UNIVERSITE DE ZIGUICHOR
U.F.R. des Sciences Economiques et Sociales
Département de Droit des Affaires
Mémoire de Licence:
Sujet : La Volonté des
Parties et Le forçage du contrat
Présenté par : Cheikh Mohamed Fadel
Dieng,
Etudiant en Licence 3 Droit des Affaires /
Mat:10EDA0032
N°1723
Sous la direction de : Dr. Diélya Y. W.
Ba,
Maitre-Assistant Associé à
l'Université de Ziguinchor
Année Universitaire : 2011/2012
Sommaire:
_ Remerciements
_ Dédicaces
_ Liste des abréviations _
Introduction
_ Titre 1 : La volonté des parties et le
contrat
_ Chapitre 1 : La volonté des parties dans l'avant
contrat
_ Chapitre 2 : La volonté des parties dans la
formation du contrat
_ Titre 2: Le Forçage du contrat: l'atteinte
à la volonté des parties
_ Chapitre 1 : Un aperçu sur le Forçage du
contrat
_ Chapitre 2 : Le forçage du contrat
effectué par le Juge
Remerciements:
Je remercie tout d'abord le bon DIEU de m'avoir donné
la force et le courage de réaliser ce modeste travail.
Ensuite, j'associe à mes remerciements Tous les membres
de ma famille qui n'ont pas cessé de me soutenir spirituellement,
financièrement... et d'apporter toutes leurs compréhensions,
conseils et aides durant tout le cour de la vie de mes études.
Mes remerciements iront aussi à tous ceux qui m'ont
soutenu de près ou de loin pour la réalisation de ce
mémoire, surtout à ceux qui ont aménagé tous leur
effort tant matériel que financier pour la réalisation de ce
travail.
Je remercie également l'ensemble du corps professoral
du Département de Droit des Affaires, notamment mon professeur encadreur
Mme Ba pour sa disponibilité, sa compréhension et ses louables
explications ; à l'administration de l'université de Ziguinchor,
à la Bibliothèque et le centre de documentation des Sciences
Juridiques et Politiques de l'université Gaston Berger de
Saint-Louis.
Je ne saurais terminer mes remerciements sans pour autant
remercier tous mes amis, mes compagnons et tous ceux que je connaisse.
Je vous dis à tous, du plus profond de mon coeur, merci
!
Dédicace: A ma mère...
Je dédie ce mémoire à tous les membres de
ma famille, ainsi qu'à tous ceux que je connaissent et qui me
connaissent également.
Liste des abréviations:
Al: Alinéa
Art: Article
Bull: Bulletin
CA: Cour d'Appel
C. Cass: Cour de Cassation
C. Civ: Code Civile
Civ. :civil
C. Com. : Chambre Commercial
Doc : Document
COCC : Code des Obligations Civiles et Commerciales
Cod : code
Cons. : Consommateur
Ed : Edition
Juris : Jurisprudence
Org : Organisation
TGI : Tribunal de grande Instance
INTRODUCTION
Lorsque plusieurs individus manifestent leur volonté de
s'engager les uns vis-à-vis des autres, la rencontre de ces
différentes volontés sera source d'obligations pour eux ; on
parlera de convention, la convention étant l'accord de volonté de
deux ou plusieurs personnes destiné à produire des effets de
droit. Ces effets que sont susceptibles de produire les conventions sont
multiples. Mais lorsque la convention a pour fonction de créer des
obligations, alors on parle plus précisément de contrat.
Source principale d'obligations, le contrat est une convention
par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent, « envers une ou
plusieurs autres, à donner, à faire, ou à ne pas faire
quelque chose » cf. POTHIER, (Obligations, n° 3). De ce
fait, il est un « Accord de volonté générateur
d'obligation » Art 40 C.O.C.C.
« Il ne saurait y avoir de contrat sans convention »
(D., 2, 14, 1, 3), affirme, au début du II° siècle
après J.-C., le juriste Pédius.
Le contrat exige donc un concours de volontés qui
crée des liens juridiques entre les parties. La volonté est, de
ce fait, l'élément central de la notion d'acte juridique, et ce
depuis le droit de l'antiquité.
Elle est donc nécessaire à l'engagement
juridique, car pour s'engager il faut être au moins deux : celui qui
promet (le débiteur) ou qui fait une offre et celui qui reçoit la
promesse (le créancier) ou l'accepte. C'est cette rencontre des
volontés qui forme le contrat.
Généralement lorsque deux personnes
décident d'un commun accord d'élaborer un contrat, elles
entendent fixer les effets qui seront attachés à ce contrat, et
uniquement ces effets.
Ainsi, le contrat ne peut pas produire d'effet à
l'égard des tiers, c'est-à-dire que les effets du contrat se
produisent dans la sphère des parties au contrat sauf convention
contraire (Art. 110 al. 1 du C.O.C.C. « Le contrat ne produit
d'obligations pour les tiers que dans les cas prévus par la
loi.»)
Ceci a pour conséquence que seules les parties au
contrat, mais d'une manière conjointe, peuvent défaire ce
qu'elles ont fait (Art.42 du C.O.C.C.).
L'autre conséquence tient au fait que le contrat et son
contenu s'impose non seulement aux parties mais aussi au juge, dans le sens,
qu'il ne peut pas le dénaturer ; « le juge en somme est au service
du contrat ».
Cependant depuis longtemps, le législateur et le juge
interviennent dans le contenu obligatoire du contrat en imposant
parfois certaines obligations aux parties. C'est alors que certains
auteurs qualifient de « forçage du
contrat » le phénomène jurisprudentiel de
développement du contenu obligatoire du contrat par le juge.
La précarisation du lien contractuel est sans doute
l'effet le plus dangereux du dirigisme contractuel.
Si le contrat perd sa force astreignante, alors il n'a plus de
raison d'être.
C'est peut-être pour toutes ces considérations qu'on
nous pose le sujet suivant : « la volonté des parties et le
forçage du contrat ».
La volonté des parties au contrat implique le désir
dans le fort intérieur de se lier ou la liberté de consentir
à un contrat ; tandis que le « forçage » du
contrat est une adjonction par le juge d'une obligation dans le contrat, non
stipulée par les parties.
La combinaison de ces deux définitions nous conduit
à dire que ce sujet met en exergue le contraste qui existe au tour du
phénomène de la souveraineté de la volonté des
parties à un contrat.
Alors, les questions qui pourraient ressortir de ce sujet
seraient de savoir : pourquoi se mêle-t-on d'un contrat auquel on
n'aurait pas pris part depuis sa formation? Et comment peut-on se permettre
d'imposer aux parties des obligations qu'elles n'auraient même pas
prévues ? .Donc, pour ce sujet, il s'agira d'examiner la
volonté des parties au contrat, mais surtout son atteinte que l'on
qualifie souvent de forçage du contrat.
Ce sujet présente un double intérêt : d'abord
théorique, en ce sens que les notions qu'il contient ont fait l'objet de
vives controverses doctrinales et ensuite pratique puisque la
protection des parties rend de plus en plus nécessaire
l'intervention du juge dans la volonté
des parties, mais aussi en ce sens que ce sujet demeure de nos
jours une réalité concrète prévue par les lois en
vigueurs.
Etant donné que le processus contractuel requiert le
consentement des contractants qui est encadré par la loi mais n'excluant
pas ainsi l'intervention du juge pour édifier la volonté des
parties, c'est pourquoi dans le cadre de notre développement de ce
sujet, nous examinerons tour à tour : La volonté des parties et
le Contrat (Titre 1) d'une part et d'autre part l'atteinte à cette
volonté des contractants ou le forçage du contrat (Titre 2).
Titre1 : La volonté des parties et le contrat
Selon la théorie classique, remontant à l'ancien
droit, et qui régnait encore indiscutablement pendant le XIX°
siècle, la volonté est l'élément fondamental des
contrats.
Une observation étymologique du mot partie, permet de
savoir qu'il provient du mot « partir » dans son sens de partage : la
partie est la personne qui « prend part » au contrat et à
l'opération qu'elle organise, donc cette qualification s'applique
à tous ceux qui, en personne, ont donné leur accord au
contrat.
Dès lors, l'importation de la volonté des
parties dans le processus contractuel peut être perçue sous deux
angles ; c'est-à-dire avant (Chapitre1) et dans la formation de celui-ci
(Chapitre2).
Chapitre1 : La volonté des parties dans l'avant
contrat
La volonté des parties dans l'avant contrat traduit
l'idée qui justifie le contrat et la raison qui permet de comprendre les
processus de négociation du contrat.
Déjà en 1893, Durkheim écrivait que
« les engagements contractuels sont ceux qui ont été voulus
par les individus et qui n'ont pas d'autre origine que cette libre
volonté ». Ainsi était exprimée la vision du
sociologue sur le principe de l'autonomie de la volonté quant aux
contrats.
