UNIVERSITE DE YAOUNDE II BP : 1365 YAOUNDE ; BP : 18
SOA Tél. : 22 21 34 04 / Fax : 77 99 14 23
FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES BP : 1365
YAOUNDE ; BP : 18 SOA Tél. : 22 20 11 54 e-mail : fsjpuy2@
yahoo.fr
fsjpuy2@uy2-soa.cm
Département de Droit Public
LA LIBERALISATION DES PRIX AU CAMEROUN THEME
:
MEMOIRE
PRESENTE ET SOUTENU PUBLIQUEMENT EN VUE DE L'OBTENTION DU
DIPLOME d'ETUDES APPROFONDIES (DEA) EN DROIT PUBLIC OPTION : DROIT PUBLIC
FONDAMENTAL
Par
PIERRE DESIRE EFFA MESSI
MAITRISE EN DROIT PUBLIC
Sous la direction de
DR. MATHIEU B. MEBENGA
CHARGE DE COURS
i
Mars 2008
ii
AVERTISSEMENT
L'université de Yaoundé II n'entend donner
aucune approbation, ni improbation. Les opinions émises dans le
présent mémoire sont propres à son auteur.
iii
A mes parents : le très regretté MESSI MBARGA
Pierre et Mme EDZIMBI TSALA Lucie pour toute l'énergie qu'ils nous ont
toujours procurée dans la quête du savoir et de la vie.
iv
REMERCIEMENTS
Que tous ceux qui, de près ou de loin, ont
oeuvrés et contribués moralement et matériellement
à la réalisation de ce travail trouvent ici l'expression de notre
profonde reconnaissance.
Nous voudrions particulièrement exprimer toute notre
profonde gratitude au Docteur Mathieu MEBENGA, Directeur du mémoire, qui
a su avec patience, courtoisie et rigueur, guider nos premiers pas dans le
monde de la recherche. Celle-ci s'adresse également à tous nos
enseignants, qui ont su, avec rigueur et fermeté, stimuler en nous
l'amour du droit et de la science du droit.
Comment par ailleurs oublier le soutien inestimable de MM. NGA
EFFA David, ELOUNDOU EFFA Nelson, MESSI EFFA Du Christ et de Mme NDONGO BIBI
Salomé ?
5
TABLE DES ABREVIATIONS
A.J.D.A : Annuaire Juridique de Droit administratif
A.R.S.E.L Agence de Régulation du Secteur
de l'Electricité.
A.R.T Agence de Régulation des
Télécommunications.
APD Archives de Philosophie du Droit
CAPME Centre d'Appui aux Petites et Moyennes
Entreprises.
CCIMA Chambre de Commerce, d'Industrie, des
Mines et
d'Agriculture
CEMAC Communauté Economique et
Monétaire des Etats de l'Afrique Centrale
CNUCED Conférence des Nations Unies pour
le Développement.
cf. : Confer
CICC Comité Interprofessionnel du Cacao
et du Café.
CNC Commission Nationale de la Concurrence.
Coll. Collection.
CRC Conseil Régional de la Concurrence
CSPH Caisse de Stabilisation des Prix des
Hydrocarbures.
Ed. Edition
GATT Accord Général sur les Tarifs
Douaniers et le Commerce
L.G.D.J Librairie Générale de
Droit et de Jurisprudence
MINCOMMERCE Ministère du Commerce.
MINDIC Ministère du Développement
Industriel et Commercial
N° Numéro
OHADA Organisation pour l'Harmonisation en
Afrique du Droit
des Affaires.
6
OMC Organisation Mondiale du Commerce.
ONCC Office National du Cacao et du
Café.
ONCPB Office National de Commercialisation
des Produits de
Base
OSC Organe de Surveillance de la
Concurrence
P.U.A Presses Universitaires d'Afrique
P.U.F Presses Universitaires de France
QSJ Que sais-je ?
R.D.P Revue de Droit Public et de science
politique en France et
à l'étranger
R.D.S.P Revue de Droit et de Science
Politique
R.F.D.A Revue Française de Droit
Administratif
R.G.D Revue Générale de
Droit
R.J.P.I.C Revue Juridique et Politique
Indépendance et Coopération
RASEG Revue Africaine des Sciences
Economiques et de Gestion
RASJ Revue Africaine des Sciences
Juridiques
S.O.P.E.C.A.M Société de
Presses et d'Edition du Cameroun
Ss.dir Sous direction
Svt(e) Suivant(e)
U.C.A.C Université Catholique d'Afrique
Centrale
UYII Université de Yaoundé II
7
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
Première partie LA DEREGLEMENTATION DES
PRIX
Chapitre 1er LES FONDEMENTS DE LA
DEREGLEMENTATION 13
Section 1ère Les fondements
externes 13
Section 2 Les fondements internes 26
Chapitre 2 LE CONTENU DE LA DEREGLEMENTATION
39
Section 1ère Le
désengagement de l'Etat 39
Section 2 L'ouverture aux lois du marché
.... 52
Seconde partie LA REGULATION DES PRIX
Chapitre 1er LES JUSTIFICATIONS DE LA
REGULATION. 62
Section 1ère La protection
d'intérêts particuliers 62
Section 2 La préservation de
l'intérêt général .. 79
Chapitre 2 LES MANIFESTATIONS DE LA REGULATION.
92
Section 1ère La
multilatéralisation de l'encadrement 93
Section 2 La flexibilisation de l'encadrement
106
CONCLUSION GENERALE ... ..
BIBLIOGRAPHIE ... ... ...
121 ANNEXES
TABLE DES MATIERES
8
RESUME
Sous l'influence des Politiques d'ajustement Structurel, le
Cameroun s'est converti aux dogmes prônant l'ouverture de son
marché au commerce international des biens et des services. La
libéralisation de l'économie qui en a résulté a
favorisé une transformation substantielle du régime juridique des
prix. Ce mouvement d'ouverture s'est illustré à travers un
paradoxe, à savoir une liberté des prix formellement
affirmée sur le marché et concomitamment une action
étatique de plus en plus prégnante en matière de
détermination des prix. Cette recherche entend expliquer ce paradoxe
à travers l'étude des techniques juridiques qui l'ont rendue
possible, en l'occurrence la déréglementation et la
régulation des prix.
9
INTRODUCTION GENERALE
10
Tout observateur de la vie publique économique plus ou
moins averti, aurait sûrement du mal à comprendre pourquoi l'on a
pu parler au Cameroun, d'une libéralisation des prix1. Non
pas que la libéralisation des prix ne soit pas tout à fait
perceptible ni réelle, mais simplement parce que d'une part, ses
manifestations dans la vie quotidienne restent assez timides et que d'autre
part, l'intervention de la puissance publique parait plutôt
prépondérante. De l'observation, il se dégage l'impression
générale que les prix continuent en général
d'être déterminés par l'Etat, D'où la tendance d'une
certaine opinion de conclure à une dénégation même
de toute libéralisation des prix sur le marché.
S'il est vrai qu'une telle vision peut paraître abusive
quand l'on considère que la concurrence actuellement ambiante sur le
marché, autant que la spéculation sauvage qui l'accompagne sont
des corollaires incontestables de ladite libéralisation ; il n'en
demeure pas moins vrai - du moins pour certains - qu'un certain paradoxe entre
libéralisation des prix et encadrement étatique des prix semble
transparaître. Ceci ne peut que susciter des interrogations sur ce
processus même de libéralisation des prix au Cameroun. Une
investigation scientifique sur ce sujet exigera pour plus de clarté, une
préalable définition des termes clés de l'étude (a)
afin d'en mieux déterminer le cadre (b) et d'en dégager le
contexte (c). L'intérêt d'une telle recherche (d) découlera
de la problématique (e) qu'elle pose et de laquelle se dégagera
une idée générale (f), commandée par une
démarche méthodologique appropriée (g). Démarche
méthodologique à partir de laquelle une ébauche de
raisonnement sera possible (h).
a. Définition des termes clés
La compréhension du sujet n'est possible
qu'après un exercice de précision terminologique des deux termes
qui en composent l'intitulé. A savoir :
«libéralisation» et «prix.»
? Libéralisation:
1 NYAMA (J-M), « La liberté de commerce et la
concurrence au Cameroun, dans le cadre de la loi camerounaise du 10 août
1990 », RJA/PUC n°1/ et 2, 1991, p. 59.
11
D'après Le Petit Larousse 2007, la
libéralisation signifie «action de
libéraliser», c'est-à-dire de rendre une
économie plus libérale. Or, cette définition ne
précise pas les acteurs de cette action et envoie d'ailleurs rechercher
la définition du mot «libéral». Ceci est
également le cas dans la définition tirée du
Vocabulaire Juridique2 selon laquelle « la
libéralisation est la tendance législative à rendre plus
libéral le système de droit, à admettre ou à
permettre plus largement un comportement, une opération etc. notamment
par ouverture de nouveaux cas ou suppression de formalités ».
Si cette définition a le mérite de présenter
la libéralisation comme étant un processus dont elle ressort
clairement les modalités, elle reste incomplète, et il s'impose
par conséquent la recherche de la définition du mot
«libéral».
Dans le Vocabulaire juridique, le concept
«libéral» signifie « ce qui se
réclame du libéralisme (politique ou économique), qui
proclame et consacre comme un principe fondamental des libertés
publiques, la liberté du marché ».
