UNIVERSITE DE STRASBOURG - FACULTE DE
DROIT
MASTER 2 DROIT COMPARE
2015-2016
![](La-gestation-pour-autrui--etude-comparative-entre-la-france-et-les-etats-unis1.png)
LA GESTATION POUR AUTRUI
Etude comparative entre la France et les
Etats-Unis
Mémoire rédigé sous la direction de Madame
la Professeure Dominique D'AMBRA
Par Geoffrey WATRIN
Mémoire soutenu le 7 juin 2016, à
l'Université de Strasbourg, devant un jury composé de Mesdames
les professeures Dominique D'AMBRA et Jacqueline BOUTON.
« Autviaminveniamautfaciam »
Hannibal
REMERCIEMENTS
Je tiens à exprimer mes remerciements les plus profonds
à Mme la professeure Dominique D'AMBRA pour avoir accepté la
direction de ce mémoire, mais également pour ses conseils qui
m'ont été d'une grande aide.
Je tiens également à remercier M. le professeur
Israël NISAND, pour avoir éveillé en moi une
curiosité toute particulière concernant la gestation pour autrui,
qui fut indispensable à la réalisation de ce mémoire.
Enfin, je tiens à remercier très chaleureusement
mes parents, ma famille et mes amis pour le soutien sans faille dont ils ont
fait preuve tout au long de mon cursus universitaire.
RESUME
Après un moment d'accalmie, le débat sur la
gestation pour autrui tend à reprendre une certaine vigueur en France,
en particulier depuis les récentes avancées orchestrées
par la Cour de cassation, en 2015. Aussi infimes soient-elles, ces
dernières redonnent pour autant l'espoir aux pro-GPA de voir un jour
cette pratique légalisée sur le territoire de la
République.
Si tel n'est pas le cas de la France, beaucoup d'Etats ont
osé franchir le cap, en décidant d'autoriser l'exercice de ce
mode de reproduction, à l'instar des Etats-Unis.
Dans la mesure où les droits français et
américain sont plutôt bien connus pour être opposés
sur cette question, nous avons trouvé intéressant, au travers de
ce mémoire, d'étudier ces différences. L'idée qui
en découle est ainsi de chercher à comprendre ce qui fonde la
position de chacun de ces deux Etats sur la maternité de substitution. A
cette occasion, plusieurs grands principes ont pu être mis en
lumière, comme l'indisponibilité du corps humain pour la France,
ou la liberté contractuelle pour les Etats-Unis.
Mais loin d'être en formelle opposition, nos recherches
nous ont également permis de constater que ces deux grands
systèmes disposaient parfois de dispositions communes, applicables
à la GPA. C'est notamment le cas de la traite des êtres humains,
contre laquelle la France et les Etats-Unis luttent avec force.
Enfin, si on retrouve des notions similaires dans le droit de
ces deux Etats, toutes ne bénéficient pas de la même
interprétation, ou de la même force, à l'instar du droit au
respect à la vie privée, ou encore de la dignité humaine.
La grande question qui découle alors de ces
constatations est la suivante : faut-il que la France légalise la
gestation pour autrui, et si oui, doit-elle s'inspirer du droit
américain pour parachever ce but ?
LISTE DES
ABREVIATIONS
ADA : AmericanswithDisabilitiesAct
ASMP : Académie des Sciences Morales et
Politiques
Ass. Plén. : Cour de cassation, Assemblée
plénière.
Bull. civ. : Bulletin civil de la Cour de cassation
Bull. crim : Bulletin criminel de la Cour de cassation
CAP : Center for American Progress
CCNESVS : Conseil Consultatif National de l'Ethique pour
les Sciences de la Vie et de la Santé
CE : Conseil d'Etat
CEDH : Cour européenne des droits de l'Homme
Civ. : Cour de cassation, chambre civile
CLEDP : Creative Love Egg Donor and Surrogate Agency
Cons. Const : Conseil constitutionnel
Crim. : Cour de cassation, chambre criminelle
DDHC : Déclaration des droits de l'Homme et du
citoyen
DUDH : Déclaration universelle des droits de
l'Homme et du Citoyen
ERISA : Employee Retirement Income Security Act
GPA : Gestation pour autrui
IVG : Interruption volontaire de grossesse
LII : Legal Information Institute
NOTA : National Organ Transplantation Act
PMA : Procréation médicalement
assistée
SOMMAIRE
Introduction.......................................................................................................................
7
Partie 1 : Le principe d'indisponibilité du
corps humain : un principe controversable.....15
I. Le freedom of contract
18
A. La notion de freedom of contract
18
B. Le freedom of contract et la
gestation pour autrui
23
II. La major life activityet l'Americans
with Disabilities Act
29
A. La définition des notions
30
B. L'Americans with Disabilities
Act : un texte à l'applicabilité limitée
31
III. La personal autonomy
33
A. La protection accordée
à la personal autonomy
34
B. La personal autonomy : un
fondement possible de la GPA
35
Partie 2 : Des fondements
conciliables..........................................................................37
I. Les fondements communs aux deux
nations
37
A. La prohibition de la traite des
êtres humains
38
B. La prohibition de la vente des
produits du corps humain
41
C. Le droit à la liberté
inclus dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme et du
citoyen et le Bill of Rights
44
II. Les principes communs mais disposant
d'une interprétation différente
49
A. Le droit au respect de la vie
privée / Right of privacy
49
B. La dignité humaine
57
Conclusion..........................................................................................................................65
Bibliographie.....................................................................................................................67
INTRODUCTION
« Mater semper certa
est. »
La maternité de substitution, autrement appelée
gestation pour autrui, est une pratique qui, notamment depuis ces
dernières années, connaît un certain engouement
auprès de nombreuses personnes. Cette dernière revêt pour
elles l'espoir de pouvoir un jour fonder une famille.
Les motivations qui les poussent à utiliser ce
procédé sont diverses. On trouve parmi elles l'infertilité
féminine, mais aussi l'échec répété de
fécondations in vitro, les risques pour la vie de la mère
liés aux complications éventuelles d'une grossesse, ou encore le
refus de passer par une procédure d'adoption, jugée à la
fois trop longue et complexe, et dont résulte l'arrivée d'un
enfant qui n'est génétiquement pas celui des parents
d'intentions1(*).A cela il
faut également ajouter le cas des couples homosexuels, notamment dans le
cas où il s'agit d'hommes, ainsi que celui des célibataires
souhaitant établir une descendance.
Bien que les Etats n'aient commencé à
s'intéresser juridiquement à ce sujet qu'au cours de ces
dernières années, ce mode de procréation est quant
à lui bien plus ancien. En effet, les premières
références auxquelles on peut se rapporter se trouvent dans
l'Ancien Testament, et plus particulièrement dans la Genèse,
où il nous est tout d'abord décrit l'histoire d'Abraham et de son
épouse, Saraï. Cette dernière, dans l'incapacité
d'enfanter, décide d'offrir sa servante à son mari afin qu'il
puisse procréer. Il résultera de cette décision la
naissance d'Ismaël2(*).
On peut encore citer un autre exemple plus marquant issu de ce
même ouvrage, cette fois concernant Rachel et son époux Jacob.
Stérile, Rachel n'en souhaite pas moins devenir mère. Elle
demande alors à Jacob de procréer avec plusieurs de ses servantes
afin de pouvoir adopter les enfants à leur naissance3(*).
Plus proche de nous, il est également possible
d'évoquer le cas particulier des afro-américaines esclaves aux
États-Unis avant la guerre de Sécession. Ces dernières
étaient alors considérées comme des mères de
substitution, en ce sens que les enfants qu'elles mettaient au monde devenaient
la propriété de leur maître4(*).
Toutefois, une différence notoire est à
souligner entreces époques respectives et la nôtre. En effet, si
dans l'histoire on utilisait les techniques ancestrales de procréation
au travers du rapport sexuel ou de l'insémination artificielle5(*), les progrès de la
médecine à partir des années 1970 vont permettre une
avancée majeureen matière de procréation
médicalement assistée,avec la fécondation in vitro6(*). Le procédé
consiste alors à fabriquer un embryon grâce à la rencontre
d'un spermatozoïde et d'un ovule pouvant provenir de donneurs en
laboratoire, puis de l'implanter dans l'utérus d'une femme. Si le
dispositif est particulièrement révolutionnaire et utile pour bon
nombre de couples, il aura toutefois des conséquences importantes en
matière de gestation pour autrui.
C'est sans doute ce qui poussera de nombreux États,
notamment en Europe, à s'interroger sur cette question à partir
des années 1970-80. La France, où la pratique commence petit
à petit à s'installer depuis 19857(*), n'y fera pas exception. En effet à partir de
cette période, plusieurs associations, dont l'objet consistait à
mettre en contact de couples infertiles avec des mères porteuses, ont
profité de la pénombre juridique en la matière pour se
former sur le territoire. Parmi elles, on peut notamment citer Alma
Mater etLes Cigognes, qui ont beaucoup oeuvré dans le
développement de la gestation pour autrui en France.
Pour éviter toute dérive, les pouvoirs publics
français ont très rapidement tenté d'enrayer ce
phénomène en essayant de prohiber le recours à la
maternité de substitution. C'est ainsi qu'en 1984, le Comité
Consultatif National de l'Éthique va émettre un avis
négatif au regard de la continuité de cette pratique, en la
qualifiant d'illicite. Cet avis a par ailleurs été
reformulé en 20108(*). En 1988, le Conseil d'État appuiera cette
position à deux reprises. Tout d'abord, au travers d'une étude
intitulée De l'éthique au droit, où il sera fait
mention de la nécessité de légiférer en
matière de procréation médicalement assistée, mais
surtout par un arrêt du 22 janvier 1988, visant l'association Les
Cigognes.Cette décisionva manifester le ressentiment du Conseil
d'État pour la gestation pour autrui, en ce sens qu'il va la
considérer comme pénalement répréhensible, en
soulignant notamment la provocation à l'abandon d'enfant, les
compensations financières perçues par la mère porteuse,
ainsi que la sélection des mères porteuses par l'association,
avant leur insémination9(*).
C'est dans cette même optique que le 13 décembre
1989, la Cour de cassation va poursuivre la marche vers
l'illicéité du recours aux mères porteuses, en
prononçant la pire sanction civile qui soit à l'égard
d'une association, à savoir la dissolution d'Alma Mater. Pour
ceux faire, la Cour se base sur le caractère illicite de son objet, en
citant notamment l'article 1128 du code civil10(*).
Ce n'est toutefois que dans son arrêt du 31 mai 1991 que
la Cour de cassation va poser la première pierre à l'interdiction
de la gestation pour autrui en France. Dans cette affaire, il était
question d'un couple dont madame était atteinte d'infertilité. Ce
dernier, désireux d'enfanter, décide alors d'avoir recours
à une mère porteuse, inséminée artificiellement par
le sperme de monsieur. A la naissance de l'enfant, ce dernier est
déclaré comme étant celui de l'époux, madame devant
procéder préalablement à l'adoption plénière
du bébé afin de pouvoir officiellement devenir sa mère. Ce
procédé a été dans un premier temps approuvé
par la Cour d'appel de Paris, qui reconnaissait « la
méthode de maternité substituée » comme
« licite et non contraire à l'ordre
public »11(*). La Cour de cassation, disposant d'une opinion
parfaitement dissidente, va alors y mettre un terme en la qualifiant de
contraire à un nouveau principe élaboré par ses soins : le
principe d'indisponibilité du corps humain12(*), qui sera étudié
plus en détail dans la première partie de ce mémoire.
Cet arrêt de la Cour de cassation aura dès lors
deux conséquences sur le droit français. Premièrement, il
va contribuer à stabiliser la situation juridique de la gestation pour
autrui sur le territoire de la République. Ensuite, il va
préparer l'arrivée d'une intervention d'envergure du
législateur quelques années plus tard, au travers des
premières lois bioéthiques.
Cette dernière, publiée au Journal officiel le
30 juillet 1994, va définitivement fixer la position de la France en
matière de maternité de substitution, en donnant naissance
à plusieurs nouveaux articles dans le Code civil. Parmi eux, l'article
16-1 qui vise à protéger le corps humain, mais aussi l'article
16-5, qui prohibe les conventions donnant une valeur patrimoniale à ce
dernier. Si ces interdictions ne concernent pas directement la GPA, il en va
autrement de l'article 16-7 du Code civil qui l'interdit très
explicitement, en sanctionnant les conventions qui en découleraient de
nullité absolue.
Bien qu'à l'origine, cette loi devait être revue
tous les 5 ans, la première révision n'interviendra qu'en 2004,
n'apportant aucun changement probant en la matière. En 2009, à
l'occasion de la seconde révision de la loi bioéthique, la
question s'est à nouveau posée au législateur de savoir si
la position de la France devait être modifiée concernant la
situation des mères porteuses. De nombreux débats
démontrent l'intérêt que les pouvoirs publics portent
à cette question, comme en témoigne une étude du Conseil
d'État du 9 avril 200913(*), où l'on trouve plusieurs pages
consacrées à la procréation pour autrui. De ces
discussions va découler la loi du 7 juillet 2011 consacrée
à la bioéthique. La réponse qu'elle contient au sujet de
la GPA sera sans appel. Ce sera un nouveau refus inconditionnel de
légalisation de cette pratique.
Cette position est par ailleurs appuyée par le code
pénal, dès sa création en 1810, sous la qualification de
« supposition d'enfant »14(*). Cette infraction sera modifiée par
l'entrée en vigueur du nouveau code pénal en 1994 sous
l'appellation de « simulation d'enfant »15(*). Ce délit consiste
à admettre qu'une femme est la mère d'une enfant sans l'avoir mis
au monde et sans l'avoir adopté. En d'autres termes, c'est le fait
d'admettre qu'elle a accouché de lui sans que ce ne soit le cas. Cette
incrimination, en matière de gestation pour autrui, s'adresse donc aux
parents d'intentions.
Dans le même esprit, le législateur a
souhaité incriminer les personnes ou organismes qui pousseraient une
mère à porter l'enfant d'un autre couple en vue de l'abandonner,
au travers de la provocation à l'abandon16(*).
Si la position du droit français semble parfaitement
claire, il n'en va pas de même en ce qui concerne le droit
américain.
En effet, il est bon de rappeler dans un premier temps que la
structure des Etats-Unis est bien différente du schéma que l'on
peut trouver en France, notamment au travers du fédéralisme qui y
règne. Cette forme étatique a des conséquences importantes
sur le droit américain, en ce sens que les Etats
fédérés bénéficient d'une marge plus ou
moins grande pour légiférer sur certains sujets, non
réservés au Congrès ou au gouvernement
fédéral par la Constitution17(*).
En ce qui concerne la gestation pour autrui, aucun article ni
amendement de la Constitution américaine ne prévoit de
compétence spéciale attribuée au législateur
fédéral. En application du Dixième Amendement du Bill of
Rights18(*), c'est donc
aux Etats fédérés de prendre les mesures
nécessaires.
De ce fait, il est impossible de parler d'un positionnement
unique du droit américain sur la maternité de substitution,
étant donné que chaque Etat dispose de son propre corps de
règles. Toutefois, on peut aujourd'hui mettre en évidence
plusieurs groupes d'Etats qui s'accordent selon une gradation
particulière.
On trouve tout d'abord, les Etats qui sont formellement contre
la GPA. Cette position se manifestepar la nullité absolue de toute
convention visant, pour une femme, à abandonner à un autre couple
l'enfant qu'elle va porter, mais aussi par la pénalisation de cette
pratique. Parmi ces Etats, on retrouve notamment le Michigan etle District de
Columbia, où les sanctions s'échelonnent de 10.000 à
50.000$ d'amende, ainsi que d'une à cinq années de prison.
On trouve ensuite les Etats qui acceptent la GPA, mais
uniquement sous certaines formes. A ce stade, il convient de préciser
qu'il existe sur le sol américain une distinction entre deux types de
gestation pour autrui. La première, appelée
traditionalsurrogacy, consiste à inséminer
artificiellement la mère porteuse. Cela implique que cette
dernière sera génétiquement liée à l'enfant
à naître. Aux côtés de cette méthode, on
trouve ensuite la gestationalsurrogacy. Cette dernière implique
que la mère de substitution ne se contente que de porter l'enfant, sans
avoir à donner l'un de ses ovules. Elle n'a donc aucun lien
génétique avec l'enfant.
En application de cette distinction, plusieurs Etats comme le
Nevada, l'Utah ou l'Illinois s'accordent pour interdire la première
forme de GPA, mais autoriser la seconde. Cela peut notamment s'expliquer par le
risque moins accru que la mère porteuse s'attache à l'enfant, et
décide de ne plus transmettre la garde de ce dernier aux parents
d'intention.
Par la suite, on peut citer les Etats qui admettent pleinement
la pratique de la maternité de substitution, quelque soit sa forme.
C'est notamment le cas du New Hampshire et dans une certaine mesure de la
Floride.
On trouve encore des Etats où aucune loi ne vient
régler la question. Ces derniers constituent une majorité sur le
sol américain19(*).
Dans ce cas, il appartient aux juges des Cours étatiques de se prononcer
sur la question. Dans la plupart des affaires, la réponse s'avère
être favorable à la maternité de substitution.
Enfin, parmi les Etats américains acceptant la GPA, il
ne faut pas oublier la question de la rémunération des
mères porteuses. Là encore, il n'y a aucun consensus sur ce
point.
Certains Etats comme la Californie ou le New Jersey sont
très permissifs et autorisent que la mère porteuse soit
rémunérée pour ses services. D'autres admettentla
légalité de la GPA à condition qu'elle soit exclusivement
pratiquée à titre gratuit, avec néanmoins une
possibilité de remboursement des frais inhérents à la
grossesse. Ces Etats sont entre autres l'Oklahoma, le Nebraska ou encore
Washington.
Si les Etats-Unis n'ont pas de position unique en la
matière, il est toutefois possible, grâce à ces
précisions, de dégager une tendance plutôt favorable du
droit américain à la gestation pour autrui.
Ce faisant, on constate une certaine opposition entre les
législations de ces deux puissances.
Le débat pourrait s'arrêter là.
Néanmoins, la récente condamnation de la France par la Cour
européenne des droits de l'Homme en 201420(*) a ouvert une brèche en droit français.
Dans les faits, il était question de deux couples ayant eu recours
à une procédure de GPA, respectivement en Californie et dans le
Minnesota. A leur retour en France accompagnés leurs enfants, ces
derniers se sont heurtés au refus des autorités françaises
de transcrire l'acte d'état civil de leur progéniture. C'est
ainsi que de longues procédures judiciaires ont été
engagées, jusqu'à la saisine de la Cour européenne des
droits de l'Homme en 2011. Celle-ci conclue, en 2014, que la République
Française a violé l'article 8 de la Convention européenne
des droits de l'Homme portant sur le droit à la vie privée et
familiale, mais uniquement vis-à-vis des enfants des deux couples issus
de gestation pour autrui.
Suite à cette décision, la Cour de cassation
française a effectué un revirement jurisprudentiel importantpar
le biais notamment de deux arrêts, dans lesquels elle casse et annule un
arrêt de Cour d'appel qui refusait la transcription d'un acte
d'état civil d'un enfant issu de maternité de substitution
à l'étranger21(*).
La Cour se montre toutefois prudente au travers de ces
décisions, en précisant que ces cassations ne valent bel et bien
que pour la transcription des actes d'état civil. Il ne faut donc pas
les interpréter comme une position favorable à la gestation pour
autrui.
Néanmoins, cette ouverture permet de se poser des
questions quant à l'avenir de cette pratique en France. On peut en effet
se demander si, à l'instar de l'interruption volontaire de grossesse en
1975, la gestation pour autrui est en phase de s'implanter sur le territoire de
la République.
Pour ces raisons, il serait dès lors intéressant
de confronter les lois antagonistes de ces deux pays en posant la
problématique suivante : est-il envisageable de légaliser la
gestation pour autrui en France au regard de la législation
américaine ?
En effet, comme le disait Aristophane, « de
leurs ennemis, les sages apprennent bien des choses ». En
application de cet adage, serait-il alors possible pour la France de tirer des
enseignements du droit américain en la matière ?
