2.1.3.2 La notion de rentabilité et sa mesure
2.1.3.2.1 La notion de rentabilité
Le concept de rentabilité est parfois difficile
à appréhender compte tenu de la diversité des approches
liée à la pluralité des notions de capitaux (capitaux
propres, capital économique, etc.) et de résultat
(résultat comptable, résultat d'exploitation, excédent
brut d'exploitation, etc.). Cette diversité correspond en
réalité aux différentes "vues" des différents
acteurs (associés, dirigeants, prêteurs, etc.).
Le dictionnaire Larousse 2009 définit la
rentabilité comme étant la capacité d'un capital à
procurer des revenus, soit par placement (dans une logique purement
financière), soit par investissement en intégrant dans un
système productif dont on attend un bénéfice
supérieur au capital investi. Dans le lexique d'économie, Silem
et Albertini (1999) ont défini la rentabilité comme étant
la capacité d'un capital investi à procurer des revenus
exprimés en termes financiers. C'est dire que la notion de
rentabilité peut être appréhendée tout au plus pour
ce qui est de l'entreprise comme l'aptitude de cette dernière à
créer plus de richesses nouvelles
12
qu'elle ne dépense de salaires, et cela en
quantité suffisante par rapport à la quantité de capital
qu'elle immobilise ( Duval, 2000).
La rentabilité constituant ainsi un bon indicateur pour
mesurer l'efficacité de l'entreprise, il convient ainsi de s'appesantir
sur ses indicateurs de mesure.
2.1.3.2.2 Mesure de la rentabilité
Deux indicateurs usuels sont privilégiés dans la
littérature économique pour appréhender la
rentabilité des entreprises : il s'agit en l'occurrence de la
rentabilité économique et de la rentabilité
financière.
La rentabilité économique mesure la
capacité de l'entreprise de dégager un résultat en
utilisant l'ensemble des moyens.
La rentabilité financière mesure quant à
elle la capacité des capitaux investis par les actionnaires et
associés (capitaux propres) à dégager un certain niveau de
profit.
Si la rentabilité financière est
supérieure à la rentabilité économique, on dit que
l'entreprise bénéficie d'un effet de levier. Une analyse des taux
de ces deux indicateurs peut du reste être faite en termes de taux de
rotation et de taux de marge.
Le taux de rotation met en rapport les ventes avec l'actif;
c'est-à-dire l'ensemble des moyens mis en oeuvre.
Le taux de marge quant à lui est le rapport entre le
bénéfice net et les ventes. Ce taux augmente quand l'entreprise
parvient à augmenter la marge réalisée sur chaque produit
vendu, soit en augmentant le prix de vente moyen, soit en limitant le
coût de revient moyen. Une entreprise peut ainsi améliorer sa
rentabilité économique de deux manières :
- soit, à volume de ventes constant, en augmentant la
marge réalisée sur chaque produit
- soit, à marge unitaire constante, en augmentant le
montant des ventes, c'est-à-dire la rotation.
De même, une entreprise peut améliorer sa
rentabilité financière de deux manières :
- Soit en améliorant la rentabilité
économique dégagée par l'utilisation de l'actif. - Soit en
modifiant la composition du passif, dans le sens d'un recours plus important
à
des moyens financiers empruntés et une limitation
relative des ressources risquées par
les associés.
Nous pouvons donc mettre en liaison ces notions
(rentabilité économique, rentabilité financière,
taux de marge, taux de rotation etc.) par le graphique suivant :
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Figure 2.2 : Analyse du taux de rentabilité en
taux de marge et taux de rotation
Source : X. Berterretche, IUT Bayonne
Il faut néanmoins préciser qu'il existe d'autres
indicateurs de rentabilité qui permettent aussi d'avoir une idée
de l'évolution de la rentabilité de l'entreprise. Il s'agit de
:
? la rentabilité commerciale qui mesure la
capacité de la société à générer du
chiffre d'affaires en fonction des volumes de ventes qu'elle réalise.
Concrètement, elle donne le taux de marge que la société
réalise sur ses ventes et ainsi permet d'estimer ses résultats
futurs en fonction des volumes de ventes prévus (chiffre d'affaires)
;
? la rentabilité globale qui mesure quant à elle
la rentabilité de l'ensemble des actifs utilisés par
l'entreprise. Tous ces indicateurs sont généralement
mesurés par le calcul de différents ratios mentionnés dans
le tableau suivant :
Tableau 1: Les ratios de rentabilité
(Profitability ratios)
1. ROS : Return On Sales ou taux de marge nette (=
Résultat net / Chiffre d'affaires)
2. ROA : Return On Assets ou rentabilité des
actifs (= Résultat net / Actif total)
3. ROE : Return On Equity ou rentabilité des
capitaux propres (= Résultat net / Fonds propres)
4. ROIC: Return On Invested Capital (= Résultat
net / Capital investi)
5. EBIT/A : Earnings Before Interests and Taxe / Assets
(= Résultat d'exploitation / Actif total)
Source : M. Albouy et H. Obeid, 2007
Nous pouvons donc constater que la notion de
rentabilité varie selon l'approche que l'on retient. C'est la raison
pour laquelle il serait utile de calculer plusieurs ratios pour avoir la vision
la plus précise possible de la rentabilité de l'entreprise
étudiée.