Néanmoins, à la même époque, la
doctrine s'est dressée contre cette vision du contrat en
instaurant la Théorie de l'autonomie de la volonté (Section 1).
Aussi, il parait intéressant de faire le point sur les phases de
négociation entrant dans le processus précontractuel et qui ont
déchainé depuis un certain nombre d'années, le
mécanisme des phases précontractuelles (Section 2).
Section 1 : la théorie de l'autonomie de la
volonté
La conception du contrat dépend essentiellement des
idées dominantes d'une époque : philosophique, morale ou
économie. Selon que l'on vit une période libéral ou
dirigiste, la conception du contrat varie. La théorie libérale de
l'autonomie de la volonté est une théorie de philosophie
juridique qui est apparu tout d'abord chez Grotius (XVIII° siècle)
et ses successeurs, mais elle se développe surtout sous l'influence du
libéralisme politique des philosophes du XVIII° siècle
(Rousseau et le « Contrat Social ») et du libéralisme
économique du XIX° siècle (Kant), elle repose
essentiellement sur l'idée de liberté individuelle.
Apres avoir exposé cette théorie (§1), les
arguments sur lesquels elle repose et ses conséquences, nous verrons
qu'elle est actuellement en évolution (§2), du moins à s'en
tenir à son rôle dans le contrat sous sa forme traditionnelle
§1 : Exposé de la théorie de
l'autonomie de la Volonté
Affirmer que la volonté est autonome, c'est accepter
que la volonté des contractants crée, à elle seule, le
contrat et tous les effets qui en découlent.
Nous examinerons sur quels arguments (A) s'appuie-t-on pour
admettre une telle assertion et éventuellement leurs conséquences
(B)
· Les arguments de la théorie de l'autonomie de
la volonté
Ils ont de trois ordres : philosophiques, moraux et
économiques.
Sur le plan philosophique, on part d'un postulat qui est
celui de la liberté des individus : en principe, personne ne doit rien
à personne. Afin d'assurer la liberté de chacun, un lien
d'obligations ne peut naitre que s'il a été voulu.
On reconnait les idées de J. J. Rousseau à la
base de cette philosophie avec son célèbre « contrat
social »
Sur le plan moral, le contrat, oeuvre des volontés, est
conforme dit-on, aux intérêts des parties contractantes. Nul ne
peut vouloir ce qui n'est pas conforme à ses intérêts.
C'est en peu de mots la thèse soutenue par Kant. Cela conduit à
l'équilibre des intérêts des contractants. Selon
Fouillée, un philosophe du XIX° siècle, « qui dit
contractuel, dit juste ».
Sur le plan économique, l'autonomie de la
volonté est le meilleur moyen soutient-on_ d'assurer la
prospérité générale. L'intérêt
personnel est le moteur essentiel de la vie économique. Pour s'exprimer,
s'épanouir, la volonté d'entreprendre doit être
libérée de toute entrave. Le libre jeu des volontés
particulières assure le maximum de production, les prix les plus bas,
par suite de la libre concurrence, donc, le bonheur du plus grand nombre !
Cependant ces arguments ont des conséquences qu'il
importe de voir.
· Les conséquences des arguments de la
théorie de l'autonomie de la volonté On peut en indiquer les
plus importantes :
D'abord, le contrat est la source principale des obligations
(Art. 40 C.O.C.C.). Il est l'origine la plus importante des rapports
obligatoires. Il suffit de considérer la table des matières du
C.O.C.C. pour voir que tel était la conception de ses
rédacteurs.
Ensuite, le caractère supplétif des lois en
matière contractuel s'applique parce que les parties l'ont voulu ; elles
interprètent donc leurs volontés et peuvent donc d'un commun
accord, les écarter et donner à leur contrat un contenu
différent, des effets différents de ceux qui sont indiqués
dans ces lois. Elles peuvent même créer des contrats non
prévus par la loi.
Les conséquences de cette théorie nous permet de
découvrir qu'elle a subit une évolution.
§2: L'évolution de la théorie de
l'autonomie de la volonté
Sous sa conception qui vient d'être exposé,
cette théorie est en évolution du fait qu'elle est un mythe en
péremption. L'évaluation de cette dernière peut avoir deux
origines: D'un côté le déclin qu'elle a subit(A), et d'un
autre, le concept contractuel a connu un nouvel essor (B).
· Le déclin de la théorie de l'autonomie
de la volonté
Du fait de la loi qui vient s'imposer aux parties du contrat
fait passer au second plan la volonté des parties et ce depuis 30 ou 40
ans...
Dès le XIX° siècle, un certain nombre de
penseurs s'écartent du mouvement libéral et vont s'opposer
à Fouillé, notamment Lacordaire : « Entre le fort et le
faible, c'est la liberté qui asservit, la loi qui libère.
» La plus grande liberté laissée aux contractants sera
en toute circonstance de nature à profiter à l'un d'eux au
détriment de l'autre. Elle profitera en effet au contractant en
situation de domination, et cette liberté viendra donc se retourner
contre le plus faible. Lacordaire dit que cette liberté qu'on
prône souvent est un leurre du type « du renard dans le poulailler.
» La liberté selon lui crée des inégalités et
ce qui va venir rééquilibrer le rapport contractant, c'est la
loi. Les grands principes de liberté demeure valables entre deux
particuliers par exemple, mais, là où ils volent en
éclats, c'est entre des rapports hiérarchiques avec un
déséquilibre initial. La tendance du droit du XXe
siècle a été une tendance au
rééquilibrage contractuel. Le législateur va donc
intervenir de plus en plus souvent réduisant le principe de l'autonomie
de la volonté.
C'est ainsi que cette dernière sera
délaissée au profit d'une nouvelle vision du monde
contractuel.
· Un nouvel essor du concept contractuel
Il résulte qu'il n'est plus possible d'expliquer la
force obligatoire du contrat par le principe de l'autonomie de la
volonté. La doctrine récente en a proposé deux :
Il y a un courant doctrinal qui propose une conception dite
« solidariste du contrat ». Dans la mesure du possible le contrat
doit être conçu comme un outil de coopération entre les
parties.
Cette conception légitime l'essor du devoir de bonne
foi dans le droit positif. Si l'on veut que les parties coopèrent il
faut nécessairement qu'elles adoptent un comportement loyal et non pas
un comportement égoïste. On lui reproche l'interventionnisme
judiciaire, c'est à dire donc intervention du juge dans le contrat. En
effet admettons que les parties ne se conforment au devoir de
coopération, dans ce cas il faudra alors que le juge intervienne pour
forcer les parties à coopérer.
Selon le 2nd courant doctrinal : la justification
de la force obligatoire du contrat doit être recherchée dans la
personne du créancier. Classiquement on met le projecteur sur le
débiteur. La force obligatoire du contrat repose sur le respect de la
parole donné par le débiteur. La force obligatoire ne doit plus
être recherchée du point de vue du débiteur. La force
obligatoire du contrat repose sur les attentes légitimes du
créancier.
Passons à présent à l'étude des
phases précontractuelles.
Section 2: Les phases précontractuelles
Il parait connaitre au bon sens, qu'avant la formation d'un
contrat, d'où la volonté n'est pas encore exprimé, que les
parties soient en phase de négociations, soit elles forment un contrat
préétablie, soit ces négociations les conduisent à
la conclusion du contrat proprement dit. Ces étapes ne sont pas
obligatoires mais précèdent souvent certains contrat surtout
important. Elles peuvent être scindées en deux phases : les
pourparlers (§1) et les promesses de contrat (§2) ou avant
contrat.
§1 : Première phase : Les pourparlers
Les parties peuvent discuter, voir négocier certains
termes du contrat. Dans ce cas, elles ne sont pas encore engagées et
donc le contrat n'est pas encore formé, car elles n'ont pas encore
exprimées leurs volontés.
Analysons cette forme de négociation (A) avant de voir sa
rupture (B).
· Les pourparlers
D'après Carbonnier: « C'est la phase
préliminaire où les clauses du contrat sont
étudiées et discutées ». Il n'y a pas encore de
contrat formé, il se peut même qu'il n'y ait pas encore eu d'offre
de contracter prête à être acceptée telle quelle,
seulement des propositions et des contrepropositions.
D'après Ghestin, entre l'initiative que constitue
l'entrée en pourparlers ou l'offre, et la conclusion d'un contrat, se
situe souvent une période précontractuelle qui peut être
parfois de
longue durée. C'est la période des pourparlers
dont la consultation peut servir à l'interprétation du
contrat.
C'est une période dans laquelle les parties n'ont pas
encore contracté. Elles viennent tout juste de débuter leur
discussion. Le contrat est simplement envisagé.
Les pourparlers peuvent ou non amener les parties à
s'engager définitivement.