Ces interrogations sont d'ampleurs car les réponses qui
en découleront seront importantes. En effet, selon Jennifer Merchant,
deux risques majeurs sont à prévoir si la République
française maintient la prohibition de la gestation pour autrui22(*). Le premier est de voir se
multiplier le tourisme procréatif, et le second est d'assister à
une recrudescence d'enfants à « la filiation
incomplète », à savoir sans filiation maternelle
officielle.
En France, le pilier sur lequel repose l'interdiction de la
maternité de substitution concerne le principe d'indisponibilité
du corps humain. Toutefois, il apparaît comme controversable tant il
s'oppose à des fondements américains d'envergure (Partie 1). Mais
malgré cela, il sera possible de constater que les deux Etats disposent
de fondements communs (Partie 2).
Partie 1 : Le principe d'indisponibilité du
corps humain : un principe controversable
Le principe d'indisponibilité du corps humain est un
principe fondamental en droit français concernant l'interdiction de la
gestation pour autrui. Ce dernier, établit par la Cour de cassation dans
son arrêt du 31 mai 1991, va servir de modèle lors de
l'établissement des lois bioéthiques en 1994.
Comme son nom l'indique, ce principe vise à
protéger le corps humain, en ce sens qu'il vient limiter les
utilisations que l'on peut faire de son propre corps.Toutefois, selon certains
auteurs comme Muriel Fabre-Magnan23(*),il convient de distinguer entre le rapport de soi
à soi et le rapport de soi à autrui.
Dans le premier rapport, la personne est dotée d'un
certain pouvoir sur son corps, en ce sens qu'elle a le droit de décider
ce qu'elle en fait. Cornu parle alors
« d'autodisponibilité du corps humain ».
C'est en particulier grâce à cela que l'on peut s'adonner à
des pratiques dangereuses au péril de sa vie, ou que l'on peut
décider librement de mettre fin à ses jours.
Dans le rapport de soi à autrui, la logique est toute
autre, dans la mesure où l'on fait intervenir un tiers. C'est ici que le
principe d'indisponibilité prend toute son essence. Dans ce nouveau
schéma, la volonté de la personne sur son propre corps n'est plus
prise en compte. C'est pour ces raisons qu'il est impossible à un
individu de demander l'aided'autrui afin de mettre fin à ses
jours24(*). On ne
parlerait d'ailleurs plus de suicide mais d'euthanasie, voire même
d'homicide volontaire dans le cadre du droit français.
C'est précisément dans cette optique
qu'intervient la prohibition de la maternité de substitution en France.
A cela, il faut ajouter que ce principe disposed'une
application large de par l'existence de certains corolaires, parmi lesquels
figure le principe d'extrapatrimonialité du corps humain, inscrit
explicitement à l'article 16-5 du code civil.
Ce dernier vise à frapper de nullité toute
convention à titre onéreux passée sur un
élément ou produit du corps humain. L'idée qui en
découle est d'éviter toute exploitation de l'être humain
concernant son corps. C'est par ce biais qu'on arrive à protéger
les populations les plus pauvres en droit français, afin de les
dissuader de vendre certains de leurs organes. C'est également dans une
certaine mesure grâce à ce fondement que l'on peut prohiber la
gestation pour autrui, mais cette fois uniquement dans sa forme
onéreuse.
En droit américain, pour comprendre l'existence de la
gestation pour autrui, il faut au préalable préciser que la
protection du corps humain s'effectue de manière substantiellement
différente. Il n'existe en effet pas de grands principes25(*) ou de règles concrets
régissant ce sujet, comme on pourrait en trouver en France.
De ce fait, la Cour suprême des Etats-Unis a très
tôt commencé à statuer sur la place du corps en droit. Ce
fut notamment le cas dans Union Pacific Railway v.
Botsford(1891)26(*), où les juges de la majorité ont
décidé « qu'aucun droit n'est plus sacré ou
mieux gardé par la Common Law que le droit pour tout individu
à la possession et au contrôle de son propre corps, libre de
toute limitation ou intervention de la part d'autrui, en dehors de
l'autorité claire et incontestable de la loi »27(*). Dès lors, on constate
que la réponse donnée par la Cour suprême est quelque peu
changeante de celle donnée par la France. En effet, ici l'accent est
mis sur la libre disposition du corps par la personne, plutôt que sur sa
limitation.
Cette notion d'autodétermination sur son corps, la Cour
suprême ne va pas l'abandonner. Elle la rappellera en effet 80 ans plus
tard dans la très fameuse affaire Roe v. Wade (1973)28(*), où les juges vont
instaurer la possibilité pour les femmes d'avorter. L'argument
avancé par les Justices29(*) consistera à dire que les Etats-Unis ne
peuvent pas impacter le droit à la reproduction (reproductive
right) des femmes.Ici, on constate une autre variante de la protection du
corps humain à l'américaine. Alors qu'en France on va chercher
à protéger le corps humain vis à vis des autres personnes,
aux Etats-Unis on va préférer le protéger contre l'Etat
lui-même.
La libre disposition de son corps, certains ont
souhaité la pousser à son paroxysme. Ce fut le cas en 1991 avec
Moore v. Regents of the University of California30(*). Dans cette affaire, John
Moore,alors hospitalisé à l'époque des faits, revendiquait
un droit de propriété sur son corps, afin de se voir verser une
rémunération quant à une découverte médicale
permise grâce au prélèvement de ses cellules. Etant
donné que cette avancée avait été brevetée
et commercialisée par les chercheurs, Moore arguait qu'il avait le droit
d'obtenir un certain pourcentage sur lesgains amassés grâce
à ses cellules.
Les Justicesde la Cour suprême de Californie
n'ont toutefois pas fait droit à cette argumentation, refusant
d'admettre qu'il pouvait exister un tel droit sur son corps. Selon eux, le
risque était trop fort de créer un précédent qui
laisserait libre cours à l'exploitation des êtres humains pour
leurs organes, mais aussi qui impacterait à coup sûr la recherche
médicale.
Malgré cette décision, il n'en reste pas moins
que le droit de disposer de son corps est important aux Etats-Unis, pour ne pas
dire fondamental. Cette perception de la personne permet plusieurs ouverturesen
droit américain qui sont simplement impossibles en droit
français, du fait de la prééminence du principe
d'indisponibilité. Ce sont précisément ces ouvertures qui
permettent à la gestation pour autrui d'être admise dans certains
des Etats fédérés.
Ces dernières se retrouvent dans plusieurs grandes
notions primordiales en droit américain, comme le freedom of
contract (I), lamajor life activity (II) ou encore la
personal autonomy (III), trois concepts qui contribuent à
fonder de manière plus ou moins importante la gestation pour autrui.
I. Le
freedom of contract
En France, la passation d'un contrat sur son corps est
absolument prohibée par les articles 16-1 al. 3, 16-5 et même 16-7
concernant la gestation pour autrui, mais également dans une plus large
mesure par le principe d'indisponibilité du corps humain.
Pour comprendre l'état d'esprit du droit
américain, il faudra dans un premier temps s'attacher à
déterminer à quoi correspond exactement la notion de freedom
of contract et comment elle est protégée (A). Ceci fait, il
sera possible d'aborderla manière dont elle est appliquée
à la gestation pour autrui (B).
A.
La notion de freedom of contract
Le freedom of contract est une notion fondamentale au
sein de la société américaine, et par là même
de son droit. Il bénéficie donc à la fois d'une protection
constitutionnelle (1), mais aussi d'une protection accrue émanant de la
Cour suprême des Etats-Unis (2).
1. Le freedom of
contract : une liberté protégée par la Constitution
des Etats-Unis
A la différence du droit français, où
le contrat est encadré par plusieurs séries de règles, le
droit de contracter aux Etats-Unis est traité de manière
très libérale, suivant l'idée que nul n'est mieux
placé que soi pour juger de ses propres intérêts. C'est
dans cette optique que les juges lui confèrent une protection toute
particulière.
Néanmoins, à la lecture de la Constitution
américaine, on peut constater qu'aucune mention expresse dufreedom
of contract ne figure dans le texte. La protection résulte en effet
d'une interprétation du Quatorzième Amendement émanant des
juges Bradley et Field, et plus particulièrement de leurs
dissents31(*)
respectifs à propos desaffairesSlaughter-House (1873)32(*). Selon eux, le freedom of
contract devait pouvoir bénéficier de la protection de cet
Amendement, et donc à travers lui de la due process clause
qu'il prévoit.
Cette doctrine sera pour la première fois
consacrée dans l'affaire Frisbie v. United States
(1895)33(*).
Si la notion dedue process n'est pas connue comme
telle en droit français, on en retrouve néanmoins quelques bribes
dans le concept de procès équitable34(*). A l'origine en Common law, ce
concept vise à faire bénéficier tout individu d'une
procédure juste (fairprocedure), en lui permettant de se faire
juger par un jury au cours d'un procès. Le due process
empêche donc une personne d'être envoyée en prison alors
même qu'elle ne serait que suspectée d'avoir commis certains actes
répréhensibles.
Si cette notion n'avait qu'une visée essentiellement
procédurale à l'époque, elle a été
considérablement élargie par la Cour suprême des
Etats-Unis, avec l'incorporation du substantive due process. Ce
principe de droit constitutionnel provient d'une interprétation des
Cinquième et Quatorzième Amendements du Bill of Rights, que les
Justices ont effectué sous l'ère Lochner (1897
à 1937), et il répond à l'autorité des due
process clauses qui y sont incluses.
Néanmoins, aussi important que cela puisse
paraître, la Cour suprême des Etats-Unis ne donne aucune
définition du substantive due process. Si on s'attache à
la Constitution, l'idée qui en découle réside dans le fait
que le gouvernement, qu'il soit fédéral (Cinquième
Amendement), ou fédéré (Quatorzième Amendement), ne
puisse porter atteinte « à la vie, à la
liberté ou à la propriété » d'une
personne sans avoir préalablement justifié d'un but raisonnable.
A titre de comparaison, avec le due process originel,
qui a une visée procédurale, on va plutôt se demander si le
pouvoir en place a suivi la bonne procédure en retirant la vie, la
liberté ou la propriété d'une personne35(*). La différence de
raisonnement réside donc dans le fait que l'un protège les
individus du pouvoir coercitif de l'Etat (procedural due process),
alors que l'autre a pour but de préserver leurs droits en
empêchant l'Etat de promulguer des lois qui iraient au delà de ses
pouvoirs.
La Cour suprême a beaucoup utilisé le due
process, et plus particulièrement le substantive due
processpour sauvegarder l'intégrité du freedom of
contract, particulièrement sous l'ère lochnérienne.
2. Le freedom of
contract : une liberté protégée par la Cour
suprême
Pour comprendre cette notion très forte, il faut
remonter à ses origines. Le freedom of contract est en effet
né d'un cheminement assez complexe de jurisprudences émanant de
la Cour suprême des Etats Unis.
a. Avant la jurisprudence Lochner
Tout commence en 1895 avec Frisbie v. United States,
dans lequel la Cour suprême déclare que cette liberté
devait bénéficier d'une protection constitutionnelle. Cependant,
le juge Brewer, écrivant au nom de la Cour, va nuancer ce propos. S'il
admet dans un premier temps que « parmi les droits
inaliénables du citoyen figure la liberté
contractuelle »36(*), il ajoute ensuite « qu'une telle
liberté n'est pas absolue ou universelle »37(*). En d'autres termes, le
freedom of contract peut se voir limiter par certaines mesures prises
soit par le gouvernement, soit par le Congrès.
Néanmoins, cette appréciation commencera
à vaciller dès 1897 avec Allgeyer v. Louisiana. En
effet, c'est au sein decette affaire que figure la toute première
invalidation d'une loi étatique, sur le fondement de la violation de la
liberté contractuelle. En l'espèce, la Cour suprême a
considéré qu'il était illégal pour la Louisiane de
sanctionner le fait, pour une société louisianaise, de contracter
une assurance maritime auprès d'une société new-yorkaise.
L'année suivante, la Cour suprême reviendra sur
sa première observation en admettant les premières restrictions
au freedom of contract dans Holden v. Hardy (1898). Ainsi,
à une majorité de sept contre deux, la Cour a jugé qu'une
loi portant sur un quota d'heures de travail pour les mineurs n'était
pas contraire à la Constitution. Elle estime en effet que ces
restrictions à la liberté contractuelle font parti des pouvoirs
de police des Etats, dans la mesure oùils interviennent dans le cadre de
mesures de santé ou de sécurité raisonnables.
En 1905, la Cour suprême va effectuer un revirement
important sous l'empire de Lochner v. New-York38(*), et va écarter ce
qui avait été entrepris avec Holden.
Dans cette affaire, la question posée concernait le
nombre maximum d'heures de travail s'appliquant aux boulangers. Les juges
considèrent alors, à une majorité de cinq contre quatre,
que rien ne démontre qu'une telle loi permettrait la protection de la
santé publique.
Bien que cet arrêt ne semble à première
vue pas extrêmement subversif, il va engendrer l'entrée dans une
nouvelle aire, au sein de laquelle la Cour suprême va suivre une ligne
particulièrement dure à l'encontre des législations
étatiques, en vue de protéger le freedom of contract.
b. Après la jurisprudence Lochner : de 1905
à 1937
A partir de 1905, la Cour suprême va s'engager à
protéger la liberté contractuelle, au détriment de
plusieurs mesures prises par les Etats fédérés dans le but
notamment de protéger les salariés. Ce fut le cas au travers
d'Adair v. United-States (1908)39(*) et de Coppage v. Kansas (1915)40(*) où la Cour a
invalidé des lois prohibant lesyellow-dog contracts41(*).
On peut encore citer Adkins v. Children'sHospital
(1923)42(*), où les
juges ont invalidé, à une majorité de cinq contre
trois,une loi visant à instaurer un revenu minimum pour les
employées femmes.
Cette chasse aux entraves à la liberté
contractuelle ne s'arrête néanmoins pas là. En 1924, la
Cour Suprême va jusqu'à invalider une loi visant à
instaurer une taille pour le pain43(*), et en 1932 une loi permettant un monopole sur la
glace44(*).
c. West coasthotel v. Parrish : un revirement d'envergure
Il faudra attendre 1937 pour que la Cour suprême
décide de changer sa doctrine impassible sur le freedom of
contract, en admettant que cette dernière puisse subir quelques
limitations. C'est ainsi que dans West coasthotel v. Parrish
(1937)45(*), les
Justices ont effectué un revirement sur Adkins v.
Children'sHospital en reconnaissant le Minimum wages for womenact
de 1913,en vigueur dans l'Etat de Washington, comme étant
constitutionnel. Pour fonder cette décision, la Cour explique
notammentque les employés et les employeurs ne sont pas sur un pied
d'égalité pour négocier leurs contrats,
particulièrement avec les conditions économiques et pratiques de
l'époque liées à la Dépression. Pour étayer
cette décision, le Chief Justice Hughes ajoute que le
freedom of contract n'est pas « une liberté
absolue avec laquelle on applique la volonté d'une seule partie, ou que
l'on contracte comme l'une en aura
décidé »46(*). Ce dernier enrichi son propos en expliquant que
« la liberté implique l'absence de restriction arbitraire,
mais pas l'immunité face à des régulations ou
interdictions raisonnables imposées dans l'intérêt de la
communauté »47(*).
Dans les années qui suivirent Parrish, la Cour
suprême a prit plusieurs autres décisions allant dans ce sens, en
établissant petit à petit une nouvelle doctrine. C'est ainsi
qu'en 1955, les juges ont déclaré qu'un Etat qui met en vigueur
une loi ne devrait pas se voir sanctionner, à partir du moment où
il démontre que cette dernière était suffisamment
rationnelle pour régler un problème, quand bien même elle
entraverait en partie le freedom of contract48(*).
A l'heure actuelle, cette doctrine est toujours
plébiscitée par la Cour suprême des Etats-Unis, mais les
débats ne sont pour autant pas parfaitementclos. En effet, plusieurs
Cours inférieures telles que les Cours d'appel
fédérales49(*)résistent en appliquant parfois une
jurisprudence de type « lochnérienne ». En effet,
elles considèrent que la liberté contractuelle peut se voir
limiter dans le cadre du bien-être commun, de la santé ou de la
sécurité publiques, mais pas dans la dimension individuelle de la
passation de contrat.
Il faut toutefois préciser que depuis 1937, aucune
décision n'a repris la pensée présente dans Lochner de
manière pure.
B.
Le freedom of contract et la gestation pour autrui
La pensée américaine veut que lorsqu'il s'agit
d'un contrat passé dans la sphère privée, les individus
soient en mesure bénéficier de leur pleine liberté, sauf
à démontrer qu'une des limites précitées est
dépassée. Là encore, on note une différence majeure
avec le droit français, qui fait notamment valoir une notion qui n'est
que vaguement connu par les américains, à savoir celle d'ordre
public.
Néanmoins, s'agissant des conventions de mère
porteuse, les Etats-Unis semblent écarter ce raisonnement propre aux
contrats de droit commun.
En effet, bien que le droit américain leur
confère un statut particulier (1), il les accepte malgré tout
dans le cas de la majorité des Etats fédérés (2).
1. Le contrat de
gestation pour autrui en dehors du droit commun
Cette appréciation différente accordée
aux conventions de mères porteuses provient d'une des trois grandes
affaires américaines portant sur la gestation pour autrui, à
savoir Baby M (1986)50(*). Dans les faits, le couple Sterns, atteint
d'infertilité, a contacté Mary Beth Whitehead afin qu'elle porte
leur futur bébé. A la naissance de l'enfant, cette
dernière l'a transmis dans un premier temps aux parents d'intention,
avant de très vite faire machine arrière. Celle-ci se sentait en
effet dans l'incapacité de se séparer de l'enfant qu'elle avait
porté, dans la mesure où elle était également sa
génitrice. A l'issu de ce procès, la Cour suprême du
New-Jersey a déclaré que ce type de contrats ne pouvait
être de droit commun et qu'il ne disposait de ce fait pas d'une force
obligatoire.
Dans le but d'une meilleure compréhension de ce
régime particulier appliqué aux contrats de maternité de
substitution, il faut se demander dans un premier temps quel est leur but.
Cela correspond en effet à une justification possible de cette limite
apportée à la liberté contractuelle en la matière.
Pour rappel, dans un tel contrat, on trouve plusieurs parties.
D'un côté les parents d'intention, qui sont dans
l'incapacité de procréer, et de l'autre la gestatrice, qui aura
pour tâche de porter l'enfant de ces derniers.
Ainsi, une convention de mère porteuse adeux objectifs
majeurs. Le premier consiste à organiser les relations entre les parents
et la candidate gestatrice. Cela peut se manifesterpar une limite d'âge
imposée à la mère porteuse, un certain poids à ne
pas dépasser, ou encore une éventuelle rémunération
si l'Etat en question l'y autorise.
Lesecondbut de ce contrat est sans doute le plus important, en
ce qu'il va servir à déterminer qui seront les parents reconnus
de l'enfant à naître, ou en d'autres termes, qui obtiendra sa
garde.
De ce fait, l'objet de cette convention, qui réside
dans le service offert par la mère porteuse, n'est pas anodin, d'autant
plus qu'il s'agit à terme de la naissance d'une vie humaine. C'est sans
doute une des raisons qui explique que les Etats-Unis aient prévu cette
restriction aufreedom of contract.
Après cela, il faut rappeler qu'aux Etats-Unis, il
n'existe pas de réglementation centralisée en matière de
gestation pour autrui. Cela vaut également pour les contrats qui s'y
rattachent. En effet, bien qu'il existe un consensus autour du freedom of
contract, chaque Etat fédéré dispose de son autonomie
en ce qui concerne la réglementation de la question. Ceci est d'autant
plus facilité avec l'abandon de la doctrine Lochner, qui permet
de ne plus appliquer le substantive due process en matière
contractuelle, ce qui permet aux Etats de bénéficier d'une plus
grande souplesse dans la prise des mesures qu'ils estiment
nécessaires.
Ainsi, si tous les Etats s'entendent pour dire que les
conventions de mères porteuses ne peuvent pas subir une exécution
forcée dans toutes les situations, chacun va raisonner d'une
manière plus ou moins différente quant à l'application de
cette règle.
Toutefois, si un contrat bénéficie d'un statut
particulier, cela sous entend qu'il est admis. C'est pour ces raisons que nous
n'étudierons que la situation desconventions de GPA passéessur le
sol des Etats tolérant la maternité de substitution.
a. Les Etats permissifs : une force exécutoire
sous conditions
Dans cette subdivision, on retrouve deux groupes d'Etats. D'un
côté ceux qui posent des conditions positives, et de l'autres ceux
qui posent des conditions négatives.
Concernant la première catégorie, on peut citer
le cas de la Floride. Dans cet Etat, le contrat de gestation pour autrui peut
subir une exécution forcée, mais les Florida
Statutes51(*)
requièrent pour cela que les parents d'intention soient
âgés de 18 ans au minimum, ainsi que mariés ensemble. Ces
statutes imposent également que la gestatrice soit
âgée d'au minimum 18 ans. La doctrine floridienne
considère en effet qu'en dessous de cet âge, la mère
porteuse n'est pas parfaitement apte à procréer sans risque
avéré, mais aussi que les parents sont trop jeunes pour s'occuper
d'enfants convenablement. Cela contreviendrait donc aux meilleurs
intérêts de l'enfant que de permettre la passation d'un tel
contrat en dessous de cet âge.
On peut encore citer la situation du Nevada qui impose que les
parties soient chacune mariée légalement, mais aussi que la
convention porte sur une procédure gestationnelle uniquement.
Parmi les Etats qui posent des conditions négatives, on
dénombre par exemple le Kentucky, l'Oregon ou encore l'Oklahoma qui
rendent les conventions de mère porteuse inopposables si les parties ont
prévu une rémunération pour la gestatrice. Ces Etats
fondent cette interdiction de différentes façons. Pour l'Oregon
par exemple, ce sont les Oregon Statutes52(*) qui prohibent l'achat et la vente d'une
personne.
A ces Etats, on peut encore ajouter l'Indiana qui impose un
certain nombre de conditions négatives. Ainsi, pour qu'une convention de
mère porteuse ait une force exécutoire, il ne faut pas que cette
dernière ait donné l'un de ses ovules aux parents d'intention
dans le cadre de cette procédure. Il ne faut également pas entre
autre que la gestatrice ait consenti à subir un avortement53(*).
b. Les Etats réfractaires: pas de force
exécutoire
Une autre catégorie d'Etats américains se
démarque concernant la force exécutoire des contrats de gestation
pour autrui, à savoir ceux qui pensent qu'elle ne doit pas exister. Ceci
peut paraître paradoxal de ne pas reconnaître l'opposabilité
de ce type de conventions, mais de le tolérer quand même.
Parmi ces Etats on retrouve le Kansas. Bien que ce dernier
n'ait aucune régulation étatique sur le sujet, on trouve une
opinion54(*) produite par
le procureur général du Kansas (attorney general of the State
of Kansas) le 2 juillet 1982 qui déclare que ce type de convention
ne devait bénéficier d'aucune force exécutoire.
2. Un contrat dont
l'existence est admise
Malgré ces restrictions plus ou moins importantes
au freedom of contract du fait de l'objet particulier de ces
conventions, force est de constater qu'elles existent.
Il est alors légitime de se demander sur quoi se basent
les Cours américaines pour juger du bienfondé de cette forme
spécifique de contrat, en particulier lorsqu'il s'agit de statuer sur un
différent concernant la garde de l'enfant à naitre. Trois
critères majeurs sont à ce titre souvent invoqués,
à savoir les liens génétiques (a), l'intention parentale
(b) et l'intérêt de l'enfant (c).
a. Les liens génétiques
Les liens génétiques revêtissent une
certaine importance pour les Cours américaines. C'est en tout cas ce
qu'a déterminé la Cour suprême de Californie dans la
fameuse affaire Johnson v. Calvert (1993)55(*).
Dans ce cas, il était question d'un différend
survenu à l'occasion d'une procédure de gestation pour autrui,
entre le couple Calvert, dans l'impossibilité de concevoir un enfant
suite à l'hystérectomie subie par l'épouse, et Madame
Johnson, candidate gestatrice. Le problème survenu portait sur la
question de la détermination de la garde de l'enfant, dans la mesure
où à sa naissance,la mère porteuse a refusé
d'appliquer les termes du contrat, en ne transmettant pas l'enfant aux parents
d'intention. Les gamètes utilisées correspondant à celles
du couple Calvert56(*), la
question qui s'est posée devant la Cour était de savoir si ces
derniers étaient les parents naturels de l'enfant ou non, et si, en
d'autres termes, la garde devait leur revenir.
La Cour suprême de Californie va alors soulever un point
important, en disant qu'il convient de se référer aux liens
génétiques présents entre l'enfant et les parents
d'intention. Ainsi, présenter un test sanguin démontrant la
filiation biologique entre le bébé et les parents d'intention est
suffisant pour déterminer la parentalité.
b. L'intention de devenir parent
Toutefois, il est des cas où cette démonstration
est impossible du fait du célibat, de l'homosexualité, ou encore
de l'infertilité des deux membres d'un couple. Ceci pourrait donc, au
terme de la démonstration précédente, poser des
problèmes dans l'établissement d'une quelconque filiation.
C'est justement pour ces raisons que la Cour suprême de
Californie a établi, dans la même affaire, que les parents
naturels de l'enfant pouvaient également être
déterminés quant à l'intention parentale dont ils font
preuve. Cette intention, selon les juges, se manifeste notamment par la
volonté de vouloir élever l'enfant comme s'il avait
été obtenu sans aucune aide extérieure.
En l'espèce, la Cour a donc donné raison au
couple Calvert, aussi bien sur la base des liens génétiques, que
de l'intention parentale qu'ils avaient manifesté dès les
prémisses de la procédure, et ceà la différence de
Madame Johnson, qui souhaitait au départ se séparer de l'enfant,
comme le stipulaient les termes du contrat auquel elle avait
adhéré.
c. Le meilleur intérêt de l'enfant
Ce troisième fondement est quant à lui un peu
plus controversé. En effet les juges, dans l'affaire Baby M,
ont décidé de l'invoquer pour justifier le fait que l'enfant soit
confié aux parents d'intention. Et c'est justement en cela que cette
notion de meilleur intérêt de l'enfant peut s'avérer
être fluctuante, car selon les arguments, elle peut aussi bien justifier
la garde du nouveau né par les parents d'intention, que par la
mère porteuse,en particulierdans le cadre d'une procédure de type
« genitrix ».57(*)On peut d'ailleurs constater ce
phénomène en France, où le débat sur ce sujet est
particulièrement nourrit. C'est ainsi que des personnes comme Marie-Anne
Frison-Roche avancent que l'intérêt de l'enfant n'est pas
d'être séparé de sa gestatrice, alors que d'autres comme le
Professeur Israël Nisand affirment tout le contraire.
Aux Etats-Unis, bien que la réglementation de
l'intérêt de l'enfant ne s'effectue pas à l'échelle
fédérale, la majorité des Etats
fédérés dispose de mesures légales en la
matière. Toutefois, il faut préciser qu'à l'origine, ce
principe a été mis en place dans un cadre plus
général et donc extérieur à la gestation pour
autrui. C'est pourquoi on n'en trouve aucune mention expresse dans les
différents textes étatiques.
En guise d'exemple, on peut citer le Dakota du Nord qui
établit que les juges, pour déterminer le meilleur
intérêt de l'enfant, devront s'attacher à vérifier
notamment qu'il existe « de l'amour, de l'affection et tout autre
lien émotionnel entre les parents et l'enfant, ainsi que la
capacité pour chacun d'eux de subvenir aux besoins nutritionnels,
affectueux et d'orientation de l'enfant »58(*).
L'Oregon partage ce point de vue, en déclarant que les
juges doivent s'attacher à détecter plusieurs facteurs, tels que
« les liens émotionnels entre l'enfant et les
autresmembres de la famille », mais
aussi« l'intérêt des parties et leur attitude vis
à vis de l'enfant », ou encore « le
désire de poursuivre une relation »59(*).
II. Lamajor life activityet l'AmericanswithDisabilitiesAct
Lamajor life activity ou activité importante
de la vie est une notion américaine particulièrement
récente,s'inscrivant dans un contexte relativement large, et inconnue en
droit français. Elle fut pour la première fois citée dans
l'United States Code (USC), avec l'instauration de
l'AmericanswithDisabilitiesAct(ADA)60(*), voté par le Congrès et mis en vigueur
en 1990.
Cette loi fédérale intervient suite à un
constat effectué par le législateur américain, à
savoir que les personnes atteintes d'invalidité (disability)
sont souvent victimes d'isolement, voire même de
ségrégation61(*). Plusieurs domaines sont alors montrés du
doigt, à l'instar du marché de l'emploi, du logement, mais aussi
de l'éducation ou des services de soin62(*).
L'instauration de l'AmericanswithDisabilitiesActa
donc pour objectif de lutter contre les discriminations faites à
l'égard de ces individus. L'idée qui en découle est de
permettre à chacun d'avoir les mêmes opportunités, mais
également d'être autosuffisant et de pouvoir contribuer à
l'évolution de la société.
On peut alors se demander en quoi la gestation pour autrui
serait liée d'une manière ou d'une autre à l'ADA. La
réponse se trouve dans les définitions données à
deux notionsinterdépendantes qui figurent dans cette loi, à
savoir les disabilities et les major life activities(A).
Néanmoins, nous constaterons que l'application qui en est faite est
particulièrement limitée (B).
A.
La définition des notions
Dès 1990, l'ADA définit l'invalidité en
trois points, comme étant tout d'abord « une
détérioration physique ou mentale qui limite substantiellement
les activités importantes de la vie d'un
individu »63(*). Cela peut ensuite consister en
« l'enregistrement d'une telle
détérioration »64(*) ou finalement dans le fait
« d'être considéré comme ayant une telle
détérioration »65(*).
Dans notre cas, c'est sur la première définition
qu'il faut s'attarder, étant donné que c'est en elle que figure
la notion d'activités importantes de la vie. Pendant un certain temps,
il faut savoir que l'application de ce concept a posé quelques
problèmes, dans la mesure où on ne disposait d'aucune
précision réelle quant à son essence. Les juridictions
américaines ont donc eu libre cours afin d'en donner une
définition plus abordable.
C'est ainsi qu'en 1998, dans l'affaire Bragdon v.
Abbott66(*), la Cour
suprême a déterminé que la reproduction humaine entrait
sous le coup des major life activities.
Dix ans plus tard, en 2008, cette interprétation des
Justices a été officiellement reprise par le
Congrès des Etats-Unis lors de la réforme portée à
l'ADA. Dès lors, si les objectifs de l'acte demeurent inchangés,
ce dernier dispose désormais d'une section 4 (2) (A) et (B), dans
laquelle figure une énumération assez précise et non
exhaustive de ce que la notion de major life activitiesdoit comporter.
On constate ainsi qu'une telle activité peut consister en manger,
dormir, marcher, mais aussi peut correspondre au bon fonctionnement du
système immunitaire, du cerveau ou des fonctions reproductrices.
Bien que le législateur américain ne vise pas
directement la maternité de substitution, rien ne permet de penser qu'il
l'interdit au travers de ce texte. En effet, si une personne est atteinte
d'infertilité, elle pourra être considérée comme
invalide au sens de l'ADA, étant donné qu'une de ses
activités majeures de la vie est atteinte. De ce fait, cette
dernière, pour ne pas être victime de discrimination, devrait
pouvoir bénéficier du traitement adéquat afin de pouvoir
remédier à son problème, à l'instar d'une FIV ou
à défaut, du recours à une mère porteuse.
Néanmoins, l'ADA comporte un bémol
sérieux quant à son application particulièrement
réduite.
B.
L'AmericanswithDisabilitiesAct : un texte à l'applicabilité
limitée
L'ADA a pour objectif de faire disparaître toute forme
de discrimination à l'encontre des personnes atteintes
d'invalidité. Toutefois, le législateur américain a mis un
accent particulier sur les cibles de ce texte, qui ne sont qu'au nombre de
trois : les employeurs, les entités publiques et les entités
privées exploitantdeslieux et services publics.
Dans le cadre de cette étude, il ne conviendra de
s'attarder que sur les deux premières formes, qui sont les plus
susceptible d'être confrontées à des personnes atteintes de
problèmes d'infertilité.
1. Les employeurs
Aux Etats-Unis, les employeurs peuvent décider d'offrir
à leurs employés une couverture sociale concernant leur
santé, conformément à l'Employee Retirement Income
Security Act(ERISA). C'est en cela que l'ADA trouve à s'appliquer
à leur égard. Néanmoins, la question en matière
d'infertilité et de traitement adéquat est
particulièrement difficile, car nombreuses sont les
sociétés qui refusent d'offrir une protection si poussée.
C'est pourquoi la question a été tranchée au sein de deux
arrêts notoires : Krauel v. Iowa MethodistMedical Center
(1996)67(*) et Saks v.
Franklin Covey Co. (2000)68(*).
Dans la première affaire jugée par la Cour
d'appel fédérale du 8ème Circuit, laquestion
s'est posée de savoir si une employée pouvait poursuivre son
employeur pour discrimination au sens de l'ADA, en raison de l'insuffisance de
la couverture santé souscrite par ce dernier, en ce qu'elle ne
subviennait pas aux frais inhérents aux interventions qu'elle a subit en
guise de traitement de son infertilité.
La réponse de la Cour fut négative. Les juges
ont en effet considéré, à l'époque, que
l'infertilité n'entrait pas dans le cadre des major life
activities, et donc qu'il n'existait ici aucune forme d'invalidité
permettant l'application de l'ADA69(*).
En 2000, la Cour d'appel fédérale du
2ème Circuit fut saisi d'une affaire similaire. En
l'espèce, une employée a décidé de poursuivre son
employeur sur la base de la discrimination au sens de l'ADA, car ce dernier n'a
pas couvert ses dépenses concernant les méthodes de
procréation médicalement assistée auxquelles elle a eu
recours pour tomber enceinte.
La décision retenue fut toutefois différente du
cas précédent, du fait de l'émergence de Bragdon v.
Abbottjugée deux ans plus tôt par la Cour suprême des
Etats-Unis, qui retenait alors que la procréation entrait dans le cadre
des major life activities.
Néanmoins, la direction prise par les juges de la Cour
d'appel restera inchangée. Ils considèreront en effet que l'on ne
peut pas parler de discrimination dans ce cas, dans la mesure où
l'employeur prévoit la même couverture santé pour chacun de
ses employés.
La moralequi ressort de ces deux affaires, c'est que la
gestation pour autrui, et plus largement les traitements de
l'infertilité ne peuvent pas bénéficier de la protection
de l'ADA face aux employeurs.
2. Les entités
publiques
A l `heure actuelle, aucune affaire mettant en cause des
entités publiques n'a été portée devant les
juridictions américaines. On ne s'attachera donc qu'à
étudier et interpréter la lettre de l'ADA en la matière.
Dans un premier temps, le texte définit le terme
d' « entité publique » comme étant entre
autre un Etat, un gouvernement local, ou encore un démembrement de ces
derniers
Il s'attache ensuite à donner une définition du
terme « discrimination » lorsqu'il est employé
vis-à-vis d'une entité publique. Cette notion réside ainsi
dans le fait pour une personne d'être exclue de la participation à
la vie sociétale, mais également « des
bénéfices des services, programmes ou activités d'une
entité publique, ou être soumis à une discrimination par
une telle entité »70(*).
Là encore, la rédaction de ces textes est
particulièrement large. De ce fait, cela permet d'envisager une
réflexion sur le cas de la gestation pour autrui.
En effet, personne n'est sans savoir qu'une grossesse peut
engendrer de nombreux frais médicaux. Si la France dispose d'un
système de sécurité sociale permettant de se voir
rembourser ces dépenses, ce n'est pas tout à fait le cas des
Etats-Unis, qui dans un esprit libéral, ont préféré
jusqu'à très récemment laisser le champ libre aux
assurances privées de santé. Cette question du financement de la
grossesse s'avère donc importante, notamment dans le cadre d'une GPA.
Ainsi, si l'on s'attache à la lettre de l'ADA, on peut
considérer qu'un Etat fédéré est dans l'obligation
de venir en aide aux couples infertiles qui ne disposent pas de moyens
financiers suffisants. En effet, en privant ce couple de cette forme de
traitement contre l'infertilité, cela pourrait constituer une entrave
à son droit de participer à la vie de la société en
permettant la naissance d'un nouveau citoyen.
III. La personal autonomy
La notion de personal autonomy consiste
grossièrement en la possibilité pour une personne de disposer de
son corps librement. Appliquée à la gestation pour autrui, elle
autorise une femme à porter l'enfant d'autres personnes, à partir
du moment où cette dernière en manifeste la volonté.
Ce concept d'autonomie personnelle n'est pas parfaitement
inconnu en France, grâce à l'intervention de la Cour
européenne des droits de l'Homme dans Pretty c. Royaume-Uni
(2002)71(*).
Néanmoins, cette dernière est définie de manière
sensiblement différente par la Cour suprême des Etats-Unis, de
telle sorte que son application n'est pas la même.
En Europe, et donc en France, l'autonomie personnelles'adosse
au principe d'indisponibilité du corps humain, mais uniquement dans le
rapport de soi à soi,qui permet, entre autre, de s'adonner à des
pratiques dangereuses, au péril sa propre vie.
La Cour européenne des droits de l'Homme
considère en effet que le pouvoir de disposer de son corps est effectif,
mais uniquement à partir du moment où aucun tiers n'est
impliqué dans l'action avecson corps. Ainsi, par ce biais, les juges
cherchent à protéger non pas la personne contre elle-même,
mais plutôt contre autrui72(*).
Aux Etats-Unis, l'objectif principal de la personal
autonomy est le même, en ce sens que l'on souhaite offrir à
chacun la possibilité de disposer librement de son corps. Toutefois,
l'appréciation qui en est faite est tout à fait
différente. En effet, si en France l'autonomie personnelle est vue comme
l'exception, aux Etats-Unis elle constitue le principe.
Ceci se manifeste notamment par la protection qui est
accordée à ce concept (A). Il conviendra ensuite d'étudier
en quoi il peut s'avérer être un fondement pour la GPA (B).
A.
La protection accordée à lapersonal autonomy
La personal autonomyn'est pas une
notioninventée ex-nihilo. Elle provient en effet d'une
décision tranchée par la Cour suprême des Etats-Unis,
dansGriswold v. Connecticut (1965)73(*), où il était question du droit pour des
personnes de pouvoir bénéficier de contraceptifs, qui
étaient jusqu'alors interdits aux Etats-Unis.
Cette doctrine fut par la suite étayée par les
Justices, notamment dans Roe v. Wade (1973)74(*). Dans ce cas lié
à la possibilité pour une femme d'avorter, la Cour va permettre
l'érection de cette liberté fondamentale de disposer de son corps
en lui accordant une protection constitutionnelle, se basant sur une notion
alors bien connue en France et aux Etats-Unis, à savoir le droit
à la vie privée.De ce fait, la personal autonomyva
bénéficier d'unsoutien accru émanant de la Constitution
des Etats-Unis, et plus particulièrement du Quatorzième
amendement, au travers de la due process clause.
Pour rappel, l'objectif de cette clause est de protéger
le justiciable américain de toute tentative des pouvoirs publics
d'établir des lois qu'ils ne seraient pas habilités à
mettre en vigueur75(*).
La signification de cette protection accordée à
la personal autonomy permet de classer le droit de disposer de son
corps au rang de droit fondamental.
Cette précision a dès lors toute son importance,
d'autant plus lorsqu'on s'attache à préciser la portée de
cette notion.
B.
La personal autonomy : un fondement possible de la GPA
Lapersonal autonomy fonde donc le droit de disposer
librement de son corps. Cela permet de s'interroger sur la possibilité
que cette notion puisse servir de base à la maternité de
substitution. La question est d'autant plus vraisemblable lorsque l'on se
focalise sur les domaines qui ont vu naitre ce concept.
En effet, si la personal autonomy ne se limite pas
qu'à cela, son domaine de prédilection réside
majoritairement dans les droits à la reproduction (reproductive
rights). C'est ce que l'on a pu constater dans Griswold et
Roe, mais aussi dans d'autres affaires comme Eisenstadt v.
Baird (1972)76(*), ou encore Relf v.Weinberger (1974)77(*).
Néanmoins à l'heure actuelle, aucune
décision ne relate l'appartenance de la gestation pour autrui à
la liste des pratiques protégées par l'autonomie personnelle. Il
faut donc se montrer prudent quant à l'éventuelle protection
qu'elle serait amenée à lui offrir.
En effet, même si la personal autonomy
bénéficie d'une protection constitutionnelle, l'étendue de
cette liberté n'est pas absolue.
C'est en tout cas ce qu'a cherché à
démontrer la Cour suprême des Etats-Unis dans Bowers v.
Hardwick (1986)78(*),
en maintenant une loi géorgienne sur l'interdiction des rapports sexuels
entre les personnes de même sexe. Selon les Justices, si les
rapports sexuels ne doivent en aucun cas regarder le législateur, il
n'en va pas de même pour toutes les pratiques. La Cour a ainsi
considéré qu'aucun droit protégé par la
Constitution n'avait été bafoué ou même
menacé par cette loi, et qu'elle devait donc être maintenue.
Cependant, cette jurisprudence fut renversée par la
Cour en 2003, avec Lawrence v. Texas (2003)79(*). Dans cette affaire, les
Justices ont en effet considéré que la vision
précédente était obsolète et surtout trop
restrictive de liberté, en particulier du point de vue de
l'intimité des pratiques visées.
Cette évolution de la doctrine la personal
autonomy démontre que la Cour essaye d'évoluer au regard des
questions actuelles. Un tel état d'esprit permet de facto de
conjecturer que si la Cour suprême devait être confrontée
à un cas portant sur la gestation pour autrui, elle ne serait pas
hostile à user de cette notion pour fonder cette pratique.
Conclusion de la Partie I
Dans cette partie, sans grand étonnement, il a
été possible de constater que les deux droits étaient en
opposition quant à la manière de protéger le corps humain.
La France, disposant d'une législation paternaliste en
la matière, considère le principe d'indisponibilité du
corps humain comme étant essentiel à cet objectif de sauvegarde
du corps. C'est en tout cas ce que l'on peut remarquer à la vue du
dispositif législatif mis en place par la République
française, en particulier avec les lois bioéthiques.
Néanmoins, si l'on peut saluer cette visée
noble, les Etats-Unis ont démontré qu'il était possible de
faire vivre une société sans qu'un tel principe n'existe. Bien
sur, dans une telle configuration, la protection accordée au corps n'a
pas la même essence, et la conception que l'on a de ce dernier est
différente. C'est ce qui donne cette balance si particulière
entre le libéralisme, qui permet de passer un contrat sur son corps, et
la morale qui cherche à ralentir les avancées trop
extravagantes80(*).
A la lecture des différentes bribes de droit
américain qui ont été étudiées dans cette
première partie, que ce soit la jurisprudence ou les textes
législatifs, on a en effet la sensation de retrouver un certain
laissez-faire, avec l'impression que le pouvoir en place a cherché
à responsabiliser les américains, plutôt qu'à leur
imposer une protection, qui aurait de toute façon été
contraire aux due process clauses incluses dans les Cinquième
et Quatorzième Amendements.
Malgré l'existence de ces principes que tout tend
à opposer, nous allons voir dans la deuxième partie de ce
mémoire que les deux droits peuvent s'entendre, voire même
s'allier dans une certaine mesure.
Partie 2-Des fondements conciliables
Dans la première partie, il a été
possible de voir que le droit américain était en opposition nette
avec un fondement majeur du droit français, à savoir le principe
d'indisponibilité du corps humain.
Cette partie aura pour objectif de démontrer que
malgré ces divergences importantes, ces deux systèmes disposent
d'instruments qui peuvent les allier dans un but commun (I). Néanmoins,
cette entente s'avèrera être toute relative, dans la mesure
où des principes communs aux Etats-Unis et à la France disposent
d'une interprétation différente (II).
I. Les fondements communs aux deux nations
Si la gestation pour autrui est une pratique qui tend à
se répandre de plus en plus sur la surface du globe, il n'en reste pas
moins que cette dernière doit être considérée avec
une attention toute particulière. En effet, il faut en permanence garder
à l'esprit que cette méthode est essentiellement basée sur
des vies humaines, en particulier celle de la mère porteuse et des
enfants à naître. Pour beaucoup dans le monde, nombreuses sont les
tentations de céder à l'appât de l'argent
« facile », pour sortir d'une situation précaire en
seulement quelques mois. Nombreuses également sont les tentations de
personnes qui exploitent ce nouveau marché, au détriment des plus
démunis.
Nous l'aurons compris, la gestation pour autrui peut se
montrer sous une face plutôt sombre, qui laisse libre cours à de
nombreuses dérives, comme on a pu encore le voir récemment en
Inde81(*), où la
mère porteuse est uniquement considérée comme un outil
susceptible d'apporter du profit.
C'est pour lutter contre de tels débordements et contre
une instrumentalisation massive du corps, et a fortiori des personnes,
que les Etats-Unis et la France ont adopté des instruments tels que la
criminalisation de la traite des êtres humains (ou
humantrafficking) (A) ou l'interdiction de la vente de produits et
éléments du corps humain (B). A côté de cela, les
deux Etats mènent une autre forme de lutte au travers de la sauvegarde
des libertés de chacun (C).
A. La prohibition de la traite des êtres humains
Dans l'esprit collectif, la traite des êtres humains se
résume, de par son passé historique, à l'esclavage.
Néanmoins, cela est beaucoup plus vaste. En effet, quelques autres
pratiques sont à mentionner comme notamment l'exploitation sexuelle (en
particulier des femmes et des enfants), mais aussi le travail forcé, ou
encore le trafic d'organes82(*).
A première vue, on est en droit de se demander quels
sont les liens qu'entretient la gestation pour autrui avec la traite des
êtres humains. La réponse ne vient effectivement pas directement
à l'esprit pour une raison simple : c'est que nous ne connaissons
pas sur le sol de nos deux Etats respectifs une telle forme d'exploitation au
travers de cette pratique reproductive.
Ces dérives ont pu être empêchées
par différentes mesures prises par les Etats-Unis et la France en la
matière, qui se traduisent aussi bien par le droit international (1),
que par leurs droits nationauxrespectifs (2).
1. En droit
international
Afin d'éviter que la gestation pour autrui ne soit
pratiquée dans un cadre incertain laissant libre cours à
l'exploitation des femmes, les Etats-Unis et la France ont pris part à
des engagements internationaux communs.
Le protocole additionnel à la Convention des Nations
Unies contre la criminalité transnationale organisée visant
à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en
particulier des femmes et des enfants, plus communément appelé
premier protocole additionnel à la Convention de Palerme, est un texte
signé par 147 Etats, parmi lesquels figurent la France et les
Etats-Unis. Il fut ratifié par ces deux pays, respectivement les 29
octobre 2002 et 3 novembre 2005.
Ce protocole a trois objectifs majeurs83(*). Tout d'abord, et c'est sans
doute le plus important, il convient de lutter contre l'exploitation des
êtres humains, en particulier les femmes et les enfants. Ensuite,
l'idée est d'aider les victimes de telles pratiques. Enfin, le protocole
ajoute que pour une meilleure application de ses dispositions, il faut garantir
une coopération suffisante entre les Etats parties.
Dans notre cas, il conviendra de s'intéresser
principalement au premier de ces objectifs, étant donné que c'est
dans le cadre de la traite des êtres humains que l'on peut retrouver une
certaine forme de gestation pour autrui.
Pour démontrer cette allégation, et à
défaut de doctrine ou d'arrêts internationaux sur ce sujet exact,
il nous faudra interpréter la définition de la traite des
êtres humains donnée par le premier protocole additionnel à
la Convention de Palerme. Cette dernière est assez longue et peut se
lire comme suit : « L'expression «traite des
personnes» désigne le recrutement, le transport, le transfert,
l'hébergement ou l'accueil de personnes, par la menace de recours ou le
recours à la force ou à d'autres formes de contrainte, par
enlèvement, fraude, tromperie, abus d'autorité ou d'une situation
de vulnérabilité, ou par l'offre ou l'acceptation de paiements ou
d'avantages pour obtenir le consentement d'une personne ayant autorité
sur une autre aux fins d'exploitation. L'exploitation comprend, au minimum,
l'exploitation de la prostitution d'autrui ou d'autres formes d'exploitation
sexuelle, le travail ou les services forcés, l'esclavage ou les
pratiques analogues à l'esclavage, la servitude ou le
prélèvement d'organes »84(*).
De cette énumération, si tout n'est pas à
retenir en ce qui concerne la GPA, plusieurs éléments doivent
attirer notre attention.
C'est notamment le cas du recrutement de personnes par abus
d'une situation de vulnérabilité. En effet, dans la
majorité des Etats qui ont connu des débordements quant à
la pratique de la maternité de substitution, c'est la pauvreté
qui est utilisée comme argument pour recruter les mères
porteuses. On comprend dès lors que le consentement de ces femmes n'est
pas donné, mais extorqué, ce qui permet de considérer que
cela constitue bel et bien un abus,étant donné que ces
dernières, dans une situation financière moins
précaire85(*),
n'auraient surement pas donné leur accord pour participer à de
telles pratiques.
2. En droit
national
La France et les Etats-Unis, dans leur combat commun contre
l'exploitation humaine vis-à-vis de la GPA, ne se sont pas
contentés de signer le premier protocole additionnel à la
Convention de Palerme pour mener cette lutte.
En effet, les Etats-Unis disposaient déjà
d'une telle réglementation quelques mois avant la signature de ce texte
international, au travers du Victims of trafficking and violence protection
Act (28 octobre 2000). L'objectif de ce texte ne diffère pas de
celui inscrit dans le protocole susvisé, en ce sens qu'il consiste
également à protéger cette forme moderne d'esclavage
qu'est la traite des êtres humains86(*). La protection offerte ici est donc similaire
à celle du texte international.
Il faut toutefois noter quelques légères
différences, comme la distinction faite entre la traite d'être
humain et la traite sérieuse d'être humain, la deuxième
regroupant notamment l'exploitation sexuelle des femmes et des enfants de moins
de 18 ans87(*).
Pour la France, qui disposait déjà de nombreux
textes prohibant l'esclavage, il faudra attendre 2003 pour voir arriver dans
l'arsenal législatif, la loi du 18 mars 2003 sur la
sécurité intérieure. C'est cette dernière qui
donnera notamment naissance àl'article 225-4-1 du code pénal
portant sur la traite des êtres humains. Etant donné que ce texte
est mis en vigueur quelques mois seulement après la ratification du
premier protocole additionnel à la Convention de Palerme, les
définitions qui y sont donnés sont presque mots pour mots
identiques.
A côté de ces dispositions concernant la traite
des êtres humains, les deux systèmes ont établi une autre
forme de protection de la personne, au travers de l'interdiction de vendre des
produits issus du corps humain.
B. La prohibition de la vente des produits du corps
humain
La vente d'organe n'a pas de lien direct avec la GPA.
Pourtant, les deux sont concernés par un sujet similaire, à
savoir la protection du corps humain. Il a jusqu'ici été possible
de constater que la France et les Etats-Unis disposaient de points de vues et
d'outils juridiques différents afin d'assouvir cet objectif.
Néanmoins, cette opposition disparait en matière de vente de
produits et éléments du corps humain.
Ainsi, les deux Etats disposent de textes visant à
réprimer les conventions passées à titre onéreux
sur certains produits du corps (1), mais dans les deux droits cela reste
limité (2).
1. La
prohibition
Le droit américain traditionnel,
particulièrement libéral, ne voit aucune objection à ce
qu'un individu décide de commercialiser certaines parties de son corps,
conformément à la doctrine attachée au freedom of
contract88(*). C'est
pourquoi dès 1984, le Congrès des Etats-Unis a
décidé de remédier à ce problème en votant
le National Organ Transplantation Act(NOTA). Ce texte
particulièrement important fait figure d'exception dans le paysage
juridique américain, en veillant à interdire purement et
simplement la vente d'organes humains (humanorgans)89(*). Cette vision sera
confortée par un rapport du Sénat sur ce sujet90(*), où il sera
établi que « les différentes parties du corps
humain ne devraient pas être vues comme étant de la
marchandise »91(*).
Cette interdiction est d'autant plus sérieuse qu'elle
est assortie d'une sanction particulièrement lourde, à savoir une
peine pécuniaire de 50.000$ d'amende, pouvant être assortie d'une
peine privative de liberté allant jusqu'à 5 ans 92(*).
La France quant à elle ne fait pas défaut et
instaure dès 1976 ce qui s'avèrera être l'entrée en
matière d'un arsenal législatif à l'encontre de la vente
d'organes humains.
La loi du 22 décembre 1976, relative aux
prélèvements d'organes, interdisait déjà d'allouer
une contrepartie financière à tout prélèvement
d'organe93(*).
Ce texte va servir de base à la loi bioéthique
de 1994, qui va instaurer le principe d'extrapatrimonialité du corps
humain dans le code civil94(*). Celui-ci vise à interdire le monnayage des
éléments et produits du corps, sous peine de nullité
absolue de la convention entreprise.
Enfin, il faut préciser que si la France dispose de
sanctions civiles, elle prévoit également des sanctions
pénales incluses, dans un premier temps,à l'article 511-2 du code
pénal. Ce dernier régule la situation où un individu
réussirait à obtenir d'une autre personne qu'elle lui offre un de
ses organes, contre une rémunération quelconque. Un tel
comportement fait encourir à son auteur une peine de sept ans
d'emprisonnement, assortie de 100.000 euros d'amende.
Dans un second temps, d'autres sanctions pénales sont
prévues à l'article 511-4 du même code, mais cette fois-ci
dans le cas où l'auteur réussirait à obtenir des tissus,
des cellules ou des produits du corps humains. Les peines encourues sont ici
moins élevées que dans le cas précédent : cinq
ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.
Les deux Etats partagent donc un point de vue similaire sur la
protection à offrir au corps humain en la matière.
Néanmoins, ils s'accordent aussi sur le fait que cette dernière
n'est pas absolue.
2. Une prohibition
non absolue
En Common law, il est de coutume de distinguer deux types de
produits du corps humain, à savoir les produits
régénérables et les produits non
régénérables, les premiers pouvant être
commercialisés mais pas les seconds95(*).
Le droit américain ne fait pas défaut à
cette pratique et applique cette différenciation par le biais du
NOTA96(*), au travers de
la définition qu'il donne des « organes humains ».
En effet, selon ce texte, ces termes doivent être entendus comme
représentant « les reins, le foie, le coeur, le poumon, le
pancréas, la moelle osseuse, la cornée, les yeux, les os et la
peau »97(*).
Selon cette section du NOTA, cette énumération
vise les organes qui ne peuvent pas faire l'objet de commercialisation. De ce
fait, si l'on interprète cet article par sa réciproque, on peut
considérer que tout autre organe ne figurant pas sur cette
liste,répond aux règles propres au freedom of contract.
Ce sera par exemple le cas du sang, des cheveux, des dents, du lait maternel ou
encore du sperme.
La France ne connaît quant à elle pas exactement
cette distinction entre produits et éléments du corps humain
régénérables ou non-régénérables.
Néanmoins, elle retient que certains d'entres eux ne doivent pas
être soumis au principe d'extrapatrimonialité du corps humain. Ces
derniers sont listés exhaustivement à l'article R1211-49 du code
de la santé publique et concernent « les cheveux, les ongles,
les poils et les dents ».
On constate donc que la ligne directrice des deux Etats semble
aller dans le même sens. Néanmoins,il convient demitiger ce
propos. En effet, si d'un point de vue général ils appliquent des
règles de mêmes tendances, l'importance accordée à
la protection du corps concernant la vente des produits et
éléments de ce dernier n'est pas la même. Cela se
vérifie assez aisément vis à vis de la quantité de
textes en la matière. Sur ce point, la France dépasse de loin les
Etats-Unis, tant par le nombre de lois, que par la hauteur des sanctions. De
plus, si l'on s'attache à lire la partie du NOTA prohibant le commerce
d'organe, on se rend compte qu'elle est particulièrement courte en
comparaison des textes français.
Pour conclure cette partie, on peut donc dire que ces deux
pays partagent une vision commune de cette interdiction, mais qu'elle constitue
un principe chez l'un (la France), alors qu'elle revêt le
caractère d'exception chez l'autre (aux Etats-Unis).
C. Le droit à la liberté inclus dans la
Déclaration universelle des droits de l'Homme et du citoyen et le Bill
of Rights
Le droit à la liberté est un fondement important
de la gestation pour autrui aux Etats-Unis, étant entendu qu'une
personne doit pouvoir disposer de son corps librement98(*).
Cette notion de droit à la liberté est
particulièrement importante au sein de l'ensemble législatif
propre aux deux pays, étant donné qu'elle trouve ses fondements
dans deux textes à portée constitutionnelle, à savoir la
Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen (ou DDHC) pour la
France, et le Bill of Rights (ou Déclaration des Droits) pour les
Etats-Unis.
Afin d'étudier au mieux ce concept, il convient tout
d'abord de s'attacher à définir le droit à la
liberté en utilisant ces deux textes (1), avant de pouvoir les mettre en
pratique au travers d'un exemple de référence, à savoir la
légalisation de l'avortement (2).
1. Le droit
à la liberté, une notion à définir
Le droit à la liberté constitue une notion
inhérente à toute démocratie. C'est pourquoi elle est
proclamée et fermement protégée par les
Déclarations française et américaine des droits de
l'Homme99(*). Elle
constitue à cet effet une pierre angulaire dans l'ensemble
législatif de ces deux pays.
Pour comprendre la portée importante de ces textes, il
faut garder à l'esprit leur origine historique. En effet, la DDHC et le
Bill of Rights sont nés à quelques mois d'intervalle, en 1789,
tous deux suite à une Révolution. Ce mouvement avait un but
précis, à savoir réprimer l'oppression exercée par
le pouvoir en place, pour, à terme, disposer de libertés
sûres. Ceci explique qu'à l'heure actuelle, ces textes figurent
dans la Constitution pour les Etats-Unis, et dans le bloc de
constitutionnalité pour la France, par l'intermédiaire du
préambule de la Constitution de 1946.
Concernant la définition du droit à la
liberté, les deux textes restent relativement vagues afin de permettre
une application aussi large que possiblede la protection qu'ils contiennent.
Ainsi, le Quatorzième Amendement du Bill of Rights ne vient seulement
mentionner « qu'aucun Etat ne privera aucune personne de sa vie,
de sa liberté ou de sa propriété, sans due process of
law »100(*).
La DDHC de son côté, n'est qu'à peine plus
précise, en établissant dans son article 4 que « la
liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas aux
autres ». A côté de cette définition, on
trouve deux autres références à cette notion de
liberté dans ce texte. La première est visible à l'article
1er, qui dispose que « tous les êtres humains
naissent libre et égaux en droit ». La deuxième
s'inscrit dans le cadre de l'article 2, où les droits naturels de
l'Homme sont décrits comme étant « la
liberté, la sûreté et la résistance à
l'oppression »101(*).
Pour tenter d'approfondir la signification du droit à
la liberté, il faut de ce fait se rapporter aux différentes
décisions prises par les institutions américaines et
françaises.
Ainsi, la Cour suprême des Etats-Unis a établi
que l'Etat ne peut réduire les libertés d'une personne, car
celle-ci doit pouvoir « être libre de jouir de toutes ses
facultés », mais aussi « être libre
de les utiliser de toutes les manières légales qui
soient ». Elle ajoute que cela peut également consister
dans le fait de « vivre et travailler où on le
souhaite », ou encore « de gagner sa vie par tout
moyen légal »102(*).
Pour le cas de la France, le Conseil Constitutionnel n'offre
aucune précision supplémentaire quant au sens à donner au
droit à la liberté. Toutefois, ce dernier vient officialiser ses
fondements, en mentionnanttout d'abord l'article 2103(*), puisles articles
1eret 4 de la DDHC104(*). Cette décision, bien que vierge de toute
définition supplémentaire, a tout de même une portée
importante, en ce sens qu'elle vient réaffirmer la protection
constitutionnelle offerte à la liberté par la DDHC.
