REPUBLIQUE DU SENEGAL
UN PEUPLE-UN BUT-UNE FOI
*******
MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA
RECHERCHE
SCIENTIFIQUE
*******
DIRECTION DE L'ENSEIGNEMENT
SUPERIEUR
********
UNIVERSITE AMADOU HAMPATE BA DE DAKAR
![](La-transparence-dans-les-marches-publics-au-Senegal-et-au-Togo1.png)
FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET
POLITIQUES
*******
Mémoire de fin de cycle pour l'obtention du
diplôme de Master en
Management Public et Relations Internationales
(MPRI)
SUJET : LA TRANSPARENCE DANS LES
MARCHES
PUBLICS AU SENEGAL ET AU TOGO
![](La-transparence-dans-les-marches-publics-au-Senegal-et-au-Togo2.png)
ANNEE ACADEMIQUE 2015-2016
Présenté par :
M. Kwasi Nyatefe DOUGBLO
|
Sous la direction de :
M. Aliou SAWARE
Docteur en droit public à l'UCAD, expert en
Partenariat Public-privé,
Avocat inscrit au barreau du
Sénégal
|
![](La-transparence-dans-les-marches-publics-au-Senegal-et-au-Togo3.png)
ANNEE ACADEMIQUE 2015-2016
i
REPUBLIQUE DU SENEGAL
UN PEUPLE-UN BUT-UNE FOI
*******
MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA
RECHERCHE
SCIENTIFIQUE
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DIRECTION DE L'ENSEIGNEMENT
SUPERIEUR
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UNIVERSITE AMADOU HAMPATE BA DE DAKAR
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FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET
POLITIQUES
*******
Mémoire de fin de cycle pour l'obtention du
diplôme de Master en
Management Public et Relations Internationales
(MPRI)
SUJET : LA TRANSPARENCE DANS LES
MARCHES
PUBLICS AU SENEGAL ET AU TOGO
Présenté par :
M. Kwasi Nyatefe DOUGBLO
|
Sous la direction de :
M. Aliou SAWARE
Docteur en droit public à l'UCAD, expert en
Partenariat Public-privé,
Avocat inscrit au barreau du
Sénégal
|
AVERTISSEMENT !
« L'Université Amadou Hampaté Ba
n'entend donner aucune approbation, ni improbation, aux opinions émises
dans les mémoires. Ces opinions doivent être
considérées comme propres à leurs auteurs ».
Avertissement ii
DEDICACE
A la mémoire de ma chère mère
Jacqueline EHO,
A mon père Alex DOUGBLO,
A mes soeurs Nadine et
Honorine,
A mes tantes Enyonam et Flavienne
EHO,
A mon cousin Thierry EBRI,
A Armel KAGBARA, Josias BILE
et mon cher FAFANA Moubarak,
A Madame Martine SEGBEAYA,
A ma très chère Soukeyna Wendyam
OUEDRAOGO que j'affectionne tant,
Eux qui soufflent en moi l'espoir de
persévérer et de donner le meilleur de moi,
Je leur dédie ce mémoire.
Dédicace iii
REMERCIEMENTS
Remerciements iv
Je tiens à remercier en premier lieu, mon Directeur de
Recherches, le Docteur Aliou SAWARE, pour ses conseils, sa
disponibilité et son soutien qui m'ont permis de donner vie et valeur
à ce mémoire.
Je remercie également M. Cheikh SAMB,
mon professeur et expert en Marchés publics, pour sa
disponibilité et sa promptitude à mon égard.
Mes remerciements vont aussi à
l'Université Amadou Hampaté Ba pour sa formation
et sa rigueur.
Je remercie tous mes compagnons d'étude de la
Promotion MPRI 2015-2016, la promotion bénie et la
meilleure de tout mon parcours universitaire.
Une pensée spéciale à mon ami et
condisciple Fakridine Saïd pour son attention, sa
disponibilité à mon égard, et ses critiques
constructives.
Ma gratitude va également à l'endroit de
M. Kombate Lardja, éminent juriste à
l'ARMP-TOGO, pour ses orientations pertinentes, ses encouragements et ses
conseils.
A tous mes proches, ainsi qu'à toutes les personnes qui
ont participé de près ou de loin, par un apport, un conseil, une
prière, une aide quelconque, à la réalisation de ce
mémoire, vous avez toute ma gratitude.
Sigles, acronymes et abréviations v
SIGLES, ACRONYMES ET ABREVIATIONS
AAI : Autorité Administrative
Indépendante
AC : Autorité Contractante
AGPM : Avis Général de Passation
des Marchés
AO : Appel d'offres
AOO : Appel d'Offres Ouvert
AOR : Appel d'Offres Restreint
ARMP : Autorité de Régulation des
Marchés Publics CCMP : Commission de Contrôle des
Marchés Publics
CMP : Code des Marchés Publics
CCGA : Cahier des Clauses
Générales Administratives CHNUF : Centre
Hospitalier National Universitaire de Fann
COA : Code des Obligations de
l'Administration
CPC : Cahier des Prescriptions Communes
CPS : Cahier des Prescriptions
Spéciales
CPM : Cellule de Passation des Marchés
CRD : Comité de Règlement des
Différends
CS : Cour Suprême
DAGE : Direction de l'Administration
Générale et de l'Equipement
DAO : Dossier d'Appel d'Offres
DCMP : Direction Centrale des Marchés
Publics
DNCMP : Direction Nationale de Contrôle
des Marchés Publics
DP : Demande de Propositions
DRP : Demande de Renseignements et de Prix
ED : Entente Directe
LONATO : Loterie Nationale Togolaise
MEF : Ministère de l'Economie et des
Finances
MFPAA : Ministère de la Formation
Professionnelle, de l'Apprentissage et de l'Artisanat
MP : Marchés Publics
MPEM : Ministère de la Pêche et
de l'Economie Maritime
MSAS : Ministère de la Santé et
de l'Action Sociale
SAZOF : Société
d'Administration de la Zone Franche
SENELEC : Sénégal
Electricité
PPM : Plan de Passation des Marchés
PRMP : Personne Responsable des
Marchés Publics
UEMOA : Union Economique et Monétaire
Ouest Africaine
Sigles, acronymes et abréviations vi
SOMMAIRE
Sommaire vii
Introduction
TITRE I : Une transparence affirmée
Chapitre 1 : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation
Section 1 : Une transparence quant aux procédures
normales
Section 2 : Une transparence quant aux procédures
particulières
Chapitre 2 : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle
Section 1 : Un contrôle administratif
ambivalent
Section 2 : Un contrôle juridictionnel indispensable
TITRE II : Une transparence relative
Chapitre 1 : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation
Section 1 : Des atteintes liées aux
marchés de type concurrentiel
Section 2 : Des constats relatifs aux procédures
particulières
Chapitre 2 : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales
Section 1 : Des faiblesses liées aux
mécanismes de contrôle
Section 2 : Des mesures de recommandations
générales
Conclusion générale
Bibliographie
Table des matières
EPIGRAPHE
Epigraphe viii
«La relation contractuelle est par nature
réfractaire à la transparence ».
CH. BRÉCHON-MOULÈNES, «
Transparence et marchés publics »
Introduction 1
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
INTRODUCTION
Depuis quelques années déjà, l'on est
témoin en Afrique, d'une mutation des règles du droit public qui,
au gré de l'évolution du contexte économique des Etats, a
suscité pour ces derniers, la nécessité de définir
un cadre harmonisé de leurs législations. Le lien ainsi
établi entre le droit et l'économie semble a priori
dénoter d'une part de l'importance que revêt un encadrement
juridique pour la matière économique et d'autre part, de la
volonté pour les Etats à se conformer aux exigences d'un organe
supranational dans le but d'atteindre les objectifs de développement
économique et de bonne gouvernance. De cette configuration bâtie
sur une dynamique d'intégration sous régionale, naquit un droit
dit des « marchés publics ».
A l'évidence, si les marchés publics1
voient leur complexité croître au fil des années sous
l'influence de certaines pratiques, le droit communautaire oeuvre quant
à lui, à redorer leur blason, tant dans leur passation que dans
leur contrôle et exécution. Depuis la Déclaration de Paris
sur l'efficacité de l'aide au développement du 2 mars 2005, le
Sénégal et le Togo se sont résolument engagés dans
un vaste programme de réformes au niveau des finances publiques et des
systèmes nationaux de passation des marchés publics. Parmi ces
réformes on note l'harmonisation de leurs systèmes de passation
des marchés pour les hisser au rang des meilleures pratiques
internationalement admises2. C'est donc dans ce contexte que l'Union
Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) a théorisé
et mis en oeuvre un programme sous régional de refonte des
systèmes nationaux de passation des marchés, visant à
limiter autant que possible, les irrégularités tant
décriées dans ce domaine particulier du droit public
économique3.
Mais pour en arriver là, l'instance communautaire a
adopté le 9 décembre 2005, deux textes
1Il convient de faire la différence entre
marchés publics, convention de service public et accord de partenariat,
tous des contrats administratifs mais n'étant pas définis par les
mêmes critères.
2 Cf. le point 28 de la Déclaration de
Paris, relatif au renforcement des systèmes nationaux de passation des
marchés.
3 Le droit public économique est un droit de
l'intervention de l'Etat et des personnes publiques dans la sphère
économique.
Introduction 2
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
fondamentaux. Il s'agit d'une part de la directive
N°04/2005/CM/UEMOA portant procédure de passation,
d'exécution et de règlement des marchés publics et des
délégations de service public, et d'autre part de la directive
N°05/2005/CM/UEMOA portant Contrôle et Régulation des
marchés publics et délégation de service public,
permettant ainsi au Sénégal et au Togo d'ajuster leur
règlementation en la matière.
En effet, ces nouveaux textes ont apporté de nombreuses
innovations, notamment la rationalisation des procédures de passation
des marchés publics, l'amélioration du contrôle à
priori, la responsabilisation des structures dépensières et
surtout la systématisation du contrôle à postériori.
Dans ce contexte, la création d'un organe en charge du contrôle et
de la régulation des marchés publics, a été
perçue comme une des innovations majeures tant en droit positif
sénégalais que togolais.
Le Sénégal, en ce qui le concerne, s'est
doté d'une autorité de régulation des marchés
publics4 (ARMP), nouveauté à mettre à l'actif
du code des marchés publics en vigueur à cette
époque5. Cet organe de régulation est une
autorité administrative indépendante6 (AAI), distincte
des administrations traditionnelles de l'Etat et perçue comme la
manifestation la plus affirmée de la régulation
juridique7 dans ce domaine. Composée d'un Conseil de
Régulation8, d'une Direction
générale9 et d'un Comité de Règlement
des Différends (CRD)10, compétent pour
4 Décret n° 2007-546 portant
organisation et fonctionnement de l'autorité de régulation des
marchés publics, 02 juin 2007 p. 2938 et S
5 Décret N°2007-546 du 25 avril 2007
portant organisation et fonctionnement de l'Autorité de
Régulation des Marchés publics.
6 Une Autorité administrative
indépendante est une personne morale de droit public, différente
des administrations traditionnelles qui quant à elles, reposent sur le
lien de la hiérarchie. Ce type d'organisme se développe de plus
en plus dans les économies et dispose d'une autonomie financière,
de gestion et d'administration.
7 N DECOOPMAN , « A propos des
autorités administratives indépendantes et de la
déréglementation », J. CLAM, G. MARTIN (dir), Les
transformation de la régulation juridique, LGDJ, « Droit et
société, Recherches et travaux », vol 5, 1998, p.24
8 Le conseil de régulation dispose des
pouvoirs les plus étendus pour administrer l'ARMP, définir et
orienter sa politique générale et évaluer sa gestion dans
les limites fixées par ses missions organiques et statutaires.
9 La Direction générale est
assurée par un Directeur général, recruté sur appel
d'offres par le Conseil de Régulation sur la base de critère
d'intégrité morale, de qualification et d'expérience dans
les domaines juridique, technique et économique des marchés
publics et délégations de service public.
10 Le comité de règlement des
différends est une autorité compétente chargée des
recours non juridictionnels ouverts à tout candidat à une
procédure d'attribution d'un marché public ou
délégation de service public.
Introduction 3
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
trancher les litiges, l'ARMP s'affirme de plus en plus comme
le défenseur des droits des soumissionnaires qui s'estimeraient
lésés par le fait de certaines autorités contractantes.
Quant au Togo, l'ARMP, tout en restant fidèle à
la même configuration structurelle évoquée pour le compte
du Sénégal, doit son avènement au décret n°
2009/013 du 30 juin 2009 relatif aux marchés publics et
délégation de service public. Ce décret, tout en
définissant le cadre institutionnel des marchés publics, qui
d'ailleurs repose sur le principe de la séparation des fonctions de
passation, de contrôle11 et de régulation12,
précise l'indépendance de cette institution de
régulation13.
Par ailleurs, la mise en oeuvre des directives de l'UEMOA
s'est faite conformément aux accords et grands principes qui gouvernent
la commande publique14 et qui sont communément admis par les
standards internationaux à savoir la liberté
d'accès15 à la commande publique,
l'égalité de traitement des candidats16,
l'efficience17 de la dépense publique mais aussi et surtout
la transparence des procédures. Ce dernier principe qui, de toute
évidence constitue le socle de ses devanciers, sera la substance
centrale autour de laquelle seront bâtis nos travaux.
Il va donc de soi que l'analyse de ce thème
dépasse le cadre spécifique des Etats, du moment où
11 La fonction de contrôle consiste à
s'assurer de la bonne application de la règlementation sur l'ensemble
des autorités contractantes.
12 La fonction de régulation est de la
compétence de l'ARMP. Elle consiste à assurer le bon
fonctionnement du système de passation des marchés publics.
13 Elle se conçoit sous trois formes :
indépendance vis-à-vis des entreprises régulées et
des autres intérêts privés; indépendance
vis-à-vis des autorités publiques et indépendance sous
forme d'autonomie institutionnelle.
14 La commande publique est une notion «
globalisante ». Elle renvoie littéralement à un ordre de
l'administration par lequel il est, entre autres, demandé à un
fournisseur la livraison d'une marchandise ou l'exécution d'un service.
L'expression « commande publique » a été
employée pour la première fois dans une acception juridique
à l'article 1er du Code des marchés publics issu du décret
du 7 mars 2001. Voir sur cette question, Jean-Matthieu Glatt, « La
catégorisation des contrats de commande publique : source
d'insécurité juridique », note sous CJCE, 10 septembre 2009,
EURAWASSER, in Les petites affiches, 11 février 2010, p. 3 et S.,
spéc. p. 12. V. Grégory KALFLECHE, Des marchés publics
à la commande publique. L'évolution du droit des marchés
publics, Thèse, Paris II, 2004, p. 25
15 Ce principe suppose la possibilité pour
toute personne remplissant les conditions requises, de se porter candidate
à un marché public
16 Les principes de liberté d'accès
à la commande publique et d'égalité de traitement des
candidats sont complémentaires. Ils résultent du principe
constitutionnel plus général d'égalité des citoyens
devant la loi, ainsi que des principes de libre concurrence et de
liberté du commerce et de l'industrie.
17 L'efficience correspond à une utilisation
rationnelle des deniers publics dans la passation des marchés. C'est
pour cela qu'un marché public doit être attribué au
candidat ayant présenté une offre techniquement conforme et
financièrement avantageuse (moindre coût) pour l'autorité
contractante.
Introduction 4
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
elle intègre des règles formalisées du
droit communautaire, destinées à être transposées.
En effet, l'existence d'un organe communautaire, l'étendue de ses
compétences et l'influence de ses décisions, constituent
aujourd'hui l'expression d'une trame historique récente surtout au
regard des deux dernières directives, considérées comme le
fondement juridique le plus en vogue depuis 11 ans, dans les
généralités qui gravitent autour de la notion de «
marchés publics » dans l'espace UEMOA.
L'expérience sénégalaise et togolaise
dans les marchés publics, quoique récente, contribuera dans une
perspective comparée à mieux asseoir les préoccupations
inhérentes aux marchés publics. Comme on le sait, ce domaine est
profondément entaché par de nombreuses
irrégularités, malgré la consécration des textes
qui, reconnaissons-le, ont tout de même contribué à creuser
le sillon, ce qui du reste nous invite à examiner « la transparence
dans les marchés publics au Sénégal et au Togo »,
thème objet de nos travaux.
Pour une compréhension plus adéquate de ce sujet
de recherche, il convient d'apporter une définition des plus larges et
complètes des termes qui le constituent.
A ce titre, « la transparence » constitue
conformément au décret n° 2005-576 du 22/06/05, portant
Charte de transparence et d'éthique en matière de marchés
publics au Sénégal, « l'application équitable et
rigoureuse de procédures connues et qui constituent exclusivement la
base des décisions d'attribution des marchés
»18. A cet égard, ce principe à valeur
constitutionnelle19, suppose avant tout, un système
d'information performant permettant de lutter contre l'opacité, à
travers la publication régulière et en temps opportun de toute
l'information sur les marchés publics allant de la publication du plan
de passation des marchés (PPM) jusqu'à celle de l'avis
d'attribution du marché.
D'un autre côté, la transparence suppose aussi le
bannissement de toute entrave à la compétition et l'abandon des
pratiques anticoncurrentielles. Concrètement, cela signifie que d'une
part, il faille définir complètement et ce, de façon
neutre, les besoins à satisfaire des autorités
18 Décret n° 2005-576 du 22/06/05, portant
Charte de transparence et d'éthique en matière de marchés
publics.
19 L'exigence de transparence au
Sénégal a été élevée au rang de
principe constitutionnel. En effet, dans le préambule de la constitution
du 22 janvier 2001, le constituant sénégalais affirme son
attachement à la transparence dans la conduite et la gestion des
affaires publiques, ainsi qu'au principe de bonne gouvernance.
Introduction 5
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
contractantes, et d'autre part, laisser libre cours à
la concurrence en évitant autant que possible les pratiques comme le
favoritisme ou la prise illégale d'intérêt et en se fondant
sur l'objectivité comme critère d'évaluation des offres et
d'attribution des marchés. D'un point de vue spécifique, la mise
en concurrence permet d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix,
conformément aux principes d'économie et d'efficience. Aussi, en
appliquant des critères décisionnels objectifs,
élimine-t-on dans la mesure du possible, partialité,
préjugés et subjectivité dans le processus de passation
des marchés publics. Tous ces éléments combinés
convergent vers un traitement équitable et non discriminatoire des
candidats et garantissent ainsi, un comportement conforme à
l'éthique.
L'éthique ainsi évoquée confère
à la transparence, non seulement une culture de
l'intégrité20 mais surtout, la reconnaissance et
l'organisation d'un droit de recours afin de réparer
éventuellement les dommages causés aux soumissionnaires et de
redresser les décisions inéquitables en matière
d'attribution des marchés. Sur ce point, en matière de passation
des marchés, il existe deux sortes de recours : un recours non
juridictionnel et un recours juridictionnel.
Le recours non juridictionnel est d'abord exercé
à titre gracieux au niveau de la personne responsable du marché
public (PRMP)21, puis, en cas de non satisfaction du
soumissionnaire, au niveau du comité de règlement des
différends de l'organe de régulation. En fonction de la nature du
dossier dont il est saisi, le CRD peut soit statuer en formation
litige22, soit en formation disciplinaire23. Quant au
recours juridictionnel, il est généralement introduit devant le
juge de l'administration, tant les contrats de marchés publics sont
généralement des contrats administratifs.
A l'évidence, la notion de transparence, dans son
essence profonde et historique, a connu une
20 L'intégrité suppose une
moralité irréprochable dans le traitement des dossiers, une
utilisation sans gabegie des fonds publics et un traitement équitable de
tous les soumissionnaires.
21 La PRMP est cette personne habilitée
à signer le marché au nom de l'autorité contractante. Par
conséquent, les marchés conclus par une personne non
habilitée à cet effet sont nuls et de nullité absolue.
22 On parle de « Formation litige »
lorsque le CRD statue sur la recevabilité et la suite à donner
à une contestation portant sur une décision d'attribution d'un
marché.
23 La Formation disciplinaire est celle qui porte
sur la sanction du faute grave commise par une des parties lors de la passation
d'un marché public.
Introduction 6
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
évolution d'un point de vue qui transcende le droit
communautaire24 de l'Afrique de l'ouest francophone. Il y a bien des
années, le droit positif français avait entrepris des ajustements
en vue de clarifier l'étendue de cette notion. Mais au contexte actuel,
l'appréhension classique qui était reconnue à la
transparence a connu des mutations et c'est dans l'affirmation
rénovée de cette transparence que le Sénégal et le
Togo25 ont proclamé leur foi afin de venir à bout des
maux qui assaillent les marchés publics.
Au bout du compte, la transparence est le principe sur lequel
le législateur fonde sa politique de lutte contre les malversations dans
les marchés publics. Le raisonnement qui est fait peut-être
simplifié en ces termes : le « principe de transparence »
interdit que le choix soit fait sans que l'on puisse en déterminer les
étapes préalables et les motivations. Ce principe est connu pour
être le socle sur lequel se fonde les autres principes des marchés
publics. Il permet donc de vérifier que le choix des autorités
contractantes a respecté les principes de liberté et
d'égalité entre les candidats, ou, pour prendre un terme
adapté à l'organisation d'un choix, l'impartialité de la
procédure. En rendant lisible la procédure, la transparence
permettra de vérifier une composante fondamentale de la notion
d'impartialité26: l'interdiction d'avoir un
préjugé sur la solution à donner au choix.
Quant aux marchés publics, on dira d'eux pour les
définir dans une acception juridique, qu'ils sont avant tout, des
contrats administratifs par détermination de la loi27 ,
« écrits, et conclus à titre onéreux par une
autorité contractante pour répondre à ses besoins en
matière de travaux, de fournitures ou de services, ou à des
besoins combinant ces différentes catégories
»28. Partant de là, un marché public est
donc considéré comme la manière spécifique dont une
personne
24 Directive n° 04/2005 de l'UEMOA portant
passation des marchés publics
25 Le principe de transparence a été
envisagé de manière approfondie dans le code togolais des
marchés publics dans le chapitre 1 du titre III relatif aux
procédures de passation des marchés publics.
26 La notion d'impartialité implique aussi
l'impossibilité pour l'autorité contractante, d'être
à la fois juge et partie.
27 Il arrive que le législateur, qualifie
directement un contrat de « public », ou lui donne ce
caractère indirectement en attribuant le contentieux au juge
administratif. Ainsi 3 types de contrats obéissent à ce principe
:
D'abord il s'agit des contrats relatifs à
l'exécution des travaux publics et les ventes d'immeubles de l'Etat (Loi
du 28 Pluviôse An VIII, article 4), ensuite des contrats portant
occupation du domaine public et enfin des contrats soumis au code des
marchés publics.
28 Article 4 CMP Sénégal relatif aux
définitions.
Introduction 7
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
publique au sens large29 commande des fournitures,
des services ou des travaux. Cependant, tous les contrats, faisant intervenir
au moins une personne publique ne sont pas forcément des marchés
publics. Ainsi les contrats passés par les sociétés
nationales et les sociétés anonymes à participation
publique majoritaire, ne sont-ils pas des contrats publics, mais bien des
contrats relevant du droit privé et par ricochet, relèvent de la
compétence du juge judiciaire.
Dès lors, tous les actes créateurs de
droit30 de l'administration, les marchés publics y compris,
sont soumis à un contrôle juridictionnel de la Cour suprême.
Ainsi, conformément à la loi n° 2008-75 du 08 août
2008 au Sénégal, la Cour suprême peut «
contrôler la régularité formelle ainsi que la
validité juridique des actes unilatéraux pris par
l'administration »31 . Concrètement, elle peut
être saisie dans le cadre d'un contrôle dénommé
« Recours pour Excès de Pouvoir » (REP), recours
destiné à l'annulation d'une décision d'une
autorité administrative32. Dès lors, elle est
également compétente pour examiner, en cassation, les
décisions rendues par les juges du fond en matière
administrative. Au Togo, le contentieux administratif au titre duquel figure le
contentieux des marchés publics est confié à la chambre
administrative de la cour d'appel et à la chambre administrative de la
cour suprême33.
Aujourd'hui, les marchés publics au
Sénégal et au Togo, représentent par essence une
matière pluridisciplinaire et complexe34. Par
conséquent, ils se situent au carrefour de plusieurs domaines où
le droit doit servir une bonne gestion économique et technique des
marchés, tant il est vrai que cette situation, conduit à
reconnaitre au juge administratif, des prérogatives
complémentaires qui donnent une nouvelle orientation à ses
attributions.
A bien voir le thème objet d'analyse, sa stature est
telle qu'elle nous impose un certain nombre de choix quant à la
démarche à adopter. En effet, la notion de marchés publics
parait reposer, conformément aux prescriptions
communautaires35, sur un triple aspect à savoir la phase
de
29 Certaines personnes privées doivent
également respecter les règles des marchés publics lorsque
les pouvoirs publics exercent sur elles une influence (matérielle ou
financière) significative.
30 Il s'agit des actes administratifs
unilatéraux et des contrats administratifs.
31 Voir CS du Sénégal, 23 janvier 1996,
Souleymane Badiane, Bulletin des arrêts de la CS.
32 Décisions rendues par le Comité de
Règlement des différends de l'Autorité de
Régulation des Marchés Publics.
33 Ordonnance numéro 78-35 du 07 septembre
1978.
34 Braconnier Stéphane, Précis du droit
des marchés publics, éditions Le Moniteur 2012, p. 65
35 Directive n°04/2005 portant passation des
marchés publics, op. cit
Introduction 8
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
passation, la phase de contrôle et celle
d'exécution. Ainsi, serait-il présomptueux de vouloir
égrener la totalité de la littérature aussi bien
générale que spécifique qui s'identifie à la
transparence et les insuffisances qui vont avec dans chacune de ces phases,
tant cette approche serait titanesque.
Il sera alors question d'examiner la transparence dans les
marchés publics au regard de la phase de passation et celle de
contrôle, abstraction faite de la phase d'exécution qui, bien que
présentant des irrégularités, ne sera cependant pas
abordée dans le cadre de notre analyse.
Eu égard à ces considérations, il est
convenable de centrer cette étude autour d'une problématique qui
servira de clef de voûte à notre analyse.
A ce titre, considérant que la transparence, constitue
d'une part un principe conçu au plan communautaire et d'autre part,
adopté par les Etats pour assainir le secteur des marchés
publics, il convient de préciser que ce principe se heurte à des
pratiques obscures36 qui mettent en évidence, une
réalité quelque peu nuancée. En effet, des
autorités contractantes tout comme certains soumissionnaires, font
souvent preuve d'une grande discrétion et de subterfuges pendant le
processus de passation, alimentant ainsi la controverse si bien que l'on se
demande si on peut véritablement parler de transparence. Ainsi donc, la
question à laquelle nous serons amenés à répondre
est celle-ci : La transparence est-elle effective dans les marchés
publics au Sénégal et au Togo ?
Ce thème soulève essentiellement deux
intérêts. Un intérêt théorique d'abord, puis
un intérêt pratique. Pour le premier, retenons que la notion de
transparence a suscité bien de controverses dans son
appréhension. En effet si le professeur BRECHON-MOULENES, il y'a un peu
plus de trente (30) ans, ne voyait dans ce principe que le seul moyen de «
créer un milieu concurrentiel »37 il n'est pas certain avec
l'évolution qu'a subie la transparence et la reconnaissance de
36 Ces pratiques s'identifient à la fraude,
la corruption, la collusion, la prise illégale d'intérêt,
le favoritisme, les conflits d'intérêt, etc.
37 CH. BRÉCHON-MOULÈNES, «
Transparence et marchés publics », Revue de jurisprudence
commerciale, octobre 1993, n° Spécial colloque sur la transparence,
pp. 45-62, spé. p. 53 : « c'est en arriver à la
véritable fonction de la transparence : une fonction
d'accessibilité au marché et non seulement au marché
public mais au marché au sens économique. La transparence vise
à créer un milieu concurrentiel. »
Introduction 9
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
nouveaux principes38 qu'elle a engendrés,
que cet auteur dirait aujourd'hui la même chose de ce sacro-saint
principe. Comme l'a si bien remarqué Grégory
KALFLECHE39, les effets de la transparence ne se confondent pas
seulement avec ceux de l'égalité et de la libre concurrence.
Désormais, la transparence dans les marchés publics, ne se
contente plus seulement d'être un principe découlant de
l'égale concurrence. Elle a également acquis une autre dimension
qui entraine par elle-même, des effets incontestables, témoignant
d'un renforcement des procédures de passation à travers
l'instauration systématique des mécanismes de contrôle,
à savoir le contrôle administratif40 et le
contrôle juridictionnel. A ces différents égards, il est
donc évident que l'on est en face d'une doctrine qui a pris ses
responsabilités en procédant à une analyse
profondément influencée par les exigences contemporaines.
Mais au-delà de la joute doctrinale et
précisément dans une approche pratique, tout le monde s'accorde
aujourd'hui sur le fait que la transparence, lorsqu'elle est effective,
garantit une atmosphère saine et rationnelle des marchés publics
et implique une gestion efficace des deniers de l'Etat.
Concrètement, cette étude cherchera à
répondre aux différentes préoccupations inhérentes
à la définition d'un cadre juridique relatif à la
transparence et mettra en évidence les contradictions qui dans les faits
accompagnent sa mise en oeuvre tout en cherchant à les dépasser
sur fond de recommandations.
Dès lors, pour mener à bien cette analyse, la
méthode de recherche pour laquelle nous avons opté s'axera
essentiellement sur la recherche documentaire. Celle-ci s'articulera autour des
ouvrages généraux et spécialisés, de l'ensemble des
textes communautaires, législatifs et règlementaires, de la
doctrine, de la jurisprudence, des rapports, des articles traitant de la
matière, et surtout d'une analyse approfondie et comparée des
données statistiques produites par les différents organes de
régulation des deux cadres géographiques de notre étude,
nous permettant ainsi d'avoir un aperçu sur l'état de la
transparence dans la passation et dans le contrôle des marchés
publics, et de voir dans quelles mesures les manquements constatés
peuvent être corrigés.
38 Il est question des principes relatifs à
l'économie, l'efficience, l'efficacité.
39 Thèse « Des marchés publics
à la commande publique », Paris 2004
40 Il s'agit des contrôles a priori et a
posteriori que nous analyserons dans les parties à venir.
Introduction 10
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
In fine, c'est à un raisonnement en deux temps que
tiendront nos travaux, inductif d'abord par la description de la transparence
à tous les niveaux de la procédure de passation, déductif
ensuite par un exposé des différents facteurs qui
résultent des insuffisances qui compromettent son effectivité.
De cette dialectique dont on espère qu'elle pourrait
éclairer des zones d'ombre, découle le plan de cette
étude. Ainsi, face à une transparence affirmée
(TITRE I), du fait qu'elle a été
consacrée par les textes communautaires puis nationaux, se dresse telle
une arlésienne au regard de sa difficile effectivité, une
transparence relative (TITRE II).
Titre 1 : Une transparence affirmée 11
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
TITRE I : UNE TRANSPARENCE AFFIRMEE
Dans le souci d'assurer un fonctionnement adéquat de
leurs activités, les administrations du Sénégal et du Togo
passent en permanence des marchés pour des acquisitions de travaux, de
fournitures et services au moyen de montants considérables de fonds
publics et d'aides de donateurs internationaux. Les contrats publics en
général et les marchés publics en particulier, au regard
des montants exorbitants qu'ils mettent en jeu, sont bien souvent
considérés comme étant « réfractaires de
transparence »41.
De cette évidence est née une volonté
qui, d'abord exprimée au plan communautaire, consistera à
élaborer un paquet législatif que les Etats devront ensuite
incorporer dans leur ordre juridique interne. De cette initiative
communautaire, ont vu le jour des principes de passation des marchés
publics tels que nous les connaissons aujourd'hui et au rang desquels figure le
principe de transparence. Cette modernité communautaire, affirmée
à travers les deux directives de l'UEMOA dont nous avons fait cas dans
nos propos introductifs, va s'appliquer à toutes les phases de la
passation des marchés, en influant tant sur les procédures de
passation que sur les mécanismes de contrôle qui les
régissent.
Ainsi, ce double mouvement d'influences, qu'il reste
d'ailleurs à détailler, montre bien un constant
développement de la notion de transparence dans les marchés
publics. Fort de cette certitude, nous partirons de la garantie d'une
transparence dans les procédures de passation des marchés
(chapitre 1), pour aboutir à la garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle (chapitre2).
41 Cf. CH. BRÉCHON-MOULÈNES, «
Transparence et marchés publics », Revue de jurisprudence
commerciale, octobre 1993, n° spécial sur la transparence, pp.
45-62 qui estime, et l'on ne saurait la contester, que « la relation
contractuelle est par nature réfractaire à la transparence »
; ce qui justifie que ce soit en cette matière que l'on ait le plus
ressenti la volonté de développer la transparence. Le droit
privé constate aussi ce « principe de secret » dans les
contrats comme en témoigne J. MESTRE, « Transparence et droit des
contrats », Revue de jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° s
pécial sur la transparence, pp. 77-88.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 12
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
CHAPITRE I : GARANTIE D'UNE TRANSPARENCE DANS LES
PROCEDURES DE PASSATION
La mise en oeuvre de l'intégrité dans la
passation s'inscrit dans une logique interprétative des implications
majeures de la transparence dans chacune des phases de passation des
marchés publics. Pour ce faire, que ce soit au Sénégal ou
au Togo les résolutions prises depuis la déclaration de Paris en
passant par les directives de l'UEMOA de 2005 garantissent une transparence
affirmée par les textes, puis unanimement acceptée.
