Introduction
La contribution de l'Afrique subsaharienne à
l'économie mondiale reste en général très
marginale. Entre 1995 et 2010, l'Afrique Sub-saharienne a enregistré un
taux de croissance de près de 5%, signe d'un léger redressement
économique. La situation des pays de l'UEMOA1 est plus
préoccupante dans la mesure où tous les huit pays que compte
l'Union depuis 1997 restent toujours des pays à faible revenu avec un
taux de croissance moyenne de 3.7%2 pour la zone sur la
période 1995 - 2010.
Pour rattraper ce retard de croissance par rapport à
l'ensemble des pays de l'Afrique subsaharienne et amener les performances
économiques des pays de la zone à des niveaux proches de ceux des
pays émergeants, des reformes multisectorielles sont entreprises et un
accent particulier a été mis sur la mobilisation des ressources
intérieures et extérieures des pays. Ainsi, des efforts sont
fournis pour attirer davantage les capitaux étrangers et faciliter les
investissements directs étrangers (IDE). De même des mesures
concrètes sont prises pour garantir aux donateurs d'une bonne
utilisation des fonds d'aide au développement.
En effet, de nombreuses initiatives ont été
prises au niveau international afin d'accroître le volume de l'aide
publique au développement (APD) et son élément don aux
pays pauvres. Mais ce qui n'a pas beaucoup évolué c'est le peu
d'attention que les responsables politiques africains accordent à la
mobilisation de l'épargne intérieure. La forte dépendance
à l'égard de l'aide étrangère pour financer les
besoins de développement a certainement joué un rôle dans
cette attitude. A l'origine, l'aide était censée compléter
les ressources financières internes afin de stimuler les efforts de
développement et d'aider les pays à sortir du
sous-développement. Malheureusement, elle a plutôt fini par
étouffer l'épargne intérieure et à créer une
forte dépendance des économies africaines. L'efficacité
limitée de l'APD en termes de développement a été
imputée pour partie à l'utilisation inefficiente de l'aide, ce
qui signifie que seuls des montants relativement restreints ont
été effectivement utilisés aux fins du
développement (CNUCED, 2006a).
1 L'UEMOA est composée de huit pays dont le
Bénin, le Burkina Faso, la côte d'Ivoire, la Guinée-Bissau,
le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.
2 Nos calculs à partir des données des
la Banque Mondiale, ADI 2011
2
Déterminants de l'épargne domestique dans
l'UEMOA
Les flux d'investissements directs étrangers (IDE) vers
les pays d'Afrique dont l'UEMOA, bien qu'en hausse ces dernières
années, restent trop limités sur le plan géographique et
trop concentrés sur les industries extractives pour avoir un effet
notable en termes de création d'emplois et de croissance
économique. En plus, l'environnement politique et le climat des affaires
n'ont pas encouragé les investissements directs étrangers dans
ces pays. Et pour un grand nombre d'acteurs économiques, les politiques
de financement extérieur ont eu pour effet d'accroître le niveau
d'endettement extérieur des pays en développement, ce qui a fini
par pénaliser leur croissance. Ces constats s'accompagnent d'une prise
de conscience progressive des vertus de la mobilisation de l'épargne
intérieure dans la conduite du développement.
En effet, pour réussir le processus du
développement économique, l'on ne saurait recourir
continuellement aux ressources extérieures qui sont d'ailleurs instables
et très sensibles à l'environnement économique
international caractérisé actuellement par des crises à
répétition. D'où la nécessité mobiliser et
de mettre à contribution les ressources domestiques disponibles de ces
pays. En tirant parti des ressources financières intérieures, on
pourrait réduire le déficit de ressources disponibles et
accélérer le processus de développement économique.
Telle mobilisation peut provenir à la fois du secteur public et du
secteur privé.
