EPIGRAPHE
« A mesure que les pays se rapprochent de la
parité, ils pensent s'être débarrassés du
problème des genres dans l'éducation, considérant que
parité vaut égalité. Or, il ne s'agit pas seulement
d'assurer l'égalité des chances de scolarisation mais aussi
l'égalité des processus d'apprentissage, l'égalité
des résultats scolaires et l'égalité devant l'emploi et
les salaires en fonction de l'éducation et de la formation reçues
».
MAKI (2010)
«L'homme étant considéré comme la
norme humaine, c'est l'expérience masculine qui a
déterminé la manière dont les sociétés
devaient être structurées, et c'est son savoir et sa
théorie, bâtis dans le cadre d'un paradigme patriarcal de la
société humaine, qui se sont imposés dans notre
héritage intellectuel».
(Rapport du Comité Directeur pour
l'égalité entre les femmes et les hommes du
Conseil de
l'Europe, 2011)
II
AVANT-PROPPOS
L'Institut Panafricain pour le Développement (IPD) est
une association internationale de Droit privé Suisse créée
en 1964 afin de contribuer à la promotion du développement
durable en Afrique. Cette mission s'exprime à travers des
activités de formation, de recherché-action, d'appui-conseil et
de publication.
Ces activités sont mises en oeuvre par un réseau
de cinq instituts régionaux qui
sont:
· L'Institut Panafricain pour le
Développement-Afrique Centrale (IPD-AC), établi à Douala
au Cameroun;
· Le Pan African Institute for Development-West Africa
(PAID-WA), établi à Buea au Cameroun;
· L'Institut Panafricain pour le
Développement-Afrique de l'Ouest et le Sahel (IPD-AOS), basé
à Ouagadougou au Burkina Faso;
· Le Pan African Institute for Development- East and
South Africa (PAID-ESA), basé à Kabwe en Zambie; et
· L'Institut Panafricain pour le
Développement-Afrique du Nord (IPD-AN), établi à
Salé au Maroc.
Les instituts de l'IPD bénéficient du statut
diplomatique que leur confèrent les accords de siège
signés avec les pays hôtes. La coordination et le contrôle
de gestion de leurs activités sont assurés par le
Secrétariat Général qui est basé à
Yaoundé au Cameroun avec un bureau à Genève en Suisse.
L'Institut Panafricain pour le Développement-Afrique
Centrale (IPD-AC) est le premier de ces cinq instituts régionaux. Il a
été créé en 1965 et ses activités couvrent
13 pays francophones et lusophones de l'Afrique Centrale y compris le
Madagascar et les Iles Comores. L'IPD-AC offre deux types de formations :
· Les formations de longue durée (cycle de Licence
et cycle de Master)
· Les formations de courte durée et les
séminaires Ces formations sont organisées sous différentes
formes:
· La formation en présentiel (in situ);
· La formation délocalisée, et
· La formation à distance (e-learning).
III
REMERCIEMENT
Il nous serait injuste de manifester une indifférence
à l'égard des personnes dont l'apport a rendu possible la
réalisation du présent travail.
Nous remercions tout d'abord le Directeur Régional de
l'IPD-AC, Mr. PIAL MEZALA ROMUALD, ainsi que toute son équipe
administrative et scientifique, pour l'élan qu'ils ne cessent de
maintenir au sein de cette prestigieuse institution.
Ensuite, nos sincères reconnaissances sont
adressées au Docteur NJEUNDAM ETIENNE HERTZ qui, nonobstant ses
multiples occupations, a accepté d'accompagner la réalisation de
ce travail; ses orientations ont été d'une importance
inestimable.
Nos gratitudes s'adressent également à notre
chère épouse VAKOLAVATI ZAWADI qui a accepté
d'énormes concessions durant les enquêtes et l'élaboration
de ce travail.
Nous remercions aussi Mr. TOUMBI BIENVENU pour le corpus des
documents en lien avec le genre mis à notre disposition, lesquels
documents nous ont offert des connaissances approfondies sur notre sujet de
recherche. La même reconnaissance s'adresse à Mr. MBUSA DANNY,
Directeur de programme de COOPI-RDC, pour son encadrement professionnel durant
les six mois de stage ainsi qu'aux chefs d'Établissement scolaires et
aux inspecteurs qui ont accepté de nous fournir des données de
leurs institutions.
En fin, Mr. KALIGHA JEAN-BON de l'ISEAB et le chef des travaux
MOKET ERIC de l'UNIGOM, trouvez ici l'expression de nos sincères
reconnaissances pour la lecture exhaustive de ce travail que vous avez
effectué. Vos commentaires et corrections ont permis de rendre ce texte
plus digeste.
KATSURANA JULES
iv
SOMMAIRE
AVANT-PROPPOS ii
REMERCIEMENT iii
CIGLES ET ABREVIATIONS v
LISTE DES TABLEAUX vi
LISTE DES GRAPHIQUES vii
INTRODUCTION GENERALE 3
Première Partie : PROBLEMATIQUE DE L'EQUITE DANS
L'EDUCATION EN RDC 18
PREMIER CHAPITRE : L'EQUITE AU REGARD DES THEORIES DE LA JUSTICE
20
1.1 Egalitarisme ou Equité 20
1.2. Problématique de la subordination de la femme 27
DEUXIEME CHAPITRE : ETAT DE LIEU DE L'INIQUITE ENTRE LES SEXE
DANS L'EDUCATION EN
RDC 34
2.1 Examen de l'iniquité entre les sexes dans
l'éducation en RDC 35
2.2 Les causes de la persistance des iniquités dans
l'éducation en RDC 48
SECONDE PARTIE : L'EDUCATION EN RDC ET LA SENSIBILITE AU GENRE
55
TROISIEME CHAPITRe : GENERALITES SUR L'AUTONOMISATION DE LA FEMME
57
3.1. Conceptualisation de l'autonomisation de la femme 57
3.2. De l'engagement mondial en faveur de l'autonomisation de la
femme et de l'éducation
pour tous 59
QUATRIEME CHAPITRE : DEGRE DE PRISE EN COMPTE DE LA DIMENSION
GENRE PAR LA
STRATEGIE DE L'EDUCATION EN RDC 69
4.1. Notion et Outils de la prise en compte de la dimension genre
69
4.2. Analyse genrée de la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP 75
RECOMMANDATIONS 86
CONCLUSION GENERALE 88
Les Références Bibliographiques 92
TABLE DE LA MATIERE 96
LES ANNEXES 98
V
SIGLES ET ABREVIATIONS
ADF/Nalu: Allied Democratic Forces/ National Army of Liberation
of Uganda.
CAP : Connaissances, Attitudes et Pratiques.
CDEG: Comité Directeur pour l'égalité entre
les femmes et les hommes (CDEG) du Conseil de l'Europe
CEDPA: The Center for Development and Population Activities COOPI
: Cooperazione Internazionale
EPSP : Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel EPT :
Education Pour Tous
GED : Genre et Développement
IFD : Intégration de la femme dans le développement
ISEAB : Institut Supérieur Emmanuel d'Alzon de Butembo LRA : Lord's
Resistance Army
Mr : Monsieur
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
UIE: UNESCO Institute for Education
UNESCO: The United Nations Educational, Scientific and Cultural
Organisation
UNIGOM : Université de Goma
ONU : Organisation des Nations Unies
RDC : République Démocratique du Congo
SADC: Southern African Development Community
PME/OEA : Projet multinational de l'éducation et de
travail de l'organisation des Etats américains
vi
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Résumé des trois courants
féministes 30
Tableau 2 : Taux d'abadons scolaires liés aux
grossesses (Année scolaire 2014-2015) 37
Tableau 3 : Répartition des chefs de classe par sexe et
par niveau 38
Tableau 4: Proportion des enseignantes par niveau
d'éducation (2008-2009) 40
Tableau 5: Proportion de la femme dans la direction des
Etablissements Scolaires 42
Tableau 6: Pourcentage des inspectrices de l'éducation
(année scolaire 2014-2015) 42
Tableau 7: Répartition des personnages dans les manuels
scolaires 43
Tableau 8: Activités des enfants dans les textes
scolaires 44
Tableau 9: Répartition des adultes en activité
dans les manuels scolaires (154) 45
Tableau 10 : Part de l'éducation dans le budget
national (1986-2014) 48
Tableau 11: Les axes stratégiques de la
Stratégie de développement du sous-secteur de
l'éducation 76
Tableau 12: Présentation des enquêtés par
Province, sexe et religion 78
Tableau 13: Perception sur la différence de
l'intelligence entre fille et garçons 79
Tableau 14: Plan de redressement des axes stratégiques
de la Stratégie de développement du
sous-secteur de l'EPSP 83
vii
LISTE DES GRAPHIQUES
Graphique 1 : Le taux d'achèvement de l'école
primaire 35
Graphique 2: Taux de scolarisation et d'achèvement
entre filles et garçons au primaire et au
secondaire 36
Graphique 3 : Disparité entre garçons et filles
selon le cycle de l'enseignement 36
Graphique 4: Répartition des chefs de classe par sexe
39
Graphique 5: Répartition des chefs de classe par sexe
et par cycle 40
Graphique 6: Proportion des enseignants par sexe et niveau
d'étude (2008-2009) 41
Graphique 7: Proportion des enseignants titulaires des classes
par sexe (au primaire) 41
Graphique 8 : Comparaison de la progression du taux net de
scolarisation et du budget de
l'éducation 49
Graphique 9 : Perception négative sur
l'éducation d'une fille 80
1
RESUME
Le présent mémoire part de l'idée
largement admise que l'éducation constitue un outil par excellence de
l'autonomisation de la femme. Ainsi, à travers ce travail, nous avons
cherché à analyser l'applicabilité de cette thèse
au contexte particulier des milieux ruraux en RDC. Car, à la suite de
l'adoption du Cadre d'action de Dakar, invitant les Etats à la
création d'un environnement éducatif sain et sûr pour tous,
la RDC a élaboré la Stratégie pour le développement
du sous-secteur de l'éducation. Cette stratégie visait entre
autre l'équité entre les sexes. Cependant, divers rapports
consultés mentionnent la persistance des iniquités entre fille et
garçons dans l'éducation dans ce pays. Absentes pour
l'accès à l'école, ces iniquités sont plus
perceptibles pour le parcours scolaire et se traduisent par un faible taux
d'achèvement des filles. Et ces iniquités persistent car
l'autonomisation de la femme semble encore moins acquise dans ce secteur.
Face à cette situation, nous avons recherché la
voie à travers l'éducation en RDC pourrait efficacement
contribuer à l'autonomisation de la femme. Pour ce faire, nous avons
mené une analyse à double volet : d'une part, la cohérence
entre l'état de lieu des inégalités entre les sexes dans
l'éducation en RDC et la nature des actions entreprises, et d'autre part
le degré de prise en compte des problèmes spécifiques des
femmes par la stratégie de la RDC en matière de
l'éducation.
Ainsi, après analyse situationnelle, nous avons
découvert en premier lieu que les inégalités dans
l'éducation en RDC se posent en termes d'iniquité entre les sexes
dans le parcours scolaire. C'est-à-dire que le système
éducatif congolais est caractérisé par une faible
discrimination directe des filles1 quant à l'accès
à l'école comparativement aux garçons (95 filles pour 100
garçons), un très faible taux d'achèvement pour les filles
très faible (34 % au primaire et 13,4 % au secondaire), et l'existence
d'innombrables stéréotypes et clichés sexistes
véhiculés par les enseignants et la structure éducative. A
l'opposé de cette situation, la priorité de la stratégie
susmentionnée est accordée à la garantie de la
gratuité à l'école primaire, la construction des
écoles et la distribution des manuels scolaires. Nous avons ainsi conclu
à un manque de cohérence entre problème d'éducation
des filles dans les milieux ruraux et actions entreprises.
En second lieu, nous avons évalué le
degré d'engagement aux problèmes d'éducation des filles
par la Stratégie pour le Développement du sous-secteur de l'EPSP.
Nous nous sommes ainsi servi du « Cadre d'Habilitation de la femme »
conçu
1 Cfr Annuaire statistiques 2008-2009.
2
par Sara Longwe, et avons retenu que cette Stratégie se
concentre sur l'accès aux opportunités éducatives,
reconnait l'existence des défis à l'égalité de sexe
mais ne propose aucune action appropriée afin d'éliminer de ces
inégalités. Ces éléments nous ont conduits à
conclure que cette stratégie s'engage de manière neutre aux
problèmes des filles dans l'éducation et que ce niveau
d'engagement n'était pas favorable à l'autonomisation de la femme
dans un contexte rural.
Sommes toutes, nous sommes aboutis à la conclusion que,
dans l'objectif de lutter contre les inégalités entre les sexes
dans l'éducation et contribuer efficacement à l'autonomisation de
la femme, le pouvoir public devrait davantage investir dans la recherche de
l'équité pour le processus éducatif et dans la prise en
compte parfaite de la dimension genre lors de la planification et la mise en
oeuvre des programmes de l'éducation.
Pour atteindre ce but, nous avons suggéré
l'ajout, aux axes prioritaires retenus par la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP, d'un objectif relative à
la promotion de l'équité entre filles et garçons dans
l'éducation. Nous avons ainsi décliné cet objectif en
trois programmes:
? Programme de lutte contre les abandons scolaires liés
aux grossesses et mariage précoces ainsi que le harcèlement
sexuel en milieu scolaire ;
? Programme de renforcement du leadership féminin au
sein du système éducatif congolais;
? Programme de lutte contre les préjugés et
clichés sexistes dans les structures éducatives et les manuels
scolaires.
Nous avons aussi proposé des indicateurs
spécifiques aux trois programmes respectifs, lesquels indicateurs
permettront d'évaluer la réduction des iniquités dans le
secteur de l'éducation en RDC.
3
INTRODUCTION GENERALE
4
1. Contexte et justification de l'étude
Afin d'assurer un développement durable et
équitable, des Etats ont de plus en pris conscience de la
nécessité d'investir dans la pleine participation des hommes et
des femmes dans le processus de développement. La notion de « genre
et développement » est devenue, d'une part omniprésente dans
des discours politiques, de l'autre l'objectif prioritaire de plusieurs
stratégies et politiques de développement.
L'émergence de la problématique des rapports
hommes-femmes ne date pas de ce siècle. Cette problématique a
conditionné la conception de différentes approches visant
à traiter la situation de la femme dans le développement. En
effet, vers 1970 les tenants de ce domaine imaginèrent la
démarche d'Intégration des Femmes dans le
Développement, (IFD) avec comme objectif de rendre le
développement plus efficace et plus réel en faisant participer
les femmes aux processus existants. Ainsi, l'IFD prévoyait des projets
visant l'accroissement des revenus et la productivité des femmes de
même que l'amélioration des moyens dont elles disposent pour
s'occuper du ménage.
Par la suite, et avec l'influence de la décennie de la
femme (1975-1985), les années 1980 furent marquées par un
revirement d'attitude à l'égard d'un développement
équitable et durable. Ainsi, l'approche Genre et Développement
(GED) fut développée. Avec cette formule, les problèmes
des femmes ne sont plus perçus sur le plan de sexe (différences
biologiques entre hommes et femmes) mais plutôt sur le plan de genre,
c'est- à-dire des rôles sociaux, des relations entre hommes et
femmes. Le GED fait alors ressortir l'idée que, depuis plusieurs
siècles, les femmes ont été systématiquement
subordonnées et confinées à des rôles secondaires ou
inférieurs à ceux de l'homme. Or, l'IFD était
exclusivement focalisée sur les besoins pratiques des femmes et ne
tenait pas compte du contexte général des
inégalités. D'où la nécessité d'une
démarche qui permettrait aux femmes de donner suite plutôt
à leurs intérêts stratégiques et de susciter un
changement social.
Dans cette optique, partant du fait que le changement social
passe par un processus la socialisation, la garantie de l'éducation fut
dès lors retenue comme objectif prioritaire dans des programmes de
développement. A titre illustratif, l'éducation faisait l'objet
d'un des huit objectifs du millénaire pour le développement, et
elle sert de principal indicateur pour l'évaluation de l'autonomisation
de la femme pour les Nations Unies. Ensuite, plusieurs rencontres
internationales lui ont été dédiées. C'est le cas
de la
En fin, le gouvernement a élaboré et
lancé, en mars 2010, la Stratégie pour le développement de
l'Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel (EPSP),
5
conférence mondiale sur l'éducation de 1990
ainsi que du forum mondial sur l'éducation de 2000.
En effet, la Conférence mondiale sur
l'éducation, organisée à Jomtien (Thaïlande, mars
1990), a affirmé la nécessité de faire appliquer le droit
à l'éducation et de répondre aux besoins éducatifs
de base dans le monde. La Déclaration sur l'Éducation Pour Tous
(EPT), issue de cette conférence, a fourni une vue large et
complète de l'éducation et du rôle qu'elle joue dans
l'autonomisation des individus et la transformation des sociétés.
Quant à lui, le «Forum Mondial sur l'éducation»,
organisé à Dakar (Sénégal, avril 2000), a conduit
les participants d'engager collectivement la communauté internationale
à tenir ses promesses et à réaliser l'éducation
pour tout citoyen dans chaque société. Pour y parvenir, six
domaines prioritaires étaient identifiés et
intégrés dans le document dénommé «Cadre
d'action de Dakar» : le VIH/SIDA, la petite enfance, la santé
scolaire, l'éducation des filles et des femmes, l'alphabétisation
des adultes, et l'éducation en situation de crise et d'urgence.
En République Démocratique du Congo, les efforts
du gouvernement ont été orientés vers cette tendance
générale. Malgré des guerres récurrentes que le
pays connait depuis 1997, le gouvernement congolais s'est engagé dans la
voie de l'égalité de sexe dans l'éducation. Le pays a
activement pris part aux différents forums précités; sa
Constitution, en son article 14, garantie l'égalité entre le sexe
dans l'éducation.
En plus, toujours pour réduire les
inégalités entre les sexes, le pays a lancé la
stratégie nationale genre. Dans le cadre de cette stratégie, un
groupe de travail genre (GTG) a été mis en place non seulement au
niveau du gouvernement central, mais aussi dans des provinces. Ce GTG comprend
les représentants de tous les ministères ; l'objectif de cette
stratégie étant d'intégrer la dimension genre dans tous
les secteurs de la vie publique. Sur terrain, des points focaux genre ont
été placés dans des divisions. Ils jouent des rôles
de conseillers en matière de genre dans leurs domaines
spécifiques. Mais à l'état actuel, il n'existe pas des
référentiels officiels pour l'analyse genre dans les
différents domaines. Les points focaux genre sont aussi, pour la plus
part, faiblement formés sur l'analyse de la dimension genre. Cette
lacune pourrait évidement avoir un impact sur l'appréciation de
l'équité qui, comme cela se vit au quotidien, risque d'être
réduite à la parité.
6
stratégie visant l'accroissement de l'accès, de
l'équité et de la rétention ainsi que
l'amélioration de la qualité de l'enseignement.
Toute cette mobilisation en faveur de l'éducation et de
l'égalité de sexe eut comme effet positif l'amélioration
de l'accès à l'éducation aussi bien pour les filles que
pour les garçons. Le taux net de scolarisation est passé, entre
2005 et 2011, de 87 à 97 % au primaire, et de 62 à 75 % au
secondaire2 ; le rapport entre les sexes indique qu'en 2015, l'on
comptait globalement à l'école primaire 97 filles contre 100
garçons. La disparité, en défaveur des filles, devient
plutôt profonde au fur et à mesure que le niveau de
l'éducation augmente.
Cependant, ces efforts n'ont pas contribué à
l'accroissement de l'équité entre les sexes. Les
disparités entre garçons et filles restent élevées
en ce qui concerne le taux d'achèvement à tous les niveaux de
l'enseignement, le taux de scolarisation au secondaire et le taux de
décrochage scolaire.
Pour preuve, en février 2013 le Ministère de
l'EPSP a publié le rapport d'une enquête nationale menée
sur les enfants et adolescents en dehors de l'école. Ce rapport montre
que 28,9% des enfants et adolescents âgés de 5 à 17 ans
sont en dehors de l'école, c'est-à-dire non scolarisé
(31,7% des filles contre 26,5% des garçons); et que cette proportion est
beaucoup plus élevée en milieu rural qu'aux centres urbains (33,4
% contre 20%). Le rapport révèle aussi que 6 ans après
l'entrée à l'école, 16,6 % des filles et 12,1% des
garçons abandonnent les études. L'écart devient profond
à 12 ans après l'entrée à l'école où
38,8% pour les filles quittent l'école contre 30,7% pour les
garçons. De manière brute, il est clair que les abandons
scolaires chez les garçons sont également inquiétants.
Toutefois, si ceux-ci ont la possibilité de regagner l'école
après une certaine période, il n'en est pas le cas pour certaines
filles, surtout celles qui décrochent pour être rendues grosses
(27,5 %3). Les règlements de certaines écoles, surtout
celles mises sous la coordination des confessions religieuses, ne donnent pas
la possibilité aux «fille-mères» de regagner les
études. Cette situation devient d'autant inquiétante que la plus
part des écoles des milieux ruraux sont organisées par les
confessions religieuses. La pratique elle-même n'est pas respectueuse des
dispositions contenues dans la convention relatives aux droits de l'enfant
ainsi que dans la constitution du pays.
Ainsi, au moment où la RDC s'investit dans la voie de
l'égalité des sexes et de l'autonomisation de la femme, il est
important que les actions menées soient pertinentes.
2Cfr Annuaire EPSP 2009-2010
3 Cfr résultat de nos enquêtes
menées dans les Uélés (une zone rurale)
4UNESCO (opcit)
7
Elles doivent traiter les vrais causes et facteurs des
inégalités. C'est cet appel qui justifie la
nécessité d'une recherche sur le pourquoi de l'absence de
l'équité dans l'éducation en RDC malgré tant
d'engagements. Car, comme nous allons le démontrer dans ce travail,
l'équité constitue le gage de l'autonomisation.
Il est certes vrai que l'autonomisation ne peut pas être
uniquement atteinte grâce l'équité dans l'éducation
; elle nécessite le recours aux autres domaines tels la santé,
l'économie, la justice, etc. Ce travail se focalise sur
l'éducation étant attendu que c'est elle qui est le principal
porteur du changement social. En plus, plusieurs expériences ont
prouvé l'efficacité de l'éducation dans la promotion de
l'équité et de l'autonomisation.
Dans une publication réalisée en 2011, l'UNESCO
mentionne un exercice de modélisation des acquis conduit par HANUSHEK et
all. dans 50 pays entre 1960 et 2000. Cette étude a
démontré qu' «une année de scolarisation
supplémentaire pourrait augmenter les revenus d'un individu de 10 % et
la moyenne annuelle du Produit Intérieur Brut de 0,35% ».
L'étude ajoute que de manière générale, le
bénéfice économique pour les individus et les
sociétés apparait plus élevé dans les pays à
bas revenu que dans les pays à haut revenus, et plus observés
également pour l'enseignement secondaire ou supérieur. Sur ce
point, l»Internationale de l'Education' ajoute que seuls des citoyens
éduqués peuvent espérer la croissance économique
(inclusive) et cela nécessite, aujourd'hui plus que jamais, une
égalité d'accès à une éducation de
qualité.
Dans le même sens, le Programme des Nations Unies pour
le Développement signale qu'en Papouasie-Nouvelle-Guinée, les
personnes vivant dans une famille dont le chef n'a pas reçu
d'éducation formelle représentent plus de 50 % des pauvres, et
qu'en République de Serbie, le niveau de pauvreté dans ces
familles est trois fois plus élevé que la moyenne
nationale4. Il ne faut également pas ignorer que, avec plus
de compétences, les filles sont plus compétitives sur le
marché de travail et peuvent aspirer à des emplois mieux
rémunérés.
En fin, en réduisant l'isolement social des femmes,
l'éducation renforce leurs capacités d'organisation et de
mobilisation. Elle leur permet de développer leur capital social ainsi
que des aspirations et l'aptitude à prendre des décisions.
Dans ce sens, en 1997, ZUNIGA a partagé, dans une
publication de l'UNESCO
(1997), l'expérience du `Projet multinational de
l'éducation et de travail de
l'organisation des Etats
américains PME/OEA' mis en place par la Colombie. Ce projet
8
a permis de doter les femmes de ce pays des capacités
à assumer efficacement les rôles de reproduction, de production et
de direction.
Cependant, l'éducation ne constitue toujours pas un
moteur pour l'autonomisation de la femme. Elle peut, dans certaines
circonstances, en constituer des blocages. L'éducation peut par exemple
être utilisée pour assoir la domination de l'homme sur la femme.
Ainsi faut-il garder une vigilance sur les règles qu'elle transmet.
Car, ne l'oublions pas, l'école est le reflet des
pratiques sociales dominantes. Ainsi, au lieu de favoriser un changement des
comportements discriminatoires, l'éducation peut se transformer en
reflet des pratiques discriminatoires de la société et
perpétuer l'injustice entre hommes et femmes. Par exemple, dans leurs
propos ou illustrations des faits sociaux, les enseignants peuvent,
inconsciemment, reproduire des pratiques discriminatoires plutôt que d'y
réfléchir.
En plus, étant entendu que l'éducation ne se
limite pas à l'école, les enfants peuvent recevoir de leurs
parents une socialisation sexiste. Certes, dès les jeunes âges,
les enfants reçoivent de leurs parents des valeurs, convictions et
cultures. Ces valeurs, qui peuvent s'avérer discriminatoires, seraient
transmises, consciemment ou inconsciemment, aux travers des échanges que
les parents ont avec les filles et les garçons, des jouets qu'ils leur
offrent, des comportements qu'ils acceptent et des règles qu'ils
imposent aux enfants de tel ou tel autre sexe.
En conclusion, l'éducation peut constituer un levier
important à l'autonomisation de la femme. Mais cela dépend des
actions développées pour atteindre ce but. Les stratégies
visant l'autonomisation de la femme et se focalisant uniquement sur les aspects
quantitatifs de l'éducation produisent très peu d'impact sur
l'égalité de sexe.
2. Problématique
En 2010, la RDC a élaboré sa Stratégie
quinquennale (2011-2016) pour le développement du sous-secteur de
l'Enseignement primaire, secondaire et professionnel (EPSP). A travers cette
stratégie, le gouvernement congolais s'est engagé à
accroitre l'accès à l'éducation, l'équité et
la rétention, et à améliorer la qualité de
l'éducation. Pour y parvenir, deux plans ont été
élaborés: Le « Plan d'actions prioritaires» pour la
période 2010-2011 et le «Plan Intérimaire de
l'Education» mis en oeuvre de 2012 à 2014.