A cet effet, il nous importe de voir comment cette
transparence se manifeste dans les procédures normales (Section 1) et
ensuite comment elle peut être appréhendée à travers
les procédures particulières (Section 2).
Section 1 : Une transparence quant aux
procédures normales
Les procédures normales de passation sont celles qui
admettent les procédés ordinaires de mise en concurrence dans
l'attribution d'un marché. La transparence de ces procédures
suppose avant tout une intégrité partant de la phase
préalable d'appel d'offres (Paragraphe 1), jusqu'aux méthodes
proprement dites de mise en concurrence (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : L'intégrité dans la phase
préalable d'appel d'offres
La phase préalable d'appel d'offres est celle qui vient
en prélude à toute soumission. La transparence s'y applique
à travers d'une part l'élaboration du plan de passation des
marchés (A) et celle de l'avis général de passation des
marchés (B).
A- Une transparence relative au plan de passation des
marchés
Une série de mesures conditionnent l'effectivité
de la transparence dans la phase préalable à l'appel d'offres. La
détermination des besoins par l'autorité contractante
préalablement à tout lancement de la procédure de
passation d'un marché constitue l'un des principes rappelés par
les
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 13
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
codes sénégalais et togolais des marchés
publics42.
En effet, avant tout appel à la candidature,
consultation ou négociation, la personne responsable des marchés
(PRMP) est tenue de déterminer la nature et l'étendue des besoins
à satisfaire, de sorte que des prestations qui feront objet de
marchés, contribuent à répondre exclusivement à ces
besoins déjà identifiés et consignés dans un
document dénommé le plan de passation des marchés
(PPM)43.
Par PPM, on entend un outil de programmation et de
planification des marchés à engager au cours de l'année.
Dans ce contexte, toutes les autorités contractantes ont le devoir en
début d'année, de recenser tous les besoins des marchés et
de les inscrire dans un document. La détermination aussi précise
que possible des besoins par l'autorité contractante, annuellement dans
un plan de passation des marchés et préalablement à tout
lancement de la procédure de passation d'un marché, constitue
l'un des fondements de la commande publique, rappelé à l'article
24 du Code des Obligations de l'Administration (COA)44. Lesdites
prestations peuvent être définies par rapport aux normes
nationales ou internationales applicables, qui doivent être
expressément mentionnées dans le Cahier des Prescriptions
Spéciales (CPS)45.
En résumé, l'obligation faite aux
autorités contractantes de déterminer leurs besoins, a le
mérite d'assurer l'efficacité de la procédure de passation
et ainsi éviter que des offres ou propositions assorties de
réserves, soient remises par les candidats aux marchés.
Une fois les besoins de l'autorité contractante
déterminés, celle-ci doit procéder à leur
spécification. A cet effet, elle fait une description claire des
fournitures, services, travaux ou prestations intellectuelles afin de permettre
aux candidats de répondre de façon réaliste et
42 Cf. respectivement les articles 5 al.1 et 6 des
CMP du Sénégal et du Togo relatifs à la
détermination des besoins à satisfaire.
43 Le plan de passation des marchés concerne
tous les types de marchés, suivant un modèle type fixé par
l'ARMP.
44 Article 24, COA « En vue d'assurer
l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers
publics, la conclusion des contrats d'achat passés à titre
onéreux par les acheteurs publics exige une définition
préalable de leurs besoins par ces acheteurs».
45 « Le CPS, préparé par l'autorité
contractante, constitue le document destiné à compléter
les dispositions du Cahier des Clauses Administratives Générales
(CCAG) et du Cahier des Clauses techniques Générales (CCTG) afin
de préciser les obligations contractuelles, et les clauses techniques
reflétant les circonstances particulières de l'appel d'offres
concerné », Manuel de procédure du code des marchés
public du Sénégal, page 33.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
compétitive. Rappelons par ailleurs que pour les
marchés de fournitures, travaux et services courants, on parle de
spécifications techniques mais pour les marchés de prestations
intellectuelles, la spécification des besoins est effectuée dans
les Termes de Référence (TDR).
En outre une étape délicate dans les
procédures préalables à la soumission réside dans
l'évaluation du montant des besoins. Dans ce contexte, l'estimation du
montant des besoins en toute transparence est nécessaire non seulement
pour le calcul des crédits requis, mais aussi pour éviter les
fraudes et déterminer si les seuils d'application des procédures
formalisées de passation d'approbation ou de contrôle des
marchés sont atteints.
Une fois ces seuils atteints, l'autorité contractante
procède au choix de la procédure de passation. La question la
plus élémentaire qui se pose ici est de savoir s'il convient de
recourir à une mise en concurrence ou d'attribuer un contrat sur une
base non concurrentielle. Dans le premier cas, l'autorité contractante
est tenue de respecter les procédés compétitifs et ce pour
les marchés fractionnés lorsque le seuil est atteint. Mais
lorsque le montant des marchés est inférieur au seuil
règlementaire, il est simplement attribué sur une base non
concurrentielle.
Par exemple dans le secteur public sénégalais,
les marchés dont les montants estimés atteignent 70.000.000
Francs CFA pour les travaux, 50.000.000 Francs CFA pour les services courants
et fournitures, 50.000.000 Francs CFA pour les prestations intellectuelles
doivent être passés par la procédure dite d'appel d'offres
ouvert qui fera objet de développement dans les prochaines parties.
Quant au Togo, le seuil de passation est de 25.000.000 pour les travaux,
50.000.000 pour les fournitures et services et 25.000.000 pour les PI.
Toutefois le fractionnement des marchés par une
autorité contractante, dans le but de le soustraire aux obligations de
concurrence est contraire au principe de transparence et par est par ricochet
interdit à la fois en droit positif sénégalais et
togolais.
Le deuxième volet de la transparence que nous allons
analyser ne se rapporte plus ni à l'identification des besoins, ni
à leur spécification ou même à leur
évaluation ou au choix de la
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 14
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 15
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
procédure, mais bien à la
publication46 du document qui renferme tous ces
procédés c'est-à-dire le plan de passation des
marchés. Rappelons que la publication de ce document vise avant tout
à garantir l'accès des marchés au plus grand nombre de
candidats au regard de principes de liberté d'accès et
d'égalité de traitement des candidats.
Sous cet angle, la publicité dans la passation
s'identifie à un « système d'informations performant
permettant la publication régulière et en temps opportun de toute
l'information sur les marchés publics »47. Le plan de
passation des marchés est élaboré par la cellule de
passation des marchés de l'autorité contractante, et est ensuite
transmis à la Direction Centrale des Marchés Publics (DCMP) au
plus tard le 1er décembre de l'année
précédant l'année budgétaire
considérée. La DCMP vérifie la conformité du
document et en assure la publication dans les trois jours suivant la
réception.
L'autorité contractuelle dispose d'un délai de
sept jours pour tenir compte des observations faites par la DCMP. Après
ce délai, la DCMP publie le plan de passation des marchés en
faisant au préalable un rapport détaillé à
l'Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP). Une
fois la publication faite sur le portail des marchés publics et au moins
dans un quotidien officiel, les potentiels candidats ont désormais la
possibilité de connaitre tous les projets de marchés inscrits au
titre de l'année concernée.
Au Togo, cette exigence est prévue par l'article 14 du
décret n° 2009-277 portant code des marchés
publics48. Tout comme au Sénégal, c'est à
partir du « Plan Prévisionnel de Passation des Marchés
» (PPPM)49 que l'autorité contractante extrait les
marchés dont elle est sûre de l'exécution. Par ricochet, et
ce à l'exception des marchés passés par entente directe,
les autres marchés passés par les autorités contractantes
et qui n'ont pas été au préalable inscrits dans le
46 F. LLORENS, « principe de transparence et
contrats publics », Contrats et marchés publics, janvier 2004, pp.
4-12 « la transparence est à la base de la réglementation la
plus ancienne en ce domaine (celle des marchés publics) sous la forme
notamment d'une obligation de publicité minutieusement organisée
».
47 Charte de transparence et d'éthique en
matière de marchés publics, P. 2
48 Les marchés à passer par les
autorités contractantes doivent avoir été
préalablement inscrits dans les plans prévisionnels initiaux ou
révisés qu'elles ont élaborés à peine de
nullité, sous réserve de l'appréciation de la DNCMP.
49 Dénomination du code togolais des
marchés publics de 2009.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 16
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
PPM sont en principe nuls. Il ne serait pas superflu cependant
de préciser que le PPM est révisable.
En définitive, c'est le PPM qui sur fond de
transparence, donne un aperçu des marchés susceptibles
d'être conclus. Une fois répertoriés, ces marchés
seront consignés dans un autre document et qui fera l'objet de la
prochaine sous-partie de notre analyse.
B- Une transparence relative aux avis de passation
L'élaboration et la publication des avis relatifs aux
marchés publics sont de la compétence de la cellule de passation
des marchés. En effet, après la publication du plan de passation
des marchés, il incombe à chaque autorité contractante
d'élaborer et de publier dès que le budget est disponible, un
avis général de passation des marchés (AGPM)50
qui par la suite sera conforté par un avis spécifique d'appel
à la concurrence.
D'abord en ce qui concerne l'avis général de
passation, il faut préciser qu'il consiste pour l'autorité
contractante à recenser la liste des marchés publics qu'elle
prévoit de passer par appel d'offres51 durant l'exercice
budgétaire. Il contient les informations sur les marchés dont les
montants estimés dépassent les seuils d'examen préalable
des dossiers d'appel à la concurrence (article 53 du CMP
Sénégal), conformément au modèle annexé
à la circulaire n°003 du 20/11/2007. Au Sénégal comme
au Togo, cet avis est établi conformément à un
modèle type fixé par voie règlementaire. Par ailleurs, la
publication de l'AGPM a la particularité d'alerter suffisamment à
l'avance, les candidats potentiels sur les opportunités offertes par les
marchés de sorte à permettre que la concurrence soit
effective52 une fois l'appel d'offres lancé.
Ensuite relativement à l'avis spécifique d'appel
à la concurrence, il convient de rappeler qu'il ne concerne pas tous les
marchés qu'une autorité contractante entend passer mais se
rapporte uniquement à un marché contenu dans l'AGPM. Pour cette
raison, chaque marché public passé par appel d'offres est
précédé d'un avis spécifique d'appel public
à la concurrence qui tout
50 Art.15 CMP Togo, L'avis général de
passation des marchés comporte les caractéristiques des
marchés de travaux, fournitures et services que l'autorité
contractante entend passer dans l'année.
51 Il s'agit ici des marchés passés par
appel d'offres ouvert, avec pré qualification, en deux étapes ou
restreint.
52 Rappelons ici que l'effectivité de la
concurrence est un gage de transparence.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
comme l'AGPM est établi conformément à un
modèle type fixé par voie règlementaire.
La publication de l'avis général de passation
des marchés et de l'avis spécifique d'appel à la
concurrence se fait à la fois sur le portail des marchés publics
et dans un journal quotidien de large diffusion. Cependant, avec le recours de
plus en plus aux procédures
dématérialisées53, les autorités
contractantes, dans un souci de rapidité et d'efficacité
économique, favorisent la diffusion et les échanges d'information
par voie électronique.
En guise de précision, notons que lorsque la passation
d'un marché requiert une mise en concurrence obligatoire, le contenu de
l'avis spécifique publié dans différents supports
d'information doit être identique et comporter les mêmes
renseignements quel que soit le support afin de garantir les mêmes
chances aux candidats.
A l'analyse de ces deux documents, il va sans dire que
l'exigence de publicité assure le respect des principes rappelés
à l'article 2 de la directive N°04 de l'UEMOA54. Ces
principes généraux du droit des marchés publics ont
été repris par chacun des codes sénégalais et
togolais des marchés publics sur la base de la
non-discrimination55 et c'est le juge administratif qui veille
à leur respect.
Par ailleurs, en plus de porter les marchés à la
connaissance de tous et de permettre à ceux qui éventuellement
seraient intéressés, de se préparer et de pouvoir
soumissionner, la publicité de l'avis général de passation
des marchés et des avis spécifiques à le mérite de
susciter une plus grande diversité des offres. Par conséquent,
elle permet d'accroître les chances d'obtenir l'offre techniquement
conforme et la plus avantageuse en termes de coût56 et de
garantir ainsi un bon usage des deniers publics.
Toutefois, il faut convenir sur le fait que les
modalités de publicité et de mise en concurrence à
53 Cf. articles 56 CMP Sénégal et 45 CMP
Togo relatifs à la dématérialisation des
procédures.
54 Art.2 Directive N°04/2005/CM/UEMOA : Les
procédures de passation des marchés publics et des
délégations de service public, quel qu'en soit le montant, sont
soumises aux principes de l'économie et l'efficacité du processus
d'acquisition, le libre accès à la commande publique,
l'égalité de traitement des candidats, la transparence des
procédures, et ce à travers la rationalité, la
modernité et la traçabilité des procédures.
55 Articles 6 et 14 de la Déclaration
universelle des droits de l'Homme et du citoyen de 1789.
56 Le moindre coût s'identifie à
l'efficience des procédures, un principe clé de la commande
publique.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 17
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 18
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
mettre en oeuvre par l'autorité contractante ne se font
pas ex nihilo. En effet, elles sont déterminées en fonction du
montant estimé du besoin à satisfaire. C'est la raison pour
laquelle l'estimation doit être faite sur fond de transparence afin
d'éviter que le choix se porte sur une procédure de passation
inappropriée, ce qui serait une entorse au principe de transparence dans
cette phase dite préalable à la soumission.
En définitive, et sans nier l'évidence, on
attend du respect effectif de toutes ces exigences inhérentes à
la publicité, rien de moins que l'intégrité de la part des
acteurs des marchés publics, et l'efficacité dans le rendement
attendu. Ces considérations qui sans doute font le délice d'un
système de passation enclin à moins de fraude et de corruption,
constituent depuis quelques années, le cheval de bataille des
autorités tant sénégalaises que togolaise dans leur
quête de transparence dans le secteur très sensible de la commande
publique en général et celui de la passation des marchés
publics en particulier.
Paragraphe 2 : L'intégrité dans la phase
proprement dite d'appel d'offres
La passation des marchés publics peut être
conduite selon différentes méthodes, dont l'appel d'offres qui,
en répondant à des règles rigoureuses de publicité
et de mise en concurrence, assure la transparence. Au Sénégal
comme au Togo, on assiste à une consécration conjointe de l'appel
d'offres (A), et une exigence d'intégrité dans l'attribution des
marchés (B).
A- Une consécration conjointe de l'appel
d'offres ouvert
La consécration « conjointe » dont nous
faisons cas ici se justifie pour le Sénégal et le Togo par la
transposition dans leur ordre juridique interne de la directive N°04 de
l'UEMOA. En effet, une double lecture des deux codes des marchés publics
consacre l'appel d'offres ouvert comme le mode de principe57 en
matière de passation des marchés publics.
En guise de définition, l'appel d'offres est une
méthode de passation des marchés publics, par
57 Selon le rapport de l'ARMP pour l'année
2014, le taux de passation des marchés conclus par appel d'offres par
les autorités contractes au Sénégal est de 80,26% en
valeur et de 14,50% en nombre.
Au Togo les estimations de l'ARMP en ce sens font état de
52% de recours à ce mode de passation.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 19
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
laquelle l'autorité contractante met publiquement en
concurrence des entreprises candidates, sur la base de critères
objectifs préalablement portés à leur connaissance, en vue
d'attribuer le marché au candidat qui présentera l'offre
évaluée conforme et la moins-disante.
Lorsqu'il est dit ouvert, l'appel d'offres met en
compétition plusieurs candidats. En réalité, il
présente l'avantage d'être une procédure a priori moins
longue et moins lourde dans la mesure où les offres les candidats sont
sollicitées et reçues en même temps. Aujourd'hui, la
définition des seuils58 de passation qui imposent la
procédure d'appel d'offres constitue à n'en point douter, une
avancée majeure au regard des décennies de recours excessifs
à l'entente directe, pratique ayant significativement gangrené le
secteur de la passation des marchés publics.
Par ailleurs, les exigences de publicité s'appliquent
pleinement au dossier d'appel d'offres (DAO) qui est un outil utilisé
dans le cadre des marchés de travaux, de fournitures, de services
courants, et qui contient la totalité des pièces et documents
nécessaires à la consultation et à l'information des
candidats. Ces informations concernent notamment les règles du jeu de la
compétition et pour des raisons de transparence, ces dernières
doivent être objectives, écrites, compréhensibles et
accessibles à tous afin de permettre aux candidats de se préparer
et de présenter leur soumission dans le délai fixé par le
DAO.
Il va donc de soi que la publicité garantie une
clarté de l'information et assure à plus d'un titre, son
accès équitable aux futurs candidats tout en favorisant la
compétitivité. La mise en concurrence suppose clairement la
restriction de toute considération subjective quant à
l'attribution du marché. Le choix de l'offre est donc
réalisé sans qu'aucune négociation59 ne soit
autorisée avec les candidats. Toutefois, nous devons préciser
qu'au-delà de l'appel d'offres ouvert, existent des formes
dérivées qui, en dépit de leur pluralité, restent
néanmoins soumises aux mêmes règles de transparence.
A cet effet, on distingue un triptyque de procédures
concurrentielles auxquelles l'autorité contractante a recours pour la
passation d'un certain type de marchés. Il s'agit en effet de l'appel
58 Art 53 CMP Sénégal, relatif aux
seuils et champs d'application des procédures.
59 PIERRE DE BAECKE, Comprendre simplement les
marchés publics, Ed Le Moniteur, Paris 2013, P.85
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 20
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
d'offres avec pré-qualification, de l'appel d'offres
ouvert en deux étapes et de l'appel d'offres avec concours.
On entend par appel d'offres avec pré-qualification, la
procédure de passation des marchés à laquelle recourt une
autorité contractante pour l'exécution des marchés
complexes60, en s'assurant préalablement de la
capacité des candidats à exécuter un tel marché. On
distingue à cet effet deux phases. Celle de pré-qualification qui
va permettre à l'autorité contractante d'établir une liste
de candidats ayant des capacités jugées suffisantes et
satisfaisantes pour l'exécution du marché concerné.
Ensuite, les candidats qui sont jugés comme ayant apporté des
garanties et des réponses satisfaisantes au regard des critères
définis par l'autorité contractante, sont invités dans la
deuxième phase à déposer une offre complète.
Néanmoins, l'appel d'offres avec
pré-qualification reste soumis aux exigences de publicité avec
notamment la publication d'un avis d'appel public à
candidature61, renfermant un dossier de
pré-qualification62 qui fait état d'une série
d'exigences63 auxquelles doivent satisfaire les candidats
conformément au délai de dépôt des candidatures.
Mais à l'expiration de ce délai, aucune offre n'est plus
recevable. Toutefois, une lettre d'information64 est adressée
par l'autorité contractante aux candidats pré-qualifiés
les invitant à déposer leurs offres. C'est désormais ces
derniers qui devront concourir.
Quant à l'appel d'offres ouvert en deux étapes,
il répond aux marchés de « grande complexité
»65. Au regard de la particularité de ce type de
marché, l'autorité contractante ne peut y recourir que sur avis
de la DCMP. Au cours de la première étape où les candidats
sont invités à ne déposer que leurs offres techniques,
l'autorité contractante doit observer le principe
d'égalité
60 Les marchés complexes sont ceux qui
s'identifient à des travaux importants ou aux fournitures de
matériels devant être fabriqués sur commande ou à
des services spécialisés.
61 Articles 71 et 19 CMP du Sénégal et
du Togo relatifs aux appels d'offres avec pré-qualification.
62 Dénomination usitée dans le code
togolais des marchés publics.
63 Il s'agit des renseignements relatifs aux
travaux, la description précise des conditions à remplir, la date
limite de dépôt et les délais dans lesquelles les
résultats de pré-qualification seront connus des candidats.
64Il est également adressé aux
candidats évincés, une lettre les informant des résultats
du dépouillement et également les motifs de rejet du dossier
s'ils en font la demande formelle
65Il peut s'agir des marchés relatifs
à la construction de barrages par exemple. Mais on cette
procédure est aussi sollicitée ou lorsque la personne responsable
du marché s'intéresse exclusivement aux critères de
performance des candidats.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 21
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
de traitement des candidats66. Le but poursuivi par
l'autorité contractante dans cette première étape est de
parvenir à avoir une liste restreinte des candidats dont elle est
sûre de la capacité à réaliser le marché, au
regard de la conformité technique de leurs offres. Les candidats retenus
étant ceux qui ont présenté une offre technique conforme,
l'évaluation se fera dans une deuxième étape sur la base
de leurs offres financière.
En dernier lieu, nous avons l'appel d'offres avec concours,
mode de passation ayant la particularité de ne s'appliquer qu'aux
marchés qui présentent des motifs particuliers67 comme
ceux relatifs à l'art. Le concours dans ce cas a lieu sur la base d'un
programme établi par l'autorité contractante qui fournit les
données nécessaires notamment les besoins à satisfaire,
les contraintes fonctionnelles et techniques, de même que le plafond de
la dépense prévue pour l'exécution du projet. Ce mode de
passation, suit une procédure de règlement
particulière68.
En définitive, une fois les exigences relatives
à la publicité du PPM, de l'AGP, de l'avis spécifique de
passation, du DAO et celles inhérentes au dépôt des offres
respectées, il revient à la commission de passation
d'intervenir.
B- Une exigence d'intégrité dans
l'attribution des marchés
La phase d'attribution des marchés marque la fin de la
procédure de passation des marchés. Pour ce faire, elle doit se
dérouler en toute transparence notamment en ce qui concerne les travaux
de la commission. L'attribution d'un marché public est d'autant plus
délicate qu'elle est l'aboutissement des travaux relatifs à
l'ouverture des plis et à l'évaluation des offres.
66 L'autorité contractante doit s'abstenir
de fournir de manière discriminatoire des informations susceptibles
d'avantager certains candidats par rapport à d'autres ou de
révéler aux autres candidats les solutions proposées ou
d'autres informations confidentielles communiquées par un candidat, sans
l'accord de celui-ci.
67 Art. 75 al. 1 CMP Sénégal, L'Etat,
les collectivités locales, les agences et autres organismes publics, les
sociétés nationales et les sociétés anonymes
à participation publique majoritaire peuvent mettre au concours, entre
les hommes de l'art ou les entreprises qualifiées,
l'établissement d'un projet, d'une fourniture ou d'un ouvrage, lorsque
des motifs techniques, esthétiques ou financiers justifient des
recherches particulières.
68 La particularité ici se saisit d'abord
à travers les primes, récompenses ou avantages qui sont
alloués aux soumissionnaires les mieux classés ; ensuite, les
projets primés deviennent tout ou partie propriété de
l'autorité contractante, conformément à l'art. 26 CMP Togo
relatif à la procédure d'appel d'offres avec concours.
Au Sénégal, l'article 75, al.2 du CMP
précise que l'appropriation par l'autorité contractante du projet
se fait par achat à l'amiable ou après expertise d'une licence
d'utilisation des brevets, dessins ou modèle qu'il contient.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 22
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
L'ouverture des plis est conditionnée par une
réception préalable des offres. Celles-ci doivent être
contenues dans une seule enveloppe contenant les renseignements relatifs
à la candidature et la garantie d'offre requise, et,
séparément, l'offre technique et l'offre
financière69, sous réserve des dispositions
spécifiques applicables aux marchés de prestations
intellectuelles70.
Pour les modes normaux de passation (appel d'offres ouvert),
les offres faisant l'objet d'évaluation doivent être reçues
aux lieux, dates et heures spécifiés dans l'avis d'appel d'offres
conformément aux articles 67 et 54 des codes sénégalais et
togolais des marchés publics. A cet effet, Le délai de
réception des candidatures ou des offres ne sauraient être
inférieur à trente (30) jours pour les marchés
supérieurs aux seuils nationaux71. Il convient de rappeler
que les offres reçues doivent être rangées dans un lieu
sûr et des mesures doivent être prises pour s'assurer que leur
contenu ne sera pas divulgué.
Cependant, les exigences communautaires de transparence
imposent que l'ouverture des plis se fasse par la commission en séance
publique, à l'expiration du délai fixé dans l'avis et en
présence des candidats ou de leurs représentants. A cet effet, le
président de la commission vérifie que les enveloppes contenant
les offres sont cachetées avant d'annoncer les soumissions
reçues. Ensuite, il procède à l'ouverture de chaque pli et
annonce à haute voix tous les détails utiles. Ce n'est
qu'à la fin de cette dernière opération qu'une
équipe technique est désignée, sur proposition du
président de la commission des marchés, pour procéder
à l'évaluation des offres. Cette commission est composée
de représentants de l'autorité contractante et des membres des
administrations concernées.
L'évaluation des offres est une phase extrêmement
délicate de la procédure de passation des marchés en
raison des risques d'atteintes à la transparence qui peuvent l'affecter
et au rang desquels figure l'épineuse question des conflits
d'intérêt72. En effet, cette phase est celle qui
débouche directement sur l'attribution provisoire des marchés et
pour cela, les travaux qui s'y
69 Art.56 de la directive n°O4 de l'UEMOA relatif
à l'enveloppe contenant l'offre.
70 Les marchés de prestations intellectuelles
feront l'objet d'une analyse approfondie dans les parties à venir.
71 Art.52 al.1 de la directive n°
04/2005/CM/UEMOA portant procédure de passation, d'exécution et
de règlement des MP et DSP dans l'UEMOA, relatif aux délais de
réception des offres.
72 Il s'agit ici de la situation dans laquelle se
retrouve un membre de la commission lorsqu'il se met à défendre
les intérêts d'un soumissionnaire alors que l'évaluation et
l'attribution doivent se faire de façon objective.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
déroulent doivent être empreints de clarté
pour satisfaire aux exigences de transparence.
Dans ce contexte, la commission des marchés va dans un
premier temps procéder à un examen
préliminaire73 conformément aux articles 68 et 56 des
codes sénégalais et togolais des marchés publics et qui se
soldera par la validation ou le rejet des offres74. Précisons
ici que les offres anormalement basses peuvent aussi faire l'objet de rejet
à ce stade de l'évaluation, si la commission estime que leur
montant ne se justifie pas par une réalité économique.
Mais les différentes législations reconnaissent aux
soumissionnaires ayant fait ces offres, le droit de justifier le prix en
cause.
Dans un second temps, la commission procède à un
examen détaillé75 des offres des soumissionnaires. En
somme, il s'agit dans les deux cas (Sénégal et Togo) de
procéder d'une part à une vérification de sorte à
déterminer si l'offre prend en charge tous les paramètres et les
variantes76 prévus dans le DAO ; et d'autres parts de
procéder à un classement séparé des offres afin de
les comparer, pour finalement déterminer l'offre évaluée
la moins-disante. La vérification se fait uniquement sur la base des
critères prédéfinis dans le DAO.
Une fois les offres évaluées, la commission
retient celle qui est conforme c'est-à-dire celle dont le candidat est
reconnu avoir réuni les critères de qualification annoncés
dans le DAO et évaluée la moins-disante. Toutefois, elle prend le
soin d'aviser les candidats dont les offres n'ont pas été
retenues et procède à la publication d'un avis d'attribution
provisoire. Rappelons qu'à ce niveau,
73 Cet examen préliminaire
déterminera si les candidatures sont recevables et conformes aux
exigences mentionnées dans le DAO.
Au Togo, les offres reçues sont confiées
à une sous-commission d'analyse désignée par la PRMP pour
évaluation et classement des offres dans un délai de trente
jours.
74 Les offres non conformes sont rejetées
soit parce qu'elles ont été déposées tardivement,
soit pour un vice de forme, ou pour absence de la garantie de soumission.
75 Cet examen a la particularité de porter
sur des critères spécifiques mentionnés dans le DAO tels
que la qualité du matériel, les délais d'exécution,
les coûts de fonctionnement et d'entretien, les modalités de
garantie ou les valeurs techniques des prestations.
76 Les variantes constituent des modifications,
à l'initiative des candidats, de spécifications prévues
dans la solution de base décrite dans les documents de consultation. La
variante permet aux candidats de proposer aux pouvoirs adjudicateurs, une
solution ou des moyens pour effectuer les prestations du marché autres
que ceux fixés dans le cahier des charges. Il s'agit d'une offre
alternative. Leur introduction rend plus complexe l'analyse des offres. Les
variantes diffèrent de l'option en ce sens qu'elles sont à
l'initiative du candidat, alors que l'option est à l'initiative de
l'autorité
contractante.
www.marchespublics.fr, consulté le 08/07/2016
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 23
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
un délai de recours de quinze (15) jours court à
partir de la publication de cet avis77.
Au Sénégal comme au Togo, Les propositions
d'attribution validées par la commission de contrôle des
marchés de l'autorité contractante font l'objet d'un
procès-verbal, dénommé procès-verbal d'attribution
provisoire78 qui, étant établi selon un document
modèle, doit faire l'objet d'une publication, après validation de
la DCMP. Cependant, si la DCMP émet des recommandations qui ne satisfont
pas l'autorité contractante, celle-ci peut saisir le Comité de
Règlement des Différends de l'ARMP dans un délai de trois
jours ouvrable suivant la recommandation79. Celui-ci statue dans les
sept jours qui suivent la réception de la demande.
Toutefois, dès que la proposition d'attribution est
approuvée, les candidats dont les offres n'ont pas été
retenues sont immédiatement informés du rejet de leurs offres ;
dans la foulée, il leur est restitué la garantie de soumission.
C'est seulement à cette dernière étape qu'est
publié l'avis d'attribution provisoire.
Aussi doit-on ajouter que l'autorité contractante peut
au bout du compte ne plus attribuer le marché. Cette situation peut
résulter d'un appel d'offres infructueux80 ou sans
suite81. Mais avant de prendre une telle décision,
l'autorité contractante doit au préalable consulter la DCMP.
Toutefois, les conditions relatives à la transparence
exigent que la décision déclarant l'appel d'offres
infructueux82 soit publiée par l'autorité contractante
par insertion dans le Journal des
77 Art.85 CMP Sénégal relatif
à la signature, approbation, notification et publication de l'avis
d'attribution définitive.
78 Le procès-verbal d'attribution provisoire
mentionne le ou les soumissionnaire(s) retenu(s), le nom des soumissionnaires
exclus et les motifs de leur rejet, et le cas échéant les motifs
de rejet des offres jugées anormalement basses
79 Art.84 al.4 du CMP Sénégal relatif
à la décision d'attribution des marchés.
80 Art.64 du CMP Sénégal, L'appel
d'offres est infructueux lorsqu'aucune offre n'a été remise
à l'expiration de la date limite de dépôt des offres ou
lorsqu'il n'a été proposé que des offres irrecevables ou
non conformes, bien que toutes les conditions devant assurer le succès
de l'appel à la concurrence aient été remplies ; Art.55
CMP Togo.
81 Art.65 CMP Sénégal,
L'autorité contractante peut après consultation de la DCMP, ne
pas donner suite à un appel d'offres pour des motifs
d'intérêt général, tels que la disparition du besoin
qui était à l'origine de la procédure ou des montants
d'offres trop élevés par rapport à la valeur
estimée du marché.
82 Lorsqu'un appel d'offres est
déclaré infructueux, il est alors procédé, soit
à un nouvel appel d'offres, soit à une consultation d'au moins
trois entrepreneurs, fournisseurs ou prestataires, et dans ce dernier cas
après autorisation de la DCMP. Le lancement d'un nouvel appel d'offres
doit être précédé d'une évaluation du DAO ou
de consultation pour s'assurer qu'il n'y a pas de modifications ou
clarifications à apporter, ou encore dans le but de redéfinir
les
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 24
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 25
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Marchés publics ou dans toute autre publication
habilitée.
En définitive, la transparence assure une part
significative de clarté et d'intégrité dans les
procédures normales de passation des marchés publics. Cependant,
si la tendance actuelle et principielle en passation des MP au
Sénégal et au Togo est de se calquer sur l'appel d'offres ouvert
ou ses formes dérivées, cette modernité communautaire ne
renie pas pour autant le recours à des modes variables,
dérogatoires et spécifiques strictement contrôlés
par la DCMP. Ces modes de passation demeurent eux aussi soumis aux exigences de
transparence.
Section 2 : Une transparence quant aux
procédures particulières
Les procédures particulières de passation sont
soit celles qui n'admettent pas des méthodes concurrentielles pour des
raisons légales, soit l'admettent mais à une échelle
réduite ou encore font recours à des procédés
spécifiques notamment dans l'évaluation des propositions et la
désignation de l'attributaire. La particularité de ces
procédures n'échappe pas aux exigences de transparence. Nous
aborderons à cet effet, dans un premier temps, la redéfinition
des procédures dérogatoires (paragraphe1) et dans un second
temps, la transparence des procédures spécifiques (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : La redéfinition des procédures
dérogatoires
Les procédures dérogatoires sont dans les codes
sénégalais togolais des MP, la procédure de l'appel
d'offres restreint et l'entente directe. Leur redéfinition se traduira
par un réaménagement de l'AOR (A), puis par un recadrage de
l'entente directe (B).
A- Un réaménagement de l'appel d'offres
restreint
L'appel d'offres est dit restreint lorsque seuls peuvent remettre
des offres, les candidats que
besoins de l'autorité contractante.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
l'autorité contractante a décidé de
consulter83. Cette sélection s'effectue en principe sur la
base de critères non-discriminatoires, liés à l'objet du
marché. Ces critères doivent cependant être
mentionnés dans le dossier d'appel d'offres ou dans la demande de
proposition.