Libéral se dit également d'un régime
politique ou d'un système économique non autoritaire, ni
dirigiste, encore moins interventionniste, le libéralisme étant
la doctrine qui en découle. Vue sous cet angle, la notion
libéralisation se rapproche de celles de
déréglementation et de privatisation. Si ces
notions sont voisines en ceci qu'elles traduisent chacune le recul de la
présence étatique en matière économique, elles ne
sont pas moins différentes en terme de degré et de domaine.
Ainsi, la déréglementation et la privatisation apparaissent
toutes comme des procédés de libéralisation. Seulement,
alors que la déréglementation traduit le recul ou le
redéploiement des normes, la privation, elle, traduit le recul des
institutions, et notamment les entreprises publiques, comme moyen par
excellence de l'interventionnisme étatique.
Au regard de tout ce qui précède, la
libéralisation dans cette étude devra être
considérée comme le processus de retrait de l'interventionnisme
étatique en matière économique pour laisser les lois du
marché la régir.
? Prix :
Le prix est défini par le Petit Larousse comme la
valeur d'une chose estimée en monnaie. Cette définition n'est pas
très éloignée de celle donnée par le
Vocabulaire juridique pour qui il s'agit d'une «
somme d'argent due par l'acquéreur au vendeur ». Le
Lexique des
2 CORNU (G), Vocabulaire juridique, 7e
éd. , Association Henri Capitant, PUF, 2005, p.536 .
12
termes juridiques3, dans la même logique,
définit le prix comme une somme d'argent due par l'acquéreur d'un
bien au vendeur, toute « somme due en échange d'un
service ». La plus-value apparaît en ceci que le
lexique intègre le service. Le prix apparaît ainsi comme un
élément de conclusion de contrat de vente ou de prestation de
services. A cet effet, le tarif des services publics ou privés
intègrera notre appréhension de la notion de prix. En sera
écarté, le salaire, qui traduit certes un prix ; la
rémunération d'un service, mais d'un service ne relevant pas de
l'activité commerciale. Tout paiement de bien ou service en nature sera
également écarté, puisque dans le cadre de cette
étude, le prix devra être utilisé comme un objet de
politique économique, objet de l'intervention étatique en
matière économique, renvoyant à une somme d'argent
donnée, due ou perçue en contrepartie d'un service ou d'un
bien.
? Libéralisation des prix
:
En considération des précédents
développements, réfléchir sur la libéralisation des
prix revient à mener une recherche sur le processus de retrait de l'Etat
du marché, pour laisser les lois du marché y régir les
prix. L'objet de l'étude se trouve donc être la
libéralisation et la matière, les prix. Ceci traduit
l'appartenance de l'étude à une discipline spécifique de
la science du droit dont il convient de délimiter les contours.
b. Délimitation de l'étude
La délimitation géographique découlant
naturellement de la précision « au Cameroun
», il convient ici de délimiter le champ
matériel, puis temporel de l'étude.
? Délimitation matérielle de
l'étude
Il sera question d'évoluer dans le cadre conceptuel et
institutionnel du Droit public économique, entendu comme l'ensemble des
règles à travers lesquelles la puissance publique manifeste
directement ou indirectement sa présence dans le domaine
économique4. Cette définition est assez proche de
celle des Professeurs André De LAUBADERE et Pierre DELVOLVE5
d'après qui « le Droit public économique est ...
le droit applicable aux interventions des personnes publiques dans
l'économie et aux organes de ces interventions ou encore, pour faire
court, le droit de l'intervention publique en matière économique
».
3 GUILIEN ® et Vincent (J), Lexique des termes
juridiques, Dalloz 13e éd ., 2001 ,P.337.
4 COLSON (J. P), Droit public économique, LGDJ
3e ed., Paris, 2001, p.9.
5 De LAUBADERE (A) et DELVOLVE (T), Droit public
économique, Dalloz, Paris 1986.
13
Ainsi pour nous, le Droit public économique est
davantage l'aspect public du Droit économique que l'aspect
économique du Droit public. L'aspect privé de ce Droit
économique renvoyant plutôt au Droit des affaires. Alors que
l'aspect économique est l'apanage des études de l'école de
l'analyse économique du droit. La présence de l'Etat en
matière économique, quel qu'en soit le degré, constitue
l'élément justificatif par excellence de l'existence de cette
discipline scientifique. Discipline de Droit public, qui, n'étant pas
exclusivement Droit administratif de l'économique6, entend
tout de même se distinguer, même relativement du Droit
privé7 tout en incluant les autres matières de Droit
public8.
Il faudrait en effet relever l'interdisciplinarité, de
même que le caractère transversal de la discipline scientifique
(Droit public économique), pour faire valoir qu'il ne sera pas
aisé d'exclure totalement certaines données taxées
à tort ou à raison de privatistes, voire d'économistes qui
se prêtent bien à cette étude. La matière de
l'étude (les prix) ne se révèle d'ailleurs qu'assez
fluctuante, glissante, complexe et technique. Toute chose de nature à
décourager toute tentative d'investigation scientifique, mais ayant au
contraire fondé la témérité et le désir de
s'investir dans ce champ scientifique au final, passionnant et émouvant,
bien qu'assez éprouvant9, mettant en exergue une
évolution dans le temps du régime juridique des prix.
? Délimitation temporelle de
l'étude
L'étude se veut panoramique, c'est-à-dire
qu'elle se traduit en une chronique vivante d'un processus de transformation de
l'encadrement des prix dans le temps. Ce processus a commencé dans les
années 1990 avec l'édiction d'une panoplie de lois dites
libérales10, s'inscrivant dans la logique du
désengagement de l'Etat, ayant en général marqué
cette période. Cette date marque la rupture d'avec le régime
général ordinaire des prix dégageant de
6 Comme le disait à ce propos le Professeur
Hubert-Gérald HUBRETH, « Le Droit administratif, bien
qu'instrument privilégié de l'action publique en matière
économique, n'est certainement pas, ou du moins, plus sont instrument
exclusif (...), elle emprunte ainsi la voie du Droit commun, et notamment le
Droit commercial », HUBRETH (H-G), Droit public
économique, Cours, Dalloz, Paris, 1997, p.5.
7 De nombreuses règles issues du Droit privé,
notamment commerciales et des affaires régissent certaines
activités économiques des personnes politiques. COLSON (J.P), Op.
cit., p.6.
8 LINOTTE (D), MESTRE (A) et ROMI (R), Service public et
Droit public économique,, 3e ed. LITEC, Paris, 1995.
9 Puisque confrontant sans cesse le chercheur positiviste
à la réalité empirique suivant laquelle, dans
l'étude de certaines matières de la science du droit,
l'étude dudit droit ne peut véritablement se détacher de
celle de la pratique du droit. Lire à ce propos MEBENGA (M), « Le
droit et ses pratiques : l'expérience camerounaise » in KUYU
MWISSA(C), repenser les droits africains pour le
21esiècle,bibliothèque de l'académie
africain,éd Pluriels,Menai Buc, 2002, pp69-87
10 Cf. Cameroun : Droit et législation, recueil des
nouveaux textes, SOPECAM, 1990
14
l'ordonnance n° 72/18 du 17 octobre 1972 un
système rigide autoritaire, unilatéral, voire dirigiste des prix.
Ce régime sera progressivement modifié par des textes de plus en
plus libéraux. Lesquels textes de natures diverses et de forces
juridiques variées seront étudiés suivant une chronologie
retraçant la chronique du processus de libéralisation des prix.
Panoplie de textes portant sur des domaines multiples tels que le commerce, la
concurrence, les investissements, les institutions économiques, bref,
toutes choses relatives au prix qui se meuvent en fonction d'un contexte auquel
n'échappe pas la présente étude.
c. Contexte de l'étude
? Le contexte sociopolitique
Le Cameroun s'est ouvert au multipartisme depuis les
années 199011. Ceci a favorisé l'avènement
d'une démocratie pluraliste marque de la soumission du pouvoir aux
exigences des bailleurs de fonds internationaux12, dans le cadre de
la mise en oeuvre des programmes d'ajustements structurels au moyen de la
conditionnalité13. Elle apparaît en effet comme
l'instrument d'une normalisation systématique et rigoureuse («
normalisation - démocratisation »,
normalisation - libéralisation » des
droits africains post coloniaux)14dont l'une des variantes
fondamentales sera la libéralisation économique,
libéralisation de secteurs entiers telles que les
télécommunications, mais aussi d'objet de politique
économique à l'instar des prix. En dehors de cette influence des
bailleurs de fonds sur l'économie camerounaise, et d'ailleurs sous leur
impulsion, la libéralisation des prix apparaît comme un corollaire
de la politique de privatisation des entreprises publiques ayant jusqu'ici
traduit le désengagement de l'Etat du secteur productif15, et
fait oublier un tant soit peu le dirigisme des prix alors inspiré des
politiques parfois contradictoires («libéralisme
planifié», «libéralisme
communautaire») de l'âge d'or de l'interventionnisme
étatique au Cameroun. Elle se présente
11 MEDARD (J.F), « Etat, démocratie et
développement : l'expérience camerounaise » in (Ss. dir.),
MAPA (S), Développer par la démocratie ? Injonction
occidentale et exigence planétaire, 1995, p.372.
12 MANGA ZAMBO (E), « Les fondements et les enjeux de la
privatisation au Cameroun », Cahier de l'UCAC, 2000, p.135.
13 ONDOA (M), « Ajustement structurel et réformes
du fondement théorique des droits africains post coloniaux : l'exemple
camerounais », RASJ, Vol.2, n°1, 2001, p.8 (La
conditionnalité apparaît en effet comme un ensemble d'exigences
posées par les bailleurs de fonds internationaux et acceptées par
les Etats demandeurs en échange d'avantages ou de prestations
financières, généralement en rapport avec la dette
extérieure).