9
Cependant, plusieurs rapports mentionnent l'absence de
l'équité dans l'éducation congolaise. Il s'agit notamment
du rapport de l' « enquête nationale sur les enfants en dehors de
l'école, publié par le ministère de l'EPSP, et du rapport
bilan des OMD produits en 2015 par la RDC publié par le PNUD. A la
lecture de ces rapports on s'aperçoit que le pays a
déployé les efforts énormes dans le secteur de
l'éducation, et que ces efforts ont permis d'accroitre le taux brut de
scolarisation dans l'enseignement primaire. On dirait donc que le pays
enregistre une très faible différence entre les filles et les
garçons quant à l'accès à l'école de base,
donc l'absence d'une discrimination directe entre les sexes. Paradoxalement, le
niveau d'équité est resté faible dans l'éducation.
Les inégalités entre les sexes persistent, la rétention
à école et l'achèvement des cycles scolaires restent des
domaines dans lesquels les différences entre filles et garçons
sont profondes. Et cette différence reste très marquée en
milieu rural comparativement aux centres urbains, la situation de la femme
étant différente dans ces deux milieux.
Ainsi, partant de l'observation sur terrain, nous affirmons
que l'une des raisons fondamentales de la persistance de
l'inégalité entre filles et garçons est le fait que
l'autonomisation de la femme ne soit pas encore acquise dans le secteur de
l'éducation. C'est pourquoi, de ce paradoxe apparait un questionnement :
dans le contexte rural de la RDC, comment faire à ce que
l'éducation conduise à l'autonomisation de la femme?
Face à cette question, la théorie de la justice
sociale de Rawls et celle d'égalisation des opportunités de Sen
nous renseignent que l'éducation contribue à l'autonomisation de
la femme au travers de la promotion de l'équité dans
l'éducation et de la prise en compte de la dimension genre dans les
stratégies et plans de l'éducation.
C'est de cet enseignement que naissent ces deux interrogations
spécifiques:
a) Les objectifs prioritaires retenus par la stratégie
de développement de l'EPSP sont-ils suffisants pour promouvoir
l'équité dans l'éducation?
b) Se référant au « Cadre d'Habilitation
de la Femme », de quelle manière la Stratégie de
développement du sous-secteur de l'EPSP prend-t-elle en compte la
dimension genre?
3. Objectifs de l'étude
Nous avons décliné nos objectifs en objectif
général et en objectifs spécifiques. Objectif
Général
L'objectif général du présent travail est
la promotion de l'autonomisation de la femme rurale à travers
l'éducation en RDC.
10
Objectifs spécifiques
De manière spécifique, à l'issu de ce
travail, nous cherchons à:
- Analyser la cohérence entre la nature des
iniquités entre les sexes dans l'éducation en RDC et les
objectifs prioritaires retenus par la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP ;
- Evaluer le niveau de prise en compte de la dimension genre
par la stratégie de développement du sous-secteur de l'EPSP.
4. Hypothèse de la recherche
A travers notre travail, nous chercherons à
démontrer les hypothèses suivantes:
Hypothèse 1: Premièrement, nous estimons que,
compte tenu du fait que la majeure partie de la population congolaise vit en
milieu rural, les objectifs prioritaires de la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP ne sont pas suffisants pour
promouvoir l'équité dans l'éducation.
Hypothèse 2: En second lieu, nous pensons que les axes
principaux de cette stratégie s'engagent de manière neutre dans
la résolution des problèmes d'égalité de sexe, ce
qui conduit au maintien des inégalités et au manque
d'autonomisation.
5. Intérêts de l'étude
L'intérêt de notre travail se situe à quatre
niveaux:
? Sur le plan théorique, cette étude condense
suffisamment des précisions théoriques sur les notions
d'égalité de sexe, d'équité et d'autonomisation de
la femme. Ces informations pourront éclairer, non seulement le pouvoir
public, mais aussi les futures chercheurs sur le sens des concepts
d'autonomisation. Et partant, cette meilleure connaissance pourra permettre de
proposer un modèle plus inclusif, efficace et pertinent que l'actuel.
? Au niveau socio-professionnel, ce travail apporte un ajout
sur la gamme des informations existantes sur la situation de la femme au sein
des structures éducatives. Les données collectées et
analysées pourront constituer des données de base pour des
éventuelles interventions en faveur de l'équité dans
l'éducation. En plus, cette étude pourrait servir, pour les
points focaux genre du ministère de l'éducation, de modèle
d'analyse de l'intégration de la dimension genre dans ce secteur.
11
? Sur le plan académique, cette étude pourra
nous permettre l'obtention du grade de Master en Programmation du
développement et Intégration régionale. En plus, les
étudiants de l'IPD-AC pourront s'inspirer de notre démarche et de
nos exemples pour comprendre l'analyse de la prise en compte de la dimension
genre dans les projets de développement.
? Sur le plan économique : ce travail contribue
à la construction d'un développement inclusif car il valorise
l'apport de la femme. Une femme mieux éduquée est exemptes de
toutes les barrières constitue une ressource humaine non
négligeable pour le développement.
6. Méthodologie de l'étude
Pour réaliser ce travail, nous nous sommes servis de
données primaires et des données secondaires. Les données
premières sont issues de l'enquête que nous avons menée sur
terrain et du stage effectué durant six mois au sein de l'organisation
internationale COOPI, alors que les secondes ont été obtenues
principalement à travers la technique documentaire.
? La réalisation de l'enquête
Nous avons réalisé une enquête sur deux
paramètres : la place que la femme occupe dans les structures
éducatives formelles et le contenu des manuels scolaires.
La première enquête a été
effectuée au sein des établissements scolaires et avait pour
objectif d'analyser la place qu'occupent la femme et la fille dans les
structures éducatives formelles (comités des
élèves, corps enseignant chef d'établissements, etc). Pour
y parvenir, nous avons ciblé deux provinces
éducationnelles5 (Orientale 3 et Orientale 4), couvrant
respectivement les provinces administratives du Haut Uélé et du
Bas Uélé. Les territoires de la RDC étant si vastes et les
infrastructures de transport limitées, nous nous sommes basés sur
les critères d'accessibilité pour retenir les localités
dans lesquelles nous avons menées nos enquêtes. Ainsi, à
l'aide d'un questionnaire préétabli, nous nous sommes
physiquement approchés des écoles et effectuer un sondage
auprès chefs d'Etablissements. Pour retenir les écoles cibles,
nous retenions la quatrième école inscrite sur la liste des
écoles d'un milieu spécifique. Cette technique nous a permis
d'obtenir un taux de réponse de 100 % et de recueillir des
données officielles pour chaque établissement.
5 L'annexe 3 présente la structure de
l'organisation du Ministère de l'EPSP en RDC.
12
La seconde enquête consistait à analyser le
contenu des manuels scolaires pour y décrypter des éventuels
stéréotypes et clichés sexistes. A cet effet, nous avons
collectionnés trois manuels contenant les textes de français
utilisés au primaire et un manuel rassemblant les textes utilisés
au secondaire. Ainsi, 85 textes ont été analysés, dont 29
du primaire et 56 du secondaire. Nous avons par la suite effectué une
lecture systématique de ces manuels en y recherchant des messages et
propos sexistes.
? La réalisation du stage
Comme prévu dans le programme de formation de l'IPD,
nous avons mené un stage de perfectionnement durant six mois (de juin
à novembre 2015) au sein de l'organisation internationale COOPI. Cette
organisation, de droit italien, est comptée parmi les principaux acteurs
de lutte contre la violence faite à la femme en RDC. Lors de notre
stage, elle développait un projet de lutte contre les violences
sexuelles et sexistes dans les deux provinces précitées.
Ainsi, durant ce stage, nous avons participé et
contribué à la conception et la mise en oeuvre d'une
stratégie de lutte contre les violences et harcèlements sexuels
en milieu scolaire. Cela nous a permis de prendre connaissance des
discriminations indirectes (refus aux fille-mères de regagner
l'école) auxquelles les jeunes filles font face ainsi que de
l'environnement défavorables dans lequel celles-ci évoluent (par
exemple le harcèlement sexuel commis par certains enseignants).
? La récolte des données secondaires
Cette récolte s'est faite à travers la technique
documentaire. En effet, pour soutenir nos analyses, nous avons fait recours aux
données et statistiques officielles contenues dans l'annuaire
statistique de l'EPSP 2008-20096, les rapports OMD concernant la
RDC, les rapports de l'enquête nationale sur les enfants et adolescents
en dehors de l'école, etc.
7. Revue de la littérature
Le développement du présent travail nous a
exigé le recours à une documentation intense à propos des
concepts de liberté, autonomisation de la femme, éducation etc.
Dans cette section, nous présentons uniquement les principaux ouvrages
et travaux référencés.
6 Il sied de mentionner l'inexistence des annuaires
complets postérieurs à ceux-ci. Nous avons décidé
d'utiliser celles de 2008-2009 par besoin de référence aux
données officielles.
13
Comme mentionné dans le contexte, l'autonomisation de
la femme se veut de sortir cette dernière de l'assujettissement qu'elle
subit de la part de son homologue homme. Mais ce sujet soulève une
question, celle de savoir ce qui serait à l'origine de cet
assujettissement. Et cette question a suscité plusieurs débats et
écrits.
En 1976, BEAUVOIR S. (1976) publia un ouvrage intitulé
«Le deuxièmes sexe». A travers ce livre, l'auteure questionne
l'origine les inégalités entre hommes et femmes. Et en guise de
conclusion, elle récuse la maternité, le pouvoir accordé
à l'homme depuis la préhistoire et la propriété
privée (ne donnant pas à la femme la possibilité
d'hériter ni de posséder). Pour BEAUVOIR, ces facteurs
infériorisent la femme. Ils sont soutenus par des mythes
(préjugés et les stéréotypes) diffusés par
la religion, la philosophie, la théologie mais aussi la science. Ainsi,
pour libérer la femme de cet état, l'auteure préconise
l'accession par les femmes à une parfaite égalité
économique et sociale.
Cependant, par opposition à la conception qui fait de
la division sexuelle du travail l'origine de l'assujettissement de la femme,
BOURGUIGNON A. (1989) pense que cet assujettissement découle
plutôt de la peur que l'homme éprouve devant la sexualité
féminine. L'auteur argue que dans les sociétés de
chasseurs-pêcheurs, les femmes n'étaient pas opprimées ;
leur rôle prépondérant dans l'apport de la nourriture et
l'éducation des enfants leur attirait une grande considération.
Il ajoute que, « à partir du moment où sa vie est devenue
sédentaire, et partant du fait que le corps de la femme recèle
l'inquiétant mystère de la reproduction et assure la descendance,
l'homme a cherché à tout prix à sauvegarder son alliance
et sa filiation ».
En rapport avec la thèse de BOURGUIGNON, nous pensons
que, si elle était valable à une certaine époque, elle
mérite d'être réévaluée compte tenu des
actuels changements énormes survenus, tels la participation des femmes
dans les activités à forte mobilité, la libération
sexuelle des femmes dans certaines mesures, etc.
Parlant, par ailleurs, de l'autonomisation de la femme, il
sied de soulever l'absence d'un consensus sur sa définition. Les
diverses théories de la justice sociale analysées et les
idées fondant les différents mouvements de défense des
droits de la femme proposent des définitions différentes.
Toutefois, quelques éléments importants peuvent être
retenus dans l'une ou l'autre conception.
En effet, PAZ R. (1990), n'admet pas la définition qui
fait de l'autonomisation un processus permettant aux individus le renforcement
de leurs capacités de diriger et de contrôler leurs propres vies
conformément à leurs propres besoins et aspirations.
14
Pour cet auteur, l'autonomisation signifie `travailler avec le
people' et non pour le peuple ; elle est une approche participative et se
construit sur les forces existantes chez les individus et au sein de la
communauté. A notre avis, une telle conception présente le risque
de limiter l'autonomisation à la simple participation ou parité,
avec comme conséquence l'oubli des problèmes structurels qui
conditionnent la subordination de la femme. En plus, il n'est pas
évident que par le fait de participer à une activité
(productive par exemple), la femme ait une influence sur la destination des
produits ou une conscience sur les inégalités sociales.
Par contre, dans le Rapport du Séminaire international
tenu à l'UIE, publié par l'UNESCO (1995), STROMQUIST admet que
l'autonomisation est un concept socio-politique qui transcende la participation
politique formelle et la conscientisation. Elle estime donc qu'une
définition complète de l'autonomisation de la femme doit
comprendre les aspects aussi bien cognitifs, psychologiques, politiques
qu'économiques.
Pour sa part, SEN A. (2000) estime que les libertés ne
sont pas uniquement les aboutissements primaires du développement, mais
elles en constituent également les principaux moyens. Cet auteur admet
qu'il existe une connexion étroite entre les différentes sortes
de libertés. Car la liberté politique (en termes de
liberté d'expression et d'élection) aide dans la promotion de la
sécurité économique; les facilités
économiques (comme les opportunités de participation dans le
commerce et la production) peuvent faciliter la génération aussi
bien de l'abondance personnelle que les ressources publiques nécessaires
aux facilités sociales. Ainsi, SEN éclaire le présent
travail en ce sens que sa théorie nous permet de comprendre le lien
entre l'égalité de sexe dans l'éducation et
l'éventuelle autonomisation de la femme.
En fin, il existe plusieurs rapports et travaux scientifiques
qui se sont penchés sur la question d'éducation, de genre et de
stéréotypes sexistes.
En 1997, STEELE C., professeur à l'Université
Sanford, a mené une étude sur les effets des barrières que
les femmes et les afro-américains affrontaient dans la réussite
scolaire en Amérique. L'auteur s'est posé la question de savoir
s'il est possible que ces deux groupes d'individus affrontent une
expérience scolaire différente avec respectivement les hommes et
les blancs alors qu'ils vivent les mêmes situations dans les salles de
classe : mêmes enseignants, mêmes manuels scolaires, des meilleures
salles de classe et un traitement identique.
15
Aux termes de cette enquête, il s'est
avéré qu'effectivement la réussite scolaire pour ces deux
groupes de personnes était très influencée par des
stéréotypes qu'ils subissaient. D'un côté, il
était largement admis que les mathématiques sont faites pour les
garçons et non pour les filles ; et de l'autre, que les blancs sont
naturellement intelligents que les noirs. L'auteur conclut que les personnes
qui ne s'identifient pas dans un domaine accordent moins d'importance au
domaine concerné comparativement à celles qui ne subissent pas
des stéréotypes. Ils peuvent également être
démotivés ou amenés à développer moins
d'efforts.
Bien plus, dans sa publication, le Comité Directeur
pour l'égalité entre les femmes et les hommes du Conseil de
l'Europe (2011) mentionne une étude menée en 2002 auprès
500 femmes cadres supérieurs dans les entreprises et cabinets de
recrutement à travers toute l'Europe pour comprendre les obstacles
à la promotion des femmes. Cette étude a
révélé que «pour les deux-tiers des femmes cadres
interrogées, les stéréotypes et les idées
préconçues sur les rôles et les capacités des femmes
constituent l'obstacle le plus important. Le cliché de la femme qui doit
s'occuper de sa famille et l'association leadership fort/sens des affaires
comme qualité typiquement masculine font toujours barrage à la
promotion des femmes et confortent la prédominance des hommes aux
fonctions supérieures de management»7.
Au niveau scolaire par ailleurs, DUQUET F. (2012) ajoute que,
suite aux stéréotypes, «les attentes des enseignants envers
les filles seraient moins élevées. Ces dernières
reçoivent, par exemple, davantage des questions fermées que leurs
homologues masculins». Cette attitude serait liée aux idées
préconçues des enseignants sur les rôles que les femmes
sont censés jouer dans la société. Ce manque d'attente
envers les filles ne leur permet pas de développer les talents ou de
faire valoir leurs capacités naturelles.
Il est cependant important de soulever l'insuffisance, si pas
l'absence, des ouvrages traitant sur l'autonomisation de la femme au niveau
national. Cette lacune nous a conduits, à ce qui concerne les
références nationales, à nous focaliser sur les rapports
et travaux académique.
En fait, en février 2013, la République
Démocratique du Congo a publié le rapport d'une enquête
nationale sur les enfants et adolescents en dehors de l'école. Il
ressort de cette enquête que l'exclusion scolaire est entre autre due
à la persistance des
7 Etude cité dans la publication du CDEG
(2011), page 12.
16
inégalités de genre dans l'éducation.
Car, à en croire le rapport, «si les efforts déployés
par l'Etat et ses partenaires dans la scolarisation des enfants ces
dernières années ont permis de réduire de manière
significative les inégalités d'accès à
l'école entre garçons et filles, des inégalités de
genre existent toujours au niveau secondaire, surtout en milieu rural en
défaveur des filles». Il faut cependant remarquer que dans ce
rapport, le concept d'égalité de genre réfère
à l'égal accès à l'école et ne questionne
pas les valeurs cultivées par le système éducatif.
Ensuite, en 2005, LUFUTA M. a présenté à
l'Université de Kinshasa, un mémoire de fin d'études sur
l'autonomisation de la femme. Ce travail cherchait à savoir si la
déscolarisation est un facteur qui ne permet pas aux femmes de
générer un revenu capable de promouvoir leur autonomisation.
Ainsi, après une enquête effectuée auprès de 400
ménages dans six quartiers de la ville de Kinshasa, LUFUTA conclut qu'il
n'existe pas de lien entre l'autonomisation de la femme et sa scolarisation, et
donc que la déscolarisation de la femme ne constitue pas un frein
à son autonomisation. Il faut néanmoins constater que ce travail
n'évalue l'autonomisation de la femme qu'à travers la seule
faculté de production de la femme, ce qui nous parait restrictif.
Sur un autre angle, en 2007, UMBI L. a présenté
un mémoire à l'Université Ouverte de Goma sur la dimension
genre et son impact dans le développement. Cette recherche est partie du
constat d'un résultat mitigé des efforts visant
l'amélioration des relations entre hommes et femmes. UMBI voulait
identifier les voies et moyens à mettre en oeuvre pour rendre effectif
l'impact souhaité des relations harmonieuses entre les hommes et les
femmes pour le développement. Après les analyses des quelques
programmes de sensibilisation tenu sur le genre, UMBI propose
l'élaboration d'un programme de renforcement des capacités des
différents partenaires en matière de genre et
développement, la prise en compte du genre, par les acteurs de
développement, dans leurs processus de planification et l'application,
par les gouvernants, des textes légaux garantissant les droits de
l'homme et de la femme en matières de travail et autres avantages.
En fin, en 2009, BANDOMBELE I. a défendu, à
l'Université de Kisangani, une thèse sur l' « ampleur et
réduction des disparités entre les sexes dans la scolarité
primaire et secondaire à Kisangani ». A travers cette recherche,
BANDOMBELE s'était engagé à identifier les facteurs qui
sont à la base des disparités entre filles et garçons dans
la scolarisation en 2005 et identifier, de ce fait, des stratégies de
réduction de ces disparités. Après analyse des
données, le chercheur a conclu que les écarts entre les
17
sexes étaient très faibles à
l'école primaire, le système éducatif était sur la
voie d'atteindre l'objectif de la parité entre les sexes en 2005, les
disparités persistaient par ailleurs au niveau secondaire et seraient
dues aux facteurs socioculturels, socioéconomiques, politiques,
scolaires et psychologiques. Comme mesure de réduction de ces
disparités, BANDOMBELE propose le paiement d'un salaire décent et
régulier aux fonctionnaires, la garantie d'un enseignement primaire
gratuit et obligatoire, la conscientisation des filles et des familles sur
l'importance de l'instruction et le changement des attitudes sur
l'éducation de la fille.
8. Enoncé du plan
Mis à part l'introduction générale, le
présent travail se décompose en deux parties. La première,
intitulée « problématiques de l'équité dans
l'éducation en RDC », présente les iniquités dont la
femme est victime en RDC. Elle est décomposée en deux chapitres.
Le premier chapitre, intitulé « L'équité au regard
des théories de justice », examine le cadre théorique de
l'égalité de sexe. Il opère un inventaire des
théories de la justice en lien avec l'égalité de sexe et
propose un condensé des analyses sur la conception de la justice
sociale. Le deuxième chapitre, nommé « Etat de lieu des
iniquités dans l'éducation en RDC » relève
l'état de lieu de la scolarisation de la fille et de la femme en RDC. Se
basant sur divers rapports, ce chapitre présente les résultats
atteints par la RDC dans la mise en oeuvre des indicateurs de l'
«Education Pour Tous» et relève les inégalités
de ces résultats entre filles et garçons.
Pour sa part, la seconde partie, dénommée
«L'éducation congolaise et la sensibilité au genre »,
analyse le niveau de prise en compte de la dimension genre les politiques
publiques en matières de l'éducation. A cet effet, le
troisième chapitre, intitulé «
Généralités sur l'autonomisation de la femme »
propose une théorie sur l'autonomisation de la femme et relève
les engagements pris au niveau international et national pour parvenir à
cet objectif. Ensuite, le quatrième chapitre, appelé «
degré de prise en compte de la dimension genre par la stratégie
de l'éducation en RDC » analyse le degré de prise en compte
de la dimension genre par la stratégie de développement du
sous-secteur de l'éducation et propose le moyen permettant une meilleure
prise en compte de la dimension genre par cette stratégie.
En fin, avant la conclusion générale, ce travail
relève quelques recommandations qui, à notre avis, sont
nécessaires pour que le système éducatif congolais soit
sensible au genre et contribue effectivement à l'autonomisation de la
femme.
18
PREMIERE PARTIE : PROBLEMATIQUE DE L'EQUITE DANS
L'EDUCATION EN RDC
19
INTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE
Dans son cours «Evaluation des
projets/programmes»8, TOUMBI B. enseigne que l'impact d'un
projet, programme ou d'une politique de développement est fortement
influencé, d'une part, par la cohérence entre les
activités/résultats attendus et les objectifs visés et,
d'autre part, l'adaptation des objectifs au contexte du projet.
Partant de cet enseignement, la première partie du
présent mémoire se propose d'analyser la cohérence interne
et externe de la stratégie de développement du sous-secteur de
l'éducation par rapport à l'objectif d'amélioration de
l'équité dans l'éducation. Pour ce faire, après
avoir élucidé la notion de justice sociale à travers la
lecture de certaines théories de justice sociale, nous allons
démontrer les inégalités entre hommes et femmes dans les
structures éducatives congolaises. Il s'agira de procéder
à une revue comparative des indicateurs de scolarisation pour les
garçons et les filles et de la participation de la femme dans les
structures de gestion. La partie sera clôturée par une analyse des
causes de ces inégalités.
8TOUMBI B., Cours d'Evaluation des projets et
programmes, Masters 2 PDIR, IPD-AC, année académique
2014-2015.
20
PREMIER CHAPITRE : L'EQUITE AU REGARD DES
THEORIES DE LA JUSTICE
INTRODUCTION DU PREMIER CHAPITRE
La promotion de la justice sociale implique-t-elle qu'il
faille accorder aux filles et aux garçons les mêmes traitements,
les placer tous dans les conditions identiques à l'école? Un
traitement, ou une action visant uniquement les filles peut-il être
considéré comme un comportement discriminatoire ?
Le premier chapitre de notre mémoire cherche à
trouver une réponse à cette inquiétude. Pour y parvenir,
nous allons interroger certains auteurs ayant développés des
idées sur la justice sociale.
1.1 Egalitarisme ou Equité
1.1.1. La notion d'égalité
Egalité et équité sont-elles synonymes? A
quoi font-elles référence?
Ainsi, pour mieux appréhender les sens de
l'égalité et de l'équité, il nous semble utile de
recourir aux théories modernes de la justice. Il s'agit, pour nous, de
chercher à comprendre ce que chacune de ces théories entend par
justice sociale et relever les voies proposées pour l'atteindre.
Cependant, conscient de l'existence de plusieurs
théories de la justice, nous allons nous limiter à celles qui
nous semblent avoir un lien avec notre sujet de travail, notamment
l'utilitarisme, la théorie d'égalisation des biens premiers, la
théorie d'égalisation des ressources étendues,
l'égalisation des opportunités et le courant de pensée sur
l'éthique de la sollicitude.
j. L'utilitarisme
L'utilitarisme est un courant des pensées qui acceptent
comme fondement morale l'utilité ou le principe du plus grand bonheur.
Les tenants de cette théorie soutiennent que les actions sont bonnes en
fonction du bonheur qu'elles engendrent, et mauvaises si elles tendent à
procurer un malheur. Par bonheur, ces auteurs comprennent le plaisir ou
l'absence de souffrance ; et par malheur, la souffrance ou l'absence du
bonheur. Ils admettent donc qu'une société juste est celle qui
recherche le plus grand bonheur au plus grand nombre. Ceci serait possible,
en
Pour RAWLS, est juste une société dont les
institutions repartissent les biens premiers sociaux entre ses membres de
manière équitable. Par biens premiers,
21
termes de méthodologie, par la maximisation de la somme
des utilités des membres qui composent une société.
Notons que l'utilitarisme est la théorie la plus connu
du « courant welfariste », celui qui regroupe les théories du
bien-être, c'est-à-dire celles qui évaluent la justice
d'une action en fonction du bien ou de l'utilité qu'elle procure
à l'individu ou à une communauté. Parmi les tenants de ce
courant, il y a lieu de citer le philosophe et économiste anglais JOHN
STUART MILL qui, en 1869, publia « the subjection of women » dans
lequel il revendiquait, au nom de la justice et de la liberté, les
droits à l'éducation, au travail et au suffrage pour les
femmes.
En planification de l'éducation, l'utilitarisme
signifierait par exemple concevoir un programme qui vise à garantir la
scolarisation à un grand nombre des congolais. La justice sociale
signifierait le fait pour la grande majorité des congolais à
être scolarisée. A ce sens, l'accroissement du taux de
scolarisation témoignerait le progrès vers
l'égalité dans l'éducation.