14
Ainsi présenté la notion de rentabilité
et ses mesures, il convient maintenant de nous appesantir sur le
deuxième aspect de la performance à savoir la
productivité.
2.1.3.3 La notion de productivité et sa mesure
2.1.3.3.1 La notion de productivité
La productivité peut être
considérée globalement comme une mesure qui permet de saisir la
relation entre output et input et plus précisément une relation
d'efficience ou d'économie des ressources qui existe entre des
résultats et les moyens mis en oeuvre pour atteindre ces
résultats (Arena, Benzoni, De Brandt et Romani, 1991). La
productivité de l'entreprise apparaît clairement comme le rapport
entre une production valorisée, les extrants et l'ensemble des facteurs
mis en oeuvre qui sont les intrants (Coulaud, Croce et Dervaux, 1986).
Ainsi, selon Leray (1983), la productivité,
contrairement à la rentabilité qui est une mesure exogène
de l'efficience, est une mesure endogène au processus de production.
Mais, il est possible de donner une dimension plus opératoire au
concept. En fait, la productivité pourrait aussi se définir comme
le taux d'accroissement de l'output moins la moyenne
pondérée des taux de croissance de différents
input, ou les pondérations représentent la part de
chaque input dans le coût total (Selon Hartely, Parker et
Martin, 1991).
Soulignons d'ores et déjà que le but
recherché dans l'étude de la productivité d'une firme est,
de façon implicite de saisir le degré d'efficacité de
celle-ci. D'où la nécessité de s'appesantir sur la notion
d'efficacité productive.
? L'efficacité productive
Une fonction de production donne le montant maximum d'output
que nous pouvons obtenir à partir d'un vecteur d'inputs, étant
donné une certaine technologie de production (Agnier, Lovell et Schmidt,
1977). Cette fonction constitue une frontière. La comparaison du vecteur
outputs-inputs d'une firme avec sa frontière de production nous informe
sur sa productivité (Farell, 1957 ; Sadoulet et De Janvry, 1995). Dans
les deux paragraphes qui suivent, nous allons faire ce type de comparaison
selon deux cas de production différente.
? Cas mono-output (y) mono-input (x)
Il s'agit du cas où la production d'un type d'output
nécessite un seul type d'input. La fonction de production f(x) est
représentée sur le graphique ci-dessous.
15
Figure 2.3 : Fonction de production
mono-output/mono-input
Source : FARELL, 1957
Les points sous les courbes (tels que D et C) correspondent
à des états réalisables, mais qui pourraient être
améliorés. En effet, avec une plus faible quantité
d'input. Il est possible de produire la même quantité d'outputs.
En revanche les points au-dessus de la courbe (tel que E) ne peuvent pas
être atteints. Ces états ne sont pas réalisables avec la
technologie de production existante.
La distance entre le niveau d'input réalisable et la
frontière de production donne une mesure de l'inefficacité de la
firme étudiée. Cette quantité, tout simplement
qualifiée de distance d'input, sera utilisée par la suite.
Le passage de l'état D à l'état B
signifie un accroissement d'efficacité dans l'utilisation des inputs
avec la technologie existante. En revanche le passage à l'état E
nécessite un changement dans la technologie de production.
? Cas mono-output multi-inputs
Désormais, nous étudions le cas où la
production de l'output unique se fait à partir de plusieurs inputs. Nous
illustrerons par souci de simplification la configuration dans laquelle
Y= f (X1, X2), c'est-à-dire celle où l'output
s'obtient à travers la combinaison de deux inputs X1 et X2.
L'efficacité économique est le fruit de la
combinaison de l'efficacité technique et de l'efficacité
allocative (Farell, 1957), comme l'illustre la figure ci-dessous.
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Figure 2.4 : Fonction de production
mono-output/multi-inputs
Input X2
|
|
Input X1
|
|
Source: Farrell, M. J., p. 254
|
Sur le graphique ci-dessus, l'ensemble des points
techniquement efficaces correspond à l'isoquant TT'. Ainsi, tous les
points au dessus de l'isoquant TT' sont techniquement inefficaces à
l'exemple du point P. Au point P l'inefficacité technique est
représentée par le segment QP. Il est possible de produire le
même niveau d'output avec une diminution de tous les inputs dans la
proportion QP/OP. Ainsi, Farrell (1957) a proposé de mesurer le
degré d'efficacité technique (ET) par le rapport OQ/OP, qui varie
entre zéro et l'unité
Bien qu'ils soient techniquement efficaces, tous les points
sur l'isoquant ne le sont pas allocativement. Une combinaison de facteurs est
dite allocativement efficace si le taux marginal de substitution est
égal au rapport des prix des facteurs. Ainsi, le point Q',
déterminé par la tangente de l'isocoût AA' à
l'isoquant TT', est allocativement efficace. L'efficacité allocative
(EA) ou l'efficacité prix des points P ou Q est mesuré par le
rapport OR/OQ. La distance RQ représente la réduction de
coût si la production correspondait au point Q'. Ce dernier est efficient
du point de vue allocatif, puisqu'il est déterminé par la
tangente de l'isocoût AA' à l'isoquant TT'. Le produit des
efficacités techniques et allocatives est appelé
efficacité totale (ETT) ou économique.
