Emancipation et représentations sexuées des femmes dans le système fédéral du tennis français( Télécharger le fichier original )par Baptiste Jalleau Université Paris-Est Créteil - Licence STAPS Management du Sport 2013 |
B- Sur le plan qualitatifPour comprendre l'aspect historique du tennis féminin il me semble important d'aborder des points plus généralistes concernant le tennis sur un plan global, dans sa dimension sportive et sociologique. L'objectif de cette sous-partie est de comprendre l'évolution du tennis féminin depuis les débuts de ce sport de raquette, aussi bien dans les représentations sociologiques (le genre) que sur le plan sportif. Il faut savoir que le tennis sous ses premières formes fut créé à la fin du 19ème siècle en Angleterre. Il n'est à l'époque qu'un simple jeu de balle (en 1874) appelé « Sphéristique ». Cette activité se répand assez rapidement sur les côtes françaises proches de l'Angleterre. C'est au début du 20ème siècle que le tennis prend une nouvelle dimension dans le paysage sportif français, devenant un sport « phénomène de mode balnéaire »31(*). L'essor des espaces ludosportifs avec l'urbanisation des plages notamment permet une implantation du tennis de plage. Le développement des sports et des loisirs touristiques prennent de l'ampleur, ce qui a notamment été bénéfique au développement du tennis sur le territoire français. Un lien apparait comme évident entre le développement tennistique et le tourisme. Cette notion est importante dès lors que l'on considère le tennis aussi bien dans sa dimension simpliste et ludique (tennis de plage) que dans sa dimension davantage « classique », plus stricte dans ses règles, car la montée en puissance de la culture du loisir a propulsé cette discipline à un niveau de popularité nouveau pour l'époque. Le tennis est un sport de raquette se pratiquant principalement en plein air, surtout à la période estivale. Il est dès le départ une activité très élitiste, ce sont en effet les aristocrates et les citadins fortunés qui la pratiquent. Le tennis s'implante très rapidement et facilement dans les lieux de villégiature grâce à ce caractère élitiste, sa pratique est un outil de représentation et de reconnaissance propre aux élites. Ainsi, « jouer au tennis, dresser un court temporaire ou disposer d'un court, surtout en zone balnéaire, c'est affirmer l'appartenance à une catégorie sociale »32(*). C'est dans ces notions qu'il est essentiel de traiter l'historique du tennis dans une dimension sociologique, afin de comprendre les éléments propres à l'évolution et représentations de ce sport. D'une façon générale, la sociabilité sportive s'inscrit dans le processus de constitution d'une « révolution culturelle » liée aux pratiques de loisir. Dès la fin du 19ème siècle, des terrains de tennis sont construits à l'initiative d'établissements hôteliers situés en zone balnéaire, les premières compétitions apparaissent, signe d'une institutionnalisation et d'une organisation plus précise. Le rapport au corps évolue dans les mentalités, un individualisme apparaît concernant les exigences liées au corps. Désormais on se soucie de son corps, de la nature, c'est une nouvelle forme de sociabilité mondaine (début 20ème siècle). Le tennis présente une illustration idéale de ce phénomène de sociabilité, apparu avec l'émergence du loisir, l'aménagement des espaces, et la considération nouvelle du sport et des activités physiques. Selon un travail d'Elias et Dunning mené en 1994, le tennis s'est déployé à travers l'évolution des mentalités et des sensibilités, des normes et valeurs intériorisées par les pratiquants et les spectateurs. Le pratiquant se fixe des objectifs personnels et se soumet à des contraintes à l'entrainement pour y parvenir, c'est ce que l'on peut appeler « la contrainte sur soi-même ». « L'entrainement repose sur le principe d'une production physique, intellectuelle, sociale, réalisée dans des conditions prédéfinies, notamment par des règles et une éthique portant une valeur et du sens »33(*). Cette citation illustre bien le rapport nouveau au corps, l'importance récente au début du 20ème siècle accordée par les pratiquants et spectateurs à l'entrainement dans des objectifs d'efficacité sportive et/ou d'appropriation de soi par le corps. Pour conclure cette sous-partie, nous pouvons dire que le tennis est passé d'un jeu mondain à la fin du 19ème siècle reposant sur des valeurs de simple divertissement/passe-temps pour les classes sociales aisées, à un entrainement à la formation de soi correspondant à de nouveaux besoins apparus avec l'évolution de la société post-industrielle et la progression des loisirs sous toutes ses formes. L'appropriation du tennis par un groupe restreint au départ (les « riches ») a permis une considération nouvelle et novatrice de cette activité comme l'affirmation d'un style de vie. Des valeurs se sont ajoutées à la panoplie que revêt le tennis, notamment la dimension éducative. * 31 PETER Jean-Michel, « Tennis, « Leisure class » et nouvelles représentations du corps à la Belle Epoque », Staps n°87, 01/2010, p. 47 * 32 Ibid., p. 49 * 33 Ibid., p. 53 |
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