Par ailleurs, étant donné que la notion
d'utilité comporte un caractère subjectif, il semble difficile de
savoir à quel moment l'égalité serait atteinte. Cette
difficulté risque par exemple de faire croire que les
préférences adaptatives constituent un bien-être. En plus,
avec cette approche, l'atteinte du bien-être ne prend pas en compte
l'effort de la personne, le bonheur pouvant par exemple être
accordé par principe, convention, compassion, etc. Dans ce cas, la
personne ne sera considérée que comme bénéficiaire
passif d'une sollicitude, et non comme une propriétaire des droits.
ii. La Théorie d'égalisation équitable
des biens premiers (RAWLS)
Cette théorie est l'invention du philosophe
américain JOHN BORDEN RAWLS (2008). En effet, dans son ouvrage
`Théorie de la Justice', RAWLS récuse l'utilitarisme dominant
car, selon lui, l'égalisation du bien-être entre individus ne peut
être juste à cause de l'existence des gouts dispendieux pour
lesquels les individus doivent être tenus pour responsables par suite de
leurs choix. C'est pourquoi, avec cette théorie, l'auteur cherche
à définir les principes généraux de fonctionnement
des institutions d'une société juste, d'un point de vue justice
distributive, à partir d'une démarche fondée sur les
théories du choix rationnel.
22
l'auteur attend les biens sociaux (conditions et ressources)
que tout individu rationnel est censé désirer et qui lui
permettent de réaliser son projet de vie rationnel, c'est-à-dire
des biens utiles à la satisfaction de n'importe quelle
préférence. Il s'agit, selon lui, des libertés
fondamentales, des opportunités offertes aux individus, des pouvoirs et
privilèges, des revenus et richesse ainsi que des bases sociales du
respect de soi.
Pour parvenir à cette égalisation, l'auteur
propose l'existence d'une attente entre les membres de la société
sur les modalités de répartition équitables des conditions
et des ressources pour que chaque individu puisse mettre en oeuvre sa propre
idée du bien compatible avec l'organisation de la société.
Il exige ensuite que la répartition de ces biens premiers respecte les
principes de la liberté de base pour tous, et celui de
l'égalité de chance et de différence.
Encadré 1: Les principes de répartition
des biens de J. Rawls
? Principe de liberté: égale
liberté pour tous, mais qui ne concerne que les libertés de base,
excluant la liberté de contracter ou de posséder des moyens de
production. Ce principe se réfère exclusivement aux
libertés fondamentales et opportunités offertes aux individus
pour lesquelles aucun avantage préférentiel ne peut être
justifié.
? Egalité de chance et principe de
différence : les pouvoirs et privilèges, les revenus et
la richesse ainsi que les bases sociales doivent être distribués
à l'avantage des membres des plus défavorisés de la
société. Ainsi, les inégalités ne sont
justifiées que dans les cas où elles ont été
produites lors d'un processus basé sur des règles justes et
équitables, ou lorsqu'elles procurent le plus grand
bénéfice aux membres les plus désavantagés de la
société, ou encore lorsqu'elles sont justifiées par
l'utilité commune.
Source : Nous-même, à partir des lectures
A travers cette théorie, RAWLS s'inscrit dans la
tradition contractualiste et considère la société comme un
système de coopération acceptée entre les personnes
libres, égales et rationnelles. Pour lui, cet accord doit être le
résultat d'un processus rationnel de délibération, et
être équitable, notamment en étant indépendant des
conditions historiques, naturelles ou sociales. L'individu impliqué dans
un tel processus doit donc être tenu responsable du résultat issu
de son choix.
23
iii. Théorie d'égalisation des ressources
étendues de DWORKIN
Comme détaillée ci-haut, la théorie de
RAWLS se limite aux biens sociaux et ne traite pas la question de compensation
des inégalités des talents et handicaps. Ainsi, admettant qu'est
juste une société qui assure à tout individu un traitement
égal, RONALD DWORKIN, philosophe et juriste américain,
soulève la problématique de compensation équitable des
handicaps et des talents.
Revenant sur la notion de responsabilité, DWORKIN
avance l'idée selon laquelle la conception de la vie bonne implique une
distinction entre le contexte et la personne. Pour lui, la possibilité
d'une réussite humaine réside dans l'art de relever, avec
compétence, le défi que nous imposent les circonstances dans
lesquelles nous sommes placés. DWORKIN pensent donc que si les individus
étaient en tout point identiques, ce qui n'est pas possible,
l'égalisation impliquerait simplement de donner à chacun une part
égale des ressources externes de la société.
Or, nous remarquons avec DENIS MAGUAIN (2002) que dans la
réalité, «les individus sont loin d'être parfaitement
homogènes. Ils se distinguent, d'une part, en ce qui concerne les
circonstances auxquelles ils font face (milieu social, carte
génétique, handicap, éducation, etc.) et, d'autre part,
les ambitions et préférences qu'ils développent ».
Ainsi, DWORKIN admet que les circonstances auxquelles fait face une personne
peuvent s'interpréter comme une partie des ressources lui permettant
d'accomplir sa conception de vie bonne. Il faut donc prendre en compte ces
ressources, non seulement externes, mais également certaines variables
personnelles reflétant les circonstances entourant une personne. A cet
effet, une juste redistribution cherchera à égaliser aussi bien
les ressources sociales externes (biens premiers de RAWLS) que l'ensemble des
ressources internes (qui sont non échangeables, comme les talents, le
handicap, et autres aptitudes naturelles).
Par ailleurs, si les circonstances (handicap) et talents
constituent des ressources, comment parvenir à leur égalisation
entre les individus ? Pour répondre à ce défi, DWORKIN
propose qu'il faille collecter un impôt sous la forme de prime
d'assurance volontaire, et que toute personne puisse y participer avec un
même montant. Ensuite, l'Etat devra effectuer un transfert, sous la forme
d'aide publique, aux personnes défavorisées par le sort. Ce
serait aussi la même procédure pour compenser les personnes ayant
des talents inégaux. Car, selon DWORKIN, les individus ont la
possibilité de s'assurer contre une éventualité d'avoir un
faible revenu. DWORKIN rejette par contre l'option de traiter les
inégalités des talents en
24
matières d'égalisation des ressources et appelle
un tel régime «l'esclavage des talentueux».
La théorie de RAWLS pose le jalon pour la
problématique de la responsabilité de la femme dans son
asservissement et permet de répondre à la question de savoir s'il
faille la compenser pour les situations dont elle ne serait pas tenue pour
responsable. Pour l'éducation par exemple, est-ce par volonté et
libre choix que les filles désertent les écoles plus que les
garçons, réussissent moins bien que les garçons, qu'elles
sont moins représentées au secondaire que les garçons?
iv. La théorie d'égalisation des
opportunités de SEN
Rejetant les idées welfaristes et se situant en
opposition avec les pensées ressourcistes de RAWLS et DWORKIN, AMARTYA
KUMAR SEN, économiste et philosophe indien, appelle à mettre
l'accent plutôt sur les chances ou les opportunités que sur les
résultats finaux ou les ressources.
Rappelons tout d'abord que la théorie de SEN fait
partie du courant d'égalisation du domaine de choix ou des
opportunités. Cette école avance l'idée
générale que la distribution des biens est juste dès lors
que l'ensemble des niveaux des résultats que l'individu peut atteindre
avec cette part et ses caractéristiques personnelles est le même
pour tous. L'idée est de mettre l'accent, non sur les résultats
effectivement atteints (car ils dépendent des choix des individus), mais
sur l'ensemble des résultats possibles, c'est-à-dire des
possibilités réelles des résultats. Ce qui compte dans ce
courant n'est pas la quantité des ressources, mais ce qu'elles
permettent à l'individu de faire ou d'être.
C'est dans cette foulée que SEN développe la
théorie de l'égalité des
capabilités. A travers cette démarche, l'auteur cherche une
approche alternative focalisée directement sur la liberté, vue
dans la forme des capabilités individuelles de faire quelque chose
qu'une personne a raison de réaliser. Il met l'accent sur l'importance
des politiques publiques et de la participation populaire dans la prise de
décision. Dans « Development as freedom (2000), l'auteur precise
que « these capabilities can be enhanced by public policy, but also, on
the other side, the direction of public policy can be influenced by the
effective use of participatory capabilities by the public».
Ainsi, pour évaluer ce bien-être, SEN pense qu'il
soit illusoire de fixer un critère objectif. Raison pour laquelle il
définit un certain nombre des composantes objectives qu'il appelle
« functionings » et qui sont, pour lui, des dimensions
25
importantes de la vie que toute personne est censée
désirer (ex : être correctement nourri, paraître en public
sans honte, être en bonne santé, etc). Ainsi, le bien-être
d'un individu, dans le sens restreint de la qualité de vie,
dépend de la capacité de l'individu à atteindre ces «
functionings » fondamentaux. Cette capacité est influencée
par le milieu social dans lequel l'individu se retrouve. Chaque «
functionings » atteignable est appelé `'capabilité» (ou
possibilité), comprise comme la réunion de la capacité de
l'individu (forces endogènes) et des opportunités à lui
offertes (forces exogènes) pour atteindre un « functionings ».
Donc, SEN, ce qui importe d'égaliser, ce ne sont pas les indices du
bien-être (les functionings) mais l'ensemble des
«capabilités» entre les individus. La justice dans ce sens
implique seulement que tous les individus disposent d'un certain nombre des
capacités jugées comme fondamentales.
Il sied de remarquer que dans sa théorie, l'auteur
insiste sur l'importance de la liberté en matière du choix et de
la construction de bien-être et définit par conséquent la
notion de capacité inhérente à une personne. Toutefois, la
théorie ne traite pas explicitement les efforts de l'individu pour
l'atteinte du bien-être et surtout la méthodologie
d'égalisation des opportunités.
C'est pourquoi des auteurs comme ROEMER et ARSON vont proposer
quelques pistes de solution. Par exemple, s'inspirant de la notion de
functionings, JOHN ROEMER suggère de définir des classes
d'équivalence, chacune regroupant des individus soumis aux mêmes
circonstances. Au sein de chaque classe, la différence dans l'obtention
d'un résultat réside dans l'effort fourni par l'individu. Pour sa
part, RICHARD ARSON, à travers la théorie
«égalité des opportunités du
bien-être», propose d'égaliser les opportunités
du bien-être qu'il définit comme le fait pour chacun de disposer
d'une gamme d'option équivalente à celles des autres en termes de
possibilité de satisfaction des préférences.
Dans la recherche de la conception de l'autonomisation de la
femme, la contribution de SEN nous semble pertinente. Sa théorie nous
invite à réfléchir en termes d'opportunités
manquées et à renforcer les capacités en faveur des femmes
pour leur permettre d'aspirer, au même titre que les hommes, au style de
vie qu'elles jugent le meilleur pour elles.
v. Le courant de pensée sur l'éthique de la
sollicitude
Cet ensemble des pensées ne s'intéresse pas au
problème de répartition des biens (ce n'est donc pas une
théorie de la justice distributive). Elle soulève plutôt la
problématique de la responsabilité des individus vis-à-vis
des autres. Il s'agit d'un
26
principe moral qui se fonde, selon LESEUR A. (2005), sur
l'idée fondamentale que nous avons une responsabilité envers
autrui, en ce sens qu'autrui a droit à de la sollicitude de notre part
dans certains cas.
Au sens de ce courant, il n'est pas pertinent de se focaliser
sur les injustices objectives, mais de considérer plutôt les
souffrances subjectives ressenties par autrui. Il s'agit ici d'un principe qui
invite à répondre à ce qu'autrui peut légitimement
attendre de notre sollicitude. Cette réponse peut alors prendre la forme
de dotation d'un bien en récompense d'une souffrance subie. Carol
Gilligan (1982), psychologue américaine et partisane de ce courant,
soutient la thèse que la sollicitude est un sentiment de
responsabilité active et partiale.
1.1.2. Qu'est-ce qu'il faut retenir de
l'égalité dans l'éducation?
A travers le parcours théorique effectué dans la
sous-section précédente, nous aboutissons à la conclusion
de ROGER BARILIER (1997) qui avance qu'il y a dans le terme
égalité une certaine équivoque, un double sens. D'une
part, l'égalité comporte une idée de justice, de faveur,
ou même de bienveillance; et d'autre part, elle prend le sens
d'uniformité.
Dans la première conception, l'égalité
cherche à placer tous les citoyens au même niveau devant la loi,
sans favoritisme ni exclusion. Cela revient à priver les `grands' des
privilèges qui ne se justifient plus et à accorder aux petits des
droits dont ils étaient dépourvus sans raison. Dans le cadre de
l'éducation, ceci signifierais par exemple `accorder, à une
certaine période, plus des ressources à l'éducation des
enfants des milieux ruraux (longtemps marginalisés du fait de
l'éloignement) en défaveur de l'éducation des enfants des
milieux urbains. Cette conception renvoie à la notion
d'équité.
Dans la seconde conception, l'égalité
réfère au renoncement vis-à-vis de la différence de
nature entre hommes et femmes. Elle vise le nivellement général
des conditions sociales et refuse toute idée de privilège. Il y
a, dans cette conception, une sorte de dénis de sexe. Cette conception
prône des actions uniformes à toutes les catégories des
personnes, peu importe les différences qu'ils démontrent. Il
s'agit donc d'un égalitarisme.
Eu égard à tout ce parcours idéologique,
nous concluons que l'égalité dans l'éducation fait appel
à la notion d'équité et non à
l'égalitarisme. Cela nous semble utile dans le sens où il est
aberrant de nier la différence naturelle entre filles et
27
garçons. Ces différences causent, pour les uns
et les autres, des facteurs peuvent constituer un blocage à la
jouissance d'un droit. C'est l'exemple d'une fille qui, si les conditions ne
sont pas réunies, s'absenterait à l'école du fait de ses
menstruations, ce qui ne peut pas arriver chez un garçon. Une telle
cause d'abandon nécessite donc des actions spécialement
conçue en faveur des filles.
1.2. Problématique de la subordination de la
femme
D'où vient le fait que la femme soit subordonnée
à l'homme. Est-ce naturel ou le fruit d'une construction sociale ?
Quelle est la part de la femme dans l'établissement de cet
état?
Dans la section précédente, nous venons de
montrer que le but de la justice sociale est de corriger les
inégalités dans l'espace social, et instaurer une justice entre
hommes et femmes. Ceci passe par l'octroi des libertés fondamentales et
le renforcement des possibilités permettant à chacun de
décider par lui-même sur sa propre vie et de la mener suivant la
voie qu'il trouve la meilleure.
La présente section cherche ainsi à comprendre
l'origine ou la cause de l'assujettissement de la femme. Il s'agit en premier
lieu de savoir, si cet état est naturel ou alors culturel; et, ensuite,
de s'interroger sur la responsabilité de la femme dans
l'établissement et la perpétuation de cet état.
1.2.1 Origine de l'assujettissement de la femme
Depuis des décennies, l'origine et/ou la cause de
l'assujettissement de la femme font l'objet des multiples controverses. Pour
les uns, cette subordination serait le fait de la nature qui donnerait à
l'homme la transcendance par rapport à la femme. Dans ce cadre, penser
à l'égalité entre homme et femme serait illusoire. Pour
d'autres par contre, l'assujettissement de la femme serait issu des
constructions sociales. Il aurait évolué au fil des années
jusqu'à devenir la normale sociétale ; un changement social est
donc possible.
Face à cette dialectique, différents mouvements
et courants de pensée ont vu le jour. Ils sont connus sous le vocable du
féminisme. Dans les entendements de TOUPIN L. (1998), féminisme
réfère à une «prise de conscience d'abord
individuelle, puis collective, suivie d'une révolte contre l'arrangement
des rapports de sexe et la position subordonnée que les femmes y
occupent dans une société donnée, à un moment
donnée de son histoire».
Pour sortir de cette subordination, les marxistes
préconisent les solutions suivantes :
28
Ainsi, le mouvement féministe cherche à
comprendre les raisons de la subordination des femmes et propose des voies et
moyens pour un changement.
Les lignes qui suivent présentent les perceptions des
trois principaux courants féministes sur les causes de la subordination
de la femme et des stratégies de changement proposées par chacun
d'eux.
i. Le Féminisme libéral
égalitaire
Appelé également féminisme
réformiste ou encore féminisme des droits égaux.
Les féministes libérales égalitaires
pensent que la subordination de la femme est causée par sa socialisation
différenciée. Cette socialisation serait entretenue par des
préjugés, des stéréotypes, des mentalités et
valeurs rétrogrades qui se font plus sentir dans l'éducation,
dans le monde du travail, dans les églises, les partis politiques, les
gouvernements, la famille, bref dans toute la sphère de la vie sociale.
Ce courant revendique, pour les femmes, l'égalité des droits,
sans discrimination, entre femmes et hommes : égalité
d'accès à l'éducation, égalité de traitement
en milieu professionnel, l'égalité dans les lois et
égalité politique.
Pour y parvenir, deux stratégies sont
proposées:
? L'éducation non sexiste,
c'est-à-dire qu'il faut socialiser la femme autrement. Une telle
éducation permettra de changer les mentalités et conduire au
changement de la société.
? Les pressions sur le pouvoir public en vue
du changement des lois discriminatoires. Cette pression prendrait la forme des
mémoires adressées au gouvernement, des sessions de
sensibilisation du public par des colloques, de la formation des coalitions
d'appui à des revendications, etc.
ii. Le courant marxiste du féminisme
Les féministes marxistes pensent quant à eux que
l'assujettissement de la femme serait issu de l'avènement du
capitalisme. Ce système économique, cultivant la
propriété privée, institue dans les mentalités des
individus les besoins de transmettre leurs propriétés par
l'héritage. Ces mentalités créant ainsi chez ces derniers
le besoin de s'assurer de la certitude de leurs descendances. Ce qui conduisit
finalement à l'institution du mariage monogamique dans lequel les femmes
ont été placées sous contrôle de leurs maris
(institution du patriarcat) et hors de la production sociale (confinée
aux travaux de ménage).
29
? La participation des femmes à la lutte des classes
afin d'abolir la société capitaliste et la
remplacer par la propriété collective.
? L'instauration d'une prise en charge collective des
enfants et du travail domestique, et la réintégration
des femmes dans la production sociale et au sein du marché du travail
salarié.
iii. Le féminisme radical
Alors que, pour analyser la subordination de la femme, les
marxistes font référence au système économique (le
capitalisme), les féministes radicaux pensent plutôt au
système social (le patriarcat). Pour expliquer l'assujettissement de la
femme, ces derniers féministes se disent remonter jusqu'à la
« racine » du problème ; d'où le qualificatif radical.
Ainsi, rejetant les idées que la subordination de la femme serait la
conséquence des préjugés et des lois injustes, moins
encore du système capitaliste, les tenants du féminisme radical
pensent plutôt que c'est le patriarcat qui explique la domination des
femmes par les hommes. L'ennemi principal est donc le pouvoir des hommes qu'il
faille à tout prix limiter. Le patriarcat aurait créé la
culture masculine dominante et la culture féminine dominée. Ce
pouvoir se manifeste par le contrôle du corps des femmes, notamment le
contrôle de la maternité et de la sexualité des femmes.
Certes, il faut à ce niveau rappeler la conclusion de
BOURGUIGNON ANDRE (1989) qui pense que l'assujettissement de la femme
découle de la peur que l'homme éprouve devant la sexualité
féminine. Et donc pour faire face à la peur de cette
sexualité (qui donnait du pouvoir à la femme dans la
société traditionnelle matriarcale), l'homme se serait
réservé les activités professionnelles, politiques et
religieuses grâces auxquelles il aurait progressivement établi et
étendu son pouvoir sur la femme. Pour ce faire, des règles et
lois protégeant le pouvoir des hommes ont été
établies et la femme s'est retrouvée discriminée.
BOURGUIGNON ajoute que cette peur de l'homme est apparue avec les
bouleversements causés par le passage du nomadisme à la
sédentarité, lequel passage exigeait aux hommes de transmettre de
l'héritage à leur progéniture.
En plus, BOURGUIGNON soutient l'idée que la femme est
l'héritière directe de l'activité sexuelle intense des
femelles primates, et que, c'est seulement elle qui possède la
capacité de déterminer avec précision la paternité
d'un enfant. A cet effet, « l'homme chercha à tout prix à la
contrôler; d'où la claustration des femmes, l'excision
clitoridienne, l'immolation des veuves, etc».
30
La stratégie globale de sortie proposée par ce
courant est le renversement du patriarcat. Pour ce faire, il
est nécessaire que les femmes se réapproprient le contrôle
de leur propre corps. Les actions proposées sont par exemple la vie
entre les lesbiennes ou les célibataires seulement, les manifestations
contre la pornographie, les concours de beauté, les mutilations
sexuelles, etc.
L'analyse des différents courants nous donnent une
vision d'ensemble sur les causes possibles de la subordination de la femme. Il
faut néanmoins souligner que:
? Ces courants ont connu, en leurs seins, diverses
métamorphoses. On rencontre ainsi, pour le courant marxiste, le
féminisme socialiste, le féminisme populaire, le courant du
salaire contre travail ménager, etc; et pour le féminisme
radical, le courant radical matérialiste, le courant radical de la
différence, etc.
? En plus, il existe toute une panoplie des doctrines et
pensées sur ce sujet. Notre objectif n'étant pas de les recenser
toutes, mais, sur un plan purement pédagogique, de s'appesantir sur les
points de repère à partir desquels l'évolution de la
pensée féministe peut être comprise.
Tableau 1 : Résumé des trois courants
féministes
Courants féministes
|
Origine de la subordination
|
Solutions proposées ou actions
menées
|
Féminisme libéral égalitaire
|
La socialisation différenciée de la femme
|
? Education non sexiste
? Pressions sur le gouvernement pour supprimer les
inégalités dans des lois
|
Le courant marxiste du féminisme
|
Le capitalisme (Système économique)
|
Abolition du capitalisme et réintégration de la
femme dans la production sociale et le marché du travail
salarié.
|
Le
féminisme radical
|
Le patriarcat (Système social)
|
Le renversement du patriarcat et la réappropriation par
les femmes du contrôle de leurs propres corps.
|
Source : Tableau construit sur base de nos lectures
Après analyse de ces différents courants
féministes, nous retenons que les causes de l'assujettissement de la
femme sont complexes et systémiques, et que la réduction de leur
analyse sur un seul fait serait limitative. En effet, dans leurs recherches sur
la cause de l'assujettissement de la femme, tous ces courants
9 Page 7
31
convergent sur un fait, le pouvoir inégal entre hommes
et femmes qui s'est transformé en domination de la femme par l'homme. La
différence entre eux réside plutôt dans la réponse
à la question de savoir pourquoi cette domination s'est-elle
transformée en assujettissement.
Ainsi pensons-nous qu'une analyse véritable et
complète doit prendre en compte les aspects soulevés par les
trois courants car il s'agit en fait, d'après nous des
éléments liés.
En effet, le système économique (capitalisme) et
le système social (patriarcat) se sont mutuellement appuyés pour
assoir la domination masculine et l'un des outils utilisé fut une
règlementation discriminatoire à la merci de la femme. A ce
sujet, le CDEG (2011) reconnait que «l'homme étant
considéré comme la norme humaine, c'est l'expérience
masculine qui a déterminé la manière dont les
sociétés devaient être structurées, et c'est son
savoir et sa théorie, bâtis dans le cadre d'un paradigme
patriarcal de la société humaine, qui se sont imposés dans
notre héritage intellectuel»9.
Ainsi, la lutte pour la libération de la femme doit
également être holistique et coordonnée pour être
efficace. Elle nécessite, de manière simultanée, des
actions de lutte contre les lois et normes discriminatoires, des efforts pour
accroitre la capacité productive des femmes et une détermination
pour renforcer le leadership féminin.
1.2.2 Part de la femme dans le maintien de son
assujettissement
Dans le langage courant, la femme est accusée de
plusieurs maux : manque d'initiative ou peur d'entreprendre, gouts dispendieux,
focalisation sur les choses non essentielles, esprit de dépendance, les
difficultés et la honte de parler en groupe, etc. Tous ces maux seraient
à l'origine de sa dépendance économique, de la
nécessité pour elle d'être contrôlée par
l'homme et du manque de l'estime de soi. Mais, tous ces qualificatifs
proviennent-ils du libre et volontaire choix de la femme.
En effet, tout observateur critique ne tardera pas à
conclure que toutes ces accusations seraient fortuites et infondées.
Certes, l'esprit d'initiative apparait lorsque la personne est sûre de
pouvoir posséder des ressources nécessaires pour une entreprise.
Or, dans la société traditionnelle, les femmes se sont vues
déniées le
32
droit d'accès aux facteurs de production. Cela les
aurait contraints à rester dépendant de la charité des
hommes.
Concernant les gouts dispendieux, les textes, chansons, et
écrits etc. qui louent la beauté et le charme de la femme et qui
prescrivent que la femme doit plaire son mari font légion aussi bien
dans la sphère religieuse que laïque. A travers ces messages, la
femme est socialisée à paraitre belle en public, elle doit
attirer la curiosité. Les «concours de beauté»,
l'élection des «miss», etc., ne concernent-ils pas
exclusivement les femmes? Tous ces clichés et stéréotypes
sont des construits sociaux, la femme ne fait qu'en subir les effets.
Quant à la honte de parler en public, la raison nous
semble bien simple. Comment une personne claquemurée durant des
siècles peut-elle développer cette facilité de parution et
d'expression?
Et donc, si les raisons évoquées sont celles qui
maintiennent la femme sous la domination, il est clair que cela ne vient pas
d'elle ; celle-ci ne doit donc pas en être tenue pour responsable et a
droit, suivant la formule de DWORKIN, à une récompense. Ainsi
donc, la recherche d'une égalité de fait entre hommes et femmes
nécessite un investissement sincère dans la promotion de
l'équité.
33
CONCLUSION DU CHAPITRE PREMIER
A travers le parcours doctrinal effectué au chapitre
premier de ce travail, nous venons de découvrir qu'une justice sociale
nécessite la prise en compte des situations particulières des
membres composant la société. A ce sens, l'égalité
de fait entre hommes et femmes requiert la promotion de l'équité
et non l'uniformisation.
En fait, guidée par la théorie de RAWLS,
l'analyse de la situation montre que toutes ces différences ou
discriminations sont généralement établies par la
société et sont devenues comme naturelles et normales aussi bien
dans le mental de l'homme que de la femme. Pour corriger cet état de
chose, la théorie d'égalisation des biens premiers nous propose
le principe de la différence qui constitue le fondement de la
discrimination positive. Ce principe permet ainsi de corriger les écarts
de distribution des biens premiers entre hommes et femmes et d'égaliser,
de surcroit, les libertés fondamentales.