Dès lors, grâce à ces informations sur ces
textes de référence, il est possible de s'attacher à
étudier les interprétations qui en ont été faite,
aussi bien par la Cour suprême des Etats-Unis, que par le Conseil
constitutionnel.
2. Une mise en
pratique des textes : l'exemple de l'avortement
Etant donné que ces textes sont particulièrement
anciens, il est important d'étudier leur interprétation
contemporaine afin de comprendre la manière dont ils s'appliquent.
A défaut de disposer de jurisprudence traitant
directement de la gestation pour autrui sous l'angle du droit à la
liberté, il faudra recourir à un exemple qui lui est proche,
à savoir l'avortement. Cette pratique consiste à offrir la
possibilité à une femme de bénéficier d'une aide
médicale afin de mettre fin à sa grossesse, et ceux avant
l'écoulement d'un certain délai pouvant varier suivant les Etats.
Bien entendu, cette pratique est à première vue
extrêmement différente de la GPA. Néanmoins, en
approfondissant un peu, il est possible de s'apercevoir qu'il existe certaines
caractéristiques communes. Ainsi, les deux pratiquesont un lien avec la
protection du corps humain.De même, elles ont trait à la
liberté pour une femme de pouvoir disposer de son corps. Enfin, la
question de la légalisation de ces deux procédés s'est
posée sur les sols français et américain.
Le premier des deux pays à avoir été
confronté à la question de savoir si une femme pouvait avorter
est les Etats-Unis. Ainsi, en 1973, la Cour suprême fut saisie de la
très célèbre affaire Roe v. Wade, dans laquelle
une loi texane sur l'avortement fut mise en cause, en ce qu'elle
prévoyait des sanctions criminelles à l'égard de cette
pratique, à l'exception toutefois des cas où elle relevait d'une
prescription médicale, établie dans le cadre d'une grossesse
à risque.
A cette occasion, plusieurs questions de droit ont
été soumises à la Cour suprême des Etats-Unis. La
première concernait par exemple la validité de la loi texane sur
l'avortement à l'égard de la Constitution. L'interrogation qui
s'avèrera toutefois être la plus importante concernait la due
process clause du Quatorzième Amendement, et plus
précisément la possibilité d'étendre le right
of privacy au corps humain, afin d'admettre la validité de
l'avortement.
La Cour suprême va alors décider d'invalider
cette loi texane et va par ce biais, rendre le recours à cette pratique
légal.
Pour fonder cette liberté de pouvoir avorter, et plus
généralement de pouvoir disposer de son corps, les
Justicesvont procéder à un raisonnement assez technique.
En effet pour commencer, ces derniers partent de la due process
clauseduQuatorzième Amendement, qui, pour rappel, vise à
limiter les pouvoirs de l'Etat en particulier vis à vis de
« la vie d'une personne, de sa liberté, ou de ses
biens ». En utilisant la notion de liberté incluse dans
cette clause, la Cour va déciderd'étendre le right of
privacy au corps humain. Grâce à ce procédé, le
juge Blackmumexplique dans son opinion au nom de la Cour, que la liberté
de pouvoir disposer de son corps bénéficie de la due process
clause, et qu'elle ne peut plus,dès lors, subir aucune immixtion
injustifiée de l'Etat.
Cette manipulation juridique, la France ne la reprendra pas
comme telle. Néanmoins, rien n'empêche de penser qu'elle se soit
inspirée de la solution adoptée par la Cour suprême des
Etats-Unis dans Roe. En effet, le Conseil constitutionnel fut saisi
d'uneproblématique similaire seulement deux ans plus tard, ce qui
donnera d'ailleurs lieu à la décision du 15 janvier 1975, dite
IVG I.
Le rôle du Conseil fût ici de déterminer si
la loi portant sur l'interruption volontaire de grossesse (ou loi Veil)
était bien conforme à la Constitution. La réponse à
cette question se trouvera être favorable105(*).
Pour arriver à ce résultat, le Conseil
constitutionnel utilise un raisonnement moins complexe que celui de la Cour
suprême des Etats-Unis. En effet, les membres du Conseil vont appliquer
la DDHC à l'interruption volontaire de grossesse, et plus
particulièrement son article 2106(*). Ce dernier dispose que « le but de
toute association politique est la conservation des droits naturels et
imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la liberté, la
propriété, la sûreté, et la résistance
à l'oppression ».
Ainsi, de la même manière qu'aux Etats-Unis, le
Conseil constitutionnel va utiliser le recours à la liberté pour
justifier la possibilité offerte à une femme de pouvoir avorter.
Néanmoins, un point particulier de cette
décision doit être souligné. En effet, on peut noter
qu'ici, seul l'article 2 de la DDHC est cité, excluant de facto
les articles 1 et 4, au sein desquels la formule consacrée à la
liberté est sans doute jugée trop large107(*). Ceci démontre la
volonté des conseillers constitutionnels de jouer la carte de la
prudence sur une affaire pouvant s'avérer être lourde de
conséquences108(*).
Dans la mesure où l'avortement est proche de la GPA
selon les termes envisagés plus haut, il est possible de conjecturer que
la Cour suprême des Etats-Unis réagirait de manière
similaire à l'égard de la maternité de substitution. En
France, le doute est de mise, dans la mesure où à l'heure
actuelle, d'autres principes empêcheraient le Conseil Constitutionnel de
se prononcer favorablement sur cette pratique, bien que la liberté
puisse s'avérer être un fondement tout à fait
admissible.
La France et les Etats-Unis disposent donc de principes
communs disposant d'une interprétation similaire. Néanmoins,
certains ne bénéficient pas de cette apparente symbiose.
II. Les principes communs mais disposant
d'une interprétation différente
Si les Etats-Unis et la France dénombrent des principes
communs au sein de leurs systèmes respectifs, tous en revanche ne
bénéficient pas de la même interprétation. C'est
notamment le cas de deux concepts majeurs, le droit au respect de la vie
privée (A) et la dignité humain (B).
A. Le droit au respect de la vie privée / Right of
privacy
Que l'on se trouve aux Etats-Unis ou en France, le respect de
la vie privée constitue une ultime barrière concernant
l'intimité des individus. C'est pourquoi ces deux systèmes
prévoient une défense particulièrement accrue, en vue de
faire respecter ce droit.
En matière de GPA, ce droit a une importance
particulière, en ce sens qu'il peut contribuer à fonder son
existence même. En effet, bien que le right of privacy dispose
de bases communes avec la France (1), il existe de nombreuses divergences dans
l'interprétation qu'en font les Cours américaines, qui lui donne
une portée plus large (2).
1. Le droit au
respect de la vie privée : un droit fondamental commun aux deux
Etats
Le droit au respect de la vie privée vise à
protéger la vie privée (b), et dispose également en France
et aux Etats-Unis d'une protection constitutionnelle (a).
a. Le droit à la vie privée : du
néant à la protection constitutionnelle
Les Constitutions française et américaine ne
font figurer nul part explicitement le droit au respect de la vie
privée, et pourtant il bénéficie de leur protection. Cela
découle d'une évolution lente mais certaine de ce principe au
sein de ces deux sociétés.
C'est tout d'abord Outre-Atlantique que l'existence de ce
droit fut revendiquée, en particulier avec un article109(*) publié par Warren et
Brandeis, en 1890. A cette occasion, ces deux avocats lancent un appel aux
juges américains, considérant qu'il règne un réel
vide juridique en matière de protection de la vie privée. Cette
considération semblait d'autant plus importante que cette époque
vit apparaître de nombreuses techniques nouvelles, à l'instar de
la photographie, ou encore de la presse à scandale, qui pouvaient
s'avérer être de réelles sources de dommages pour les
individus110(*).
Il faudra néanmoins attendre quelques années
avant de voir des Cours se montrer favorables à cette doctrine. Parmi
elles figure ainsi la Cour suprême de Géorgie, qui dès 1905
va décider de sanctionner une compagnie d'assurance, cette
dernière ayant utilisé la photo d'un individu pour une campagne
de publicité, sans son accord111(*).
Cette première avancée emboitera le pas de
plusieurs autres décisions, visant à mettre en place une sanction
(tort) concernant les atteintes portées à la vie
privée. Une par une, ces solutions apportées aux
différentes affaires vont contribuer à faire évoluer le
droit relatif à la vie privée.
Cependant, il faut préciser qu'à ce stade, le
right of privacy ne dispose pas encore d'existence autonome. En effet,
la Common Law fonctionne de manière telle qu'il est impossible de
créer un droit sans qu'il ne se rattache à un corps juridique
déjà existant112(*). C'est pourquoi Warren et Brandeis ont établi
le right of privacy en arguant qu'il était issu d'une
évolution des droits afférant à la
propriété113(*).
Ce n'est qu'en 1965 que le droit à la vie privée
prendra son indépendance, grâce à Griswold v.
Connecticut114(*),
jugée par la Cour suprême des Etats-Unis. Dans cette affaire
où il était question d'une loi interdisant l'utilisation de
contraceptifs, les juges ont été confrontés à un
dilemme important. Soit ces derniers revenaient à une jurisprudence
lochnérienne en utilisant le recours au substantive due
processqui était réfuté depuis 1937, soit ils
utilisaient un procédé innovant au travers du right of
privacy. Les Justices ont opté pour la modernité,
offrant ainsi une protection constitutionnelle à ce droit.
Aujourd'hui, la doctrine américaine s'accorde sur
plusieurs émanations possibles du right of privacy dans le Bill
of Rights. On trouve parmi elles le Troisième Amendement
(hébergement de troupes dans un foyer privé), le Quatrième
Amendement (recherches et saisies déraisonnables), le Cinquième
Amendement (droit de ne pas s'incriminer soi-même), ou encore le
Quatorzième Amendement, sous l'angle de la liberté et de la
due process clause115(*).
En France, le cheminement vers l'acquisition du droit au
respect de la vie privée débutera plus tardivement, mais sera
plus aisé.
La première amorce à l'établissement de
ce droit résidera dans l'adhésion par la France à la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948, et plus
particulièrement à son article 12116(*). Néanmoins, la
première apparition de son équivalent français
n'interviendra qu'une vingtaine d'années plus tard, avec la mise en
vigueur de la loi du 17 juillet 1970, instaurant l'article 9 du Code civil, qui
dispose dans son alinéa 1er que « chacun a
droit au respect de sa vie privée ».
Si ce droit bénéficie à ce stade d'une
protection sûre de la loi française, il ne peut encore revendiquer
aucune défense émanant de la Constitution. Le Conseil
constitutionnel, conscient de l'importance fondamentale du respect de la vie
privée,va résoudre ce problème grâce à deux
décisions importantes. Dans la première, du 12 janvier 1977, le
Conseil ne fait qu'une brève référence à la
liberté individuelle, en tant que « principe
fondamental»117(*), sans toutefois mentionner explicitement la vie
privée. La deuxième, rendue le29 décembre 1983, se montre
plus explicite. En effet, le Conseil rattache ici le droit au respect de la vie
privée à l'article 2 de la DDHC118(*).
Ainsi, si la première décision pouvait laisser
place au doute, la seconde vient complètement l'effacer. Il est de ce
fait certain que le droit au respect de la vie privée
bénéficie d'une protection constitutionnelle en France, d'autant
plus que de nombreuses décisions de cette institution feront suite, en
allant dans ce sens.
Le respect de la vie privé est donc
considéré comme fondamental par les droits français et
américain. Néanmoins, son contenu reste à
préciser.
b. Un principe visant à protéger
l'intimité
Si le droit au respect de la vie privée
bénéficie d'une protection constitutionnelle dans les deux pays,
il faut encore savoir de quoi il résulte.
Si l'on part du droit français, on se rend compte
qu'aucun des textes mentionnés ne vise avec précision le champ
d'application de ce droit fondamental. Néanmoins, la jurisprudence
contribue à donner des pistes afin de pouvoir le délimiter.
Plusieurs composantes de la vie privée peuvent ainsi
être établies.
On peut bien sûr citer le droit à l'image. La
Cour de cassation a ainsi jugé qu'il était interdit de se servir
du cliché d'une personne, vivante ou morte, sans autorisation de cette
dernière, ou d'un individu ayant le pouvoir de donner cette autorisation
à sa place119(*).
De même, ce droit peut couvrir le corps humain, mais
uniquement dans le cadre des informations portant sur la santé d'un
individu. Il est de ce fait prohibé de divulguer des renseignements
protégés par le secret médical à un tiers, si le
patient concerné refuse de lever ce secret. Cela porterait atteinte
à sa vie privée120(*).
Le domicile est également protégé par ce
droit. Le Cour de cassation considère en effet qu'un bailleur faisant
visiter l'appartement de son locataire sans autorisation préalable de ce
dernier, porte atteinte à sa vie privée121(*).
Néanmoins, la plus grosse composante réside
surement dans le droit à l'intimité. En effet, ce dernier se
subdivise en plusieurs éléments. Parmi eux se trouvent ainsi la
vie sentimentale ou sexuelle. Là, la Cour de cassation a jugé
qu'il relevait de l'atteinte à la vie privée la divulgation des
relations entretenues entre un sportif reconnu et une femme122(*).
Dans cette même optique, on peut encore citer la
protection de la vie familiale. Ainsi, rendre publiques des informations
concernant la maternité d'une personne n'est pas un acte respectueux de
la vie privée123(*).
Aux Etats-Unis, étant donné que le right of
privacy ne figure pas explicitement dans la Constitution, il ne dispose
d'aucune définition légale. Néanmoins, la doctrine
américaine a admis qu'il pouvait être rattaché à
plusieurs Amendements du Bill of Rights. A cela, il ne faut pas oublier de
mentionner que la Cour suprême a joué un certain rôle dans
l'ancrage de ce droit Outre-Atlantique.
Pour commencer, il faut partir d'un constat simple, à
savoir que les droits français et américains se rejoignent quant
à l'application du droit au respect de la vie privée.
Ainsi, le Quatrième Amendement garantie par exemple une
protection du domicile sous le coup de right of privacy. La Cour
suprême des Etats-Unis, dans Mapp v. Ohio124(*), a en effet
déterminé que devaient être sanctionnées des saisies
et recherches considérées comme étant
déraisonnables. Le juge Clark explique en effet que de tels agissement
constituent une intrusion injustifiée de l'Etat dans la vie des
individus, et que cela constitue donc une atteinte à leur vie
privée, en référence à la due process
clause du Quatorzième Amendement.
La Cour suprême entend également protéger
la famille en ce qu'elle a, dans Moore v. East Cleveland125(*), déclaré
inconstitutionnelle une loi de Cleveland qui visait à n'autoriser que
les membres d'une famille tout au plus à vivre dans une maison. La
définition qu'il fallait entendre par ce terme consistait en
« une famille nucléaire ordinaire », soit
les parents et leurs enfants. En l'espèce, Mrs Moore était
grand-mère de deux petits-enfants auprès desquels elle vivait,
accompagnée de deux de ses fils. Les juges Powell et Stevens vont ainsi
expliquer dans leurs avis qu'une telle loi est contraire au Quatorzième
Amendement, en ce qu'elle n'intervient ni dans le cadre « de la
santé, de la sécurité ou des moeurs publiques, ni dans
celui du bien-être commun ».
Pour finir, on peut citer un document apparu dans les
années 1960, sous la plume du professeur William P. Prosser126(*), à savoir le
Restatement. Ce dernier va établir, en se
référant aux différentes décisions prises par des
Cours de différents degrés à travers les Etats-Unis,
quatre classes de torts inhérents à la vie
privée. Parmi elles, figurent notamment le fait de s'approprier l'image
d'autrui ou encore la révélation d'informations manifestement
privées ou dégradantes127(*).
De fait, il est aisé de constater que le right of
privacyaméricain et le droit au respect de la vie privée
français recouvrent un champ similaire. Néanmoins, ce n'est pas
sur ce terrain que l'un ou l'autre peut servir de fondement à la
gestation pour autrui. C'est pourquoi les Etats-Unis, et plus
particulièrement la Cour suprême ont décidé une
application plus large de ce droit.
2. Le right of
privacy : un champ d'application plus large que son équivalent
français
Si l'interprétation du right of privacy
émanant de la Cour suprême est similaire à celle de la
France, elle ne dispose pour autant pas des mêmes limites.
En effet, la conception de la vie privée aux Etats-Unis
est plus large, ce qui a donné lieu à de nombreuses affaires sur
des thèmes assez diversifiés. C'est ainsi par exemple que la Cour
suprême a jugé dans Roe v. Wade, que l'avortement, en
plus de constituer une liberté de la femme de disposer de son corps,
devait entrer dans le cadre du right of privacy. De même, elle a
établi dans Meyer v. Nebraska128(*) que l'Etat ne pouvait dicter la manière
dont un parent ou un enseignant devait éduquer un enfant, sans quoi cela
porterait atteinte à sa vie privée.
Néanmoins, parmi ces thèmes abordés par
la Cour suprême, il en est un qui intéresse
particulièrement la gestation pour autrui, à savoir le droit
fondamental de procréer.
Sous cette forme de protection, on ne se place
néanmoins plus du côté de la mère porteuse, mais de
celui des parents d'intention. En effet, le droit américain
préfère protéger la génitrice sur le terrain des
libertés et de la libre disposition de son corps.
Le droit de procréer a intéressé la Cour
suprême, en ce que beaucoup d'affaires sur ce sujet lui ont
été soumises. La première affaire qui érigera la
procréation au rang de droit fondamental sera Skinner v.
Oklahoma129(*).
C'est précisément dans ce cas que le juge Douglas énoncera
dans son opinion que « le mariage et la procréation sont
fondamentaux pour l'existence et la survie de la race ».
Skinner sera suivi par de nombreuses affaires portant
sur cette question. Parmi elles figure notamment, Eisenstadt v.
Baird130(*).
Ici, la Cour fut exposée à un problème en
lien avec une loi du Massachussetts qui criminalisait la distribution de
contraceptifs à des couples non-mariés. Pour établir sa
décision, les Justices vont dans un premier temps se baser sur
une affaire antérieurement tranchée par la Cour et reprenant des
faits similaires, à savoir Griswold v. Connecticut131(*). Ainsi, le juge Brennan,
rejoint par les juges Douglas, Stewart et Marshall, rappelle que le right
of privacy est « le droit pour un individu, marié ou
célibataire, d'être libre de toute intrusion injustifiée du
gouvernement au sein d'affaires qui affectent si fondamentalement une personne,
comme par exemple la décision de porter ou d'engendrer un
enfant ».
Cette décision vient donc préciser l'état
du droit de procréer, érigé au rang de droit fondamental
avec Skinner. Néanmoins, au vu de cette définition, un
problème de taille se fait sentir. En effet, elle ne concerne que la
procréation par voie naturelle, ou ce que l'on appellerait en anglais la
coital reproduction. Cela ne peut donc en aucun cas fonder le recours
à la GPA pour un couple infertile, qui nécessiterait
l'intervention d'une FIV.
Ce problème fut notamment soulevé par la
Professeure Janet L. Dolgin132(*), qui affirme que le droit de se reproduire de
manière artificielle doit être déduit du droit de se
reproduire. Pour ce faire, elle expose un argument qui fût avancé
dans l'affaire Baby M, basé sur le principe américain de
protection égale de la loi (equal protection of law). En
l'occurrence, il s'agissait de dire que la gestation pour autrui revêtait
la seule manière possible pour des parents infertiles de pouvoir avoir
leurs propres enfants. De ce fait, l'Etat qui empêcherait ces personnes
de bénéficier d'une telle procédure, enfreindrait le
principe d'equal protection of law, dans la mesure où des
parents fertiles seraient, eux, protégés contre les intrusions de
l'Etat, alors que des parents infertiles ne le seraient pas.
Pour conclure sur le droit au respect de la vie privée,
on peut dire que le droit américain offre plus de possibilité que
le droit français, en ce sens que par son champ d'application large, il
permet de trouver un fondement à la gestation pour autrui.