Toutefois, il ne peut être recouru à la
procédure de l'appel d'offres restreint que lorsque les biens, les
travaux ou les services, de par leur nature spécialisée, ne sont
disponibles qu'auprès d'un nombre limité de fournisseurs,
d'entrepreneurs ou de prestataires de services. Dans ce cas, seuls les
candidats susceptibles d'exécuter le marché concernés sont
invités à déposer leurs offres.
La nature particulière de ce mode de passation ne lui
fait pas pour autant échapper aux exigences de transparence. Pour cela,
le réaménagement de ce mode de passation impulsé depuis
2005 par la directive n°04 de l'UEMOA s'est imposé par le fruit
d'une prise en compte dans les droits positifs sénégalais et
togolais, des dispositions concernées notamment en termes de
publicité et par ricochet de transparence. Tout comme l'appel d'offres
ouvert et ses dérivées, l'appel d'offres restreint doit faire
l'objet d'une publication dans un journal officiel ou sur une plateforme en
ligne accréditée.
Toutefois, il ne peut être procédé
à l'appel d'offres restreint qu'après avis de la DCMP et ce, dans
des cas bien définis par le législateur. Dans ce contexte et
conformément à l'article 73 du CMP du Sénégal, on y
recourt dans les situations qui ne sont pas du fait de l'autorité
contractante à savoir les cas d'urgence simple84, mais qui
imposent une action rapide, qui justifient la réduction des
délais85 de réception des candidatures afin de
prévenir un danger ou un retard préjudiciable à
l'autorité contractante.
Par ailleurs, il peut aussi être fait recours à
l'appel d'offres restreint pour des marchés de travaux, fournitures ou
services qui ne sont exécutés qu'à titre de recherche,
d'essai d'expérimentation ou de mise au point et aussi des
marchés que l'autorité contractante doit faire exécuter en
lieu et place des titulaires défaillants, à leur frais et
risques.
83 Art. 73 CMP Sénégal, 23 CMP Togo
relatif à la définition de l'appel d'offres restreint.
84 Pour des raisons de transparence, l'urgence
simple doit être justifiée ; elle permet de réduire les
délais de consultation tout en maintenant les obligations
d'informations.
85 Selon le CMP Sénégal, ce délai
est de 15 jours pour les marchés cités à titre
d'exemple.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 26
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 27
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Enfin, la procédure d'appel d'offres restreint
s'applique aux marchés qui ont donné lieu à un appel
d'offres infructueux. Rappelons qu'un appel d'offres est dit infructueux
lorsqu'à la date limite de dépôt des dossiers, aucune offre
n'a été remise ou que les offres déposées sont
irrecevables.
Quant à la situation d'urgence citée plus haut,
elle est doit présenter une certaine particularité, et sur ce
dernier aspect, le code sénégalais a eu le mérite
d'énumérer, contrairement au code togolais, les conditions dans
lesquelles l'urgence peut être invoquée. En effet, l'urgence
invoquée pour procéder à l'appel d'offres restreint doit
répondre à certaines conditions. Ainsi dans un premier temps, la
situation d'urgence doit être réelle, ce qui exclut la
volonté d'accélérer la procédure pour des raisons
de convenance de l'autorité contractante ou d'un tiers ; dans un second
temps, l'événement concerné doit être
imprévisible et la situation d'urgence, qui du reste doit être
constatée par la DCMP, ne doit pas résulter du fait de
l'autorité contractante. A cet effet, les candidats ont un délai
réduit86 pour déposer leurs offres.
Par exemple, la réalisation urgente de travaux
d'évacuation des eaux avant l'hivernage ne constitue pas une situation
d'urgence avérée dès lors que cet événement
est prévisible et que la réalisation tardive de travaux
résulte du manque de prévoyance de l'autorité
contractante. Mais toutefois, comme l'exige la transparence, le nombre de
candidats87 admis à soumissionner doit assurer une
concurrence réelle. Comme en matière d'appel d'offres ouvert on
met en oeuvre les procédés compétitifs entre les candidats
sélectionnés pour ne retenir que celui qui aura convaincu
l'autorité contractante par la conformité de son offre technique,
et l'avantage que représente son offre financière pour
l'autorité contractante.
Sur cet aspect, notons que les capacités techniques
sont des moyens matériels et humains dont dispose un candidat à
un marché public. Elles sont appréciées quantitativement
et qualitativement. En vertu de cela, il peut être demandé aux
candidats des certificats établissant des livraisons ou des prestations
de service qu'ils ont au préalable effectuées, au profit d'une
autre entité publique ou privée. Aussi peuvent être
demandés non seulement des certificats de
86 Ce délai réduit est de 10 jours au
moins au Sénégal (Cf. article 63 alinéas 2 CMP), et de 15
jours au minimum au Togo (article 44 CMP).
87 Pour l'effectivité de la concurrence,
l'appel d'offres restreint met aux prises trois (3) candidats au moins.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
bonne exécution pour les travaux, mais également
une description de l'équipement technique. L'évaluation par la
commission se fera ensuite sur le montant de l'offre financière et c'est
dans cette condition que le marché sera attribué au candidat
ayant justifié d'une capacité technique conforme et d'une offre
financière avantageuse pour l'autorité contractante.
En définitive, il est évident que le recours
à la procédure d'appel d'offres restreint ne repose pas sur une
base hasardeuse. Il doit être nécessité par une situation
particulière qui à défaut de convaincre la DCMP entrainera
simplement le rejet du recours à cette procédure
dérogatoire. Du réaménagement concerté de l'AOR, on
débouchera dans la suite de notre analyse sur l'aspect relatif à
l'entente directe.
B- Un recadrage de l'entente directe
Un marché est dit de « gré à
gré » ou par « entente directe »88 lorsqu'il
est passé sans appel d'offres, après autorisation
préalable de la DCMP confirmant que les conditions légales sont
réunies. En d'autres termes, un marché est passé par
entente directe lorsque l'autorité contractante engage directement les
discussions avec un ou plusieurs opérateurs économiques et
attribue le marché au candidat qu'elle a retenu.
A l'analyse d'une telle approche, on remarque que l'entente
directe est une procédure de passation qui doit sa particularité
au fait qu'elle passe outre les procédés compétitifs qui
pourtant sont exigés pour les autres méthodes de passation.
L'entente directe a pendant longtemps été utilisée dans le
secteur des marchés publics tant sénégalais que togolais,
des décennies durant. Suite aux réformes instituées par la
directive n°04 de l'UEMOA, le Sénégal et le Togo ont
strictement encadré et de façon unanime, le recours à
l'entente directe dans la passation des marchés.
Dans la conception générale, on est bien
tenté de penser que cette procédure particulière de
passation occulte toute idée de transparence. Mais en
réalité, elle n'en constitue pas toujours une entorse. Pour
autant, malgré leur connotation péjorative et nonobstant le fait
qu'ils sont décriés
88 Art.76 CMP Sénégal, Les
marchés sont passés par entente directe lorsque l'autorité
contractante engage directement les discussions avec un ou plusieurs
opérateurs économiques et attribue le marché au candidat
qu'elle a retenu.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 28
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 29
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
aux yeux du commun des citoyens, les marchés
passés par entente directe n'en demeurent pas moins
légitimés par chacun des droits positifs de notre cadre
d'étude. Pour cette raison, des circonstances particulières
justifient le recours à l'entente directe.
En effet, les codes sénégalais et togolais des
MP ont pris en compte des circonstances exceptionnelles auxquelles les
autorités contractantes peuvent être confrontées et dont
certaines justifieraient le recours à l'entente directe. Il s'agit
essentiellement de l'urgence impérieuse, des marchés
d'exclusivité89, des marchés complémentaires,
et des marchés secret défense.
Pour rappel, l'urgence impérieuse résulte de
circonstances imprévisibles pour l'autorité contractante ; ces
circonstances n'étant pas compatibles avec les délais et
règles de forme exigés par la procédure d'appel d'offres
ouvert ou restreint, la dérogation qui s'applique à elles permet
de recourir au marché négocié, sans publicité et
sans mise en concurrence. Il s'agit là du marché par entente
directe, étiqueté de « gré à gré
». Eu égard à leur nature, il convient de se
référer aux articles 76 et 35 des codes sénégalais
et togolais des marchés publics, qui fixent certaines conditions de
recours à cette procédure. Mais il faut préciser que dans
tous les cas de marchés par entente directe, une autorisation ou un avis
de la DCMP est nécessaire.
Sous cet angle, l'autorisation de la DCMP concerne les
marchés destinés à répondre à des besoins
qui, pour des raisons tenant à la détention d'un droit
d'exclusivité, ne peuvent être satisfaits que par un contractant
déterminé. Aussi convient-il d'ajouter que les fournitures,
services ou travaux objets dudit marché doivent constituer un
complément à ceux ayant fait l'objet d'un premier marché,
exécuté par le même titulaire dans le cadre d'un
marché complémentaire90. Toutefois, la condition dans
ce cas est que le marché ait été préalablement
passé selon la procédure d'appel d'offres. Du reste, le nouveau
marché doit porter sur des fournitures, des services ou travaux ne
figurant pas dans le marché initialement conclu, ne pouvant en
être techniquement ou économiquement séparés, mais
qui sont devenus nécessaires à la suite d'une circonstance
imprévue et extérieure aux parties. Rappelons ici que le montant
cumulé des marchés complémentaires ne doit pas
dépasser un tiers du montant du marché
89 Le service recherché à travers ce
genre de marché est ne peut être réalisé que par une
seule entreprise qui en a le monopole.
90 Dans ce type de marché, on fait appel
à une entreprise pour assurer d'autres travaux sur l'oeuvre
déjà réalisée.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
principal.
Quant à l'avis de la DCMP, il ne peut être
sollicité que pour les marchés considérés comme
secrets ou dont l'exécution nécessite des mesures
d'accompagnement particulières de sécurité comme les
marchés de la défense ou de la sécurité
nationale.
La seconde catégorie des marchés
concernés, renvoie à ceux destinés à
répondre à des besoins nés d'une situation d'urgence
impérieuse, résultant des circonstances imprévisible,
irrésistibles et extérieurs à l'autorité
contractante, incompatibles pour les délais requis pour l'appel d'offres
ouvert ou restreint.
Rappelons qu'au Togo, la DNCMP veille à ce que sur
chaque exercice budgétaire, le montant additionné des
marchés passés par entente directe ne dépasse pas 10% du
montant total des MP passés par ladite autorité. Mais dans
l'hypothèse où une autorité contractante solliciterait
auprès de la direction nationale de contrôle des marchés
publics une autorisation de passer un marché de gré à
gré, alors que le seuil des dix (10) pour cent serait franchi, la
décision favorable de cette direction sera soumise, avant l'initiation
de la procédure, à l'autorité de régulation qui
doit la valider91.
Si aujourd'hui la nécessité se fait sentir de
recourir de moins en moins à ce mode de passation des marchés, il
apparait opportun de préciser qu'au Sénégal et au Togo, le
taux d'entente directe il y a quelques années était très
encore très élevé, ce qui manifestement était un
abus. Toutefois cette estimation, est depuis 2015 descendue sous la barre des
vingt pourcents.
En tout état de cause, l'entente directe ne doit pas
méconnaitre certains principes comme la détention d'un droit
d'exclusivité ou le principe du marché complémentaire pour
ne citer que ceux-là, et qui sont les garde-fous lorsqu'ils sont
observés, d'une transparence garantissant la bonne gouvernance.
En définitive, les modes dérogatoires de
passation des marchés comme l'appel d'offres restreint et l'entente
directe ne supposent pas que soit occultées les règles de
transparence lorsqu'une autorité contractante en fait recours. Ils
demeurent malgré leur caractère particulier soumis à
des
91 Art.36 al.4 CMP Togo, relatif à
l'autorisation préalable des marchés passés par entente
directe.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 30
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 31
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
exigences d'intégrité et de clarté, comme
le sont d'ailleurs les procédures spécifiques de passation des
marchés.
Paragraphe 2 : La transparence des procédures
spécifiques
Les procédures spécifiques sont des
procédés auxquels recourt l'autorité contractante lorsque
les marchés à passer ne présentent pas les mêmes
caractéristiques que celles exigées par l'un des modes de
passation cités plus haut. Ces procédures concernent d'une part
les marchés de prestations intellectuelles -PI- qui d'ailleurs affichent
une certaine particularité (A), et d'autre part les demandes de
renseignement et de prix92 et les marchés passés suite
à une offre spontanée (B).
A- Une particularité quant aux prestations
intellectuelles
Les marchés de prestations intellectuelles sont ceux
dont les résultats ne sont pas quantifiables et qui sont basés
sur le « know how »93. Ils ne se traduisent pas par un
résultat physiquement mesurable ou apparent. Partant de ce constat, ils
peuvent renvoyer à la réalisation d'études, les services
de consultant, conception ou de conseil, les services de conseil ou
études en informatique, les prestations d'ingénierie, de
maîtrise d'oeuvre, de maîtrise d'ouvrage
délégué, de conducteur d'opération, les prestations
de conseil juridique, d'expertise comptable, d'expertise technique et de
contrôle, de formation.
Pour l'exécution de ces marchés, c'est le
savoir-faire du consultant qui est primordial et non l'importance de ses moyens
matériels ou de sa capacité financière. Du fait de ces
caractéristiques, la procédure de sélection ne se fait pas
par appel d'offres comme pour les procédures normales
92 Selon l'article 78 alinéa 1, du CMP
Sénégal l'autorité contractante peut recourir à la
procédure de DRP pour les fournitures, travaux et service dont la valeur
estimée est inférieure aux seuils requis pour les marchés
à passer par appel d'offres. La DRP doit être utilisée
conformément à la procédure fixée par
arrêté du MEF.
Pour des raisons de transparence, il est exigé que les
marchés passés par une DRP soient conclus à travers des
contrats écrits et publiés sur le site des marchés publics
dès leur attribution.
L'autorité contractante doit à cet effet
communiquer à la DCMP, la liste des personnes consultées, le nom
de l'attributaire, ainsi que la nature et le montant du marché.
93 Terme anglophone désignant le «
Savoir-faire ».
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 32
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
de passation mais plutôt par une procédure assez
particulière appelée « Demande de
propositions»94. En effet, conformément aux articles 80
du CMP Sénégal et 30 du CMP Togo, les demandes de propositions
donnent lieu à une pré-sélection des candidats admis
à présenter une offre, basée sur des impératifs de
transparence. Une lecture attentive de ces dispositions nous instruit à
suffisance sur les modalités d'attribution de ces types de
marchés dans ces deux Etats.
Sous ce rapport, une mise en concurrence des candidats
présélectionnés est nécessaire. Partant de
là, il importe d'abord que la liste des candidats soit
arrêtée suite un appel public à manifestation
d'intérêts dans les conditions et délais dans lesquelles
sont tenues les autorités contractantes. Ensuite il convient de
préciser que le délai minimum de réponse est de quinze
(15) jours à compter de la date de publication de l'avis public à
manifestation d'intérêts.
Dès lors, les candidats sont sélectionnés
par la commission des marchés compétente, en raison de leur
aptitude à exécuter les prestations objet du marché et
sont classés sur la base des critères publiés dans l'avis
public à manifestation d'intérêt. L'autorité
contractante adresse alors une demande de proposition à au moins trois
des premiers candidats sélectionnés. A ce titre, ils
reçoivent un dossier de consultation comprenant les termes de
référence95, une lettre d'invitation indiquant les
critères de sélection et leur mode d'application
détaillé ainsi que le projet de marché. Après
évaluation, le marché est attribué au candidat ayant fait
la meilleure proposition.
En ce qui concerne le dépôt des propositions, il
se fait sous la forme d'une enveloppe unique contenant deux enveloppes
distinctes et cachetées comportant respectivement l'offre technique et
l'offre financière. La commission de passation des marchés de
l'autorité contractante procède alors à l'ouverture des
propositions à l'expiration de la date limite de dépôt.
Pour ce faire, l'ouverture des propositions s'effectue en deux temps.
Dans un premier temps, les propositions techniques sont
ouvertes et évaluées conformément aux
méthodes96 décrites par les textes en vigueur. Dans un
deuxième temps, seuls les
94 En matière de prestations
intellectuelles, la demande de proposition (DP) est l'équivalent de ce
qu'est le DAO pour les marchés de travaux, de fournitures ou de services
courants.
95 Les TDR contiennent les spécifications sur
les marchés de prestation intellectuelle.
96 Art. 80 CMP Sénégal et 31 CMP Togo
relatifs aux dispositions spécifiques des marchés de prestations
intellectuelles.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 33
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
soumissionnaires ayant présenté des propositions
techniquement qualifiées et conformes, voient leurs propositions
financières ouvertes. Les autres propositions financières sont
retournées, sans être ouvertes, aux soumissionnaires non
qualifiés. L'ouverture des propositions financières est publique
et est effectuée en présence des soumissionnaires
qualifiés invités à y participer. De l'ouverture des
propositions, va découler leur évaluation sur fond de
transparence.
Pour préserver cette dernière et lutter contre
les conflits d'intérêts, les codes sénégalais et
togolais des MP exigent que l'évaluation des propositions se fasse en
deux étapes ; la première consistant en une évaluation des
propositions techniques, la seconde se rapportant aux propositions
financières.
Sous cet angle, il est procédé dans un premier
temps à l'ouverture des propositions techniques. Elles sont
évaluées sur la base de leur conformité aux Termes de
référence conformément aux critères définis.
Les Propositions financières restent cachetées et
déposées en lieu sûr. Chaque proposition conforme se verra
attribuer une note technique (NT). Notons qu'une proposition sera
rejetée à ce stade si elle ne satisfait pas à des aspects
importants de la DP, et particulièrement aux Termes de
référence (TDR) ou n'atteint pas la note technique minimum
spécifiée dans les Données particulières.
A l'issue de l'évaluation des propositions techniques,
l'Autorité contractante informera les Candidats des notes techniques
obtenues par leurs Propositions. Dans la foulée, il sera notifié
aux candidats dont les propositions n'ont pas obtenu la note minimale de
qualité ou ayant été jugée non conforme à la
DP et aux TDR que leurs propositions financières leur seront
renvoyées sans être ouverte à l'issue du processus de
sélection. Aux candidats dont la proposition technique est conforme
à la note minimale de qualification, il leur est indiqué le lieu,
la date et l'heure d'ouverture des propositions financières. Toutefois,
La date d'ouverture des propositions financières doit être
déterminée de manière à donner aux Candidats le
temps suffisant pour assister à l'ouverture, s'ils choisissent d'y
assister.
Dans un deuxième temps, la commission des
marchés de l'autorité contractante procède à
l'évaluation des propositions financières des candidats dont les
propositions techniques ont été validées. Cependant,
l'évaluation des propositions et la désignation de l'attributaire
s'effectuent
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 34
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
sur la base de plusieurs facteurs. Elles peuvent se faire au
sens des articles 80 et 53 des codes togolais et sénégalais des
MP soit sur la base de la qualité technique et le
coût97 ; soit sur la base d'un budget
prédéterminé98 ; soit sur la base de la
meilleure proposition financière99 soumise par les candidats
ayant obtenu une note technique minimum ; soit exclusivement sur la base de la
qualité technique exclusivement100 ou soit selon la
méthode de sélection basée sur la
qualification101.
Toutefois, en passant d'une méthode à une autre,
un facteur déterminant qui fait office de leitmotiv doit être
constamment gardé à vue. Il s'agit de l'objectivité dont
doit faire preuve les membres de la commission dans leurs travaux afin
d'éviter de tomber dans le vice du conflit d'intérêt qui
inévitablement ouvre la voie au favoritisme102 et porte de ce
fait une atteinte aux exigences de transparence.
B- Un recours aux autres procédures
spécifiques
Les autres procédures spécifiques sont
essentiellement les demandes de renseignements et de prix (DRP) et les offres
spontanées. Les DRP ou encore demandes de cotation constituent une
procédure spécifique à laquelle se réfère
une autorité contractante pour les marchés de petits
montants103 qui ne nécessitent pas le recours à une
procédure par appel d'offres. Dans ce cas, vu qu'il s'agit d'une
procédure simplifiée, les règles de publicité et de
mise en concurrence ne sont
97 La qualification sur la base de la
qualité technique et le coût est le procédé
principiel d'attribution des marchés de prestations intellectuelles.
Elle suppose la recherche d'une note globale, qui se fait par l'addition des
notes techniques et financières pondérées des propositions
faites par les entreprises candidates. L'entreprise qui aura obtenu la
meilleure note globale sera celle qui remportera le marché.
98 Cette méthode consiste à attribuer
le marché au candidat qui présente à la fois une offre
technique conforme et une offre financière inférieure ou
égale au budget-cible. Dans tous les cas, l'offre financière
retenue ne saurait présenter la moindre exorbitance au regard de la
limite budgétaire prévue.
99 Cette méthode consiste à ne
retenir que le candidat qui présente une offre technique conforme et une
offre financière estimée la plus basse.
100Ce procédé permet à la
commission des marchés de ne prendre en compte que la meilleure note
technique uniquement. Cette méthode n'est cependant utilisée que
pour les marchés de prestations intellectuelles présentant une
certaine complexité.
101 Ici on est à la recherche d'un consultant ou d'un
expert dont le seul critère de sélection est la qualification
dans le domaine concerné. A cet effet, l'évaluation se fait sur
la comparaison des CV des candidats
102 Le favoritisme est une pratique qui dans le cadre des
marchés publics, consiste à accorder des faveurs injustes ou
illégales à un candidat.
103 Il s'agit des marchés inférieurs aux seuils
fixés par les articles 53 et 5 des CMP du Sénégal et du
Togo ;
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 35
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
pas aussi rigides que celles imposées pour la passation
des marchés dont le montant est au-dessus des seuils des
procédures formalisées.
Toutefois, le recours aux DRP104 doit être
fait conformément à une procédure fixée par
arrêté du ministre chargé de l'économie et des
finances. A cet effet au Sénégal, l'arrêté du 07
janvier 2015 relatif aux modalités de mise en oeuvre des
procédures de DRP en application de l'article 78 du CMP distingue trois
catégories de DRP ; il s'agit de la DRP simple dispensée d'une
forme écrite, de la DRP à compétition restreinte et de la
DRP à compétition ouverte.
De l'analyse de la DRP simple dispensée d'une forme
écrite, il ressort qu'il s'agit d'une procédure qui ne
nécessite pas de publicité, autant qu'elle ne requiert aucun
formalisme. De ce fait, en dessous d'un certain montant105,
l'autorité contractante peut directement s'adresser à au moins 3
entrepreneurs fournisseurs ou prestataires à travers une demande de
cotation et qui seront consultés selon les modalités
laissées à sa libre appréciation. Toutefois, les
propositions financières sont soumises sous forme de facture pro forma,
conformément aux fournitures et prestations exigées.
L'attribution du marché se fait conformément aux mêmes
règles de transparence106 qui régissent les
procédures formalisées.
En ce qui concerne la DRP à compétition
restreinte, l'autorité contractante s'y réfère lorsqu'elle
veut passer des marchés dont les montants approximatifs se situent
à un certain niveau107. A cet effet, l'autorité
contractante choisit des modalités de publicité adaptées
au montant et à la nature du marché ; ensuite, elle sollicite
simultanément, par écrit, des prix auprès d'au moins 5
entreprises choisies en priorité parmi les prestataires ayant
manifesté leur intérêt pour les marchés
concernés. A ce niveau l'autorité contractante doit s'assurer que
les candidats sont
104 Selon le rapport ARMP Sénégal de 2014, la
DRP ont représenté 81,07% en nombre et 11,38% en valeur des
marchés.
Quant au Togo, le recours aux DRP est selon le rapport de
l'ARMP sur les marchés conclus en 2015, de 28% en termes de valeur.
105 Travaux d'un montant estimatif inférieur à 5
millions de francs TTC ; prestations intellectuelles d'un montant estimatif
inférieur à francs TTC ; fournitures ou services d'un montant
estimatif inférieur à 3 millions de francs TTC.
106 L'attribution se fait en faveur du candidat dont l'offre
technique est évaluée conforme et dont la proposition
financière est évaluée la moins-disante.
107 Il s'agit des marchés dont les montants
estimés sont inférieurs à 25 millions de francs CFA pour
les travaux ; 15 millions de francs CFA pour les services courants et
fournitures et 25 millions pour les prestations intellectuelles.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 36
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
intéressés par la procédure et ont
à cet effet la capacité d'exécuter le
marché108. Une fois les formalités relatives au
dépôt des offres et à leur évaluation
observées, le marché est attribué au candidat ayant
présenté l'offre techniquement conforme et évaluée
la moins-disante. Pour respecter les exigences de publicité
conférant aux candidats évincés un droit de recours,
vecteur de transparence, l'autorité contractante est tenue d'informer
ceux dont l'offre n'a pas été retenue, après avoir
rédigé pour le compte de celui qui a remporté le
marché, le procès-verbal d'attribution.
Enfin on distingue la procédure de DRP à
compétition ouverte. Par cette procédure, l'autorité
contractante lance un avis public d'appel à la concurrence dont la date
de publication fait courir le délai109 de dépôt
des offres. Tout comme les procédures citées
préalablement, la procédure de DRP à compétition
ouverte intervient au regard du montant110 et de la nature du
marché concerné. L'attribution du marché se fait par la
commission de passation des marchés dans un délai maximum de 15
jours dans le respect strict de l'intégrité. Les modalités
d'information du candidat retenu et de ceux évincés demeurent de
mise. Ceux qui s'estiment lésés doivent préalablement
à un recours contentieux111, saisir la PRMP d'un recours
gracieux par une notification écrite112. Cette
dernière est tenue d'y donner suite dans un délai de deux jours
au-delà duquel un défaut de réponse serait constitutif
d'un rejet du recours gracieux.
Somme toute, il faut admettre que le recours aux DRP au
Sénégal a connu à partir de 2013, une réelle
amélioration par rapport à la préparation des dossiers,
à l'invitation d'au moins 5 candidats, à l'implication de la
commission des marchés et au choix pour l'essentiel du candidat
108 Les marchés concernés donnent lieu à des
contrats écrits de forme libre.
109 Le délai de dépôt des offres pour la DRP
à compétition ouverte est de 15 jours calendaires.
110 Montant estimé inférieur à 70
millions de francs CFA et supérieur ou égal à 25 millions
de francs CFA pour les travaux ; Montant estimé inférieur
à 50 millions de francs CFA et supérieur ou égal à
15 millions de francs CFA pour les fournitures et services courants ; Montant
estimé inférieur à 50 millions de francs CFA et
supérieurs ou égal à 25 millions de francs CFA.
111 En tout état de cause, ce recours doit
impérativement se rapporter à une violation
caractérisée de la règlementation des marchés
publics et doit être exercé dans un délai de 3 jours francs
et ouvrés, à compter de la publication de l'avis d'attribution
provisoire du marché, de l'avis d'appel à la concurrence ou de la
communication du dossier d'appel à la concurrence.
112 Article 6, al. 1 arrêté relatif aux
modalités de mise en oeuvre des procédures de DRP, « La
notification écrite indique les références de la
procédure de passation du marché et expose les motifs de
réclamation du requérant par une lettre recommandée avec
demande d'avis de réception ou déposée contre
récépissé ».
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
moins-disant et qualifié.
Au Togo, la procédure des DRP n'est pas formellement
prévue par les textes en vigueur113. En
réalité, cette pratique s'inscrit dans le cadre de la
procédure restreinte dénommée « demande de cotation
», prévue par les textes 114. Les DRP constituent une
mesure pratique préconisée par la DNCMP pour alléger les
procédures d'acquisition dont les montants sont inférieurs
à 3 millions de francs CFA. Au-delà de ce montant, est alors
appliquée la procédure de demande de cotations qui s'applique aux
procédures d'acquisition dont le montant est inférieur à
15 millions, mais supérieur à 3 millions.
En ce qui concerne les offres spontanées115,
il convient de préciser avant tout et dans une approche
définitoire qu'elles constituent une procédure récemment
consacrée et par laquelle une entreprise candidate présente une
offre pour répondre à un besoin qui n'avait pas été
identifié lors de la phase préalable d'appel d'offres par
l'autorité contractante. Cette méthode de passation passe ainsi
pour une « échappatoire» ou mieux une exception juridiquement
admise au principe qui voudrait que soient déclarés nuls tous les
marchés ne figurant pas dans le plan de passation des marchés.
Cependant, le recours aux offres spontanées n'échappe pas aux
principes fondamentaux régis par la transparence.
Dès lors, il convient de se pencher sur la
manière dont on doit recourir à ce procédé
spécifique de passation dans les limites d'une utilisation normale pour
éviter tout abus. A cet effet, il faut préciser que les offres
spontanées ne permettent pas toujours à l'autorité
contractante de passer directement le marché avec les entreprises qui en
sont à l'origine. Si la personne publique souhaite donner suite à
un tel projet, elle doit organiser la mise en concurrence de tous les
opérateurs économiques potentiellement intéressés
par sa mise en oeuvre, offrant ainsi en conformité avec l'article 81
alinéa 2 du CMP Sénégal, toutes les garanties
d'impartialité de sélection, mais sous réserve des
marchés qui dérogent totalement au jeu de la concurrence.
Toutefois, le recours à la négociation directe
avec une entreprise présentant une offre spontanée
113 Précisons que depuis un moment, toutes ces
procédures sont en train d'être revues dans le cadre des
activités de relecture des textes suite aux nouvelles mesures
adoptées par la Commission de l'UEMOA en 2014.
114 Cf. les articles 16 du CMP Togo et 12 du décret
n° 2011-059/PR du 04 mai 2011 portant seuils de passation, de publication,
de contrôle et d'approbation des MP au Togo.
115 Cf. 81 du CMP Sénégal.
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 37
Titre 1, Chapitre I : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 38
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
ne peut se faire que sur avis de la DCMP sous certaines
conditions cumulatives. A cet effet, le montant estimatif du marché
concerné doit être au moins égal à 50 milliards de
francs CFA, intégralement financé par l'entreprise mais
conformément aux règles d'endettement du Sénégal.
En outre, si l'entreprise est de droit non communautaire, elle doit s'engager
à sous-traiter aux nationaux, une part de marché qui ne peut
être inférieur à 10% du montant total. Enfin, comme
dernière condition, l'entreprise doit définir le cas
échéant, un schéma pouvant assurer un transfert de
compétences et de connaissances.
Par ailleurs, l'autorité contractante ne peut recourir
à la procédure négociée sans publicité ni
mise en concurrence que dans les hypothèses expressément
prévues par le code, notamment lorsque l'offre spontanée s'appuie
sur une technologie particulière que seule l'entreprise détient
ou maîtrise et qu'aucune alternative n'existe pour satisfaire le besoin
de l'acheteur.
Toutefois, dans le cadre d'une mise en concurrence,
l'autorité contractante doit éviter tout favoritisme à
l'égard d'une des entreprises candidates. Dans cette logique, il ne doit
être porté atteinte à l'égalité des candidats
en reprenant dans les cahiers des charges, les indications techniques
directement inspirées de celles fournies par l'initiateur du projet ou
en diffusant des informations techniques protégées par le secret
des affaires. En ce qui concerne le droit positif togolais, le code des
marchés publics n'a jusqu'à présent pas prévu de
dispositions relatives aux offres spontanées.
En définitive, les règles de transparence sont
de mise à tous les niveaux de la procédure de passation. Le
respect de ces règles que consacrent les textes de l'UEMOA,
transposés en droit sénégalais et togolais, est
conforté par un mécanisme de contrôle qui n'échappe
pas au principe de transparence.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 39
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
CHAPITRE II : GARANTIE D'UNE TRANSPARENCE DANS
LES MECANISMES DE CONTROLE
Qu'il s'agisse des procédures normales ou des
procédures particulières, il est indispensable que les pouvoirs
publics portent une attention singulière sur leur déroulement.
Dès lors, ces derniers exercent une série de contrôles pour
s'assurer de la conformité de ces procédures au regard des
prescrits communautaires et aussi des lois et règlements.
Dans ce contexte, l'efficacité du contrôle des
procédures de passation des marchés publics est assurée
par un contrôle administratif ambivalent (section 1) et un contrôle
juridictionnel indispensable (section 2).
Section 1 : Un contrôle administratif
ambivalent
Le contrôle administratif est celui opéré
par les autorités publiques directement reliées à l'Etat
ou à l'autorité contractante, ou encore celles relevant
d'instances administratives indépendantes. Il s'agira essentiellement
pour cette partie de notre travail d'évoquer les aspects relatifs au
contrôle a priori (paragraphe 1) et ceux tournant autour du
contrôle a posteriori (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La mise en place d'un contrôle a
priori
Le respect du bon déroulement de la procédure de
passation des marchés publics est assuré dans le cadre du
contrôle a priori par des organes désignés à cet
effet. Au-delà de l'aspect étendu de ce contrôle (A), nous
allons démontrer que lorsqu'il est effectif, le contrôle a priori,
constitue un mécanisme de transparence (B).
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 40
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
A- Un contrôle étendu
Du premier chapitre de la directive n°05
UEMOA116 du 9 décembre 2005, il ressort que les Etats membres
s'engagent à mettre en place des entités administratives
centrales déconcentrées, ainsi que décentralisées
de contrôle des marchés publics. Dans les deux pôles
géographiques sur lesquels porte notre étude, le droit positif
reconnait l'existence d'un contrôle a priori de la passation des
marchés publics à partir d'un certain seuil117.
Conformément à l'article 141 du code
sénégalais des marchés publics, le contrôle a priori
de la passation des marchés publics est assuré par la direction
chargée du contrôle des marchés publics. Au Togo, il est
régi par les dispositions de l'article 11 du code des marchés
publics et est assuré par la Direction Nationale du Contrôle des
Marchés Publics (DNCMP). C'est l'occasion de rappeler que le
contrôle a priori s'exerce à différents niveaux du
processus de passation.