A la lumière de la théorie de Sen, les efforts
d'éducation pour tous chercheraient à analyser les faits qui,
à la base, constituent des blocages à l'atteinte d'une
éducation égalitaire et à concevoir des programmes visant
le renforcement de la capacité de la femme (et de la communauté)
à briser les inégalités que celle-ci subi.
Par transposition, nous estimons qu'une éducation
basée sur l'efficacité, c'est-à-dire dont l'objectif
principal est de délivrer une instruction à un grand nombre des
individus et celle qui vise uniquement à obtenir la parité
homme/femme, serait une éducation utilitariste. Elle ne pourra donc pas
efficacement conduire à une égalité de fait entre hommes
et femmes car elle se fierait trop peu aux valeurs et clichés
propagés par les structures éducatives.
A ce titre, admettant qu'il importe de répondre aux
besoins éducatifs des filles et des garçons, nous estimons que
l'équité entre filles et garçons dans l'éducation
doit se fixer comme objectif la lutte contre les stéréotypes qui
maintiennent les femmes dans un état de subordination. Et, étant
donné le caractère exogène de cet état, la femme
mérite un traitement spécial temporaire de manière
à écarter les causes profondes et systémiques qui
soutiennent l'iniquité.
34
DEUXIEME CHAPITRE : ETAT DE LIEU DE L'INIQUITE
ENTRE LES SEXE DANS L'EDUCATION EN RDC
INTRODUCTION DU DEUXIEME CHAPITRE
Comme mentionné dans l'introduction, nous rappelons que
la stratégie de développement du sous-secteur de l'EPSP visait
l'atteinte d'un triple objectif : accroitre l'accès à
l'éducation, accroitre l'équité et la rétention, et
améliorer la qualité de l'éducation.
A travers le parcours documentaire, nous avons constaté
que, de ces trois
objectifs, les efforts entrepris par le gouvernement congolais
et ses partenaires ont permis d'accroitre l'accès à
l'éducation et que l'équité et la qualité de
l'éducation restaient en souffrance durant le parcours scolaire. Raison
pour laquelle nous avons focalisé notre travail sur le deuxième
objectif, celui de l'équité.
Ainsi, le présent chapitre va retracer l'ampleur des
iniquités constatées durant le parcours scolaire et relever
quelques causes et/ou facteurs qui favorisent leur persistance.
A cet effet, nous avons défini trois critères
à travers lesquels nous avons évalué l'ampleur des
iniquités dans le secteur particulier de l'éducation: la
rétention, le leadership féminin ainsi que les
stéréotypes et clichés sexistes.
- La rétention à
l'école. Pour ce premier critère, nous partons de
l'idée que l'égalité dans l'éducation ne se limite
pas à l'égalité d'accès, mais qu'elle doit aussi
viser l'achèvement, gage d'une autonomisation effective. Nous allons
ainsi évaluer ce critère à travers l'analyse du taux
d'achèvement et du taux des abandons scolaires.
- Le leadership féminin dans les structures
éducatives congolaises. Cet indicateur cherche à
analyser l'existence du modèle féminin dans ces structures. Un
modèle ou une référence peut constituer un
élément de motivation aux études mais aussi, en
participant dans la gestion des structures éducatives, les filles
développent des capacités managériales qui pourraient leur
être utile dans la vie active. C'est pourquoi à ce niveau nous
allons analyser la place que la femme occupe dans le comité des
élèves, le pourcentage des femmes dans le corps enseignant, le
pourcentage des femmes responsables des établissements scolaires et
l'effectif des femmes impliquées dans l'inspection du système
éducatif.
Par ailleurs, si la RDC a atteint des résultats
satisfaisants de scolarisation dans l'enseignement primaire, il n'en a pas
été le cas pour l'enseignement
35
- Présence des stéréotypes et
clichés sexistes. De l'étude de STEELE (1997), nous
avons retenu que les stéréotypes peuvent conduire les personnes
qui les subissent à une démotivation ou au développement
de moins d'efforts dans le processus d'apprentissage. Ainsi allons-nous,
à ce niveau, analyser les rôles attribués aux femmes dans
les manuels scolaires ainsi que la nature des relations existantes entre les
personnages femmes et les personnages hommes.
2.1 Examen de l'iniquité entre les sexes dans
l'éducation en ROC
2.1.1. Inégalités dans la rétention
à l'école
? Analyse du taux d'achèvement
Graphique 1 : Le taux d'achèvement de l'école
primaire
120
100
|
100
|
Comparaison
|
du
taux 100
|
|
89,86
|
d'achevement
|
100
|
du
78,38
|
primaire
84,53
|
|
(en
100
|
%)
81,02
|
91,12
|
|
|
|
|
|
|
|
80
|
|
69,7
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
60
|
|
51
|
|
|
|
53,81
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
40
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
20
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
0
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
RDC Afrique Sub Pays fragiles Monde
|
Cible 1990 2013
Source : RDC, Rapport OMD 2000-2015: Evaluation des
progrès accomplis par RDC dans la réalisation des Objectifs du
millénaire pour le Développement; septembre 2015, page
37.
De ce graphique il y a lieu de constater que, comparativement
à la moyenne des pays de l'Afrique Subsaharienne et même des pays
fragiles, le taux d'achèvement du cycle primaire est resté bas en
fin 2013, le pays est donc loin d'atteindre la cible de 100% tel que voulu par
le plan d'action de Dakar.
Cette situation soulève la problématique de la
qualité de l'enseignement en République Démocratique du
Congo, et surtout sa capacité dans la rétention des enfants
à l'école.
36
secondaire où les résultats restent mitigés
et l'écart entre garçons et filles demeure déplorable.
Graphique 2: Taux de scolarisation et d'achèvement entre
filles et garçons au primaire et au secondaire.
Taux brut de scolarisation (en %) /
2009
97,5
Primaire Secondaire
83
Garçons Filles
51,2
28,8
Taux d'achevement (en %)/ 2009
55,9
Primaire Secondaire
34
Garçons Filles
36,2
13,4
Source : Annuaire statistique de l'EPSP
2008-200910.
En 2009, l'écart du taux brut de scolarisation entre
les filles et les garçons était élevé dans
l'enseignement primaire et très prononcé dans le secondaire. En
ce qui concerne le taux d'achèvement, le constat est plutôt
inquiétant. 34 % des filles avait achevé l'enseignement primaire
contre seulement 13% au secondaire.
Cette situation peut mieux être observée dans le
graphique suivant: Graphique 3 : Disparité entre garçons et
filles selon le cycle de l'enseignement
Superieur
secondaire
Primaire
|
|
Filles Garçons
|
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110
Source : Données tirées du rapport OMD 2000-2015
Au regard de ce graphique, l'on s'aperçoit qu'au fur et
à mesure que le degré de l'éducation augmente, le nombre
de fille diminue. Si pour 100 garçons on
10 Nous utilisons les données des annuaires
statistiques 2008-2009 car la stratégie étudiée a
été élaborée sur cette base.
37
compte environs 95 filles, la différence devient
d'environs 20 au secondaire et de 50 au supérieur.
? Analyse des abandons scolaires
L'abandon scolaire constitue un deuxième facteur majeur
influençant la rétention des enfants à l'école. En
effet, d'après l'enquête nationale menée en 2013 sur les
enfants et adolescents en dehors de l'école, les filles courent les
risques les plus élevés d'abandon que les garçons. Car, 6
ans après l'entrée à l'école, 16,6 % des filles et
12,1% des garçons abandonnent leurs études11. En plus,
les enfants des milieux ruraux sont très exposés au risque
d'abandon, et les taux après 12 ans d'entrée à
l'école représentent 45,6% pour les enfants des milieux ruraux
contre 27,4% pour ceux des centres urbains.
Dans la prochaine section, nous allons démontrer que
les causes des abandons ne sont pas identiques aux centres urbains qu'en
milieux ruraux.
Les grossesses constituent l'une des principales causes de la
désertion. Pour s'en rendre compte, notre enquête menée
dans les écoles primaires et secondaires sur les causes d'abandon
scolaire lié aux grossesses a révélé la situation
suivante:
Tableau 2 : Taux d'abadons scolaires liés aux grossesses
(Année scolaire 2014-2015)
|
Ecoles Primaires
|
Ecoles Secondaires
|
Total Général
|
F
|
G
|
T
|
F
|
G
|
T
|
F
|
G
|
T
|
Nombre total
d'abandons
|
742
|
530
|
1272
|
357
|
469
|
826
|
1099
|
999
|
2100
|
Nombre d'abandons
lies aux grossesses
|
160
|
0
|
160
|
144
|
10
|
154
|
3014
|
10
|
314
|
Taux d'abandons liés aux grossesses
|
22%
|
0%
|
13%
|
40%
|
2%
|
19%
|
27%
|
0,1 %
|
15%
|
Source : Nos enquêtes menées dans 30 écoles
lors du stage.
Ce tableau fait ressort deux situations :
D'abord, nous nous rendons compte qu'en termes d'effectif, les
garçons abandonnent leurs études tout autant que filles, quoi que
le nombre de celle-ci restent élevé. Cependant, les causes de
l'abandon diffèrent d'un sexe à l'autre. C'est pourquoi, une
démarche genrée voudra que les causes des abondons pour les
11 RDC, Rapport de l'enquête nationale sur les
enfants en dehors de l'école, 2013.
38
filles et garçons soient analysées distinctement
et que des actions de réponses soient spécifiques à chaque
cause/sexe.
Ensuite, l'on se rend compte que pour les filles, le taux
d'abandon scolaire au secondaire environne la moitié. Car en fait, 4
filles sur 10 abandonnent leurs études pour être rendues
grosses12. Au niveau du primaire, le taux semble être
réduit (22% au primaire contre 40 % au secondaire). Cependant, en
considérant l'âge des filles qui sont inscrites à ce niveau
d'étude (principalement moins de 15 ans), l'on se rend bien compte du
danger que cette société encours du point de vue de la protection
de l'enfant. En poussant des analyses au-delà du sujet du présent
travail, nous pensons que cette situation est un des facteurs qui augmente la
prévalence des viols en RDC13. Donc, les viols largement
rapportés ne seraient pas liés aux conflits armés mais
aussi aux pratiques sociales.
2.1.2. Examen du leadership féminin dans les
structures éducatives
? Place des filles dans les comités des
élèves
Dans le système éducatif congolais, les chefs
des classes sont des élèves qui assurent le pont entre les
élèves, les enseignants, et la direction scolaire. Ils assurent
également le maintien de la discipline en salle de classe en l'absence
d'un enseignant ou de tout autre responsable scolaire. Ils sont les
interlocuteurs directs des directeurs de la discipline et donc les
répondants en cas d'un désordre survenus dans leurs salles de
classe. En général, les chefs de classe sont élus au
suffrage universel par leurs camarades. Mais il arrive des circonstances dans
lesquelles l'enseignant titulaire de la classe, le directeur de discipline ou
le directeur/préfet de l'école puisse en désigner un.
Tableau 3 : Répartition des chefs de classe par sexe et
par niveau
Niveau
|
Nombre des chefs des classes
|
Filles
|
Garçons
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Primaire
|
187
|
70
|
37 %
|
117
|
63%
|
Secondaire
|
208
|
55
|
26%
|
153
|
74%
|
Total
|
395
|
125
|
32%
|
270
|
68%
|
Source : Nos enquêtes
12 Parmi nos enquêtés, il n'y avait
aucune fille mariée
13 Il faut noter qu'en RDC, tout rapport sexuel avec
toute personne âgée de moins de 18 ans est pénalisé
et qualifié de viol avec violence.
39
Le présent tableau démontre une disproportion
entre les sexes dans la désignation des chefs de classes : des
garçons représentant 68 % et les filles 32 %. Cette disproportion
est le prolongement des pratiques sociales, elle reflète la nature des
relations sociales et traduit la représentation des rôles des
hommes et des femmes dans la société et la structure
familiale.
Graphique 4: Répartition des chefs de classe par sexe
Garçons chefs de classe
68%
Filles chefs de classe
32%
Source : Nos enquêtes menées en 2015
L'analyse détaillée de ce indicateur montre que
la proportion des filles chefs de classe va décroissant au fur et
à mesure que le niveau d'éducation augmente. Car en fait, alors
que cette proportion est de 37% au primaire, elle n'est que de
26% au niveau secondaire. Deux hypothèses peuvent
être soulevées pour justifier cette situation. Soit les
élèves considèrent que la tache de chef de classe devient
lourde pour les niveaux élevés, et que c'est le garçon qui
est apte à ce genre de défi (dans ce cas, il s'agirait encore une
fois des préjugés). Ou alors on pourrait penser qu'en bas
âge, les enfants n'ont pas encore pleinement intériorisés
les normes sociétales qui seraient beaucoup plus marqués chez les
grandes personnes.
40
Graphique 5: Répartition des chefs de classe par sexe et
par cycle
Nombre des chefs des classes par niveau et par
sexe
70
55
117
153
Filles chefs de classe Garçons chefs de classe
Primaire Secondaire
Source : Nos enquêtes menées en 2015
? Répartition des enseignants par sexe et par
niveau d'étude
Concernant cet indicateur, nous avons
préféré analyser plutôt les données
nationales (car elles sont disponibles) pour donner la vue complète du
système.
Tableau 4: Proportion des enseignantes par niveau
d'éducation (2008-2009)
Niveau
|
Femmes
|
Hommes
|
Total % femmes
|
% hommes
|
Maternel
|
9664
|
475
|
10139 95,3%
|
4,7 %
|
Primaire
|
72300
|
202153
|
274453 26,3%
|
73,7%
|
Secondaire
|
22043
|
190230
|
212273 10,4 %
|
89,6 %
|
Total
|
104007
|
392858
|
496865
|
|
|
%
|
20,9%
|
79,1%
|
100%
|
Source : Annuaire statistique de l'EPSP (2008-2009).
Au niveau national, la proportion des enseignantes (20,9%)
reste basse et n'atteint pas la parité telle que prônée par
le gouvernement congolais14.
En plus, l'écart entre hommes et femmes devient grand
lorsqu'il faut considérer les effectifs par niveau d'étude. Et
comme pour la proportion des filles chefs de classe, le nombre des enseignantes
diminue lorsqu'il s'agit de passer d'un niveau bas à un niveau
élevé. Le graphique suivant illustre bien cette tendance.
14 L'objectif du gouvernement était d'atteindre
une proportion minimum de 30 % des femmes dans toutes les institutions
publiques.
41
Graphique 6: Proportion des enseignants par sexe et niveau
d'étude (2008-2009)
100
40
80
60
20
0
Maternel Primaire Secondaire
4,7
95,3
73,7
26,3
89,6
10,4
Hommes Femmes
Source : Annuaires statistiques
Au fur et à mesure que le niveau d'éducation
augmente, la proportion des enseignantes diminue. La tendance est contraire
quant à la proportion des enseignants.
La même tendance est constatée au sien d'un
même niveau de l'enseignement. Sur les six classes du cycle primaire, les
femmes se voient majoritairement confiées la charge des deux
premières classes. Leur proportion diminue avec l'augmentation du niveau
d'étude. On dirait qu'elles sont bonnes au niveau
élémentaire de l'enseignement.
Graphique 7: Proportion des enseignants titulaires des classes
par sexe (au primaire)
100
40
80
60 62,3 61,4
20
0
1ere 2e 3e 4e 5e 6e
37,7 38,6
71,3 76,7
28,7 23,3
85,3
14,7
93,5
6,5
Hommes Femmes
Source : Annuaires statistiques de l'EPSP
(2008-2009).
42
? Participation des femmes dans la direction des
écoles
Tableau 5: Proportion de la femme dans la direction des
Etablissements Scolaires (2014-2015)
Province
|
Niveau
|
Femmes
|
Hommes
|
Total
|
Haut-Uélé
|
Primaire
|
1
|
13
|
14
|
Secondaire
|
2
|
13
|
15
|
Total
|
3
|
26
|
29
|
Pourcentage
|
10%
|
90%
|
100%
|
Bas-Uélé
|
Primaire
|
0
|
8
|
8
|
Secondaire
|
0
|
7
|
7
|
Total
|
0
|
15
|
15
|
Pourcentage
|
0%
|
100%
|
100%
|
|
Total Général
|
3
|
41
|
44
|
|
Pourcentage
|
6,8%
|
93,2%
|
|
Source : Nos enquêtes sur terrain menées dans les
deux provinces éducationnelles Orientale 3 et 4.
La Direction des Etablissements scolaires constitue l'un des
postes privilégiés dans le système éducatif. Le
chef d'Etablissement, permanent dans les écoles, incarne le pouvoir et
la sagesse. Il est le modèle et inspire la plus part des
élèves. Son approche dans une salle de classe crée de la
peur. C'est un « grand ».
Les enquêtes menées dans 44 écoles ont
révélé que pour 100 chefs d'établissement on ne
compte qu'au maximum 7 femmes.
Il sied de noter que cette faible représentation
n'influe pas seulement sur la perception du leadership féminin. Elle
diminue également la possibilité d'avoir plus d'inspectrices.
Car, une des conditions majeures pour aspirer au poste d'inspecteur de
l'éducation consiste à disposer d'une bonne expérience
dans la Direction des établissements scolaires.
? Part de la femme dans la gestion de
l'éducation
Tableau 6: Pourcentage des inspectrices de l'éducation
(année scolaire 2014-2015)
Province éducationnelle
|
Femmes
|
Hommes
|
Total
|
Orientale 3
|
4
|
49
|
53
|
Orientale 4
|
4
|
38
|
42
|
Total
|
8
|
87
|
95
|
Pourcentage
|
8,4%
|
91,6%
|
100%
|
Source : Nos enquêtes sur terrain
Les inspecteurs sont les garants du système
éducatif. Ce sont eux les gardiens des directives et normes de
l'éducation. Ils participent dans la planification et le suivi des
programmes/projets dans ce secteur.
43
Le tableau ci-haut montre que cette tâche est
majoritairement masculine. Les femmes n'y sont représentées
qu'à 8%. Ce manque est susceptible d'influencer la perception des
enfants sur les rôles des hommes et des femmes.
2.1.3. Regards sur les stéréotypes et
clichés sexistes dans l'éducation
? Place et rôle des personnages féminins
au sein des manuels scolaires
En plus des structures éducatives, les manuels
scolaires peuvent être porteurs des stéréotypes.
D'après l'INEE, « souvent, on ne remarque pas la discrimination de
genre et la discrimination culturelle que peuvent véhiculer les textes
et les images utilisés pour l'enseignement parce qu'on est trop
habitué à les voir»15.
Partant de cette observation, nous avons analysé la
fréquence avec laquelle la femme est citée dans les personnages
et les rôles qu'elle y joue. Pour ce faire, nous avons recensé et
analysé 301 personnages dans 85 textes contenus dans les principaux
manuels de français utilisés au niveau primaire et secondaire.
Nous avons ainsi obtenu les résultats suivants :
Tableau 7: Répartition des personnages dans les manuels
scolaires
|
Libellé
|
Personnages féminins
|
Personnages masculins
|
Total
|
Femme
|
Fille
|
Homme
|
Garçons
|
Sexe précis
|
Catégories
|
48
|
22
|
139
|
81
|
290
|
Total par sexe
|
70
|
220
|
290
|
Pourcentage
|
34 %
|
76 %
|
100%
|
Effectif Total
|
290
|
Pourcentage
|
96%
|
Sexe non précis
|
Effectif
|
11
|
Pourcentage
|
4%
|
Total General
|
Effectif
|
301
|
Source : Nos enquêtes.
Légende
Femmes : personnes présentées comme adultes de sexe
féminin
Hommes : personne présentées comme adultes de sexe
masculin
Filles : personnes présentées comme enfants de sexe
féminin
Garçons : personnes présentées comme enfants
de sexe masculin
Sur les 301 personnages analysés, il n'a été
possible de déterminer le sexe
que pour 290 personnes, soit 96 % des enquêtés.
15 INEE (2010), page
52.
44
Parmi les 96% des personnages, le masculin représente
76 % des cas contre 34 % du féminin. Ceci signifie que le personnage
féminin est référencé une fois lors qu'on parle
pour la troisième fois du personnage masculin. Donc lors de la
composition des textes, les enfants parlent principalement des hommes. C'est
l'image de ceux-ci qui restent dans la mémoire des
élèves.
Et, que font les enfants et les adultes, les filles et les
garçons, les femmes les hommes dans ces textes ? Quels qualificatifs
sont-ils réservés aux uns et aux autres? Le tableau suivant
propose des réponses à ces questions.
Tableau 8: Activités des enfants dans les textes
scolaires
Activités des enfants
|
Filles
|
Garçons
|
Total
|
Pourcentage
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Scolaires
|
1
|
4,5%
|
20
|
24,5%
|
21
|
20%
|
Domestiques
|
1
|
4,5%
|
5
|
6%
|
6
|
6%
|
Loisirs
|
8
|
36%
|
31
|
38 %
|
39
|
38%
|
Autres activités
|
4
|
18%
|
3
|
4%
|
7
|
7%
|
Rien
|
8
|
37%
|
22
|
27,5 %
|
30
|
29%
|
Total
|
22
|
100%
|
81
|
100%
|
103
|
100%
|
Source : Nos enquêtes
De manière générale, les enfants sont
présentés dans des loisirs et des activités scolaires. Un
nombre élevé (29%) est aussi cité comme des personnages
secondaires, avec aucune mention sur ce qu'ils font. Très peu d'enfants
font objet des activités domestiques, qu'il s'agisse des filles ou des
garçons.
Par contre, si la différence de référence
aux loisirs et aux activités domestiques n'est pas assez grande entre
filles et garçons, le fossé se creuse profondément
lorsqu'il s'agit des activités scolaires. Seules 4,5 % des filles
recensées sont présentées dans les activités
scolaires contre 24,5 % chez les garçons. Ceci donne l'impression que
les études sont l'apanage des seuls garçons. Ceux-ci partent en
voyage d'études, reçoivent des cadeaux pour la bonne
réussite, ou ils font la fierté de l'école et des parents
à cause de leur intelligence.
Quant aux activités domestiques, il y a lieu de
remarquer une division sexuelle des taches : sur les 6 enfants cités
pour ce type d'activité, une fille fait la cuisine, un garçon
fait l'élevage des animaux domestiques, 3 garçons pratiquent la
pêche pour nourrir la famille, alors qu'un garçon accompagne sa
mère au marché pour vendre les produits du champ.
A part la représentation inégalitaire des femmes
dans les personnages des manuels scolaires, on s'aperçoit
également que certains extraits des textes
45
La même tendance est observable pour les loisirs. Les
garçons sont en promenade, en voyage, font des découvertes de la
forêt ou des eaux ; alors que les filles s'amusent principalement dans
l'espace familial, rendent visites aux camarades ou organisent des banquets
dans lesquelles elles invitent les amis.
Tableau 9: Répartition des adultes en activité dans
les manuels scolaires (154)
Nature d'activités
|
Femmes
|
Hommes
|
Total/
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Effectif
|
%
|
Activités professionelles
|
11
|
27
|
74
|
65
|
85
|
56
|
Activités extraprofessionnelles
|
29
|
73
|
40
|
35
|
69
|
44
|
Total : Effectif - pourcentage
|
40
|
100
|
114
|
100
|
154
|
100
|
Source : Nos enquêtes
Sur les 187 adultes représentés dans les textes
analysés, il a été possible d'appréhender les
activités effectuées par 154 personnes, soit 82 % des
enquêtés.
Les activités professionnelles concernent
essentiellement l'agriculture, la pèche et la chasse (femme 40%, hommes
12%), le commerce (0% femmes et 3 % hommes) et les services (45 % pour les
femmes et 74 % pour les hommes).
Cependant, à propos des services et des
activités extraprofessionnelles, tous les 14 rôles de chefs,
directeurs de services ou propriétaires font exclusivement
référence aux hommes. Aucune femme n'incarne ce rôle. Les
femmes sont citées sans référence ou rôle majeur.
Ensuite, pour les activités extraprofessionnelles, 3,5%
des femmes se divertissent contre 35 % des hommes ; 55 % des femmes effectuent
des tâches domestiques contre 7,5% des hommes ; et 31 % des femmes sont
présentées dans les activités communautaires (fêtes,
deuil, etc.) contre 37,5% des hommes.
En fin, en termes de qualificatifs, les femmes sont
admirées pour leurs aptitude à faire des meilleures cuisines,
leur élégance, douceur ou démarche ; les hommes, par
contre, sont qualifiés de guerriers, cavaliers, magiciens, d'hommes
d'esprit, intelligents, méchants, agressifs, très riches, etc.
Tout cela montre la conception différenciée des
hommes et des femmes qui existe dans les manuels scolaires. Cette conception
est conforme à la situation sociale dominante.
? La représentation des hommes et des
femmes
Il existe également des textes qui montrent et, en
quelque sorte, justifient l'agressivité masculine. Ceci est
illustré dans les passages suivants:
46
perpétuent la répartition sexuelle des rôles
entre hommes et femmes et sont porteurs des stéréotypes. Quelques
exemples, tirés des manuels scolaires, sont illustrés dans les
lignes qui suivent:
- Stéréotype sur la virilité d'un
homme
Deux jeunes garçons, s'apprêtant à une
bataille, discutent entre eux. Ci-dessous un extrait de leur conversation:
A : ...Alors j'ai décidé: je ne me battrais
plus, c'est bien finit!
B : Tu as peur ! Voilà la vérité! Tu
n'es pas un homme. Tu ne seras jamais un homme !
|
(Référence: Manuel des Textes français,
Titre « Ami ou Ennemi », page 3).
Il est communément admis que le fait d'avoir peur
traduit un caractère féminin. Un homme qui manifeste ce
caractère est donc qualifié de `femme'.
L'homme doit socialement rester fort, alors que la femme doit
faire objet de la sollicitude, de l'attention du fait de sa
présumée `fragilité'. Le texte suivant traduit ce
préjugé. Il s'agit d'une discussion entre un garçon et sa
mère :
« ...ce matin, comme pour se moquer de lui, sa
mère lui dit: « Tu commences à devenir un homme comme
ça. ». Il lui répondu : « C'est vous qui m'aviez
habitué au véhicule, vous vouliez donc que je devienne une femme?
»
(Référence: Manuel des textes français,
texte «Les bonnes habitudes», page 12.
Dans cet exemple, le véhicule représente la
facilité. Ainsi, comme l'enfant s'habitue à aller à
l'école à pied (considéré comme une tâche
difficile), il est qualifié d'homme. C'est donc dire que la
facilité est propre au sexe féminin.
