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La neknomination : défi d'expression de soi et culture du « share ».

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par Clémence CORDEAU
Institut Français de Presse (Paris 2) - Master 1, Sciences politiques et sociales, mention médias, information et communication 2015
  

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Partie 3 - La nature virale de la Neknomination

Cette partie constitue une réflexion sur la nature virale du phénomène Neknomination. Elle abordera les éléments constitutifs de la culture du « Share » des réseaux socionumériques en analysant la configuration sociotechnique de ces sites internet qui incitent leurs utilisateurs au partage de contenus et en interrogeant les motivations des individus à partager sur ces réseaux. Dans un second temps, sera étudiée la circulation de cette chaîne en tant que réalisation collective, on conclura sur le besoin de reconnaissance qui a animé ceux qui ont publié une vidéo de Neknomination.

CHAPITRE 5 : LA CULTURE DU « SHARE »

Les internautes ont appris, au fil des années, à tourner les possibilités qu'on leur offrait à leur avantage. Ce chapitre met l'accent sur ce Culte du « Share » que les réseaux sociaux, et le web de manière général ont imposé depuis leur création, des codes et des conduites que les internautes se sont appropriés. Ce partage n'est en aucun cas désintéressé, il a toujours pour but de valoriser celui qui partage un contenu, il est l'outil de cette auto-présentation et valorisation de soi que la première partie de cette étude met en exergue.

A/ Configuration sociotechnique et incitation au partage

Les réseaux sociaux nous incitent-ils au partage ? Internet tout entier est un espace sociotechnique où les algorithmes exercent un pouvoir sur les internautes, Code is Law, disait Lawrence Lessig56. En réalité, l'utilisateur n'est jamais dépossédé de son libre arbitre, Michel Foucault affirme qu'il y a toujours une marge de liberté, les

56 Lawrence Lessig, Code is Law - On Liberty in Cyberspace, 1999

 

CORDEAU Clémence| Mémoire de master 1 | juin 2015

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personnes qui exercent un pouvoir incitent les autres à faire quelque chose. C'est la logique du faire-faire, le pouvoir se trouve dans l'action mais il peut toujours y avoir négociation. Le code fonctionne de la même manière, nous sommes toujours, en tant qu'internautes, contraints par le code, la façon dont le site a été agencé pour nous faire-faire des choses : partager une photo, partager un statut, partager une vidéo, réagir sur un partage par un like ou un commentaire (qui n'est autre qu'un partage de point de vue). Vous trouvez que le mot « partage » revient souvent ? C'est parce que le « Share » est omniprésent dans les réseaux socionumériques. Toute la construction de ces sites a été pensée pour faciliter et amplifier les partages de contenus. Aujourd'hui, le pouvoir n'est plus dans l'interdiction d'une action mais dans ce qu'il est rendu possible de faire. Les stratégies élaborées par un site tel que Facebook influencent les comportements de ses usagers à travers des outils techniques, le design est un des résultats de ces stratégies. Puisqu'on décide des caractéristiques par laquelle l'action va être possible, on oriente les comportements. La contrainte n'est plus ce qui limite l'action mais ce qui la rend possible. Pour s'en rendre compte, une analyse de la page d'accueil de Facebook a été faite.

! Accueil du site : en haut, au milieu : barre de statut dans laquelle est inscrit « Exprimez-vous »57 à l'intérieur (phrase qui s'éclairci quand on y met le curseur et s'efface quand on commence à écrire), puis on choisi dans l'onglet de cet encadré si on veut poster un statut (par défaut) ou partager une photo ou une vidéo, trois choix s'offrent alors à nous : « télécharger des photos/vidéos » ; « Ajouter des photos synchronisées » ; « créer un album photo ». Cet encadré est donc destiné à faire partager nos contenues personnels à nos amis.

! Dans la Timeline / le fil d'actualités, s'entremêlent publications d'amis et publications de pages que l'on a aimé.

57 On note ici l'importance de l'usage de l'impératif

 

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- Dans le cas des publications de nos amis, si c'est un statut ou une photo (que ce soit photo de profil ou photo partagée), on peut aimer, commenter et/ou partager. On peut également réagir dans le commentaire avec ce que Facebook appelle un « autocollant » (gros émoticône proposé et fait par le site, des marques ou des studios de production (dessins animés, films mais de toute façon toujours cautionnés par Facebook) ou une photo.

- Dans le cas des publications des pages que l'on a aimé, ce sont en général des liens qui sortent de Facebook lorsque l'on clique sur le lien par ordinateur, si c'est par téléphone via l'application Facebook donc hors web, on reste sur la plateforme Facebook. Le dispositif reste le même, on nous propose d'aimer, de commenter et/ou de partager, si on veut partager une fois que l'on a cliqué sur le lien on peut copier l'adresse URL de la page et la coller dans l'encadré de statut sur Facebook, ainsi la page se charge « aux normes » de Facebook et on peut également partager ce que l'on pense du contenu partagé. Ainsi nos amis seront incités également à réagir et/ou à repartager le lien lorsqu'ils le verront apparaître sur leur Timeline.

A côté des icônes « J'aime », « Commenter », « Partager », dès la première réaction est indiquée le nombre de chacune de ces actions comme sur la capture d'écran ci-dessous :

Ainsi, likes, commentaires et partages font office d'indicateur de popularité sur Facebook. Les liens pour réagir et les indicateurs sont d'ailleurs séparés car les icônes sont simplement là pour indiquer le nombre de réactions. Ce faisant, le site Facebook attire plus de monde, de réaction et de partage, c'est une boucle sans fin dans laquelle l'internaute a intérêt à partager et à réagir pour avoir des réactions en retour. On remarque d'ailleurs que plus un usager est actif, plus il aura un réseau

 

CORDEAU Clémence| Mémoire de master 1 | juin 2015

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important de groupes homogènes et par un effet boule de neige, de réactions.

On l'a vu, l'espace socionumérique favorise le partage. Ces outils techniques mis à notre disposition sont des configurations sociotechniques qui favorisent ainsi le partage. En un clic et quelques secondes, un contenu peut faire le tour de tous nos amis voire du monde, c'est la viralité des contenus, conséquence de cette culture du « Share ». Néanmoins, on peut se demander si ces partages sont davantage un généreux don de soi, ou une démonstration c'est-à-dire une construction réfléchie de son identité, pas un mensonge mais une version embellie de sa personnalité, une mise en scène du corps qu'Antonio Casilli appelle un « projet de soi », une quête de soi qui passe par la quête d'un corps idéal. « L'identité numérique est-elle une coproduction où se rencontrent les stratégies des plateformes et les tactiques des utilisateurs ? »58.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand