1.5. LA SEDIMENTATION AU
LAC KIVU
Les études sur la réflexion sismique
révèlent que les sédiments non consolidés sont
épais dans le bassin nord du lac Kivu (Wong and Herzen 1974 ;
cité par Descy et al., 2012). Les différences d'épaisseurs
des sédiments reflètent une différence d'âges des
bassins du lac.
Particulièrement, l'épaisseur est limitée
au-delà de 300 m, probablement parce que le lac a été peu
profond par rapport à sa profondeur à travers l'histoire (Degens
et Kulbicki, 1973).
Les matériaux sous les sédiments dont
l'épaisseur est inconnue ont une grande densité ;
probablement constitués des granites ou des roches
métamorphiques.
Harberyan and Hecky (1987) ont divisé le coeur de
sédiment du lac Kivu en trois différentes zones ; la zone A
(14000-9400 av. JC) : le lac était peu profond avec un grand taux
de sédimentation par accumulation des matières organiques.
L'alcalinité du lac était modérément
élevée. La dominance du Stephanodiscus astraea
a indiqué un rapport Si :P bas. Cette zone était
séparée de la zone B par une couche de cendres qui indique une
probable éruption volcanique interne (Descy et al., 2012).
Dans la zone B (9400-5000 av. JC) le lac devient plus profond
avec un taux de sédimentation réduit. C'est pendant cette
période qu'est née la Ruzizi comme exutoire (Stoffers and Hecky,
1978). Le rapport Si :P croît durant cette période à
cause du P comme facteur limitant et la dominance des diatomées dans la
biomasse algale.
La zone C, aux environs de 5000 av. JC, révèle
des changements dramatiques de l'histoire du lac. La précipitation des
carbonates cesse brusquement, alors que le carbone organique et l'azote total
augmentent de façon accentuée. Ces changements dramatiques ont
été attribués au volcanisme et aux activités
hydrothermales. (Descy et al., 2012)
Haberyan and Hecky (1987) pensent qu'une éruption
limnique similaire à celle qui a eu lieu au lac Nyos doit avoir eu lieu
au lac Kivu avec pour conséquence d'avoir causé une extinction
en masse de poissons. L'analyse de la zone C montre que dès 5000 ans av.
JC, le lac est devenu stratifié (Haberyan and Hecky, 1987).
Au début des années 1200 av. JC, le lac Kivu
devient méromictique à cause du climat chaud humide (Stoffers and
Hecky, 1987) ; la présente stratification observée au lac
Kivu date de cette époque (Degens and Kulbicki ; 1987)
Les caractéristiques physiques et le rythme de
sédimentation ont révélé des changements majeurs
dans la sédimentation à dater d'environ 50 ans derniers (Pasche
et al. 2010, Pasche 2012). La majeure partie des paramètres
physico-chimiques du lac ont nettement changé après 1960. Depuis
1960, il y a une augmentation massive de CaCO3 et des sels
dissous.
Le changement brusque dans le coeur de sédiments note
le début de précipitation des carbonates, à partir des
années 1960. Dans les 50 dernières années, le flux de
matières organiques a augmenté de 50%. Plus
précisément, le TOC a augmenté de 40% et le TN de
80% ; mais le TP c'est presque le triple (Descy et al., 2012).
L'augmentation des proportions des sols dans les sédiments
reflète une forte érosion dans le bassin versant comme
résultat des activités anthropiques (déforestation,
agriculture et exploitation minière) (Descy et al., 2012).
Les majeures modifications d'il y a 50 ans peuvent être
expliquées par une ou l'ensemble de 3 changements environnementaux du
lac Kivu à savoir les changements dans la chaine trophique
causés par l'introduction de la sardine zooplanctonophage
Limnothrissa miodon, la forte densité des populations dans le
bassin versant du lac qui augmente les apports externes en nutriments. La forte
production primaire explique la forte accumulation de TOC, TN, TP et la
précipitation des carbonates (Descy et al., 2012).
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