Il en est de même de la douceur, de la patience, etc.,
qui sont considérées comme des caractères propres à
la femme :
« Parmi les étudiants qui suivaient l'an
passé les cours de l'Ecole de Médecine se retrouvait un jeune
homme nommé Eugene....il menait une vie tranquille et passait pour avoir
un caractère fort doux...Le seul défaut qu'on lui reprochait
était un singulier penchant à la rêverie et une
réserve si excessive dans son langage et ses moindres actions
qu'on le surnommait `la petite fille' ».
(Référence: Manuel Au gré de vague 2,
nouvelle édition, page 14)
- Constructions sociales de l'agressivité masculine
Elle rejoint ensuite son époux qui se repose sur un
fauteuil. Le fauteuil représente, dans le contexte de la RDC, le
pouvoir. Il est réservé aux chefs, aux
47
« Le soleil et la lune furent époux et
épouse...Mais le soleil, le père, se montrait très
méchant vis-à-vis de la lune, la mère. Il la battait tous
les jours, sans raison valable. Ne pouvant plus supporter ce triste sort, la
lune prit ses enfants, les étoiles, et décida de s'en aller se
cacher très loin dans la nature, à l'abri de l'agressivité
de son mari... »
(Référence: Manuel `A nous l'école', Texte
« Le soleil, la lune et les étoiles », page 50).
De tous les textes que nous avons consultés, il n'y pas
un seul qui décrit une femme agressive. Les femmes sont
présentées douces, réservées ou se résignant
à accepter innocemment et impuissantes les discriminations et les
violences « masculines ».
Il en est le cas du texte suivant:
« Mais lorsqu'un père de famille s'adonne
immodérément à la boisson, il ne pense qu'à
lui-même. Les privations que subit sa femme lui importent peu. Il la
traite comme une chose achetée, qui lui appartient et sur laquelle il a
tous les droits, comme une petite machine idéale qui est à son
service ».
(Référence: Manuel Textes de français 1ere,
Texte « Papa, Souvent absent! », page 14).
Ce texte contient des préjugés sur les rapports
de pouvoir dans un couple. Il soulève la dimension de la soumission de
la femme à son époux.
- Représentation du rôle de la femme dans la
société
Quelques extraits cités consultés traduisent la
répartition des taches des hommes et des femmes dans la
société.
« Amela avait posé sur sa tête
un pot rempli d'eau. Elle avait mis une belle jupe colorée et
des souliers plats. Elle marchait, élégante,
à gras pas, vers le village pour rejoindre son époux, se
reposant dans un fauteuil en bois ».
(Référence: Manuel `A nous l'école', texte
« Orthographe », page 60).
Cette phrase semble très courte; elle contient par
ailleurs plusieurs idées porteuses des clichés sexistes.
La femme avec pot rempli d'eau sur sa tête rappelle que
les tâches domestiques lui sont réservées.
La femme met sa belle jupe, elle est élégante,
...Ces mots renvoient à ce que la femme doit paraitre belle pour plaire
à l'homme. C'est une manière de la chosifier.
48
rois. Ce groupe des mots peut donc être
interprété comme suit: l'homme est le roi, la femme la
servante.
Dans le même sens, un garçon qui
appréciait le travail de sa mère déclare dans un manuel
scolaire que :
« Ma mère est la ménagère la plus
méthodique que je n'ai jamais connue ».
(Référence: Manuel `A nous l'école', texte
« Orthographe », page 97).
Il existe donc énormément des textes qui
traduisent des préjugés sur les hommes et sur les femmes. Ceux
qui sont cités ci-haut n'en constituent que quelques exemples. Ils sont
tous tirés des manuels scolaires d'usage par les enseignants et
élèves du primaire et du secondaire.
Il faut remarquer que ces textes ne sont pas mentionnés
pour remettre en cause les relations discriminatoires entre hommes et femmes.
Ils sont utilisés comme historiettes ou dans des conversations. Ils
serviraient davantage s'ils permettaient aux élèves de discuter
sur leurs natures sexistes, mais ce n'est curieusement pas le cas. La plupart
des enseignants ne peuvent pas montrer aux élèves qu'il s'agit
des préjugés, car, parmi eux, il y en a qui possèdent des
perceptions pessimistes quant à l'équité entre hommes et
femmes (cela va être démontré dans le quatrième
chapitre du présent travail).
2.2 Les causes de la persistance des iniquités
dans l'éducation en RDC.
La fourniture de l'éducation pour tous se butte
à des multitudes de contrainte en RDC. Celles-ci sont d'ordre
conjoncturel tout autant que structurel.
2.1.4. Les causes conjoncturelles des
inégalités dans l'éducation
? La crise économique
La crise des années 1990 serait à l'origine de
la mauvaise gouvernance qui a conduit au resserrement de l'assiète
fiscal de l'Etat et occasionné la baisse significative de la part du
budget de l'Etat allouée aux secteurs sociaux de la vie.
L'éducation n'a pas été épargnée par cette
situation.
Tableau 10 : Part de l'éducation dans le budget national
(1986-2014)
|
1980
|
1990
|
2000
|
2002
|
2006
|
2009
|
2011
|
2012
|
2013
|
2014
|
% du budget
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
24,3
|
4,0
|
8,0
|
6,0
|
12,0
|
11,3
|
12,3
|
12,8
|
13,2
|
16,0
|
de l'éducation
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Source : RDC, Rapport OMD 2000-2015.
49
Graphique 8 : Comparaison de la progression du taux net de
scolarisation et du budget de l'éducation.
20
10
Comparaison du taux net de scolarisation et de la part du budget
de l'éducation
100
90
80
70
60
50
40
30
0
Annee 2001 Année 2007 Année 2013
Part du budget d'éducation Taux net de scolarisation
Source : Graphique construit par nous-même sur base des
données issues du rapport OMD 2000-2015.
A partir de ce graphique il y a lieu d'admettre que
l'augmentation de la part du budget allouée à l'éducation
va de pair avec l'amélioration du taux net de scolarisation. Cela
démontre l'importance de l'engagement du pouvoir public aux questions de
l'éducation.
? Les conflits armés récurrents et persistants.
La RDC a enregistré des dizaines des conflits
armés qui ont eu des fâcheuses conséquences sur la
situation sociale de la population. Ces conflits sont principalement
concentrés à l'Est du pays et touches les anciennes provinces du
Katanga, les deux Kivu et l'ancienne Province Orientale. Ces conflits sont
aussi bien influencés par le contexte politique international, la
situation dans les pays voisins (Rwanda, Ouganda et Burundi) que par des
dimensions internes.
En effet, dans les deux Kivu, la crise politique et sociale a
été renforcée par l'arrivée d'un million des
réfugiés burundais et rwandais respectivement en 1993 et 1994. Le
fait que certains de ces réfugiés étaient armés et
soutenus de l'extérieur, leur présence affectera la population
locale dans une partie aussi volatile du territoire nationale et créa
une logique pour le conflit à venir, comme le soulignent KOEN V. at all
(2004), « plaçant l'antagonisme Hutu-Tutsi au centre de la lutte
locale et mettant en place des ingrédients nécessaires à
une guerre régionale ». Bien plus, suites aux contestations et
tensions politiques en Ouganda, les mouvements rebelles ougandais de l'ADF/NALU
et de la LRA vont tous installer leurs bases
50
arrières au Kivu et dans l'ancienne province orientale
où ils commettent des atrocités énormes et des multiples
violations des droits humains sur des populations congolaises.
Parlant de la dimension interne du conflit, KOEN V. et alli
(2004) en distingue trois dynamiques essentielles : la nature de l'Etat
Zaïrois, les politiques foncières et la question de
nationalité. Tout d'abord, l'auteur signale que la stratégie
politique du président MOBUTU fut de diviser l'opposition et compter sur
ses membres en les inondant des fonds. MOBUTU convertit les ressources
économiques en ressources politiques pour les distribuer à ses
alliés. Ainsi, la population, déniée d'accès
à la participation politique sombre dans une pauvreté sans
précèdent. Ensuite, le conflit foncier a été
amplifié par le dualisme des systèmes de gestion de l'espace de
terre disponible (système traditionnel et droit civil). En fin, la crise
congolaise est caractérisée par une insécurité
civique et politique permanente issue de l'exclusion sociale des Barundi (dans
la Plaine de la Ruzizi), des Banyarwanda de Masisi et Rutshuru, et des
Banyamulenge d'Uvira.
Ces trois dynamiques sont à l'origine de la guerre de
1996-1997 (chute du pouvoir de MOBUTU) et de celle 1998-à nos jours
(guerre contre le régime de MZEE DESIRE KABILA, création
d'environ vingt groupes armés).
Cette situation a contraint des milliers des personnes au
déplacement. Selon l'Office de coordination des affaires humanitaires
(OCHA), au milieu de l'année 2014, on comptait plus de 861.000 personnes
déplacées internes dans le Nord Kivu, plus de 618.000 au sud
Kivu, plus 582.000 dans le Katanga et 467.000 dans l'ancienne Province
Orientale16.
En plus du déplacement des populations, les
différentes guerres ont occasionné la destruction des
infrastructures sociales de base (hôpitaux, centres de santé,
écoles), la réduction du pouvoir d'achat des populations,
l'absence ou, dans certains zones, l'affaiblissement de l'autorité de
l'Etat et des services publics, etc. Par conséquent, beaucoup d'enfants
sont restés non scolarisées.
De l'analyse des raisons sus évoquées, nous
estimons que, bien que les filles soient les plus touchées par les
effets de la guerre (enlèvement pour des fins sexuels, mariage
précoce et grossesse conduisant aux abondons scolaires), l'impact de la
guerre et de la pauvreté sur l'éducation est significatif aussi
bien chez les
16 Source: OCHA, situation humanitaire, septembre
2014.
51
filles que chez les garçons. La crise économique
et la guerre constituent un défi pour les deux catégories. Et
donc, si les guerres constituent une des causes du faible taux de
scolarisation, elles ne contribuent que de très peu dans la
perpétuation des inégalités entre filles et garçons
en matière de l'éducation.
2.1.5. Les causes structurelles des
inégalités dans l'éducation
? Les pesanteurs socioculturelles
Les efforts vers l'équité et l'autonomisation de
la femme se heurtent aux pesanteurs socioculturelles qui occultent le
rôle important que les femmes jouent dans la vie sociale et
économique du pays. Parmi ces facteurs, il y a lieu de citer :
- Le mariage et les grosses précoces largement rependu
dans les zones rurales de la RDC et qui peuvent s'expliquer par plusieurs
raisons : existence des préjugés (ex : les femmes qui se marient
en retard ont moins de possibilité d'avoir des enfants), le manque ou
l'éloignement d'institutions d'enseignement supérieur et d'autres
alternatives pour l'occupation des jeunes adolescents, etc. ;
- La répartition sexuelle du travail réservant
aux filles l'essentiel des travaux domestiques principalement dans les milieux
ruraux. En effet, des focus groups organisés (lors du stage) avec les
élèves lors des enquêtes précitées ressort le
fait que certains enfants sont obligés par les parents d'abandonner les
études afin de s'occuper de la garde des petits enfants quand les
parents s'occupent des activités agricoles ou du commerce
ambulatoire.
- Dans des situations où les parents ne disposent pas
assez des ressources pour scolariser les enfants, la priorité est
accordée aux jeunes garçons pour deux raisons: il est largement
admis qu'à l'absence du père, c'est le garçon qui assure
la charge de la famille ; et la fille se chargera des travaux de ménages
car il existe quelqu'un (un homme) qui prendra ses charges. Ces clichés
privent les filles des ressources pour poursuivre les études et
réduisent leurs motivations étant données qu'elles
développent moins de vision pour le future.
52
CONCLUSION DU DEUXIEME CHAPITRE
Le gouvernement de la RDC a déployé
énormément d'efforts pour parvenir à l'éducation
pour tous. Mais, les inégalités entre filles et garçons
restent très prononcées dans le secteur de l'éducation. Si
elles ne sont pas perceptibles pour l'accès à l'éducation,
leur proportion est inquiétante quant à la rétention
à l'école et la poursuite des études. Ce chapitre a donc
clairement démontré le manque d'équité entre les
sexes dans l'éducation en RDC.
Cette iniquité s'observe à travers la
différence entre filles et garçons dans la rétention
à l'école (faible taux d'achèvement et taux d'abandon
élevé pour les filles), la participation de la femme dans la
gestion des structures éducatives (elle y joue un rôle secondaire)
et dans la présence des stéréotypes et clichés
sexistes (observables à travers la place et les rôles
réservés aux hommes et aux femmes dans les manuels scolaires).
Il est certes évident qu'à ce niveau la
responsabilité du pouvoir public face à ce problème doit
être assumée. Car, la stratégie nationale reconnait
l'existence de ces stéréotypes, bien qu'aucune analyse
approfondie à cet égard ne soit menée ; on ne peut donc
pas mentionner l'ignorance. Et, bien que, par exemple, les textes des manuels
scolaires constituent un héritage historique, le gouvernement a la
possibilité de les mettre hors d'usage et de concevoir des textes
porteurs des messages constructifs pour les enfants des deux sexes.
53
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Le cadre juridique congolais, en commençant par la loi
fondamentale, reconnait l'égalité en droit et en devoir entre
l'homme et la femme. Mais, dans les structures éducatives congolaises,
ces prérogatives semblent être ignorées. Les femmes et les
jeunes filles continuent de subir des inégalités, des
préjugés et clichés sexistes.
Pourtant, l'analyse des théories de la justice nous a
permis de relever les éléments de base d'une justice sociale.
Ainsi sommes-nous arrivés à la conclusion qu'une politique
d'éducation pour tous doit non seulement répondre aux besoins
éducatifs des filles et des garçons mais aussi et surtout
combattre les stéréotypes qui maintiennent les femmes dans
l'état de subordination.
A cet effet, faut-il admettre que les objectifs prioritaires
retenus par la stratégie pour le développement du sous-secteur de
l'ESPS sont-ils suffisant pour parvenir à l'équité dans
l'éducation en RDC ?
Les données officielles et les enquêtes que nous
avons menées sur la situation de la femme dans l'éducation en RDC
ont révélé les faits suivants :
? La grande majorité de la population congolaise vit en
milieu rural, milieu où le changement social évolue très
lentement;
? En 2009, La différence du taux brut de scolarisation
est faible entre les filles et garçons (83 % contre 97,5%) au cycle
primaire et beaucoup plus accentuée au niveau secondaire (28,2 % contre
51,2%). Cette tendance montre que dans la globalité, il n'existe pas de
discrimination directe à l'encontre des filles quant à
l'accès à l'école en RDC.
? La même année, de tous les enfants inscrits
à l'école 34 % des filles ont achevé le cycle primaire
(contre 55,9 % des garçons), et 13,4 % des filles le cycle secondaire
(contre 36,2 % des garçons). Donc le premier problème
d'équité dans l'éducation se pose en termes de
rétention.
? Parallèlement, les femmes jouent le rôle
plutôt secondaire dans toutes les structures éducatives, allant du
comité des élèves à l'inspection. Cela
démontre, aux yeux des élèves que les
responsabilités sociales sont l'apanage des hommes.
? Enfin, il existe énormément des
stéréotypes et clichés sexistes présents dans les
manuels scolaires et propagés par l'éducation en RDC.
54
Face à cette situation, les efforts du gouvernement,
qui visaient entre autre l'équité, ont été
exclusivement focalisés sur la gratuité de l'enseignement
primaire, la construction des infrastructures scolaires et la distribution des
manuels scolaires (pourtant porteurs des stéréotypes).
A cet effet, les analyses effectuées au travers de
cette partie permettent de confirmer notre première hypothèse.
Car, s'il faut prendre en compte le contexte mentionné ci-dessus,
l'application des mesures de gratuité de l'enseignement primaire, la
construction des salles de classe et la distribution des manuels scolaires ne
constituent pas la principale voie pour favoriser l'équité dans
l'éducation.
Nous retenons ainsi qu'une politique soucieuse de
l'équité dans l'éducation doit plus s'investir dans la
rétention des filles à l'école, l'amélioration de
la place de la femme dans les structures éducatives formelles et dans le
combat contre les stéréotypes et les préjugés
existant dans l'éducation.
A cet effet, les programmes et projets visant à assurer
l'inscription de « toutes les filles, ou tous les enfants à
l'école » doivent être remplacés par ceux qui
permettent que « tous les enfants finissent l'école». Aussi,
les efforts doivent être concentrés au niveau secondaire et, dans
les limites des moyens disponibles, élargis au supérieur. Il en
serait de même pour les mesures de l'autonomisation de la femme.
Celles-ci doivent retenir les indicateurs au niveau secondaire et
supérieur et non au niveau primaire.
55
SECONDE PARTIE : L'EDUCATION EN RDC ET LA SENSIBILITE
AU GENRE
56
INTRODUCTION DE LA SECONDE PARTIE
Dans la première partie de ce travail, nous avons
démontré que le but de l'éducation pour tous ne se limite
pas uniquement à la promotion de l'accès des filles et
garçons à l'éducation. Elle implique aussi et surtout
l'équité dans celle-ci. Cela implique, comme le mentionne MARTIN
MICHAELA (2010) «une représentation et une réussite des
filles et des garçons durant tout leur processus
éducatif».
La partie a également révélé que
les efforts de la RDC en matière de l'éducation pour tous n'ont
pas su conduire à l'accroissement de l'équité. Et
pourtant, la théorie d'égalisation des capacités et
opportunités de Sen nous ont démontré que
l'égalité de sexe nécessite plutôt
l'équité entre filles et garçons en termes de
possibilités d'éducation. Ainsi, la lutte pour l'éducation
pour tous devrait également s'attaquer aux facteurs qui constituent des
barrières aux possibilités d'une éducation
égalitaire.
Partant de ce constat, la seconde partie de notre
mémoire se met à la quête d'une stratégie permettra
d'atteindre cet objectif. De manière pratique, nous comptons effectuer
une évaluation du degré de prise en compte des problèmes
des filles et des femmes dans les politiques publiques en matière
d'éducation, et proposer, par la suite, un ensemble d'objectifs qui,
selon nous, méritent d'être intégrés parmi les axes
prioritaires de la stratégie pour le développement du
sous-secteur de l'EPSP. Mais avant d'y parvenir, il nous semble opportun de
clarifier le concept d'autonomisation (de la femme).
57
TROISIEME CHAPITRE : GENERALITES SUR
L'AUTONOMISATION DE LA FEMME
INTRODUCTION DU TROISIEME CHAPITRE
L'autonomisation fait partie de ces concepts pour lesquels
tout le monde semble comprendre ou ignorer les sens. Dans le langage courant,
ce concept est principalement réduit à la seule
indépendance économique. La précision du sens
accordé à ce concept nous a paru une étape primordiale et
nécessaire pour la compréhension de notre travail. Raison pour
laquelle tout un chapitre lui a été dédié.
Ainsi, ce troisième chapitre relève la
définition de l'autonomisation de la femme et recense les engagements
pris tant au niveau international que national pour atteindre ce but social.
3.1. Conceptualisation de l'autonomisation de la
femme
L'autonomisation est actuellement l'un des termes les plus
employés en matière de développement. Pourtant, il n'en
reste pas moins vrai que ce terme soit également l'un des moins compris
si l'on s'en tient à son observation et à sa mesure.
Théoriquement, autonomisation provient du concept
autonomie, lui-même
issu des mots « auto » (soi-même) et «
nomos » (loi, règle). Donc
étymologiquement autonomie
signifie la capacité ou le droit de se donner à soi-même
(c'est-à-dire à ses actes et décisions) sa propre loi (ou
sa propre règle).
Ce concept présente diverses significations selon qu'il
s'agit de tel ou tel autre domaine.
En philosophie, l'autonomie signifie la faculté d'agir
par soi-même en se donnant ses propres règles de conduite.
L'autonomie caractérise, selon les philosophes de Lumières, la
raison humaine, la raison pratique ou morale. C'est dans cet angle que,
s'exprimant sur l'autonomie, KANT EMMANUEL encourage «l'homme à
sortir de l'état de minorité en l'invitant à penser par
lui-même pour ne
58
pas être dirigé par un autre » ; et
DESCOMBES VINCENT pense que « être autonome n'est pas s'inventer,
mais être capable de se diriger seul »17.
Quand il s'agit de la médecine, l'autonomie
réfère au respect de la volonté du patient dans la prise
des décisions le concernant.
Par ailleurs, dans un sens restreint de la sociologie,
l'autonomie réfère à l'aptitude d'une personne à
s'intégrer de manière individuelle dans la société.
Ceci est en opposition à la situation d'assistance de la part des tiers
et des pouvoirs publics. Elle correspond donc à la capacité
à s'auto-suffire et/ou à s'autogérer.
Au fil du temps, le terme autonomie a été
récupéré par le mouvement féministe. Militant pour
les droits des femmes, ce mouvement utilise beaucoup plus le mot
autonomisation18 qui est la traduction française du concept
anglais «empowerment».
D'après STROMQUIST (1993), le concept
empowerment serait utilisé pour la première fois aux
Etats-Unis d'Amérique, lorsque des groupes des femmes luttaient pour la
reconnaissance de leurs droits. A l'origine, il signifiait l'octroi de plus de
pouvoir aux individus ou aux groupes défavorisés pour agir sur
les conditions sociales, économiques, politiques et écologiques
qu'ils subissent. Ainsi, cette auteure définit l'autonomisation de la
femme à partir de quatre composantes essentielles:
? La composante cognitive : inclut la
compréhension par les femmes de leurs conditions de subordination et de
leurs causes au niveau macro et micro de la société. Elle
implique l'acquisition des nouvelles connaissances engendrant une nouvelle
conception des rapports entre les sexes ainsi que la suppression des vielles
croyances qui structurent les idéologies traditionnelles entre femmes et
hommes;
? La composante psychologique : inclut le
développement des sentiments que les femmes peuvent influencer
l'amélioration de leur condition. Ce qui signifie croire au
succès de leurs efforts initiant tout processus de changement
positif;
? La composante économique: requiert
que les femmes soient capables de s'engager dans une activité productive
qui leur permettra d'accéder à un certain degré
d'autonomie, peu importe qu'elle soit faible ou difficile à obtenir au
départ ; et, en fin ;
17 Cités par Molenat (2010)
18Cette traduction ne comporte cependant pas tous les
sens donné par empowerment
59
? La composante politique comprend la
capacité à s'organiser et à se mobiliser en vue de tout
processus de changement.
Ainsi donc, par l'autonomisation de la femme nous comprenons
le processus qui permet à la femme de renforcer le pouvoir de choisir,
de façon consciente et libre, le style de vie qu'elle considère
bon et la manière qu'elle croit être la meilleure pour mener cette
vie.
3.2. De l'engagement mondial en faveur de
l'autonomisation de la femme et
de l'éducation pour tous.
Fort de toute la mobilisation, l'autonomisation de la femme
fait actuellement l'objet des plusieurs traités internationaux et
régionaux. Elle est devenue à la fois un objectif des programmes
de développement et un processus pour le changement social. Elle ne
concerne plus uniquement l'identité personnelle, mais entraine aussi une
analyse globale des droits humains.
3.2.1. Engagement international en faveur de
l'autonomisation de la femme
La prise de conscience mondiale sur la situation de la femme a
suscité l'élaboration, sur le plan international et
régional, des politiques communes et publiques intégrant la
dimension genre et visant spécialement l'autonomisation de la femme. A
la base de ces politiques figurent des traités de promotion des droits
de l'homme, parmi lesquels on peut mentionner la charte internationale des
droits humains, les quatre conférences mondiales sur les femmes, ainsi
que la convention sur l'élimination de toutes les formes de
discriminations à l'égard de la femme.
En effet, la Charte Internationale des droits de
l'homme19 constitue la base juridique internationale garantissant
les droits et libertés fondamentaux à tout être humain.
Certes, la Déclaration universelle des Droits de l'Homme (DUDH)
énonce, à son article 2, le principe général de
non-discrimination dans l'exercice des droits de l'homme. Le Pacte
international relatif aux droits économique, sociaux et culturels
(PIDESC) décrit, de manière très détaillée,
les droits énoncés dans la DUDH et précise les mesures
nécessaires à leur réalisation. Pour le droit à
l'éducation par exemple, les articles 13 et 14 précisent le
devoir, pour les Etats, d'assurer gratuitement l'enseignement primaire
obligatoire et de prendre des mesures en vue d'instaurer la gratuité
dans l'enseignement secondaire et supérieur.
19Formé de la DUDH, du PIDES', et du PIDCP.
60
Pour sa part, le Pacte international relatif aux droits civils
et politiques (PIDCP) développe les droits civils et politiques
énoncés dans la DUDH. Son article 26 garantit
l'égalité devant la loi et la protection, sans discrimination, de
la loi en vigueur dans un Etat ; et l'article 25 garantit le droit de prendre
part à la direction des affaires publiques, en particulier par des
élections périodiques et honnêtes.
Ensuite, les quatre conférences mondiales sur
les femmes, organisées par les Nations Unies, ont
été le moyen de placer la question de l'égalité
entre les sexes au coeur de l'agenda mondial. A en croire l'ONU (2000), ces
conférences ont permis de grouper la communauté internationale
autour d'un ensemble d'objectifs communs, assorti d'un plan d'action effectif
pour la promotion générale des femmes, dans toutes les
sphères de la vie publique et privée.
En fin, la Convention sur l'élimination de toutes les
formes de discriminations faites à la femme (CEDEF),
adoptée en décembre 1979, énonce plus en détail ce
que l'on attend par discrimination sexuelle sous l'angle de
l'égalité entre l'homme et la femme. En outre, elle met l'accent
sur l'obligation faite aux Etats parties de s'abstenir de toute pratique
discriminatoire à l'égard des femmes dans leurs fonctionnements
internes et de prendre des mesures visant à instaurer
l'égalité en droit et en fait dans tous les domaines de la vie,
notamment en faisant disparaitre les comportements, coutumes et pratiques
discriminatoires dans la société.
L'adoption de ces traités, ainsi que de tant d'autres,
et leurs ratifications par les Etats ont suscité et favorisé
l'élaboration des politiques et programmes visant spécialement
l'égalité entre hommes et femmes. Sans être exhaustif, nous
nous proposons de relever, à travers cette section, quelques-unes de ces
politiques développées au plan international, régional et
national.
i. Du Plan d'action de Mexico au Plan d'Action de
Beijing
Les quatre Conférences Mondiales sur les femmes ont
abouti à l'élaboration de quatre plans d'action de :
Mexico, Copenhague, Nairobi et Beijing.