14 D'après le Professeur Magloire ONDOA, la
première exige d'impliquer le citoyen dans un débat sur la
politique gouvernementale, tandis que la deuxième consiste en une double
limitation du pouvoir dans l'Etat et du rôle de l'Etat afin de permettre
l'éclosion et l'emprise complète du génie industriel,
pp.105 et 118.
15 MANGA ZAMBO (E), « Les fondements et les enjeux de la
privatisation... » Op. cit., p.49.
15
comme la conséquence logique d'une
libéralisation générale de l'économie et du
commerce16, venant ainsi rompre avec une direction, une fixation et
un contrôle autoritaire des prix, par l'Etat interventionniste. Lequel
interventionnisme se justifia alors par le souci d'asseoir l'autorité de
l'Etat17, de légitimer le pouvoir et d'atteindre les
objectifs fondés sur l'idéologie de la construction
nationale18. Toutes choses qui, n'ayant pas
véritablement disparu, continuent même implicitement de fonder
l'action de l'Etat en matière économique.
? Le contexte
socio-économique
Après une crise économique parfois
marquée par des crises sociales (villes mortes), le Cameroun
était vraisemblablement obligé de procéder à des
réajustements de son environnement normatif et institutionnel en
matière économique19. La crise des années 1980
a en effet été considérée comme la
conséquence fâcheuse d'un interventionnisme20
institutionnalisé, synthétique et rationnel, donc, proche du
dirigisme21. La pensée libérale imposée par les
« messagers du libéralisme » que
sont les bailleurs de fonds22 s'est avérée comme
solution incontournable contre la crise économique et ses
problèmes. Dans le cadre de cet environnement également, la
communautarisation de l'économie et la psychose des effets du
démantèlement douanier en gestation dans le cadre de
l'élimination des régimes préférentiels de l'accord
de Cotonou dont l'échéance déjà
dépassée a ouvert des tribunes pour des négociations
d'accords provisoires, pour le moins, hasardeux. Ceci n'est d'ailleurs que le
corollaire d'une mondialisation tous azimuts de l'économie23.
Mouvement d'ouverture extrême auquel le Cameroun n'a pu que s'arrimer
malgré les incertitudes, les craintes et imprévisions qu'inspire
cette mouvance ultra libre-échangiste sur le faible tissu
économique des pays en voie de développement comme le
Cameroun24. A ce propos justement, des manifestations contre la
hausse des prix des produits pétroliers - expression et
conséquence
16 Du BOIS GAUDUSSON (J), « Crise de l'Etat
interventionniste et libéralisation de l'économie en Afrique
», RJPIC, n°38, janvier 1984, pp.1-11.
17 Idem, p.9.
18 KAMTO (M), Pouvoir et droit en Afrique : Essai sur le
fondement du constitutionalisme dans les Etats d'Afrique noire francophone,
LGDJ, Paris, 1987. ONDOA (M), « Ajustement structurel et
réformes du fondement théorique des droits africains post
coloniaux ... » Op. cit., p.78.
19 TOUNA MAMA (Ss. dir), Crise économique et
politique de déréglementation au Cameroun, L'HARMATTHAN,
Paris/Montréal, 1996, p. 10.
20 Du BOIS GAUDUSSON (J), « Crise de l'Etat
interventionniste... » Op. cit., p.9.
21 MOMO (B), Droit public économique interne,
Cours polycopiés, UY, 1992, p.6.
22 ONDOA (M), « Ajustement structurel et réformes
du fondement théorique des droits africains post coloniaux ... »
Op. cit., p.30.
23 ADDA (J), La mondialisation de l'économie,
Tome 2 : Problèmes, La découverte, 5e ed.,
Paris 2002.
24 TAMBA (I), « La mondialisation dans l'économie
camerounaise », RASEG,Vol.3, n°1,PUY, janv-juil 2000,
pp.125-140.
16
de la mondialisation économique, ont eu lieu,
révélant un malaise, une tension sociale souterraine mais
permanente. C'est pourquoi dans ce contexte d'extrême pauvreté, il
est observable que, du fait de la libéralisation des prix, à la
moindre variation de ceux-ci sur le marché, notamment pour ce qui est
des biens de première nécessité et/ou de grande
consommation (poisson, pain, gaz, ciment, pétrole etc.), des
interpellations mêlées de revendications et d'espoirs sont
adressées à la puissance publique. La compréhension du
paradoxe qui semble s'en dégager rend cette étude
intéressante.
d. Intérêt du sujet
Cette étude présente un intérêt
scientifique et social.
? Intérêt
scientifique
Si la libéralisation dans le secteur des
télécommunications au Cameroun a fait l'objet de nombreuses et
récentes études25, la libéralisation des prix
n'a été abordée qu'il y a une quinzaine
d'années26, dans une étude qui se veut privatiste,
où elle occupait d'ailleurs une place secondaire dans les
développements. Aussi paraît-il opportun aujourd'hui de
s'intéresser aux évolutions de ce processus après sa
consécration, l'objectif étant d'en dresser l'état et d'en
dégager les techniques juridiques, mais surtout de mener une tentative
d'appréhension sous l'angle du droit public. Cette étude
démontrera d'abord, la consistance de la libéralisation des prix
au Cameroun dans un contexte marqué par la survivance de la
réglementation des prix27. Elle permettra ensuite une
qualification et une classification du mode de désengagement de l'Etat
en matière des prix au Cameroun dans la catégorie des retraits
partiels et perpétuellement transitoires. Elle permettra enfin la mise
en évidence du degré de présence de l'Etat en
matière de prix au Cameroun. Se faisant, elle contribuera à
25 MVOGO (R.M) La libéralisation du secteur de
télécommunication au Cameroun : Chronique juridique d'un
processus complexe, Mémoire DEA, Droit public, UYII, 2004 ; PEKASSA
NDAM (G), « La réforme du secteur des postes et
télécommunications au Cameroun », RASJ, Vol.1,
UYII, 2000 pp.97-104.
26 NYAMA (J-M), « La liberté de commerce ... »
Op. cit., pp.59 et suivantes.
27 Idem, p. 64.
17
démontrer que la place de l'Etat dans un contexte
certes de libéralisation, loin de disparaître, se conforte
plutôt en tant que chef d'orchestre d'un encadrement désormais
collectif et participatif. Ceci infirme toute tendance à la banalisation
du Droit public économique et conforte d'ailleurs son originalité
ainsi que son dynamisme. Cette étude sera une invite à
l'intégration dans le jargon juridique de concepts nouveaux ou jusque
là formellement économiques et établira la capacité
évolutive et adaptative du droit aux transformations du monde. Il sera
ainsi mis en évidence les transformations du régime juridique des
prix qui, sans en dénaturer l'essence, l'enrichissent de techniques
juridiques, édulcorant son autorité et ses privilèges,
confirment cependant sa majesté comme cadre d'action économique
du droit ; véritable épée de Damoclès sur les
accès de libéralisme qui ont le vent en poupe à
l'ère contemporaine. Cette recherche a vocation à mettre en
exergue la dynamique du Droit public économique à travers
l'adoption des techniques juridiques modernes28.
? Intérêt pratique
Sur le plan pratique, l'ambition affichée est de
démontrer que la libéralisation des prix n'est pas incompatible
avec toute action de l'Etat en matière de prix. Qu'en fait,
libéralisation ne signifie pas libertinage, encore moins anarchie. Ceci
facilitera la compréhension de la place et du rôle de l'Etat en
matière de prix dans un contexte de libéralisation. L'action de
l'Etat en matière de prix ne s'en trouvera que davantage
légitimée puisque, l'étude amènera le particulier
à comprendre les tenants et les aboutissants d'un juste
rééquilibrage de sa liberté en matière de prix. Sur
le plan social, l'étude révèlera en filigrane combien
stratégiques sont les prix en tant qu'objet de politique
économique juridiquement encadré. En somme, il est question de
démontrer qu'au Cameroun, libéralisation des prix ne rime pas
avec démission de l'Etat en matière des prix. L'Etat en est
à la fois auteur et acteur de l'ouverture.
Ceci est d'autant plus vrai qu'il se dégage un certain
paradoxe entre une libéralisation souhaitée et même
revendiquée des prix ; mais en même temps, une intervention
étatique revendiquée. C'est de ce paradoxe que découle la
problématique qui sous-tend cette étude.
28 L'une des spécificités ou
même originalités du Droit public économique d'après
le Professeur HUBRETH est que « plus que tout autre
enseignement juridique, cette discipline est ainsi au coeur d'évolutions
en cours qui lui confère une grande instabilité et exigent un
suivi constant de l'actualité » HUBRETH (H-G),
DPE..., Op. cit., p.4.
18
e. Problématique
L'analyse de la vie publique économique camerounaise
présente en effet en matière de prix un tableau pour le moins
paradoxal, sinon contradictoire.
D'un côté, une hausse chronique des prix des
biens et marchandises sur le marché, orchestrée par des
opérateurs imbus, des avantages que leur concède la
liberté de fixer les prix au gré de leurs
intérêts.
De l'autre, la multiplication des cadres et techniques de
contrôle des prix par l'Etat en réaction aux nombreuses
revendications et interpellations aussi bien du consommateur affaibli au
pouvoir d'achat diminué, que de l'opérateur impuissant face
à la concurrence internationale et devant les pratiques déloyales
des grands groupes économiques.
