CHAPITRE V : L'IMPACT DES ACTIONS ET LES
DIFFICULTÉS DES COMMUNES DE GAROUA BOULAI, NGAOUI ET BERTOUA DANS
LA GESTION DESCONSEQUENCES DES CONFLITS CENTRAFRICAINS DE 1960 A 2013
Les multiples actions des communes des bortherlands
camerounais ont permis de faire face aux conséquences des conflits
centrafricains dans les villes de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua. Les effets
d'amélioration des conditions de vie des refugiés centrafricains
et des populations locales par le truchement des communes, sont aujourd'hui
perceptibles et lisibles dans ces trois villes. Ceci à travers les
actions réalisées sur les plans social, politique, culturelle
qu'économique. Ces actions qui ont eu un impact considérable
s'observent à plusieurs niveaux et sous plusieurs formes. Toutefois, il
faut aussi rappeler que la réalisation de ces actions a aussi
rencontré d'énormes difficultés. L'objet du présent
chapitre consiste à présenter l'impact des actions des communes
de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua, sur les plans politique,
économique, social et culturel. Ensuite, il s'agira de scruter dans la
seconde partie, les difficultés dont ces trois communes ont
rencontré dans la réalisation de leurs actions.
I-L'IMPACT DES ACTIONS DES COMMUNES DE GAROUA BOULAI,
NGAOUI ET BERTOUA SUR LES PLANS POLITIQUE, ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET
CULTUREL
L'instabilité politique en Centrafrique a
favorisé depuis longtemps et favorise encore aujourd'hui des
conséquences négatives pour le Cameroun en général
mais les villes frontalières en particulier. De nombreuses populations
en provenance de la République Centrafricaine sont présentes dans
les régions frontalières du Cameroun. Si, avec l'arrivée
massive de ces derniers on note une situation où les centres de
santé et les écoles sont débordés par l'effectif
pléthorique des malades et des élèves, une flambée
des prix des denrées alimentaires, des cas de vols de plus en plus
récurrentes et une croissance exponentielle de
l'insécurité, il n'en résulte pas moins qu'en 2013, on
assiste à une nette amélioration de la situation. Il est question
dans cette partie de présenter exclusivement l'impact des actions des
communes de Bertoua, Garoua Boulai et Ngaoui sur les plans politiques,
économique, social et culturel.
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A-L'impact des actions des communes de Garoua Boulai,
Ngaoui et Bertoua sur le plan politico-économiques
Les multiples actions des communes des bortherlands
camerounais face aux crises centrafricaines ont eu impact sur les plans
politique et économique
1-Le recul de l'insécurité et le maintien
de la paix au Cameroun
Les répercussions des conflits centrafricains au
Cameroun suscitent la crainte des hommes d'État surtout qu'elles
s'accompagnent d'un mal qui effraie tout le monde. Il s'agit de
l'insécurité. Les théoriciens des migrations de crise ont
établi l'idée selon laquelle l'insécurité et ses
corollaires dérivent généralement des situations de
conflit et de tout ce qui suit1. Les réfugiés qui
arrivent de la RCA peuvent alors être des facteurs de
l'insécurité dans les villes de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua
dans la mesure où leur mouvement s'accompagne parfois et même
assez souvent avec la circulation des armes légères de petit
calibre. Facilement dissimulables, du fait de leur
légèreté, « Ces armes échappent aux
contrôles douaniers et policiers et peuvent ainsi passer d'un pays
à un autre selon le mouvement des réfugiés
»2 En période de conflit, il faut noter que,
l'opportunité d'entrer en possession de ces armes est chose facile.
D'autre part, les populations centrafricaines qui s'installent
au Cameroun font face à d'énormes difficultés de la vie
courante. Celles-ci en fuyant les bals, la hâche de guerre et les
exactions des rebelles n'ont pas eu le temps de bien se munir afin de faire
face à la nouvelle vie à laquelle elles sont appelées.
Ainsi, confrontés à des questions de survie, plusieurs d'entre
eux vont choisir les moyens obscurs pour assurer leur survie. L'on note alors
dans les régions frontalières camerounaises une croissance de
vol, des actes d'agression, le banditisme, la prostitution, les braquages
à mains armées, les bandits de grand chemin (Zarguina)
et les prises d'otage 3 . Les actions des communes des
bortherlands camerounais face aux crises centrafricaines ont alors
été d'une très grande importance surtout lorsqu'on sait
qu'elles ont favorisé l'intégration des réfugiés.
On assiste à une prévention de l'insécurité et le
contrôle de la circulation des armes qui pourraient entrainer des
conséquences graves non seulement pour les zones frontalières
mais surtout,
1 Dion Essongué Marinette, « La prise
en charge des femmes et des enfants réfugiés centrafricains dans
les régions de l'Est et de l'Adamaoua au Cameroun de 1960 à 2010
: Etat, enjeux et impact », Mémoire de Master II, Université
de Ngaoundéré, pp 130-135.