· La rupture des pourparlers
La question est de savoir si l'une quelconque des parties
peut se dégager en rompant les pourparlers sans aucune
conséquence juridique. La réponse est positive, le principe
étant la liberté de rupture des pourparlers.
Chaque partie peut s'en sortir sans que sa
responsabilité soit engagée sauf, lorsque la rupture a
été brutale ou intempestive, ou marquée d'une
légèreté blâmable. En d'autres termes, c'est lorsque
celui qui prend l'initiative a abusé de sa liberté de rompre les
pourparlers.
La rupture des pourparlers peut en principe intervenir
à tout moment, sur décision unilatérale d'une partie.
Cette liberté, imposée par l'autonomie de la volonté ne
doit pas cependant autoriser la légèreté ou la mauvaise
foi.
Aussi admet-on que l'auteur de la rupture engage sa
responsabilité civile s'il abuse de cette faculté.
Cette éventuelle responsabilité est de nature
délictuelle, aucun contrat n'ayant été conclu entre les
parties, et ceci en dépit de la théorie de Ihering sur la faute
contractuelle aujourd'hui fermement condamnée par la cour de
cassation.
Passons à présent à la deuxième
phase.
§2 : Deuxième phase : la promesse de
contrat ou l'avant contrat
La promesse de contrat est un véritable contrat ayant
pour but la conclusion d'un deuxième contrat.
C'est ce qu'on appelle aussi l'avant contrat qui est un
accord pour lequel un ou les deux parties s'engagent à contracter par la
suite dans certaines conditions.
Il peut s'agir d'une promesse unilatérale (A) ou
synallagmatique de contracter (B).
· Promesse unilatérale
Ici, une des parties est déjà engagée.
Son engagement se traduit par la promesse faite à l'autre partie que
l'on appelle bénéficiaire de conclure un contrat
déterminé à des conditions déterminées. Seul
le promettant est engagé, le bénéficiaire de la promesse
lui n'est tenu à aucune obligation. On dit qu'il a une option, soit
conclure le contrat à la date convenue avec
le promettant, on dit alors qu'il a levé l'option ;
soit ne pas conclure le contrat et dans ce cas on dit qu'il n'a pas levé
l'option.
Toutefois, il peut arriver que la promesse unilatérale
soit accompagnée d'une clause de dédit ou clause d'immobilisation
en vertu de laquelle si le bénéficiaire ne lève pas
l'option, il sera condamné à payer au promettant une
indemnité de dédit ou d'immobilisation.
Qu'en est-il de la promesse synallagmatique?
· promesse synallagmatique
Ici, les deux parties sont toutes deux déjà
engagées. En fait, il ne reste qu'à finaliser le contrat
définitif. Généralement, on rencontre une telle promesse
dans les contrats complexes qui nécessitent souvent un certain
formalisme. Comme les deux parties sont déjà engagées,
lorsque l'une d'elles ne s'exécute pas, on peut l'y contraindre par la
force.
Au-delà de cette période, le contrat va être
définitivement scellé.
Chapitre 2 : La volonté des parties dans la
formation du contrat
L'école libérale voyait dans la volonté
la source essentielle des obligations et prétendait laisser la plus
grande liberté aux individus. Contre cette conception, les écoles
sociales ont affirmé que la volonté était à elle
seule impuissante à jouer ce rôle, que la société et
non l'individu, créait le droit et que la volonté devrait
être contrôlé.
Sur le plan du droit positif, la pleine liberté
contractuelle n'est pas concevable car les rédacteurs du C.O.C.C. Lui
ont fixé des barrières.
Ainsi, il conviendra, tout d'abord, de rechercher l'examen du
consentement en lui-même, de son existence (Section1), avant de
démontrer qu'il y'a des restrictions à la liberté des
contractants (Section2).
Section 1 : L'existence du consentement
Il est d'intérêt de noter que le consentement
joue un rôle considérable dans la formation des contrats. Le COCC
envisage, d'ailleurs, son existence : « Le consentement doit
émaner d'une personne jouissant de ses facultés
intellectuelles» (Art. 59).
Ainsi, considérer l'existence du consentement,
implique d'une part, l'étude de l'expression de la volonté
(§1) de chacune des parties, d'autre part, celle de l'accord des
volontés (§2)
§1 : L'expression de la volonté
La validité du contrat passe nécessairement par
la volonté des parties contractantes. Ce phénomène
représente l'acte psychologique de la validité du contrat qui n'a
de valeur juridique que par sa manifestation. En réalité, il est
composé de deux éléments : la volonté réelle
ou l'opération intellectuelle (A) et son extériorisation
d'où la volonté exprimée (B).
· La Volonté réelle ou l'opération
intellectuelle
Elle nécessite d'une part, la conscience de ce l'on va
faire et d'autre part, l'intention de le réaliser. Cela explique le
besoin de cette autre condition de validité des contrats qui est la
capacité. En effet, la volonté doit émaner d'une personne
consciente, ce qui exclut l'enfant en bas Age, l'aliéné et
même toute personne sous l'empire d'un trouble mental, comme en cas
d'ivresse ou d'hypnose.
En outre, la volonté, nous l'avons dit, doit
être effective, réelle, sérieuse. La personne doit avoir
réellement voulu contracter et non agir par plaisanterie. C'est ainsi
que lorsque les parties ont conclu un acte apparent destiné à
déguiser un autre acte, seul l'acte véritable aura valeur
juridique entre les parties. La volonté doit être libre et
consciente.
· La volonté exprimé ou
l'extériorisation de la volonté
La manifestation de la volonté est celle qui
résulte d'une parole ou d'un écrit. Le plus souvent ce sera un
écrit, acte authentique ou sous seing-privé, sur support papier
ou sur support électronique (rappelons qu'ils constituent des modes de
preuves, preuves parfaites, V Tome 1) mais aussi bien une lettre, un
télégramme, une annonce dans un journal, une affiche, etc.
(preuves parfaites).
En revanche, la manifestation de volonté peut
n'être que tacite, lorsqu'elle découle d'un acte qui implique
l'existence de la volonté. C'est le cas de la tacite reconduction du
bail : le locataire demeure dans les lieux, manifestant ainsi sa volonté
de prolonger le bail.
Passons en revue l'accord des volontés.
§2 : L'accord des volontés
C'est le concours des volontés qui scelle le
véritable contrat dispose l'art 40 du C.O.C.C. Dès lors, un
contrat peut être conclu lorsqu'une pollicitation ou offre, ferme non
équivoque, précise et complète, émanant de l'une
des parties contractante est accepté par l'autre d'une manière
explicite, non équivoque et sans réserve. Tout contrat comporte
cette double démarche. Quelques observations sur cette offre ou
pollicitation (A) et ensuite sur l'acceptation (B).
· L'Offre ou la pollicitation
C'est une déclaration unilatérale de
volonté par laquelle l'offrant, encore appelé pollicitant, fait
savoir son intention de conclure un contrat déterminé à
des conditions déterminées. Pour être
considérée comme offre, cette déclaration
unilatérale de volonté doit revêtir certains
caractères.
En premier lieu, il faut préciser que l'offre ou la
pollicitation peut être faite à personne déterminée
ou au public. Cette offre doit être ferme, précise et non
équivoque. Elle doit renfermer les éléments essentiels du
contrat. En principe, elle doit être assortie d'un délai avant de
pouvoir être rétractée. Ce délai peut être
expressément convenu. Mais si tel n'est pas le cas, il peut
résulter des circonstances, donc être implicite. Tant que le
délai n'est pas expiré, l'offrant ne peut retirer son offre.
Mais, l'incapacité ultérieure ou le
décès du pollicitant rendent caduques l'offre.
Voyons maintenant ce qi en est avec l'acceptation.
· L'Acceptation
C'est le second terme de l'accord. C'est la réponse
positive apportée par le destinataire à l'offre de contracter.
Elle doit être identique à tout point de vue à l'offre.
Elle peut être expresse ou tacite, elle doit être précise et
non équivoque. Et, elle ne doit pas être accompagnée de
réserves sinon, il s'agit d'une contre-offre ou d'une
contre-proposition. L'acceptant devient nouvel offrant parce que du fait de la
réserve ou de la modification de l'offre, les rôles vont
être renversés.
Section 2 : Les restrictions et l'existence du
consentement
Permettre aux hommes de contracter comme ils l'entendent est
le moyen d'établir entre eux les rapports les plus justes et les plus
utiles. Les hommes présumés libres et égaux, ne doivent
pas cependant conclure des contrats qui dérogent à l'Ordre Public
et les Bonnes Moeurs, mais il y'a aussi certain contrat qui peuvent être
imposé.
Ainsi, si certains contrats sont forcés (logement,
Assurance voiture) d'autres sont interdits par la loi, le plus souvent pour
protéger le consommateur.
Pour mieux étaler cette section, faisons le point sur
les limitations des parties de déterminer le contenu du contrat
(§1) d'une part et d'autre part, sur l'évolution de ces
dernières (§2).
§1:Les limites à la liberté des
parties de déterminer le contenu du contrat
De nos jours, des restrictions sont apportées à
la liberté contractuelle dans la mesure ou la notion d'ordre Public
s'est étendue, ou la loi impose aussi parfois l'ossature du contrat aux
contractants.
C'est ainsi que pour ce présent paragraphe, nous
verrons que l'ordre public et les bonnes moeurs sont protégés
(A), mais aussi que l'armature du contrat peut parfois être
imposée aux contractants (B).
· La protection de l'Ordre Public et des Bonnes Moeurs
En droit des contrats, l'un des principes fondamentaux est la
liberté contractuelle. Sans ce principe, le contrat (qui est la
rencontre de volonté génératrice d'obligation)
passé serait nul. Ce principe est reconnu à l'art 42 du C.O.C.C.
« Libres de contracter ou de ne pas contracter, d'adopter toute
espèce de clauses de modalités, les parties ne peuvent cependant
porter atteinte par conventions particulières à l'ordre public ou
aux bonnes moeurs Ainsi celui qui contracte a la faculté de
contracter ou pas, cela en fonction de différentes raisons. Mais ce
principe connaît bien des limites. En effet pour qu'un contrat soit
valable il doit être licite c'est à dire conforme à la loi)
comme il est rappelé à l'article 76 du C.O.C.C. La cause du
contrat (qui est la raison pour laquelle le contrat est conclu). Mais on doit
également inclure la cause de l'obligation (qui correspond à
l'objet de l'obligation du cocontractant) doivent être conforme à
l'ordre public et aux bonnes moeurs qui correspondent à l'ensemble des
exigences fondamentales considérés comme essentielles au
fonctionnement des services publics, au
maintien de la sécurité et de la
moralité. L'ordre public est la norme impérative dont les
individus ne peuvent écarter ni dans leurs comportements ni dans leurs
conventions. L'on est donc en présence ici de règles
jugées essentielles à l'intérêt
général interdisant de ce fait aux conventions d'y
déroger.
· L'armature du contrat imposé aux parties
Le contrat s'impose au législateur. Toutefois, il peut
intervenir parfois dans un souci de protection des intérêts
particuliers en imposant aux parties, dans certains contrats, l'ossature du
contrat.
Ainsi, les intérêts particuliers sont
protégés au détriment de la liberté contractuelle.
Par ailleurs, la loi impose des formalités à défaut
desquelles le contrat est nul. Les contrats solennels et réels doivent
être soumis à certaines formalités, faute de quoi ces
contrats ne seront pas valables même si la volonté des parties
était manifeste. Ce formalisme a pour but la protection des parties.
Certains contrats, comme les contrats de mariages qui sont soumis à
publicité, comme condition de leur opposabilité aux tiers.
§2 : L'évolution des limites
imposés aux parties
Les limites imposées aux parties ne sont pas
prévue ex nihilo par le législateur. Ce dernier les a
édictée afin qu'elles puissent rétablir l'équilibre
social dans le processus contractuel mais aussi afin de protéger les
parties les plus faibles dans un contrat.
Pour toutes ces raisons, le législateur va asseoir des
mesures qui consisteront à réprimer les contrats qui
dérogent aux limites imposés aux parties.
L'étude de ce présent paragraphe passera
d'abord par l'examen du sort du contrat non conforme à l'Ordre Public et
aux Bonnes Moeurs (A) et ensuite par l'analyse des clauses abusives (B).
· Le sort du contrat non conforme à l'Ordre
Public et aux Bonnes Moeurs
· On a d'abord retenu le critère du risque de
l'acte et aujourd'hui on considère que ce qui compte est la nature des
intérêts en jeu. S'agit-il de protéger des
intérêts particuliers ou s'agit-il de protéger
l'intérêt général ? La nullité est relative
lorsque la règle qui n'a pas été respectée
était destinée à protéger un intérêt
particulier. Il en est ainsi lorsque ne sont pas respecter les règles
relatives à l'incapacité, les conditions relatives au
consentement, les conditions relatives à l'exigence de la cause (civ 1,
9 novembre 1999). « La nullité est absolue lorsque la
règle non respectée était destinée à
protéger les tiers ou l'ordre public autrement dit
l'intérêt général ».
· Il est exigé que les offres de contrat soient
présentées en langue française lorsqu'elles sont
présentées à des consommateurs. On se dit d'une part que
la règle ici violée est une règle qui était
destinée à protéger les consommateurs. La cour de
cassation française (Crim, 20 octobre 1986) a considéré
qu'il s'agissait d'une nullité absolue car elle a estimé que,
outre la protection du consommateur, il s'agissait ici de protéger la
langue française.
· Les clauses abusives
· Le droit de la consommation a bouleversé bon
nombre de comportements prévoyant de règles dérogatoires
au droit commun dans les rapports entre consommateurs et professionnels. Dans
les contrats conclu entre professionnels et non professionnels (ou
consommateurs), sont abusives, les clauses qui ont pour objet ou pour effet de
créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un
déséquilibre significatif entre les droits et obligations des
parties au contrat. Ce qui institue une réglementation des clauses
abusives qui peut être réduite à la nullité de la
cause. Est déclarée comme non écrite toute clause qui
aurait l'effet de créer un déséquilibre significatif entre
les droits et obligations.
· Après avoir terminé avec la
volonté des parties et le contrat, allons voir l'atteinte à la
volonté de ces dernières.
Titre 2 : Le Forçage du contrat ou l'atteinte
à la volonté des parties
Les parties sont libres de s'engager mais si elles
s'engagent, elles doivent se tenir à leur engagement, la loi y contribue
en conférant une force à l'engagement valablement formé.
L'art. 96 du C.O.C.C. pose un principe sacro-saint selon le lequel :
«Le contrat légalement formé crée entre les
parties un lien irrévocable». Ce qui implique donc que «
ce la volonté commune a fait, seul la volonté commune peut la
défaire ».
Ceci a pour conséquence que seules les parties au
contrat, mais d'une manière conjointe, peuvent défaire ce
qu'elles ont fait. Autre conséquence : le contrat et son contenu
s'impose
non seulement aux parties mais aussi au juge, dans
le sens, qu'il ne peut pas le dénaturer ; le juge en somme est au
service du contrat.
Cependant il peut arriver que le contrat soit mal
rédigé qu'il soit équivoque ambigu obscure ou
imprécis à telle enseigne que chaque partie en a une lecture, une
compréhension différente, mais aussi elles peuvent rester
silencieuses et dans ce cas le juge va devoir se livrer à une
interprétation de ce dernier.
C'est à partir de ce moment que l'on porte atteinte
à la volonté des parties dont Josserand parle de «
forçage du contrat » car la recherche artificielle de la
volonté des parties va être délaissée laissant place
à la charge des parties de nouvelles obligations non contenues dans le
document contractuel.
Etant donné que le forçage du contrat est un
produit de la jurisprudence selon la doctrine, c'est dans cette optique que
l'étude de ce présent titre passera tour à tour à
un aperçu sur la théorie du forçage du contrat (chapitre1)
et au forçage du contrat effectué par le juge (chapitre2).
Chapitre1 : Un aperçu sur le forçage du
contrat
Il arrive parfois que le contrat légalement
formé rencontre des difficultés qui peuvent entrainer sa
paralysie dans son exécution.
Théorisé par la doctrine, exposé par les
lois et usages ; et mis en oeuvre par le juge, le forçage du contrat
écarte la volonté des parties tout en amenant le juge à
rétablir l'équité entre les contractants.
Dès lors, il appartiendra à ce dernier de combler
les lacunes des parties de diverses manières. Cet aperçu sur le
forçage du contrat nous conduira à examiner son fondement
(section1) et sa portée (section2).
Section1 : Les fondements de la théorie du
forçage du contrat
La théorie du forçage du contrat a
été présentée par la doctrine comme étant
une interprétation du contrat qui vise à encadrer la
volonté des parties.
De ce fait, elle tire son origine de la jurisprudence, des
lois et usages dans lesquels le juge parvient parfois difficilement à
rétablir l'ordre contractuel.
Pour mieux étaler les fondements de cette
théorie, voyons d'abord ses sources (§1) avant de voir les effets
pernicieux du dirigisme contractuel (§2).
§1 : Les sources de la théorie du
forçage du contrat
Cette théorie est une création purement
jurisprudentielle qui est intervenue pour combler le vide du fait du silence
des parties sur certains points du contrat.
Dans ce cas, pour essayer de savoir ce qu'aurait dit les
contractants s'ils ne s'étaient pas abstenus, le juge pourra se
référer à l'usage et à l'équité.
Ainsi, nous nous accentuerons sur cette création
d'ordre jurisprudentielle (A) ainsi qu'aux autres sources
précitées (B), pour mieux analyser les sources de la
théorie du forçage du contrat.
· Le forçage du contrat : une création
purement jurisprudentielle
« La théorie du forçage du contrat est due
à un arrêt de la Cour de cassation en date du 21 novembre 1911. En
l'espèce, il s'agit d'un voyage en bateau, un passager fut blessé
et demanda réparation du préjudice à la compagnie maritime
qui l'avait transporté. Dans le contrat de transport, une clause
prévoyait une compétence d'attribution impérative au
tribunal de Marseille pour régler les difficultés nées de
l'exécution du contrat. Le problème consistait dans le fait de
savoir si l'indemnisation du dommage corporel causé à la victime
lors du transport, et sur laquelle le contrat était resté
silencieux, était une obligation contractuelle. Pour résoudre ce
litige, la Cour de cassation va considérer dans son Attendu de principe
et sous le visa de l'article 1134 du code civil, que « l'exécution
du contrat de transport comporte pour le transporteur l'obligation de conduire
le voyageur sain et sauf à destination ». Le juge s'octroie le
pouvoir de créer une nouvelle obligation non contenue dans la convention
sous couvert du silence des parties et de sa compétence en
matière d'interprétation. En l'espèce, seule une clause
mentionnait une éventuelle compétence du tribunal Marseillais en
cas de dommage. Mais les motifs et modalités de réparation
n'avaient pas été évoqués par les parties. Le juge
chargé de l'interprétation du contrat de transport a donc
créé de sa propre initiative une nouvelle obligation : conduire
le transporté sain et sauf à destination. Le transporteur
garantit la sécurité de ses passagers et s'il ne le fait pas, sa
responsabilité sera engagée et le transporté n'aura pas
à prouver une faute ».
· Les autres sources de la théorie du
forçage du contrat
Certes, cette initiative a été critiquée
par la doctrine puisque la Haute juridiction avait pour habitude de se
réfugier derrière la volonté des parties. Mais lorsque
celle-ci n'est pas exprimée, il faut remédier aux lacunes et
répondre aux besoins des parties en rendant la solution la plus juste.
Il a alors recours à la méthode dite subjective qui se fonde sur
la référence à des notions telles que l'utilité
sociale du contrat et ce que commande la justice. De
ce fait, on peut observer qu'il existe un « contenu
essentiellement variable, suivant les usages, les moeurs, les habitudes du
commerce juridique ».
Les articles du C.O.C.C., qui renvoie à la bonne foi
lui seront également utiles. En cas de silence du contrat, le juge
s'arroge le droit d'en déterminer le contenu qui n'avait pas
été envisagé par les parties. Il associe des obligations
à certains contrats en se référant à d'autres
sources : la loi, les usages ou l'équité.
§2 : Les effets pernicieux du dirigisme
contractuel
Le C.O.C.C. pose un certain nombre de règles
permettant au juge d'entrer dans le contrat, c'est-à-dire de
l'interpréter.
Cependant, malgré ces directives, il est souvent
difficile pour le juge de rétablir le contenu contractuel.
C'est en ce sens que lorsqu'il interprète le contrat,
il peut détourner la volonté des parties en recherchant un
équilibre qu'on peut qualifier d'être artificiel.
· Le détournement de la volonté des
parties
Cela consiste pour le juge de réviser le contrat.
Les parties ont contracté en fonction de circonstances
économiques, mais si elles avaient connu le bouleversement
économique elles se seraient engagées avec des clauses
différentes. Comme on ne peut pas rechercher véritablement la
volonté des parties alors les juges essaient d'analyser la
révision selon qu'elle est moralement juste et économiquement
utile.
On reproche à la révision du contrat d'être
un facteur d'instabilité et d'insécurité.
Mais c'est le contraire qui se passe. En effet si les
conditions changent sans révision une partie sera ruinée et elle
n'exécutera pas le contrat.
La révision apparaît comme moralement
souhaitable mais économiquement dangereuse. Le facteur moral est
subordonné au facteur économique. Mais cela n'exclue pas une
intervention sélective pour certains contrats. Le juge peut alors
décider que ces contrats doivent susciter une coopération active
et permanente des contractants pour que l'exigence de bonne foi soit
satisfaite.
· A la recherche d'un équilibre artificielle
entre les parties
C'est l'article 99 du C.O.C.C. qui pose la première
directive adressée au juge. Selon cette disposition, on doit dans les
conventions rechercher quelle a été la commune intention des
parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens
littéral des termes. Mais en matière contractuelle, le juge
pourra difficilement recueillir des informations l'aidant à clarifier
l'intention des parties. Il ne dispose pas des outils
d'investigations du domaine législatif ; ni travaux
préparatoires, ni motifs. Il va devoir redonner à la convention
le sens exact que les parties avaient voulu lui donner mais avaient mal
exprimé. Son rôle ne consiste pas à imposer son point de
vue.
Qualifié de « petit guide-âne » par le
Doyen Carbonnier, les dispositions ne s'imposent pas au juge, ce sont de
simples conseils n'ayant pas de valeur impérative. Elles sont
plutôt une « feuille de route », permettant d'obtenir plus de
précisions en invitant les juridictions du fond à rechercher
l'intention. Il ressort clairement, à la lecture de cet article, que
l'esprit doit l'emporter sur la lettre.
Telle doit être l'attitude du juge amené
à interpréter le contrat.
La jurisprudence a apporté des illustrations comme en
témoigne l'arrêt de la chambre commerciale du 9 juin 1998. Dans le
cadre d'un cautionnement, il a été admis que l'intention
réelle des parties pouvait être décelée en comparant
la date des actes de prêt et de cautionnement dans un premier temps, et
du montant des engagements dans un second temps. Ou encore, pour
l'interprétation d'une convention d'édition à la
lumière des propositions antérieures de l'éditeur (Civ.
1ère, 18 fév. 1986 :Bull. civ. I, n° 31.).
De même, en cas de contradiction entre une clause
manuscrite ou dactylographiée, c'est la seconde qui prévaudra
art. 101 al. 1 (Cass. soc. 27 fév. 1947, Gaz. Pal. 1947. 1.
205).
Les dispositions qui suivent viennent dans le prolongement du
principe.
Section2 : La portée de la théorie du
forçage du contrat
La portée de cette théorie se retrouve
essentiellement dans l'office du juge qui interviendra dans le contrat.
Ainsi, il lui est d'usage de déterminer le contenu du
contrat. C'est d'ailleurs en ce sens que la jurisprudence a imaginée des
obligations à son égard lors de son intervention.
Donc, pour exposer la portée de cette théorie,
il nous importera de voir l'interprétation des clauses du contrat
(§1) et le champ d'application du forage du contrat (§2).
§1 : L'interprétation des clauses du
contrat
Il n'y aurait pas à interpréter un contrat, ni
une loi lorsqu'ils sont clairs. Il faut les appliquer purement et
simplement.
Ce que l'on dit parfois en latin « interpratatio
cessat in claris » (ce qui est clair ne doit pas être
interprété).
Cependant, dans l'interprétation du contenu du
contrat, le rôle du juge du fond et de la Cour de Cassation n'est pas le
même en ce sens qu'une distinction capitale s'impose; celles des
clauses claires et précises (A) d'une part et d'autre
part celles des clauses obscures ou ambiguës (B).
· Les clauses claires et précises
Elles s'imposent au juge, même si elles lui paraissent
sévères ; il doit respecter la volonté des parties. Art
100 du C.O.C.C. dispose : « Si les termes du contrat sont clairs et
précis, le juge ne peut sans dénaturation leur donner un autre
sens ».
La notion de clarté des clauses du contrat parait
simple à priori. Mais, malgré la clarté d'un texte, il
peut et même doit être interprété en cas de lacunes
ou d'erreurs matérielles. Il s'agit alors de la correction d'un texte,
plus que de son interprétation. Peut aussi être
interprété, pour des raisons comparables, un texte clair, lorsque
son application littérale aboutirait à des conséquences
absurdes, ce que les anglais appellent la « Golden rule
».
Le juge ne saurait, d'ailleurs, aller plus loin et
écarter une clause claire et précise au motif, par exemple
qu'elle est contraire à l'équité. En ce cas, sa
décision encourait la cassation.
· Les clauses obscures ou ambiguës
Un contrat, bien que valablement formé, peut
s'avérer ambigu ou lacunaire. L'interprétation du contrat est
alors utile pour en clarifier le sens ou le compléter. C'est ce que
traduit l'art. 101 du C.O.C.C. :« En présence d'une clause
ambiguë ou simplement douteuse, le juge peut déceler la
volonté des parties en interprétant les clauses de la convention
les unes par les autres, et en tenant compte des circonstances de la cause
».