Cette situation suscite un certain nombre d'interrogations. A
quoi renvoie la libéralisation des prix ? Elle correspond sommairement
à une ouverture aux lois du marché dans la détermination
des prix. L'ouverture, ou du moins liberté signifie-t-elle libertinage
entendu au sens de liberté totale et illimitée ? La
libéralisation signifie-t-elle en plus démission,
c'est-à-dire retrait complet et définitif de l'Etat en
matière de prix ? Force est de constater que dans aucun Etat au monde,
cette hypothèse n'a jamais fait école. Il convient alors de se
demander si l'Etat n'aurait pas une certaine légitimité, sinon un
droit d'intervention ou d'action en matière de prix. Au regard de ce qui
précède, la libéralisation des prix s'illustre alors comme
une cohabitation, apparemment contre nature, entre le souci de laisser agir le
marché et le besoin d'intervention étatique en matière de
détermination et d'encadrement des prix. Face à cette
réalité, le problème qui se pose dès lors est celui
des moyens, des mécanismes, mieux, des techniques juridiques de
réalisation de cette dernière conciliation
d'intérêts contradictoires, traduisant dans les faits, la
libéralisation des prix au Cameroun. Comment tenir compte de
l'influence du marché dans la détermination et l'encadrement des
prix sans ignorer le besoin de l'intervention étatique ? En
d'autres termes, comment concilier le souci de laisser le
marché influencer la détermination et l'encadrement des prix avec
la nécessité de laisser agir l'Etat en la matière
?
Cette dernière question constitue la question centrale
de l'étude. Elle se veut fédératrice, c'est-à-dire
englobante de toutes les autres questions et permet la démonstration des
aspects que décline l'idée générale.
f. 19
Idée générale
Deux techniques juridiques permettent de rendre compte de la
libéralisation des prix au Cameroun, entendue comme conciliation d'une
ouverture à l'influence du marché dans la détermination et
l'encadrement des prix et de la nécessité de permettre à
l'Etat de continuer à intervenir en la matière.
Prosaïquement, il s'agit d'une part, de la déréglementation
des prix et d'autre part, de la régulation desdits prix. La
déréglementation des prix apparaît comme le processus
d'ouverture à l'influence des « lois du marché
»29 dans la détermination des prix, tandis
que la régulation des prix renvoie à un procédé :
le procédé d'ouverture à la participation des «
forces du marché »30 à
l'encadrement des prix.
Ces deux techniques juridiques convergent vers une
transformation du rôle de l'Etat et non une exclusion de la
présence étatique en matière de prix. La
démonstration de cette hypothèse requiert pour se faire une
démarche méthodologique appropriée.
g. La démarche méthodologique
La démarche méthodologique consistera
essentiellement en la méthode juridique classique, c'est-à-dire
qu'elle portera sur la dogmatique et la casuistique. Dans le cadre de cette
étude, la méthode sera principalement dogmatique. La casuistique,
c'est-à-dire l'analyse des décisions du juge ne sera
qu'incidente. Tant un contentieux sur les prix semble inexistant dans le
contexte camerounais.
La dogmatique, c'est-à-dire une exégèse,
mieux une analyse des textes juridiques31 consistera en une
étude du contenu du droit32. Lequel contenu du droit
apparaît comme la réponse à la question «
qu'est-ce qui est prescrit ? »33. La dogmatique a
ainsi pour tâche, l'interprétation du discours du
législateur34, mais aussi la compréhension et les
explications dudit discours, en d'autres termes, des textes juridiques. Elle
permettra donc dans le cadre de
29 C'est-à-dire les lois de l'offre et de la
demande sur le marché
30 Entendue comme les autres acteurs intervenant sur
le marché en dehors de l'Etat.
31 KAMTO (M), Pouvoirs et droit en Afrique... Op. cit.,
p.51.
32 BOBBIO (N), Essai de théorie du droit, LGDJ,
Paris, 1998, p.5.
33 Idem, p.5.
34 Ibid, p.5
20
cette étude d'expliquer et d'interpréter le
régime juridique des prix en pleine mutation, ainsi que certains
régimes qui lui sont connexes.
Une démarche complémentaire, mais accessoire
s'avèrera nécessaire, à savoir la démarche
ontologique, qui consiste en la recherche de l'essence même des choses.
Préconisée par le Professeur Jean Jacques SUEUR pour toute
étude en droit économique35 et justifiée par le
Professeur Magloire ONDOA car : « l'étude des mutations
juridiques africaines exige un dépassement de l'approche classique. Elle
appelle en complément une démarche ontologique consistant
à interroger leur essence, c'est-à-dire leur source
intellectuelle ou théorique »36. Or, la
libéralisation en général et celle des prix en
particulier, ne constitue qu'une assez forte expression de la mutation
juridique desdits droits. Cette démarche permettra donc d'aller chercher
les fondements même de la transformation des régimes juridiques
des prix dans cette ébauche de raisonnement.
h. Ebauche de raisonnement
Il s'agit à ce niveau de décliner le plan de
l'étude et de le justifier. Parce que relevant d'une étude
juridique, le plan de l'étude sera binaire. La première partie
consistera en la démonstration d'une ouverture de la
détermination des prix à l'influence des lois du marché ;
il s'agit de la déréglementation des prix. Il s'agira alors dans
le premier chapitre de cette partie, de démontrer que cette
déréglementation des prix repose sur des fondements juridiques,
avant d'en dégager, le contenu réel, dans le second chapitre.
La seconde partie quant à elle s'articulera autour de
la démonstration de l'ouverture de l'Etat à la participation des
autres acteurs du marché dans l'encadrement des prix ; c'est la
régulation des prix. La recherche des justifications de ladite
régulation fera l'objet du chapitre premier de cette partie, alors que
le chapitre second en dégagera les manifestations.
35 SUEUR (J.J), « Méthodologie du droit et Droit
économique » Philosophie du droit économique ?Mélange
en l'honneur de Gérard FARJAT, éd FRISON-ROCHE
,Paris,1999,p.293...
36 ONDOA (M), « Ajustement structurel ... » Op. cit.
, p.76. Le Professeur s'en référant lui-même à
DUGUIT (L), Les transformations du droit public, réed. , A.
Colin. Coll. «La Mémoire du droit » ; Paris, 1999,235p.
21
PREMIERE PARTIE
LA DEREGLEMENTATION DES PRIX.
|
22
Concept ambigu37, ou du moins
polysémique38, la déréglementation traduit
d'abord une remise en cause exigeant une mise en pause de la
réglementation39. Elle est alors considérée
comme un allègement quantitatif du corpus des textes applicables
à l'économie. « Il s'agit dans ce cas de
réglementer moins pour réglementer mieux
»40. Mesure préconisée
37 TOUNA MAMA (Ss. dir), Crise économique et
politique de déréglementation, Op. cit., p.240 ; BAZEX,
La déréglementation, AJDA, 1986, p.2.
38 Ce concept est en effet susceptible de plusieurs
définitions et traduit également plusieurs approches. Pour plus
amples développements sur cette question, lire CHEVALLIER (J), «
Les enjeux de la déréglementation », RDP, 1987, pp.
281-319.
39 COLSON (J.P), Droit public économique...Op.
cit., p.99. CHEVALLIER (J), « Les enjeux de la
déréglementation » Op. cit., RDP, 1987, p. 293
40 HUBRETH (H.G), Droit public économique ...Op.
cit.,p.58.
23
par nombre d'auteurs libéraux41, c'est un
mouvement né aux Etats-Unis d'Amérique du Nord et amplifié
en Europe, puis transposé, voire imposé aux pays en voie de
développement dans le cadre de l'ajustement structurel comme
conditionnalité de l'aide financière42. Dans ce cadre,
elle épouse la forme d'un ensemble de mesures juridiques
destinées à promouvoir un environnement concurrentiel
expurgé des mécanismes de l'intervention et à rendre plus
aisé l'investissement ou l'expansion de l'initiative
privée43. Enfin, la déréglementation
apparaît comme l'expression d'un redéploiement. Plutôt que
d'un recul de la réglementation, il s'agit en fait de réglementer
autrement44.
En matière de prix au Cameroun, elle épouse
à la fois chacun de ces différents aspects et peut s'entendre
comme le processus d'ouverture de la réglementation des prix à
l'influence des lois du marché dans la détermination des prix.
Dans cette optique, elle repose sur divers fondements juridiques (Chapitre I)
et épouse un contenu précis (Chapitre II).
41 Tels que : HAYECK (F.V), Droit, législation et
liberté, Coll. Cambridge, PUF, Paris 1995 ; La route de la
servitude, Coll. Cambridge, PUF, Paris 1985 ; CROZIER (M), On ne
change pas la société par décret, Coll. Pluriel
GRAFSEE, Paris 1979, réédité en 1982, évoqué
par HUBRETH (H.G), Op. cit. A cette liste, il convient de manière non
exhaustive d'ajouter les tenants de l'école classique française
tels que TOURGOT, CONDILLAC, SAY, BASTIA dont les idées ont
été approfondies par l'école ultra libéraliste
autrichienne : MENGER, ROTBARD MISIES.
42 ONDOA (M), « Ajustement structurel... », Op. cit.
p.106.
43 Idem, p.106
44 CHEVALLIER (J) « Les enjeux de la réglementation
... » Op. cit., p.291.