Néanmoins, il faut souligner que malgré cela, ce fondement,
unique de surcroit, reste fragile. En effet, l'argument soulevé dans
Baby M, ne permet pas à lui seul d'obtenir la garde de l'enfant
en cas de conflit, comme ce fut le cas dans cette affaire. Il ne peut de ce
fait que justifier le recours à la maternité de substitution en
tant que droit fondamental. C'est ce qui fut soulevé dans J.R v.
Utah133(*),
jugé par la Cour de district de l'Utah.
A cela, il faut ajouter que si le droit français
applique le droit au respect de la vie privée dans un champ restrictif,
ce n'est pas forcément la façon de faire de la Cour
européenne des droits de l'Homme, dont la jurisprudence est applicable
sur le territoire français. En effet, cette dernière
interprète l'article 8 de la Convention européenne des droits de
l'Homme dans un style beaucoup plus libéral, élargissant de ce
fait le champ d'application de la protection accordée à la vie
privée. On peut citer à ce titre les affaires Mennesson
et Labassée c. France, du 26 juin 2014134(*), où la Cour avait
jugé que le refus de la France de transcrire les actes de naissance des
enfants nés de GPA à l'étranger constituait une violation
de l'article 8 de la CEDH, et donc du droit au respect de la vie privée
de ces enfants.
B. La dignité humaine
La dignité humaine correspond à une notion
particulièrement vaste, en ce qu'elle s'applique à de nombreuses
disciplines, telles que la religion, la philosophie et bien entendu le droit.
S'il est relativement difficile de lui donner une
définition précise, qui dans tous les cas ne ferait que
restreindre son champ d'action, il est plus aisé de déterminer
son but. En effet, la dignité humaine a pour noble vocation de maintenir
et protéger les valeurs propres à la sauvegarde de
l'humanité135(*).
Ainsi ce principe, qui constitue l'essence des
« sociétés occidentales modernes »136(*), s'inscrit aussi bien dans
le système français qu'américain.
Néanmoins, l'importance et la considération qui
lui sont apportées n'arborent pas la même force. En effet, les
Etats-Unis semblent moins empruntes à donner une place
prépondérante à ce principe, contrairement à la
France.
Or, ceci s'avère particulièrement
intéressant du point de vue de la gestation pour autrui. En effet, alors
qu'en France des personnalités politiques comme Alain Juppé
revendiquent que « la GPA est une atteinte à la dignité
humaine »137(*), les Etats-Unis l'ont quant à eux
légalisé. Tout ce débat pourrait donc se recentrer autour
de la question de la dignité de l'être humain.
Pour comprendre la divergence de ces deux Etats quant à
la place à donner à cette notion, il faut tout d'abord s'attacher
à étudier ses fondements dans leur système respectif (1),
avant de se focaliser sur l'impact de la dignité sur la maternité
de substitution (2).
1. Les fondements
et la portée
Il existe des fondements internationaux (a), applicables
communément sur le sol des deux Etats, et des fondements nationaux de la
dignité humaine (b).
a. Les fondements internationaux
La France et les Etats-Unis sont signataires de deux textes
internationaux majeurs faisant figurer la dignité humaine.
Le premier correspond à la Charte des Nations Unies,
adoptée le 26 juin 1945. C'est plus particulièrement à son
Préambule qu'il faut s'attacher, en ce qu'il exprime la
résolution des Etats membres à faire appliquer les droits
fondamentaux de l'Homme, et ceux notamment dans la
« dignité ».
Le deuxième concerne quant à lui la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948 (DUDH), qui fait
figurer dans son article 1er que « tous les
êtres humains naissent libres et égaux, en dignité et en
droits ».
Cette déclaration a également donné
naissance quelques années plus tard à deux pactes, dont le
Préambule fait figurer ce concept. Il s'agit respectivement du Pacte
international sur les droits civils et politiques, et du Pacte international
sur les droits économiques et sociaux, de 1966.
Ces deux textes, adoptés au lendemain de la guerre, ne
sont pas le fruit du hasard. Ils manifestent la volonté limpide et sans
faille des Etats parties de ne pas revoir se perpétrer les horreurs des
années précédentes.
Néanmoins, il faut noter l'absence totale de
précision quant à la notion de dignité inscrite aussi bien
dans la Charte des Nations-Unies, que dans la DUDH. Ceci s'avère
être une faille plus ou moins considérable, dans la mesure
où chacun des Etats parties pourra appliquer sa propre conception de ce
qu'est la dignité de l'être humain.
b. Les fondements nationaux
Les deux pays ont chacun leur propre appréciation
concernant la dignité humaine.
Du côtéde la France,
cette notion est fondamentale, en ce sens qu'elle est la source de nombreux
autres droits de même nature138(*) visant à la protection de l'être
humain. Pourtant, elle ne fut édictée que tardivement au sein de
l'arsenal législatif français. En effet, si les premières
traces de la dignité humaine apparaissent lors de l'adhésion de
la France à la Charte des Nations-Unies et à la DUDH, il faudra
néanmoins attendre 1994 pour qu'elle soit réellement
consacrée par le législateur139(*), au travers des lois dites
bioéthiques140(*).
C'est également à cette occasion qu'est
intervenu un événement majeur en droit français, à
savoir la consécration de la dignité des êtres humains au
rang de droit fondamental. En effet, le Conseil constitutionnel, par une
décision du 27 juillet 1994, a reconnu que cette notion devait
bénéficier de la protection de la Constitution. Pour ce faire,
les conseillers ont décidé de rapprocher le principe de
dignité au premier aliéna du Préambule de la Constitution
de 1946141(*), en ce
qu'il renvoie entre autre aux expériences inhumaines
perpétrées par les nazis pendant la guerre142(*).
Si cette décision constitue un grand pas dans
l'avancée de la protection accordée à la dignité
humaine, la France ne s'arrête pour autant pas là. En effet, parmi
les lois bioéthiques, il en est une qui est consacrée à la
protection du corps humain143(*). Cette dernière aura pour effet notamment de
créer un nouveau chapitre dans le Code civil, dans lequel vont figurer
notamment deux articles importants à ce sujet, à savoir les 16 et
16-9 du code civil.
Le premier vient protéger la personne humaine, en
réaffirmant l'interdiction des atteintes faites à sa
dignité. Le deuxième fait quant à lui de ce principe une
disposition d'ordre public, qui lui offre de facto une protection
supérieure, la dérogation étant rendue impossible.
A cela, il faut ajouter la protection incluse à
l'article 16-1-1 du Code civil, qui étend le champ d'application de la
dignité au corps d'une personne décédée, cette
disposition étant également d'ordre public.
Dans le cas des Etats-Unis, les premières
référencesà la dignité humaine interviennent plus
tôt qu'en France, et avant même la signature des deux textes
internationaux précités. En effet, dès 1942,
différents juges de la Cour suprême invoquent ce principe dans
leurs opinions publiées à l'occasion de quelques
décisions. Dans cette optique, le juge Frankfurter fut le
précurseur de l'établissement de ce droit, lorsqu'il expliquera
dans son dissentsurGlasser v. UnitedStates144(*), que l'ensemble des
garanties incluses dans le Bill of Rights étaient « des
clauses de sauvegarde de la liberté et de la
dignité ».
La même année, le juge Jackson fera
également référence à ce principe dans le
dissent qu'il publie à l'occasion de Skinner v.
Oklahoma. Ici, il rappelle que les pouvoirs de l'Etat sont limités,
de façon telle qu'il ne peut exercer d'expériences biologiques au
détriment de la « dignité d'une
minorité ».
Il faudra toutefois attendre 1952 et Rochin v.
California pour que la Cour suprême fasse mention de la
dignité humaine dans une de ses décisions. Dans cette affaire
ayant trait à une saisie déraisonnable, les Justices
estiment que tous les moyens ne sont pas bons pour recueillir des preuves lors
d'une enquête, en ce qu'elles ne doivent pas être
« brutales ni choquantes à l'encontre de la dignité
humaine ». Pour fonder cet arrêt, la Cour se basera sur
les Quatrième, Cinquième et Quatorzième Amendements,
relatifs notamment aux perquisitions et saisies déraisonnables, ainsi
qu'au due process of law145(*).
La Cour suprême rapprochera également cette
notion du Huitième Amendement dans Trop v. Dulles146(*). A cette occasion, le
Chief Justice Warren, assistés par les juges Black, Douglas et
Whittaker, déclarera que le fondement même de cette disposition
« n'est rien de moins que la dignité
humaine ».
Par la suite, plusieurs autres arrêts de la Cour
suprême confirmeront cette tendance, et ce jusqu'à ce
jour147(*), faisant de
cette notion un droit protégé par la Constitution
américaine.
Ceci permet à première vue de penser que les
Etats-Unis considèrent la dignité humaine comme un principe
central, à l'instar de la France. La réalité reste
néanmoins plus mitigée, et ceci pour principalement deux raisons.
La première concerne la matière même des
arrêts. En effet, la majorité de la jurisprudence de la Cour
suprême faisant référence à la dignité
humaine de manière autonome, porte sur des affaires
pénales148(*).
Ceci ne correspond donc pas à une application
généralisée du principe.
La deuxième cause concerne quant à elle
l'utilisation réduite de cette notion, et par là-même sa
portée. Ainsi, en dehors de la matière criminelle, la Cour
suprême n'invoque pas la dignité humaine en tant que principe
fondamental, mais comme une notion complémentaire149(*). En d'autres termes, elle
n'existerait qu'en étant apposée aux côtés d'un
autre droit.
La Cour suprêmetend en effet à confirmer cette
orientation de plusieurs manières. La première réside dans
les fondements mêmes qu'elle donne à la dignité humaine,
à savoir les Cinquième et Quatorzième Amendements, qui
sont également ceux du right of privacy150(*).On peut trouver une
illustration de cela dans PlannedParenthood v. Casey151(*), où le juge
Brennanjuxtapose le droit à l'autonomie de la personne découlant
du right of privacy et la dignité humaine.
Cette tendance de la Cour se reflète également
au travers de l'utilisation d'un autre droit, à savoir celui à
l'égale protection de la loi (equal protection of law). Si au
départ la juxtaposition de ce droit à la dignité humaine
n'a pas su convaincre les juges de la Cour suprême, leur avis a
changé au cours d'un long cheminement s'échelonnant de 1944
à 2000. C'est en effet au cours de cette année que les
Justices ont eu à se prononcer sur Rice v.
Cayetano152(*).
Dans cette affaire où il était question notamment de
l'interprétation de l'interdiction d'utilisation de la
« race » comme d'un critère de classement, la Cour
indique qu'une telle pratique « rabaisse la dignité et la
valeur d'une personne et son droit à être traitée selon ses
qualités intrinsèques et ses mérites, non selon ses
ancêtres ».
Après ces constatations, et en comparaison avec le
droit français, il est relativement aisé de cerner la
différence qui règne entre les deux systèmes. En effet, la
dignité humaine, si elle existe bel et bien en France et aux Etats-Unis,
ne dispose pas de la même puissance Outre-Atlantique, en ce qu'elle n'est
pas appliquée de manière autonome, en dehors de l'adoucissement
de la répression pénale.
De fait, son champ d'application est grandement réduit
par rapport à la France, pour qui ce principe apparaît comme
étant l'un des plus importants, en ce qu'il vient fonder plusieurs
grandes notions propres au droit français, comme notamment la protection
du corps humain.
Ainsi, il n'est pas exclu de penser que cette
différence puisse avoir des conséquences quant à la
situation de la gestation pour autrui dans chacun de ces deux pays.
2. L'impact de la
dignité humaine sur la légalisation de la GPA
Les relations qu'entretient la gestation pour autrui avec la
dignité humaine sont particulièrement complexes. En effet,
plusieurs groupements européens affirment que cette pratique serait
contraire au principe même de dignité153(*). Dans cette idée, ils
avancent notamment qu'au delà de la dignité de la mère
porteuse, c'est celle de l'enfant qui est bafouée, en ce que ses
intérêts ne sont pas respectés dans une telle relation
triangulaire154(*).
Sur cette même question, la doctrine américaine
reste particulièrement silencieuse, au même titre que sur la
dignité humaine en général.
Les différences flagrantes qui règnent entre les
deux systèmes, tant en matière de fondements que de
portée, pourraient ainsi amener à penser que c'est l'une des
causes majeures caractérisant la différence des
législations en matière de gestation pour autrui. En effet, ce
principe, central en France en matière de protection du corps humain,
fonderait légitimement un refus de légiférer en
matière de maternité de substitution. A l'inverse, il paraitrait
logique que les Etats-Unis admettent la GPA dans la mesure où la
dignité humaine bénéficie d'une puissance diminuée,
étant donné qu'elle n'existe pas de manière parfaitement
autonome.
Néanmoins, trois éléments
importantsmettent à mal ce raisonnement, notamment du côté
français. En effet, dès les premières discussions sur la
possible légalisation de la GPA, le Conseil d'Etat a publié un
rapport155(*) dans
lequel figurait un chapitre comportant les principes fondamentaux liés
à la bioéthique. Aucune mention ne sera faite de la
dignité humaine dans ce texte, et a fortiori de la
contrariété de ce principe avec cette pratique.
Dans le même esprit, la Cour de cassation ne fera aucune
référence à la dignité dans son fameux arrêt
d'assemblée plénière du 31 mai 1991, qui vise pour rappel
à prohiber les pratiques liées à la gestation pour autrui.
Enfin, le Sénat apporte l'ultime argument allant
à l'encontre de ce raisonnement, dans une réflexion qu'il a
publié sur la gestation pour autrui. Ce dernier effectue alors une
distinction entre d'une part la GPA pratiquée à titre
onéreux, qui instrumentaliserait le corps de la femme, et d'autre part
celle pratiquée à titre gratuit, qui ne constituerait pas une
telle instrumentalisation, ce qui aurait pour effet de ne pas porter atteinte
à sa dignité. En d'autres termes, la valeur centrale dans le
raisonnement arboré par le Sénat réside dans
l'instrumentalisation. C'est ainsi elle qui détermine si la
dignité est violée ou non. Le Sénat conclu alors que dans
la mesure où elle est pratiquée à titre gratuit, la GPA
n'est pas une pratique contraire au principe de dignité
humaine156(*).
Conclusion générale
Après ces constatations, il est évident que la
question de la légalisation de la GPA en France sur le modèle
américain est délicate.
La cause majeure réside dans l'existence du principe
d'indisponibilité du corps humain. Ce dernier, dans sa conception
actuelle, met en échec toute tentative de légalisation, tant
concernant l'aspect contractuel de la pratique, que sur le terrain de la libre
disposition de son corps. Or, ces deux aspects s'avèrent être
centraux pour bénéficier d'une procédure de
maternité de substitution.
Il en va de même vis-à-vis d'un des corolaires de
ce principe, à savoir l'extrapatrimonialité du corps humain, qui
refuse la GPA dans sa variante pécuniaire.
Néanmoins, pour les partisans de cette pratique, tout
espoir n'est pas perdu. En effet, il règne à l'heure actuelle une
certaine incohérence en droit français, dans la mesure où
le législateur a décidé de légaliser l'avortement
et de le maintenir jusqu'à présent, alors que celui-ci va
à l'encontre même des principes d'indisponibilité et
d'inviolabilité du corps humain. De ce fait, si cette exception a
été admise, rien n'exclu de penser qu'elle pourrait aussi
l'être dans le cadre de la maternité de substitution à
l'avenir.
Toutefois, cette légalisation, si elle intervenait,
devrait prendre en compte plusieurs caractéristiques importantes,
à commencer par la mise en place de critères pour accéder
au statut de mère porteuse. En effet, beaucoup d'agences
américaines spécialisées imposent des conditions
relativement strictes afin de protéger à la fois la gestatrice et
l'enfant à naitre. Il faut par exemple être âgée de
21 à 41 ans, avoir euau moins un enfant, et plus
généralement avoir sa propre famille, mais également ne
pas fumer ou encore avoir un indice de masse corporel inférieur à
33157(*).
De même, il conviendrait pour le législateur
d'envisager l'épineuse question de la rémunération des
mères de substitution, que certains Etats admettent aux Etats-Unis. Pour
ne pas contrevenir à trop de principes chers au droit français,
il serait plus judicieux de ne pas admettre qu'elle puisse exister, dans la
mesure où cela contreviendrait à la fois au principe
d'extrapatrimonialité du corps humain, mais également à la
dignité humaine158(*).
Pour finir, il serait possible d'imaginer que dans un premier
temps, l'accès à cette pratique soit restreint. A l'instar du
droit américain, il serait ainsi possible de faire reconnaître
petit à petit la gestation pour autrui comme un mode de traitement de
l'infertilité à part entière. Cette méthode
pourrait ainsi être proposée aux couples infertiles en ultime
recours, lorsque une ou plusieurs procédures de fécondation in
vitro ont échoué.
A l'impossibilité d'obtenir un enfant naturellement,
beaucoup répondront que l'adoption est la solution à tous les
problèmes. Néanmoins, il faut rappeler que d'une part, le
processus d'adoption est long et particulièrement couteux, mais
également que l'enfant qui en sera issus n'aura aucun lien
génétique avec les deux parents.
Ainsi, il serait alors préférable de permettre
à ces couples de choisir entre l'une ou l'autre de ces
procédures.
Quoiqu'il en soit, les récentes avancées en
droit français exercées par la Cour de cassation, aussi fragiles
soient elles, font naitre une certitude. Celle que l'évolution du droit
français en la matière sera lente, mais sans aucun doute
certaine.
BIBILIOGRAPHIE
I. Ouvrages
A. Ouvrages de droit
américain
R. COOK, S. D. SCLATER, F. KAGANAS
SurrogateMotherhood : International Perspectives, Bloomsbury
Publishing, 2003.
N. EHRENREICH, The Reproductive Rights Reader : Law,
Medicine, and the Construction of Motherhood, NYU Press, 2008.
L. FISHER, K. J. HARRIGER, American constitutional
law, Carolina AcademicPress, 9th Edition, 2011.
B. FRIEDMAN, The will of the people, Farrar, Straus and
Giroux, 1st Edition, 2009.
L. O. GOSTIN, SurrogateMotherhood : Politics and
Privacy, Indiana UniversityPress, 1990.
C. P. KINDREGAN, M. MCBRIEN, Assisted Reproductive
Technology : A Lawyer's Guide to Emerging Law and Science, American
Bar Association, 2006.
A. A. LEVASSEUR, Le droit américain, Dalloz,
Connaissance du droit, 2004.
W. P. STATSKY, Family Law, The Essentials, Cengage
Learning, 2014.
G. R. STONE, L. M. SEIDMAN, C. R. SUNSTEIN, M. V. TUSHNET, P.
S. KARLAN, Constitutional law, Wolters Kluwer, 6th Edition, 2009.
L. H. TRIBE, American constitutional law,
Foundationpress, Vol. 1, 3rd Edition, 2000.
L. D. WARDLE et L. C. NOLAN, Family law in the USA,
Wolters Kluwer, 2011.
B. Ouvrages de droit
français
G. CORNU, Droit civil Les personnes, Montchrestien,
Domat droit privé, 13ème édition, 2007.
E. ZOLLER, Le droit au respect de la vie privée au
sens de la Convention européenne des droits de l'homme, F. Sudre
(Dir.), Bruylant, Coll. Droit et Justice n° 63, 2005, pp. 35-67.
II. Articles de doctrine
A. Doctrine américaine
A. L. ALLEN, « Privacy, Surrogacy, and the Baby M
Case », FacultyScholarship. Paper 808 (1988).
Disponible sur :
http://scholarship.law.upenn.edu/faculty_scholarship/808
D. E. BERNSTEIN, « Freedom of contract »,
George MasonUniversity Law and EconomicsResearchPaperSeries, 08-51.
Disponible sur :
http://www.law.gmu.edu/assets/files/publications/working_papers/08-51%20Freedom%20of%20Contract.pdf
D.E BERNSTEIN, « Lochner EraRevisionism, Revised:
Lochner and the Origins of Fundamental Rights Constitutionalism »,
Georgetown Law Journal 92(1) :1-60, (2003).
Disponible sur
http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=395620
M. CARTINE, « Surrogacy and Silence: Why State
LegislaturesShould A empt to RegulateSurrogacy Contracts », Law
SchoolStudentScholarship, paper 417, (2014).