La mobilisation de l'épargne domestique vers les
projets d'investissement constitue une condition cruciale pour la
réussite des stratégies de croissance et de réduction de
la pauvreté dans les pays à faible revenu, comme l'ont
souligné les expériences historiques d'industrialisation des pays
aujourd'hui développés ou en Asie de l'Est. Une grande part de la
disparité dans les performances de croissance entre les pays du Sud est
souvent attribuée aux différences entre les taux d'épargne
et d'investissement. De faibles taux d'épargne peuvent maintenir la
croissance à des niveaux faibles (Solow, 1956).
Ainsi, lorsque les ressources domestiques n'arrivent pas
à financer entièrement les besoins d'investissement, il est
possible de recourir aux ressources externes pour combler le gap et non
l'inverse. Bien que la dépendance à l'épargne
extérieure a ses avantages, elle expose davantage le pays aux chocs
extérieurs. Et contrairement à l'interprétation
répandue de la «théorie du cercle vicieux», force est
de constater qu'aucun pays n'est en effet trop pauvre pour épargner. Les
études menées dans le domaine de la microfinance ont mis en
exergue chez les populations démunies des pratiques d'épargne
très variées. Dès lors, l'épargne domestique
demeure une source privilégiée de financement de l'investissement
par souci de
3
Déterminants de l'épargne domestique dans
l'UEMOA
réduire au maximum la vulnérabilité de
l'économie aux fluctuations de l'économie internationale.
Au cours de ces dernières années, nombre de
travaux empiriques se sont intéressés aux déterminants de
l'épargne aussi bien dans les pays développés que dans les
pays en développement. Ce regain d'intérêt pour les
déterminants de l'épargne est motivé par la chute
croissante dans les taux d'épargne pour la plupart des pays de l'OCDE et
le fossé grandissant entre l'épargne et l'investissement dans les
pays en développement (Athukorala et Sen, 2004). En ce qui concerne les
économies de la zone l'UEMOA, l'investissement n'a été en
moyenne que de 17% du PIB réel entre 1995 et 2010 bien qu'il
connaît une tendance en légère hausse ces dernières
années. L'épargne domestique ne fait pas exception puisque durant
la même période son taux moyen n'est que de 12.85% du
PIB3.
Il n'y a plus de doute que le défi est de promouvoir
l'épargne domestique dans les pays pour augmenter le taux
d'investissement et atteindre des taux de croissance plus élevés.
Pour cette raison, la connaissance des principaux déterminants de
l'épargne domestique des pays de la zone UEMOA revêt d'une
importance capitale dans la formulation des politiques économiques
pouvant permettre de rehausser les niveaux des taux d'épargne domestique
pour répondre aux besoins de la croissance économique.
Il devient, dès lors, nécessaire de se demander
quels sont les principaux facteurs qui guident les comportements
d'épargne dans les pays de l'UEMOA ?
C'est à cette interrogation que tente de répondre
ce travail de manière générale.
Plus spécifiquement il s'agit de:
- déterminer les variables macroéconomiques qui
affectent l'épargne domestique dans l'UEMOA,
- identifier les facteurs démographiques qui
influencent les performances d'épargne intérieure des pays de la
dite zone.
Pour atteindre ces objectifs, nous posons les hypothèses
suivantes :
? Les variables macroéconomiques affectent
différemment, et selon leur nature, le taux d'épargne domestique
dans l'UEMOA.
? Les variables démographiques déterminent
négativement, et dans une certaine mesure, les taux d'épargne
domestique dans l'espace UEMOA.
3 Nos calculs à partir des données de la
BCEAO, 2010
4
Déterminants de l'épargne domestique dans
l'UEMOA
Le reste du travail est organisé comme suit : le
chapitre 1 présente structure de l'épargne domestique et
l'analyse des comportements d'épargne dans l'UEMOA; le chapitre 2 est
consacré à la revue littéraire sur l'épargne ; le
chapitre 3 traite de la méthodologie et présente les
résultats et les discussions suivies des implications de politiques
économiques et la conclusion.
5
Déterminants de l'épargne domestique dans
l'UEMOA
|