En effet, le contrôle de la DCMP commence au
Sénégal comme au Togo, au moment de l'élaboration du plan
de passation des marchés jusqu'à la revue juridique avant
signature du contrat. Dans ce contexte, les nombreuses attributions de la DCMP
peuvent être regroupées en une trilogie
fonctionnelle118.
En premier lieu, la DCMP au Sénégal et au Togo,
a pour rôle d'assurer le contrôle a priori de la passation des
marchés publics. Partant de ce constat, elle est chargée
d'émettre non seulement un avis sur les PPM élaborés par
les autorités contractantes, mais aussi un avis de non objection (ANO)
sur les dossiers d'appel d'offres avant le lancement de l'appel à la
concurrence et la publication correspondante. La direction chargée du
contrôle des MP dans ses attributions fondamentales, émet
également un avis de non objection sur le rapport d'analyse comparative
des offres et propositions et le procès-verbal d'attribution provisoire
du marché.
116 Cf. article 4 de la directive 05, relatif aux «
Fonctions et mécanismes de contrôle des marchés publics et
délégations de service public ».
117 Arrêté n°011580 fixant les seuils de
contrôle a priori des dossiers de passation des marchés publics au
Sénégal.
118 Décret du 25 avril 2007 relatif au rôle de la
direction centrale des marchés publics du Sénégal.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Par ailleurs, elle doit procéder à un examen
administratif, juridique et technique du dossier de marché avant son
approbation et au besoin adresse à l'autorité contractante toute
demande d'éclaircissement, de modification de nature à garantir
la conformité du marché avec le dossier d'appel d'offres et la
réglementation en vigueur.
En deuxième lieu, la DCMP joue un rôle
fondamental en ce qui concerne les marchés revêtant un
caractère assez particulier. En ce sens, elle accorde les autorisations
et dérogations nécessaires à la demande des
autorités contractantes lorsqu'elles sont prévues par la
réglementation en vigueur. Ces dérogations concernent
essentiellement les procédures de concurrence restreinte et l'entente
directe.
En dernier lieu, la DCMP assure en relation avec l'organe
chargé de la régulation des marchés publics, la formation,
l'information et le conseil de l'ensemble des acteurs de la commande publique
sur la réglementation et les procédures applicables, tout en
contribuant, en relation avec l'organe chargé de la régulation
des marchés publics, à la collecte et à l'analyse des
données ainsi qu'à l'établissement des statistiques sur
les marchés publics.
Notons cependant que le contrôle a priori, bien
qu'étant assuré pour l'essentiel par la DCMP, n'exclut pas pour
autant celui opéré par les organes de contrôle
inhérents à l'autorité contractante. A cet effet, le CMP
du Sénégal précise119 que les marchés
qui n'ont pas atteint les seuils de revue de la Direction chargée du
contrôle des MP sont examinés par la cellule de passation des
marchés publics de l'autorité contractante dans les conditions
fixées par arrêté du Ministre chargé des finances.
Sur ce dernier aspect relatif au contrôle interne à priori
assuré par la cellule de passation, il convient de mettre en
lumière quelques-unes des prérogatives qu'elle exerce pour un
regain de transparence.
A ce propos, au sein de chaque AC, existe une cellule de
passation des MP qui prend généralement l'aspect d'une structure
de conseil. Elle s'assure que les dossiers d'appel d'offres sont
constitués le mieux possible et que le processus d'attribution des
marchés se déroule conformément à la
règlementation. C'est également la cellule de passation qui
élabore le plan de passation de l'autorité contractante dont elle
relève et qui veille au bon fonctionnement de la
119 Cf. avant dernier alinéa de l'article 141du CMP
Sénégal.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 41
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
commission des marchés publics.
En ce qui concerne le Togo, une particularité en
rapport avec le contrôle interne a priori doit être relevée.
En effet, depuis la loi n°2009-013 du 30 juin 2009 relative aux marches
publics et délégations de service public jusqu'au décret
N° 2011-059 / PR du 04 mai 2011 portant définition des seuils de
passation, de publication, de contrôle et d'approbation des
marchés publics, un certain nombre de missions sont confiées
à une structure nouvelle dénommée « Commission de
Contrôle des Marchés Publics120 » (CCMP),
distincte de la commission de passation des marchés et qui, au regard de
ses attributions équivaut à ce que le droit positif
sénégalais désigne par « cellule de passation des
marchés ». Cet organe, placé sous la responsabilité
de la PRMP, joue un rôle central dans le contrôle de
régularité des marchés passés par les
autorités contractantes depuis la phase de planification jusqu'à
l'attribution du marché lorsque leur montant n'atteint pas le seuil de
compétence de la DNCMP.
Dès lors, le contrôle interne a priori de la CCMP
s'effectue à plusieurs niveaux de la passation. Pour cette raison,
l'autorisation préalable par la DNCMP de certains marchés par
entente directe se fait sur la base d'un rapport spécial validé
par la CCMP121. En ce qui concerne les cas d'appel d'offres
infructueux, c'est la CCMP de l'autorité contractante, qui, en l'absence
d'offres ou en cas de non-conformité de propositions au DAO, émet
un avis sur la question. C'est à partir de cet avis que la commission de
passation des marchés déclare l'appel d'offres
infructueux122. En outre, conformément à l'article 56
du CMP relatif à la procédure d'évaluation des offres,
c'est à la CCMP que sont soumis les rapports d'analyse de la
sous-commission de passation et c'est elle qui valide les propositions
d'attribution des marchés123.
Au Togo en définitive, tout dossier qui doit être
soumis à un contrôle a priori de la DNCMP doit
120 Art. 1 CMP Togo, La CCMP est une structure constituée
auprès de l'autorité contractante chargée du
contrôle de la régularité de la procédure de
passation du marché public ou de la délégation de service
public. Art. 8 CMP Togo, la CCMP est créée et placée
auprès de l'autorité contractante et placée sous la
responsabilité de la personne responsable des marchés publics ;
elle est chargée du contrôle de la régularité de la
procédure de passation des marchés publics et
délégations de service public.
121 Art.36 CMP Togo relatif à l'autorisation
préalable.
122 Art.55 CMP Togo relatif à l'appel d'offres
infructueux.
123 Art.61 CMP Togo, C'est sous réserve de
l'approbation de la CCMP d l'autorité contractante que la commission de
passation des marchés déclare attributaire provisoire, le
soumissionnaire dont l'offre est conforme aux prescriptions du descriptif
technique et qui présente l'offre de prix la moins « disante
».
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 42
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
passer par la CCMP qui a pour mission de contrôler la
régularité de la procédure de passation des MP au sein de
l'autorité contractante.
Eu égard à toutes ces ramifications du
contrôle a priori, on peut légitimement envisager
l'efficacité d'un tel contrôle au regard du principe de
transparence.
B- Un mécanisme de transparence
La mise en place d'un contrôle a priori interne ou
externe de la passation des marchés vise avant tout à donner une
acception pratique à la notion de transparence. Ce contrôle prend
naissance à partir de l'élaboration du plan de passation des
marchés et s'arrête à la revue juridique avant signature du
contrat. Au cours des développements à venir, nous envisagerons
tour à tour, les différents niveaux du processus de passation sur
lesquels plane l'ombre du contrôle a priori dans sa dimension de
transparence.
Commençons d'abord notre analyse par le plan de
passation des marchés qui apparait aujourd'hui dans un contexte de
communautarisation des procédures comme un outil fondamental de
contrôle à préserver. En effet, parmi les mécanismes
instaurés pour que le processus de passation soit transparent, l'acte
plus fort posé est sans doute l'élaboration et la publication
d'un PPM qui peut être consulté par tout citoyen sur le portail
des MP. Il s'agit d'une plateforme où tous les marchés qu'un
ministère ou une autorité contractante compte passer pendant
l'année, sont inscrits. L'intérêt ici est que tout
marché qui n'y figure pas est nul, à l'exception des
marchés classés secret défense et les marchés
conclus en cas d'urgence impérieuse résultant de la force
majeure.
Sous ce rapport, Le PPM est adressé à la
Direction qui a en charge le contrôle des MP qui le publie sur le portail
des marchés publics. L'élaboration du PPM est basée sur
des crédits déjà alloués mais précisons
qu'il est tout de même révisable en cours d'année. En ce
sens, il revient à l'autorité contractante de proposer sa
révision et son envoi à la DCMP. Après vérification
du respect de la réglementation, celle-ci procède à la
mise à jour du PPM. C'est sur ce dernier point que le mécanisme
de transparence dont le contrôle a priori est le porte étendard se
manifeste une
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 43
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
fois de plus.
En effet, c'est à travers cette vérification que
la direction chargée du contrôle des marchés publics veille
à ce qu'il n'y ait pas de fractionnement illégal124
des marchés afin de soustraire l'autorité contractante aux
exigences de concurrence (AAO). La DCMP vérifie donc que
l'autorité contractante a bien regroupé les marchés en
fonction de leur nature.
En outre, pour un marché de fourniture inférieur
à quinze (15) millions, l'autorité contractante peut passer une
DRP qui est une procédure simple. A cet effet, elle invite au minimum
cinq (5) candidats capables d'exécuter le marché et attribue
celui-ci au moins disant. Cette possibilité si elle n'est pas
contrôlée, permet à l'AC de faire plusieurs DRP pour
éviter d'initier un appel d'offres ouvert, ce qui a priori remet en
cause les principes d'égalité de traitement des candidats, de
liberté d'accès à la commande et surtout de
transparence.
C'est en ce sens que le contrôle a priori est essentiel.
Pour cela, la DCMP vérifie au regard du plan de passation des
marchés, les regroupements pour éviter les fractionnements
frauduleux. Si au terme de ce processus, la DCMP estime que tout est en ordre,
elle publie dans le portail le PPM de toutes les autorités contractantes
avec des données fiables et précises sur les dates, le mode de
passation et autres données sur le marché.
Par ailleurs, concernant les autorisations accordées
par la DCMP pour les marchés limitant la concurrence, on signale qu'il
ne peut être procédé à un appel d'offres restreint
qu'après avis de la DCMP pour la passation des marchés
présentant un caractère d'urgence ou ceux ayant donné lieu
à un appel d'offres infructueux ou ceux que l'autorité
contractante doit faire exécuter en lieu et place des titulaires
défaillants125.
Soulignons dans la même logique que les marchés
par entente directe n'échappent pas non plus au contrôle a priori.
On note en ce sens que le contrôle a priori de la DCMP a permis de
rejeter plusieurs demandes d'entente directe abusives. L'un des cas
récents est celui de la SENELEC même si au final cette
dernière a trouvé une échappatoire pour contourner le
rejet de sa demande. Rappelons au passage qu'il ne peut être passé
des marchés par entente directe qu'après avis de la
124 Au Sénégal comme au Togo, les fractionnements
peuvent contribuer à contourner les contrôles a priori du CMP.
125 Art.73 CMP du Sénégal et 23 du CMP du Togo.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 44
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 45
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
DCMP dans le cadre du contrôle a priori et ces
marchés donnent lieu à un compte rendu détaillé.
Par ailleurs, la publication d'un avis d'attribution provisoire fait l'objet
d'approbation de la DCMP et c'est à partir de l'aval donné par
celle-ci que ledit avis est publié.
Il appert au regard des éléments cités
ci-haut que le contrôle a priori contribue à assainir le secteur
de la passation des marchés publics en se fondant sur des
critères définis par le code des marchés publics. La
transparence des mécanismes de contrôle est nécessaire
à assurer l'intégrité du système de passation.
Toutefois ce mécanisme de contrôle administratif ne se calque pas
que sur le contrôle a priori.
Paragraphe 2 : La systématisation d'un
contrôle a posteriori
Lorsque les prestations objets du marché sont
réceptionnées par l'autorité contractante, s'exerce un
autre type de contrôle, se substituant au contrôle a priori. Il
s'agit du contrôle a posteriori, opéré à titre
accessoire par l'autorité contractante elle-même, et à
titre principal par l'autorité de régulation. Il sera donc
question dans un premier temps d'analyser l'aspect bicéphale de ce
contrôle (A) pour aboutir dans un second temps au droit de recours non
juridictionnel mis en oeuvre auprès de l'autorité de
régulation (B).
A- Un contrôle à deux visages
La bicéphalie du contrôle a posteriori de la
passation des marchés au Sénégal et au Togo se
dénote déjà à travers une exploration sommaire des
différents codes régissant les marchés publics dans ces
deux pays. Partant de ce constat et conformément aux dispositions des
articles 143 et 144 du code sénégalais des MP, on remarque qu'il
existe au sein de chaque autorité contractante, un organe de
contrôle interne qui doit s'assurer du respect rigoureux des dispositions
légales et réglementaires applicables aux marchés publics.
Pour cela, chaque cellule de passation des marchés a l'obligation
d'établir avant le 31 mars de chaque année à l'intention
de l'autorité dont elle relève et aussi de la DCMP et de l'ARMP,
un rapport annuel sur l'ensemble des marchés publics passés
l'année précédentes. C'est à travers ce rapport que
la cellule de passation fournit
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 46
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
la liste des entreprises jugées défaillantes,
précise la nature des manquements constatés et donne un compte
rendu détaillé des marchés passés par entente
directe.
En ce qui concerne le Togo, lorsque nous analysons les
attributions de la CCMP conformément au décret n°
2009-297/PR, ou peut lire dans le dernier alinéa que la CCMP «
établit à l'attention du représentant de l'autorité
contractante, un rapport annuel d'activités ». Ce rapport
comme au Sénégal porte sur l'ensemble des marchés
déjà passés au cours de l'année
précédente. De ce constat, on comprend à suffisance qu'il
s'agit là d'un contrôle a posteriori exercé au plan
interne.
Cependant, au-delà du contrôle interne a
posteriori exercé à titre accessoire par la cellule de passation
des marchés (Sénégal) et la commission de contrôle
des marchés publics (Togo), existe un autre type de contrôle a
posteriori, exercé à titre principal et au plan externe par
l'ARMP. Le contrôle a posteriori de l'ARMP est une exigence communautaire
qui consiste en l'exercice d'une série de prérogatives,
conformément à la directive 05 de l'UEMOA.
A ce titre, l'autorité de régulation des
marchés publics est chargée de veiller, par des études et
avis réguliers, à la saine application de la
réglementation et des procédures relatives à la passation
des marchés publics et de proposer au gouvernement et aux institutions
en charge des marchés publics toutes recommandations ou propositions de
nature à améliorer et renforcer l'efficience du système de
passation des marchés publics.
Par ailleurs, un aspect important qui mérite
d'être évoqué et qui fait office de convergence dans les
deux codes est le pouvoir de l'ARMP à mener des opérations de
contrôle et d'audit126 portant sur la transparence dans la
passation des marchés.
C'est le lieu d'évoquer les conclusions du rapport de
synthèse des marchés conclus par 31 autorités
contractantes au Togo et qui ont été rendues en mai
2015127. Ce rapport fait état des résultats des
travaux portant sur les marchés passés au titre de la gestion
2012, l'examen du traitement des litiges, les marchés passés par
entente directe et ceux conclus suivant la procédure
126 Cf. Art. 145 CMP Sénégal relatif au
contrôle externe et a posteriori et l'article 13 du CMP Togo relatif aux
missions et attributions de l'ARMP.
127 Revue indépendante de la conformité de la
procédure de passation des marchés publics passés par les
Autorités contractantes au titre de l'année 2012
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 47
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
d'appel d'offres restreint.
D'une manière générale, il ressort au
terme de ces travaux que des manquements ont émaillé d'une
manière significative la passation des marchés, portant ainsi un
coup dur aux dispositions législatives et règlementaires
régissant le principe fondamental de la transparence.
Quant au Sénégal, l'ARMP procède
annuellement comme au Togo à la revue a posteriori des marchés
publics, sur la base d'un échantillon représentatif. Un
système de ciblage est conçu pour la sélection des
structures à auditer. A cet effet toutes les structures publiques
gérant un budget supérieur à dix (10) milliards sont
systématiquement auditées128 contre 50% des structures
gérant un budget compris entre 5 et 10 milliards; 25% des structures
gérant un budget compris entre 1 et 5 milliards et 10% des structures
gérant un budget inférieur à 1 milliard.
Toutefois, quoiqu'on puisse dire, il faut admettre que ces
différents rapports ont permis aux organes de régulation
sénégalaise et togolaise d'interpeler les autorités
contractantes pour plus de rigueur tout en leur proposant des actions
correctives et préventives de nature à améliorer la
qualité de leurs performances, dans un souci d'économie, de
transparence et d'efficacité dans les procédures de passation.
Par ricochet, des mesures coercitives ont aussi été
érigées pour sanctionner les contempteurs des normes relatives
à la transparence. A cet effet, des personnes physiques ou morales
défaillantes se sont vues imposer des sanctions financières et
certaines ont même été exclues des procédures de
passation et sont répertoriées sur une liste tenue par l'ARMP.
Somme toute, les rapports de contrôles annuels a
posteriori effectués par l'ARMP doivent être transmis aux
autorités étatiques pour être ensuite publiés. Mais
étant dans une logique de transparence garantie par un organe de
régulation, il importe que nous puissions appréhender une autre
façon dont use ce dernier pour assurer le respect des règles et
la sanction des manquements constatés. La charte de transparence et
d'éthique, garantissant un droit de recours lié au contentieux
à tout candidat qui estime être injustement évincé,
nous allons donc nous en inspirer pour aborder la fonction contentieuse de
l'ARMP dans le règlement non juridictionnel des différends
relatifs à la passation.
128 ARMP Sénégal, Rapport annuel 2011, P.14
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 48
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
B- Une garantie en matière de recours
Le processus de passation des marchés publics ne se
déroule pas toujours dans les meilleures conditions et dans le respect
total des principes régissant la matière. Les éventuelles
irrégularités qui pourraient surgir peuvent être
traitées soit à l'amiable, soit par voie contentieuse par saisine
du comité de règlement des différends (CRD) de l'ARMP.
En effet, les codes sénégalais et togolais
reconnaissent un préalable obligatoire à la saisine du CRD lors
du contentieux des marchés publics. Sous cet angle, le candidat qui
s'estime lésé est d'abord tenu de saisir la personne responsable
du marché à travers un recours gracieux129. Ce recours
peut selon l'article 89 du CMP du Sénégal, porter sur la
décision d'attribuer ou de ne pas attribuer le marché, les
conditions de publication des avis, les règles relatives à la
participation des candidats, le mode de passation, etc. Dans ce cas de figure,
le candidat doit adresser une notification écrite à la PRMP
comprenant les références de la procédure de passation
ainsi que l'exposé des motifs. Ce recours doit être exercé
au Sénégal par le requérant dans le délai de 5
jours suivant la publication de l'avis provisoire d'attribution du
marché. Ce recours s'exerce en droit togolais au plus tard dans les 10
jours qui précèdent la date prévue pour le
dépôt de la soumission130. La PRMP est tenue de
notifier sa réponse au requérant ; mais si elle ne le fait pas
dans le délai règlementaire131, ce défaut de
réponse sera constitutif d'un rejet implicite du recours gracieux. Le
candidat peut alors saisir le CRD de l'organe de régulation dans le
délai de 3 jours suivant la saisine de la PRMP132
(Sénégal). Par ailleurs ce délai en droit togolais est de
7 jours conformément à l'article 125 du CMP133
Togo.
129 Art. 89 CMP Sénégal et 122 CMP Togo relatif au
recours devant l'autorité contractante.
130 Article 124 CMP Togo « Ce recours doit être
exercé dans les délais requis à l'article 62 du
présent décret, ou au plus tard dix (10) jours ouvrables
précédant la date prévue pour le dépôt de la
candidature ou de la soumission. Il a pour effet de suspendre la
procédure jusqu'à la décision définitive de la
personne responsable des marchés ou de l'autorité de
régulation des marchés publics ».
131 Ce délai au sens de l'article 89 alinéa 4 du
CMP Sénégal est de 3 jours.
132 Art. 90 CMP Sénégal,
133 Article 125CMP Togo « En l'absence de
décision rendue par la personne responsable des marchés publics
dans les cinq (5) jours ouvrables de sa saisine, le requérant peut
également saisir l'autorité de régulation qui rend sa
décision dans les sept (7) jours ouvrables de sa saisine, faute de quoi
l'attribution du marché ou de la délégation ne peut plus
être suspendue ».
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 49
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Sur ce dernier point sus évoqué, rappelons que
l'une des implications essentielles de la fonction de régulation de
l'ARMP est de procéder au règlement non juridictionnel des
litiges nés à l'occasion de la passation des marchés
publics. Cette fonction est dévolue au Sénégal et au Togo
au Comité de Règlement des différends (CRD), qui de toute
évidence constitue le pivot central du contentieux non juridictionnel
des marchés publics. Partant de ce point de vue, il va sans dire que les
diligences effectuées par le CRD constituent la démonstration
d'une volonté conjointe en ce qui concerne la mise en oeuvre d'un droit
de recours lié au contentieux de la passation des marchés comme
le recommande la charte de transparence et d'éthique au
Sénégal.
Dès lors, le CRD est chargé de recevoir les
dénonciations des irrégularités constatées par les
parties intéressées ou celles connues de toute autre personne
avant, pendant et après la passation ou l'exécution des
marchés publics. Sa saisine se fait par notification écrite et
n'est recevable que lorsque le requérant invoque une violation
caractérisée de la règlementation des MP et accompagne sa
requête de la pièce attestant du paiement d'une consignation.
Cependant, pour des raisons de cohérence, nous ne nous
intéresserons qu'aux irrégularités survenues pendant la
phase de passation. Rappelons aussi que pour des questions de transparence et
dans le but de prévenir tout conflit d'intérêt lors du
règlement d'un litige, les membres de la société civile et
du secteur privé susceptibles d'avoir un intérêt avec l'une
des parties au conflit sont remplacés sur décision du
président du comité au moment de statuer sur le litige. Par
ailleurs, si les faits reportés devant le CRD caractérisent des
violations de la réglementation relative à la passation des
marchés publics, le Président du Comité saisit, soit la
Commission Litiges134, soit le Comité en formation
disciplinaire135. En ce sens, plusieurs décisions ont
été rendues par le CRD dans le souci de corriger les
écorchures faites au principe de la transparence. Mais rappelons que la
saisine du CRD a un effet suspensif136 sur la procédure
jusqu'à sa décision définitive.
Au Sénégal, dans sa décision
n°147/16/ARMP du 18 mai 2016, le CRD a statué en commission
134 Le CRD statue en formation litige pour approuver ou non la
requête du requérant par rapport à la décision de la
commission de passation des marchés de l'autorité
contractante.
135 Le CRD statue en formation disciplinaire pour sanctionner
un soumissionnaire ayant fait preuve de malhonnêteté.
136 L'effet suspensif ici correspond au respect des mesures
conservatoires.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 50
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
litiges sur la saisine de la Direction du Livre et de la
Lecture du ministère de la culture et de la communication. En
l'espèce, le CRD a été saisi suite au refus de la DCMP
d'autoriser la signature par entente directe, d'un marché d'acquisition
de livres, avec chacune des librairies « Harmattan Sénégal
», « Quatre vents », et « La différence ».
Malgré l'assurance que la Direction du Livre et de la Lecture
prétendait avoir par l'article 142 alinéa 3 du CMP
137, le CRD n'a pas manqué de lui lancer un message fort en
lui rappelant le respect scrupuleux des principes sacrosaints de la passation
des marchés publics à savoir la liberté d'accès
à la commande, l'égalité de traitement des candidats et la
transparence des procédures, qui ne sauraient être tenus en
échec pour un marché d'acquisition de livres au profit de
l'entente directe. Ainsi donc, le CRD a t-il approuvé la décision
de la DCMP et a ordonné à la Direction du Livre et de la Lecture
de passer le marché envisagé par appel d'offres.
En résumé, le respect de la transparence est de
mise à tous les niveaux de la procédure de passation. Du
contrôle administratif du processus de passation, découle un autre
type de contrôle qui, loin d'intéresser à nouveau la DCMP
ou l'organe de régulation, fait émerger un nouvel acteur, le
juge.
Section 2 : Un contrôle juridictionnel
indispensable
Le contrôle juridictionnel dans la passation des
marchés revêt une importance capitale dans une exigence de
transparence. A cet effet nous aborderons d'abord ce contrôle comme
portant sur la régularité des procédures (paragraphe1) et
ensuite l'étendue d'un tel contrôle (paragraphe 2).
137 « Si l'autorité contractante n'accepte pas les
avis et recommandations qui, le cas échéant auront
été formulés par la Direction chargée du
contrôle des marchés publics concernant la possibilité
d'utiliser une procédure autre que l'appel d'offres ouvert ou relatives
à la proposition d'attribution du marché, elle ne peut poursuivre
la procédure de passation qu'en saisissant le Comité de
Règlement des Différends près l'organe chargé de la
régulation des Marchés Publics ».
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 51
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Paragraphe 1 : Le contrôle de la
régularité des procédures
Le contrôle de la régularité des
procédures permet au juge d'avoir un droit de regard sur le processus de
passation. Ainsi, sera-t-il procédé au rappel des règles
de transparence (A) puis à la régulation économique par le
juge (B).
A- Un rappel des règles de transparence par le
juge
Au Sénégal, les marchés publics sont
soumis au principe de la publicité et de mise en concurrence
conformément à la charte de transparence et d'éthique en
matière des marchés publics, à la directive n°04 de
l'UEMOA, au décret n° 2011-1048 du 27 juillet 2011 portant code des
marchés publics et au code de transparence dans la gestion des finances
publiques au sein de l'UEMOA. Ils relèvent de la même directive au
Togo mais sous la houlette du décret 2009/277 portant code des marches
et délégation de services publics.
Sous ce rapport, le juge administratif veille au respect
scrupuleux des règles fondamentales qui définissent la
transparence dans la passation des marchés publics. A bien des
égards, la commande publique se doit de respecter tout d'abord la
liberté d'accès qui consiste à permettre à toutes
les personnes remplissant les conditions nécessaires, de se porter
candidates à un marché public. Dès lors, toute
discrimination injustifiée dans le choix des candidats doit être
sanctionnée. Cette liberté d'accès des candidats
correspond, en réalité, à l'application
particulière de la liberté de concurrence dans le cadre des
marchés publics. Sur ce dernier aspect, il convient de rappeler que
l'obligation de mise en concurrence s'applique dans sa globalité
à l'administration conformément aux dispositions de l'article 24
et 3 nouveau du COA138. L'autorité contractante ne peut donc
violer les règles de concurrence et de libre accès aux
marchés publics sans encourir une sanction de la part du juge
administratif.
Dans ce contexte, le juge sénégalais dans
l'arrêt de la cour suprême « Société SARRE-CONS
contre ARMP »139 du 22 aout 2013 n'a pas manqué de
rappeler que l'autorité contractante ne peut violer les règles de
concurrence et de libre accès aux marchés publics en
insérant dans les
138 Loi n° 65-51 du 19 juillet 1965, portant code des
obligations de l'administration, modifiée par la loi 06-16 du 30 juin
2006.
139 CS, 22/08/2013, Société SARRE-CONS c/ ARMP
Bulletin des arrêts de la Cour suprême du Sénégal
2013.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 52
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
dossiers d'appel d'offres une clause relative à
l'autorisation du constructeur à fournir par les candidats au
marché de véhicules neufs.
L'intervention du juge au regard du respect des
critères contenus dans le DAO s'affirme de plus en plus au
Sénégal et demeure dans un état quasiment latent en droit
positif togolais. En effet, le contentieux de la passation offre à la
Cour suprême, l'opportunité de recenser et de corriger les
irrégularités administratives constatées dans le cadre de
l'examen des candidatures au regard des critères inhérents
à la transparence.
En réalité, à travers le respect du
principe constitutionnel140 de la concurrence, le juge est parvenu
à imposer l'égalité des candidats dans la passation des
marchés publics et en a fait un élément
d'appréciation objective au regard de la légalité des
actes administratifs. Dans cette nouvelle donne, le juge administratif au
Sénégal comme au Togo apparait comme l'ultime rempart contre les
atteintes aux règles de transparence qui gouvernent la passation des
marchés.
Par ailleurs, le juge administratif s'assure également
de l'effectivité de la transparence par la vérification des
formalités de publicité par les autorités contractantes.
En effet, il faut bien convenir que les marchés publics doivent faire
l'objet de publicité sous réserve des marchés
requérant une procédure de passation non concurrentielle. Ainsi,
la soumission des marchés publics au Sénégal et au Togo
aux formalités de publicité n'échappe pas à
l'office du juge administratif. La tendance de favoritisme étant
toujours présente, l'autorité contractante peut être
amenée à procéder à la passation d'un marché
par entente directe et donc sans formalité de publicité, alors
que la nature du marché ne l'exigeait pas.
Dès lors, le juge administratif est intervenu au
Sénégal à travers des arrêts pour rappeler que
l'obligation de publicité n'a pas un caractère facultatif. En
effet, l'analyse des décisions rendues par la Cour suprême du
Sénégal atteste singulièrement de la permanence de
l'office du juge en la matière. C'est le lieu d'évoquer au regard
de la pertinence de son dispositif, l'arrêt Société
Angélique International Limited (A.I.L) contre ARMP141. Le
juge sénégalais considère à travers cet arrêt
qu'il y a violation de l'obligation de publicité lorsque les
critères et sous critère n'ont
140 Linotte Didier., « Existe-t-il un principe
général du droit de la libre concurrence » ?, AJDA, 2005,
p.1549.
141 CS Sénégal, 24/10/2013 Angélique
International Limited (A.I.L) contre ARMP.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
pas été portés à la connaissance des
candidats au marché.
Par conséquent, conformément à l'exigence
de transparence, on peut considérer qu'un marché a
été passé dans des conditions satisfaisantes si les moyens
de publicité utilisés ont réellement permis aux potentiels
soumissionnaires d'en être informés et ont abouti à une
diversité des offres. En effet, l'efficacité de la
publicité constitue une composante essentielle de la
régularité du marché. Un avis de publicité
insuffisant comme le non-respect d'une procédure dont le formalisme est
défini par le code, est susceptible d'entrainer l'annulation du
marché pour violation des principes fondamentaux que sont la
liberté d'accès à la commande publique,
l'égalité de traitement des candidats, et la transparence des
procédures de passation142.
A ces différends égards, on peut conclure d'un
point de vue prétorien qu'au Sénégal, le respect de
l'exigence de publicité vise à assurer une meilleure conciliation
entre le principe de légalité et l'action des autorités
contractantes et cette situation s'impose dès lors comme une
méthode de raisonnement. Cependant, au-delà du rappel
juridictionnel des règles de transparence, s'opère une mission
technique qui se rapporte à la régulation économique par
le juge, de la passation des marchés publics.
B- Une régulation économique par le
juge
La rénovation du système de contrôle dans
la régulation des marchés publics a été
consolidée dans un passé récent par un contrôle
juridictionnel qui s'observe à des proportions variables au Togo et au
Sénégal. Cette situation s'est accompagnée d'une mutation
de l'office du juge administratif qui conserve néanmoins ses
attributions classiques.
En guise de définition, la régulation est
entendue en droit comme une « fonction tendant à
réaliser certains équilibres entre concurrence et d'autres
impératifs d'intérêt général, à
veiller à des équilibres que le marché ne peut pas
produire à lui seul »143. Elle renvoie dès
lors à des
142 Docteur Mamadou Yaya DIALLO, « Le juge de
l'administration et la régulation des marchés publics au
Sénégal », Page 18.
143 Lombard Martine, « Institutions de
régulation économique et démocratie politique »,
AJDA, n°10, 14 mars 2005, p. 531.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 53
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
considérations économiques étant
donné les montants exorbitants que suppose la passation des
marchés publics.
En effet, le juge administratif ne peut plus se cantonner dans
une analyse abstraite et indifférente aux enjeux économiques et
financiers des décisions qu'il contrôle. Il intègre
dès lors des données économiques dans la résolution
des affaires dont il est saisi. Il doit non seulement les comprendre mais aussi
déterminer leur place dans les notions fondamentales telle que la
concurrence, une composante de l'intérêt général
protégée par la loi. Sous ce rapport, on peut citer la
décision de la Cour suprême sénégalaise dans
l'affaire «Association sénégalaise des
hémodialysés et insuffisants rénaux, ASHIR » contre
ARMP144 où l'intérêt général
dégagé par les juges repose sur une considération
essentiellement économique.
Dans cette affaire, la cour suprême a estimé que
l'intérêt général est une condition de
légalité de l'acte administratif. Mais le plus important dans
cette décision c'est que le juge considère que l'attribution du
marché à Carrefour Médical rendait plus accessible les
médicaments à un moindre coût. Par conséquent, le
but de l'intérêt général est aussi
réalisé. Cette situation amène le juge à conclure
que le moyen développé par l'association en question et tenant
à la violation de la loi n'est pas fondé. Par cette
décision, le juge a cherché à concilier protection de
l'intérêt général et celle des intérêts
économiques particuliers. Le juge montre à travers cette
décision que la régulation de l'économie peut aussi se
faire par le droit mais dans un souci de préservation de
l'intérêt général. Pour cela, le juge doit faire
preuve d'une clarté irréprochable au regard des textes dans ses
décisions dans le souci d'assurer une sécurité
juridique145 et un règlement effectif des différends
qu'il doit trancher.