Montaigne témoigne : « Il y a plus affaire
à interpréter les interprétations qu'à
interpréter les choses et plus de livres sur les livres que sur autre
sujet : nous ne faisons que nous entre-gloser »
Se distinguant de la qualification par le fait que le
régime juridique du contrat ne soit pas remis en cause, il en
résulte que le juge n'est pas lié par la qualification
donnée par les parties mais l'est pour un accord sur
l'interprétation.
Alors que dans l'interprétation de la loi, c'est le
texte qu'il faut apprécier, l'intention du législateur est
secondaire, dans l'interprétation du contrat, il en va
différemment.
Suivant le postulat du consensualisme, l'interprétation
du contrat est le résultat de la recherche de l'intention commune des
parties, opérée par le rapprochement des clauses, de l'analyse de
l'économie du contrat et du comportement postérieur des
cocontractants. L'interprétation du contrat constitue donc un
préalable à la qualification. L'obscurité vise la lacune,
l'ambiguïté exprime la pluralité de significations
possibles.
§2 : Le champ d'application du forçage du
contrat
Lorsque les parties ne sont pas comprises sur un point du
contrat, le juge peut suppléer à leur volonté en y
ajoutant « En l'absence de volonté exprimée, le contrat
oblige à toutes les suites que la loi, les usages, la bonne foi ou
l'équité donnent à l'obligation d'après sa nature
» (Art. 103 al.1 du C.O.C.C.).
Ce qui a permis à ce dernier un forçage du
contrat en y mettant des obligations de sécurité et d'information
ou de conseil qui ont été imaginé par le juge.
· L'obligation de sécurité
L'obligation de sécurité créée
par le juge était conçue comme une obligation de résultat.
Il fallait que la victime prouve la faute de la compagnie qui la transportait.
L'arrêt du 21 novembre 1911 est venu supprimer l'établissement de
la preuve. Il lui suffit d'établir le défaut d'exécution
de l'obligation qui incombe au transporteur. Cette obligation est à la
charge de la compagnie « à partir au moment où le voyageur
commence à monter dans le véhicule et jusqu'au moment où
il achève d'en descendre » (Civ. 1re, 1er juill. 1969). En 1991, la
Cour de cassation a précisé que le contrat cessait à
partir du moment où les passagers retrouvaient leur autonomie.
Les contrats de transports ne sont pas les seuls
concernés. L'obligation de sécurité est imposée
dans divers autres contrats. En matière de contrats avec un garagiste,
ce dernier est « tenu, envers ses clients qui lui confient un
véhicule en réparation, d'une obligation de
sécurité dont il peut s'exonérer en prouvant qu'il n'a pas
commis de faute » (Civ. 1re, 9 juin 1993). Le médecin est aussi
débiteur de cette obligation et il a été jugé que
« le contrat médical formé entre le patient et son
médecin met à la charge de ce dernier, sans préjudice de
son recours en garantie, une obligation de sécurité de
résultat en ce qui concerne les matériels qu'il utilise pour
l'exécution d'un acte médical. » De nombreux autres domaines
d'activités telles que les jeux, assistance, accueil d'un public,
enseignement etc., sont intéressés, ce qui élargit
constamment le domaine de l'obligation. C'est pourquoi la doctrine plaide la
reconnaissance d'une qualification d'obligation légale et non pas
conventionnelle
· L'obligation d'information ou de conseil
Concrètement, l'obligation d'information et de conseil
vise de nombreux contrats. Ce sont les professionnels qui sont le plus
largement responsabilisés. Si l'on s'intéresse tout d'abord
à la qualité des parties, on peut observer que le consommateur
est de plus en plus protégé. Cette obligation doit jouer chaque
fois que l'une des parties « ignore légitimement des informations
qui lui étaient utiles et que l'autre connaissait ou se devait de
connaître ». Il en est ainsi pour
les banquiers qui doivent informer le client du risque des
opérations spéculatives ou encore pour les médecins,
avocats, agents immobiliers, notaires. Par exemple, les obligations du notaire
dépendent des circonstances de la cause et de la qualité du
client : profane ou professionnel. La jurisprudence y ajoute même un
devoir de conseil et une obligation de renseignement. Concernant la nature du
contrat, la jurisprudence a également imposé une obligation
d'information au vendeur. Il est tenu de « fournir tous les renseignements
indispensables à son usage et notamment avertir l'utilisateur des
précautions à prendre lorsque le produit est dangereux ». La
charge de la preuve repose sur lui et il devra prouver qu'il a correctement
accompli ses obligations. Pour autant cet essor jurisprudentiel ne signifie pas
que tous les contrats contiendront une obligation de renseignement. Celle-ci
n'a de raison d'être que si elle constitue une « suite raisonnable
et équitable du contrat »
Chapitre2 : Le forçage du contrat par le juge
De nombreux contractants ne maitrisent pas le langage
juridique et rédige mal leur contrat ou que ce dernier présente
des lacunes. Le juge qui force le contrat doit lui redonner son sens.
Pour déterminer la mission de ce dernier quant
à l'interprétation du contrat, l'Art. 99 du C.O.C.C. pose des
directives à cet effet.
Pour démontrer comment s'effectue le forçage du
contrat par le juge, il nous incombera de voir de les différentes
méthodes d'interprétations du contrat (Section1), ainsi que les
contours de l'interprétation du contrat par le juge (section2).
Section1 : Les différentes méthodes
d'interprétation du contrat
Aujourd'hui, de toutes les questions que pose
l'interprétation, ce sont ses méthodes qui ont le plus
attiré l'attention et suscite les plus amples controverses. La
jurisprudence parait
insensible à ce tourbillon intellectuel : son
éclectisme l'empêche de choisir ; mais son interprétation
est devenu beaucoup plus libre et créatrice qu'elle ne l'était au
XIX° siècle.
Il y a une multitude de méthode
d'interprétation qui est proposé par la doctrine : «
dogmatique », « historique », « téléologique
», « rhétorique » etc. Cependant, nous en retiendrons que
deux des plus importantes à savoir : la méthode
exégétique (§1) et celle qui tient au raisonnement qui se
dit scientifique mais est politique (§2). A l'intérieur de chacune
d'elle, il existe des nuances et la différence n'est pas toujours aussi
tranché qu'il parait.
§1 : La méthode exégétique
Apparu depuis le XIX° siècle, la méthode
exégétique développe essentiellement deux pistes
d'interprétation des contrats qui sont aujourd'hui admises dans notre
droit positif.
Tout dépend de la teneur du désaccord entre les
parties.
La première prône la théorie de
l'autonomie de la volonté des contractants, tandis que la seconde
traduit le recul du volontarisme jugé insuffisant par la doctrine
contemporaine.
Si l'on se retrouve en présence d'une convention aux
formules obscures, équivoques, le juge devra élucider son sens et
se livrera à l'interprétation dite subjective (A) ou explicative
du contrat. Par contre, s'il doit pourvoir aux manques, lacunes voir au
silence, alors c'est l'interprétation dite objective (B) ou
créatrice qui sera mis en oeuvre.
· La méthode subjective
Directement puisée dans la théorie de
l'autonomie de la volonté, cette méthode fait du juge le
serviteur de la volonté des parties. Dans cette optique, son unique
rôle est de restituer à la convention sa réelle
signification.
L'article fondamental de cette méthode demeure
l'article 99 du C.O.C.C. :« Par-delà la lettre du contrat, le juge
doit rechercher la commune intention des parties pour qualifier le contrat et
en déterminer les effets ».Ce texte impose de faire primer l'esprit
de la convention sur sa lettre, et par conséquent de rechercher cette
fameuse « commune intention de parties », ce qui s'avère
parfois délicat.
Aussi, il permet « d'étendre la sphère des
effets contractuels au-delà de la lettre même du contrat ».
En effet, l'art. 101 al. 1 disposent que : «En présence d'une
clause ambiguë ou simplement douteuse, le juge peut déceler la
volonté des parties en interprétant les clauses de la convention
les unes par les autres, et en tenant compte des circonstances de la cause.
». L'article parle bien d'ambiguïté, alors qu'une
volonté a été exprimée, il s'agira donc de
l'élucider, de la préciser. Cette déclinaison directe de
la cause prévue par l'article 101 al.1 du
C.O.C.C. est éminemment subjective. Il y a eu
l'expression d'une volonté que le juge doit perfectionner.
L'article 100 du C.O.C.C. pose, quant à lui, la
règle dite de l'effet utile des conventions qui consiste à
interpréter la convention dans le sens qui lui donne un effet. On parle
aussi "d'interprétation validante". Par exemple dans une affaire
où une clause d'arbitrage avait était prévue, le
président du TGI qui constate qu'aucune procédure de
désignation de l'arbitre n'avait été prévue, en
crée une lui-même.