La première conférence mondiale sur les femmes,
tenue en 1975 à Mexico (Mexique), a initié, pour la
première fois, un dialogue de portée internationale sur
l'égalité de sexe et aboutit à l'élaboration et
l'adoption du Programme Mondial d'Action de Mexico. Ce programme
établissait les résultats minimum devant être atteints
avant 1980. Il permettrait également de garantir un accès des
femmes aux domaines tels que l'éduction, en augmentant leurs
opportunités d'emploi, leur
Ce ne sera, en fin, qu'à la quatrième
conférence mondiale sur les femmes, organisée à Beijing
(Chine) en 1995, que l'on assistera véritablement à
l'ouverture
61
chance de participation à la vie publique, aux services
de santé, à la sécurité alimentaire et au planning
familial.
Par la suite, il fut organisé, en 1980, la
deuxième conférence mondiale sur la femme à Copenhague
(Danemark). Ce forum eut pour objectif d'examiner et revoir le Programme
mondial d'action mis en place lors de la conférence de Mexico. Durant de
ces assisses, les représentants des 145 Etats membres de l'ONU
reconnurent, de manière unanime, que des progrès significatifs
avaient été réalisés, parmi lesquels figure
l'adoption, par l'Assemblé Générale des Nations Unies, de
la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
à l'égard de la femme.
Cette conférence releva cependant l'émergence
des disparités entre les droits théoriquement garantis et la
capacité pour les femmes d'exercer effectivement ces droits. D'où
l'adoption du Plan d'action de Copenhague qui appelait à la mise en
place des mesures nationales plus importantes afin de garantir aux femmes la
propriété et le contrôle foncier, ainsi qu'une
amélioration des droits en matières de succession, de garde
parentale et de perte de nationalité.
En 1985, il fut organisé à Nairobi, au Kenya, la
troisième conférence mondiale sur la femme. Et contrairement
à la précédente, celle-ci a eu comme objectif la recherche
des voies nouvelles qui permettrait de surmonter les obstacles de la
décennie 1975-1985 (appelée Décennie des Nations
Unies pour les Femmes). A l'issu de cette conférence furent
développées et adoptées les «
Stratégies prospectives d'action de Nairobi pour l'an
2000», dont la nouveauté réside dans le fait
qu'elles déclaraient que tous les problèmes humains
étaient aussi les problèmes des femmes. Ainsi, la participation
des femmes au processus de prise de décision et à la gestion de
toutes les affaires humaines fut reconnue non seulement comme un droit
légitime, mais aussi comme une nécessité politique et
sociale.
Il faut toutefois signaler que de Mexico à Nairobi, les
efforts développés avaient aidé à améliorer
la condition de la femme et son accès aux ressources. Malheureusement,
ils n'avaient pas permis de modifier les formes élémentaires
d'inégalité existant au sein des relations homme-femme. Les
décisions qui affectaient la vie de la plupart des individus
étaient toujours prises par des hommes.
62
d'un nouveau chapitre dans la lutte pour
l'égalité des sexes. Beijing a, en fait, permis de
déplacer l'attention, jadis focalisée sur les femmes, vers un
concept plus large, le genre. En fait, l'idée était de montrer
que la structure de la société dans son ensemble, de même
que les relations entre les hommes et les femmes qui la composent, doivent
être réévaluées. La conférence de Beijing
attira l'attention internationale sans précédent. Elle aboutit
à l'adoption, à l'unanimité, de la Déclaration et
du Plan d'action de Beijing. Celui-ci définissait douze
domaines critiques estimés être représentatifs des
obstacles principaux à la promotion de la femme et par lesquels une
action concrète des gouvernements et de la société civile
était nécessaire.
A propos de l'éducation, qui fait partie des douze
domaines, les participants à la conférence de Beijing reconnurent
que les filles sont toujours en butte à la discrimination dans des
régions du monde du fait de traditions, des mariages et grossesses
précoces, du caractère inapproprié et sexiste du
matériel didactique et d'enseignement, de harcèlement sexuel,
etc. C'est pourquoi, conscient du fait que l'éducation est un droit de
l'homme et un moyen essentiel d'atteindre les objectifs
d'égalité, de développement et de paix, ils
recommandèrent aux gouvernement de prendre des mesures pour, entre
autre, assurer un accès égal à l'éducation et
mettre au point des systèmes d'enseignement et de formation non
discriminatoire.
ii. La Déclaration Mondiale sur l'éducation
(Jomtien)
Cette déclaration est l'émanation de la
Conférence Mondiale sur l'Education pour Tous (EPT) organisée
à Jomtien (Thaïlande) du 5 au 9 mars 1990.
A travers cette déclaration, les Etats partis à
cette conférence se sont engagés à répondre aux
besoins éducatifs fondamentaux de toute personne - enfants, adolescent
ou adultes. Car ils avaient constaté que dans le monde, plus de 100
millions d'enfants, dont au moins 60 millions des filles, n'ont pas
accès à l'enseignement primaire et que plus de 100 millions
d'enfants et d'innombrables adultes n'achèvent pas le cycle
éducatif de base qu'ils ont entamé.
Ainsi, dans le souci d'universaliser l'accès à
l'éducation et de promouvoir l'équité, la
déclaration accorda une priorité absolue à l'accès
des filles et des femmes à travers l'amélioration de la
qualité de la formation, la suppression des obstacles à leur
participation active et la lutte contre les stéréotypes sexistes
présents dans l'éducation. Elle a ainsi relevé les
conditions requises pour parvenir à
63
une éducation pour tous : mettre en place des politiques
d'accompagnement, mobiliser les ressources pour l'éducation et renforcer
la solidarité internationale.
iii. Le Cadre d'Action de Dakar
Le Cadre d'Actions de Dakar a été adopté
lors du Forum Mondial sur l'Education tenu à Dakar
(Sénégal) du 26 au 28 avril 2000.
Ce forum a été organisé dans le but de
mener une évaluation détaillée sur le Bilan des
engagements collectifs pris à Jomtien en faveur de l'Education pour
Tous. Ces évaluations ont constaté que, durant les dix ans
suivant le lancement de l'EPT, des progrès non négligeables ont
certes été réalisés. A titre illustratif, les
effectifs de l'enseignement primaire au niveau mondial ont augmenté
d'environ 82 millions, le nombre des filles scolarisées en 1998
était supérieur de 44 millions à celui de 1990 et les taux
de redoublement et d'abandon avaient diminué. En outre, le forum a
révélé que l'égalité entre les sexes avait
tendance à s'améliorer dans certaines régions et que
presque tous les pays du monde avaient ratifié la Convention relative
aux droits de l'enfant, et de ce fait, ils ont accepté l'obligation de
garantir à chaque enfant le droit à une éducation de
base.
Cependant, les participants au forum de Dakar ont
soulevé certains défis liés à la réalisation
de l'EPT. En effet :
? Nombre des gouvernements et d'organismes ont
concentré leurs efforts sur ceux qu'ils étaient facile
d'atteindre et négligé ceux qui étaient exclus de
l'éducation de base pour des raisons sociales, économiques ou
géographique;
? L'éducation des filles demeure un défi majeur:
60 % des enfants qui n'ont pas accès à l'enseignement primaire
sont des filles ;
? En Asie et en Afrique Subsaharienne, les progrès ont
été les plus difficiles à réaliser.
Pour faire face à ces défis, le cadre d'action
de Dakar fixa six objectifs et 12 stratégies visant à permettre
à tous les êtres humains d'exercer leurs droits d'apprendre et
d'exercer leur responsabilité en contribuant au développement de
leur société. Parmi ces stratégies, le cadre
prévoyait de créer un environnement éducatif sain et
sûr, qui favorise un apprentissage efficace, notamment en fournissant des
matériels didactiques de qualité qui permettront à tous
les apprenants d'atteindre et de dépasser des niveaux d'acquisition bien
définis.
64
Encadré 2: Les six objectifs du cadre d'action de
Dakar
1. Développer et améliorer sous tous leurs
aspects la protection et l'éducation de la petite enfance, et notamment
des enfants les plus vulnérables et défavorisés;
2. Faire en sorte que d'ici 2015 tous les enfants, notamment
les filles et les enfants en difficulté ou issus des minorités
ethniques, aient la possibilité d'accéder à un
enseignement primaire obligatoire et gratuit de qualité et de le suivre
jusqu'à son terme;
3. Répondre aux besoins éducatifs de tous les
jeunes en assurant un accès équitable à des programmes
adéquats ayant pour objet l'acquisition des connaissances ainsi que des
compétences nécessaires dans la vie courante;
4. Améliorer de 50 % les niveaux
d'alphabétisation des adultes, et notamment des femmes, d'ici à
2015, et assurer à tous les adultes un accès équitable aux
programmes d'éducation de base et d'éducation permanente;
5. Eliminer les disparités entre les sexes dans
l'enseignement primaire et secondaire d'ici 2005 et instaurer
l'égalité dans ce domaine d'ici 2015 en veillant notamment
à assurer aux filles l'accès équitable et sans restriction
à une éducation de base de qualité avec les mêmes
chances de réussite;
6. Améliorer sous tous ses aspects la qualité
de l'éducation et garantir son excellence de façon à
obtenir pour tous des résultats d'apprentissage reconnus et
quantifiables-notamment en ce qui concerne la lecture, l'écriture, le
calcul et les compétences indispensables dans la vie courante.
Source : Extrait du Cadre d'action de Dakar
Il sied de noter que le Forum de Dakar a été
précédé de six forum régionaux (Les
Amériques, les Etats arabes, l'Asie et le Pacifique, l'Europe et
l'Amérique du Nord, l'Afrique Subsaharienne et les pays
E-920. Ces conférences ont donné naissance aux cadres
régionaux sur l'EPT, et ceux-ci constituent des parties
intégrantes du cadre d'action de Dakar. Pour le compte de l'Afrique
Subsaharienne, la conférence eut lieu à Johannesburg, Afrique du
Sud, du 6 au 10 décembre 1999. Elle a retenu entre autre objectif,
l'amélioration de l'éducation des filles et des femmes, qui
devrait être atteint aux travers des moyens suivants:
20 L'initiative E-9 rassemble ces neuf pays du Sud
à forte population : Bangladesh, Brésil, Chine, Egypte, Inde,
Indonésie, Mexique, Nigeria et Pakistan.
65
· Faire à ce que le nombre des filles inscrites
à l'école, terminant la scolarité et passant d'un niveau
de l'enseignement à un autre soit de plus en plus compatible à
celui des garçons;
· Revoir, et, le cas échéant, adopter des
lois afin de supprimer tous les obstacles à la participation des filles
et des femmes à l'éducation;
· Prendre des mesures pour créer un environnement
d'apprentissage sûr et favorable aux filles et femmes, à
l'intérieur comme à l'extérieur de l'école;
· Généraliser l'action positive pour
améliorer l'accès à l'éducation, en particulier
dans les domaines des mathématiques et des sciences;
· Mener des campagnes de sensibilisation et de formation
attentives aux différences entre les sexes, à l'intention des
parents, enseignants et des gestionnaires de l'éducation en vue
d'accroitre la participation féminine à l'éducation.
Notons enfin que les objectifs de l'EPT occupaient à
eux seuls deux des huit objectifs du millénaire pour le
développement.
iv. Objectifs du millénaire pour le
développement (OMD)
Lors du « Sommet du Millénaire » tenu
à New York en septembre 2000, les Nations Unies ont décidé
du lancement d'un ambitieux programme structuré autour de ce qu'on
appelle les huit «Objectifs du Millénaire pour le
Développement»(OMD). Adoptés par 193 Etats membres de l'ONU,
les OMD recouvraient des grands enjeux humanitaires comme la réduction
de l'extrême pauvreté et de la mortalité infantile, la
lutte contre les épidémies dont le SIDA, l'accès à
l'éducation, l'éducation et le Développement Durable.
Deux objectifs de ce programme réfèrent
à notre sujet de travail. Il s'agit
de :
· L'Objectif 2, visant à assurer
l'éducation primaire pour tous, prévoyait de donner à tous
les enfants, garçons et filles, et partout dans le monde, le moyen
d'achever un cycle complet d'études primaires;
· L'Objectif 3, qui se focalisait sur
l'égalité de sexe et l'autonomisation de la femme, et voulait,
entre autre but, éliminer les disparités entre les sexes dans
l'enseignement primaire et secondaire en 2005 et, si possible, à tous
les niveaux de l'enseignement en 2015.
A leur échéance (en 2015), les huit OMD ont
été remplacés par dix-sept Objectifs du
Développement Durable (ODD)
66
v. Le Protocole de la SADC sur le genre et le
développement
En 2008, les chefs d'Etats ou des Gouvernements des Etats
membres de la SADC ont signé un protocole sur le genre et le
développement. L'objectif de ce protocole fut de favoriser le
renforcement des moyens d'action des femmes, d'éliminer la
discrimination et de réaliser l'égalité entre les sexes
par l'élaboration et la mise en oeuvre des législations,
politiques, programmes et projets soucieux de répondre aux besoins des
femmes comme des hommes. Ainsi, les Etats se sont engagés à
adopter des politiques, stratégies et programmes nécessaires tels
que la discrimination positive.
Ces mesures de discrimination positive devraient être
mises en place avec référence particulière aux femmes et
aux filles afin d'éliminer toutes les barrières qui les
empêchent de participer de façon significative à toutes les
sphères de la vie. De manière spécifique, au terme de ce
protocole, les Etats devraient :
? Edicter, au plus tard 2015, des lois qui promeuvent
l'égalité d'accès au primaire, secondaire,
supérieur, professionnel et non formel (Article 14,1);
? Adopter et mettre en oeuvre au plus tard 2015 des
politiques et programmes éducatifs soucieux de l'égalité
entre les sexes qui s'attaquent notamment aux clichés et à la
violence sexiste (article 14, 2);
? Prendre des mesures appropriées, le cas
échéant les mesures législatives, pour décourager
les normes culturelles, y compris les pratiques sociales, économiques,
culturelles et politiques qui légitiment et accentuent la persistance et
la tolérance de la violence, et ce en vue de les éliminer.
3.2.2. Engagement de la ROC en faveur de l'autonomisation
de la femme
i. La loi fondamentale
A travers la constitution de 2006, la RDC a
réaffirmé son attachement aux Droits humains et aux
libertés fondamentales tels que proclamés par les instruments
juridiques internationaux auxquels elle a adhéré. Certes,
à son article 14, la loi fondamentale dispose que «les pouvoirs
publics veillent à l'élimination de toute forme de discrimination
à l'égard de la femme et assurent la protection et la promotion
de ses droits. Ils prennent dans tous les domaines, notamment dans les domaines
civil, politique, économique, social et culturel, toutes les mesures
appropriés pour assurer le total épanouissement et la pleine
participation de la femme au développement de la nation».
67
ii. Les Documents de Stratégie de Croissance
et de Réduction de la Pauvreté (DSRP)
Dans le but d'améliorer les conditions de vie des
populations congolaises, le gouvernement a adopté en juillet 2006 le
«Document de Stratégie de Croissance et de Réduction de la
Pauvreté de première génération » (DSCRP1),
mis en oeuvre entre 2006 et 2010. En 2011, un deuxième DSCRP (DSCRP2) a
été lancé pour faire suite au premier, arrivé
à son échéance. Actuellement, le DSCRP2 constitue, pour
reprendre le langage de son auteur, le seul cadre fédéral de
l'ensemble des politiques macroéconomiques et sectorielles pour le
prochain quinquennat (20112015).
Dans ce document, parmi les grandes options, le gouvernement
s'est décidé d'assurer une approche holistique transversale,
prenant en compte les femmes autant que les hommes dans toutes les
activités des quatre piliers du DSCRP2. Pour y parvenir, quatre piliers
importants ont été prévus: renforcer la gouvernance et la
paix ; diversifier l'économie, accélérer la croissance et
promouvoir l'emploi; améliorer l'accès aux services sociaux de
base et renforcer le capital humain; et protéger l'environnement et
lutter contre les changements climatiques. Dans le secteur de
l'éducation en particulier, et afin d'assurer l'accès universel
à l'éducation de base, «le gouvernement entend promouvoir un
enseignement primaire obligatoire et gratuit, conformément aux
dispositions de la constitution. Cet axe important pour le gouvernement
s'articule autour de : (i) la suppression progressive des frais scolaires, (ii)
l'identification et l'intégration des enfants exclus du système
scolaire; (iii) la réduction des disparités géographiques
et des inégalités entre les sexes et les groupes sociaux; (iv)
l'accroissement des capacités d'accueil; et (v) l'appui aux
communautés locales pour le développement de l'éducation
préscolaire en vue de faciliter le passage vers l'enseignement
primaire.
iii. La stratégie pour le développement du
sous-secteur de l'EPSP (2010/20112015/2016)
Face aux multiples défis structurels auxquels faisait
face le sous-secteur de l'enseignement primaire, secondaire et professionnel,
le gouvernement de la RDC s'est engagé dans un processus de
réforme de ce secteur. En effet, après plusieurs études,
analyses et réflexions, le ministère ayant ce secteur dans ses
attributions a initié l'élaboration et l'adoption, en mars 2010,
du «Document de Stratégie pour le développement du
sous-secteur de l'éducation primaire, secondaire et
68
professionnel»(EPSP). Cette stratégie vise la
construction d'un système éducatif inclusif et de
qualité.
Le Plan Intérimaire de l'éducation (PIE) a
ainsi été élaboré pour assurer la mise en oeuvre de
cette stratégie. Pour ce plan, la gratuité de l'enseignement
primaire constitue l'action prioritaire sur laquelle le gouvernement a
axé ses efforts.
CONCLUSION DU TROISIEME CHAPITRE
A travers ce troisième chapitre, nous avons retenu que
l'autonomisation n'est pas une fin en soi, mais plutôt un processus. Elle
vise, pour les femmes, le renforcement du pouvoir de choisir par
elles-mêmes le style de vie qui leur semble le meilleur.
L'éducation a ainsi été retenue comme
étant le moyen le plus efficace pour aspirer à ce but ultime.
Raison pour laquelle, diverses conventions internationales ont
été organisées en sa faveur. En plus, des nombreux Etats,
à l'instar de la RDC, ont conçu des stratégies et
programmes visant à contribuer pour l'égalité de sexe.
Reste à savoir si cette mobilisation a été traduite par
des actions concrètes sur le terrain.
69
QUATRIEME CHAPITRE : DEGRE DE PRISE EN COMPTE
DE LA DIMENSION GENRE PAR LA STRATEGIE
DE
L'EDUCATION EN RDC
INTRODUCTION DU QUATRIEME CHAPITRE
L'égalité de sexe, comme tout autre secteur du
changement social, nécessite un engagement solide des gouvernants. Cet
engagement doit être traduit par des actions concrètes et bien
pensées. Car, comme LONGWE SARA l'a démontré dans son
«cadre d'habilitation de la femme», il existe un lien direct entre le
niveau d'engagement d'une politique publique et l'autonomisation de la
femme.
Le dernier chapitre de ce mémoire se propose ainsi
d'analyser le degré de prise en compte de la dimension genre par la
stratégie de développement du sous-secteur de l'EPSP pour, enfin,
analyser sa propension à contribuer à l'autonomisation de la
femme congolaise.
4.1. Notion et Outils de la prise en compte de la
dimension genre
4.1.1. Quid de la prise en compte de la dimension
genre
Dans le langage courant, le genre est utilisé en lieu
et place de sexe, parité, mixité, mixage, émancipation de
la femme, etc. Aussi, comme divers projets orientés vers le genre se
sont axés sur les femmes ; on a toujours fait du genre le synonyme de
`femmes'. Des projets qui visent à satisfaire les besoins des femmes
peuvent, à tort, parler des besoins de genre. Par exemple, un projet
utilisant 50 % des femmes dans le personnel sera qualifié de respectueux
du genre. Dans un processus de recrutement des employés, le fait
d'accorder le poste à une femme en lieu et place d'un homme est
justifié par le besoin du respect de la dimension genre. Ainsi, faut-il
dire que genre et sexe sont des synonymes ?
Certes, genre et sexe sont bien différents. Le sexe
réfère à l'ensemble des caractéristiques
biologiques qui différencient les hommes des femmes. Ces
caractéristiques sont immuables et innées. Le genre, par contre,
fait référence aux caractéristiques socialement acquises.
Celles-ci traduisent les rôles assignés et appris aux hommes et
aux femmes. Elles peuvent, à ce titre, changer avec le temps, les
cultures, les circonstances, l'environnement, etc.
70
Le genre est donc considéré comme un construit
social, parce qu'il est déterminé par des éléments
sociaux et repose sur des structures sociales. Il s'intéresse, selon
RILA (2008), «aux rapports sociaux entre les sexes, à leurs
interactions, et met en évidence la construction sociale des rôles
féminins et masculins ainsi que la hiérarchie qui marquent cette
forme de relations».
Ainsi, dans le souci d'améliorer l'impact de leurs
projets sur les bénéficiaires, les acteurs de
développement ont introduit la notion de la «dimension genre».
Mais, à quoi cette notion réfère-t-elle?
La notion de la dimension genre n'est ni aussi simple qu'on
la réduit, moins encore compliquée qu'elle est
mystifiée.
La notion de genre n'est pas une fin en soi, comme c'est le
cas pour la parité ou la mixité21. Elle s'applique,
comme nous allons le démontrer à travers les outils qui s'y
réfèrent, dans toutes les étapes du cycle d'un projet.
C'est donc un processus, une approche de travail.
Le genre ne signifie pas non plus les droits des femmes. Un
ministère de genre ne traiterait pas exclusivement des questions des
femmes ; il ne doit pas non plus être systématiquement
dirigé par des femmes. Une telle conception constitue un autre exemple
de stéréotype.
En fait, prendre en compte la dimension genre signifie, pour
un programme ou un projet, identifier et répondre aux besoins,
préoccupations et capacités des différentes groupes
sociaux, et comprendre les relations que les uns ont avec les autres pour ce
qui est de l'accès et de la gestion des ressources. Il s'agit d'une
démarche continue qui s'applique à toutes les étapes du
cycle d'un projet (conception, élaboration, mise en oeuvre, suivi et
évaluation).
Dans ce sens, parler de «l'éducation pour
tous» ne signifie pas offrir les mêmes traitements entre filles et
garçons (conception juridique, renvoyant à
l'égalitarisme). Dans ce contexte, on parlerait plutôt de
«égalité dans l'éducation», sachant bien
évidement que l'égalité réfère à la
non-discrimination. Or, au regard des théories de justice
précédemment développées, spécifiquement
celles d'égalisation des ressources (biens premiers et ressources
étendues), la situation des
21 La parité
réfère à l'égalité
numérique. C'est-à-dire pour 10 personnes, il y a 5 hommes et 5
femmes. La mixité signifie juste un mélange
entre hommes et femmes ; exemple pour un groupe de 10 personnes
constitué de 3 hommes et 7 femmes.
71
femmes mérite des compensations dans certains
contextes. Et ces compensations peuvent prendre la forme de
`discrimination positive' prônée par la
convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
à l'égard de la femme (à son article 4). Donc, si la
notion d'égalité pour tous signifiait égalité dans
l'éducation, les mesures de discrimination positive ne seraient pas
justifiées et acceptables. Ainsi, par éducation pour tous, nous
comprenons «la prise en compte du genre dans l'éducation». Il
s'agit donc de prendre en compte, dans la planification de l'éducation
(prévision des activités et du budget), des besoins pratiques et
intérêts stratégiques différenciés des filles
tout comme ceux des garçons. Par exemple, les actions visant la
réduction des abandons scolaires ne doivent pas être identiques
car les causes de ces abandons ne sont toujours pas les mêmes pour les
filles et les garçons.
Ainsi définit, il faut conclure que la dimension genre
est une méthodologie sur laquelle s'appuie la justice sociale. Elle
permet donc la jouissance des droits par chaque membre d'une
société. Elle est le fondement pour une égalité des
droits et l'arme efficace pour la lutte contre toute forme de discrimination.
En fin, cette dimension ne concerne pas uniquement les femmes et les filles.
Elle s'applique bien également aux hommes et aux garçons.
4.1.2. Les outils d'intégration de la dimension
genre dans les politiques de développement.
Divers outils d'analyse et d'intégration de la
dimension genre ont été développés à travers
le monde. Il s'agit notamment du cadre analytique de Harvard, du Cadre
d'habilitation de la femme, du cadre ADATEr et AGIR, du Moser's gender planning
Framework, du « social relations Framework », du gender marker,
etc.
Le Cadre analytique de Harvard est l'un des premiers cadres
conçus pour l'analyse de genre. Il a été
développé par un groupe des chercheurs du Harvard Institute for
International Development aux USA. Le but de ce cadre est d'aider les
planificateurs à concevoir des projets d'égalité de sexe
de manière plus efficaces et d'améliorer la productivité
totale. Il s'agit d'une grille de collecte des données au niveau
micro-économique. Il est constitué de quatre principaux outils:
le profil des activités, le profil d'accès et de contrôle,
l'analyse des facteurs favorisant et l'analyse du cycle du projet. Il faut
cependant noter que cet outil est beaucoup plus
22 INEE (2010)
72
utile dans des projets d'agriculture ou de
développement rural ou pour ceux qui adoptent une approche de
réduction de la pauvreté à travers le renforcement des
moyens de subsistance.
Pour sa part, le cadre ADAPTEr et AGIR est une initiative du
Comité Permanent Inter-organisations (CPI). Il a été
élaboré pour servir de guide aux actions d'intégration des
questions de genre dans les programmes/projets humanitaires. Le cadre ADAPTEr
et AGIR ne considère pas le genre comme un travail séparé
dans les programmes. Il utilise plutôt une `optique de genre' lors de la
planification, de la mise en oeuvre du suivi/évaluation de tout
travail.
Pour ce cadre, adopter une approche genre signifie «
mettre une paire de lunettes. A travers l'un des verres des lunettes, nous
voyons les besoins, la participation et les réalités des filles
et des femmes. A travers l'autre verre, nous voyons les besoins, la
participation et les réalités des garçons et des hommes.
Pour avoir une vue complète de n'importe quelle situation, nous devons
regarder avec les deux yeux»22.