Disponible sur :
http://scholarship.shu.edu/student_scholarship/417
E. CHEMERINSKY, « Substantive Due
Process », Touro Law Review, Vol. 15, (1999), pp. 1502
à 1534.
CRG, « Surrogacy in America », (2010).
Disponible sur :
http://www.councilforresponsiblegenetics.org/pagedocuments/kaevej0a1m.pdf
J. L. DOLGIN, « Status and Contract in
SurrogateMotherhood: An Illumination of the
SurrogacyDebate », 38 Buff. L. Rev. 515, (1990).
Disponible sur :
http://scholarlycommons.law.hofstra.edu/faculty_scholarship/438
J. T. FLAHERTY, « Enforcement of SurrogateMother
Contracts: Case Law, the Uniform Acts, and State and
FederalLegislation », 36 Clev. St. L. Rev. 223 (1988).
Disponible sur :
http://engagedscholarship.csuohio.edu/clevstlrev/vol36/iss2/4
E. R. GOLD, « Body Partes : Property Rights and
the Ownership of HumanBiologicalMaterials », Harvard Journal of
Law &Technology, Vol. 10, No. 2, (1997), pp. 370 à 375.
L. O. GOSTIN, « A Civil LibertiesAnalysis of
Surrogacy Arrangements », Georgetown University Law Center,
(1988).
Disponible sur :
http://scholarship.law.georgetown.edu/facpub/771
S. HENNETTE-VAUCHEZ, « Le principe de la
dignité humaine en Droit américain », in C. GIRARD, S.
HENNETTE-VAUCHEZ, La dignité de la personne humaine : recherche
sur un processus de juridicisation, Paris, P.U.F, 2005, pp. 145 à
157.
M. E. HOLLAND,
« ForbiddingGestationalSurrogacy : Impeding the Fundamental
Right to Procreate », UC Davis Journal of Juvenile Law &
Policy, Vol. 17 :2, (2013), pp. 2 à 28.
J. LAVOIE, « Ownership of Human Tissue : Life
after Moore v. Regents of the University of California »,
Virginia Law Review, Vol. 75, No. 7, (1989), pp. 1363 à 1396.
Y. MARGALIT, « In Defense of Surrogacy Agreements: A
Modern Contract Law Perceptive », William & Mary Journal of
Women and the Law, Vol. 20, Iss. 2, Article 6, (2014).
Disponible sur
http://scholarship.law.wm.edu/wmjowl/vol20/iss2/6
S. L. OQUIST, « Reproduction constitutes a
« Major life activity » under the ADA : Implications
of the SupremeCourt'sdecision in Bragdon v. Abbot », Creighton
Law Review, Vol. 32, (1999), pp. 1357 à 1432.
N. RAO, « Three Concepts of Dignity in
Constitutional Law », Notre Dame Law Review, Vol. 86 :1, (2011),
pp. 183 à 272.
Disponible sur :
http://scholarship.law.nd.edu/ndlr/vol86/iss1/4
S. H. SNYDER, « National Approach to Surrogacy in
the United States ».
Disponible sur :
http://www.uianet.org/sites/default/files/safe_uploads/clients/39054/rapports/SNYDER,%20Steven%20-%20US%20Surrogacy%20Law.pdf
Carla SPIVACK, « National Report : The Law of
SurrogateMotherhood in the United States », The American Journal of
Comparative Law, Vol. 58, 2010, pp. 97 à 114.
Disponible sur :
http://works.bepress.com/carla_spivack/15/
J.-R. TRAHAN, « The Distinction
BetweenPersons&Things : An Historical Perspective », 1 J.
Civ. L. Stud. (2008).
Disponible sur :
http://digitalcommons.law.lsu.edu/jcls/vol1/iss1/3
D. H. WALD et K. BLACK, « Surrogacy and a
pregnantwoman'sconstitutional right to medical and procreativechoice - A
briefsurvey », (2011).
Disponible sur :
http://www.waldlaw.net/assets/files/ABA%20surrogacy%20article.10.2011.pdf
S. WARREN, L. BRANDEIS, « The Right to
Privacy », Harvard Law Review, Vol. 4, No. 5, (1890).
Disponible sur :
http://groups.csail.mit.edu/mac/classes/6.805/articles/privacy/Privacy_brand_warr2.html
D. P WEBER, « Restrincting the Freedom of
Contract : A Fundamental Prohibition », Yale Human Rights
and Development Journal, Vol. 16: Iss. 1, Article 2, (2014).
Disponible sur :
http://digitalcommons.law.yale.edu/yhrdlj/vol16/iss1/2
S. WEILER, « BodilyIntegrity: A Substantive Due
Process Right to Be Free fromRape by Public Officials »,
California Western Law Review: Vol. 34: No. 2, Article 19, (1998).
Disponible sur :
http://scholarlycommons.law.cwsl.edu/cwlr/vol34/iss2/19
E. ZOLLER, «La dignité de la personne humaine
dans la jurisprudence de la Cour suprême des États-Unis »,
Revue générale du droit, Etudes et réflexions 2014,
numéro 4.
Disponible sur :
http://www.revuegeneraledudroit.eu/wp-content/uploads/ER2014_5.pdf
K. D. ZUCKER, « The Meaning of Life : Defining
« Major Life Activities » under the
AmericanswithDisabilitiesAct », Marq. L. Rev. 957,
(2003).?
Disponible sur : http://scholarship.law.marque
e.edu/mulr/vol86/iss5/3
B. Doctrine française et
européenne
P. COSSALTER, « La dignité humaine en droit public
français : l'ultime recours », Revue générale du
droit, Etudes et réflexions 2014, numéro 4.
Disponible sur :
http://www.revuegeneraledudroit.eu/blog/2014/11/06/la-dignite-humaine-en-droit-public-francais-lultime-recours/
M. FABRE-MAGNAN, « Autonomie personnelle,
indisponibilité du corps humain et justice sociale »,
in Liber amicorum en hommage à Antonio Marzal, Esade, Bosch
editor, (2008).
A. MOITROT de la MOTTE, « Le droit au respect de la
vie privée », ASMP.
Disponible sur :
http://www.asmp.fr/travaux/gpw/internetvieprivee/rapport3/chapitr17.pdf
NOMATERNITYTRAFFIC, « Gestation pour autrui et
droits de l'Hommes : enjeux humains, éthiques et
juridiques », Novembre 2015.
Disponible sur :
http://www.nomaternitytraffic.eu/wordpress/wp-content/uploads/2015/11/2015-Contribution-UIAG-No-Maternity-TrafficFR.pdf
NOMATERNITYTRAFFIC, « La gestation pour autrui (GPA)
est incompatible avec le droit international », mars 2016.
Disponible sur :
http://www.nomaternitytraffic.eu/wordpress/wp-content/uploads/2016/03/NOTE-GPA-CONSEIL-DE-LEUROPE-Mars-2016.pdf
III. Rapports et avis officiels
CCNESVS, Avis n°110 sur les problèmes
éthiques soulevés par la gestation pour autrui (GPA),
1er avril 2010.
CONSEIL D'ETAT, La révision des lois
bioéthiques, La documentation française, Paris, 2009.
R. HENRION et C. BERGOIGNAN-ESPER, Bulletin de
l'Académie Nationale de Médecine, 2009, 193, no 3, 583-618,
séance du 10 mars 2009 dédiée à la gestation pour
autrui.
J. LEONETTI, Rapport n°2276 fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles de la légalisation et de l'administration
générale de la République sur la proposition de loi
n°2211, relative à l'organisation du débat public sur les
problèmes éthiques et les questions de société,
Paris, Assemblée Nationale, 3 février 2010.
SENAT, Rapport d'information n°421 :
« Contribution à la réflexion sur la maternité
pour autrui », 25 juin 2008.
THE PRESIDENT'S COUNCIL ON BIOETHICS, HumanCloning and
HumanDignity : An EthicalInquiry, Washington DC, Juillet 2002.
IV. Thèse
D. TISSIER, « La protection du corps humain sous
l'angle de la procréation assistée - Regards croisés des
droits français et nord-américains », Thèse de
doctorat en droit en droit privé, sous la direction de Monsieur le
professeur Rémy CABRILLAC et de Madame Anne-Françoise
ZATTARA-GROS, La Réunion, Université de la Réunion, 2011.
V. Jurisprudences
A. France
1. Cour de cassation
Ass. Plén., 31 mai 1991, pourvoi n°90-20.105.
Ass. Plén., 3 juillet 2015, pourvoi n°
14-21323.
Ass. Plén., 3 juillet 2015, pourvoi n° 15-50002
Crim. 20 octobre 1998, Bull. crim. n°264, R., p.319.
Civ. 2è, 5 janvier 1983, Bull. civ. II,
n°4.
Civ. 2è, 24 avril 2003, Bull. civ. II,
n°114.
Civ. 3è, 25 février 2004, Bull. civ.
III, n°41.
Civ. 2è, 19 février 2009, Bull. civ.
II, n°62.
2. Conseil constitutionnel
Cons. Const., n°75-54 DC du 15 janvier 1975, (IVG I).
Cons. Const., n°76-75 DC du 12 janvier 1977.
Cons. Const., n° 83-164 DC du 29 décembre 1983.
Cons. Const., n°94-343/344 du 27 juillet 1994, (IVG
II).
3. Conseil d'Etat
CE, 22 janvier 1988, n°80936
4. Cour d'appel
Paris, 1re ch. C., 15 juin 1990
B. CEDH
PRETTY c. Royaume-Uni, CEDH, quatrième
section, 29 avril 2002, n°2346/02.
MENNESSON c. France, CEDH, cinquième section,
26 juin 2014, n° 65192/11et LABASSEE c. France, CEDH,
cinquième section, 26 juin 2014, n°65941/11.
C. Etats-Unis
1. Cour Suprême des Etats-Unis
Slaughter-House cases, 83 U.S. 36 (1873).
Union Pacific Railway Co v. Botsford, 141 U.S. 250
(1891).
Frisbie v. United States, 157 U.S. 160 (1895).
Allgeyer v.
Louisiana, 165 U.S. 578, (1897).
Lochner v. New-York, 198 U.S. 45 (1905).
Adair v. United-States, 208 U.S. 161 (1908).
Coppage v. Kansas, 236 U.S. 1 (1915).
Adkins v. Children'sHospital, 261 U.S. 525 (1923).
Meyer v. Nebraska, 262 U.S. 390 (1923).
Jay Burns Baking v. Bryan, 264 U.S. 504 (1924).
New State Ice v. Liebmann, 285 U.S. 262 (1932).
West coasthotel v. Parrish, 300 U.S. 379 (1937).
Glasser v. United States, 315 U.S. 60 (1942).
Skinner v. Oklahoma, 316 U.S. 535 (1942).
Williamson v. Lee Optical of Oklahoma, 348 U.S. 483
(1955).
Trop v. Dulles, 356 U.S. 86 (1958).
Mapp v. Ohio, 367 U.S. 643 (1961).
Griswold v. Connecticut, 381 U.S. 479 (1965)
Eisenstadt v. Baird, 405 U.S. 438 (1972).
Roe v. Wade, 410 U.S. 113 (1973).
Moore v. City of East Cleveland, 431 U.S. 494
(1977).
Bowers v. Hardwick, 478 U.S. 186 (1986).
Moore v. Regents of the University of California, 499
U.S. 936 (1991).
PlannedParenthood v. Casey, 505 U.S. 833 (1992).
Bragdon v. Abbott, 524 U.S. 624 (1998).
Rice v. Cayetano, 528 U.S. 495 (2000).
Lawrence v. Texas, 539 U.S. 558 (2003).
2. Cours suprêmes
fédérées
Baby M, 537 A.2d 1227, 109 N.J. 396 (N.J. 1988).
Johnson v. Calvert, Cal. Sup. Ct., 5 Cal4th 84, 851
P.2d 776 (1993).
3. Cours d'appel fédérales
Krauel v. Iowa methodistmedical center, 95 F.3d 674
(8th Cir. 1996).
Saks v. Franklin Covey Co., 117 F.Supp.2d 318,
327-28, 329, 330 (S.D.N.Y.2000)
4. Cours inférieures
J. Pavesich v. New England Life Ins. Co., 50 S.E. 68
(1905).?
R. v. Utah, 261 F. Supp. 2d 1268, 1272 (D. Utah
2002).
VI. Sitographie
Tous les sites internet inscrits dans cette partie ont
été revisités en guise de vérification le 28 mai
2016.
S. ASTIER, Jurilexblog, Le droit au respect de la vie
privée, constitutionnellement reconnu, 2010.
Disponible sur :
http://www.jurilexblog.com/droit-respect-vie-privee-droit-constitutionnellement-reconnu-260783
L. CAMPO-ENGELSTEIN, Albany MedicalCollege,
GestationalSurrogacy Contracts : Are TheyLegal and
Enforceable ?, 2013.
Disponible sur :
http://www.amc.edu/BioethicsBlog/post.cfm/gestational-surrogacy-contracts-are-they-legal-and-enforcable
CAP, Guide to State SurrogacyLaws, 2007.
Disponible sur :
https://www.americanprogress.org/issues/women/news/2007/12/17/3758/guide-to-state-surrogacy-laws/
CLEDP, WhatisGestational vs TraditionalSurrogacy.
Disponible sur :
http://www.cledp.com/what-is-gestational-vs-traditional-surrogacy.html
D. H. WALD, The Wald Law Group, CaliforniaSurrogacy Law
FAQ, 2015.
Disponible sur : http://www.waldlaw.net/surrogacy.html
J. M. HANNAH, Updates in Family Law, As SurrogacyBecomes
More Popular, LegalProblemsProliferate, 2011.
Disponible sur :
http://jeannehannah.typepad.com/blog_jeanne_hannah_traver/2011/06/as-surrogacy-becomes-more-popular-legal-problems-proliferate-.html
C. de la HOUGUE, Liberté Politique.com, La
gestation pour autrui, violation des droits de l'homme et de la
dignité, 2013.
Disponible sur :
http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/La-gestation-pour-autrui-violation-des-droits-de-l-homme-et-de-la-dignite
C. HSU, Findlaw, Surrogacy Contracts
Aren'tAlwaysEnforceable, 2013.
Disponible sur :
http://blogs.findlaw.com/law_and_life/2013/02/surrogacy-contracts-arent-always-enforceable.html
INTERPOL, La traite d'êtres humains.
Disponible sur :
http://www.interpol.int/fr/Criminalit%C3%A9/Trafic-d'%C3%AAtres-humains/Traite-d%E2%80%99%C3%AAtres-humains
JUSTITIA, Constitutional Law, 2016.
Disponible sur :
https://www.justia.com/constitutional-law/docs/privacy-rights.html
LII, CornellUniversity Law School, Personal
autonomy.
Disponible sur :
https://www.law.cornell.edu/wex/personal_autonomy
J. MANCINI, The Nest, WhatInsurance Will
CoverSurrogatePregnancy ?.
Disponible sur :
http://budgeting.thenest.com/insurance-cover-surrogate-pregnancy-32725.html
G. MAYES, Medscape, Buying and SellingOrgans for
Transplantation in the US: National Organ Transplant Act of 1984 (NOTA) Bans
Buying and Selling, 2003.
Disponible sur :
http://www.medscape.org/viewarticle/465200_2
MODERN FAMILY SURROGACY CENTER, What are the State Laws in
California for Surrogacy ?.
Disponible sur :
http://www.modernfamilysurrogacy.com/page/state_laws_in_california_for_surrogacy
J. MASON PIEKLO, Rewire, Griswold v. Connecticut, and the
Evolution of Personal Privacy Rights. What'snext ?, 2013.
Disponible sur :
https://rewire.news/article/2013/06/07/griswold-v-connecticut-and-the-evolution-of-personal-privacy-rights-whats-next/
JM POUGHON, L'Europe des libertés, L'individu,
propriétaire de son corps ? Une réponse entre scolastique
juridique et réalisme économique, 2005.
Disponible sur :
http://leuropedeslibertes.u-strasbg.fr/article.php?id_article=100&id_rubrique=5
D. LINDER, ExploringConstitutional Law, The Right of
Privacy.
Disponible sur :
http://law2.umkc.edu/faculty/projects/ftrials/conlaw/rightofprivacy.html
SENAT, Etude de légalisation comparée
n°182 - La gestation pour autrui, 2008.
Disponible sur :
http://www.senat.fr/lc/lc182/lc1828.html
STANFORD UNIVERSITY, SurrogateMotherhood in India, 2008.
Disponible sur :
https://web.stanford.edu/group/womenscourage/Surrogacy/womensrights.html
G.P STOREY,
EthicalProblemsSurroundingSurrogateMotherhood, 2000.
Disponible sur :
http://www.yale.edu/ynhti/curriculum/units/2000/7/00.07.05.x.html
THE SURROGACY EXPERIENCE, U.S. Surrogacy Law by
State.
Disponible sur :
http://www.thesurrogacyexperience.com/surrogate-mothers/the-law/u-s-surrogacy-law-by-state/
F. TODD, The StudentLawyer, Property Rights in the Human
Body, 2013.
Disponible sur :
http://thestudentlawyer.com/2013/07/12/property-rights-in-the-human-body/
VIE-PUBLIQUE, Chaque citoyen a-t-il droit au respect de sa
vie privée ?, 2013.
Disponible sur :
http://www.vie-publique.fr/decouverte-institutions/citoyen/citoyennete/definition/droits/chaque-citoyen-t-il-droit-au-respect-vie-privee.html
J. K. WAGNER, Genomics Law Report, PropertyRights and the
Human Body, 2014.
Disponible sur :
http://www.genomicslawreport.com/index.php/2014/06/11/property-rights-and-the-human-body/
VII. Articles de presse
M-A. FRISON-ROCHE, (2014), Les limites des bienfaits de la
régulation : la convention de maternité de substitution,
Huffington Post.
Disponible sur :
http://www.huffingtonpost.fr/marieanne-frisonroche/les-limites-des-bienfaits_b_6013284.html
C. FOUREST, (2014), A-t-on le droit de débattre de la
GPA ?,Huffington Post.
Disponible sur :
http://www.huffingtonpost.fr/caroline-fourest/debat-gpa-manif-pour-tous_b_5944940.html
A. LECLAIR (2015), Les enfants ne sont pas à vendre,
Le Figaro.
Disponible sur :
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2015/07/03/01016-20150703ARTFIG00090-gpa-les-enfants-ne-sont-pas-a-vendre.php
E. SAGET et Y. BOUSENNA, (2014), Gestation pour autrui :
la filière américaine, L'express.
Disponible sur :
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/famille/gestation-pour-autrui-la-filiere-americaine_1603640.html
TABLE DES MATIERES
Introduction.......................................................................................................................
7
Partie 1 : Le principe d'indisponibilité du
corps humain : un principe controversable.....15
I. Le freedom of contract
18
A. La notion de freedom of contract
18
1. Le freedom of contract : une liberté
protégée par la Constitution des Etats-Unis
18
2. Le freedom of contract : une liberté
protégée par la Cour suprême
20
B. Le freedom of contract et la
gestation pour autrui
23
1. Le contrat de gestation pour autrui en dehors du droit
commun
23
2. Un contrat dont l'existence est admise
26
II. La major life activityet l'Americans
with Disabilities Act
29
A. La définition des notions
30
B. L'Americans with Disabilities
Act : un texte à l'applicabilité limitée
31
1. Les employeurs
31
2. Les entités publiques
32
III. La personal autonomy
33
A. La protection accordée
à la personal autonomy
34
B. La personal autonomy : un
fondement possible de la GPA
35
Partie 2 : Des fondements
conciliables..........................................................................37
I. Les fondements communs aux deux
nations
37
A. La prohibition de la traite des
êtres humains
38
1. En droit international
39
2. En droit national
40
B. La prohibition de la vente des
produits du corps humain
41
1. La prohibition
41
2. Une prohibition non absolue
43
C. Le droit à la liberté
inclus dans la Déclaration universelle des droits de l'Homme et du
citoyen et le Bill of Rights
44
1. Le droit à la liberté, une notion à
définir
45
2. Une mise en pratique des textes : l'exemple de
l'avortement
46
II. Les principes communs mais disposant
d'une interprétation différente
49
A. Le droit au respect de la vie
privée / Right of privacy
49
1. Le droit au respect de la vie privée : un droit
fondamental commun aux deux Etats
49
2. Le right of privacy : un champ d'application plus large
que son équivalent français
55
B. La dignité humaine
57
1. Les fondements et la portée
58
2. L'impact de la dignité humaine sur la
légalisation de la GPA
63
Conclusion..........................................................................................................................65
Bibliographie.....................................................................................................................67
* 1R. HENRION et C.