La commune intention des parties étant de se soumettre
à l'arbitrage, le juge donne un effet utile à cette
volonté, en complétant ici la carence des parties. Enfin, l'al. 2
dudit article, relève lui d'une volonté d'assurer la
cohérence contractuelle en disposant que « Les termes trop
généraux, les clauses visant un point particulier, ne font pas
obstacle à la recherche de la volonté réelle des
parties.».
· La méthode objective
Concernant maintenant la méthode
d'interprétation objective, l'article 102 al. 2 du C.O.C.C. dispose que
« Entre clauses inconciliables ou contradictoires, celle qui
reflète le mieux la volonté commune des parties a la
préférence ». Ici, il est évident que l'on ne
recherche plus une quelconque volonté, exprimée ou silencieuse.
Cet article est clairement guidé par une volonté de protection de
l'une des parties. Le doyen Carbonnier parle de la maxime de « faveur du
débiteur ».
Ici, ce n'est plus la commune interprétation qui guide
l'interprétation du contrat, mais des éléments objectifs,
et plus particulièrement la qualité de l'un des cocontractants.
Pour certain auteurs une volonté serait malgré tout
exprimée. D'autres en revanche voient dans cet article l'expression
d'une méthode objective. En effet, dans ce texte, il n'y a pas de
référence évidente à une quelconque volonté
ou intention. Les usages en vigueur dans un pays donné sont simplement
des éléments de détermination objective
d'interprétation.
§2 : La méthode scientifique ou
politique
Le vice majeur de l'exégèse fut de reposer sur
le postulat de la plénitude du texte écrit de la loi, ou se
trouverait toutes les réponses à toutes les difficultés,
ce que F. Gény avait appelé le « fétichisme de la
loi écrite et codifié ».
Il avait voulu, en reprenant les méthodes surtout
attachées au raisonnement, que l'interprétation soit basé
sur la libre recherche scientifique (A) ce que était plus contestable,
car sous la prétendue science, il avait en réalité une
politique de l'interprétation basé sur la logique de l'argument
(B).
· La libre recherche scientifique
Par opposition à la méthode de
l'exégèse, F. Gény avait affirmé que tout
jurisconsulte, et notamment le juge, avait le droit et le devoir de
procéder à une « libre recherche scientifique », en
recherchant le « donné » pour mettre en oeuvre le «
construit ».
Le « donné »,ce sont tous les
éléments de solution qui commandent un problème juridique
déterminé, élément qui sont légaux, mais
aussi économiques, politiques, sociaux ou historiques, qui peuvent aussi
provenir du sentiment individuel de la justice et de l'équité.
L'objet du construit est double : il impose d'abord au juge de rattacher
à un texte de loi ou à un principe juridique la solution que le
donné avait dégagée ; il faut que la solution puisse
être raccordée à une règle écrite ; Saleilles
disait : « au-delà du Code civil mais par le Code civil
». Le construit recherche aussi la cohérence intellectuel et
politique ; chaque interprétation jurisprudentielle doit être
élaboré de manière à ce que, lorsque l'on rapproche
les solutions apportées à des questions voisines, elles puissent
s'intégrer dans un système cohérent.
La libre recherche scientifique a suscité peu
d'adhésion parce qu'elle ne donnait que de vagues directives
d'interprétations.
· La logique de l'argument et la politique du pire
« Une école contemporaine de logique juridique,
s'inspirant de la rhétorique aristotélicienne et
médiévale, a ajouté à la logique formelle une
logique non formelle, relevant de la controverse et de l'argumentation,
c'est-à-dire de l'ensemble des raisonnements qui viennent appuyer ou
combattre une thèse et permettre de critiquer ou de justifier une
décision ».
Au demeurant, une curieuse politique jurisprudentielle de
l'interprétation, récente et encore peu pratiquée, est la
politique du pire, le système de la provocation. Parfois, les juges
acceptent d'interpréter la règle d'une manière
littérale et tendancieuse, qui aboutit délibérément
à des résultats injustes, afin de provoquer une intervention
législative, qui, d'ailleurs, ne s'accomplit pas toujours ou tarde
parfois à s'accomplir : un politique du pire.
Cette méthode devrait être exceptionnelle, car
elle sacrifie les plaideurs : la politique du pire est la pire des
politiques.
Section2 : L'interprétation du contrat par le Juge
L'interprétation est un office particulier du juge. En
effet, il ne s'agit pas seulement ici de trancher un litige, le juge doit
donner du sens. Interpréter un contrat est donc une tâche
particulièrement noble, puisqu'il s'agit de rendre clair un acte flou et
obscur. En interprétant
un contrat, le juge exerce un premier office « ordinaire
» : il tranche un litige, une contestation. Cela étant, en
matière d'interprétation, cette jurisdictio porte aussi
sur une norme individuelle, issue de la volonté des parties : le
contrat. C'est sur ce point que l'office du juge en matière
d'interprétation est particulier et dépasse une mission
étriquée. Cet office nécessite un juge
particulièrement actif et impliqué. Il participe ici d'un
affinement du principe de liberté contractuelle, en complétant la
carence des parties, afin de garantir la vigueur du lien contractuel. C'est en
ce sens que l'on peut parler de noblesse de la mission interprétative,
qui consiste à donner du sens, de la cohérence, de la
précision à un acte obscur. L'interprétation est donc le
triomphe du rationalisme sur l'absurdité.
§1 : La recherche de la volonté des
parties
Lorsque le juge se livre à interpréter un contrat,
il peut soit le dénaturer, soit le requalifier. Voyons de manière
beaucoup plus approfondie ces deux questions de dénaturation (A) et de
qualification (B) du contrat par le juge.
· La question de la dénaturation
Le principe général de l'intervention du juge
est qu'il ne peut intervenir que s'il y a obscurité. Lorsqu'une clause
contractuelle est ambigüe, puisqu'il s'agit d'une question de fait, les
juges du fond ont un pouvoir souverain que la cour de cassation n'a pas.
Au demeurant, si le juge du fond interprète un contrat
clair et précis, la cour de cassation pose la règle qu'il le
dénature, viole donc l'article 100 du C.O.C.C., et que sa
décision doit, par conséquent, être cassée.
La dénaturation est la méconnaissance
grossière et évidente d'un contrat dont le sens est discutable//
Les juges du fond la commettent parfois pour des raisons d'équité
et c'est ce dont la cour de cassation ne veut pas, sans doute parce qu'elle
voit dans l'équité une source d'arbitraire.
· La question de la qualification
Il est de jurisprudence constante que le juge n'est pas
lié par la qualification donnée par les parties. Dans un contrat
à interpréter, le juge doit y redresser la fausse qualification
en y substituant celle qui parait lui convenir, en principe, compte tenu de la
réelle volonté des parties sous les réserves qui leurs
sont admises.
Inversement, l'office du juge le conduit à confirmer
les exactes dénominations fournies par les parties qui, par exemple, ont
justement écarté la qualification « bail rural ou
commercial» et retenu celle d'occupation précaire pour
désigner leur convention
Quoi qu'il en soit, le pouvoir du juge du fond n'est pas
souverain. Il n'est pas discuté que ce soit là une question de
droit. D'innombrables décisions sont cassées pour ne pas donner
à la convention la qualification qui, d'après la Haute
Juridiction française, correspond à sa nature telle qu'elle
résulte des clauses de l'acte relevé par les juges du fond.
§2 : Les compléments à la lettre
du contrat
Le contrat peut s'avérer trop lacunaire
empêchant de connaître avec certitude la volonté commune des
parties. Dans ce cas, ce n'est plus la méthode subjective qui est
retenue mais celle consistant à se tourner vers la typologie
légale du contrat en cas d'impossibilité de trouver la
volonté des parties, il convient de s'aider de l'article 103 du C.O.C.C.
qui se base sur la loi (A) ; l'équité qui est un outil
privilégié du juge pour enrichir le contrat et découvrir
des obligations non prévues par les parties lors de sa formation ; les
usages (B) pour combler les lacunes réputés avoir
été incorporés au contrat sauf clause contraire.
· Les lois
En appliquant les articles 100 du C.O.C.C, le juge va pouvoir
rendre une clause, nulle en apparence, valable en lui donnant un autre sens.
- L'alinéa 2 de l'article 101du C.O.C.C., lui
permettent de se référer à la matière du contrat en
cas de termes trop généraux devant être
précisé ou à contrario en cas de termes restrictifs devant
être élargis.
- Le juge doit apprécier globalement le contrat :
consécration de la théorie des ensembles.
L''article 103 du C.O.C.C, prévoit que si malgré
tout le doute subsiste, la convention s'interprète contre celui qui a
stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation.
