Dedollarisation : enjeux, regard et perspectives( Télécharger le fichier original )par Espoir KAHENGA KALEMBO BUTALELE Université de Lubumbashi - Licence 2014 |
II.1.3. UNE TYPOLOGIE DE LA DOLLARISATION PARTIELLELa forme de la détention de la monnaie ne s'assimile pas à son motif. Par exemple, la détention de billets en dollars peut répondre à un motif de transaction ou à un motif de réserve de valeur (thésaurisation). Afin de clairement d'identifier les différentes situations de dollarisation partielle, nous proposons une typologie à partir des deux critères retenus le motif et la forme de la détention. - Motifs : de transaction : dollarisation des paiements ; De réserve de valeur : dollarisation de la réserve de valeur ; D'unité de compte : dollarisation de compte Critères : - Formes : billets : dollarisation des billets ; Dépôts dans le système bancaire national : dollarisation financière interne ; Dépôts dans les banques à l'étranger : dollarisation financière extérieure A partir de ce découpage, pour un contexte monétaire donné, nous proposons la typologie suivante : Tableau 1. Typologie de la dollarisation partielle
Dollarisation financière Le terme ``dollarisation partielle'' recouvre l'ensemble des cas recensés dans le tableau 1 autrement dit, la dollarisation partielle signifie le remplacement de la monnaie nationale par le dollar quels qu'en soient la forme et le motif de la détention. A la suite de cette typologie, le terme de la dollarisation partielle doit d'interpréter dans un sens générique (par opposition à spécifique). Cette dollarisation partielle correspond à différentes situations possibles qui sont synthétisées dans le tableau 1 Le commentaire de ce tableau peut se décomposer en quatre parties : v La distinction entre la dollarisation partielle au sens large et la dollarisation partielle au sens strict Selon notre tableau, du point de vue de la forme de détention, la définition la plus complète de la dollarisation partielle est celle de la dollarisation partielle au sens large qui englobe l'ensemble des formes de détentions d'actifs monétaires libellés en dollars : billets et dépôts dans le système bancaire national et à l'étranger. La dollarisation partielle au sens strict se limite à l'usage du dollar dans l'économie nationale et comprend donc les dépôts en dollars dans le système bancaire national (dollarisation financière interne) et la monnaie manuelle en dollars (dollarisation des billets).52(*) Les différentes formes de dollarisation partielle répondent à un motif particulier. Le croisement ligne/colonne du tableau donne les différents cas de figure. v La dollarisation de la réserve de valeur selon la forme de la détention de dollars Dans le tableau 1, le croisement d'une ligne (la forme) avec une colonne (le motif) apporte trois informations sur la dollarisation partielle en question ; le support, les conditions d'existence et les conditions de développement de celle-ci.53(*) Etudions d'abord le croisement entre la dollarisation des billets et la dollarisation de la réserve de valeur. C'est une situation où l'agent détient des billets pour un motif de réserve de valeur. Le tableau apporte trois informations. Premièrement, le support de cette opération est, par définition, les billets thésaurisés. Deuxièmement, l'existence de cette opération n'est liée à presque aucune condition légale car il a priori impossible d'interdire des billets en dollars entant que réserve de valeur. Troisièmement, il n'existence pratiquement aucune contrainte liée au développement de la thésaurisation des billets. La seule limite est le danger objectif lié à une thésaurisation pour un montant très élevé pouvant faire l'objet d'un vol. Une forme alternative d'actifs en dollars assurant la fonction de réserve de valeur correspond aux dépôts en dollars dans les banques. Le support de cette opération correspond typiquement à des dépôts de quasi-monnaie. Dans le système bancaire national, l'existence de cette dollarisation financière interne dépend d'un cadre légal contraignant autorisant ou non les dépôts de quasi-monnaie en dollars. En outre, deux conditions sont nécessaires au développement de ces dépôts. Premièrement, il faut que le système bancaire national propose des dépôts diversifiés avec une rémunération attractive ; autrement dit, le système bancaire national doit être libéralisé. Deuxièmement, le développement de ces dépôts nécessite que le public ait une confiance suffisance dans le système bancaire national. Dans les pays en développement, cette confiance peut facilement faire défaut. Il apparaît donc que les conditions d'existence et de développement des dépôts de quasi-monnaie dans le système bancaire