Enfin, le « cadre d'habilitation de la femme » (en
anglais The women's empowerment (Longwe) framework) a été
développé par LONGWE SARA HLUPEKILE, une consultante zambienne en
genre et développement. Son but est d'aider les planificateurs des
questions des femmes à comprendre ce que autonomisation et
égalité de la femme signifient en pratique, et les rendre
à même de mener une analyse critique sur le degré de
promotion de l'autonomisation de la femme dans une intervention de
développement.
Cet outil analyse l'égalité au travers de
chaque domaine et se concentre, par conséquent, sur les secteurs de la
vie sociale pris séparément, et non sur l'égalité
des femmes dans l'ensemble du processus de développement. Pour ce faire,
le cadre définit cinq « niveaux d'égalité» et
trois « degrés d'engagement» à l'égalité
et l'autonomisation de la femme.
C'est ce dernier cadre qui nous semble le mieux adapté
à notre travail. Il mérite donc une présentation
détaillée. Il est composé de deux outils: les cinq niveaux
d'égalité et les trois niveaux de reconnaissance des
problèmes des femmes.
73
i. Premier outil : Les cinq niveaux d'égalité
du cadre d'habilitation des femmes
Dans son cadre d'habilitation de la femme, LONGWE
définit cinq niveaux l'égalité de sexe: il s'agit du
bien-être, de l'accès, de la prise de conscience, de la
participation et du contrôle.
Bien-être : renvoie à la
satisfaction des besoins matériels des femmes en comparaison des hommes.
Il répond à la question suivante: les femmes ont-elles un
égal accès à l'alimentation, aux soins, aux revenus,
etc.?
Accès: réfère à
l'accès des femmes aux facteurs de production sur une base de
l'égalité avec les hommes : accès égal à la
terre, au travail, aux crédits, à la formation, aux services et
bénéfices publics, etc.
La prise de conscience signifie, dans le
cadre analytique de LONGWE, une compréhension consciente de la
différence entre sexe et genre, et une conviction que les rôles de
genre sont culturels et qu'ils peuvent ainsi changer.
Participation : désigne
l'égalité de la participation des femmes à la prise de
décision et à la définition des politiques, à
toutes les étapes du développement du programme et partout
où le programme est réalisé depuis la communauté
jusqu'aux plus hautes instances de direction.
Le contrôle désigne
l'égalité du contrôle des facteurs de production et de la
répartition des bénéfices.
Encadré 3 : Les cinq niveaux d'égalité
de Longwe
Egalité accrue Autonomisation accrue
Contrôle Participation Conscientisation Accès
Bien-être
Source: Candida March, et all, 1999, p 69.
Selon ce modèle, il existe un lien entre le niveau
d'égalité et l'autonomisation de la femme, en ce sens que
l'augmentation du niveau d'égalité entraine l'accroissement de
l'autonomisation de la femme. En outre, les niveaux d'égalité
sont hiérarchiques. Si une
74
intervention de développement se focalise sur un
niveau élevé, il y a une forte probabilité que
l'autonomisation de la femme puisse mieux être accrue par cette
intervention que lorsque l'intervention se focalise sur un niveau bas.
ii. Deuxième outil: Les trois niveaux de
reconnaissances des problèmes des femmes
LONGWE pense que les problèmes des femmes doivent
être placés sur un pied d'égalité avec ceux des
hommes lors de l'identification des objectifs d'un projet. Raison pour laquelle
elle définit trois degrés d'engagement aux problèmes des
femmes : négatif, neutre et positif.
Encadré 4: Les trois degrés d'engagement aux
questions des femmes.
- Niveau négatif : A ce niveau, les objectifs du
projet ne font aucune mention aux problèmes des femmes.
- Niveau neutre : Une intervention est neutre lorsque ces
objectifs reconnaissent les problèmes des femmes mais l'intervention du
projet n'arrive pas à sortir les femmes dans les mauvaises situations
qu'avant le projet.
- Niveau positif : à ce niveau, les objectifs du projet
tiennent compte de façon positive des problèmes des femmes et
cherchent à améliorer la situation des femmes par rapport aux
hommes.
Source: Candida March, et all, 1999, p 70.
Mis ensemble, les deux outils du cadre d'habilitation de la
femme permettent de classifier les interventions de développement selon
le niveau d'égalité qu'elles permettent d'atteindre et le niveau
de reconnaissance et de traitement des problèmes de la femme.
A cet effet, le cadre d'habilitation de la femme fournit une
voie pratique pour l'analyse du niveau d'autonomisation de la femme. Son
application peut permettre de donner un avis sur la prise en compte des besoins
des femmes dans des interventions aussi bien humanitaire que de
développement.
Cependant, l'application de cet outil pourrait se buter
à quelques défis. Le fait, par exemple, que les niveaux
d'égalité soient hiérarchiques, pose un problème. A
titre illustratif, la prise de conscience des problèmes des femmes ne
serait toujours pas précédée de l'accès ou de la
participation. A notre avis, ces niveaux peuvent être atteints de
manière tout à fait indépendante.
75
4.2. Analyse genrée de la stratégie pour
le développement du sous-secteur de l'EPSP
La prise en compte de la dimension genre dans une
stratégie de développement revient à concevoir les actions
de manière à ce qu'elles répondent aux besoins pratiques
et intérêts stratégiques des hommes et des femmes, des
garçons et des filles.
Dans le cadre du présent travail, nous nous limitons
à analyser la prise en compte des besoins et intérêts des
filles par la stratégie de développement du sous-secteur
éducation; étant entendu que l'autonomisation de la femme passe
par la satisfaction de ses besoins pratiques et la prise en compte de ses
intérêts stratégiques.
4.2.1. Analyse du degré de prise en compte des
besoins des femmes dans la stratégie de l'éducation en ROC
Elaborée en 2010, la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP constitue, selon le
ministère de tutelle, la référence pour le
développement de toutes les activités de ce secteur. Il
décrit le contexte dans lequel le système éducatif
congolais évolue, dresse un diagnostic analytique des faiblesses et
opportunités qu'offre l'éducation, et dégage les axes
stratégiques et les priorités de développement du
sous-secteur de l'éducation primaire, secondaire et professionnel.
Cette stratégie se place dans la ligne droite des OMD
2 et 3 et s'engage à la réalisation des objectifs de l'EPT en
RDC.
i. Les axes prioritaires de la stratégie
La stratégie pour le développement du
sous-secteur de l'EPSP vise le développement de l'accès à
un enseignement de qualité et équitable. Elle prévoit
ainsi trois axes stratégiques suivants:
- Objectif stratégique 1: Accroitre l'accès,
l'équité et la rétention; à travers, entre autre
action, la réduction des disparités géographiques et les
inégalités entre les sexes.
- Objectif stratégique 2 : Améliorer la
qualité et l'efficacité de l'enseignement; et - Objectif
stratégique 3 : Renforcer la gouvernance.
76
ii. Actions et résultats attendus de la
stratégie
Tableau 11: Les axes stratégiques de la Stratégie
de développement du sous-secteur de l'éducation.
Objectifs stratégiques
|
Programmes
|
Indicateurs de performance
|
Accroitre l'accès, l'accessibilité,
l'équité et la rétention
|
Appui aux communautés locales pour le
développement de l'éducation préscolaire
|
· Le TBS passera de 3% à 15 %23
· L'équivalent de 3% de la masse salariale du
personnel enseignant des écoles maternelles publiques sera investi dans
des activités de plaidoyer et de sensibilisation
|
|
· Le TBS passera de 82% à 118 %
· L'indice de parité filles-garçons
passera de 0,84 à 1.
· Le taux brut d'achèvement passera de 43 %
à 83%
· La suppression des menaces aux frais scolaires sera
effective en 2015-2016.
|
Accroitre l'accès, l'accessibilité, l'équité
et la rétention
|
Renforcement des capacités d'accueil
du système.
|
· Mise en place par le gouvernement
d'une stratégie de construction d'infrastructures scolaires
· Réhabilitation de 3% de salles de
classe dans le primaire et le secondaire par an
· Le pourcentage de classes à double
vacation passera de 0,1%à 5%
|
Améliorer la qualité et la pertinence
|
Amélioration de l'efficience interne
|
· Le taux de passage dans le primaire passera de 78 %
à 88 %
· Le taux de redoublement dans le primaire passera de
15% à 7%
· Le taux d'abandon dans le primaire passera de 8%
à 5%
· Le taux moyen de survie dans le secondaire passera
de 75% à 83 %
· Le taux de redoublement dans le secondaire passera
de 16 % à 10 %.
|
|
· Mise en place par le gouvernement d'une
stratégie de valorisation de la
fonction enseignante (primaire et secondaire)
· L'équivalent de 5% par an de la
masse salariale des enseignants sera investi dans la revalorisation de la
fonction enseignante (primaire et secondaire)
· D'ici 2015, mécanisation de 100%
des enseignants du primaire et du secondaire
· D'ici 2012, uniformisation des zones salariales
(sur base des salaires payés à Kinshasa)
|
|
23Il s'agit des indicateurs des années
scolaires 2007-2008 et 2015-2016.
77
Tableau 11 (suite):
Objectifs stratégiques
|
Programmes
|
Indicateurs de performance
|
Améliorer la qualité et la pertinence
|
Fourniture de supports pédagogiques
|
· D'ici 2010-2011, chaque élève du
primaire sera doté de 2/3 manuels scolaires d'une durée de vie
de 4 ans;
· D'ici 2010-2011, chaque enseignant du primaire sera
doté de guides pédagogiques d'une durée de vie de 5
ans;
|
|
La direction des programmes scolaires et matériels
didactiques sera renforcée et l'équivalent de 1% des
dépenses courants totales de l'EPSP sera investi dans
l'actualisation et l'optimisation des
programmes d'études.
|
|
· Réhabilitation de 3% de salles de classe
en secondaire technique et professionnel par an
· Construction et équipement de 120 salles
de classe spécialisées en 2010-2016.
· L'équivalent de 4% par an de la masse
salariale des enseignants du secondaire sera investi dans la formation
continue.
|
Renforcer la gouvernance
|
Accompagnem ent et mise en oeuvre de a décentralisatio n
pour une gestion efficace.
|
· Dès 2010-2011, transfert annuel par
le gouvernement central des frais de fonctionnement aux bureaux
gestionnaires
· Dès 2010-2011, transfert annuel par le
gouvernement central aux écoles primaires publiques
d'une allocation financière destine à leur fonctionnement
· Production annuelle des Annuaires Statistiques
· Le budget de réforme et de fonctionnement du
SECOPE passera de 0,1% à 0,5 % par an
· Mise en place du dispositif de coordination, de suivi
et d'évaluation de la mise en oeuvre de la stratégie
|
|
· Les dépenses de planification et de gestion
du sous-secteur passeront de 0,1 % à 1% par an.
|
|
Source : Document de la Stratégie de développement
du sous-secteur de l'EPSP.
78
iii. Analyse du niveau d'égalité de sexe dans
l'éducation en RDC
Après étude et analyse des structures
éducatives congolaises, nous avons résolu classer la
stratégie de développement du sous-secteur de l'ESPS au niveau de
l'accès.
En effet, l'analyse des données de l'annuaire
statistique de l'EPSP 20082009 nous a conduits à la conclusion qu'il
n'existe pas une différence significative entre garçons et filles
en termes d'entrée à l'école. A 6 ans, un garçon
sur cinq (20,9%) est déjà entré à l'école
contre une fille sur cinq (20,3%), à 9 ans, 73,1% des garçons et
69,8 % des filles. Et donc, l'accès à l'éducation est
presque égalitaire entre les garçons et les filles.
Par contre, la stratégie n'atteint pas le niveau de
prise de conscience car les opérateurs du secteur continu à avoir
une certaine inconscience sur la différence de traitement entre les
sexes et une faible conviction que les rôles de genre peuvent changer.
Les préjugés issus de ces lacunes sont transmis des enseignants
aux élèves, des générations en
générations. Car, possédant une relation
privilégiée avec les élèves, les enseignant(e)s
façonnent en grande partie la représentation que les filles et
les garçons se font des rapports femmes-hommes.
Pour soutenir nos propos, nous avons mené une
enquête CAP (connaissances, attitudes et pratiques) à travers un
sondage auprès de 152 enseignants sélectionnés au hasard
au sein des écoles primaires et secondaires dans les provinces
éducationnelles du Haut Uélé et du Bas
Uélé.
Ces enquêtes ont révélé les
résultats suivants :
Tableau 12: Présentation des enquêtés par
Province, sexe et religion
Province
|
Femmes
|
Hommes
|
|
|
Protest
|
Kimbang
uiste
|
Total
|
Catho
|
Protes
|
Réveil
|
Rel Sans
|
Total
|
Total général
|
Bas-Uélé
|
14
|
8
|
4
|
26
|
26
|
12
|
4
|
1
|
43
|
69
|
Haut-Uéle
|
24
|
9
|
0
|
33
|
33
|
14
|
2
|
1
|
50
|
83
|
Total
|
38
|
17
|
4
|
59
|
59
|
26
|
6
|
2
|
93
|
152
|
|
61,19%
|
100%
|
|
Source : Nos enquêtes
Compte tenu de la faible représentation des
enseignantes dans le corps enseignant et du besoin d'atteindre le maximum des
enseignants, nous n'avons pas retenu la parité femme/homme comme
critère de sélection des répondants. En plus, les
catholiques constituant la grande majorité des enseignants de la zone,
nos
79
résultats ne sont pas analysés ni
interprétés sur base des religions des enquêtés.
Ainsi, nos données seront essentiellement analysées selon le sexe
des répondants et les provinces dans lesquelles ils vivent.
Notons que les enseignants sont parmi les catégories
sociales stables, qui se déplacent rarement de leurs villages. Selon les
informations brutes recueillies dans les deux Uélé, lors des
vacances la grande majorité des enseignants s'occupent de leurs champs
et font très peu de voyage en dehors de leurs territoires. Le risque
d'une influence extérieure dans la réponse à nos questions
est donc amoindri.
? Est-ce que les filles sont naturellement moins
intelligentes que les garçons? Tableau 13: Perception sur la
différence de l'intelligence entre fille et garçons
Provinces
|
Femmes
|
Hommes
|
Total
|
|
Vrai
|
Total
|
Faux
|
Vrai
|
Total
|
Faux
|
Vrai
|
Total
|
Bas-Uélé
|
23
|
3
|
26
|
36
|
7
|
43
|
59
|
10
|
69
|
Haut-Uélé
|
27
|
6
|
33
|
39
|
11
|
50
|
66
|
17
|
83
|
Total
|
50
|
9
|
59
|
75
|
18
|
93
|
125
|
27
|
152
|
Pourcentage
|
85%
|
15%
|
100%
|
81%
|
19%
|
100%
|
82%
|
18%
|
100%
|
|
Source : nos enquêtes
Au regard de nos enquêtes, 18% des enseignants
interrogés pensent que naturellement les filles sont moins intelligentes
que les garçons. L'écart entre la perception des enseignantes
(15%) et enseignants (19%) n'est pas grand.
Cette perception influencerait l'orientation des enfants en
termes de choix de filière. Déjà 12,5% de nos
enquêtés admettent que les sections techniques sont
appropriées aux garçons étant donné que les filles
sont naturellement faibles en ces matières.
? La lutte pour l'égalité homme et femme
est-elle importante?
A l'issu de cette enquête, nous avons découvert
que 36,8% des enquêtés pensent que dans les Uélé les
femmes ne sont pas discriminées par rapport aux hommes. Ils admettent
donc que l'égalité est acquise. En fait, parmi les femmes
interrogées, 33,9 % pensent que les femmes ne sont pas
discriminées (contre 38,7% des hommes), et les proportions sont de 39%
et 34 % respectivement pour le Bas et le Haut Uélé. Ensuite, 40%
de nos enquêtés pensent que la lutte pour l'égalité
de sexe est une imposition de l'occident et qu'il n'est pas une
émanation congolaise. Les enseignants ne perçoivent même
pas la faible proportion des femmes dans les structures éducatives
formelles, ni la différence entre filles et garçons dans le
parcours scolaire.
Le second outil de Longwe nous permet d'analyser le
degré d'engagement de la politique éducative congolaise sur les
problèmes des femmes et des filles.
80
Cette faible prise de conscience sur la discrimination de la
femme a un effet néfaste sur la nécessité de la lutte
contre les discriminations à l'égard de la femme et la
possibilité d'une société égalitaire.
Graphique 9 : Perception négative sur l'éducation
d'une fille
Il n'est pas important de dépenser
beaucoup
d'argent dans les études d'une fille
93,3 87
6,7 13
Enseignantes Enseignants
Oui
Non
Source : Nos enquêtes
Perception sur l'éducation des filles.
7 enseignantes sur 100 et 13 enseignants sur 100 admettent
que, comme une fille devra se marier et aller dans une tierce famille, il ne
faut pas dépenser autant d'argent dans ses études. C'est ainsi
que 5,2% des enquêtés pensent que la place de la femme est
à la cuisine et non au bureau. Nous avons découvert que cette
dernière idée est acceptée par plus des femmes (8,4 % des
femmes interrogées) que les hommes (3,2% des hommes interrogés).
Une telle attitude constitue un frein à la motivation des filles,
surtout lorsqu'elle est acceptée par des personnes censées
transmettre les valeurs d'égalité.
De manière générale, notre enquête
a démontré que le corps éducatif est mieux
sensibilisé aux relations entre les sexes. Ceci constitue une force sur
laquelle les programmes de lutte contre les iniquités peuvent
s'appuyer.
iv. Le degré d'engagement de la stratégie
quant aux intérêts spécifiques de la
femme
81
Pour ce faire, nous avons analysé la stratégie
pour le développement du sous-secteur de l'EPSP, 2010/2011- 2015/2016,
son plan d'actions prioritaires (2011-2012) et ainsi que le Plan
Intérimaire de l'Education 2012-2014. Ces documents constituent le coeur
de la politique congolaise en matière de l'éducation.
Après analyse de cette stratégie, il y a lieu
de constater que le gouvernement congolais manifeste de l'intérêt
à promouvoir l'équité dans ses programmes. Cet engagement
est manifeste dans les préambules des plans précités.
Par contre, cet intérêt n'est pas encore assorti
des actions pragmatiques. Certes, la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP retient l'accès,
l'accessibilité, l'équité et la rétention parmi ses
objectifs. Mais, les programmes prévus pour l'atteinte de cet objectif
ne tournent qu'autour de la gratuité de l'enseignement primaire et la
construction des salles de classe. Aucun programme ni mesure touchant la
rétention à l'école secondaire et l'équité
n'y ressort. Il en résulte l'absence de la prévision
budgétaire pour l'objectif de l'équité.
Quant au Plan Intérimaire de l'Education, à
travers programme d'Optimisation et actualisation d'étude, le
ministère s'est engagé à veiller à
l'intégration systématique de programmes thématiques
transversaux, tel que le genre, dans le programme national. Cependant, cette
nécessité ne ressort pas dans le plan d'actions prioritaires.
Par conséquent, nous référant au cadre
d'habilitation de la femme, nous concluons que la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP intervient de manière
neutre à l'égard de l'égalité de sexe.
En fusionnant les deux conclusions, nous retenons que la
stratégie de développement du sous-secteur de l'EPSP intervient
de manière neutre face à l'égalité de la femme et
qu'elle ne se limite qu'à favoriser l'accès des enfants à
l'enseignement. Ce faible niveau d'engagement aux problèmes des filles
ne peut pas conduire à l'autonomisation de la femme. C'est pourquoi il
s'avère important d'apporter un ajustement à la stratégie
de développement pour le sous-secteur de l'EPSP.
82
4.2.2. Proposition de redressement pour une meilleure de
prise en compte du genre dans les stratégies de l'éducation en
RDC
? Rappel de la situation de la fille dans
l'éducation en RDC
Avant de proposer un plan de redressement de la
stratégie pour le développement du sous-secteur de l'EPSP, il
importe de fournir un rappel sur la situation de la jeune fille dans
l'éducation.
En fait, cette situation peut être résumée
par les faits suivants :
- Il existe un fossé entre le taux brut de
scolarisation des filles (31,3%) et celui des garçons
(50,3%)24 au niveau secondaire;
- Les enfants filles courent plus des risques d'abandonner
les études que les garçons. A 2014, 62,2% des filles ont
achevé le cycle primaire (contre 76% des garçons), et seulement
20,6 % ont achevé le cycle secondaire (contre 37,3% des
garçons)25.
- Les filles et les femmes sont faiblement
représentées dans les structures éducatives formelles.
Leur proportion décroit avec augmentation du niveau de
l'éducation.
- Les manuels scolaires contiennent des
stéréotypes sur les rôles respectifs des garçons et
des filles et sur la place que chacun est appelé à occuper dans
la société.
- La stratégie pour le développement du
sous-secteur de l'EPSP demeure aveugle aux problèmes
susmentionnés. Elle se focalise sur l'accès des enfants à
l'éducation et ne traite que très faiblement les défis de
rétention, d'achèvement et de la présence des
stéréotypes de genre.
? Vision de la RDC en matière d'autonomisation de
la femme
Pour rappel, le gouvernement de la RDC veut bâtir une
société plus juste où les comportements, les aspirations
et les différents besoins de l'homme et de la femme sont pris en
compte.
Cette engagement est clairement détaillé dans
la loi numéro 15/013 du 1er aout 2015 portant
modalités d'application des droits de la femme et de la
parité.
24 Cfr Annuaire statistiques de
l'EPSP 2013/2014
25 Idem
83
> Objectifs nécessaires pour parvenir à
l'équité
Pour atteindre cette vision, nous estimons qu'il soit utile
d'ajouter, au plan d'actions prioritaires de la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP, les objectifs suivants:
Tableau 14: Plan de redressement des axes stratégiques de
la Stratégie de développement du sous-secteur de l'EPSP.
Objectifs stratégiques
|
Programmes
|
Indicateurs de performance
|
|
Lutte contre les
|
· Le taux d'achèvement au secondaire
|
|
abandons scolaires liés
|
passe de 20,6% à 40 % pour les
|
|
aux grosses
|
filles.
|
|
précoces, mariages
|
· Le taux d'abandon scolaire lies aux
|
|
précoces et harcèlement
|
grossesses/mariage précoces est
|
|
sexuels en milieu
scolaire.
|
réduit de 27 % à moins de 5%.
|
|
|
· Le pourcentage des filles chefs de classes passe de 32
% à 50 % à tous
|
Promouvoir
|
|
les niveaux de l'enseignement;
|
l'équité entre filles et garçons dans
l'éducation.
|
|
· Le pourcentage des enseignantes du
passe de 10,4 % à 30 % au
|
|
Renforcement du
|
secondaire;
|
|
leadership féminin dans
|
· Le pourcentage des femmes chefs
|
|
le système éducatif
|
d'Etablissements scolaires passe de
|
|
congolais.
|
6,8% à 30 %.
|
|
|
· Le pourcentage des femmes inspectrices passe de 8,4%
à 30 %
|
|
|
· 100 % des chefs d'Etablissement scolaires
bénéficient d'un recyclage sur la direction des écoles.
|
|
84
Tableau 14 (suite):
Objectifs stratégiques
|
Programmes
|
Indicateurs de performance
|
|
|
? Les manuels scolaires utilisés
sur l'ensemble du territoire
national sont exempts des clichés et
stéréotypes sexistes et
contiennent les personnages
|
|
Lutte contre les
|
reparti équitablement en nombre
|
Promouvoir
|
préjugés et clichés
|
et en rôles pour les femmes et
|
l'équité entre filles et garçons dans
l'éducation.
|
sexistes dans les
structures éducatives et
|
les hommes.
? Le module sur l'analyse des
|
|
les manuels scolaires.
|
stéréotypes sexistes est ajouté dans le
programme de formation
des enseignants et rendu obligatoire pour la formation
continue.
|
Source du tableau : Nous-même
85
CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE
La première partie de ce mémoire a
démontré que les axes prioritaires retenus par les politiques
publiques en matière de l'éducation n'étaient pas
suffisants pour favoriser l'équité dans l'éducation. A
l'issu de ce constat, la seconde partie du mémoire a cherché
à analyser le niveau à travers lequel la Stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP traite les questions des
femmes.
En effet, concernant l'autonomisation de la femme, nous avons
remarqué que cette notion va au-delà de la dimension
économique. Elle prend en compte les composantes cognitives,
psychologiques et politique, et réfère à un processus qui
permet à la femme de renforcer son pouvoir de décision.
Ce processus, pour être durable et soutenable, doit
s'appuyer sur l'éducation. Or, à travers les analyses, nous avons
découvert que l'éducation, telle qu'organisée en RDC, ne
soutient pas véritablement l'autonomisation de la femme.
Car, de l'analyse des efforts engagés par le
gouvernement dans ce secteur et des indicateurs de l'éducation ressort
la conclusion que la Stratégie pour le développement du
sous-secteur de l'EPSP ne se focalise que sur l'accès des filles et des
garçons à l'école. Le niveau de conscience sur les
problèmes des femmes reste faible. Il en est de même pour la
participation dans la conception, la mise en oeuvre et le contrôle de la
politique éducative. Cette conclusion permet ainsi de confirmer la
seconde hypothèse du présent travail, selon lequel, la
stratégie précitée traite les problèmes des femmes
de manière neutre
86
RECOMMANDATIONS
Pour lutter efficacement contre les iniquités et
permettre à l'éducation d'être un moyen pour
l'autonomisation de la femme, nous estimons que le gouvernement congolais
devrait :
? Renforcer la démocratisation de l'enseignement en
faisant respecter la loi et luttant contre toute forme de discrimination dans
tous les établissements scolaires (par exemple interdire formellement
l'exclusion des filles qui sont rendues grosses et leur donner la
possibilité de revenir à l'école après
l'accouchement).
? Adopter une politique temporaire de discrimination positive
en faveur des filles des milieux ruraux. Il s'agirait par exemple de l'octroi
des bourses d'étude à toutes les étudiantes inscrites dans
des filières techniques à partir de la 4ème
année secondaire et au supérieur.
Notre travail a démontré que les filles des
milieux ruraux sont doublement victimes de discrimination indirecte. Certaines
pratiques locales freinent l'éducation des filles et les ressources
matérielles et humaines sont inégalement réparties entre
les milieux ruraux et urbains. Ces inégalités justifient le
recours à une discrimination en faveur des filles des milieux ruraux tel
qu'établi par la Convention sur l'élimination de toutes les
formes de discrimination à l'égard de la femme. Ceci permettra de
réduire l'écart entre filles et garçons, et filles des
milieux ruraux et celles des milieux urbains en termes de rétention
à l'école et de l'achèvement des études.