Par ailleurs, la régulation économique par le
droit dans la passation des marchés publics apparait comme l'instrument
par lequel le juge reconnait à l'administration les pouvoirs qui lui
sont nécessaires pour mener sa politique économique. Toutefois un
contrôle efficace est exercé sur ces pouvoirs pour ne pas laisser
surgir des dérives de la part de l'administration. Ce contrôle
144 CS, 12/04/2012 Association sénégalaise des
hémodialysés et insuffisants rénaux (ASHIR) contre
l'ARMP.
145 La sécurité juridique est un principe du droit
qui a pour objectif de protéger les citoyens contre les effets
secondaires négatifs du droit, en particulier les incohérences ou
la complexité des lois et règlements, ou leurs changements trop
fréquents.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 54
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 55
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
cependant n'est pas effectué sur la base exclusive des
règles du droit administratif classique car ces dernières ne
sauraient efficacement prendre en compte des données économiques
en perpétuelles mutation qui caractérisent les marchés
publics.
A cet effet, si nous revenons à la décision
« ASHIR contre ARMP » précitée, le juge s'est
prononcé non pas sur la base des règles immuables du droit
administratif traditionnel, mais bien sur le fondement des
considérations économiques et de la notion d'intérêt
général146. La Cour suprême s'est
cantonnée sur une appréciation des faits alors qu'elle pouvait se
contenter d'une application stricte de la règle de droit basée
sur une méthode habituelle de raisonnement. Dès lors, la
représentation juridique des faits dont participe l'intérêt
général perd donc de son autonomie pour se structurer autour du
modèle dominant qu'offre la pensée économique. Ainsi,
à la lumière de cette mutation qui s'impose aux juges
sénégalais et togolais au regard de leurs attributions, on serait
tenté de conclure qu'il s'agit là d'une dénaturation de
leur mission originaire. Pourtant, il faut bien s'accorder sur le fait que les
récentes transformations du droit public ne signalent ni sa
dénaturation dans les domaines qui seraient réservés au
droit privé, ni sa dissolution, mais son adaptation aux exigences
nouvelles de l'action publique : « Les deux corps du droit subsistent
»147.
C'est sans doute dans cette logique de raisonnement que les
considérations actuelles en matière de contrôle
juridictionnel trouvent accessoirement un sens surtout en droit positif
sénégalais où le juge bien souvent, fait preuve d'une
saine audace, mettant ainsi en évidence une divergence
prétorienne vis-à-vis de l'activité contentieuse de son
homologue togolais.
Mais rappelons une fois de plus que ces attributions nouvelles
ne font pas pour autant perdre au juge administratif ses attributions
classiques en ce qui concerne le contentieux de la passation des marchés
publics. Ce contentieux bien que revêtant une symétrie variable,
touche du doigt les réalités de plus d'une discipline du
droit.
146 Dans ladite décision, l'existence de
l'intérêt général est avérée en raison
de l'accessibilité des patients aux médicaments à un
moindre coût.
147 Gérard TIMSIT, « Les deux corps du droit,
Essai sur la notion de régulation », RFAP, n°78, avril-juin
1996, p. 376.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 56
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Paragraphe 2 : L'étendue du contrôle
juridictionnel
La transparence des procédures implique que les
décisions du CRD soient soumises à un contrôle du juge
administratif au regard du principe de légalité (A). Partant de
ce dernier aspect, nous allons nous intéresser à l'extension du
contrôle au juge pénal (B).
A- Un contrôle axé sur la
légalité
Comme nous l'avons souligné dans nos propos
introductifs, le contentieux148 en matière de passation des
marchés publics est de la compétence du juge administratif. De ce
fait, c'est par le contrôle des décisions de l'ARMP que le juge
renforce son autorité. Aussi vrai que l'Autorité de
Régulation des Marchés Publics incarne une institution
administrative indépendante et donc soustraite à la tutelle
hiérarchique de l'Etat, elle demeure néanmoins rattachée
à son « placenta administratif »149.
Désormais, en renforçant ses outils méthodologiques en
termes de contrôle150 classique, le juge administratif est
amené à jouer un rôle en matière économique,
en veillant au respect des droits et libertés économiques et
à exercer un contrôle direct151 sur l'action des
autorités publiques en charge de la passation des marchés
publics.
Les articles 90 et 125 des codes sénégalais et
togolais des marchés publics, confirment respectivement les
compétences du CRD pour statuer sur les éventuels conflits
susceptibles de survenir lors de la passation des marchés. A cet effet,
les décisions du comité de règlement des différends
ne peuvent avoir pour effet que de corriger la violation alléguée
ou d'empêcher que d'autres dommages soient causés aux
intérêts concernés.
Toutefois, toute personne non satisfaite des décisions
du CRD a la faculté de saisir la chambre administrative de la cour
suprême aux fins de contrôle si elle estime que la décision
du CRD souffre d'une irrégularité formelle ou sur le fond.
Rappelons que le principe de légalité
148 Il s'agit ici du recours pour excès de pouvoir, le
recours de plein contentieux étant l'apanage du TGI de Dakar pour le
Sénégal et de la chambre administrative de chacune des deux cours
d'appel du Togo.
149 Docteur Mamadou Yaya DIALLO, Op. cit. Page 3.
150 Coulibaly D., Baba Kane, « Le juge administratif,
rempart de protection des citoyens contre l'administration en Afrique noire
francophone? » Disponible sur le site
www.afrilex.u-bordeaux4.fr
151 Jean MARIMBERT, L'ampleur du contrôle
juridictionnel sur le régulateur, in Marie Anne Frison-Roche, pp.
179-183.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 57
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
administrative requiert un rapport de conformité entre
les normes, et par ricochet de non contrariété. Pour cela, les
décisions du CRD ne sauraient contredire les lois en vigueur de
même que les deux directives de l'UEMOA qui servent de houlette à
la passation des marchés publics au Sénégal et au Togo. En
effet, la passation des marchés, lorsqu'elle s'écarte des
exigences du code des marchés publics, donne lieu à divers
recours qui sont souvent communs aux autres contrats administratifs. Sous cet
angle, la cour suprême du Sénégal, conformément
à la loi n° 2008-75 du 08 août 2008, peut contrôler la
régularité formelle ainsi que la validité juridique des
actes unilatéraux pris par l'administration. Quant au Togo, c'est
l'ordonnance n° 78-35 du 07 septembre 1978 qui confie cette mission de
contrôle à cette auguste assemblée.
Par ailleurs, l'aspect porteur d'intérêt dans
l'innovation du contentieux juridictionnel en passation des marchés
publics surtout au Sénégal est sans doute la mise sur pied de ce
qu'il convient d'appeler le « Recours du soumissionnaire
évincé ». En effet, à travers un tel recours, le juge
de l'administration qui en statuant sur saisine du soumissionnaire
évincé, sanctionne les manquements aux aboutissements sacrosaints
du principe de transparence, avant la signature du marché.
Dans ce contexte, une analyse approfondie de ce dernier
constat renforce à suffisance la conviction selon laquelle les juges
administratifs sénégalais et togolais, à travers le
contrôle des actes du CRD relativement aux règles de
publicité et de concurrence, se conforment aux exigences communautaires,
législatives et règlementaires de transparence. Mais pour arriver
à un tel constat, il convient de préciser au préalable,
les implications de la joute prétorienne, surtout au niveau de la
chambre administrative de la cour suprême sénégalaise et
qui ont eu une part significative d'implications sur l'évolution de la
matière.
C'est le lieu de souligner à cet égard, les
célèbres décisions, par elle rendues à travers les
arrêts « Sarre-CONS contre ARMP »152 et « Etat
du Sénégal contre Société Africaine Audit
»153. Ces jurisprudences ont marqué le début
d'une évolution ouvrant la voie à la prise en compte par le bloc
de la légalité, des dispositions relatives au droit de la
concurrence et qui tendent à mettre à la charge des personnes
publiques, une obligation de respect de la neutralité et de mise en
oeuvre
152 CS, 22/08/2013, Société SARRE-CONS c/ ARMP
Bulletin des arrêts de la Cour suprême du Sénégal
2013.
153 CS, 25 avril 2006 Etat du Sénégal c/
Société Africaine Audit.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
de la libre concurrence.
En effet, dans le 1er arrêt,
l'autorité contractante avait inséré dans le DAO, une
clause relative à l'autorisation du constructeur et que devraient
présenter les candidats à un marché de fournitures de
véhicules neufs. Le juge a dès lors affirmé à
travers cette jurisprudence que cette exigence de l'autorité
contractante mettait à mal les règles de concurrence,
conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 24
du COA154. Le juge s'est attelé dans le deuxième
arrêt à rappeler comme dans le premier, la nécessité
pour les acheteurs publics de se conformer au respect de l'obligation de mise
en concurrence.
Ainsi, le juge dans son office à travers ces deux
décisions sus mentionnées, fait-il valoir que toute
discrimination injustifiée dans l'attribution du marché, doit
être sanctionnée155. Eu égard à cela, il
est plus que jamais évident que l'intervention du juge dénote de
l'intérêt à préserver la clarté et à
imposer aux autorités contractantes, le respect des obligations de
liberté d'accès et de mise en concurrence, des
éléments fondamentaux dans le pré carré des
exigences de transparence dans la passation des marchés.
Aujourd'hui il va sans dire que le contentieux juridictionnel
de la passation des marchés publics ne relève pas exclusivement
de la compétence du juge administratif.
B- Une extension du contrôle au juge
pénal
Le contentieux juridictionnel de la passation des
marchés publics peut, à un niveau, relever moins d'un manquement
aux règles du droit administratif que d'une violation
avérée des principes du droit pénal. A cet effet, il ne se
borne pas seulement à faire sanctionner le non-respect des obligations
de publicité et de mise en concurrence par une décision
d'injonction, de suspension ou d'annulation de l'attribution d'un
marché. Dès lors, des sanctions pénales peuvent être
prises à l'encontre des auteurs des faits allégués, au
regard de leur gravité. En effet, la
154 Art.24, COA « le non-respect des formalités de
publicité prescrites et la violation du principe d'égalité
de traitement des candidats aux commandes publiques par les acheteurs publics
entraîne la nullité de la procédure de passation ou du
marché passé, à la requête de toute personne
intéressée au déroulement normal de la procédure
».
155 Docteur Yaya DIALLO, op. cit, p.9.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 58
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
méconnaissance des règles de transparence,
matérialisée par des pratiques frauduleuses relevant du droit
pénal, fait passer le maillet, des mains du juge de l'administration
à celles du juge pénal.
La passation des marchés publics requiert une attention
particulière de la part des citoyens tant il est vrai que ce sont eux
qui la financent en partie à travers l'impôt. C'est la raison pour
laquelle toute atteinte à la règlementation constitutive de
fraude doit être réprimée. A l'analyse de ces pratiques
frauduleuses, on remarque que les atteintes à la liberté
d'accès, à l'égalité de traitement des candidats ou
de tout autre facteur garantissant la transparence dans la passation des
marchés sont érigées autour d'une trilogie d'infractions
que sont le délit de favoritisme, la corruption (active ou passive) et
la prise illégale156 d'intérêt. Bien que le CRD
statue en formation disciplinaire pour sanctionner les auteurs des pratiques
frauduleuses, il peut cependant saisir le juge pénal lorsque sont
constatés des faits susceptibles d'une qualification pénale.
L'atteinte à la liberté et à
l'égalité d'accès aux marchés publics consiste
à procurer à une personne physique ou morale, un avantage anormal
au moyen d'une entorse à la législation sur les marchés
publics indépendamment de savoir si l'autorité a sollicité
ou accepté un tel avantage. Toutefois, le problème qu'il s'est
posé au Sénégal et au Togo réside dans la sanction
pénale des auteurs de telles infractions. En effet, le délit
d'atteinte à la liberté d'accès dans les marchés
publics encore appelé délit de favoritisme tel qu'il existe en
droit français et qui a pour but de réprimer pénalement de
telles atteintes, n'existe pas encore en droits positif
sénégalais et togolais. Conformément au principe de
légalité des délits et des peines157 , le juge
pénal ne saurait condamner les présumés auteurs de tels
actes pour le seul motif qu'ils ne sont pas encore pénalement
qualifiés par chacun de ces droits positifs.
Toutefois, l'office du juge pénal n'est pas pour autant
amoindri. En effet, une lecture attentive du code pénal du
Sénégal et celui du Togo aide à comprendre que des
dispositions générales peuvent aussi sanctionner les faits des
agents publics ou candidats qui occultent la transparence
156 La jurisprudence a reconnu depuis longtemps que le
délit de prise illégale d'intérêt est
constitué par l'intérêt personnel, patrimonial pris par une
personne exerçant des fonctions publiques dans une affaire sur laquelle
elle exerce l'une des formes de contrôle prévu par la loi. Mais
aujourd'hui, on admet de plus en plus que l'intérêt visé
puisse être moral.
157 Selon ce principe, on ne peut être pénalement
condamné qu'en vertu d'un texte pénal précis et clair au
sens de la formule latine « Nullum crimen, nulla poena sine lege
».
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 59
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 60
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
lors de la phase de passation des marchés publics.
A cet effet, des délits comme l'usage de faux sont
punissables au correctionnel sur la base des articles 147 et 375 du code
pénal sénégalais. On en déduit donc qu'un candidat
qui soumissionne sur la base de faux documents afin de se voir attribuer un
marché public peut être poursuivi au plan pénal. De
même au Togo, des pratiques comme la corruption sont
réprimées par le juge conformément aux dispositions de
l'alinéa 2 de l'article 208 du code pénal158.
Toutefois, il n'est pas superflu de souligner que la menace de
sanctions pénales159 est une incitation forte pour les
acteurs publics et privés des marchés publics à se
conformer au droit pendant la phase de passation. En effet, bien qu'il n'existe
pas véritablement un arsenal répressif propre aux marchés
publics au Sénégal et au Togo, on note cependant que c'est
à travers la répression de certains délits comme la
corruption, le trafic d'influence et bien d'autres et que l'on observe
d'ailleurs dans le domaine de la passation des marchés, que le juge
pénal prévient les atteintes et donne des signaux clairs aux
pouvoirs publics et acteurs privés, les contraignant ainsi à se
conduire de manière prudente, conformément aux règles de
transparence.
Aujourd'hui, l'irruption du juge pénal sur la
scène des marchés publics est en train de se matérialiser
dans un contexte où les mécanismes traditionnels de
contrôle que sont les contrôles a priori, a posteriori, financier
et du juge administratif, semblent témoigner d'une relative
défaillance face aux atteintes sans cesse récurrentes à la
règlementation sur les marchés publics. L'office du juge
pénal qui certes ne dénotera d'une « efficacité
curative »160 accomplie que dans un futur proche, appelle
cependant à des ajustements préalables des codes pénaux
sénégalais et togolais en vue de clarifier sa sphère
d'intervention.
Dans ce cas de figure, la pénalisation du droit des
marchés publics contribuera à exposer de
158 Art. 208 al. 2 code pénal Togo: « Sera puni
d'un à 5 ans d'emprisonnement, tout officier public, magistrat,
fonctionnaire ou préposé d'un service public qui aura
sollicité ou agréé des dons, promesses, avantages de toute
nature en vue d'accomplir un acte de sa fonction non sujet à
rémunération particulière ou en vue de s'abstenir de
remplir un devoir de sa fonction. »
159 Pendant que les sanctions administratives et
financières sont traditionnellement destinées à mettre en
cause les institutions, les sanctions pénales quant à elles
frappent la personne à l'origine du comportement fautif.
160 Catherine PREBISSY-SCHNALL, « La pénalisation
du droit des marchés publics », ed. LGDJ, Bibliothèque de
droit public (tome 223).
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
manière dynamique, la manière dont le juge
pénal devra examiner les moyens utilisés par les acteurs pour
atteindre les objectifs économiques qu'ils se sont fixés et leur
conformité à la règlementation en vigueur. Partant de
là, il va sans dire que la crédibilité de la
répression pénale dépendra avant tout du degré
d'autonomie qui sera reconnue au juge pénal dans le jugement des
questions dont il sera saisi dans le contentieux de la passation des
marchés publics.
En définitive, l'ensemble du dispositif de
contrôle qu'il soit administratif, financier ou juridictionnel,
garantissant un respect du principe de transparence dans la passation des
marchés publics s'accorde sur un dénominateur commun: c'est que
les marchés publics sont soumis à une kyrielle d'atteintes,
rendant fragile l'effectivité de cette transparence tant
défendue. Toutefois et sans nier l'évidence, des efforts à
l'allure d'antidotes ont été entrepris et s'inscrivent
aujourd'hui dans une note positive au regard des améliorations
apportées.
Mais et si ces antidotes n'arrivaient pas à
guérir le mal? Faisons remarquer que cette question vaut son pesant
d'or. Mais quoiqu'on puisse penser, accordons-nous sur le fait que le principe
de transparence connait bien des atteintes qui feront l'objet d'une analyse
plus approfondie dans la seconde partie de notre travail.
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 61
Titre 2 : Une transparence relative 62
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
TITRE II : UNE TRANSPARENCE RELATIVE
Tout ne va donc pas pour le mieux dans le milieu des
marchés publics. Les systèmes de passation des marchés
publics d'un bon nombre de pays africains, y compris le Sénégal
et le Togo, présentent de nombreuses faiblesses qui peuvent être
rattachées au non-respect de leur législation, à la
lenteur et la complexité des formalités, aux difficultés
de mise en oeuvre des mécanismes de contrôle et également
à la fraude et la corruption161. Ces épines entrainent
inévitablement un impact négatif sur leurs budgets et par
ricochet sur leur croissance économique.
Ainsi, parties d'une affirmation textuelle flamboyante mais
controversée dans la pratique, les règles de transparence qui au
départ se voulaient messianiques et irréprochables ont vite fait
de se laisser influencer par des pratiques qui au bas mot peuvent être
qualifiées de déviantes. Des lors, comme palliatifs aux
difficultés encourues par les exigences de transparence, les principes
de fonctionnement qui en résultent au Sénégal et au Togo
ont suscité le besoin d'être consolidés et
sauvegardés à différents niveaux de la phase de
passation.
A cet effet, il s'agira dans cette seconde partie de notre
travail de faire une analyse fine de la pratique de passation au
Sénégal et au Togo pour en faire ressortir les failles et des
recommandations innovantes pour contourner au mieux l'épineux
problème des atteintes au principe de la transparence. Pour ce faire, il
sera d'abord question de faire un état des lieux des insuffisances
relatives à la transparence des procédures (Chapitre 1), et
d'envisager ensuite un diagnostic des mécanismes de contrôle sur
fond de recommandations (Chapitre 2).
161 OCDE, Guide sur la prévention de la corruption dans la
passation des marchés publics, Editions OCDE.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
CHAPITRE I : INSUFFISANCES RELATIVES A
LA
TRANSPARENCE DES PROCEDURES DE PASSATION
Les pratiques qui suivent sont qualifiées de
déviantes car elles regroupent celles qui violent directement la lettre
du code, et celles qui prêchent contre son esprit, lesquelles sont les
plus délicates à appréhender. Il est possible de faire
apparaitre ces pratiques en remontant le fil chronologique des
procédures de passation qui ont été décrites dans
la première partie de nos travaux. Qu'il s'agisse du
Sénégal ou du Togo, Il importe de prendre conscience que les
atteintes aux règles de transparence des procédures de passation
peuvent avoir des causes diverses, allant d'une simple erreur dans
l'exécution d'une tâche administrative à une transgression
délibérée de la législation et des règles
applicables. A cet effet, nous avons pu faire un état des lieux de ces
insuffisances dans les différents modes de passation. Dès lors,
après une analyse des atteintes relatives aux marchés de type
concurrentiel (Section 1), nous allons nous intéresser aux constats
relatifs aux procédures particulières (Section 2).
Section 1 : Des atteintes liées aux
marchés de type concurrentiel
Consacrer la concurrence comme porte-flambeau de la
transparence n'a pas toujours été aisé, du fait des
irrégularités constatées. Il a été crucial
à ce niveau de notre travail de répertorier ces
irrégularités dans les marchés de type concurrentiel. A
cet effet, les insuffisances seront abordées tour à tour dans le
mode de passation (paragraphe 1) et dans le traitement des dossiers (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : Les insuffisances dans le mode de
passation
La passation des marchés publics est bien souvent
émaillée d'insuffisances dues à un non-respect de la
règlementation en vigueur162. Ces insuffisances dans le mode
de passation seront analysées d'abord à travers une compromission
en amont de la soumission(A), puis dans la phase
162 Directives 04 et 05 de l'UEMOA relatives aux marchés
publics, codes sénégalais et togolais des marchés
publics.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 63
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
proprement dite d'appel d'offres (B).
A- Une compromission en amont de la soumission
Pendant la phase préalable d'appel d'offres, les
autorités contractantes procèdent à une série
d'activités allant de l'évaluation des besoins jusqu'au choix de
la procédure applicable avec pour but d'inscrire les potentiels
marchés dans le PPM. En ce qui concerne chacune de ces étapes
situées en amont de la soumission, les risques d'atteintes sont bien
présents et peuvent, de façon significative, entacher la
procédure de passation.
En effet, on remarque à première vue pour
certains marchés, une mauvaise qualité de l'évaluation des
besoins qui se traduit par une approbation de biens, services ou projets
inutiles, soit par des agents incompétents, qui bien souvent se basent
sur des besoins peu pertinents privant ces marchés de toute
objectivité, soit par des agents qui identifient le besoin d'un achat,
en ayant un intérêt privé dans l'acquisition du bien objet
du marché163.
Aussi doit-on préciser que certaines autorités
contractantes ne respectent pas l'inscription préalable des
marchés dans le PPM164 et la publication des avis
généraux de passation des marchés165.
Par ailleurs, des dysfonctionnements qui s'observent dans la
phase de planification et budgétisation s'inscrivent de plus en plus
dans une récurrence alarmante avec de lourdes conséquences. En
effet, c'est pendant la phase préalable d'appel d'offres que se fait
l'analyse financière devant déboucher sur une estimation en terme
de coût des biens et services ayant été identifiés
lors de l'évaluation des besoins.
163 Kari K. HEGGSTAD, « les fondements de
l'intégrité dans la passation des marchés », P.16
164 Au Sénégal, des marchés de la Commission
de Régulation du Secteur de l'Electricité (CRSE) et du Conseil
Exécutif des Transports Urbains de Dakar (CETUD) ont été
passés sans être préalablement inscrits dans le PPM. La
Direction de l'Administration Générale de l'Equipement (DAGE) du
MITD n'a quant à elle pas transmis son PPM à la DCMP en violation
des dispositions de l'article 6 du décret portant CMP.
165 Au Togo en 2012, aucune autorité ciblée par
les enquêtes du cabinet Grant Thornton n'a établi un avis
général de passation en violation des dispositions de l'article
15 du CMP.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 64
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Il arrive cependant que cette estimation soit volontairement
sous-évaluée par des agents indélicats afin de
présenter à l'autorité d'approbation des marchés,
des montants réduits et qui après validation, échapperont
aux valeurs seuil de mise en concurrence. Ceci se fait
généralement dans l'espoir d'ajuster le coût contractuel
initialement approuvé, une fois le projet en cours validé.
Parfois, l'approbation des marchés se fait par une personne non
habilitée et la non-signature des marchés par la
PRMP166.
Il va sans dire que cette pratique dénote non seulement
d'une malhonnêteté de la part des agents publics, mais aussi d'une
absence de définition précise et objective des exigences d'achat
qui normalement devraient être soumises aux règles de
transparence. Le défaut d'inscription de certains marchés dans le
PPM dont nous avons tantôt fait cas a été
dénoncé dans le rapport de l'ARMP Togo167,
publié le 20 Aout 2015 pour les marchés conclus en 2012. Cette
situation a été imputée au ministère
délégué auprès du ministère de
l'agriculture, chargé des infrastructures rurales.
Au regard des exigences d'achat susmentionnées, notons
que des fonctionnaires corrompus à qui revient la préparation des
documents de nature technique comme le DAO ou le cahier des charges, les
établissent parfois au profit d'une seule entreprise limitant ainsi la
concurrence qui pourtant est nécessaire pour assurer la transparence.
Bien souvent, le DAO et le cahier des charges sont inutilement et
volontairement rendus complexes afin de dissimuler les actes de corruption et
rendre difficiles les opérations de surveillance.
Rappelons cependant que les pratiques occultant la
transparence ne sont pas exclusivement le fait des agents publics. A cet effet,
au niveau des entreprises candidates, la tentation est tout aussi grande. De ce
fait, des entreprises candidates fournissent des certificats d'assurance
falsifiés, aux fins d'être éligibles à l'appel
d'offres, bien qu'étant non qualifiées168.
166
www.itietogo.org relativement
à la transparence des marchés publics, consulté le 19
octobre 2016.
167 Ce rapport a été produit par le cabinet de
renommée internationale Grant Thornton du Sénégal et a
concerné 31 autorités contractantes dont 15 ministères,
1à sociétés d'Etat, 2 agences, 2 universités, 1
commune et une institution représentant le corps de contrôle de
l'Etat.
168 Ceci se justifie par les nombreuses décisions de
l'ARMP en formation disciplinaire tant au Sénégal qu'au Togo pour
sanctionner les entreprises auteures de tels actes.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 65
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Par ailleurs, l'aspect relatif à l'adaptation ou
l'irrégularité du choix de la procédure de passation
mérite une attention particulière. A ce niveau encore les risques
d'atteintes sont palpables. A cet effet, on dénonce un recours abusif
aux procédures restrictives de concurrence qui sont utilisées
sans justification adéquate, ou simplement dans l'ignorance des
exigences, pour par exemple exploiter exagérément la segmentation
des marchés169, violant de ce fait les exigences de l'article
53 du code sénégalais et 5 du code togolais des marchés
publics relatives aux valeurs seuil.
Précisons à ce niveau que le droit positif exige
que les marchés passés par chaque autorité contractante et
dépassant ces valeurs seuil soient traités et attribués
conformément aux procédures définies dans le CMP. Les
textes sont pourtant clairs dans les deux cadres d'étude; mais à
l'analyse, on constate que certaines autorités contractantes, surtout au
Sénégal, au mépris de la règlementation, continuent
de recourir à un nombre exponentiel de Demandes de Renseignement et de
Prix (DRP)170, procédure spécifique de passation qui
d'ailleurs fera l'objet d'analyse plus poussée dans les parties à
venir.
Dans la même logique, notons qu'il arrive que des
fournisseurs soient évalués sans procédure d'appel
d'offres préalable, probablement parce que les décideurs ont
choisi une société particulière pour des motifs
personnels, et ce, au risque d'ignorer le meilleur soumissionnaire potentiel.
Une telle situation peut porter atteinte à la qualité des
prestations fournies.
En outre, des informations utiles ne sont pas
communiquées à tous les candidats de la même
manière171. Cette situation, constitutive d'une violation du
principe d'égalité de traitement des candidats, est telle que
certains candidats privilégiés sont préalablement
informés des délais de dépôt des offres au
détriment des autres. Cela leur offre un avantage considérable
puisque les délais leur ont été communiqués
d'avance, ce qui leur laisse le temps de se préparer et de
déposer à temps leurs offres.
169 Il s'agit ici d'une fragmentation
délibérée des contrats pour ne pas dépasser les
valeurs seuil légales à partir desquelles la mise en concurrence
est obligatoire.
170 La DRP est une procédure par laquelle les PRMP
procèdent à des consultations de fournisseurs pour les achats ou
services normalisés d'un prix inférieur aux seuils de passation.
Le recours à cette procédure exige que l'autorité
contractante s'adresse au moins à 3fournisseurs ou entrepreneurs.
171 L'autorité contractante donne ici des délais
irréalistes afin de réduire le temps imparti pour répondre
à l'appel d'offres ouvert.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 66
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
En résumés, ces exemples montrent à quel
point les procédures de passation des marchés publics sont,
pendant la phase préalable à l'appel d'offres, compromises par
les malversations de tous genres, allant des moindres aux plus audacieuses.
Malheureusement, la phase proprement dite d'appel d'offres n'en est pas
épargnée.
B- Une compromission pendant la phase d'appel
d'offres
La phase d'appel d'offres est émaillée autant
que celle qui la précède d'irrégularités
manifestes. A cet effet, on dénote une kyrielle d'atteintes aux
règles de transparence aussi bien au Sénégal qu'au Togo.
Pour ce faire nous allons procéder successivement à travers ces
deux sphères au recensement de ces atteintes.
D'abord s'agissant du Togo il faut souligner qu'au total, 841
marchés publics toutes catégories confondues ont
été conclus au cours de l'exercice 2015 dont 52% d'appels
d'offres. Le rapport de synthèse de l'ARMP Togo sur la conformité
de la procédure de passation des marchés publics passés en
2013, fait remarquer que la passation des marchés par la méthode
de l'appel d'offres souffre de malversations tant au niveau des
autorités contractantes qu'au niveau des candidats.
En effet, en plus des défaillances relatives au
système d'archivage, il a été dénoncé un
défaut de publicité pour certains marchés, avec pour
conséquence une inaccessibilité pour le public à
l'information relative à la procédure d'appel d'offres. Aussi,
les critères de sélection du soumissionnaire qui a
remporté le contrat ne sont-ils pas toujours publiés alors qu'ils
devraient l'être selon les exigences du CMP.
D'un autre côté, des informations pertinentes ne
sont pas toujours distribuées aux candidats de manière
équitable ce qui biaise la transparence et porte un revers au principe
d'égalité de traitement. En ce qui concerne l'état de la
transparence sur le délai de réponse à un appel d'offres
public, on constate qu'il n'est pas appliqué à l'ensemble des
soumissionnaires de manière équitable. Il ressort qu'il est
excessivement court, et par conséquent, seules les entreprises
bénéficiant de connaissances approfondies ont le temps de
préparer le dossier d'appel d'offres.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 67
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Mais à bien considérer les choses, il ressort
que tel un effet papillon172, un manquement en amont est susceptible
de bouleverser complètement l'état de la transparence le long de
la procédure d'appel d'offres. En effet, le défaut de
publicité évoqué plus haut entraine inévitablement
une absence de la concurrence et par ricochet un coût trop
élevé en ce qui concerne l'offre financière de
l'entreprise. Au regard de ce dernier aspect, il apert que c'est le principe de
l'efficience des procédures qui en prend un coup, et pas des
moindres.
Mais au-delà des atteintes dont sont auteures les
autorités contractantes, des pratiques peu louables sont de plus en plus
imputées à l'action des entreprises candidates. Dans ce cas de
figure, des concurrents se concertent pour fixer le prix d'achat à un
niveau artificiellement élevé, se rendant de ce fait coupables de
collusion. En outre, des entreprises offrent-elles des pots-de-vin pour avoir
accès à des informations confidentielles sur l'importance
relative des différents éléments de l'appel d'offres ou
sur les soumissions d'autres concurrents. Il s'agit là et d'une
façon on ne peut plus manifeste, d'une pratique constitutive de
corruption, portant atteinte à l'égalité d'accès
à l'information des candidats. Aussi convient-il de rappeler que
certaines entreprises soumettent de faux certificats d'assurance
qualité, permettant ainsi à des entreprises non qualifiées
de participer au processus de mise en concurrence.
Quant au Sénégal, il n'échappe pas non
plus à ces atteintes qui émaillent l'appel d'offres. Le rapport
annuel de l'ARMP pour le compte de l'année 2014 indique qu'au
Sénégal, les appels d'offres représentent 80,26 % (dont
53,04% pour l'AAO) en termes de valeur et 14,50% (dont 6,16% pour les AAO) en
termes de nombre. Le rapport fourni par l'ARMP dénonce un fait alarmant,
notamment le faible recours à l'appel d'offres ouvert en termes de
nombre. Sur les 11 autorités contractes qui composent le 1er
périmètre de contrôle issu de ce rapport annuel, on
constate que 6 d'entre elles n'ont pas lancé d'appels d'offres
ouverts.
Par contre sur les 5 autres restantes, on note que l'une
d'entre elles a passé 91,22% de la valeur des appels d'offres ouverts.
Ainsi toute réflexion faite, le mode principiel de passation des
marchés semble, au vu de son nombre, devenir une procédure
d'exception même si cette
172 Expression venant de l'anglais « Butterfly efffect
» et qui est matérialisée par une chaine
d'évènements qui se suivent les uns les autres et dont le
précédent influe sur le suivant.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 68
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
supposition est battue en brèche lorsque l'on raisonne
en fonction de la valeur financière de ces marchés.
Par ailleurs, en plus du défaut
d'archivage173 des dossiers d'appel d'offres, dû à
l'insuffisance de dotation en matériels et équipements
d'archivage des documents de passation des marchés, on dénonce
une insuffisante maîtrise des textes qui organisent les modalités
de mise en oeuvre des procédures de contrôle de la validité
des pièces administratives requises aux articles 43 et 44
précisés par l'article 45 du CMP. Des demandes de renouvellement
de pièces sont adressées aux soumissionnaires, pour des
pièces qui donnent pourtant droit à la participation aux
marchés publics, au regard des dispositions de l'article 45 du CMP.
Au terme de l'article 115 du CMP, il est fait obligation
à tout titulaire d'un marché dont le montant dépasse la
valeur seuil, de présenter une garantie de la bonne d'exécution
de celui-ci, destinée à couvrir les réserves à la
réception des travaux, fournitures ou services. Mais il est regrettable
de constater dans les faits, que la garantie de bonne exécution ne soit
pas fournie dans les délais requis par cette disposition du code
sénégalais des marchés publics.
