La micro finance et la lutte contre la pauvreté en RDCongo( Télécharger le fichier original )par Eric NSENSELE WA YUMBA Université protestante au Congo - Graduat 2011 |
II.1.3. Les principales Causes de la pauvreté en RDCOn peut identifier plusieurs causes structurelles telles que la forte croissance démographique, l'instabilité politique, l'instabilité macro-économique, l'insuffisance des ressources, la mauvaise gouvernance politique et économique... et les causesconjoncturelles comme les pillages de 1991 et de 1993, les deux guerres de 1996 et de 1998 et le retrait des bailleurs de fonds ayant contribué significativement à l'aggravation de la pauvreté en RDC.35(*) a. Les causes structurelles L'origine de l'aggravation de la pauvreté en RDC remonte notamment à la politique économique menée dans les années 1990 notamment en matière budgétaire et de taux de change. D'une manière générale, l'accumulation des déficits budgétaires et leur financement par la création monétaire, ainsi que la politique de taux de change ont provoqué une hyperinflation et une forte érosion des revenus réels des populations. Ces distorsions ont par ailleurs été renforcées par le fait que les gouvernements ont recouru massivement à l'endettement extérieur de manière à permettre à l'Etat de financer ses dépenses. On sait que la crise de la dette et l'incapacité de l'Etat à maîtriser ses dépenses ont été à l'origine d'une révision de la politique économique qui a surtout été caractérisée par un désengagement de l'Etat et une liberté plus grande laissée aux forces du marché. Une partie croissante de la population se retrouve de ce fait quasiment exclue des secteurs économiques et sociaux formels, si bien qu'elle n'a d'autre alternative que d'essayer de s'organiser afin de survivre en marge du système officiel. Il apparaît aussi assez clairement que l'aggravation de la pauvreté en RDC est liée à la forte croissance démographique (soit 3% en 2003). La RDC, comme la plupart des pays africains au sud du Sahara, n'a pas encore amorcé le déclin du taux de natalité qui devrait entraîner un ralentissement de la progression de sa population et une baisse consécutive de la pression sur les ressources et sur l'environnement2. Malheureusement, ni les secteurs agricole et minier, ni le secteur informel urbain ne parviennent à répondre à la croissance démographique. Il en résulte une croissance du chômage et plus particulièrement du chômage urbain.36(*) Hormis l'instabilité macro-économique et la crise de l'emploi, un autre facteur est à la base de la croissance rapide du taux de pauvreté en RDC : la très grande instabilité politique. En effet, depuis 1960, la RDC a connu sept constitutions et des changements de gouvernements pratiquement tous les neuf mois. A cela il faut ajouter les deux longues transitions des années 1990 et du début des années 2000. Il est évident que cette très grande instabilité politique et la remise en cause perpétuelle des acquis économiques et sociaux constituent des facteurs explicatifs majeurs de la dégradation des conditions d'existence des populations congolaises. Deux autres éléments expliquent aussi la pauvreté en RDC : la mauvaise gouvernance et la corruption. Les changements fréquents de gouvernements n'ont malheureusement pas introduit des changements profonds dans la gestion de la chose publique. La plupart des gouvernements n'ont pas fait preuve d'une préoccupation particulière pour la situation des couches les plus basses de la population par les programmes sociaux (éducation, santé, logement social, etc.) conscients, cohérents et finalisés. Ils n'ont pas non plus fait de la lutte contre la corruption, l'enrichissement illicite et le népotisme leur priorité. Bien au contraire, ils ont souvent intentionnellement encouragé ces fléaux qui gangrènent l'économie et expliquent dans une certaine mesure les profondes inégalités sociales observées en RDC. La pauvreté en RDC s'explique en outre par l'insuffisance des ressources financières. L'insuffisance des ressources qui, à son tour, explique dans une certaine mesure le faible taux d'investissement dans les secteurs productifs et dans les secteurs sociaux. Le manque de ressources a été particulièrement aggravé dans les années 1990 par le retrait des investisseurs et des bailleurs de fonds, ce qui a contribué à accélérer le rythme de décroissance de l'activité économique. Il faut associer à ces tableaux les effets de la propagation et/ou de la résurgence de certaines épidémies (SIDA, choléra, tuberculose, paludisme, etc.) sur la société congolaise. Le paludisme à lui seul tuerait plus de 500 000 personnes par an ! C'est dire que ces épidémies