2Njimamboué Aliou, 2009, « Les enjeux
stratégiques de la frontière orientale du Cameroun (1960-2008)
», Mémoire de DEA, Université de Ngaoundéré,
p. 56.
3 Ibid.
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pour l'État camerounais en général. En
effet, les populations centrafricaines qui s'installent dans les zones
frontalières du Cameroun, connaissent de plus en plus un nombre
croissant. Cette situation met à risque l'État camerounais qui
peut voir naître sur son territoire un groupe de rébellion au
même titre que la RCA4 si rien n'est fait. La circulation des
armes, facteur d'insécurité est récurrente comme le
souligne HarounaYaraDoua : « (....) même les femmes et les enfants
sont souvent utilisés pour la circulation des armes car ils ne font pas
souvent l'objet d'une fouille systématique à la traversée
de la frontière »5 Il est donc sans doute que les
populations centrafricaines qui sont installées dans les zones
frontalières du Cameroun en particulier, dans les villes de Garoua
Boulai, Ngaoui et Bertoua possèdent des armes avec eux.
La prévention de l'insécurité dans ces
régions passe en partie par un meilleur encadrement de populations
centrafricaines comme souligne les ONG humanitaires : « il faut offrir aux
réfugiés un espoir de vie meilleur pour espérer les voir
rester du bon côté de la barrière »6. La
prévention de l'insécurité passe donc par un meilleur
encadrement des réfugiés qui constituent de nos jours un
potentiel facteur d'insécurité7. Les actions
humanitaires des communes de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua sont alors
à plus d'un titre bénéfiques pour les régions
frontalières mais surtout pour le Cameroun qui peut, comme nous l'avons
souligné tantôt être à son tour touché par le
même fléau. Puisqu'on sait qu'en matière
d'insécurité, la gangrène peut facilement se
répandre et infecter les zones saines8. D'où
l'intérêt des actions communes des bortherlands face aux
conflits centrafricains. Ces actions peuvent alors être analysées
comme une action préventive de l'insécurité
transfrontalière dans une région envahie par des personnes en
quête de protection. Des personnes qui ne sont plus seulement
vulnérables mais qui peuvent aussi être des personnes vectrices
d'insécurité. Les villes de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua,
présentement villes d'accueil des réfugiés centrafricains,
ne peuvent se permettre de négliger cette prise en charge, Vu que cette
gestion est non seulement un luxe pour elles-mêmes mais surtout pour le
Cameroun en général.
4 Les populations centrafricaines qui s'installent
dans les villes de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua sont à
majorité des ex-rebelles de la « SELEKA ».
5 Entretien avec HarounaYara Doua le 17 juillet 2014
à Ngaoui.
6 R. Preston, 1995, « y'a-t-il une
éducation spécifique aux réfugiés », in le
courrier n°150, mars-avril, p.60. 7Ndjock Nyobé, «
Le Cameroun de l'ONU de 1989 relative aux droits de l'enfant et ses
perspectives d'application au Cameroun : Analyses des aspects juridiques et
sociopolitiques », Thèses de Doctorat de 3è Cycle en
Relations Internationales, IRIC, Université de Yaoundé. P. 39.
8 N'Salambi Makiades Neves, 1989, « Le
problème de réfugiés en Afrique et ses conséquences
pour les pays hôtes : cas des réfugiés Namibiens,
Sud-Africains et Zaïrois en Angola », Mémoire de
Maîtrise professionnelle en relations internationales, IRIC, p.45.
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En somme, il est convenable de souligner que les populations
peuvent devenir des facteurs d'insécurité dans les villes de
Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua si leur prise en charge est biaisée
voir laissée pour compte. Lorsque leur encadrement présente
certaines lacunes, ces personnes désespérées peuvent
devenir un important facteur de déstabilisation tant sur le plan
politique, économique, social que culturel de ces trois villes, mais
aussi du Cameroun tout entier. Cette déstabilisation cour le risque
d'aller plus loin que des problèmes de conflit foncier et des rebellions
comme le souligne Saïbou Issa : « l'impact de leur présence
sur un territoire, associé à mauvaise prise en charge et à
d'autres facteurs externes, conduit à une situation désastreuse.
Où on assiste à une transformation du banditisme transfrontalier
9». Puisque la criminalité rurale se modifie et devient
une criminalité sophistiquée avec, des modes opératoires
qui n'ont rien à envier aux délinquants les plus
expérimentés. Exactement ce qu'on remarque dans les villes de
Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua. Les actions humanitaires de ces trois
communes ont alors permis d'éviter une insécurité et
renforcer la paix au Cameroun.
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