En définitive, même si l'appel d'offres ouvert
demeure le mode recommandé de passation des MP pour les autorités
contractantes, il reste marqué dans son application par des
critères abusifs ou discriminatoires, qui sont une entrave au principe
de libre accès à la commande publique. En effet, même si
l'importance du marché le requiert, l'exigence faite aux candidats de
présenter des états financiers certifiés sur une
période de 3 ans et des références des marchés
similaires constituent une barrière à l'accès aux
marchés publics pour les entreprises de création récente,
même si elles ont les capacités techniques et financières
pour exécuter lesdits marchés.
Des irrégularités dans les prérogatives
de la commission et de la cellule de passation des marchés
méritent elles aussi d'être clarifiées.
173 Cas de la « Fondation Droit à la Ville »
(FDV) dont la cellule de passation des marchés, n'ayant pas de bureau,
ne dispose pas de locaux destinés à l'archivage et au classement
des documents de passation des marchés, rendant difficiles les travaux
de collecte d'informations. Cf. Mission de Revue Indépendante de la
Conformité de la Passation des Marchés de la Fondation Droit
à la Ville, Aout 2015, P.31
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 69
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Paragraphe 2 : Les anomalies dans le traitement des
dossiers
Le traitement des dossiers par l'autorité contractante
peut révéler des irrégularités sur plusieurs plans.
Les anomalies dont il est question ici peuvent dès lors être
structurées, à travers l'évaluation compromise des offres
(A) et l'attribution irrégulière des marchés (B).
A- Une évaluation compromise des offres
Au terme des dispositions des articles 35 du CMP
Sénégal174 et 1er du CMP
Togo175, on retient qu'une fois que les offres ont été
déposées par les candidats, la commission de passation des
marchés de l'autorité contractante concernée
procède à l'ouverture publique des plis et à
l'évaluation des offres qui ont été déposées
dans les délais contenus dans le dossier d'appel d'offres. Ces deux
phases concentrent cependant des manquements aux règles de transparence
à cette étape de la procédure car ce sont elles qui
détermineront respectivement la prise en connaissance du contenu des
offres techniques des candidats et leur conformité par rapport aux
spécifications du DAO de même que l'évaluation de leurs
offres financières.
Au Sénégal, le dernier rapport publié de
l'ARMP176 indique que la conduite de plusieurs processus
d'évaluation des offres est marquée par une absence de
formalisation dans les rapports d'évaluation et un contrôle
insuffisant de la conformité technique des offres aux
spécifications des cahiers de charges, en violation des dispositions de
l'article 59 du CMP relatif aux critères d'évaluation des
offres.
En outre, les opérations d'audit portant sur les
marchés passés par la Fondation Droit à la Ville font
état de graves manquements dans les activités de la commission et
dans celles de la cellule
174 « Au niveau de chaque autorité
contractante, sont mises en place une commission des marchés
chargée de l'ouverture des plis, de l'évaluation des offres et de
l'attribution provisoire des marchés ainsi qu'une cellule de passation
des marchés chargée de veiller à la qualité des
dossiers de passation des marchés ainsi qu'au bon fonctionnement de la
commission des marchés, dans les conditions fixées par
arrêté du Ministre chargé des finances après avis de
l'organe chargé de la régulation des marchés
publics.»
175 «Commission constituée par une
autorité contractante pour procéder à l'ouverture et
à l'évaluation des offres ; elle recommande, dans ses
conclusions, l'attribution ou non du marché ou de la
délégation ».
176 Rapport annuel 2014 de l'ARMP Sénégal.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 70
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
de passation177 des marchés de ladite
fondation. Aussi, la désignation du coordonnateur de la cellule de
passation des marchés comme membre du comité d'évaluation
des offres et membre de la commission de réception méconnait-elle
les dispositions de l'article 36 du code qui régit la composition de la
commission de passation des marchés des autorités
contractantes.
Rappelons à cet effet dans l'esprit du code et ce, pour
des questions de transparence, que les membres de la cellule de passation des
marchés et ceux de la commission de passation doivent être
désignés de manière distincte. Aussi a-t-il
été constaté que la commission des marchés ne s'est
pas réunie pour procéder à l'examen du rapport
d'évaluation, au mépris des exigences de l'article 39
alinéa 2 du code et du décret n°1048 du 27/07/2011.
Les anomalies variant dans leurs spécificités
d'une autorité contractante à une autre, mais demeurant communes
dans leur esprit général d'atteintes au principe de la
transparence, on constate une fois de plus dans la phase d'évaluation
des offres, une opacité de la définition des critères de
sélection, qui de ce fait rend le processus de sélection
subjectif plutôt qu'objectif.
En effet, les rapports d'évaluation de certaines
autorités contractantes ont été très sommaires.
C'est le cas de l'Agence Sénégalaise d'Electrification Rurale
(ASER) où les évaluations ont été faites uniquement
sur la base d'une comparaison des prix, en violation des articles 59 et 70 du
CMP alors qu'elles devaient se faire conjointement avec l'offre
technique178.
Pour d'autres autorités contractantes comme la SENELEC,
il a été constaté que le rapport d'évaluation des
offres ne précise pas la date d'approbation de deux des marchés
qu'elle a passés, pour le compte de l'année 2013.
Aussi, note-t-on une violation du principe
d'intangibilité des offres au niveau de l'Agence Nationale de
l'Aquaculture suite à un ajustement et non une correction d'erreur
arithmétique qui a été opéré sur l'offre
d'un soumissionnaire, pour la rendre conforme au dossier d'appel à
concurrences par la commission alors que cela n'était pas de son
ressort. Il en a été de même lors
177 Le rapport dénonce à cet effet une mise en
place tardive de la commission de passation des marchés violant ainsi
les dispositions de l'article 35 du CMP et de l'arrêté 12/783 du
26/12/2012
178 Cabinet d'audit Grant Thornton, Revue indépendante
de la conformité de la passation des marchés des autorités
contractantes du groupe 2 (Gestion 2014), Agence Sénégalaise
d'Electrification Rurale, Rapport définitif, Page 4.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 71
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
du processus de passation pour l'acquisition de deux
unités de fabrique d'aliments de poisson ou l'un des soumissionnaires a
apporté par lettre, des modifications sur son offre
financière.
En ce qui concerne le Togo, les phases d'ouverture et
d'évaluation des offres sont organisées sous la
responsabilité de la Personne Responsable des Marchés Publics,
assistée dans cette mission par une Commission de Passation des
Marchés Publics, chargée des opérations d'ouverture et
d'évaluation des offres et des propositions. Là encore, nous
avons relevé des irrégularités.
En effet à ce niveau de la procédure, le dernier
rapport de synthèse de l'ARMP portant sur les marchés publics
conclus au cours de l'année 2015, impute à certaines
autorités contractantes, un non-respect ou une interprétation
erronée des clauses des dossiers d'appel à la concurrence lors de
l'évaluation et la comparaison des offres. Ainsi ce rapport
déplore-t-il une violation du principe d'égalité de
traitement des candidats, déjà constatée lors de
l'évaluation des offres, notamment à travers la tolérance
pour des écarts graves commis par certains soumissionnaires et
l'austérité avec laquelle sont traités d'autres candidats
moins indélicats.
Par ailleurs, il a été rapporté que
certaines autorités contractantes ont déclaré conformes
certaines offres alors qu'elles ne l'étaient pas et inversement.
Toujours dans cette logique de mauvaise évaluation des offres, le
rapport de l'ARMP fait état d'un cas de déclaration d'une offre
anormalement basse sans que l'autorité contractante ait au
préalable pris le soin d'inviter le soumissionnaire à justifier
son prix comme l'exigent les dispositions de l'article 64 du code togolais des
marchés publics. En outre, il est fait mention d'un cas de rejet d'une
offre pour absence de la page de signature de la lettre de soumission alors
qu'elle y figurait.
Pour ce qui est des marchés passés par la
Société d'Administration de la Zone Franche (SAZOF) en 2013, en
plus de la non-obtention de l'avis de la commission de contrôle des
marchés publics sur le rapport d'évaluation des offres, il est
constaté que le rapport d'analyse des offres est signé mais ses
pages ne sont pas paraphées par les membres de la sous-commission en
charge de l'analyse des offres pour les 3 marchés179,
entrainant de ce fait un risque de non-contrôle sur la fiabilité
et la régularité de la procédure de contrôle.
179 Rapport de revue indépendante de la
conformité des procédures de passation, de contrôle et
d'exécution des marchés publics passés par la
Société d'Administration de la Zone France (SAZOF) au titre de
l'année 2013.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 72
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Quant à la Société Togolaise de Eaux,
l'analyse de l'évaluation des marchés par elle passés par
AOO en 2013 montre que pour 4 des 7 marchés audités soit 57%, le
rapport d'analyse des offres n'a pas été soumis à
l'approbation de la commission de contrôle des marchés publics
(équivalent de la cellule de passation des marchés en droit
sénégalais).
Tous ces phénomènes susmentionnés,
témoignent d'un manque de transparence dans le processus
d'évaluation, et dont les causes pourraient dans un examen
antérieur sur la question, relever de la corruption des agents publics
ou du favoritisme au profit d'un des candidats. Somme toute, voilà
autant d'anomalies que d'incompréhensions qui d'une manière
significative compromettent la transparence dans le processus
d'évaluation des offres. Qu'en est-il alors de l'état de la
transparence au plan de l'attribution des marchés ?
B- Une attribution irrégulière des
marchés
Une fois les offres techniques et financières
évaluées, il incombe à la commission de passation des
marchés de l'autorité contractante de procéder à
l'attribution du marché conformément aux dispositions des
articles 84 du CMP Sénégal et 31 du CMP Togo. En effet, selon les
exigences d'intégrité qui régissent la commande publique
et sur fond de transparence, l'autorité contractante ne peut attribuer
le marché qu'au soumissionnaire ayant présenté non
seulement une offre technique conforme aux spécifications du dossier
d'appel d'offres ou de la demande de propositions, mais aussi une offre
financière jugée moins-disante. Toutefois dans la pratique, ces
exigences qui garantissent la transparence sont dans bien de cas
occultées. A cet effet, on signale des malversations aussi
néfastes les unes que les autres dans cette phase cruciale du processus
de passation.
D'abord en ce qui concerne le Sénégal, il y a
lieu de souligner une défaillance au sein de certaines commissions de
passation. A cet effet, le rapport d'audit de l'ARMP sur les marchés
passés en 2014 nous instruit à suffisance sur cet état de
fait. Entre autres on note des délais anormalement longs
constatés entre l'ouverture des plis et l'attribution des marchés
imputés à
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 73
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
certaines autorités contractantes180 violant
ainsi les dispositions de l'article 70 du CMP qui fixe ce délai a 15
jours181. Mais les faits les plus délicats s'articulent
autour des phénomènes des conflits
d'intérêts182 et de favoritisme qui semblent à
bien des égards être présents dans le processus, depuis
l'évaluation des offres jusqu'à l'attribution provisoire du
marché.
En effet, les conflits d'intérêt dans les
commissions de passation des marchés, peuvent résulter de
l'action de plusieurs ou d'une seule personne. Mais le plus souvent, il est le
fait du détenteur du pouvoir discrétionnaire. Sous cet angle, il
peut être associé au risque de partialité lorsque la
transparence de la prise de décision est faible. Ainsi le risque est
plus élevé si un seul individu dispose d'un pouvoir
discrétionnaire sur toutes les décisions, que si plusieurs
personnes sont impliquées dans la prise de décision. On signale
à ce effet que le Directeur de l'Administration Générale
et de l'Equipement (DAGE) du ministère du tourisme et du transport
aérien (MTTA) est président de la commission des marchés,
président de la commission de réception et au-delà de ce
cumul de fonctions, contraire au principe de séparation des fonctions,
il agit comme PRMP en approuvant certains contrats sans avoir reçu une
délégation formelle du ministre dépensier au sens de
l'article 27 du CMP183 à cet effet. Cette situation a eu pour
conséquence la rupture du principe d'égalité de traitement
des candidats184 lors de l'évaluation et de l'attribution de
certains marchés.
En outre, certains candidats dont les offres n'ont pas
été retenues, n'ont-ils pas été informés par
écrit du rejet de leurs offres. De toute évidence, ce
défaut de notification ne s'inscrit pas dans une
180 Il s'agit de la commission de passation des marchés
des autorités contractantes comme le Centre Hospitalier Régional
de Thiès (CHRT), le Centre Hospitalier Régional Ibrakhima Niass
de Kaolack (CHREIN-KL), la Société d'Infrastructure et de
Réparation Navale (SIRN), la Société Nationale du Port
Autonome de Dakar (SN PAD).
181 Ce délai peut être prorogé dans la
limite maximale de 10 jours sur demande motivée de l'autorité
contractante adressée à la DCMP.
182 Il s'agit d'une situation dans laquelle les membres des
commissions se retrouvent à orienter leur décision dans le sens
des intérêts d'un soumissionnaire pour lequel ils prennent parti,
contrevenant ainsi aux exigences d'intégrité et de transparence
dans l'attribution des marchés.
183 Article 27 CMP Sénégal « La
procédure de passation des marchés est conduite par la personne
responsable du marché, qui est habilitée à signer le
marché au nom de l'autorité contractante. Les marchés
conclus par une personne non habilitée à cet effet sont nuls et
de nullité absolue.
L'autorité contractante peut désigner d'autres
personnes responsables des marchés, en précisant les
catégories et les montants des marchés pour lesquels celles-ci
disposent des compétences de personnes responsables de marchés
».
184 Il s'agit du marché relatif à l'acquisition du
matériel de transport à la DAGE.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 74
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
logique de transparence puisque les soumissionnaires
évincés ont le droit de prendre connaissance des raisons qui ont
motivé le rejet de leurs offres. Par ailleurs, on remarque que lors de
l'attribution des marchés, les décideurs manquent parfois
d'impartialité comme cela a été le cas dans l'affaire
opposant la DCMP à la SENELEC185.
Quant au Togo, les constats relatifs à l'attribution
des marchés sont inquiétants au moins autant si ce n'est plus
qu'au Sénégal. A cet effet, si nous prenons d'une part les
marchés de la (SAZOF) évoqués précédemment,
il ressort dans les travaux de la commission de passation des marchés
que les offres reçues ne sont pas enregistrées dans leur ordre
d'arrivée dans un registre spécial mais plutôt sur des
papiers imprimés sur format A4. Plus grave, le procès-verbal
d'attribution n'a pas été publié après la
validation du rapport d'évaluation par la DNCMP avec pour
conséquence, une non-information des soumissionnaires non retenus
à qui la possibilité n'est plus de ce fait donnée de faire
un recours, recours qui a priori constitue une garantie prônée par
le principe de transparence.
D'autre part, l'analyse de la suite de l'attribution
provisoire des marchés par la commission de passation de la LONATO
(Loterie Nationale Togolaise) par AOO révèle que deux 2
marchés sur les 03 audités soit 66,67% n'ont pas
été approuvés dans le délai de validité des
offres, entrainant non seulement un allongement des délais de
réalisation de l'activité mais aussi un risque
considérable de non-validité des offres. Par ailleurs le rapport
déplore le défaut de publication d'avis d'attribution
définitive dans le journal officiel des marchés publics ou tout
autre journal habilité sur la totalité des marchés
audités186 causant ainsi un déficit d'informations des
soumissionnaires et du public en général.
Pour ce qui est des marchés passés par appel
d'offres ouvert par la société nationale de
téléphonie mobile TOGOCEL et le Port Autonome de Lomé,
c'est le même son de cloche que la LONATO, en ce qui concerne
l'approbation des marchés audités dans le délai de
validité des offres, mais dans une proportion de risque quelque peu
élevée. Il en est de même pour les formalités de
publicité dans le journal officiel des marchés publics
relativement à l'avis
185 Nous aborderons cette question de manière plus
approfondie dans les parties à venir.
186 Cabinet Erudit, Rapport de revue indépendante de la
conformité des procédures de passation, de contrôle et
d'exécution des marchés publics passés par la LONATO au
titre de l'année 2013, Page 20.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 75
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 76
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
d'attribution définitive.
Tout bien pesés, les faits ci-haut cités
constituent aux bas mots les manquements les plus partagés dans
l'évaluation et l'attribution des marchés passés par AOO,
dans la mesure où la majorité des autorités contractantes
n'ont pas échappé à ces constats. Ces derniers d'ailleurs
ne se limitent pas qu'aux procédures normales de passation des
marchés.
Section 2 : Des constats relatifs aux procédures
particulières
Les procédures particulières de passation sont
celles qui font appel à des règles distinctes de celles
sollicitées pour les marchés par appel d'offres ouvert. Nos
constats sur l'état de la transparence porteront à cet effet sur
les procédures de concurrence restreinte (Paragraphe 1) et les
procédures spécifiques de passation (Paragraphe2).
Paragraphe 1 : Les méthodes de concurrence
restreinte
Les procédures restrictives de concurrence sont celles
qui n'admettent pas la concurrence, ou l'admette mais à un degré
réduit. Elles sont du fait de leur particularité, parfois
utilisées dans un contexte qui ne garantit pas toujours la transparence.
A cet effet, nos observations porteront successivement sur les
incohérences relatives à appel d'offres restreint (A) et sur
celles portant sur l'entente directe(B).
A- Des incohérences quant à l'appel
d'offres restreint
Comme cela a prévalu dans les parties
précédentes, nous rappelons que les constats
évoqués, de même que les marchés sur lesquels ils
ont porté ne sont pas exhaustifs. Ces constats sont cependant
récurrents et c'est pour cette raison que nous avons choisi de nous
intéresser à ceux qui d'une manière particulière
altèrent la transparence dans le processus de passation.
En guise de rappel, l'appel d'offres est dit restreint lorsque
seuls les candidats sélectionnés par l'autorité
contractante, sont autorisés à soumissionner187. Le
recours à cette méthode de passation est subordonné
à une autorisation préalable de la DCMP. Par ailleurs une
autorité contractante ne
187 Cf. article 73 CMP Sénégal et 23 CMP Togo
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La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
peut recourir à un AOR que dans les cas d'urgence
simple, de marchés exécutés à titre de recherche
d'essai d'expérimentation ou de mise au point et aussi des
marchés que l'autorité contractante doit faire exécuter en
lieu et place des titulaires défaillants, à leur frais et risques
et enfin dans le cas des marchés ayant donné lieu à un
appel d'offres infructueux.
De la même façon que des atteintes ont
été décelées dans chacune des étapes
précédentes, il en sera de même dans cette partie de notre
analyse. Ainsi au Sénégal, et sur la base du rapport de
synthèse de l'ARMP au titre des marchés passés au cours de
l'année 2014, des incohérences ont été
dénoncées. Sur ce, nous allons analyser dans une logique
non-exhaustive, des cas de non-conformité pris au hasard sur la base de
ce rapport.
Au Sénégal, l'examen des procédures par
AOR a permis de noter que des critères discriminatoires figurent dans
certains Dossiers d'Appel à la Concurrence, en violation des principes
de libre accès à la commande publique et d'égalité
de traitement des candidats. A titre d'illustration, il a été
noté que l'offre d'un des soumissionnaires pour l'AOR relatif à
la sélection d'un prestataire pour un marché de fourniture de
véhicule 4x4, attribué pour un montant de 71 400 000 F CFA, bien
que moins-disante, a été rejetée au motif que ladite offre
ne satisfait pas aux critères relatifs à la cylindrée,
à la taille du réservoir et à la puissance fiscale. Il
s'agit là de critères discriminatoires, constitutifs d'une
entrave au libre accès à la commande publique et à
l'égalité de traitement des candidats. Cette élimination a
conduit l'autorité contractante à contracter avec un autre
soumissionnaire, dont l'offre présentait un surcoût de 19.126.000.
Il ressort de ce constat que non seulement les règles de transparence
ont été négligées mais aussi les principes
d'économie et d'efficacité de la dépense publique n'ont
pas été suffisamment pris en considération dans la mise en
oeuvre de cette procédure.
En outre, si nous consultons le rapport définitif de
l'ARMP publié en 2015 et portant sur les marchés relatifs
à l'exercice 2014 de l'Agence Nationale pour l'Economie et la Maitrise
de l'Energie (AEME)188, il ressort qu'un seul marché a
été passé par appel d'offres restreint. Il s'agit du
marché N°C 2168/14, relatif au programme d'analyse, de suivi et de
réduction des dépenses
188 Cabinet d'audit Grant Thornton, Revue indépendante
de la conformité de la passation des marchés des autorités
contractantes du groupe 2, Gestion 2014, Pages 3 et 4.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 77
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
d'électricité dans ce secteur public. A
l'analyse de ce marché conclu pour un montant de 191 295 700 F CFA, il
ressort qu'il a été le produit d'une relance suite à un
appel d'offre infructueux. Cependant l'autorité contractante n'a pas pu
fournir les lettres de relance.
Au Togo, les marchés passés par appel d'offre
restreint en 2013 s'élèvent à un effectif de quarante (40)
pour un montant de vingt-six milliard huit cent soixante-treize millions trois
cent soixante-treize mille sept cent soixante-quinze (26 873 373 775) FCFA et
représentent 6% en nombre et 7% en valeur du total des marchés
passés par l'ensemble des autorités contractantes
sélectionnées189.
Conformément aux dispositions de l'article 23 du code
des marchés publics : « il ne peut être recouru à
l'appel d'offres restreint que lorsque les biens, les travaux ou les services,
de par leur nature spécialisée, ne sont disponibles
qu'auprès d'un nombre de fournisseurs, d'entrepreneurs ou prestataires
de service ». Malheureusement, il ressort de notre analyse que cette
condition n'est pas toujours satisfaite dans la plupart des marchés
passés par appel d'offres restreint.
En définitive, à l'analyse des insuffisances
relevées sur les marchés audités, il ressort de
façon globale que les retards notés dans les AOR relèvent
d'un paradoxe puisque l'AOR est une procédure indiquée pour les
situations d'urgence, en plus des cas de substitution d'entreprises
défaillantes. On comprend dès lors sur l'interprétation de
ces rapports d'audit que les irrégularités notées sont
dues à un manque de maîtrise de la procédure. En effet, en
dépit du contrôle a priori de la DCMP, les autorités
contractantes consultent des entreprises sans s'assurer de leur qualification
aux plans technique et juridique. C'est ce qui explique que des candidats
soient écartés après évaluation des offres pour
défaut de qualification, en violation des dispositions
règlementaires et des principes qui régissent les AOR. En outre,
les reports des dates d'ouverture pour insuffisance du nombre des offres
reçues sont fréquents, notamment lorsque le nombre de candidats
consultés est inférieur à trois. Quid alors des
irrégularités relatives à l'entente directe ?
189 Cabinet ERUDIT, Rapport de Synthèse de la revue
indépendante de la conformité des procédures de passation,
de contrôle et d'exécution des marchés publics
passés par les autorités contractantes du Togo au titre de
l'année 2013, Page 13.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 78
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
B- Des irrégularités liées
à l'entente directe
Pour rappel, les marchés sont dits par « entente
directe » lorsque l'autorité contractante engage directement les
discussions qui lui paraissent utiles avec les candidats et attribue le
marché au candidat qu'elle a retenu. Dans les codes
sénégalais et togolais des marchés publics, une
autorité contractante ne peut recourir à ce mode
dérogatoire de passation que dans les cas de marchés
d'exclusivité, de marchés complémentaires, de
marchés secret défense et enfin de marchés liés
à des cas d'urgence impérieuse. Soulignons que toute
procédure de passation de marchés par entente directe
nécessite au préalable un avis190 ou une
autorisation191 de la DCMP et le cas échéant, donnent
ensuite lieu à un compte rendu détaillé. Toutefois ces
marchés n'échappent pas du fait de leur caractère
dérogatoire, aux exigences de transparence. C'est ainsi que dans les
faits, des autorités contractantes recourent aux ententes directes sans
que les conditions qui définissent leur transparence soient
réunies.
A cet effet au Sénégal, on constate un recours
aux procédures faisant l'objet d'exceptions juridiques, par exemple pour
des raisons de "sécurité nationale", ou création d'une
situation d'urgence pour passer un marché dans des conditions
exceptionnelles. Au titre de l'exercice 2014, 35 marchés des 2366 ont
été passés par entente directe (1,48% en nombre et 6,72%
en valeur) pour un montant de 8 186 430 634 F CFA192. De même,
même si la passation d'un certain type de marchés se justifie par
l'entente directe, il existe des cas où des autorités
contractantes se livrent maladroitement à des incohérences dans
la façon dont il faut procéder. Cette situation s'est
illustrée à travers les deux (2) marchés passés par
entente directe par l'Agence des Aéroports du Sénégal
(ADS) au titre de l'année 2014. En effet, on remarque à l'analyse
que l'ADS s'est méprise sur la formule à adresser à la
DCMP pour le recours à cette méthode de passation. Ainsi, une
autorisation a-t-elle été requise par l'ADS auprès de la
DCMP pour recours
190 On ne recourt à une demande d'avis que pour les
marchés de défense et sécurité, les marchés
liés à une urgence impérieuse, les marchés
passés dans le cadre des mesures de mobilisation générale
et de mise en garde. Cf. art. 76 CMP Sénégal.
191 Une autorité contractante ne recourt à la
demande d'autorisation que pour les marchés d'exclusivité ou
de
complémentarité ou encore les marchés
passés suite à une urgence impérieuse.
192 Rapport annuel ARMP Sénégal relatifs aux
marchés de 2014, page 55.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 79
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
à l'entente directe, alors que c'est plutôt son
avis qui aurait dû être demandé, compte tenu des motifs
invoqués dans les 2 procédures, conformément à
l'article 76 alinéa 2 du CMP.
En ce qui concerne le Ministère de la Santé et
de l'Action Sociale, le rapport final de l'ARMP publié en Septembre 2015
grâce aux travaux d'audit du Groupement GMS/SSPM portant sur les
marchés passés par entente directe par ledit ministère en
2014, fait état de deux marchés passés par cette
méthode de passation. Ces marchés ont comme ceux qui ont
précédé, été entaché
d'irrégularités en ce qui concerne leur inscription dans le plan
de passation des marchés de 2014, l'archivage de leur notification, le
classement des copies de garantie dans le dossier.
Au Togo, les marchés passés par entente directe
au cours de l'exercice 2013 sont estimés à 142 pour l'ensemble
des 34 autorités contractantes auditées193. De toutes
les autorités contractantes auditées, Togo Télécom
est celle qui s'est le plus illustrée avec un nombre record de recours
à l'entente directe s'élevant à 68 marchés au total
parmi lesquels, 8 seulement ont pu être audités194. Il
a été remarqué que les propositions des fournisseurs
pressentis n'ont pas fait l'objet d'analyse par une commission
désignée par l'autorité contractante. Ce constat a eu pour
conséquence, une méconnaissance des biens et services
proposés par ces fournisseurs. On constate aussi qu'il y a eu une
série de manquements parmi lesquels des absences de preuves relatives
à l'enregistrement du marché avant son commencement, un
défaut de publication de l'avis d'attribution définitive.
D'un autre côté, si nous analysons les
marchés conclus par la Nouvelle Société Cotonnière
du Togo (NSCT), il ressort que l'unique procédé de passation par
entente directe dont elle a eu recours n'a pas été
justifié dans un rapport spécial validé par la commission
de contrôle des marchés publics. Par ailleurs, il a
été constaté que cette procédure n'a pas
été approuvée par la DNCMP au mépris des
dispositions de l'article 35 du Code des Marchés Publics. Cet
état de fait a malheureusement conduit à un défaut de
contrôle de la fiabilité et de la régularité de la
procédure par la DNCMP.
193 Rapport de synthèse ARMP-TOGO relatif aux
marchés de l'exercice 2013 et publié en Novembre 2015, page 5 des
annexes.
194 Rapport du cabinet ERUDIT relatif aux marchés
conclus par TOGO TELECOM en 2013 et publié en Octobre 2015, page 15.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 80
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Aussi constate-t-on lorsqu'on se réfère aux 4
marchés passés par entente directe par le ministère de la
santé que le montant additionné des marchés de gré
à gré, dépasse le seuil contraignant des 10% du montant
total des marchés publics passés par cette autorité
contractante, en violation de l'article 36 alinéa 3 du CMP195
du Togo. Il a aussi été révélé que pour la
planification de ces 4 marchés, la demande de gré à
gré n'a pas été justifiée comme cela a
été le cas pour la NSCT. De même il y a eu un manquement
aux exigences de publicité suite à l'attribution
définitive de chacun de ces 4 marchés.
D'une manière générale, il ressort qu'au
Togo, certains marchés conclus par entente directe n'ont pas
été passés en conformité avec les exigences
règlementaires compte tenu non seulement des nombreux manquements
notés et imputables aux autorités contractantes, mais aussi de
l'absence de rigueur dans l'exercice des prérogatives dévolues
aux organes de contrôle. Figure aussi sur la liste de ces manquements, un
défaut de concurrence pour les marchés par entente directe
éligibles à la concurrence mais aussi une absence de rapport de
l'observateur indépendant destiné à l'ARMP sur tous les
dossiers soumis pour revue sur les marchés passés par entente
directe. C'est la preuve qu'au moment où les opérations d'audit
ont été menées, la transparence n'était pas
effective pour les marchés relevant de ce mode de passation.
En définitive, les incidences du défaut de
transparence altèrent à des proportions variables, la passation
des marchés passés par des procédures dérogatoires.
Mais ces atteintes ne demeurent pas moins visibles pour les marchés
conclus par des méthodes spécifiques de passation.
Paragraphe 2 : Les insuffisances relatives aux
procédures spécifiques
Lorsqu'il est question de l'analyse des procédures
spécifiques, un certains nombres de points peuvent être
soulevés en guise d'insuffisances. Il s'agira dans cette partie
d'envisager successivement les anomalies liées aux DRP (A) et celles
relatives aux autres procédures
195Article 36 alinéa 3 du CMP Togo :
« La direction nationale de contrôle des marchés publics
veille à ce que, sur chaque année budgétaire, le montant
additionné des marchés de gré à gré
passés par chaque autorité contractante ne dépassent pas
dix (10) pour cent du montant total des marchés publics passés
par ladite autorité ».
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 81
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
spécifiques (B).
A- Des anomalies liées aux demandes de
renseignements et de prix
Lorsque l'on scrute les méthodes de passation des
marchés publics au Sénégal comme au Togo, il y a un
constat qui interpelle et qui, difficilement pourrait passer sous silence. Il
s'agit de la primauté des recours aux DRP. En effet, le mode principiel
de passation des marchés publics qui est l'appel d'offre ouvert, semble
au vu de son nombre, devenir une méthode d'exception au profit de la
procédure de demandes de renseignements et de prix196.
Ainsi au Sénégal, lorsqu'on analyse le PPM de
l'exercice 2014, on constate que sur les 278 818 marchés qui ont
été prévus, 64 057 devaient être passés par
appel d'offres ouvert, 25 616 par appel d'offres restreint ou entente directe
et 215 248 par demande de renseignements et de prix soit un taux de 71% de
DRP197 pour l'ensemble des marchés à passer pour cette
année.
Ces précisions étant faites, il est possible
d'envisager les atteintes qui, étant multiples, varient d'une
autorité contractante à une autre. Dès lors, un regard sur
les marchés passés par DRP par les ministères nous
confronte à une évidence. Il s'agit du fait pour chaque direction
relevant d'un ministère, de gérer de manière isolée
ses demandes de renseignements et de prix, favorisant ainsi, le risque de
fractionnement, surtout si celui-ci s'inscrit dans une logique obscure.
A titre d'exemple, 498 demandes de renseignements et de prix
ont été recensées au niveau du Ministère de
l'Economie, des Finances et du Plan. Dans ce lot, des DRP de même nature
passées par des directions différentes et qui auraient pu, avec
une bonne planification, être regroupées ont été
identifiées. Mais si l'on pousse loin l'analyse, on remarque que ces
commandes par DRP sont généralement le fait de gestionnaires de
programmes198 désignés par le ministre
dépensier
196 Constat à relativiser parce que malgré la
primauté des DRP en termes de nombre, l'appel d'offres demeure en termes
de valeur, la première méthode de passation.
197ARMP Sénégal, Direction des
Statistiques et de la Documentation portail des Marchés Publics, page
19.
198 Nouveau concept initié par le nouveau cadre
harmonisé des finances publiques pour désigner ce qu'on appelait
avant, « Administrateurs de crédits délégués
».
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 82
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
conformément à l'article 18 du décret
2011-1880 du 24 novembre 2011 portant Règlement Général
sur la Comptabilité Publique, qui tiennent absolument à avoir la
main sur les crédits qu'ils administrent et agissent comme des Personnes
Responsables des Marchés Publics, sans avoir été
formellement désignés comme telles199
conformément aux dispositions des articles 27 et 28 du CMP.
Dès lors, le constat qui se dégage à
travers ces faits est que très souvent, le cumul de ces DRP de
même nature dépasse le seuil de passation des marchés par
appel d'offres et est assimilable à un fractionnement des marchés
proscrit par les dispositions de l'article 54 alinéa 5 du
CMP200.
D'un autre point de vue et toujours pour le cas
spécifique des DRP, il est indispensable de disposer des offres des
soumissionnaires dont l'examen permettra de déceler les manquements aux
règles de transparence. A cet effet, malgré les
améliorations qui ont été reconnues au recours aux DRP, il
convient cependant de reprocher à cette méthode spécifique
de passation, des anomalies qui pour le moins portent atteinte aux exigences de
transparence.
Dans ce contexte, outre les manquements tels que la
publication de marchés non-inscrits dans le PPM en violation de
l'article 6 du CMP et imputable à certaines autorités
contractantes comme le Centre Hospitalier Régional de Thiès, la
Société d'Infrastructure et de Réparation Navale, pour ne
citer que celles-là, on constate aussi des pratiques collusives de
même que des simulations de concurrence. En outre remarque-t-on dans la
constitution des listes restreintes, un manque de transparence
matérialisé par la récurrence de la consultation conjointe
de mêmes groupes d'entreprises.