ETT = (OR/OP) = (OQ/OP) x (OR/OQ) = ET x EA
Après avoir étudié le sens du terme
productivité, nous allons désormais voir comment
l'évaluer.
17
2.1.3.3.2 Mesure de la productivité
Il existe différentes méthodes de mesure de la
productivité. Celles qui peuvent être fondées sur les
indices de productivité (Arena et al. 1991), celles fondées sur
le calcul de différents ratios (Megginson et al.1994) et celles
économétriques (Rouabah, 2001).
? Les méthodes fondées sur les indices de
productivité
Plus récemment la littérature sur la
productivité a développé des approches non
paramétriques qui utilisent comme indicateurs de performance des indices
calculés directement à partir des données discrètes
sur les inputs et les outputs (Raffarin, 1999). La productivité consiste
alors en un rapport d'un indice des outputs sur un indice des inputs. Nous
allons nous intéresser à la distinction qui existe entre ces deux
grandes catégories de mesures de la productivité.
La première est qualifiée de mesure partielle de
la productivité. Elle met en rapport la croissance de l'output avec le
volume d'un seul input (Single Factor Productivity : SFP). Cependant, cette
croissance peut également être comparée avec le volume
d'une partie des inputs, l'autre partie n'étant pas prise en compte.
Toutefois, la productivité partielle soulève un certain nombre de
difficultés dont le fait qu'elle ne tient compte que d'un seul input ou
d'une partie d'inputs alors que la firme peut améliorer la
productivité d'un input aux dépend d'un autre ; mais aussi le
fait que la nature hétérogène des inputs est
négligée car en effet, concernant la main-d'oeuvre par exemple,
certains travailleurs peuvent être plus productifs que d'autres.
La seconde est qualifiée de mesure totale de la
productivité. Sadoulet et De Janvry (1995) la présentent comme la
quantité totale d'output agrégée obtenue à partir
d'une unité d'input total agrégé (Total Factor
Productivity : TFP). Le problème posée par l'existence de
plusieurs facteurs de production et (ou) d'output est résolu par l'usage
d'indices agrégés, pondérés par la part des
différents inputs et outputs respectivement dans le coût total et
la recette totale. Cette méthode permet de parer au fait que plusieurs
outputs sont produits à partir de plusieurs inputs. Un autre avantage
par rapport à la mesure partielle est que cette mesure peut
répondre aux questions soulevées quand on s'intéresse
à la productivité : elle évalue les différences de
productivités entre les entreprises et elle mesure la croissance de la
productivité au cours du temps. Le tableau suivant présente un
aperçu de quelques formules d'indices de productivité.
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Tableau 2: Typologie et mesure de la
productivité
Source : Extrait du tableau 1 p.517 d'Arena et al.
(1991)
A côté des méthodes fondées sur les
indices de productivité, on retrouve les méthodes comptables.
? La méthode fondée sur le calcul de
différents ratios de productivité
Cette approche qui se base sur les mesures comptables,
évalue la productivité à l'aide du calcul d'une batterie
de ratios mentionnés dans le tableau suivant :
Tableau 3: Les ratios de productivité
(Productivity ratios)
1. SPE : Sales Per Employee ou productivité
commerciale (= Ventes Réelles / Nombre d'Employés)
2. IPE : Income Per Employee ou bénéfice
par employé (= Bénéfice net / Nombre d'employés)
3. APE : Assets Per Employee ou productivité des
actifs (= Actif total /Nombre d'employés)
Source: M.Albouy et H. Obeid, 2007
19
? Les méthodes
économétriques
La productivité s'évalue à travers des
changements techniques que connaît le système de production de la
firme considérée. Ces modifications peuvent porter aussi bien sur
la fonction de production que sur celle des coûts. Cependant, ces deux
fonctions ne sont pas données et doivent de facto être
estimées à l'aide de paramètres. On parle alors d'approche
paramétrique (Lovell, 1993).
De façon concrète, une estimation de la fonction
de production est faite à différents instants. On peut ainsi
savoir s'il y a eu modification des paramètres de la fonction. Un
déplacement de la fonction de production vers le haut caractérise
une augmentation de la productivité, dans la mesure où les gains
de productivité sont le fruit d'une amélioration de la technique
de production. De la même manière, l'on estimera à divers
instants une fonction de coût. Une amélioration de la
productivité se traduira par un déplacement de la fonction de
coût vers le bas, puisque la firme est d'autant plus productive que ses
coûts sont bas.
Ainsi présenté les contours de la notion de
privatisation et de performance, il serait temps de nous appesantir sur les
théories supportant la thèse de la supériorité de
la forme privée de propriété.
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