24
CHAPITRE I : LES FONDEMENTS JURIDIQUES DE LA
DEREGLEMENTATION DES PRIX
Si la libéralisation des prix trouve sa traduction dans
la déréglementation des prix, ce processus à son tour se
fonde sur des moyens de droit qui la consacrent dans l'ordre juridique
national. Tout ordre juridique étant composé de normes d'origine
externe et interne, les fondements de la déréglementation des
prix épousent cette dichotomie. Aussi distingue-t-on les fondements
juridiques externes (Section I) des fondements juridiques internes (Section II)
de la déréglementation des prix au Cameroun. Les premiers issus
de l'ordre international sont dans la plupart indirects et implicites,
c'est-à-dire déduit de leur compatibilité avec l'objectif
de déréglementation ; tandis que les seconds tirés de
l'ordonnancement juridique national, sont directs et explicites,
c'est-à-dire consacrant plus concrètement ladite
déréglementation.
SECTION I : LES FONDEMENTS JURIDIQUES EXTERNES
Les fondements juridiques externes varient selon qu'ils sont
considérés à l'échelle internationale (Paragraphe
I) ou à l'échelle communautaire, c'est-à-dire
régionale et sous-régionale (Paragraphe II).
PARAGRAPHE I : LES FONDEMENTS INTERNATIONAUX
La déréglementation des prix est une
conséquence de l'adhésion du Cameroun aux règles de
l'Organisation Mondiale du Commerce45 (A) et une résultante
de sa soumission aux prescriptions des programmes d'ajustement structurel
engagés dans le cadre de la coopération financière
internationale (B).
45 L'article 15 de la loi n° 2002/004 du 19
avril 2002 portant Charte des investissements en République du Cameroun
affirme clairement l'adhésion du Cameroun au système
multilatéral des échanges de l'Organisation Mondiale du
Commerce.
25
A. LA DEREGLEMENTATION DES PRIX DANS LE SYSTEME NORMATIF
DE L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE
En sa qualité de membre fondateur de l'Organisation
Mondiale du Commerce46, le Cameroun intègre les règles
et objectifs du système multilatéral GATT-OMC. Il intègre
ainsi les visées libre-échangistes de l'organisation et
prône de fait l'éradication de toute forme d'entrave et de
protectionnisme dans les échanges commerciaux. Cette ouverture doit
à la libéralisation des économies en vue de la
réalisation finale d'une globalisation financière et d'une
mondialisation des économies aux conséquences humanitaires
parfois désastreuses47. De ce fait, le Cameroun est astreint
au respect des règles de ladite organisation, et notamment pour ce qui
est de son système normatif. Ledit système fonde en effet la
déréglementation des prix au regard des principes libéraux
dégagés de ses accords relatifs aussi bien au commerce qu'aux
investissements.
1. Les principes dégagés des accords de
l'Organisation Mondiale du Commerce relatifs au commerce
Le droit substantiel de l'Organisation Mondiale du
Commerce48 se compose essentiellement du GATT49 de 1994
qui a travaillé à améliorer celui de 1947, qu'il a
d'ailleurs intégré50. Cet instrument regroupe des
accords multilatéraux et spécifiques, relatifs au commerce des
marchandises, mais aussi des services, de même qu'un nombre assez
impressionnant d'autres instruments juridiques de natures diverses (accord
instituant l'Organisation Mondiale du Commerce, sur les barrières non
tarifaires, etc. ; Mémorandum, décisions, déclarations et
protocoles). Tout cet arsenal normatif vise la réalisation des
46 Le Cameroun est en effet membre de
l'Organisation Mondiale du Commerce depuis 1963. L'accord de Marrakech
instituant l'Organisation Mondiale du Commerce a été
ratifié par le décret n° 5/194 du 26 septembre 1995. La
législation en vigueur reconnaissant la primauté de cet accord
sur les lois, il a vocation à s'appliquer immédiatement. OMC,
Examen de politique commercial : Cameroun, 2001, p.22.
47 MADELEY (J), Le commerce de la faim, Jeune
Planète, Collection Mondiale pour une autre mondialisation, Paris, 2002,
259 p.
48 FLORY (T), L'OMC, droit institutionnel et substantiel,
Bruyant, Bruxelles, 1999, 248 p.
49 General Agreement of Tariff and Trade (Accord
général sur le commerce et les tarifs).
50 TOUSCOZ (J), « La réorganisation mondiale des
échanges : quelques aspects juridiques, rapport introductif » ,
pp.3-36 in La réorganisation mondiale des échanges,
société française pour le Droit international, Colloque de
Nice, ed. A. Pedone, Paris, 1996, 337 p.
26
objectifs et buts de l'organisation (depuis le GATT,
jusqu'à l'Organisation Mondiale du Commerce) ; à savoir assurer
la libéralisation du commerce international afin d'assurer la croissance
économique51. A cet effet, la déclaration de Marrakech
du 15 avril 1994 engageait les Etats à «
résister aux pressions protectionnistes de toutes natures (...) et
à ne plus prendre des mesures commerciales qui amoindriraient les
résultats des négociations du cycle de l'Uruguay ou leur mise en
oeuvre, ou qui leur serait contraire »52. Aussi
se sont-ils engagés à « oeuvrer en faveur d'une
plus grande cohérence au niveau mondial des pratiques menées dans
les domaines commercial, monétaire et financier
»53. D'où l'universalité de ses
règles dont la souplesse et l'application à
géométrie variable54 n'altère ni leur
uniformité, ni leur progressivité. Aussi, quels qu'en soient les
domaines, les membres de l'Organisation Mondiale du Commerce sont soumis au
respect de nombreux principes se dégageant de son cadre normatif.
Bernard GUILLOCHON55, Thiébaut FLORY et autres Pierre Michel
EISEMANN56 en tirent trois principes fondamentaux : le principe de
non discrimination, le principe de non restriction, et celui de la libre
concurrence.
Le principe de non-restriction renvoie à la
libéralisation des échanges. Il repose d'une part sur la
réduction (à défaut de leur suppression) des droits de
douane ; et d'autre part, sur la levée des obstacles non tarifaires au
commerce. Ainsi, la libéralisation des prix, à travers leur
déréglementation, relève plus de cette seconde exigence
plutôt que des problèmes liés aux droits de douane qui
n'entretiennent que des rapports lointains avec les prix. La
déréglementation des prix évite en effet que la politique
des prix ne constitue un obstacle non tarifaire au commerce ; et donc, une
mesure discriminatoire.
Le principe de non discrimination, quant à
lui, apparaît comme la clé de voûte du système
GATT-OMC. Ce principe prône en effet l'égalité de
traitement entre produits étrangers, et entre ces derniers et les
produits d'origine locale. Ce principe figure dans l'accord
général sur le commerce des marchandises et tous les autres
accords relatifs au
51 RAINELLI (M), L'Organisation Mondiale du Commerce, la
découverte, Repère, Paris 2002, pp.5 et suivantes. TOUSCOZ
(J), Colloque de Nice, Op. cit., p.5 et suivantes.
52 OMC, Les textes juridiques, Résultats des
Négociations commerciales multilatérales du cycle d'Uruguay,
Secrétariat de l'OMC,2003 ,555 P .
53 Idem.
54 FLORY (T), « Rapport général du colloque
de Nice »,Op cit, pp. 89-111, permet de considérer le droit de
l'Organisation Mondiale du Commerce comme étant à plusieurs
poids. En effet, un traitement différencier selon les catégories
de pays (PVD, pays transitoires) ; traitement différencier suivant
l'appartenance ou non à une même organisation d'intégration
économique régionale ou sous-régionale.
55 GUILLOCHON (B), Le protectionnisme, la découverte,
Repère, Paris 2001, 125p.
56 EISEMANN (P.M), « Le système normatif de
l'Organisation Mondiale du Commerce » in Colloque de Nice, Op. cit.,
pp.53-73.
27
commerce. Il repose respectivement sur la clause de la nation
la plus favorisée et la clause dite du traitement national.
La clause de la nation la plus favorisée
consacrée par l'article 2 du GATT de 1994 oblige le Cameroun
à accorder les mêmes faveurs à tous les autres membres de
l'Organisation Mondiale du Commerce que celles octroyées à un
autre considéré comme le plus favorisé. Il s'agit d'une
exigence d'égalité de traitement entre tout produit d'origine
étrangère tant pour ce qui est de l'accession au marché
que de la commercialisation sur ledit marché interne.
La clause du traitement national quant à elle,
consacrée par l'article 3 du GATT de 1994 et réceptionnée
dans la charte des investissements57, interdit toute discrimination
entre un produit importé et le même produit de fabrication locale.
C'est un égal traitement des produits étrangers et des produits
locaux à l'intérieur du territoire. Dans cette logique, la
fixation des prix minimum ou maximum à l'importation peut
apparaître comme une mesure discriminatoire au profit des produits
locaux.
Sur le plan de l'application de ces principes, il est
important de relever que le Cameroun bénéficie d'un certain
nombre de dérogations liées à sa situation
économique de pays en voie de développement. En tant que membre
de diverses organisations d'intégration économique,
régionale et sous-régionale, le Cameroun ne peut qu'avoir un
traitement différencié vis-à-vis des membres de ces
organisations.
Le troisième principe est celui de la libre
concurrence. Il traduit l'exigence de prévisibilité, de
concurrence et de loyauté dans les échanges commerciaux
internationaux. Il fonde à cet effet la prohibition de certains types de
subventions, l'interdiction du dumping, ainsi que la notification ou la
publication à l'Organisation Mondiale du Commerce des lois, textes et
règlements nationaux. Cette dernière exigence peut permettre en
effet d'éviter une réglementation par trop autoritaire ou rigide
des prix de nature à empêcher la réalisation ou la
multiplication des échanges. Par ailleurs, la politique des prix ne doit
aucunement constituer une pratique anti-concurrentielle revêtant par
exemple la forme d'obstacles non tarifaires, encore moins d'obstacles
techniques au commerce.