national sont contraignantes et peuvent facilement ne pas être non respectées ; ce qui n'est en général pas le cas des dépôts à l'étranger. La troisième forme d'actifs assurant la fonction de réserve de valeur correspond aux dépôts à l'étranger. Nous supposons que les dépôts sont liés à un motif de réserve de valeur et correspondent donc typiquement à des dépôts de quasi-monnaie.54(*) La condition d'existence de cette dollarisation financière extérieure n'est pas contraignante. En effet, les autorités peuvent autoriser ou non certains mouvements de capitaux ; mais, l'expérience indique qu'une interdiction n'empêche pas la constitution de ces dépôts à l'étranger. En outre, les conditions associées au développement de ces dépôts à l'étranger sont presque toujours respectées : la confiance du public envers les banques internationales faisant a priori très rarement défaut. Il apparaît donc que la détention de billets et de dépôts à l'étranger en dollars pour un motif de réserve de valeur ont deux caractéristiques communes : les conditions d'existence et de développement de ces deux types d'actifs sont dans les faits peu ou non contraignants (ce qui n'est pas le cas pour les dépôts en dollars dans le système bancaire national). En outre, il est important de remarquer que la détention de billets thésaurisés et de dépôts à l'étranger sont deux opérations dont le degré de sophistication est très différent. Les dépôts en dollars à l'étranger sont des produits très sophistiqués et concernent un public relativement riche et informé. La thésaurisation des billets est une opération très rudimentaire concernant un public a priori moins informé ou, tout du moins, relativement large. Ainsi, si la possibilité des dépôts en dollars dans le système bancaire national est limitée, la fonction de réserve de valeur est assurée de manière relativement aisée par la détention de billets ou de dépôts à l'étranger en dollars. Comme ces deux opérations touchent a priori deux publics distincts, on peut penser que la détention de billets et de dépôts en dollars à l'étranger pour un motif de réserve de valeur évoluent simultanément dans le même sens lorsque le contexte monétaire se détériore.55(*) v La dollarisation des paiements selon sa forme de détention de dollars La dollarisation des paiements, ultime stade de la dollarisation partielle, prend essentiellement la forme de billets en dollars. Contrairement à la thésaurisation, la dollarisation des paiements sous forme de billets est aisément observable (même si elle n'est pas non plus directement mesurable). Si le système bancaire est libéralisé et sûr, la dollarisation des paiements peut aussi être associée avec de la dollarisation financière interne à travers la détention de dépôts à vue en dollars.56(*) L'interprétation des conditions d'existence et de développement associées aux deux situations décrites sont similaires à celle que nous venons d'étudier dans le point précédent. v La dollarisation de compte Les résultats du croisement entre la dollarisation de compte et les formes s'interprètent de manière particulière. Si les motifs de transaction et de réserve de valeur peuvent être relié à un support particulier ce n'est pas le cas du motif d'unité de compte. La fonction d'unité de compte n'a de sens que si elle est reliée au motif de transaction, autrement dit à la dollarisation des paiements. S'il y a un processus de dollarisation des billets qui correspond à de la dollarisation des paiements, alors la dollarisation de compte est concomitante à la dollarisation des billets. En outre, une transaction réelle effectuée en monnaie scripturale (dépôts à vue en dollars) implique aussi la dollarisation de compte. * 52 Band (1993) dans une typologie sur la dollarisation partielle propose cette distinction entre la substitution monétaire au sens strict et la substitution monétaire au sens large (cité dans boismey (1996). * 53 On retrouve ces trois informations pour les motifs de transaction et de réserve de valeur et non le motif d'unité de compte dont l'interprétation est particulière * 54 Nous excluons donc l'existence de dépôts à vue à l'étranger qui pourrait répondre à un motif de transaction. Dans le tableau 1.1, cette hypothèse se traduit par l'absence d'interprétation du croisement de la dollarisation financière extérieure avec la dollarisation des paiements (ainsi qu'avec la dollarisation de compte). * 55 Nous verrons, dans la section 2, l'importance de cette hypothèse dans l'étude du processus de dollarisation partielle en Equateur. * 56 Rappelons que nous excluons a priori la dollarisation financière extérieure pour un motif de transaction |
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