III.3.4. UN PETIT SYSTÈME FINANCIER POUR UN GRAND
PAYS
Au début de l'année 2013, la configuration du
système bancaire congolais se présentait comme suit : 23 petites
banques commerciales; 157 coopératives d'épargne et de
crédit ; 19 institutions de micro finance et quelques bureaux de
change. Tous ces établissements bancaires et de crédit ont une
caractéristique commune : ils disposent d'à peine 80 agences
bancaires au total, en grande partie concentrées à Kinshasa ainsi
qu'à Lubumbashi, et ne comptent pas dans leur capital d'actionnaires
congolais importants. On trouve en RDC des banques commerciales et des
établissements de crédits dont les capitaux appartiennent
à des banques internationales ou régionales, à des pays
partenaires et à d'autres banquiers privés étrangers.
Force est de constater et de dénoncer la perte de contrôle du
système bancaire et de la monnaie par des intérêts
nationaux, dont témoignent l'origine des capitaux investis d'une part,
et la dollarisation de l'économie d'autre part.
Avec amertume, l'on réalise que toutes les banques
à capitaux nationaux ont soit été liquidées, soit
été vendues à des investisseurs étrangers au cours
des dernières années. Sans être opposé à
l'arrivée de capitaux étrangers, nous sommes néanmoins
d'avis qu'un juste dosage des capitaux nationaux et étrangers produit un
système bancaire équilibré, répondant
véritablement aux besoins de développement du pays et de soutien
au secteur privé. Certains personnels de la Banque Centrale Congolaise
arguent que la disparation des nationaux de l'actionnariat des banques et
établissements financiers au Congo est conforme à la principale
caractéristique du système bancaire et financier en
Afrique. Nous considérons que cette attitude est très
irresponsable car elle traduit une abdication devant les responsabilités
et une incapacité à changer les choses pour le bien du peuple
congolais. Nous soutenons le point de vue que la République
Démocratique du Congo est un grand pays de près de
70 millions d'habitants, et donc potentiellement une très grande
économie émergente. Ce qui n'est pas réalisable dans
certains pays africains, l'est tout à fait dans ce sous-continent si
l'on place l'imagination, la volonté et le savoir-faire collectifs au
service du peuple congolais sans exclusion aucune.
Il est normal que différents pays se fassent
mutuellement concurrence pour attirer des capitaux étrangers. La
République Démocratique du Congo doit aussi s'impliquer dans ce
combat avec détermination, mais pas avec aveuglement au point d'exclure
les nationaux de l'actionnariat des banques, au motif simpliste que dans
le passé, certaines institutions contrôlées par des
nationaux ont fait faillite faute de gestionnaires compétents. Nous
réfutons cet argument fataliste et pessimiste dégradant. Les
actionnaires congolais ont besoin de beaucoup de soutien de la part des
autorités politiques et monétaires pour percer dans un secteur
qui leur est encore très fermé. En définitive, la perte du
contrôle national du système bancaire en République
Démocratique du Congo provient bel et bien de l'origine des capitaux
dans l'actionnariat des banques et est la conséquence directe d'un
manque de vision national -et en particulier de la part de l'autorité
monétaire. Un pays qui ne contrôle ni sa monnaie ni son
système financier ne contrôle pas son économie.
L'offre de produits financiers est très rudimentaire et
se limite aux échanges de devises et billets de trésorerie,
à quelques cartes bancaires et distributeurs automatiques des billets,
et services de téléphonie mobile bancaire. L'accès au
crédit reste très limité. La tarification des
institutions financières est tellement élevée
qu'elle dissuade la clientèle et la pousse à traiter sur le
marché informel. Par exemple, tout dépôt en compte et tout
retrait d'un compte en devise est soumis à des frais bancaires de
1% du montant de l'opération, avec un minimum de 10 dollars même
sur des transactions de petits montants. Il n'existe aucun
mécanisme de protection des consommateurs ou du public. Les
banques se servent sur les comptes du public qui n'a aucun moyen de recours.
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