Concrètement, ces différents principes se
matérialisent par une libéralisation aussi bien des importations
que des exportations. A cet effet, le Cameroun a supprimé toutes les
licences, restrictions, contingentements et autres formes d'autorisation. Les
prix minimum à
57 Le principe de non discrimination est repris par
la Charte des investissements qui engage l'Etat à «
bannir toute forme de discrimination dans l'application du droit
». Article 8, alinéa 1, paragraphe 5.
28
l'exportation n'existent plus. Les procédures
préalables d'évaluation des prix qui pesaient sur certains
produits dits sensibles ont été éliminées. Toutes
choses allant dans le sens désiré par les accords pertinents de
l'Organisation Mondiale du Commerce en matière d'investissement.
2. Les accords pertinents de l'Organisation Mondiale du
Commerce relatifs à l'investissement
Les liens entre le commerce et l'investissement sont logiques
et pratiques. Ils s'étendent sur les prix et ont d'ailleurs
justifié la mise sur pied au sein de l'Organisation Mondiale du Commerce
d'un groupe de travail, lors de sa première conférence
ministérielle tenue à Singapour en 198658. Ce groupe
de travail qui a une mission de formation et d'information sur le lien entre
l'investissement et le commerce n'est qu'une instance de réflexion et de
consultation. Il témoigne au moins de l'importance desdits liens,
lesquels sont régis par nombre de dispositions de l'Organisation
Mondiale du Commerce malgré l'inexistence d'un ensemble distinct de
règles traitant de manière détaillée de la
question. Plusieurs accords présentent en effet un rapport étroit
avec l'investissement. Ceci s'explique d'une part par l'extension de
l'application du droit OMC sur les personnes et les biens ; et d'autre part par
l'importance croissante de l'investissement étranger dans
l'économie mondiale. Les principaux accords pertinents de l'Organisation
Mondiale du Commerce sur l'investissement sont à cet effet.
L'accord général sur le commerce des
services qui apparaît comme un accord portant sur le commerce et sur
l'investissement dans le secteur des services. A la différence des
accords bilatéraux, cet accord ne traite pas de la protection des
investissements étrangers. L'expropriation, l'indemnisation, les
conflits de rapatriement des bénéfices, autant que les
mécanismes d'arbitrage n'y figurent pas.
L'accord sur les mesures concernant les investissements et
liées au commerce, proscrit l'application de toute mesure de cette
nature, incompatible avec les article III (traitement national pour
marchandises importées) ou XI (prohibition des restrictions
58 KOULEN (M), « Disposition de l'Organisation Mondiale
du Commerce concernant l'investissement » in Société
française pour le Droit international, Un accord multilatéral
sur l'investissement : d'un forum de négociation à l'autre ?
Journée d'étude, ed. A. Pedone, pp.101-110.
29
quantitatives à l'importation). Le défaut de cet
accord est cependant de ne viser que les mesures affectant le commerce des
marchandises, en omettant celles affectant le commerce des services. Aussi Mark
KOULEN conclut-il que « l'accord sur les mesures concernant
les investissements et lié au commerce n'est pas un accord sur
l'investissement à proprement parlé
»59.
La définition du terme
«investissement» dans la plupart des accords internationaux
y relatifs englobe la propriété intellectuelle. L'accord sur
les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touche au
commerce, peut être considéré comme fondant le
libre-échange à travers la promotion de l'investissement.
En dehors de ces différents accords relatifs aux
investissements dans le cadre de l'Organisation Mondiale du Commerce, nombre
d'accords bilatéraux sur l'investissement existent entre les Etats qui
sont favorables à une politique libérale des prix ; malgré
le fait que leur architecture normative et institutionnelle paraît
désincitative de tout investissement direct et étranger.
Finalement, en matière de commerce ou d'investissement,
les accords de l'Organisation Mondiale du Commerce fondent directement ou
indirectement la libéralisation des échanges ; et par extension
la déréglementation des prix. Sous cet angle, la
déréglementation des prix apparaît comme une expression, un
moyen, voire une condition pour la réalisation des objectifs de
l'Organisation Mondiale du Commerce. Elle participe par exemple à
l'élimination progressive des barrières non tarifaires comme la
forme la plus actuelle de protectionnisme. Ces accords ne vont pas à
contre courant de ceux conclus dans le cadre de toutes les autres organisations
plus ou moins compétentes en matière commerciale, en bonne place
desquelles figurent les organisations financières internationales qui,
à travers les programmes d'ajustement structurel, mettant en oeuvre
l'idéologie libérale.
B. LA DEREGLEMENTATION DES PRIX SUR LA BASE DE
L'AJUSTEMENT STRUCTUREL60
59 KOULEN (M), « Disposition de l'Organisation Mondiale
du Commerce concernant l'investissement » in Société
française pour le Droit international, Un accord multilatéral
sur l'investissement ...Op. cit., p.105.
60 Série de réformes de la politique
économique mise en oeuvre dans le cadre des pays en voie de
développement depuis les années 1980, sous l'égide des
bailleurs de fonds internationaux (principalement la Banque Mondiale et le Fond
Monétaire International), en vue de transformer leurs économies
à l'origine interventionnistes, voire dirigistes en économie de
marché.
30
Evoquer les programmes d'ajustement structurel parmi les
fondements juridiques de la déréglementation des prix revient
à reconnaître, au moins implicitement, leur juridicité.
Ceci paraît pourtant assez risqué en considération de moult
raisons qui militent en défaveur d'une telle initiative. Ce d'autant
plus qu'aucun instrument en relation avec l'ajustement structurel
n'évoque directement, ni expressément la politique des prix. Ces
derniers développements doivent cependant intégrer le fait que
l'ajustement structurel constitue d'abord un fondement théorique dont sa
non conventionalité ne consacrerait pas moins la politique de
déréglementation au regard des objectifs poursuivis.
1. L'ajustement structurel comme fondement
théorique des droits économiques61
Ceci est une théorie démontrée par le
Professeur Magloire ONDOA qui, au-delà de la question de la
juridicité de ces mesures de réforme de notre
économie62, dans le cadre de la résolution du
problème de la dette, et, au moyen d'une méthode scientifique
appropriée, à savoir la méthode ontologique, à
établit l'ajustement structurel comme le fondement nouveau des droits
africains d'après les indépendances. Le paradigme de l'ajustement
structurel a ainsi remplacé l'idéologie de la construction
nationale en vogue, au lendemain de l'accession à l'indépendance.
Cette dernière sous-tendait tout l'édifice normatif et
institutionnel de cette époque. Les conditionnalités des
programmes d'ajustement structurel apparaissent ainsi comme l'instrument de
cette réforme du substratum idéologique de nos ordres
juridiques en
sorte que soit opérée une libéralisation
aussi bien politique qu'économique, devant désormais guider
toute optique politique, économique et sociale. Une attitude des
bailleurs de fonds rendue possible du fait des réalités
socioéconomiques et de la dépendance financière des Pays
en Voie de Développement en rapport avec le problème de la dette
extérieure. Attitude taxée de néocolonialiste par
des africanistes avérés qui trouvent illégitime un tel
processus. Dénonçant une certaine illégitimité des
programmes d'ajustement structurel, ils accusent les bailleurs de fonds de
violation de la souveraineté des Etats africains soumis sans
véritable choix à ce processus.
61 Pour de plus profonds développements sur cette partie,
lire ONDOA (M), « Ajustement structurel... »Op. cit., pp. 75-118.
62 Les programmes d'ajustement structurel
apparaissent en effet comme une thérapie de choc endogène pour la
relève des économies africaines. Ils sont conçus sur la
base du principe libéraliste suivant lequel, moins l'Etat intervient
dans l'économie, mieux cela vaut ; et qu'à long terme, une
économie ne sera plus efficace et plus productive que si les forces du
marché y prédominent.
31
A ce propos, s'il est indéniable que la part de
responsabilité des bailleurs de fonds sur l'entretien de ladite dette
est avérée, il reste que l'engagement de ces derniers est louable
et relève simplement de ce qu'il conviendrait de qualifier
d'énorme charitas international, expression d'une
volonté affichée des bailleurs de fonds de sortir les pays
pauvres du sous-développement, en réveillant l'esprit de
responsabilité, d'initiative et de créativité des
africains. Le moyen pour y arriver demeure une pression insupportable, mais
demeure légitime. L'application de bonne foi des obligations
contractuelles de tous genres voudrait qu'une dette contractée soit
payée et que la parole donnée soit respectée. Sous ce
rapport, la conditionnalité étant issue d'une rencontre des
engagements des Etats africains et des bailleurs de fonds, consignée
conjointement dans un certain nombre d'instruments, apparaît comme la
clause des parties à un contrat, qui en devient forcément la loi.
Ces objectifs sont alors convertis en actes juridiques formels63.