? Mettre en place une politique de lutte contre les abus et
les harcèlements sexuels commis sur les élèves, peu
importe leurs âges ou le statut de l'auteur.
Le harcèlement sexuel, auquel des milliers des filles
font face à l'école, ne conduit pas uniquement à la
déperdition scolaire. Il perpétue également les
préjugés sur la prétendue incapacité et les
idées de la soumission féminine. En fin, il réduit, chez
les filles, l'estime de soi et la confiance à leurs propres
capacités. Pour ce faire, le pouvoir public doit édicter des
mesures fortes et claires contre tout harcèlement sexuel sur les
élèves et renforcer la célérité des actions
disciplinaires et judiciaires à l'encontre des auteurs de ces
violations.
? Rendre obligatoire la formation continue de tous les
enseignants sur l'analyse de genre et insérer, dans les programmes de
formations de ceux-ci, le module sur le genre et l'éducation.
87
Il a été constaté que la majorité
des enseignants sont moins conscientisés sur les relations
inégalitaires entre hommes et femmes et leurs effets sur le
développement du pays. Rare sont ceux qui sont conscients du fait qu'ils
transmettent une culture d'inégalité aux élèves.
D'où la nécessité de renforcer leur connaissance
théoriques et compétence pratique sur le genre.
? Initier une enquête/analyse sur le types de formations
techniques et professionnels qui attirent les filles, d'analyser leurs
respectives propensions à contribuer à la
réintégration économique, et, en fin, d'évaluer le
positionnement géographique de ces filières afin de savoir si les
enfants des milieux ruraux ont les mêmes chances d'accès aux
formations professionnelles et techniques que ceux des centres urbains. Cela
permettra de réorienter le positionnement des écoles et des
sections compte tenu des gaps, des ressources et des besoins locaux.
88
CONCLUSION GENERALE
89
Dans le contexte de la RDC, comment faire à ce que
l'éducation conduise à l'autonomisation de la femme?
Tel a été le principal questionnement ayant
guidé cette recherche. La question est partie du constat que les efforts
tant déployés par le gouvernement congolais n'ont pas su
permettre l'accroissement de l'équité dans l'éducation. Et
pourtant, c'est cette équité qui est la base même de
l'autonomisation.
Ainsi, pour mieux traiter ce problème, la question
principale a été décomposée en deux questions
spécifiques, à savoir :
? Prenant en compte le contexte particulier de la RDC, les
objectifs prioritaires retenus par les politiques publiques en matière
de l'éducation sont-ils les suffisants pour parvenir à
l'équité dans ce secteur ?
? De quelle manière la stratégie de
développement du sous-secteur de l'EPSP prend-telle en compte la
dimension genre ?
Pour répondre à ces questions, nous avons
structuré notre travail en deux parties. Dans la première, nous
avons analysé la cohérence interne et externe de la
stratégie pour le développement du sous-secteur de
l'éducation par rapport à la situation de la femme dans ce
domaine. Et dans la seconde, nous nous sommes attelés à
évaluer le degré de prise en compte des problèmes de
l'égalité de sexe par cette stratégie.
A cet effet, il sied tout premièrement de rappeler que
les plans d'actions de la Stratégie pour le développement du
sous-secteur de l'EPSP accordent la priorité à la gratuité
de l'enseignement primaire et à la construction des salles de classe.
Or, à travers l'analyse de la situation, nous sommes parvenus à
la conclusion que le problème pour l'éducation des jeunes filles
en RDC se pose beaucoup plus en termes du faible taux de scolarisation au
niveau secondaire, de l'écart dans le taux d'achèvement (en
comparaison avec celui des garçons) et de l'existence d'importants
stéréotypes et clichés sexistes défavorables aux
filles.
Certes, au-delà des inégalités dans les
indicateurs de la scolarisation, qui sont très facilement palpables, il
existe, dans ce système, d'énormes stéréotypes
sexistes. Ceux-ci se présentent sous forme de la hiérarchie
administrative des hommes sur les femmes à tous les niveaux
(comité des élèves, enseignants, inspection), de la faible
représentation des femmes, des clichés sexistes dans les manuels
scolaires, et de la perception fataliste et conservatiste des enseignants sur
l'égalité de sexe. De même, certains textes contenus dans
les manuels scolaires traduisent clairement une
90
hiérarchie. Par conséquent, la structure
éducative congolaise reproduit le schéma familial dans lequel le
pouvoir de décision est réservé à l'homme. Elle
représente, aux yeux des élèves, la répartition des
pouvoirs entre hommes et femmes dans la société.
Ainsi, après l'analyse des résultats de ce
travail, notre première hypothèse a été
confirmée. En effet, l'équité dans l'éducation ne
passe pas véritablement par la gratuité de l'enseignement
primaire et la construction des salles, bien que ces mesures soient importantes
pour la promotion de l'éducation pour tous. Nous avons découvert
que l'égalité de fait entre le sexe dans l'éducation fait
plutôt appel aux mesures de discrimination positive en faveur des filles
et à la lutte contre les stéréotypes sexistes. Ces deux
considérations doivent ainsi faire l'objet des projets
spécifiques assortis des prévisions budgétaires
conséquentes.
En second lieu, nous avons analysé le degré de
prise en compte des problèmes des femmes dans la stratégie de
développement du sous-secteur éducation. Pour y parvenir, nous
avons décidé d'utiliser le Cadre d'Habilitation de la Femme
développé par Sara Longwe.
Cette analyse nous a permis de démontrer que la
stratégie de développement du sous-secteur de l'EPSP traite de
manière neutre les questions d'égalité de sexe.
C'est-à-dire que les objectifs de cette politique reconnaissent les
problèmes que rencontrent les jeunes filles dans leurs processus
d'éducation, mais qu'aucune activité spécifique n'est
développée pour y faire face. En effet, comme déjà
mentionné, cette politique fonde sa priorité sur la
gratuité de l'enseignement primaire et la
construction/réhabilitation des salles de classes. Or, si ces deux
priorités peuvent permettre l'accès et l'accessibilité des
élèves à l'éducation, elles ne peuvent que
partiellement favoriser la rétention des élèves du
primaire. Quant à l'équité, les deux priorités ne
peuvent pas y contribuer. La stratégie reste totalement distante face
à ce problème.
Cette conclusion nous amène bien évidement
à confirmer la seconde hypothèse de notre recherche où
nous pensions que les axes principaux de la stratégie de l'EPSP ne
s'engagent que de manière neutre dans la résolution des
problèmes et défis rencontrés par les filles dans leur
scolarisation.
Il faut cependant préciser que les résultats
obtenus par cette recherche sont propres au milieu rural. Car cette recherche a
été menée dans deux provinces rurales (Haut
Uélé et Bas Uélé) et la situation de la femme
diffère du milieu rural au milieu urbain.
91
Ainsi, en réponse à notre question principale,
nous aboutissons à l'idée maitresse de ce mémoire que,
pour le secteur de l'éducation, l'autonomisation de la femme passe par
l'accroissement de l'équité et la prise en compte effective de la
dimension genre dans la planification de l'éducation nationale. Nous
admettons, à travers ce travail, que l'égalité de sexe
dans l'éducation, gage de l'autonomisation de la femme, ne se limite pas
uniquement à l'accès à l'enseignement. Elle exige une
équité entre filles et garçons dans la
représentation, la réussite scolaire, le maintien, la
répartition des tâches, etc.
Pour y parvenir, la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP requiert un ajustement afin de
permettre au pouvoir public d'être plus attentif et plus sensible aux
problèmes spécifiques de la jeune fille. Cette prise de
conscience doit être accompagnée de l'adoption des actions
positives pour favoriser l'essor d'un environnement éducatif juste, dans
lequel filles et garçons bénéficient des mêmes
capacités et des mêmes opportunités scolaires.
La récurrence des guerres ou les crises
économiques ne doivent pas constituer des disculpations à la
fourniture de l'éducation de qualité pour tous. La qualité
de l'enseignement n'a pas de prix. Elle doit être une priorité en
temps de paix tout comme en temps de guerre. Car il s'agit de préparer
une génération, de lui léguer une histoire, des valeurs et
des responsabilités. Il n'y a pas de précieux héritage
qu'une génération puisse léguer à une autre que
l'éducation.
Somme toutes, nous ne pensons pas avoir analysé tous
les paramètres de ce sujet, nous restons néanmoins convaincus que
notre travail apporte une modeste contribution à toutes les recherches
antérieures. Il constitue également une des voies à qui
veut s'engager sur la route de l'autonomisation de la femme. En fin, l'analyse
approfondie de ce travail pourrait également soulever la
nécessité de l'harmonisation du système éducatif au
sein de la sous-région de l'Afrique centrale pour le rendre beaucoup
plus inclusif dans tous les Etats.
92
LES REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
93
Les Ouvrages
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faits et les mythes. Paris, France Loisirs.
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early childhood work in Israel. Hague, Bernard Van Leer Foundation.
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5. SEN A. (1995), Development as freedom; New York,
the New York Times.
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Articles
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justice distributive post-rawlsiennes. Une revue de la littérature,
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11. MICHAELA M. (2010), Parvenir à
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14. TOUPIN L. (1998), Les courants de la pensée
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94
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Défendue à l'Université de Kisangani, inédit.
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Rapports et Autres publications
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Guide to Gender-Analysis Frameworks, Published by Oxfam GB.
20. Comité Directeur pour l'égalité
entre les femmes et les hommes (CDEG) du Conseil de l'Europe(2011) ; Etude
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21. Gouvernement du Québec (2010), Entre le rose
et le bleu : stéréotypés sexuels et construction sociale
du féminin et du masculin, Etude do Conseil du statut de la
femme, Gouvernement du Québec ; Bibliothèque et Archives
nationales du Québec.
22. Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droit de l'Homme
(2012), Le Dispositif conventionnel des Nations Unies relatif aux droits de
l'Homme, Fiche d'information n 30, New York et Genève.
23. Haut Conseil à l'égalité entre les
femmes et les hommes de la République de France(2015), Guide pratique
pour une communication publique sans stéréotype de sexe,
novembre.
24. LESEUR A. (2005), Les Théories de la justice,
CECO-293. Cahier 2005-009.
25. INEE (2010), Egalité des genres dans
l'éducation et par l'éducation. Guide de poche de l'INEE
sur le genre. INEE, Genève.
26. ONU (2000), Publication du département de
l'information, DPI/2035/M - 0039711.
95
27. RDC (2013), Rapport de l'enquête Nationale sur les
enfants et adolescents en dehors de l'école, Kinshasa.
28. RDC (2015), Rapport OMD 2000-2015. Evaluation des
progrès accomplis par la République Démocratique du Congo
dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le
développement.
29. RILA M. (2008), L'approche « Genre » des
projets de développement constitue-t-elle une atteinte
culturelle?
30. STROMQUIST N. (1993), Fondements théoriques et
pratiques de l'autonomisation, in Rapport du séminaire International
tenu à l'IUE, Hambourg, du 27 janvier au 2 février 1993.
31. UNESCO(2011), le Rôle central de
l'éducation dans les objectifs du millénaire pour le
développement, UNESCO.
Sites Web
32. DUQUET F. (2012), « Les enfants reçoivent
dès leur plus jeunes âge des représentations
stéréotypées du rôle des femmes et des hommes
»,,
http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/344146/reseau-scolaire-il-faut-oser-enseigner-l-egalite;
consulté le 7 mars 2015
33. Carte de la RDC :
https://www.google.cd/search?q=site+web+epsp+rdc&biw=1680&bih=939&source=ln
ms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwjZwPuCwbLQAhUFtxoKHZkOAfYQ
AUIBygC#tbm=i
sch&q=nouvelles+provinces+de+la+rdc&imgrc=lQot3Erd-yEIKM%3A;
consulté le 19 novembre 2016.
96
TABLE DE MATIERE
CIGLES ET ABREVIATIONS v
RESUME vi
INTRODUCTION GENERALE 3
1. Contexte et justification de l'étude 4
2. Problématique 8
3. Objectifs de l'étude 9
Objectif Général 9
Objectifs spécifiques 10
4. Hypothèse de la recherche 10
5. Intérêts de l'étude 10
6. Méthodologie de l'étude 11
7. Revue de la littérature 12
8. Plan de l'étude 17
Première Partie : 18
PROBLEMATIQUE DE L'EQUITE DANS L'EDUCATION EN RDC 18
INTRODUCTION DE LA PREMIERE PARTIE 19
PREMIER CHAPITRE 20
L'EQUITE AU REGARD DES THEORIES DE LA JUSTICE 20
1.1 Egalitarisme ou Equité 20
1.2. Problématique de la subordination de la femme
27
1.2.1 Origine de l'assujettissement de la femme 27
1.2.2 Part de la femme dans le maintien de son
assujettissement 31
DEUXIEME CHAPITRE 34
ETAT DE LIEU DE L'INIQUITE ENTRE LES SEXE DANS L'EDUCATION EN
RDC 34
2.1. Examen de l'iniquité entre les sexes dans
l'éducation en RDC 35
2.1.1. Inégalités dans la rétention
à l'école 35
2.1.2. Examen du leadership féminin dans les structures
éducatives 38
2.1.3. Regards sur les stéréotypes et
clichés sexistes dans l'éducation 43
2.2. Les causes de la persistance des iniquités dans
l'éducation en RDC. 48
2.2.1. Les causes conjoncturelles des inégalités
dans l'éducation 48
2.2.2. Les causes structurelles des inégalités
dans l'éducation 51
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 53
SECONDE PARTIE : 55
97
L'EDUCATION EN RDC ET LA SENSIBILITE AU GENRE 55
INTRODUCTION DE LA SECONDE PARTIE 56
TROISIEME CHAPITRE 57
GENERALITES SUR L'AUTONOMISATION DE LA FEMME 57
3.1. Conceptualisation de l'autonomisation de la femme 57
3.2. De l'engagement mondial en faveur de l'autonomisation de
la femme et de l'éducation pour
tous. 59
3.2.1. Engagement international en faveur de l'autonomisation
de la femme 59
3.2.2. Engagement de la RDC en faveur de l'autonomisation de
la femme 66
QUATRIEME CHAPITRE 69
DEGRE DE PRISE EN COMPTE DE LA DIMENSION GENRE PAR LA
STRATEGIE DE L'EDUCATION EN
RDC 69
4.1. Notion et Outils de la prise en compte de la dimension
genre 69
4.1.1. Quid de la prise en compte de la dimension genre 69
4.1.2. Les outils d'intégration de la dimension genre
dans les politiques de développement. 71
4.2. Analyse genrée de la stratégie pour le
développement du sous-secteur de l'EPSP 75
4.2.1. Analyse du degré de prise en compte des besoins
des femmes dans la stratégie de
l'éducation en RDC 75
4.2.2. Proposition de redressement pour une meilleure de prise
en compte du genre dans les
stratégies de l'éducation en RDC 82
Source du tableau : Nous-même 84
CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE 85
RECOMMANDATIONS 86
CONCLUSION GENERALE 88
Les Références Bibliographiques
92
TABLE DE LA MATIERE 96
LES ANNEXES 98
Annexe 1 : Lettre d'introduction pour le stage 99
Annexe 2 : Organisation administrative et scolaire du
Ministère de l'Enseignement Primaire,
Secondaire et Professionnel en RDC. 100
Organisation politico administrative. 100
Structure de l'Enseignement. 100
98
LES ANNEXES
99
Annexe 1 : Lettre d'introduction pour le stage
100
Annexe 2 : Organisation administrative et scolaire
du Ministère de
l'Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel
en RDC.
Organisation politico administrative.
Au niveau central, le Ministère de l'Enseignement
Primaire, Secondaire et Professionnel est dirigé par un Ministre
secondé par un Vice-Ministre chargé principalement de
l'Enseignement Professionnel. L'Administration centrale est dirigée par
un Secrétaire Général secondé par les Directeurs
Chefs de Service. Ces derniers sont assistés des Chefs de Division et
des Chefs de Bureau.
Il faut également signaler que le Ministère de
l'EPSP dispose d'un service technique chargé de l'inspection. Au niveau
national, ce service est dirigé par un inspecteur général
secondé par des inspecteurs généraux adjoints.
Au niveau provincial, le Ministère de l'Enseignement
Primaire, Secondaire et Professionnel est composé des divisions
provinciales et des sous-divisions qui sont respectivement dirigées par
des chefs de division et des sous-divisions provinciales. L'inspection
provinciale de l'enseignement est également représentée
par les inspecteurs principaux provinciaux au niveau des divisions provinciales
et des inspecteurs chefs de pools au niveau des sous- divisions.
Le Ministère compte à ce jour 30 divisions
provinciales et 237 sous-divisions.
L'Etat ayant confié la gestion de certaines
écoles aux confessions religieuses, ces dernières ont leur propre
organisation administrative aux différents niveaux. Ainsi, au niveau
national, la coordination nationale est dirigée par un coordinateur
national, au niveau provincial la coordination provinciale a, à sa
tête, un coordinateur provincial ; à l'échelon
inférieur, les sous-coordinations sont dirigées par des
sous-coordinateurs.
Structure de l'Enseignement.
La structure de l'Enseignement National, secteur de
l'Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel comprend trois niveaux :
Maternel, Primaire et Secondaire.
101
? Le niveau maternel ou pré primaire est organisé
en un cycle de trois ans. Il n'est pas obligatoire. Il est surtout
organisé en grande partie par des privés et accueille les enfants
âgés de 3 à 5 ans
? Le niveau primaire est organisé en cycle de 6 ans
repartis en trois degrés : élémentaire, moyen et terminal.
Sont admis en 1ère année primaire, les enfants qui ont
atteint l'âge de six ans révolus.
? Niveau secondaire comprend 4 cycles :
- Le cycle de Spécialisation Professionnelle (CSP) d'une
durée d'un an ou deux ans,
- Le cycle d'Arts et Métiers d'une durée de 1
à 3 ans,
- Le cycle Professionnel d'une durée de 4 à 5
ans,
- Le cycle long (humanités) d'une durée de 6 ans et
qui ouvre la porte aux études supérieures et universitaires.
? Le CSP et le cycle d'arts et métiers organisent
plusieurs options
essentiellement de type professionnel.
? Le cycle long ou les humanités, organise trois types
d'enseignement, à
savoir :
- L'Enseignement Général où sont
organisées les deux premières années du secondaire ainsi
que les sections scientifiques et littéraires.
- L'Enseignement Normal et l'Education physique.
- L'Enseignement Technique où sont organisées les
sections industrielles, commerciales et sociales.
102
Annexe 3 : Carte RDC par province
Source : site web (cfr bibliographie)
103
Annexe 4 : Page de couverture de la Stratégie de
l'éducation en RDC
- 0 -
Annexe 5 : Résultats des Enquêtes sur les abandons
scolaires
Tableau 15 : Résultat des enquêtes dans les
écoles de Dungu
Ecole
|
Lieu
|
Niveau
|
Filles
|
Garcons
|
Total abandons
|
Abandons liées aux grosses
|
%
general
|
Abandons
|
Abandons liées aux grosses
|
%
|
Abandons
|
Abandons liées aux grosses
|
%
|
Institut Abbe Kosa
|
Dungu
|
secondaire
|
54
|
10
|
18,5
|
79
|
0
|
0,0
|
133
|
10
|
7,5
|
Institut Zitope
|
Dungu
|
secondaire
|
5
|
2
|
40,0
|
15
|
0
|
0,0
|
20
|
2
|
10
|
Institut Ngasuyo
|
Dungu
|
secondaire
|
15
|
1
|
6,7
|
16
|
0
|
0,0
|
31
|
1
|
3,2
|
E.P. Dekpe
|
Dungu
|
Primaire
|
25
|
0
|
0,0
|
22
|
0
|
0,0
|
47
|
0
|
0
|
E.P. Nangilima
|
Dungu
|
Primaire
|
26
|
1
|
3,8
|
42
|
0
|
0,0
|
68
|
1
|
1,5
|
E.P.A. Ngilima
|
Ngilima
|
secondaire
|
18
|
8
|
44,4
|
23
|
0
|
0,0
|
41
|
8
|
19,5
|
Institut Ngilima
|
Ngilima
|
secondaire
|
12
|
7
|
58,3
|
17
|
0
|
0,0
|
29
|
7
|
24,1
|
institut Ndolomo
|
Doruma
|
secondaire
|
45
|
39
|
86,7
|
76
|
0
|
0,0
|
121
|
39
|
32,2
|
E.P. Mapedi
|
|
Primaire
|
26
|
3
|
11,5
|
14
|
0
|
0,0
|
40
|
3
|
7,5
|
E.P. Ndolomo
|
Doruma
|
Primaire
|
46
|
5
|
10,9
|
22
|
0
|
0,0
|
68
|
5
|
7,3
|
E.P. Gurba
|
Doruma
|
Primaire
|
36
|
2
|
5,6
|
24
|
0
|
0,0
|
60
|
2
|
3,3
|
E.P. Mandofi
|
|
Primaire
|
81
|
33
|
40,7
|
79
|
0
|
0,0
|
160
|
33
|
20,6
|
Total
|
389
|
111
|
28,5
|
429
|
0
|
0,0
|
818
|
111
|
13,5
|
- 1 -
Tableau 16 : Résultat des enquêtes dans les
écoles de Bondo
Ecole
|
Lieu
|
Niveau
|
Filles
|
Garcons
|
Total abandons
|
Abandons liées aux grosses
|
%
general
|
Abandons
|
Abandons liées aux grosses
|
%
|
Abandons
|
Abandons liées aux grosses
|
%
|
Complexe scolaire Kini-Ngozo
|
Bondo Centre
|
secondaire
|
0
|
0
|
0
|
4
|
0
|
0,0
|
4
|
0
|
0
|
E.P Gbiande
|
Bondo Centre
|
Primaire
|
82
|
5
|
6,1
|
75
|
0
|
0,0
|
157
|
5
|
3,2
|
Institut Barambo
|
Bondo Centre
|
secondaire
|
21
|
11
|
52,4
|
36
|
0
|
0,0
|
57
|
11
|
19,3
|
Institut Lwanga
|
Bondo Centre
|
secondaire
|
8
|
0
|
0,0
|
56
|
0
|
0,0
|
64
|
0
|
0
|
Institut Lugutu
|
Bondo Centre
|
secondaire
|
23
|
15
|
65,2
|
12
|
0
|
0,0
|
35
|
15
|
42,8
|
Cosking primaire
|
Bondo Centre
|
Primaire
|
42
|
12
|
28,6
|
27
|
0
|
0,0
|
69
|
12
|
17,4
|
EP Bendu
|
Baye
|
Primaire
|
36
|
13
|
36,1
|
24
|
0
|
0,0
|
60
|
13
|
21,6
|
Institut Bendu
|
Baye
|
secondaire
|
50
|
15
|
30,0
|
44
|
0
|
0,0
|
94
|
15
|
15,9
|
EP Kpete
|
Baye
|
Primaire
|
45
|
5
|
11,1
|
40
|
0
|
0,0
|
85
|
5
|
5,9
|
EP Dulo Dengwa
|
Baye
|
Primaire
|
35
|
9
|
25,7
|
25
|
0
|
0,0
|
60
|
9
|
15
|
EP2 Monga
|
Monga
|
Primaire
|
59
|
13
|
22,0
|
21
|
0
|
0,0
|
80
|
13
|
16,2
|
EP Fakula
|
Monga
|
Primaire
|
48
|
3
|
6,3
|
37
|
0
|
0,0
|
85
|
3
|
3,5
|
Institut Mukasa
|
Monga
|
secondaire
|
22
|
10
|
45,5
|
12
|
0
|
0,0
|
34
|
10
|
29,4
|
EP Monga I
|
Monga
|
Primaire
|
37
|
10
|
27,0
|
16
|
0
|
0,0
|
53
|
10
|
18,8
|
EP Bagbeni
|
Mogalu
|
Primaire
|
45
|
25
|
55,6
|
62
|
0
|
0,0
|
107
|
25
|
23,3
|
Inst. Technique Banyanguma
|
Nzokongba I
|
secondaire
|
35
|
12
|
34,3
|
42
|
6
|
14,3
|
77
|
18
|
23,4
|
Institut Bagbeni
|
Mogalu
|
secondaire
|
49
|
14
|
28,6
|
37
|
4
|
10,8
|
86
|
18
|
20,9
|
Mbale Bile
|
Nzokongba I
|
Primaire
|
73
|
21
|
28,8
|
0
|
0
|
0,0
|
73
|
21
|
28,7
|
Total
|
710
|
193
|
27,2
|
570
|
10
|
1,8
|
1280
|
203
|
15,8
|
Annexe 6 : Guide d'entretien avec les enseignants
1. Sexe
O Féminin O Masculin
2. Religion
O Sans religion O Catholique O Musulman O Protestant O Eglise de
reveil O Autre (Précisez)
3. Que pensez-vous de la phrase suivante : « De nature,
les filles sont moins intelligentes à l'école comparativement aux
garçons »
O Vrai OFaux
4. Les sections ou options techniques sont appropriées
pour les garçons et non pour les filles car elles exigent de
l'intelligence
O Vrai O Faux
5. Comme une fille devra se marier et aller dans une autre
famille, il n'est pas utile de dépenser beaucoup d'argents pour ses
études
O Vrai O Faux
6. Il est normal qu'une fille ne se concentre pas à
ses études car sa place est dans la cuisine et non au bureau/travail
O D'accord O Pas d'accord
7. Dans cette province, la femme est discriminée par
rapport à l'homme aussi bien dans les ménages que dans la
société
O D'accord O Pas d'accord
8. La lutte pour l'égalité entre hommes et
femmes est importante et vaut la peine pour cette province
O Vrai O Faux
9. Il n'est pas possible de parvenir à une
égalité des droits entre hommes et femmes, c'est à dire
arriver à ce qu'hommes et femmes jouissent des mêmes droits,
même opportunités ou même privilège car la
différence entre homme et femme est naturelle.
O Vrai Faux
10. Depuis des années, les femmes du monde entier
luttent pour la promotion des droits de la femme; pensez-vous que la
mobilisation des femmes peut changer leur état de subordination et
améliorer leur situation dans la société?
O Oui Non
11. La lutte pour la promotion des droits de la femme est
imposée par l'Europe, elle n'est pas appropriée pour l'Afrique
O Oui Non