BERGOIGNAN-ESPER, Bulletin de l'Académie Nationale de Médecine,
2009, 193, no 3, 583-618, séance du 10 mars 2009 dédiée
à la gestation pour autrui.
* 2Genèse
(16 :1>16 :4)
* 3Genèse
(30 :1>30 :13)
* 4C. SPIVACK,
« National Report : The Law of SurrogateMotherhood in the United
States »,The American Journal of Comparative Law, Vol. 58, 2010,
pp. 97 à 98.
* 5J. HUNTER, chirurgien
écossais, réussi à obtenir la première grossesse
par insémination artificielle en 1789.
* 6La toute première
naissance par FIV n'interviendra toutefois qu'en 1978.
* 7Date de la première
naissance par gestation pour autrui en France.
* 8CCNESVS, Avis n°110
sur les problèmes éthiques soulevés par la gestation pour
autrui (GPA), 1er avril 2010.
* 9CE, 22 janvier 1988,
n°80936.
* 10Article 1128 du code
civil : « Il n'y a que les choses qui sont dans le commerce
qui puissent être l'objet des conventions ».
* 11Paris, 1re ch. C., 15
juin 1990.
* 12Ass. Plén., 31
mai 1991, pourvoi n°90-20.105 : « Attendu que, la convention
par laquelle une femme s'engage, fût-ce à titre gratuit, à
concevoir et à porter un enfant pour l'abandonner à sa naissance
contrevient tant au principe d'ordre public de l'indisponibilité du
corps humain qu'à celui de l'indisponibilité de l'état des
personnes ».
* 13Conseil d'État,
La révision des lois bioéthiques, La Documentation
française, Paris, 2009, pp. 60 à 65
* 14Article 345 du code
pénal de 1810 : « Les coupables d'enlèvement,
de recélé, ou de suppression d'un enfant, de substitution
d'un enfant à un autre, ou de supposition d'un enfant à une femme
qui ne sera pas accouchée, seront punis de la réclusion
criminelle à temps de cinq à dix ans ».
* 15Article 227-13 al.1er du
code pénal : « La substitution volontaire, la
simulation ou dissimulation ayant entraîné une atteinte à
l'état civil d'un enfant est punie de trois ans d'emprisonnement et de
45 000 euros d'amende ».
* 16Article 227-12 al.
1er et 2 du code pénal : « Le fait de
provoquer soit dans un but lucratif, soit par don, promesse, menace ou abus
d'autorité, les parents ou l'un d'entre eux à abandonner un
enfant né ou à naître est puni de six mois d'emprisonnement
et de 7 500 euros d'amende.
Le fait, dans un but lucratif, de s'entremettre entre une
personne désireuse d'adopter un enfant et un parent désireux
d'abandonner son enfant né ou à naître est puni d'un an
d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ».
* 17C'est ce que
prévoit le 10ème Amendement de la Constitution des
Etats-Unis d'Amérique, qui dispose que : « The powers
not delegated to the United States by the Con- stitution, norprohibited by it
to the States, are reserved to the States respectively, or to the
people ».
* 18Tout au long de ce
mémoire, ce terme ne visera que le Bill of Rights américain.
* 19Parmi ces Etats figurent
entre autre l'Alaska, le Colorado, la Géorgie, Hawaï, l'Idaho, le
Maine, le Maryland, le Massachussetts.
* 20MENNESSON c.
France, CEDH, cinquième section, 26 juin 2014, n° 65192/11et
LABASSEE c. France, CEDH, cinquième section, 26 juin 2014,
n°65941/11.
* 21Ass. Plén., 3
juillet 2015, pourvoi n° 15-50002 et Ass. Plén., 3 juillet 2015,
pourvoi n° 14-21323.
* 22J. MERCHANT,
« Procréation et politique aux Etats-Unis : le cas de la
gestation pour autrui », Académie nationale de
Médecine, La gestation pour autrui, Lavoisier, 2011, p. 223.
* 23M. FABRE-MAGNAN,
« Autonomie personnelle, indisponibilité du corps humain et
justice sociale », in Liber amicorum en hommage à
Antonio Marzal, Esade, Bosch editor, 2008.
* 24Exemple tiré de
Pretty c. Royaume-Uni, CEDH, quatrième section, 29 avril 2002,
n°2346/02.
* 25Il convient de
préciser que certaines juridictions américaines mentionnent la
notion de bodilyintegrity, que l'on peut traduire par la notion
d'intégrité du corps humain. Ce fut par exemple le cas dans
United States v. Lanier (1997), où la Cour d'appel des
Etats-Unis du 6ème Circuit a jugé qu'il était
nécessaire de protéger le droit de bodilyintegrity
à l'égard de cinq femmes qui avaient été
violée.
* 26Union Pacific
Railway Co v. Botsford, 141 U.S. 250 (1891).
* 27 « No
right isheld more sacred or is more carefullyguarded by the common law than the
right of everyindividual to the possession and control of hisownperson, free
from all restraint or interference of othersunless by clear and
unquestionableauthority of law ».
* 28Roe v. Wade,
410 U.S. 113 (1973).
* 29Appellation
utilisée aux Etats-Unis pour désigner les juges de la Cour
suprême.
* 30Moore v. Regents of
the University of California, 499 U.S. 936 (1991).
* 31En Common Law, il arrive
que dans un procès où siègent plusieurs juges, l'un
d'entre eux ne soit pas d'accord avec la majorité. Dans ce cas, il a la
possibilité de rédiger ce que l'on appelle en anglais un
dissent, où il fera état de son opinion contraire et du
raisonnement qu'il aurait souhaité appliquer à l'affaire. Cette
pratique est très courante à la Cour suprême des
Etats-Unis.
* 32Slaughter-House
cases, 83 U.S. 36 (1873).
* 33Frisbie v. United
States, 157 U.S. 160 (1895).
* 34P. MBONGO,
« Le conseil constitutionnel et le procès
équitable », Nouveaux cahier du Conseil constitutionnel
n°44, juin 2014.
* 35E. CHEMERINSKY,
« Substantive Due Process », 15 Touro Law
Review 1501-1534, 1999.
* 36« Among
the inalienable rights of the citizenisthat of the liberty of
contract ».
* 37« Such
liberty is not absolute and universal ».
* 38Lochner v.
New-York, 198 U.S. 45 (1905).
* 39Adair v.
United-States, 208 U.S. 161 (1908).
* 40Coppage v.
Kansas, 236 U.S. 1 (1915).
* 41Lesyellow-dog
contracts sont des contrats qui visaient à interdire la
syndicalisation des salariés aux Etats-Unis.
* 42Adkins v.
Children'sHospital, 261 U.S. 525 (1923).
* 43Jay Burns Baking v.
Bryan, 264 U.S. 504 (1924).
* 44New State Ice v.
Liebmann, 285 U.S. 262 (1932).
* 45West coasthotel v.
Parrish, 300 U.S. 379 (1937).
* 46« There is
no absolute freedom to do as one wills or to contract as one
chooses ».
* 47« Liberty
implies the absence of arbitraryrestraint, not
immunityfromreasonableregulations and prohibitions imposed in the interests of
the community ».
* 48Williamson v. Lee
Optical of Oklahoma, 348 U.S. 483 (1955).
* 49Voir par exemple
Craigmiles v. Giles, 312 F.3d 220 (6th Cir. 2002).
* 50Baby M, 537
A.2d 1227, 109 N.J. 396 (N.J. 1988).
* 51The 2015 Florida
Statutes, Title XLIII, Chapter 742, Section 742.15 (1).
* 52The 2013 ORS, Vol. 4,
Chapter 163, §163.537.
* 53Indiana Code, Section
31-20-1-1.
* 54R. T. STEPHAN, Attorney
General of the State of Kansas, opinion 82-150, July 2, 1982.
* 55Johnson v.
Calvert, Cal. Sup. Ct., 5 Cal4th 84, 851 P.2d 776 (1993).
* 56Il faut préciser
que Madame Calvert disposait toujours de ses ovaires, ce qui lui a permis
d'effectuer un don de gamète.
* 57Cornu faisait
référence à la procédure dite
« génitrix » pour qualifier la
gestationalsurrogacy, et à la procédure dite
« gestatrix » pour qualifier la
traditionalsurrogacy.
* 58N.D. Cent. Code Ann.
§ 14-09-06.2(1) : « The love, affection, and
otheremotionaltiesexistingbetween the parents and child and the ability of each
parent to provide the childwithnurturing, love, affection, and
guidance »
* 59Or. Rev. Stat. Ann.
§ 107.137(1) : « The emotionaltiesbetween the child and
otherfamilymembers » ; « The interest of the
parties in and attitude toward the child » ;
« The desirability of continuing an
existingrelationship »
* 60U.S.C, Title 42, Chapter
126, §12101 et s.
* 61ADA, Sec. 2 (a) (2),
1990
* 62ADA, Sec. 2 (a) (3),
1990
* 63ADA, Sec 3 (2)
(A) , 1990: « a physical or mental
impairmentthatsubstantiallylimits one or more of the major life activities of
suchindividual ».
* 64ADA, Sec 3 (2) (B),
1990 : « a record of such an impairment ».
* 65ADA, Sec 3 (2) (C),
1990 : « beingregarded as havingsuch an
impairment ».
* 66Bragdon v.
Abbott, 524 U.S. 624 (1998).
* 67Krauel v. Iowa
methodistmedical center, 95 F.3d 674 (8th Cir. 1996).
* 68Saks v. Franklin
Covey Co., 117 F.Supp.2d 318, 327-28, 329, 330 (S.D.N.Y.2000)
* 69Il faut noter que cette
décision intervient deux ans avant Bragdon v. Abbott,
jugé par la Cour suprême des Etats-Unis, qui mis en place une
solution inverse.
* 70ADA, Subchapter II,
Part. A, Sec. 12132.
* 71CEDH, Pretty c.
Royaume-Uni, requête n° 2346/02, du 29 avril 2002.
* 72CEDH, Pretty c.
Royaume-Uni, requête n° 2346/02, du 29 avril 2002.
* 73Griswold
v.Connecticut, 381 U.S. 479 (1965).
* 74Roe v. Wade,
410 U.S. 113 (1973).
* 75Pour plus de
précisions, se rapporter aux I, A, 1 de cette partie.
* 76Eisenstadt v. Baird, 405 U.S. 438 (1972).
* 77Relf v.
Weinberger, U.S.D.C, Civ. A. Nos. 73-1557, 74-243.
* 78Bowers v.
Hardwick, 478 U.S. 186 (1986).
* 79Lawrence v.
Texas, 539 U.S. 558 (2003).
* 80Voir par exemple
Moore v. Regents of the University of California, 499 U.S. 936
(1991).
* 81E. HILTON,
« The surrogacyindustry and humantrafficking », Action
Institute, 31 mai 2015, disponible sur www.blog.acton.org.
*
82http://www.interpol.int
* 83Article 2 du premier
protocole additionnel à la Convention de Palerme (2000).
* 84Article 3a du premier
protocole additionnel à la Convention de Palerme (2000).
* 85Nomaternitytraffic,
« La gestation pour autrui (GPA) est incompatible avec le droit
international », Mars 2016, disponible sur
www.nomaternitytraffic.eu.
* 86Victims of
trafficking and violence protection act(2000), Div. A, Sect. 102,
(a).
* 87Victims of
trafficking and violence protection act(2000), Div. A, Sect. 103,
(8).
* 88D. TISSIER, La
protection du corps humain, L'Harmattan, 2013, p.391.
* 89NOTA, Sec. 274e, (a).
* 90S. REP. NO. 382, 98th
Cong., 2nd Sess. 2 (1984) at 17.
* 91« Human
body parts should not beviewed as commodities ».
* 92NOTA, Sec. 274e, (b).
* 93Article 3 de la loi
n°76-1181 du 22 décembre 1976 relative aux
prélèvements d'organes
* 94L'interdiction se trouve
dans plusieurs articles dans le code civil, à savoir les 16-1, 16-5 et
16-6. On peut également la retrouver à l'article L1211-4 du code
de la santé publique.
* 95D. TISSIER, op
cit. p. 391.
* 96NOTA, Sec. 274e, (c),
(1).
* 97 « The
term ''humanorgan'' means the human (includingfetal) kidney, liver, heart,
lung, pancreas, bonemarrow, cornea, eye, bone, and skin or anysubpartthereof
and anyotherhumanorgan ».
* 98C'est le point de vue
dégagé par la Cour suprême des Etats-Unis dans Union
Pacific Railway v. Botsford, 141 U.S. 250 (1891).
* 99Il faut entendre par
cette expression la DDHC et le Bill of Rights.
* 100Bill of Rights,
14è Amendement, Section 1 : « ... norshallany State
depriveanyperson of life, liberty, or property, without due process of law
... ».
* 101DDHC, article 2 :
« Le but de toute association politique est la conservation des
droits naturels et imprescriptibles de l'Homme. Ces droits sont la
liberté, la propriété, la sûreté, et la
résistance à l'oppression ».
*
102Allgeyer v.Louisiana, 165 U.S. 578, (1897).
* 103Cons. Const.,
n°75-54 DC du15 janvier 1975 (IVG I).
* 104Cons. Const.,
n°94-343/344 du 27 juillet 1994 (IVG II).
* 105Cons. Const.,
n°75-54 DC du 15 janvier 1975 (IVG I),Article 1er.
* 106Cons.
Const.,n°75-54 DC du 15 janvier 1975 (IVG I),
décision,8ème considérant.
* 107Article 1 DDHC :
« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en
droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur
l'utilité commune ».
Article 4 DDHC : « La liberté
consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui :
ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles
qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de
ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être
déterminées que par la Loi ».
* 108Delphine TISSIER, op
cit., p 283.
* 109S. D. WARREN, L. D.
BRANDEIS, « The right to privacy », Harvard Law
Review, Vol. IV, 15 décembre 1890, pp. 193 à 220.
* 110E. ZOLLER,
« Le droit au respect de la vie privée aux
Etats-Unis », in Le droit au respect de la vie privée au
sens de la Convention européenne des droits de l'homme, F. Sudre
(Dir.), Bruylant, Coll. Droit et Justice n° 63, 2005, pp. 35-67.
* 111Pavesich v. New
England Life Ins. Co., 50 S.E. 68 (1905).?
* 112E. ZOLLER,
« Le droit au respect de la vie privée aux
Etats-Unis », in Le droit au respect de la vie privée au
sens de la Convention européenne des droits de l'homme, F. Sudre
(Dir.), Bruylant, Coll. Droit et Justice n° 63, 2005.
* 113L. FISHER, K. J.
HARRIGER, American Constitutional Law, Carolina AcademicPress, 9th
Edition, 2011, p.895.
* 114Griswold v.
Connecticut, 381 US 479 (1965).
* 115L. FISHER, K. J.
HARRIGER, op. cit. p. 895. Voir également D. O. LINDER, « The
right of privacy », disponible sur
http://law2.umkc.edu/faculty/projects/ftrials/conlaw/rightofprivacy.html.
* 116Article 12 DUDH :
« Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie
privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes
à son honneur et à sa réputation.
Toute personne a droit à la protection de la loi
contre de telles immixtions ou detelles atteintes ».
* 117Cons. Const.,
n°76-75 DC du 12 janvier 1977, 1er considérant.
* 118Cons. Const., n°
83-164 DC du 29 décembre 1983, 41ème
considérant.
* 119Crim. 20 octobre 1998,
Bull. crim. n°264, R., p.319.
* 120Civ.
2è, 19 février 2009, Bull. civ. II, n°62.
* 121Civ.
3è, 25 février 2004, Bull. civ. III, n°41.
* 122Civ.
2è, 24 avril 2003, Bull. civ. II, n°114.
* 123Civ.
2è, 5 janvier 1983, Bull. civ. II, n°4.
* 124Mapp v. Ohio,
367 U.S. 643 (1961).
* 125Moore v. City of
East Cleveland, 431 U.S. 494 (1977).
* 126W. L. PROSSER, Torts,
4e ed., St Paul, Minn., West Publishing Co., 1971.
* 127E. ZOLLER, op. cit.
* 128Meyer v.
Nebraska, 262 U.S. 390 (1923).
* 129Skinner v.
Oklahoma, 316 U.S. 535 (1942).
* 130Eisenstadt v.
Baird, 405 U.S. 438 (1972).
* 131Griswold v.
Connecticut, 381 U.S. 479 (1965).
* 132J. L. DOLGIN,
Status and Contract in SurrogateMotherhood: An Illumination of the
SurrogacyDebate, 38
Bu . L. Rev. 515 (1990).
* 133J.R. v. Utah,
261 F. Supp. 2d 1268, 1272 (D. Utah 2002).
* 134MENNESSON c.
France, CEDH, cinquième section, 26 juin 2014, n° 65192/11et
LABASSEE c. France, CEDH, cinquième section, 26 juin 2014,
n°65941/11.
* 135E. ZOLLER, «La
dignité de la personne humaine dans la jurisprudence de la Cour
suprême des États-Unis », Revue générale du
droit, Etudes et réflexions 2014, numéro 4.
* 136Sénat,
« Contribution à la réflexion sur la maternité
pour autrui ».
Disponible sur
https://www.senat.fr/rap/r07-421/r07-4216.html.
* 137A. JUPPÉ,
« La GPA est une atteinte à la dignité
humaine », sur Alain Juppé, le bloc note, 4 Juillet
2015,www.al1jup.com
* 138P. COSSALTER, «
La dignité humaine en droit public français : l'ultime
recours», Revue générale du droit, Etudes et
réflexions 2014, numéro 4.
* 139On trouvait toutefois
une occurrence discrète de la dignité humaine dans l'article
1er de la loi du 30 septembre 1986, relative à la
liberté de communication (dite Loi Léotard).
* 140Loi n°94-653 du
29 juillet 1994 relative au respect du corps humain, et loi n°94-654 du 29
juillet 1994 relative au don et à l'utilisation des
éléments et produits du corps humain, à l'assistance
médicale à la procréation et au diagnostic
prénatal.
* 141Cons. Const., n°
94-343/344 DC du 27 juillet 1994, 2ème considérant.
* 142D. TISSIER, op. cit.,
p. 51.
* 143Loi n°94-653 du
29 juillet 1994 relative au respect du corps humain.
* 144Glasser v. United
States, 315 U.S. 60 (1942).
* 145E. ZOLLER, op cit.
* 146Trop v.
Dulles, 356 U.S. 86 (1958).
* 147Voir par exemple
Atkins v. Virginia, 536 U.S. 304 (2002), ou encore Hall v.
Florida, 572 U.S. _ (2014).
* 148E. ZOLLER, op cit.
* 149 Ibidem
* 150D. TISSIER, op cit.,
p.63.
* 151PlannedParenthood
v. Casey, 505 U.S. 833 (1992).
* 152Rice v.
Cayetano, 528 U.S. 495 (2000).
* 153Secrétariat de
la Commission des Episcopats de la Communauté Européenne,
« Avis du groupe de réflexion bioéthique sur la
gestation pour autrui », Février 2015.
* 154No MaternityTraffic,
« Gestation pour autrui et Droits de l'Homme : enjeux humains,
éthiques et juridiques », novembre 2015.
* 155Conseil d'Etat,
Sciences de la vie, de l'éthique et du droit, Paris, La
documentation française, 1988.
* 156Sénat, Rapport
d'information n°421 : « Contribution à la
réflexion sur la maternité pour autrui », 25 juin 2008,
Partie IV, A, 3.
* 157Voir
www.circlesurrogacy.com ou encore www.fertilitysourcecompanies.com.
* 158Sénat, Rapport
d'information n°421 : « Contribution à la
réflexion sur la maternité pour autrui », 25 juin 2008,
Partie IV, A, 3.
|