2. L'ajustement structurel comme fondement
quasi-conventionnel
La quasi-conventionalité des accords découle de
ce qu'ils ne remplissent pas tout à fait les conditions d'une convention
internationale, malgré leur
«bilatéralité», pour emprunter le terme du
Professeur ONDOA64. Cependant, la présence de deux parties
concluant ensemble des engagements à respecter ne peut que s'apparenter
à la conclusion d'un contrat, avec tout ce que cela implique comme
obligation conventionnelle. La conventionalité économique dans ce
cadre ne peut qu'imposer au jurislateur national dans sa
multiformité, l'édiction des normes libérales
teintée de la pensée capitaliste d'ouverture du marché. A
cet effet, la déréglementation en général et donc
partant, celle des prix ne pouvait qu'être prescrite par les bailleurs de
fonds internationaux en matière économique et
commerciale65. Le recul de l'Etat de tout le secteur productif et
son confinement dans sa fonction de régulation de l'économie, ont
été ainsi érigés en objectifs
macroéconomiques à réaliser pour l'atteinte de
l'initiative en faveur des Pays pauvres très endettés (Initiative
PPTE).
63 ONDOA (M), « Ajustement structurel... » Op. cit.,
p.34.
64 En effet, les accords de confirmation sont
déniés de tout caractère conventionnel par la doctrine. En
ceci qu'ils ne sont ni enregistrés comme accords à l'Organisation
des Nations Unies, ni l'aboutissement d'un accord de volonté. Sauf
à considérer les formations simplifiée des traités
internationaux sur l'affaire internationale, ou encore que les échanges
des documents, malgré le poids économique d'une des partie, et la
position de faiblesse de l'autre, ne constituent bel et bien une manifestation
de volonté.
65 SCHULDER (G), S'unir, le défi de l'Afrique
centrale, L'HARMATHAN, Paris 1990, p.126. ONDOA (M) « Ajustement
structurel... » Op. cit., p.106.
32
La libéralisation en général de
l'économie deviendra l'objectif de la décennie 1990, objectif
ayant tôt fait d'être transformé en règle de
droit66, se traduisant par l'édiction cette année
là, de plusieurs dizaines de textes juridiques, libéralisant
nombre de secteurs et de domaines économiques67.Cette
Libéralisation économiques surveillée de près par
des missions de contrôles intermittents des institutions de Breton
woofers, du représentant résident et de la Commission Technique
de Suivi des programmes économiques (CTS) ne pouvait qu'aboutir à
un desserrement de l'étau réglementaire sur les prix.
Sur le plan international , la déréglementation
des prix tire ses origines des conventions internationales signées dans
le cadre de l'Organisation Mondiale du Commerce, mais également de
l'influence des bailleurs de fonds sur la conception, l'édiction et
l'application du droit, en matière notamment économique dans les
pays en voie de développement. Cette construction internationale de la
libéralisation se traduit également dans le cadre des
regroupements d'intégration économique et juridique, aussi bien
au niveau continental, qu'au niveau sous-régional.
PARAGRAPHE II : LES FONDEMENTS REGIONAUX ET SOUS-
REGIONAUX
Davantage, choix d'une époque, marqué par un
monde en redéfinition, que choix d'un système, la solution
régionale, certes loin d'être parfaite, constitue le mode par
excellence de regroupement des Etats contemporains68. Aussi, la
déréglementation des prix se nourrit-elle des textes y relatifs.
Elle tire ainsi ses fondements non seulement des objectifs d'harmonisation du
droit des affaires en Afrique (A), mais également plus restrictivement
de délimitation de l'intégration sous-régionale de la
Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale (B).
A. LA DEREGLEMENTATION DES PRIX DANS L'HARMONISATION DU
DROIT DES AFFAIRES EN AFRIQUE
66 ONDOA (M) « Ajustement structurel... » Op. cit.,
p.84.
67 Cf. Cameroun, Droits et libertés, Op. cit.,
68 SCHULDER (G), S' unir... »Op. cit. p.27.
33
La déréglementation des prix est
incontestablement fondée par l'esprit général et la lettre
de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires69. Elle traduit la volonté d'éliminer toutes
dispositions normatives entre Etats membres en matière de prix. Cela
semble être le sens dégagé autant du traité de
l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires que de
l'Acte Uniforme relatif aux matières commerciales
générales.
1. Le traité OHADA
L'OHADA est un traité conclu entre les pays, une
organisation internationale dotée de la personnalité
juridique70 instituée par un traité de 1993 à
Port Louis (Ile Maurice), traité ayant pris effet en 1995, après
les 7 ratifications nécessaires à cet effet71.
Ainsi, le traité a le souci de favoriser la
concurrence, d'assurer la sécurité juridique et judiciaire, de
stimuler l'investissement, de dynamiser l'intégration régionale
par une matérialisation de la libre circulation des personnes, de biens,
des services et des capitaux et partant, d'élargir au maximum l'espace
économique du marché commun72. Toutes choses qui
postulent l'ouverture dudit marché et le démantèlement de
la présence étatique.
Dans ce contexte, la recherche de la simplicité
implique l'élimination de toute réglementation superflue ou
contraire aux objectifs des organisations. La compatibilité entre le
traité et ce processus est donc vérifiable. L'originalité
du droit OHADA ne peut d'ailleurs militer qu'en faveur de cette
assertion73. Le traité OHADA à travers les articles 1
et 2 énumère le commerce parmi ses matières. Ceci se
traduit d'ailleurs dans le cadre de l'activation du pouvoir normateur de
l'organisation, à côté de son activité consultative
en matière d'affaire74. Ce pouvoir législatif semble
constituer l'objet même de tout processus de
69 L'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique
du Droit des Affaires regroupe principalement 16 pays d'Afrique francophone :
le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, le Congo (Brazzaville), la
Côte-d'Ivoire, le Gabon, la Guinée Conakry, la
Guinée-Bissau, la Guinée-équatoriale, le Mali, le Niger,
la République Centrafricaine, le Sénégal, le Tchad, le
Togo et l'Union des Comores, la République Démocratique du Congo,
demeure en étude des conditions d'adhésion.
70 POUGOUE (P-G), Présentation générale
et procédure en OHADA, PUA, Coll. Droit uniforme, Yaoundé
1998, p.6.
71 PAILUSSEAU (J), « Le droit de l'OHADA, un droit
très important et original » in L'OHADA, dix années
d'uniformisation du droit des affaires en Afrique, La semaine juridique,
Entreprise et affaires n°5, supplément à La semaine
juridique n°44 du 28oct 2004, 78e année, JCP, p.1 ;
POUGOUE (P-G), Présentation générale et
procédure en OHADA, Op. cit., p.97.
72 NYAMA (J-M), Eléments du droit des affaires
Cameroun OHADA, Presses de l'UCAC, Yaoundé 2002, p.11 ; FORNERIS
(F.X), « Harmonising commercial law in Africa : the OHADA, Juridis
périodique, n°47, juillet 2001, p.80.
73 « Le droit de l'OHADA est donc très
important, il aussi original à de multiples égards, c'est le
droit d'un espace juridique, et non celui d'une union économique et
monétaire ; ce n'est non plus le droit d'un Etat fédéral ;
c'est un droit unifié et non harmonisé ; c'est un droit
essentiellement conçu par la pratique ; ce n'est pas réellement
un droit des affaires, mais c'est un droit des activités
économiques », PAILUSEAU (J), « Le droit de l'OHADA, un
droit très important et original » Op. cit., p.1.
74 POUGOUE (G), Présentation générale et
procédure en OHADA, Op. cit., p .11 et suivantes
34
libéralisation à l'échelle
régionale qui puise ses racines dans l'Acte Uniforme relatif au commerce
général.
2. L'Acte Uniforme relatif au Droit commercial
général
La présence d'Actes Uniformes semble d'emblée
confirmer qu'il convient en réalité de parler plus
d'uniformisation, que d'harmonisation du droit des affaires75. Ce
sont des actes supranationaux directement applicables et obligatoires dans le
droit interne des Etats parties. L'Acte Uniforme relatif au Droit commercial
général répond au souci de libéraliser les
échanges et les investissements. Cela est perceptible à l'analyse
de certaines dispositions dudit acte. Par exemple, l'article 206 du Livre V,
relatif à la vente commerciale consacre prioritairement la
volonté des parties comme condition de formation du contrat de vente.
Ceci apparaît comme une véritable invite au «laisser
aller», «laisser faire» des acteurs du
marché en matière de prix, préconisant toute
possibilité d'ouverture du marché, aussi bien à
l'échelle internationale, continentale que sous-régionale.
B. L'ENCADREMENT COMMUNAUTAIRE DE LA
DEREGLEMENTATION DES PRIX
Corollaire d'un processus de crise, suite à
l'échec de l'UDEAC76, impératif de la mondialisation,
orientation incontournable, l'intégration est un véritable
défi dont le Cameroun est conscient77. La Communauté
Economique et Monétaire d'Afrique Centrale est la forme la plus
expressive et la plus dynamique d'intégration à laquelle le
Cameroun adhère78. La Communauté Economique et
Monétaire d'Afrique Centrale adhère au système
75 En réalité, malgré
l'intitulé, il s'agit plus d'uniformisation que d'harmonisation.
L'harmonisation cherche à coordonner des systèmes juridiques
différents ou à respecter la sensibilité essentielle d'une
législation donnée en vue de réduire les
différences pour atteindre les objectifs communautaires. Alors que
l'uniformisation, encore appelée unification est plus radicale et
aboutit dans une matière juridique donnée à une
réglementation unique, identique à tout point pour les Etats
concernés. Aucune place n'étant en principe possible pour les
différences. Ceci est bien le cas du Droit OHADA. Lire POUGOUE (G),
Présentation... Op. cit., p.11 ; PAILUSSEAU (J), « Le
droit de l'OHADA... » Op. cit., p.2.