Au Togo, les atteintes à la transparence ne demeurent
pas moins présentes dans les demandes de cotation201. Ainsi,
en se basant sur le rapport de synthèse de l'ARMP publié en 2015
et qui porte sur les marchés passés en 2013 par cette
méthode, on constate une série de faits tout aussi
199 Les DRP signées par les administrateurs de
crédits sont frappées de nullité en vertu des articles 18
et 22 du Code des Obligations de l'Administration qui sanctionnent
respectivement le défaut d'autorisation et l'incompétence.
200 Article 54 al. 4 du CMP Sénégal «
Les autorités contractantes ne peuvent en aucun cas fractionner les
dépenses ou sous-estimer la valeur des marchés de façon
à les soustraire aux règles qui leur sont normalement applicables
en vertu du présent décret ».
201 Expression utilisée par le CMP Togo pour la
passation des marchés situés en dessous des seuils de passation.
Cf. les articles 11, 12 et 15 u CMP Togo.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 83
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
saisissants que pernicieux vis-à-vis des idéaux
de transparence. En effet, sur 87 cotations auditées, 23 n'ont pas
été inscrites au PPM.
En plus de cela, il a été constaté une
inexistence des dossiers de demandes de cotation pour un certain nombre de
marchés, en dessous du seuil202 avant le lancement de la
procédure. Cette situation a entrainé une non-information des
soumissionnaires sur les spécifications techniques des biens à
acquérir, les critères d'évaluation des offres et les
obligations des différentes parties.
En outre, Neuf (09) demandes de cotation sur quatre-vingt-sept
(87) auditées n'ont pas été soumises à la
Commission de Contrôle des marchés publics pour validation,
entrainant un défaut de contrôle par celle-ci sur la
fiabilité et la régularité de la procédure. Selon
les exigences du code, les demandes de cotation doivent être
adressées au moins à 5 prestataires sélectionnés
à partir d'un registre tenu par l'autorité contractante.
Là encore, sur les 87 cotations auditées, 18 ont manqué
à cette obligation. L'analyse de ce dernier aspect montre à
suffisance qu'il y a eu dans la mise en oeuvre de cette procédure, un
défaut de mise en concurrence d'un nombre suffisant de prestataires et
de fournisseurs potentiels. Cette situation a probablement pour le moins
entrainé un risque d'obtention de prix non compétitifs.
Une analyse des marchés passés par DRP par la
Nouvelle Société Cotonnière du Togo (NSCT) nous renseigne
à suffisances sur les incohérences à chaque étape
de la passation. Sur 41 marchés, 11 l'ont été par appel
d'offres ouvert, 1 par appel d'offres restreint, 1 par entente directe, et 28
par DRP soit un taux de 68% pour ces derniers203. En plus de cela,
on constate pendant leur planification et la préparation des dossiers,
une violation de l'article 9 du CMP. Quant à la phase d'ouverture et
d'évaluation des offres, il a été constaté qu'il
n'existait pas au niveau de la commission de passation, un registre
spécial, coté et paraphé destiné à
l'enregistrement des offres dans leur ordre d'arrivée. Mais bien plus
grave, la NSCT a très souvent omis d'informer systématiquement
par écrit, les soumissionnaires non retenus du motif du rejet de leurs
offres et d'en conserver les preuves. En outre, la NSCT ne procède pas
à la publication systématique du
202 La demande de cotations au Togo s'applique aux marchés
dont le montant est compris entre 3 millions et 15 millions de francs CFA.
203 Cabinet ERUDIT, Rapport de Revue indépendante de
conformité des procédures de passation des marchés
passés par la NSCT au titre de l'année 2013, publié en
octobre 2015, Page 8.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 84
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
procès-verbal d'attribution du marché
après l'obtention de l'avis de non-objection de la DNCMP sur le rapport
d'évaluation des offres.
Quant à la phase de signature du contrat, on
déplore un non-respect d'attribution du marché pendant le
délai règlementaire de même qu'une absence de preuve de
l'enregistrement du marché avant exécution et un défaut de
publication dans le journal officiel, de l'attribution définitive du
contrat.
Somme toute, ces irrégularités sont
principalement imputées aux autorités contractantes puisqu'aucun
acteur extérieur n'est impliqué dans les DRP. Les audits ont de
ce fait mis en évidence les nombreuses dérives substantielles,
découlant non seulement de l'absence de maîtrise des
procédures mais aussi d'une volonté
délibérée de contournement de la règlementation.
B- Des anomalies relatives aux autres procédures
spécifiques
Les marchés de prestations intellectuelles ne sont pas,
malgré leur spécificité, exempts de vices entachant la
transparence au cours de leur passation. Il importe toutefois de faire un bref
rappel définitoire de cette catégorie propre de marchés
publics. Ainsi en guise de définition, un marché de prestation
intellectuelle est celui portant sur un métier du savoir dont les
résultants précis ne peuvent être définis
préalablement à son exécution. Ces marchés sont
immatériels et sont caractérisés par la «
co-production », ce qui signifie que le client et le prestataire
contribuent tous les deux à la réussite de la prestation.
Quant aux atteintes, on note au Sénégal et ce
pour le compte de certaines autorités contractantes, une insuffisante
maitrise des procédures de passation des marchés de prestations
intellectuelles. C'est le cas par exemple du Ministère de la Formation
Professionnelle, de l'Apprentissage et de l'Artisanat (MFPAA) qui a
traité en 2014, les marchés de prestations intellectuelles comme
s'il s'agissait de de marchés de services courants ou de fournitures, en
violation de l'article 80 du
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 85
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
CMP204.
En outre, toujours pour le même ministère, il a
été constaté relativement à la sélection
d'un consultant pour l'élaboration du projet annuel de performance
attribué pour un montant de 24 780 000F CFA, une incohérence
entre la liste des candidats invités et la liste des soumissionnaires
inscrits au niveau du procès-verbal d'ouverture des plis. En effet,
l'examen de la liste des soumissionnaires a permis de noter que trois autres
candidats ont soumissionné en lieu et place des trois candidats
invités de la liste restreinte. Cependant, l'examen des propositions des
nouveaux candidats a permis de noter que ces propositions, sous forme de
facture pro forma205, sont venues s'ajouter à celles des
candidats de la liste restreinte présélectionnée.
Par ailleurs, en ce qui concerne toujours les demandes de
propositions, il ressort des marchés passés par les dix
autorités contractes du groupe IV, auditées au titre de
l'année 2014, que celles-ci ont eu recours à cinq marchés
de prestations intellectuelles pour un coût global de 158 313 756 F CFA.
Le rapport d'audit fait état de situations alarmantes parmi lesquelles
la non-inscription au PPM de la plupart des marchés transmis à la
DCMP comme ce fut le cas pour le Centre Hospitalier National Universitaire de
FANN (CHNUF).
D'un autre côté, l'article 80 alinéa 1.a
dispose que « ...Lorsqu'un nombre minimum de trois candidat n'est pas
réuni à la date de réception des offres ou après
évaluation, l'autorité contractante ouvre un nouveau délai
qui ne peut être inférieur à dix (10) ouvrables et invite
de nouveaux candidats... ». Cependant, il n'a pas été
fait mention d'une telle ouverture de délai pour les demandes de
propositions auxquelles a eu recours le Ministère de la Pêche et
de l'Economie Maritime (MPEM) au cours de l'exercice 2014206. En
dernier lieu mais pas de façon exhaustive, on note que les dossiers de
demandes de propositions de certaines autorités contractantes comme le
Ministère de la Santé et de l'Action Sociale (MSAS), ne
prévoient pas la
204 Cet article est relatif aux dispositions spécifiques
aux marchés de prestations intellectuelles.
205 La facture pro forma est un document commercial qui est
utilisé lors des échanges entre une entreprise commerciale et son
prospect. Il s'agit pour la personne qui propose un produit ou un service
d'établir une facturation pour la prestation. L'expression « pro
forma » vient du latin et signifie « pour la forme ».
www.droit-finances.commentcamarche.net,
consulté le 31 octobre 2016.
206 Rapport annuel de l'ARMP pour les marchés de
l'exercice 2014.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 86
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
production des pièces administratives par les
candidats, violant ainsi l'article 44 du CMP, relatif aux renseignements et
justifications à fournir.
Au Togo, les marchés de prestations intellectuelles
bien que moins nombreux par rapport au Sénégal, gardent
néanmoins des faisceaux d'insuffisances quoique non-substantielles,
relativement à l'effectivité des règles de transparence
auxquels ils sont en principe soumis. Mais sur les trois dernières
années, les différents rapports d'audit de l'ARMP que nous avons
consultés ne nous ont pas révélé des manquements
ayant porté atteinte aux règles de transparence. Toutefois le
rapport de synthèse des marchés de l'exercice 2012,
révèle cependant une absence de la mise en oeuvre de la phase
« manifestation d'intérêt » sur certains marchés
de prestation intellectuelle. En plus de cela, il a été
constaté que l'effectivité n'est pas souvent justifiée par
un livrable ou une attestation de service fait pour des marchés de
prestations intellectuelles.
Doit, pour terminer cette analyse, concernant les
procédures spécifiques, être abordé le cas des
offres spontanées. En effet l'analyse des offres spontanées met
en évidence une propension pour les autorités contractantes
surtout au Sénégal en ce qui concerne le recours à cette
méthode de passation des marchés. Les principaux constats sont
relatifs au recours systématique à l'entente directe avec les
entreprises ayant présenté des offres spontanées sans que
ces entreprises n'obéissent aux conditions
énumérées par l'alinéa 3 de l'article 81 du CMP du
Sénégal. Précisons que le recours aux offres
spontanées fait partie des innovations apportées en 2014 par le
code sénégalais des marchés publics. Mais cette notion
n'existe pas pour le moment en droit positif togolais, ce qui explique
l'absence de constat relativement à cette méthode.
En définitive, un parcours de ce qui a
évoqué précédemment fait réaliser que la
transparence, en plus d'être affectée en amont de la soumission,
connait un parcours aussi délicat que tortueux au cours de la mise en
oeuvre des méthodes de passation des marchés. Cependant,
lorsqu'on continue d'explorer les procédures de passation, on remarque
que celles-ci ne présentent pas moins de difficultés quant aux
différents mécanismes de contrôle.
Titre 2, Chapitre I : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 87
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
CHAPITRE II : DIAGNOSTIC DES MECANISMES DE CONTROLE ET
RECOMMANDATIONS GENERALES
Les mécanismes de contrôle tels qu'on les connait
ont été conçus207 afin de porter un regard
particulier sur le respect par les autorités contractantes et les
opérateurs privés, des procédures de passation telles que
définies dans le code des marchés publics, depuis la phase
préalable à l'appel d'offres jusqu'à l'évaluation
et l'attribution des marchés. Ces mécanismes s'exercent d'abord
au niveau des autorités administratives dans le cadre du contrôle
a priori et a posteriori, puis au niveau des autorités
juridictionnelles.
Toutefois, ces autorités ne présentent pas moins
des insuffisances quant à leur façon de procéder à
de tels contrôles. Il sera alors question dans ce chapitre de faire une
analyse en partant des faiblesses des mécanismes de contrôle
(Section 1) jusqu'aux mesures de recommandations générales
(Section 2).
Section 1 : Des faiblesses liées aux
mécanismes de contrôle
Le contrôle des méthodes de passation des
marchés a incontestablement eu le mérite de dénoncer et de
limiter autant que possible les incohérences qui les entachent. Ces
mécanismes de contrôle souffrent cependant de certaines
insuffisances. Pour ce faire, il sera procédé successivement
à l'analyse des insuffisances relatives au contrôle administratif
(Paragraphe 1) et celles relatives au contrôle juridictionnel (Paragraphe
2).
Paragraphe 1 : Les insuffisances relatives au
contrôle administratif
Le contrôle administratif est celui opéré
à l'interne par la cellule de passation des marchés, et à
l'externe par la DCMP et l'ARMP dans le cadre des contrôles a priori et a
posteriori. A cet effet, il sera abordé dans un premier temps, les
faiblesses relatives au contrôle a priori (A) et dans un second temps
celles liées au contrôle a posteriori (B).
207 Elles ont été précisées par la
directive n° 05 de l'UEMOA portant Contrôle et Régulation des
marchés publics et délégations de service public.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 89
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 90
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
A- Des faiblesses liées au contrôle a
priori
Lorsqu'on parle de contrôle a priori, il s'agit à
titre de rappel, du contrôle qui s'effectue depuis l'élaboration
du PPM jusqu'à la revue juridique qui précède la signature
du contrat. Il est essentiellement assuré par la DCMP pour les
marchés ayant un montant égal ou supérieur aux seuils de
passation208, mais aussi par la cellule de passation des
marchés (Sénégal) ou commission de contrôle des
marchés (Togo), lorsque les montants en jeu n'atteignent pas le seuil de
passation.
Cependant, une analyse attentive du contrôle a priori,
permet de déceler des insuffisances qui, en mettant à mal la
liberté d'action de ces entités ayant en charge un tel
contrôle, influencent négativement l'effectivité de la
transparence dans la passation des marchés.
Ainsi au niveau des autorités contractantes au
Sénégal et au Togo, les principales difficultés auxquelles
sont soumises la cellule de passation des marchés et la commission de
contrôle des marchés, dans le cadre du contrôle interne a
priori, résident pour un certain nombre d'autorités
contractantes, dans la non-conformité de leur système d'archivage
au manuel de classement des documents des marchés. En effet, on
déplore au sein des organes chargés du contrôle interne a
priori, une difficulté quant à l'archivage physique et
numérique des dossiers relatifs à la passation des
marchés.
Ces carences documentaires entrainent
généralement un classement non-centralisé des documents
des marchés et font ainsi retarder la mise en oeuvre des travaux de
vérification pour l'établissement des rapports annuels.
En outre et plus pertinent encore, les rapports d'analyse et
de synthèse de certaines autorités contractantes, qui en principe
devraient être soumis à la cellule de passation des marchés
ou encore la commission de contrôle des marchés pour validation,
ne le sont pas dans certains cas. En plus de cela, les propositions
d'attribution, validées par la commission de contrôle des
marchés dans le cas du Togo par exemple et qui devraient en principe
faire l'objet d'un procès-verbal d'attribution provisoire des
marchés, ne le sont pas.
208 Cf. article 53 CMP Sénégal et 5 CMP Togo.
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La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Par ailleurs, il a été constaté au niveau
des deux espaces géographiques sur lesquels porte notre étude que
certaines cellules de passation ou commissions de contrôle des
marchés, manquent de moyens et d'agents suffisamment formés pour
exécuter les prérogatives qui leur sont reconnues. Cette
situation entraine bien souvent une incidence sur la qualité des
dossiers à traiter. Faisons aussi remarquer que le contrôle
exercé par les cellules n'est pas indépendant, si l'on sait que
jusqu'à un certain moment, les responsables de cellules sont dans bien
des cas nommés par les ministres. Ceci montre toute la difficulté
de ces cellules à jouir de toute l'indépendance
nécessaire.
Au niveau des différentes directions
sénégalaise et togolaise en charge du contrôle a priori de
la passation des marchés publics, des observations méritent
également d'être faites. A cet effet, on déplore un relatif
allongement des procédures, dû à la récurrence de
correspondances entre des autorités contractantes et la DCMP, mettant
ainsi à mal les objectifs recherchés par la réforme des
marchés publics en termes de célérité. C'est le
lieu de rappeler que l'examen d'un dossier de marché peut
déboucher sur un certain nombre d'observations qui du reste, impliquent
la nécessité pour l'autorité contractante concernée
de les prendre en compte dans le souci de se conformer aux exigences de la
procédure de passation. Mais la prise en compte de ces observations
n'exclut cependant pas que de nouvelles observations puissent une fois de plus
être émises par la DCMP.
Au final, la fréquence de ces observations a le triste
mérite d'impacter sur les délais de procédures, entrainant
de ce fait un allongement de la durée du processus de passation des
marchés.
Pour ce qui est des autorisations relatives aux modes
dérogatoires de passation, on signale depuis quelques temps, un recours
quelque peu anormal aux procédés limitatifs de concurrence.
Toutefois, la mise en oeuvre des procédures dérogatoires ne peut
se faire que si la DCMP les autorise préalablement. Mais si on signale
un recours excessif à ces méthodes, cela voudrait-il dire que la
DCMP autorise les dérogations à la hauteur des demandes qui lui
sont adressées ?
On ne saurait répondre à cette interrogation par
l'affirmative sans remettre en cause les efforts fournis par cette noble
institution dans le cadre du contrôle a priori. Il existe malheureusement
au
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 91
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Sénégal, un problème de contournement des
refus de la DCMP. Aujourd'hui, même s'il est vrai qu'il y a beaucoup de
sérieux dans les autorisations accordées par la DCMP, cette
dernière doit continuer de procéder avec rigueur à
l'examen de toutes les demandes qui lui sont adressées comme cela a
été le cas lors de l'analyse de la demande d'autorisation de la
SENELEC pour la passation d'un marché par entente directe.
Pour rappel, la SENELEC dans cette affaire avait saisi la DCMP
d'une demande d'entente directe avec l'argument que le candidat propose une
solution qu'on ne trouve pas sur le marché, argument peu convaincant et
que le code des marchés publics ne prévoyait pas dans ses textes.
La DCMP a naturellement rejeté cette demande d'autorisation en motivant
son refus sur la base de la législation en cours à
l'époque. Néanmoins, la SENELEC au eu gain de cause209
et a attribué le marché à AFRICA-ENERGY malgré les
protestations de la DCMP qui dénonçait un manque de transparence.
La DCMP est revenue à la charge, persistant à contester le
marché mais cela sera sans effet puisque le marché avait
déjà été signé.
Voici des cas qui, bien que n'étant pas exhaustifs, ont
contribué à démontrer, la façon dont est mis
à mal le système du contrôle a priori de la passation des
marchés.
B- Des difficultés inhérentes au
contrôle a postériori
Le contrôle a posteriori des marchés publics est
une prérogative qu'exercent conjointement la cellule de passation des
marchés (ou commission de contrôle des marchés au Togo) et
l'autorité de régulation des marchés publics. Une analyse
de ce contrôle nous montre des failles variant en fonction de la nature
des organes qui en ont la charge. Ainsi, si on se réfère aux
articles 143 et 144 du code sénégalais des MP, il existe au sein
de chaque autorité contractante, un organe de contrôle interne qui
doit s'assurer du respect rigoureux des dispositions légales et
réglementaires applicables aux marchés publics.
209 Le Directeur Général de la SENELEC avait
obtenu du chef du gouvernement son aval pour l'attribution dudit marché
en invoquant l'article 76 du CMP, lequel autorise l'entente directe pour les
marchés « considérés comme secrets ou dont
l'exécution doit s'accompagner de mesure particulière de
sécurité, lorsque la protection de l'intérêt
supérieur de l'Etat l'exige ».
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 92
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Ce faisant, chaque cellule de passation ou commission de
contrôle des marchés, a l'obligation d'établir avant le 31
mars de chaque année à l'intention de l'autorité dont elle
relève et aussi de la DCMP et de l'ARMP, un rapport annuel sur
l'ensemble des marchés publics passés l'année
précédente. Malheureusement, cette exigence, en plus d'être
mal exécutée, n'est pas toujours observée de
manière suffisamment satisfaisante. Par conséquent, cette
situation rend difficile, la mise à disposition auprès de l'ARMP,
des documents indispensables aux opérations d'audit.
Sous ce rapport, l'autorité de régulation des
marchés publics éprouve des difficultés aigues à
accéder aux informations portant sur les marchés passés
par ces autorités contractantes, lorsqu'elle exerce ses
prérogatives dans le cadre du contrôle a posteriori. Ainsi cette
situation peut-elle être constitutive de retard dans la production des
rapports d'audit. A cet effet, on dénonce au Sénégal un
retard incroyablement long dans la publication des rapports d'audit de l'ARMP
sur les marchés de l'exercice de 2012210. Cette situation
s'observe aussi au Togo puisque la revue indépendante de la
conformité de la procédure de passation des marchés
passés par les autorités contractantes, au titre de
l'année 2012 n'a été rendue publique qu'en mai 2015.
De ce fait, on remarque que les autorités
sénégalaises comme togolaises, n'ont pas publié ces
rapports d'audit, dans un délai raisonnable. Le manque de diligence en
ce sens va à l'encontre de « l'indicateur 11 » intitulé
« Degré d'accès à l'information » de
l'OCDE211 sur l'évaluation du système de passation des
marchés publics. Cet indicateur en guise de précision, renvoie
à la qualité, à la pertinence et à
l'exhaustivité des informations sur le dispositif de passation des
marchés publics.
Cependant, ne pas remédier à un tel retard dans
la publication des rapports de synthèse sur la passation des
marchés, pourrait être constitutif d'une violation du principe de
transparence prévu par la Directive 04/2005/CM/UEMOA et par la loi 2006
-16 du 30 juin 2006 portant Code des Obligations de l'Administration au
Sénégal.
210 Ce rapport a été finalement transmis au
premier ministre le 31 décembre 2014, soit deux ans après
l'écoulement de l'année pour le compte duquel il a
été établi.
211 L'Organisation pour la Coopération et le
Développement Economique, OCDE, a été mise en place par la
Convention de Paris du 14 novembre 1960, laquelle est rentrée en vigueur
le 30 septembre 1961. Elle se substitue à l'OECE. Elle comprend 35 Etats
membres et à vocation à favoriser le développement de
l'économie mondiale dans un univers mondialiste de non-discrimination et
aider à la stabilité financière des Etats membres.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 93
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
En outre, on a pendant longtemps constaté une
augmentation des litiges au niveau du CRD, entrainant ainsi une période
de traitement relativement longue des contentieux. Mais lorsqu'on l'observe de
près, l'augmentation des litiges peut d'une part, et ce en amont,
être rattachée à la mauvaise qualité des agents des
commissions et cellule de passation, qui évaluent mal et font une
attribution subjective des marchés, sans procéder au
préalable aux vérifications requises en conformité avec la
règlementation. D'autre part, la mauvaise formulation des
requêtes, la tendance aux recours abusifs et la production de dossiers de
requêtes généralement incomplets212 ralentissent
considérablement les travaux du CRD et compliquent l'instruction des
dossiers.
Par ailleurs, dans certains cas, les prérogatives de
l'ARMP la conduisent à trancher entre différents
intérêts en présence et le cas échéant, elle
peut exceptionnellement trancher en faveur de l'administration pour lui
permettre d'attendre les objectifs de développement que l'Etat s'est
fixés213.
Paragraphe 2 : La complexité du contrôle
juridictionnel
Le contrôle juridictionnel de la passation des
marchés publics met en évidence une configuration complexe du
droit au regard de l'outillage technique dont disposent les différents
juges pour faire face aux mutations de la matière. A cet effet nous
envisagerons tour à tour le dépassement des attributions
classiques du juge administratif (A) et les difficultés liées au
volet pénal (B).
A- Un dépassement des attributions classiques du
juge
Depuis que le juge administratif est amené à
jouer un rôle en matière économique, en veillant d'une part
au respect des droits et libertés économiques et en assurant un
contrôle directe sur l'action des autorités publiques en charge de
la passation des marchés publics d'autre part, il est allé de soi
que ses attributions originelles ont changé d'orientation. Ainsi,
initialement formé dans une logique pure de la science juridique
traditionnelle, le juge administratif va désormais
212 Très souvent, les requérants omettent de
joindre à leurs dossiers, des pièces à conviction.
213 Cette situation peut amener l'ARMP à
accélérer la procédure et à ne pas respecter les
critères contenus dans le dossier d'appel dans le but de ne pas perdre
le financement de l'Etat.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 94
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
chercher à étendre sa sphère de
compétence à un autre domaine, celui de l'économie.
Toutefois et ce jusqu'à aujourd'hui, cette extension de
compétence ne s'est pas toujours révélée
aisée du fait de la complexité de l'analyse
économique214 à laquelle les juges administratifs
sénégalais et togolais sont confrontés dans le contentieux
des marchés publics. Dès lors, on comprend mieux les propos du
doyen Georges VEDEL lorsqu'il affirmait que l'économie « intimidait
» ou « ennuyait » le juge215.
Mais aujourd'hui, depuis que les règles de droit public
ont entrepris une mutation, c'est cette même économie qui est
devenue le « patrimoine juridique commun » de tous les juges, y
compris du juge administratif qui apparaît, de prime abord, peu
concerné par ce domaine modelé par les relations privées.
Désormais, le contentieux des marchés publics semble très
éloigné du contentieux classique de la légalité,
entendu au sens classique du terme. C'est un contentieux d'espèce qui,
de toute évidence révèle le caractère purement
économique du droit des marchés publics et il n'est plus permis
aux juges administratifs sénégalais et togolais, de se contenter
de dire simplement le droit216.
A l'évidence, cette appréhension qui place le
contentieux de la passation au coeur de l'élaboration d'un droit de la
régulation économique, devrait permettre au juge d'avancer dans
le contrôle d'opportunité des décisions de
l'autorité de régulation217, à condition bien
sûr de disposer réellement des connaissances techniques
appropriées, chose qui a priori fait défaut aux juges
sénégalais et togolais.
Par ailleurs, l'application par le juge d'un droit
influencé par l'économie soulève chez celui-ci, la crainte
que l'économie ne porte atteinte à l'intégrité du
droit218. En effet, cette crainte peut paraître fondée
dans la mesure où les droits administratifs sénégalais et
togolais sont très
214 Docteur Mamadou Yaya DIALLO, « Le juge de
l'administration et la régulation des marchés publics au
Sénégal », page 28
215 Georges VEDEL, Le droit économique existe-t-il ?
, Mélanges Vigreux, 1981 p. 778
216 Dans cette nouvelle configuration, le droit que doit dire
le juge administratif, n'est pas le droit entendu au sens formel, mais un droit
intégrant des considérations économiques et des politiques
de régulation économique.
217 Canivet Guy, Propos généraux sur les
régulateurs et les juges , in Marie-Anne Frison-Roche, p. 192
218 TAMIN C, Economie et droit, in Dénys.
Alland et J. Riels (dir), Dictionnaire de la culture juridique PUF et Lamy,
2003, pp. 578-581
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 95
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
sensibles aux normes communautaires notamment dans le cadre
des marchés publics219. En clair, on pourrait être
amené à penser que le droit a perdu de son essence
profondément judiciaire au contact de
l'économie220.
Par ailleurs, il importe de souligner que le juge
sénégalais de l'administration n'est pas outillé, pas plus
que son homologue togolais pour exercer efficacement certaines
prérogatives. En effet, ils ne disposent pas du pouvoir d'enjoindre
à l'administration d'agir dans un certain sens, ni de prononcer des
astreintes, alors que c'est du renforcement des pouvoirs du juge administratif
que l'efficacité du contrôle juridictionnel trouvera son sens.
En outre, au-delà de l'espoir qu'il suscite dans la
mise en oeuvre d'une transparence de plus en plus affirmée dans la
passation des marchés, le recours juridictionnel connait une fois de
plus des entailles. En effet, au Sénégal comme au Togo, le
recours juridictionnel en matière de contentieux de la passation n'a pas
d'effet suspensif sur le processus de passation (art. 92 al.2 et art. 127 des
CMP du Sénégal et du Togo). Cette situation qui prévalait
déjà au Togo depuis la loi du 23 juin 1981221, est
simplement déplorable pour la simple raison qu'on se demande à
quoi servirait un tel recours si les mesures conservatoires222 ne
sont pas déployées afin d'éviter d'aboutir à la
signature définitive du contrat.
A ces différents égards, si nous nous proposons
de faire une comparaison de l'activité juridictionnelle en
matière de contentieux de la passation entre le Sénégal et
le Togo, on se rend très vite compte qu'il existe une divergence
prétorienne saisissante. De ce fait, pendant que le juge
sénégalais « s'impose » et fait preuve d'une relative
audace, on assiste cependant à un
219 La transposition des directives 04 et 05 de l' UEMOA par
le Sénégal et le Togo atteste de cette perméabilité
de leur droit administratif.
220 Jean BOULOUIS, Droit économique in
L'unité du droit : Mélange en hommage à Roland Drago,
Economica, 1996, p.175
221 Article 9 de la loi togolaise N° 81-10 du 23 juin
1981 fixant la procédure devant la chambre administrative de la cour
d'appel de Lomé qui dispose : « Le dépôt de la
requête n'a pas d'effet suspensif à l'égard de la
décision attaquée, sauf si le président de la cour ordonne
le sursis à exécution cette décision, notamment dans la
mesure où la poursuite de l'exécution serait de nature à
créer une situation irréversible ôtant tout effet à
l'exercice du recours ».
222 Les mesures conservatoires sont des mesures provisoires
prises par le juge, afin de préserver la situation juridique dans
laquelle se trouve chacune des parties au moment de sa saisine
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 96
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
balbutiement de la part de son homologue togolais en termes de
recours223 contre les décisions du CRD. Ainsi, jusqu'à
aujourd'hui, signale-t-on seulement quatre (4) contentieux relatifs à la
passation des marchés publics auprès de la chambre administrative
de la cours d'appel de Lomé, témoignant d'une certaine latence
pour cette juridiction dans le traitement des recours liés à la
passation des marchés.
Au Sénégal où cette activité
prétorienne est plus poussée, on signale néanmoins des
difficultés chez le juge de la cour suprême. D'une part, on
déplore l'absence des dispositions réglant de manière
satisfaisante le problème des procédures d'urgence relativement
au contentieux de la passation des marchés publics. D'autre part, le
juge administratif sénégalais semble toujours ne pas comprendre
que «ordonner à l'administration de faire ce que le droit lui
impose ne constitue pas une méconnaissance de la séparation des
pouvoirs ou des fonctions »224.
In fine, on retient de ces constats sur le plan pratique, que
les juges administratifs sénégalais et togolais sont
confrontés à un défi, celui de leur capacité au
regard de leur formation, à juger efficacement les problèmes
afférents au contentieux économique dans la passation des
marchés publics.
B- Des difficultés liées au volet
pénal
Les pratiques irrégulières qui surviennent lors
de la passation des marchés publics se déclinent
généralement en corruption passive225, la prise
illégale d'intérêt, le trafic d'influence226 et
le favoritisme227. Pour le magistrat sénégalais Malick
LAMOTTE, « On est en face d'une corruption passive lorsqu'on envisage
l'infraction du côté du corrompu », c'est-à-dire
celui qui
223 Conformément à l'article 127 alinéas
2 du CMP Togo, les opérateurs économiques qui ne sont pas
d'accord avec les décisions rendues par le Comité de
Règlement des Différends peuvent saisir la chambre administrative
de la juridiction d'appel compétente.
224 Charles DEBBASCH, Déclin du contentieux
administratif, page 97
225 Dans le cadre de la corruption passive, le corrompu
sollicite ou accepte un avantage pour lui-même ou un proche que son
interlocuteur reste libre de ne pas verser.
226 Le trafic d'influence n'apparait pas clairement dans les
CMP du Sénégal et du Togo mais il demeure tout de même, une
infraction occulte pouvant être commise dans le cadre des marchés
publics.
227 Le favoritisme s'assimile au non-respect des conditions
d'attribution des marchés publics.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 97
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
rend service en contrepartie d'un avantage. Inversement, il
s'agit pour les autorités contractantes, dans l'optique d'obtenir un
avantage indu de procurer ou de tenter de procurer un avantage anormal à
un candidat ou de passer un marché avec un candidat exclu des
marchés publics. Les faits qui entrent dans la définition de
cette infraction apparaissent à la lecture des dispositions des articles
146 et 147 du CMP du Sénégal et 132 du CMP du Togo, toutes
relatives aux sanctions des candidats, soumissionnaires et titulaires des
marchés, applicables pour non-respect de la règlementation des
marchés publics.
Si l'on observe attentivement le constat contenu dans nos
derniers propos, un fait interpelle notre attention en tant que juriste. En
effet, on remarque d'une manière on ne peut plus claire, que la
répression de cette première catégorie d'infraction, bien
que reconnue au juge pénal, tient cependant moins à une
disposition du code pénal du Sénégal ou du Togo,
qu'à une disposition relevant de leurs codes des marchés publics.
Ainsi s'ouvre la brèche qui s'identifie aux difficultés d'ordre
pénal qui assaillent le secteur de la passation des marchés
publics et qui de ce fait dénotent d'une absence d'un arsenal
pénal propre, destiné à réprimer les
irrégularités constatées dans les procédures de
passation.
La pénalisation des marchés publics au
Sénégal et au Togo reste en effet du moins au plan textuel, un
domaine peu exploré à la fois par le législateur que par
les tenants de la doctrine. Ne disposant pas de l'outillage juridique
nécessaire, le juge pénal se contente jusqu'ici d'un
pis-aller228 pour sanctionner les irrégularités qui
lui sont signalées dans les procédures de passation.
L'imprécision des statistiques pénales en ce domaine, l'absence
de volet économique et financier dans les codes pénaux
sénégalais et togolais, le nombre peu connu des décisions
de justice non diffusées ou encore l'absence d'une formation
spécifique des magistrats révèlent que l'émergence
d'un droit pénal229 directement applicable aux marchés
publics, n'a jusque-là pas encore été
concrétisée.
Aujourd'hui, si on se réfère à la lente
formation d'un véritable contentieux pénal de la
228 Un pis-aller est une solution que l'on choisit faute de
mieux. Dans ce cas-ci, il s'est agi pour le juge pénal, à
défaut de disposer des textes spécifiques, de se baser sur les
dispositions générales contenues dans le code pénal.