pèsent considérablement sur la société en la privant d'une grande partie de ses membres productifs. Pire, les victimes laissent derrière elles un nombre croissant d'orphelins qui sont pris en charge par les proches (ce qui constitue une charge supplémentaire pour eux) ou qui se retrouvent carrément dans la rue. Enfin, à ces causes communes aux deux sexes, il faut mentionner les facteurs explicatifs spécifiques du taux élevé de pauvreté chez les femmes : elles sont victimes d'inégalités de toute sorte ; elles ont difficilement accès aux ressources économiques (terre, travail, revenu, crédit, etc.) et aux services sociaux de base (éducation, formation, santé, protection sociale, etc.) ; les emplois qu'elles occupent sont généralement précaires ; les activités qu'elles exercent sont généralement peu productives... b. Les causes conjoncturelles Sans entrer dans les détails, disons que parmi les nombreux facteurs conjoncturels qui expliquent la forte incidence de la pauvreté en RDC, trois au moins méritent une attention particulière : les deux pillages de 1991 et de 1993, les deux guerres de 1996 et de 1998 et le retrait des bailleurs de fonds décidé au début des années 1990. Les pillages que la RDC a connus en septembre 1991 et en janvier 1993 et les guerres de 1996 et de 1998 sont sans contester les deux des facteurs conjoncturels qui ont le plus contribué à aggraver le niveau de pauvreté dans le pays. Ces évènements ont affecté le système de production et accentué le manque d'accès aux soins de santé, à l'éducation, à l'eau potable... La destruction des infrastructures a également contribué à accroître l'isolement de certaines régions et donc le manque d'accès à l'aide humanitaire. Les déplacements de populations, l'éclatement progressif des groupes et des familles, l'insécurité, conséquences directes des conflits armés, ont affecté les activités agricoles et désorganisé les circuits de commercialisation des produits. Cela a eu pour conséquence l'accélération de la marginalisation des petits paysans et la détérioration de la situation économique des ménages ruraux. La désorganisation des systèmes de commercialisation des produits agricoles a également provoqué une baisse des prix. Les revenus dans le secteur agricole sont alors devenus insuffisants pour inciter les paysans à investir davantage et à accroître leur productivité, de sorte que dans de telles conditions, ils préfèrent ne produire que pour assurer leur subsistance. La production interne de produits alimentaires étant devenue de plus en plus faible, la RDC doit recourir de plus en plus aux importations alimentaires. La seconde explication de nature conjoncturelle, déterminante, de la pauvreté en RDC nous semble découler du retrait des investisseurs et des bailleurs de fonds. Cela a contribué à aggraver la situation économique et sociale dans les années 1990. Les investisseurs privés et les bailleurs de fonds, faut-il le rappeler, avaient fini par perdre confiance aux différents gouvernements ou se sont retirés en raison de l'instabilité macroéconomique et politique, de la guerre et/ou de la corruption galopante. Hamuli Kabarthuza Baudouin écrit : « la pauvreté ou la misère extrême de la RDC peut s'expliquer uniquement par la faible performance de ses institutions, de ses entreprises, encore de ses coutumes. Notre mode de travail, notre niveau de vie et nos politiques sont déterminés par un ordre mondial et cet ordre mondial est fortement marqué par le jeu des intérêts de grandes puissances qui ne veulent pas l'avancement de la RDC et qui continuent à aggraver la misère des congolais. Nos politiques aussi avec leur mauvaise gestion ont plongé le pays dans l'abîme où il croupit c'est-à-dire chacun des gouvernements à sa part de responsabilité à la descente aux enfers que poursuit le niveau de vie congolais, dans la mesure où les dirigeants sont restés marqués non pas par le souci de promouvoir le progrès économique et social, mais par un esprit servile et fortement tourné vers le seul profit et leur sécurité personnelle. A cela s'ajoute les mécanismes financiers internationaux qui créent la pauvreté et la dépendance... »37(*) * 35Youssoufou, C., Rapport intermédiaire de recherche sur la contribution des initiatives à la lutte contre la pauvreté en RDC, 2006, p.13 * 36D'après le Ministère du Plan (2003), en 2000, l'emploi représentait 2% de la population totale, 4% de la population active Et 8% de la population active masculine contre respectivement 8%, 18% et 35% en 1958. * 37Baudouin Hamuli Kabarthuza, Donner sa chance au peuple congolais, Paris, Ed. Karthala, 2002, pp.21-22 |
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