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale
d'un Etat » selon les propres termes de l'article 2 paragraphes 7 de la
Charte des Nations Unies144. En
141 Il en était ainsi de la jurisprudence du Tribunal
de Nuremberg de 1945. William A. SCHABAS et Clémentine OLIVIER
expliquent à ce sujet que, dans le cadre du jugement des criminels sous
le IIIème Reich, la conception traditionnelle était
que, en fait, « non seulement une politique devait exister mais qu'elle
devait être celle d'un Etat, comme dans le cas de l'Allemane Nazie
». Mais, bien que cela ait pu être le cas durant la Seconde Guerre
mondiale, (...) ce n'est plus le cas aujourd'hui, p. 383
142 On constate que, ni le statut des TPIY et TPIR ni celui de
la CPI ne posent comme condition que le crime contre l'humanité soit
perpétré ou encouragé par les autorités
étatiques. L'article 5 du Statut du TPIY et l'article 3 du TPIR gardent
le silence sur cette question. Au surplus, la CDI précise que «
c'est l'instigation ou la direction soit d'un gouvernement ou d'une
organisation, ou d'un groupe quelconque, qui donne à
l'acte sa dimension et en fait un crime contre l'humanité... »
143 On citera comme exemples d'organisations terroristes
contemporaines l'ETA en Espagne (Euzkadi Ta Azkatasma qui se traduit par «
le pays Basque et sa liberté »), le HAMAS en Palestine, le
HEZBOLLAH au Liban, et la nébuleuse internationale terroriste Al Qaida
de Oussama BEN LADEN, AQMI au Sahel, Boko Haram au Nigeria .
144 Il faut préciser que cet auteur ne conclut pas
à une généralisation des actes terroristes comme crimes
contre l'humanité. Bien au contraire, pour lui, « la qualification
de crime contre l'humanité pourrait s'avérer pertinente
s'agissant des seuls actes commis sur le territoire américain ».
Poursuit-il,
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effet, en agissant ainsi, l'organe sécuritaire ne
s'écarte pas de la légalité, puisque le même article
l'y autorise pour les besoins du maintien de la paix145. Ainsi que
le concluent les Professeurs Alain PELLET et Patrick DAILLIER, « (...)
dans l'intérêt général, exprimé par le
Conseil de sécurité, les souverainetés étatiques
doivent s'incliner devant les exigences du maintien de la paix
»146. Ajoutons enfin que la Résolution 1373 n'est
cependant pas complètement innovante puisque en la matière des
obligations équivalentes figurent déjà dans certaines
Conventions régionales.
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