229 Catherine PREBISSY-SCHNALL « La
pénalisation du droit des marchés publics »,
publié aux éditions LGDJ dans la collection Bibliothèque
de droit public (tome 223).
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 98
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
commande publique et ses hésitations à suivre
l'évolution actuelle des mutations propres aux marchés publics,
on peut facilement remarquer qu'il est urgent et impératif de
créer un cadre juridique autonome adapté au volet pénal de
la passation.
En plus de cela, nous avons également constaté
qu'il n'est nulle part mentionné dans les codes pénaux
sénégalais et togolais, un délit dit de «favoritisme
» bien que l'expression soit récurrente dans les débats
juridiques. Si nous prenons par exemple le droit positif français, les
« atteintes à la liberté d'accès et à
l'égalité de traitement des candidats dans les marchés
publics », ont été instituées comme un délit
depuis la loi du 3 janvier 1981 et sont réprimées par l'article
432 alinéas 14 du code pénal français230.
Cependant, même si la violation des conditions d'attribution des
marchés est abordée par les codes sénégalais et
togolais des marchés publics231, il ne reste pas moins vrai
que leurs codes pénaux gardent le silence quant à leur
qualification pénale.
En définitive, même s'il est vrai que les
marchés publics ont d'une certaine manière réussi à
allier droit administratif et économie, ils n'ont cependant pas encore
totalement réussi ce pari pour le droit pénal, ce qui à
tous égards est perçu aujourd'hui comme un défi à
relever pour le Sénégal et le Togo.
Sous ces dernières observations, les faits
rapportés ci-haut viennent clore la longue liste, mais non exhaustive
des insuffisances que connaissent la passation des marchés publics au
Sénégal et au Togo. Ces irrégularités
répertoriées, il importe maintenant de faire des recommandations
pour voir dans quelles mesures la transparence peut être
restaurée.
230 Article 432 alinéas 14 code pénal
français « Est puni de deux ans d'emprisonnement et d'une
amende de 200 000 euro, dont le montant peut être porté au double
du produit tiré de l'infraction, le fait par une personne
dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une
mission de service public ou investi d'un mandat électif public ou
exerçant les fonctions de représentant, administrateur ou agent
de l'Etat, de collectivités territoriales, des établissements
publics, des sociétés d'économie mixte locales ou par
toute personne agissant pour le compte de l'une de celles susmentionnées
de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage
injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou
règlementaires ayant pour objet de garantir la liberté
d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés
publics et délégations de service public ».
231 Cf. articles 146 et 147 du CMP du Sénégal et
132 du CMP du Togo
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 99
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 100
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Section 2 : Des mesures de recommandations
générales
Les recommandations dont il sera ici question se feront
conformément aux différentes insuffisances dont nous avons
préalablement fait cas. Ainsi ces recommandations seront successivement
abordées relativement aux procédures de passation (paragraphe 1)
puis à l'égard des mécanismes de contrôle
(paragraphe2).
Paragraphe 1 : Les recommandations relatives aux
procédures
Concernant les procédures de passation, les
recommandations que nous allons proposer, se feront relativement aux
procédures normales (A) puis aux procédures particulières
de passation (B).
A- Des propositions relatives aux procédures
normales
En dépit des nombreuses irrégularités
dont souffrent les procédures de passation, il ne demeure pas moins vrai
qu'il existe des possibilités de promouvoir la
transparence232. Il sera ici question des propositions faites pour
conforter le processus de passation et répondre aux insuffisances
relatives à la fois à la phase préalable à l'appel
d'offres et celles mentionnées pour la phase proprement dite d'appel
d'offres. A cet effet, nous faisons les recommandations suivantes :
? La nécessité d'une incitation à la
dématérialisation des procédures
Il est un fait incontestable que la
dématérialisation des procédures constitue aujourd'hui un
gage de transparence dans les procédures de passation des marchés
publics. La dématérialisation des procédures mérite
donc au vu de son caractère innovant et de sa récurrence dans
l'actualité, une attention particulière.
Qu'entend-t-on par dématérialisation des
procédures ? Qu'apporte-t-elle concrètement et en quoi
contribue-t-elle à la transparence? Autant de questions qui nous
amènent à nous intéresser à ce nouveau
procédé.
232 Transparancy international, « Minimum Standards of
public procurement », 2005
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Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 101
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
w' La notion de dématérialisation des
procédures
La dématérialisation des procédures des
marchés publics est une technique qui consiste à mettre en oeuvre
des moyens électroniques pour effectuer des opérations de
traitement, d'échange et de stockage d'informations sans support papier.
A cet effet, la dématérialisation est définie au sens de
l'article 43 de la directive 04 de l'UEMOA comme étant « La
création, l'échange, l'envoi et la réception ou la
conservation d'informations ou de documents par des moyens électroniques
par des moyens électroniques ou optiques ».
Elle suppose deux procédés233 : Soit
les documents sont numérisés à partir d'un support papier,
soit ils sont créés directement sous forme
électronique.
w' Les apports de la
dématérialisation
La dématérialisation constitue un facteur
d'économie dans la mesure où elle assure une diminution des
dépenses relatives à l'élaboration et la diffusion des
dossiers en format papier et par ricochet, une réduction des coûts
de transactions.
Aussi, la dématérialisation permet-elle lors de
la phase de préparation des dossiers par les entreprises candidates de
gagner en temps, les formulaires étant directement remplis et
envoyés par voie électronique.
w' La contribution de la dématérialisation
à la transparence
A partir du moment où les informations relatives aux
marchés à passer sont diffusées largement par le biais de
moyens électroniques, l'accès à ces marchés est
désormais facile à l'ensemble des entreprises candidates. Cette
situation constitue non seulement un facteur de concurrence, mais
également assure une égalité de traitement des candidats
et une liberté d'accès à tous à la commande
publique, trilogie constitutive du principe de transparence. Partant de
là, les petites entreprises disposent au même titre que les
grandes, d'un accès aux marchés publics.
En définitive, l'ouverture des marchés publics
à la communication électronique constitue un
233 Jean-Marc RIETSH, Mise en oeuvre de la
dématérialisation, Ed. Dunod, 2010.
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La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
gage de transparence dans les procédures de passation et
aussi de contrôle.
> L'évaluation des besoins doit être conduite par
des agents publics compétents, dont l'autorité contractante
s'assure au préalable de l'intégrité morale.
> Les autorités contractantes doivent être plus
regardantes sur l'élaboration et la publication du PPM et la DCMP doit
systématiquement rejeter des marchés qui n'y sont pas
préalablement inscrits.
> Le choix de la méthode de passation doit se fonder
sur des motifs réels et objectifs.
> Les décideurs publics doivent se garder de
privilégier certains candidats et doivent communiquer les informations
relatives aux marchés de façon que tous les candidats puissent y
avoir un accès équitable.
> Les entreprises candidates doivent elles aussi faire preuve
d'intégrité dans la présentation des documents qui
attestent de leur capacité techniques à exécuter les
marchés pour lesquelles elles ont soumissionné.
> La publication régulière des marchés
dans les avis généraux de passation ne doit souffrir d'aucune
exception sauf si bien sûr une discrétion est requise pour
certains marchés particuliers.
> Pendant la phase proprement dite d'appel d'offres ouvert,
les exigences de publicité doivent scrupuleusement être
respectées par les autorités contractantes.
> Les critères d'évaluation des offres des
candidats et d'attribution des marchés doivent se faire sur la base de
critères objectifs fidèles aux exigences de conformité
technique et en termes de coût financier.
> Les conflits d'intérêt et aussi le favoritisme
doivent être bannis et les restrictions qui pèsent sur eux doivent
être renforcées.
> Il serait intéressant pour la commission de faire
siéger des représentants de la société civile
à travers des audiences publiques afin de leur permettre de prendre part
au processus de décision, même si aujourd'hui, l'évaluation
se fait à huis clos.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 102
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
> Faire appel à un groupe et non pas à un
individu pour convenir de la décision d'attribution.
> Pratiquer une plus grande rotation du personnel afin
d'éviter l'ancrage des relations corrompues234.
> Il est impératif pour chaque autorité
contractante de s'assurer que la personne chargée de l'attribution est
différente de la personne ou du groupe qui lance l'appel d'offres. Le
fait de dissocier la décision des achats du choix de l'attributaire
permet de diminuer le risque d'arrangements corrompus entre l'autorité
contractante et les soumissionnaires.
> Contre les délais excessifs notés dans
l'évaluation des offres, il serait souhaitable que soit mise sur pied,
une déconcentration des opérations de dépouillement par
une habilitation des unités de gestion de projets et autres structures
à prendre en charge leurs propres marchés.
> Aussi serait-il nécessaire de rendre effective
l'application de sanctions contre les membres
des commissions en cas de retards
exagérés235 constatés dans l'évaluation
des offres.
> Les cellules de passation des marchés quant
à elles doivent faire preuve de diligence et de professionnalisme dans
l'archivage des dossiers relatifs aux marchés passés par les
autorités contractantes dont elles relèvent afin de faciliter
l'établissement des rapports lors des opérations d'audit.
> Les autorités contractantes doivent veiller
à ce qu'il n'y ait plus de plaintes suite à la non-publication
des avis d'attribution provisoire et définitive des marchés.
> La notification aux candidats, du rejet de leurs offres
ne doit plus être négligée. Ainsi, leur sera-t-il permis
non seulement de connaitre les motifs du rejet de leurs offres, mais aussi de
pouvoir exercer en connaissance de cause, un recours gracieux et s'il y a lieu,
un recours contentieux.
Voilà donc quelques améliorations qui pourraient
contribuer à atténuer les insuffisances dont souffre le principe
de transparence dans les méthodes normales de passation des
marchés au
234 Transparency International 2006, Page 44
235 Il n'est pas exagéré d'affirmer qu'aucune
autorité contractante ne respecte le délai de 15 jours
imposé par le CMP. Le non-respect de ce délai est tel que
l'évaluation des offres peut parfois prendre 6 mois ou même
plus.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 103
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 104
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Sénégal et au Togo. Quid des procédures
particulières ?
B- Des propositions relatives aux procédures
particulières
Les recommandations que nous formulons pour les
procédures particulières se feront en deux volets, les
procédures dérogatoires d'abord et les procédures
spécifiques ensuite.
Pour les premières voici les mesures que nous
préconisons :
? Pour corriger les insuffisances que nous avons
relevées pour la procédure d'appel d'offres restreint, nous
conseillons aux autorités contractantes de porter à 4 ou à
5, le nombre236 minimum de candidats invités à
soumissionner, afin de réduire les risques d'appel d'offres
infructueux.
? Compte tenu des risques de blocage pouvant découler
du respect du seuil de 10% à l'échelle nationale, la DCMP doit
veiller scrupuleusement au respect de cet indicateur par les autorités
contractantes, ce qui permettrait une péréquation qui prend en
considération le fait que les autorités contractantes ne soient
pas soumises aux mêmes réalités face à la
problématique de l'urgence et aux autres conditions devant donner lieu
à des procédures dérogatoires.
? La DCMP doit continuer à dénoncer tout recours
injustifié à l'appel d'offre restreint et à l'entente
directe.
Quant aux irrégularités constatées dans
les procédures spécifiques, voici ce que nous proposons :
? Pour les DRP, il faut une rigueur dans la gestion des
dossiers et la formation conséquente des agents publics des
autorités contractantes, aux conditions de recours à ce mode
spécifique de passation.
? En ce qui concerne le fractionnement excessif des
marchés par les autorités contractantes, nous leur recommandons
de regrouper tous ces achats et lancer des
236 Ce nombre minimum est aujourd'hui fixé à 3
candidats.
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La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
appels d'offres en plusieurs lots sous forme de marchés
à commandes237 ou de marchés de
clientèle238 qui constituent en fait une déclinaison
des accords-cadres.
? Dans une perspective de transparence, il est
nécessaire que soit aménagées pour les DRP, des
possibilités de recours pour les candidats qui s'estimeraient
lésés.
? Les autorités contractantes doivent non seulement
respecter les obligations relatives à la publication des informations
à toutes les étapes, mais aussi celle de publier sur le portail
des marchés publics, les résultats de DRP.
? Il serait opportun de songer à un système de
sanction des auteurs de malversations constatées dans les DRP.
? Concernant les marchés de prestations
intellectuelles, les membres des commissions de passation des marchés
doivent parfaitement maitriser les techniques d'évaluation des demandes
de propositions239 qui obéissent un certain nombre de
critères spécifiques.
? Concernant les offres spontanées, les
autorités contractantes ne doivent pas systématiquement exclure
l'appel d'offres ouvert dans la mise en oeuvre de cette procédure
spécifique.
Telles sont donc les propositions que nous pouvons faire d'un
point de vue global afin venir à bout des irrégularités
auxquelles sont confrontées les procédures de passation.
Paragraphe 2 : Les recommandations relatives aux
contrôles
En termes de contrôle nous allons procéder
respectivement à travers les recommandations relatives au contrôle
administratif (A) puis celles relatives au contrôle juridictionnel (B) de
la
237 Un marché à commandes fixe le minimum et le
maximum des fournitures ou de prestations, arrêtées en valeur ou
en quantité, susceptibles d'être commandées au cours de la
période déterminée, n'excédant pas celle
d'utilisation des crédits de payement ; les quantités des
prestations ou fournitures à exécuter sont
précisées pour chaque commande, par l'autorité
contractante en fonction des besoins à satisfaire. Cf. article 25-1.a du
CMP Sénégal.
238 Un marché de clientèle est celui auquel
recourt une autorité contractante et par lequel elle s'engage à
confier au prestataire ou au fournisseur retenu, des commandes portant sur une
catégorie déterminée de prestations de service,
fournitures ou travaux d'entretien ou de maintenance, sans indiquer la
qualité ou la valeur globale des commandes. Cf. article 25-1.b du CMP
Sénégal
239 Il s'agit d'une bonne connaissance des techniques
d'évaluation des offres techniques et des offres financières.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 105
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
passation des marchés.
A- Des propositions quant au contrôle
administratif
Il sera question ici de propositions relatives au
contrôle a priori et au contrôle a posteriori du processus de
passation.
? Pour le contrôle a priori interne, il serait
souhaitable de renforcer la capacité des autorités contractantes
en ressources humaines et doter les fonctionnaires des cellules de
passation(Sénégal) et commission de contrôle des
marchés (Togo), d'un système de motivation à la hauteur de
la responsabilité qui leur incombe.
? Pour le contrôle a priori externe, afin de venir
à bout du problème de contournement des refus de la
DCMP240, nous plaidons pour une volonté politique plus
affirmée.
? A niveau du contrôle a posteriori interne,
l'obligation faite à chaque cellule de passation ou commission de
contrôle des marchés, d'établir avant le 31 mars de chaque
année, un rapport sur les marchés passés l'année
précédente, à l'intention de l'autorité dont elle
relève et aussi de la DCMP et de l'ARMP, doit être plus
contraignante.
? En ce qui concerne le contrôle a posteriori de l'ARMP,
bien que cette institution établisse annuellement un rapport
synthétique des marchés passés, et comportant des
propositions de mesures tendant à prévenir les
irrégularités constatées, elle doit cependant faire
diligence dans la publication de ses rapports parce que nous avons
remarqué surtout au Togo un retard dans la publication de ces
rapports241.
? Pour des faits de corruption, de trafic
d'influence242, de prise illégale
d'intérêt243 ou de toute forme d'atteintes aux
principes de liberté et d'égalité d'accès, commis
par des agents publics ou privés, il serait opportun de centraliser les
infos nécessaires à la
240 Cf. affaire DCMP contre SENELEC, où malgré
le rejet par la DCMP de la demande d'autorisation d'un marché par
entente directe, la SENELEC a usé d'autres moyens pour passer le
marché.
241 Pour preuve, le rapport de synthèse des
marchés publics passés par les autorités contractantes au
Togo au titre de l'année 2012 n'a été publié qu'en
mai 2015, soit 3 ans plus tard.
242 Le trafic d'influence consiste à solliciter ou
agréer des avantages pour soi-même ou pour autrui en abusant de
son influence réelle ou supposée, en vue de faire obtenir d'une
autorité publique, une faveur.
243 La prise illégale d'intérêts est le
fait par une personne dépositaire de l'autorité publique, de
prendre, recevoir ou conserver directement ou indirectement, un
intérêt quelconque dans une opération dont elle a la charge
d'assurer la surveillance ou l'administration.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 106
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
détection et à la prévention de tels faits
en mettant sur pied un service indépendant de lutte contre la
corruption.
Sur ce dernier aspect, d'aucuns pourraient dénoncer une
surabondance institutionnelle mais au regard de l'importance des montants qui
disparaissent par défaut de transparence dans le processus de passation,
aucune innovation pratique dont le mérite manifestement incontestable ne
doit être ignorée.
B- Des propositions quant au contrôle
juridictionnel
Les mesures qui seront proposées pour faire face aux
insuffisances relevées pour le compte du contrôle juridictionnel
se feront en deux temps. Il sera d'abord questions des propositions relatives
au juge administratif et ensuite celles qui concernent le juge pénal.
Concernant le juge administratif, nous avons
évoqué plus haut que les mesures conservatoires n'étaient
pas appliquées en cas de saisine de la cour suprême. Ce qui fait
qu'on constate que pour certains contentieux soumis à la cour, les
marchés sont exécutés avant l'intervention de la
décision de la cour. Ce qui rend sans objet voire totalement inutile la
décision rendue par la cour.
Après réflexion sur une telle situation voici ce
que nous proposons :
? Bien qu'il existe au Sénégal et au Togo la
procédure de demande de sursis à exécution244
de la décision d'attribution du marché à un
soumissionnaire, Il serait opportun de renforcer les droits des candidats aux
marchés publics qui devront s'opérer et se calquer sur
l'institution du « référé précontractuel
»245, technique existant en France, qui comporte des vertus
considérables.
244 Le sursis à exécution est une décision
par laquelle le juge reporte la date de la mise en oeuvre d'une
décision.
245 V. François BRENET, Succession d'un
référé précontractuel et d'un
référé contractuel , note sous CE, 10 novembre
2010, France Agrimer, in Droit administratif, janvier 2011, p.
38 et S., p. 38. Le Professeur Jean-David DREYFUS remarquait une «
mosaïque de recours ». V. Dreyfus Jean-David, «
Référé précontractuel et
référé contractuel : l'ignorance prémunit contre
l'irrecevabilité », note sous CE, 10 novembre 2010, France Arrimer,
in AJDA, 2011, p. 51. et S. p. 52. Le Professeur Philippe COSSALTER qualifiait
le contenu du contentieux administratif des contrats publics de « feu
d'artifice ».V. en ce sens : COSSALTER Philippe, « Vingt ans de
contentieux administratif des contrats publics : permanence et innovations
», in Mélanges en
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 107
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
? Dans sa mise en oeuvre, le référé
précontractuel permettra aux opérateurs économiques de
saisir de saisir le juge administratif, avant même que le contrat soit
signé, à un stade où les éventuelles violations aux
règles de publicité et de mise en concurrence peuvent encore
être empêchées ou corrigées. Il s'agira pour le
Sénégal et le Togo de donner ainsi sa pleine effectivité
à l'intervention du juge en favorisant la prévention en amont,
des manquements aux règles de passation des marchés publics.
Concernant les difficultés liées à
l'appropriation par les juges sénégalais et togolais des
techniques économiques, nous faisons les recommandations suivantes :
? Il faudrait inventer des « magistratures
économiques »246, pour appliquer un nouveau droit
pénétré d'économie, ce qui leur permettra
d'intégrer les enjeux et impératifs de la régulation
économique dans leur raisonnement247 et de comprendre que
dans certaines situations, l'application du droit dans toute sa rigueur et son
autorité peut être contreproductive d'un point de vue
économique.
? Il faut aussi donner aux juges administratifs, le pouvoir
d'enjoindre à l'administration d'agir dans un sens ou dans un autre et
de prononcer des astreintes car l'efficacité du contrôle
juridictionnel de la régulation justifie le renforcement des pouvoirs du
juge.
Pour ce qui est des insuffisances constatées pour
l'office du juge pénal, voici nos recommandations:
? Il s'impose de créer une incrimination autonome
destinée à sanctionner l'atteinte à la liberté et
à l'égalité d'accès aux marchés publics. Car
c'est d'abord l'égalité et ensuite la concurrence qui en
résulte, qui assurent l'efficacité de la dépense et
partant de là, garantit la bonne gouvernance des deniers publics.
l'honneur de Jean-Pierre Boivin, IDPA, 2012, p. 231 et s., p.
250. Le Professeur Stéphane Braconnier soulignait la « concurrence
fratricide entre les actions post-contractuelles ouvertes aux concurrents
évincés » ; Marino-Philippe Clémence, « Les
nouvelles règles de la commande publique : bilan autour d'un contentieux
en perpétuelle évolution », in RDP, 2011, p. 113 et s., p.
114
246Jacquemin Alexis, la magistrature
économique, oyez et Bruylant, 1976, « Eléments structurels
d'une magistrature économique » RTD com 1977, pp. 421-434
247 Il importe toutefois de souligner que le juge
sénégalais de l'administration et son homologue du Togo ne sont
pas aussi outillés que le juge français en ce sens.
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 108
Titre 2, Chapitre II : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 109
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
? La pénalisation constituant un dispositif de
protection des marchés248, il faudrait impérativement
penser à pénaliser le favoritisme. En ce sens, une
révision du code pénal s'impose au Sénégal tout
comme au Togo.
En définitive, voilà donc quelques propositions
qui, si elles sont observées, pourraient aider à atténuer
les insuffisances dont souffre le principe de transparence dans la passation
des marchés publics au Sénégal et au Togo.
248 Catherine PREBISSY-SCHNALL, « La pénalisation du
droit des marchés publics », op. cit, page
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La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
CONCLUSION GENERALE
Ces dix dernières années auront porté
pour le Sénégal et le Togo, l'empreinte d'une décennie
caractérisée par un combat commun, celui de mettre fin aux
pratiques sombres qui depuis longtemps sévissent dans les marchés
publics. L'on ne peut dénier que les efforts entrepris, ont
apporté des changements significatifs à divers niveaux. En effet
la nouvelle règlementation née de ces apports a su asseoir un
climat d'évolution, de constance et de relative confiance dans
l'assainissement des pratiques de passation de même que dans les
mécanismes de contrôle.
Mais malgré les efforts consentis ici et là, les
incohérences dans les pratiques n'ont pas disparu pour autant. De ce
fait, comme nous l'avons relevé, les entorses sont toujours
légions. Elles semblent à certains égards
considérablement éprouver les efforts si durement consentis, du
moins au plan textuel et occultent ainsi les retombées positives que
l'on pouvait escompter du respect des règles de transparence. Nous avons
compris qu'une prise de conscience était nécessaire mais elle ne
saurait garantir à elle seule l'intégrité tout au long du
processus de passation et de contrôle des marchés. Ainsi, le
professionnalisme du personnel impliqué est-il essentiel pour garantir
la bonne gestion et la prévention des comportements
réprouvés.
Du reste, ce n'est pas tant le trop grand espoir
suscité par son avènement que la désillusion autour de son
effectivité qui est reproché à la transparence, mais bien
la faiblesse dans l'affirmation d'une volonté politique plus audacieuse
à entreprendre davantage de réformes afin de venir à bout
des atteintes tous azimuts que nous avons antérieurement
évoquées.
En outre, s'il est vrai que les droits de recours sont
garantis et que les contrôles a priori et a posteriori sont
généralement respectés, il reste que les autres exigences
de la transparence ne sont pas vérifiables dans leur mise en oeuvre.
Ainsi, au vu des circonstances qui prévalent, on peut affirmer jusqu'en
ce moment où nous sommes en train de broder ces propos finaux, que la
transparence est relative dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo. Il va sans dire que cet aboutissement moins
généreux auquel on est confronté aujourd'hui
témoigne bien de la difficulté à instaurer un
environnement des marchés publics, exempt de toute
irrégularité.
Conclusion générale 108
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Mais comme pour toute bonne oeuvre destinée à
instaurer une embellie dans une situation qui pendant longtemps a
été obscurcie, il y a toujours des péripéties qui
ne devraient cependant pas contraindre les défenseurs les plus
optimistes du principe de la transparence au désistement.
En outre, les phases de passation et de contrôle ayant
été analysées, quid alors de l'état de la
transparence dans la phase d'exécution des marchés publics au
Sénégal et au Togo ?
Conclusion générale 109
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
BIBLIOGRAPHIE
Bibliographie I
OUVRAGES GENERAUX:
> Charles DEBBASCH, Déclin du
contentieux administratif, Ed. Dalloz-Sirey, 1967. > Georges
VEDEL, Le droit économique existe-t-il ?
Mélanges Vigreux, 1981.
> Jean BOULOUIS, Droit économique
in L'unité du droit : Mélange en hommage à
Roland DRAGO, Economica, 1996.
> Jean-Marc RIETSH, Mise en oeuvre de la
dématérialisation, Ed. Dunod, 2010.
> Nicole DECOOPMAN, Les transformation de
la régulation juridique, LGDJ, « Droit et
société, Recherches et travaux », vol 5, 1998.
> PIERRE DE BAECKE, Comprendre simplement
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Paris 2013.
> TAMIN C, Economie et droit, in
Dénys. Alland et J. Riels (dir), Dictionnaire de la culture juridique
PUF et Lamy, 2003.
OUVRAGES SPECIAUX :
> Catherine PREBISSY-SCHNALL, La
pénalisation du droit des marchés publics, ed. LGDJ,
Bibliothèque de droit public (tome 223).
> F. LLORENS, Principe de transparence
et contrats publics, Contrats et marchés publics, janvier 2004.
> Stéphane BRACONNIER,
Précis du droit des marchés publics, éditions Le
Moniteur 2012.
Bibliographie II
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
ARTICLES:
> BEDOS Gérard, « Transparence et
marchés publics », LPA, 13 septembre 1995, n° 110 dossier
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> CH. BRÉCHON-MOULÈNES, «
Transparence et marchés publics », Revue de
jurisprudence commerciale, octobre 1993, n° Spécial
colloque sur la transparence.
> COSSALTER Philippe, « Vingt ans de
contentieux administratif des contrats publics : permanence et innovations
», in Mélanges en l'honneur de Jean-Pierre Boivin, IDPA, 2012
> Coulibaly D, Baba Kane, « Le juge
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Afrique noire francophone? » .
> DELVOLVE Pierre, « La transparence
administrative (colloque sur la transparence) », Revue de jurisprudence
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> DUPONT Laurent, « La preuve des
pratiques anticoncurrentielles en droit français », Revue de la
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> Gérard TIMSIT, « Les deux corps
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> J. MESTRE, « Transparence et droit des
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> Jacquemin ALEXIS, « La magistrature
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> Jean MARIMBERT, « L'ampleur du
contrôle juridictionnel sur le régulateur », in Les
régulations économiques : légitimité et
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Presses de Sciences Po et Dalloz, 2004.
Bibliographie III
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
> Jean-Matthieu Glatt, « La
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d'insécurité juridique », note sous CJCE, 10 septembre
2009.
> Kari K. HEGGSTAD, les fondements de
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> Linotte Didier, « Existe-t-il un
principe général du droit de la libre concurrence » ?, AJDA,
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> Mamadou Yaya DIALLO, « Le
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> Marino-Philippe Clémence, « Les
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> Martine LOMBARD, « Institutions de
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> N. RENAUDIN, « Transparence et
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THESE:
> Grégory KALFLECHE, « Des
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du droit des marchés publics, Thèse, Paris II, 2004
Bibliographie IV
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
> Anne Marie Cécile DIENE, Le
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et faiblesses, CESAG 2013.
> Ibrahima Khadil DIOP, Diagnostic de la
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> Mamadou Ndiaye, Analyse des
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> Seynabou ATHJ, Audit des marchés
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> VA Sandrine Anne Elodie, Mise en place de
la dématérialisation du processus de passation des marchés
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DOCUMENTS OFFICIELS :
> ARMP Sénégal, Rapport annuel 2011.
> ARMP Sénégal, Rapport annuel 2014.
> ARMP Togo, Rapport annuel 2012.
> ARMP Togo, Rapport annuel 2013.
> Arrêté d'application du décret du
n°2014 - 1212 du 22 septembre 2014 portant code des
marchés publics au Sénégal.
> Charte de transparence et d'éthique en matière
de marchés publics, Sénégal.
> Code des Obligations de l'Administration (COA).
> Code Pénal Sénégal.
> Code Pénal Togo.
> Déclaration de Paris sur l'efficacité de
l'aide au développement du 2 mars 2005.
> Décret n°2009/277/PR portant code des marches et
délégation de services publics au
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Bibliographie V
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
> Décret n°2007/546 du 25 avril 2007 portant
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> Décret n°2007/54 du 25 avril 2007 portant
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> Directive n°04/2005/CM/UEMOA portant procédures
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> Guide du contrôle a priori de la commande publique
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> Loi du 28 Pluviôse An VIII
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> OCDE, Guide sur la prévention de la corruption dans
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> OCDE, « L'intégrité dans les
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> Ordonnance numéro 78-35 du 07 septembre 1978.
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> Vocabulaire juridique, Gérard CORNU,
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> CS Sénégal, 22/08/2013, Société
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> CS Sénégal, 24/10/2013 Société
Angélique International Limited (A.I.L) c/ ARMP, Bulletin des
arrêts de la Cour Suprême du Sénégal.
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
WEBOGRAPHIE:
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www.afrilex.u-bordeaux4.fr
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www.droit-finances.commentcamarche.net
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Bibliographie VI
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
TABLE DES MATIERES
Sigles, Acronymes et Abréviations v
Introduction 1
TITRE I : UNE TRANSPARENCE AFFIRMEE
. 11
Chapitre 1 : Garantie d'une transparence dans les
procédures de passation 12
Section 1 : Une transparence quant aux procédures
normales 12
Paragraphe 1 : L'intégrité dans la phase
préalable d'appel d'offres .. 12
A- Une transparence relative au plan de passation des
marchés ... 12
B- Une transparence relative aux avis de passation des
marchés .. 16
Paragraphe 2 : L'intégrité dans la phase
proprement dite d'appel d'offres 18
A- Une consécration conjointe de l'appel d'offres
ouvert 18
B- Une exigence d'intégrité dans l'attribution
des marchés .. 21
Section 2 : Une transparence quant aux procédures
particulières 25
Paragraphe 1 : La redéfinition des procédures
dérogatoires 25
A- Un réaménagement de l'appel d'offres
restreint 26
B- Un recadrage de l'entente directe 28
Table des matières VI
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Paragraphe 2 : La transparence des procédures
spécifiques . 31
A- Une particularité quant aux prestations
intellectuelles 31
B- Un recours aux autres procédures spécifiques
. 35
Chapitre 2 : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 39
Section 1 : Un contrôle administratif ambivalent ..
39
Paragraphe 1 : La mise en place d'un contrôle a priori
39
A- Un contrôle étendu 40
B- Un mécanisme de transparence 43
Paragraphe 2 : La systématisation d'un contrôle a
posteriori 45
A- Un contrôle à deux visages 45
B- Une garantie en matière de recours 48
Section 2 : Un contrôle juridictionnel indispensable .
50
Paragraphe 1 : Le contrôle de la
régularité des procédures 51
A- Un rappel des règles de transparence par le juge ..
51
B- Une régulation économique par le juge ..
53
Paragraphe 2 : L'étendue du contrôle
juridictionnel 56
A- Un contrôle axé sur la légalité
56
B- Une extension du contrôle au juge pénal .
59
TITRE II : Une transparence relative
.. 62
Chapitre 1 : Insuffisances relatives à la
transparence des procédures de passation 63
Section 1 : Des atteintes liées aux marchés de
type concurrentiels . 63
Table des matières VII
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Paragraphe 1 : Les insuffisances dans le mode de passation
63
A- Une compromission en amont de la soumission 64
B- Une compromission pendant la phase l'appel d'offres 67
Paragraphe 2 : Les anomalies dans le traitement des dossiers
70
A- Une évaluation compromise des offres 70
B- Une attribution irrégulière des
marchés 73
Section 2 : Des constats relatifs aux procédures
particulières 76
Paragraphe 1 : Les méthodes de concurrence restreinte
76
A- Des incohérences quant à l'appel d'offres
restreint . 77
B- Des irrégularités liées à
l'entente directe . 79
Paragraphe 2 : Les insuffisances relatives aux
procédures spécifiques 82
A- Des anomalies liées aux demandes de renseignements
et de prix 82
B- Des anomalies relatives aux autres méthodes
spécifiques 85
Chapitre 2 : Diagnostic des mécanismes de
contrôle et recommandations générales 89
Section 1 : Des faiblesses liées aux mécanismes
de contrôle 89
Paragraphe 1 : Les insuffisances relatives au contrôle
administratif 89
A- Des faiblesses liées au contrôle a priori
90
B- Des difficultés inhérentes au contrôle
a posteriori 92
Paragraphe 2 : La complexité du contrôle
juridictionnel 94
A- Un dépassement des attributions classiques du juge
94
B- Des difficultés liées au volet pénal
97
Section 2 : Des mesures de recommandations
générales 100
Table des matières VIII
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
Paragraphe 1 : Les recommandations relatives aux
procédures 100
A- Des propositions relatives aux procédures normales
100
B- Des propositions relatives aux procédures
particulières 102
Paragraphe 2 : Les recommandations relatives aux contrôles
104
A- Des propositions quant au contrôle administratif .
104
B- Des propositions quant au contrôle juridictionnel
105
Conclusion générale 108
Bibliographie I
Table des matières VI
Table des matières IX