Ainsi celui qui s'engage est considéré comme étant
dans une situation de faiblesse par rapport à celui qui obtient un
engagement, il faut donc le protéger
· Les usages
Bien que le juge ne puisse pas modifier le contrat en raison
du principe de la force obligatoire des conventions, quand le contrat est trop
lacunaire, ce dernier va l'interpréter excessivement, on parle
d'interprétation créatrice.
Découvrant plusieurs obligations en application, cela a
pour conséquence de rajouter des obligations, des clauses non
prévues à l'origine par les parties.
On trouve notamment les fameuses obligations de
sécurité relative aux contrats de transport ou encore les
obligations d'information qui enjoint le professionnel de fournir le mode
d'emploi de la chose vendue.
C'est le cas quand le juge décide d'appliquer tel usage
ou considère que telle obligation a été envisagée
en raison de la nature même du contrat ou quand les parties ont
précisé une obligation, cela ne veut pas dire pour autant
qu'elles aient voulu exclure les cas non exprimés (l'exclusion de «
a contrario »).
CONCLUSION:
Le droit des contrats est essentiellement régi par le
Code des Obligations Civiles et Commerciales, mais, il ne faut pas
négliger l'influence croissante du droit communautaire (O.H.A.D.A.), qui
d'ailleurs est en train de mettre en oeuvre une harmonisation du droit des
contrats.
Réfléchir sur la volonté des parties et
le forçage du contrat, traduit le fait d'analyser la volonté des
parties dans le processus contractuel.
L'évolution de la théorie de l'autonomie de la
volonté à conduit certains à déplorer son
déclin : ils en déduisent que c`est la liberté de l'homme
elle-même qui est de ce fait , compromise ou, du moins
considérablement réduite. Nous ne pensons pas que ce grief soit
justifié, car la liberté est un concept vide de sens, cela ne
signifie pas grand-chose. Ce qui existe, ce qui est réel, ce sont les
divers libertés de faire tel ou tel acte, d'agir ou de ne pas agir, de
choisir ou de ne pas choisir telle ou telle autre profession, d'exprimer ou de
ne pas exprimer sa pensée, etc. La liberté contractuelle n'est
que l'une de ces libertés.
La liberté de contracter à n'importe quelles
conditions, à n'importe que prix, avec `importe qui, a montré
qu'elle peut conduire à l'étouffement des autres droits et
libertés, lesquels importent pour le bonheur de tous et de chacun. Si,
au prix d'un certain abandon de la liberté de contractuelle, on augmente
l'efficacité des autres droits et libertés, le bilan serait
encore positif et bénéfique.
A l'inverse, les règles d'interprétation du
contrat, renseigne bien évidemment sur la rédaction contractuelle
contemporaine et sur l'attitude du palais en la matière. Cette question
est aussi et surtout un outil de réflexion sur les sources du droit. En
effet, l'interprétation des contrats ne peut pas se comprendre sans
l'apport essentiel de la jurisprudence. D'autant que ces fameux articles 99 et
suivants du C.O.C.C. apparaissaient comme de « véritables maximes
du droit ». La jurisprudence a joué un rôle dans
l'application de ces articles, à la texture si particulière,
puisque originellement dépourvus d'impérativité.
L'influence jurisprudentielle qui a marqué de son empreinte le domaine
de l'interprétation, ses méthodes, et sa portée
illustre qu'une codification des plus méticuleuses ne
saurait se passer des prolongements prétoriens efficaces. Les choix de
politiques jurisprudentielles opérés sont parfois critiquables,
mais reflètent la nécessité pour une société
de choisir ses paradigmes, la sécurité dans le transport, par
exemple. Mais l'intervention de la jurisprudence a été en
matière d'interprétation des contrats un vecteur de la
pérennité des textes. Ce sont donc bien les magistrats qui «
pénétrés de l'esprit général des lois en ont
gouvernés l'application ».
A ce jour, un constat semble s'imposer : les sources du droit
demeurent d'une grande complémentarité !
Bibliographie:
Ouvrages :
_J. CARBONNIER, Droit civil, Les obligations, Paris,
éd. PUF, 1996 (20ème éd.), coll. Thémis,
n° 142
_
|
Yvaine BBuffelan-Lanore, Droit Civil, Deuxième
Année, 8ème édition
|
Josserand, Le contrat forcé et le contrat légal,
D.H., Chap. 5, P. Durand
_ B. Stark- H. Laurent- L. Boyer, Droit Civil, Les Obligations,
2-Le Contrat
_ Philipe Malaurie et Larent Aynès, Droit civil,
Introduction Générale, édition 1994/1995, édition
Cujas, Livre III Interprétation de la règle de droit
_ Marie-Hélène Monsérie-Bon et
Jérôme Julien, Droit des obligations, Collection dirigée
par Phillipe Ségur
- François Terré et phillipe Simler, Droit Civil :
Les Obligations, précis Dalloz,
5ème édition 1993
Sites Internet : _
Google.com _Wikipédia.com _
Oboulo.com
Table des matières:
SOMMAIRE: 1
REMERCIEMENTS: 2
DEDICACE: 3
LISTE DES ABREVIATIONS: 4
INTRODUCTION 5
TITRE1 : LA VOLONTE DES PARTIES ET LE CONTRAT
7
Chapitre1 : La volonté des parties dans l'avant
contrat 7
Section 1 : la théorie de l'autonomie de la
volonté 7
§1 : Exposé de la théorie de l'autonomie de
la Volonté 8
A- Les arguments de la théorie de l'autonomie de la
volonté 8
B- Les conséquences des arguments de la théorie
de l'autonomie de la volonté 8
§2: L'évolution de la théorie de
l'autonomie de la volonté 9
A- Le déclin de la théorie de l'autonomie de la
volonté 9
B- Un nouvel essor du concept contractuel 9
Section 2: Les phases précontractuelles
10
§1 : Première phase : Les pourparlers 10
A- Les pourparlers 10
B- La rupture des pourparlers 11
§2 : Deuxième phase : la promesse de contrat ou
l'avant contrat 11
A- Promesse unilatérale 12
B- promesse synallagmatique 12
Chapitre 2 : La volonté des parties dans la formation
du contrat 13
Section 1 : L'existence du consentement 13
§1 : L'expression de la volonté 13
A- La Volonté réelle ou l'opération
intellectuelle 13
B- La volonté exprimé ou
l'extériorisation de la volonté 14
§2 : L'accord des volontés 14
A- L'Offre ou la pollicitation 14
B- L'Acceptation 15
Section 2 : Les restrictions et l'existence du
consentement 15
§1:Les limites à la liberté des parties de
déterminer le contenu du contrat 15
A- La protection de l'Ordre Public et des Bonnes Moeurs
15
B- L'armature du contrat imposé aux parties 16
§2 : L'évolution des limites imposés aux
parties 16
A- Le sort du contrat non conforme à l'Ordre Public et
aux Bonnes Moeurs 16
B- Les clauses abusives 17
TITRE 2 : LE FORÇAGE DU CONTRAT OU L'ATTEINTE A
LA VOLONTE DES PARTIES 17
Chapitre1 : Un aperçu sur le forçage du
contrat 18
Section1 : Les fondements de la théorie du
forçage du contrat 18
§1 : Les sources de la théorie du forçage
du contrat 19
A- Le forçage du contrat : une création
purement jurisprudentielle 19
B- Les autres sources de la théorie du forçage
du contrat 19
§2 : Les effets pernicieux du dirigisme contractuel
20
A- Le détournement de la volonté des
parties 20
B- A la recherche d'un équilibre artificielle entre
les parties 21
Section2 : La portée de la théorie du
forçage du contrat 21
§1 : L'interprétation des clauses du contrat
21
A- Les clauses claires et précises 22
B- Les clauses obscures ou ambiguës 22
§2 : Le champ d'application du forçage du
contrat 23
A- L'obligation de sécurité 23
B- L'obligation d'information ou de conseil 23
Chapitre2 : Le forçage du contrat par le juge 24
Section1 : Les différentes méthodes
d'interprétation du contrat 24
§1 : La méthode exégétique 25
A- La méthode subjective 25
B- La méthode objective 26
§2 : La méthode scientifique ou politique
26
A- La libre recherche scientifique 27
B- La logique de l'argument et la politique du pire 27
Section2 : L'interprétation du contrat par le
Juge 28
§1 : La recherche de la volonté des parties
28
A- La question de la dénaturation 28
B- La question de la qualification 28
§2 : Les compléments à la lettre du
contrat 29
A- Les lois 29 En appliquant les articles 100 du
C.O.C.C, le juge va pouvoir rendre une clause, nulle en apparence, valable en
lui donnant un autre sens. 29
B- Les usages 30
CONCLUSION: 30
BIBLIOGRAPHIE: 31
TABLE DES MATIERES: 32
|