76 L'Union Douanière des Etats d'Afrique
Centrale, l'UDEAC est l'organisation prédécesseur de la
Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale.
77 SCHOULDER (G), S'unir, Op. cit, p.27.
78 La CEMAC est la Communauté Economique et
Monétaire d'Afrique Centrale créée le 16 mars 1996, lors
du sommet de NDJAMENA (Tchad), suite à l'échec de l'UDEAC, elle
regroupe en permanence 6 pays : le Cameroun, le Gabon, la
Guinée-équatoriale, le Congo (Brazzaville), le Tchad et la
République Centrafricaine. Le traité instituant la CEMAC
signé le 16mars 1996 a été ratifié au Cameroun par
décret n° 98/274 du 23 octobre 1998 portant ratification des actes
constitutifs du traité instituant la CEMAC. Le Cameroun, en l'article 16
de sa charte des investissements réaffirme son adhésion audit
traité.
35
de l'Organisation Mondiale du Commerce et intègre
également la législation de l'Organisation pour l'Harmonisation
en Afrique du Droit des Affaires. Ses règles bénéficient
du principe de l'immédiateté normative79.
Elle poursuit fondamentalement l'objectif de construction d'un marché
commun et contribue à l'ouverture totale de l'espace économique
communautaire aux Etats ressortissants de la communauté80.
Non expressément consacrée cependant, la libéralisation
des prix dans le cadre de la communauté découle tant des textes
généraux de la Communauté Economique et Monétaire
d'Afrique Centrale que d'instruments spécifiquement
édictés en matière économique et de commerce.
1. Les textes généraux de la CEMAC en
matière économique et commerciale
Il s'agit du traité instituant la Communauté
Economique et Monétaire d'Afrique Centrale et des conventions instituant
ses institutions spécialisées en matière
économique.
Le traité instituant la Communauté
Economique et Monétaire d'Afrique Centrale est en
réalité peu disert en matière de
déréglementation. Ce souci se dégage pourtant de l'analyse
de ses objectifs et missions. La mission de la communauté est celle de
l'intégration en général des économies des Etats
membres81. C'est d'ailleurs l'objectif essentiel
dégagé de la Convention de l'Union Economique de l'Afrique
Centrale qui affirme la nécessité d'uniformisation des
marchés des Etats membres et la condamnation de politiques sectorielles
de concurrence dans le but de se conformer au principe d'une économie de
marché ouverte et concurrentielle. C'est ce que traduit l'article 2 de
ladite convention qui prévoit la création d'un marché
commun, fondé sur la libre circulation des biens, des services, des
capitaux et
79 Elles sont immédiatement applicables et
directement invocables devant le juge interne, en vertu de l'article 21 de
l'additif au traité de la Communauté Economique et
Monétaire d'Afrique Centrale, relatif au système institutionnel
et juridique de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique
Centrale. Pour plus d'amples informations, lire Deny Simon, Le
système juridique communautaire, PUF, Paris, 1997, 536 p. et ONDOA
(M) « L'ajustement structurel ... », Op. cit., p.113. Même s'il
faut relever avec le Professeur Alain Didier OLINGA que « la
Constitution camerounaise n'offre aucune base juridique pour une telle
applicabilité directe ». OLINGA (A.D), «
Réflexion sur le Droit international, la hiérarchie des normes et
l'office du juge au Cameroun » in « Acte de la journée
d'étude du 18 juin 2004 à l'ENAM », Juridis
Périodique, n° 63, 16e année, ed.
spéciale, juin 2005, pp.10 et suivantes
80 DJEUKOU (J), « La CEMAC, rétrospective et
perspective : réflexion sur l'étude récente du Droit
communautaire de l'Afrique centrale », Juridis Périodique,
n° 47, juillet 2001, pp.106-116 ; AVOM (D), « Le traité CEMAC
: nouveau départ pour le processus d'intégration
économique en Afrique centrale ? », RJPIC, n°...,
mai-août 1999, p.58 ; ATEMENGUE (J.N), « Le droit matériel
d'intégration dans la Communauté économique et
monétaire de l'Afrique centrale. Une lecture des textes fondamentaux
», Juridis Périodique, n°46, Avril, 2001, pp
106-113.
81 L'article 28, alinéa 5 de l'UDEAC, renforcé
dans le cadre de la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique
Centrale préconisait déjà d'ailleurs « la
recherche des moyens susceptibles d'aboutir à l'abandon progressive
entre les Etats membres des pratiques commerciales restrictives
».
36
des personnes. L'article 13, quant à lui, commande
l'élimination entre autres « de toute autre mesure
d'effets équivalents susceptible d'affecter les transactions entre les
Etats membres », y compris donc les mesures nationales
d'encadrement des prix. Dans la même logique, l'alinéa 2 de
l'article 16 instituant des restrictions au mouvement d'investissement et des
capitaux précise que « lesdites restrictions ne doivent
constituer ni un moyen de discrimination arbitraire, ni une restriction
déguisée au commerce des Etats membres ».
En somme et, bien que n'ayant directement pas un lien avec les
prix, la Convention de l'Union Monétaire d'Afrique Centrale,
relative aux politiques monétaires de la sous région se fixe pour
objectif essentiel la stabilisation des prix à travers la maîtrise
des taux de change. En fait, l'existence des institutions
spécialisées de l'Union Monétaire d'Afrique Centrale
laisse entendre qu'elle préconise une liberté réelle des
prix sur le marché. Cet objectif est d'ailleurs l'objet
spécifique de textes de la Communauté Economique et
Monétaire d'Afrique Centrale, spécialement pris en matière
économique et commerciale.
2. Les textes spécifiques de la CEMAC en
matière économique et commerciale
La Communauté Economique et Monétaire d'Afrique
Centrale est une institution dotée d'une personnalité juridique
susceptible de générer du droit dérivé. Sur cette
base, des instruments juridiques ont été spécifiquement
édictés en matière économique et commerciale afin
de favoriser l'intégration communautaire à travers la
multiplication des échanges entre les Etats. Il s'agit de
règlements dont le premier régit le commerce entre les Etats ; le
deuxième, les pratiques déloyales entre les Etats ; et le
troisième porte charte des investissements de la Communauté
Economique et Monétaire d'Afrique Centrale.
Le règlement n°1/99/UEAC-CM-639 du 25
juin 1999, portant adoption de la réglementation des pratiques
commerciales anticoncurrentielles ; et le règlement
n°4/99/UEAC-CM-639 du 25 juin 1999, portant réglementation
des pratiques étatiques affectant le commerce entre les Etats membres
sont consubstantiels quant au fond. Le premier cependant interdit toute
pratique de nature à faire obstacle au libre jeu de la concurrence
telles que les ententes illicites, les abus de position dominante, les
concentrations, qui réduisent
37
sensiblement le commerce sur le plan communautaire et qui sont
orchestrées par les entreprises. Toutes choses qui obstruent la
concurrence sur le marché commun, mais aussi particulièrement la
liberté des prix. Aussi a-t-il été institué des
organes ou autorités communautaires chargés de l'application du
Droit communautaire de la concurrence à titre exclusif. Il convient
toutefois de rappeler que ces organes ne peuvent être compétents
qu'à condition qu'il y ait eu entrave à la concurrence au niveau
communautaire affectant sensiblement le commerce entre les Etats. Encore
faudrait-il préciser à partir de quel critère une telle
affectation pourrait être considérée comme sensible. En
terme d'institutions, il s'agit de l'Organe de Surveillance de la Concurrence
(OSC), du Conseil Régional de la Concurrence (CRC), de la Cour arbitrale
et même sûrement de la Commission permanente en matière de
concurrence et de protection du consommateur bénéficiant tous,
bien que relativement, de pouvoir de sanction des pratiques
anticoncurrentielles tant des entreprises que des Etats membres.
Le règlement n°4, quant à lui, régit
justement les pratiques anticoncurrentielles, c'est-à-dire toute
pratique affectant la libre détermination des prix au sein de la
communauté, ou encore en constituant l'abus, il préconise
« l'abandon progressif entre les Etats membres des pratiques
commerciales restrictives »82. Ce
règlement distingue les aides compatibles et celles non compatibles avec
le marché commun et le préserve contre les effets de monopole
légaux afin de garantir la concurrence. L'aide ne pouvant être
sanctionnée qu'à condition d'affecter sensiblement la concurrence
entre Etats membres.
Heureusement, le règlement n°17/99/CEMAC-020-CM-03
relatif à la Charte des investissements de la Communauté
Economique et Monétaire d'Afrique Centrale se révèle
être un véritable Droit commun des affaires destinées
à améliorer l'environnement institutionnel fiscal et financier
des entreprises, sans distinction, en vue de favoriser la croissance et la
diversification des économies des pays membres sur la base d'une
meilleure définition du rôle de l'Etat et du développement
harmonieux du secteur privé à travers les investissements. Elle
préconise la reconnaissance du rôle fondamental du secteur
privé dans le processus économique et préconise un
partenariat actif entre l'Etat, le secteur privé et la
société civile qu'elle ne définit cependant pas.
L'article 10 de la Charte des investissements dénonce
toute les « pratiques discriminatoires qui font obstacle au
libre jeu de la concurrence ». Cet article consacre en
82 KALIEU (Y)... p.84
38
filigrane la liberté du commerce et de l'industrie par
cette affirmation de la libre concurrence, et donc par ricochet, de la
liberté des prix.
La Charte des investissements de la Communauté
Economique et Monétaire d'Afrique Centrale apparaît donc comme le
texte le plus pertinent fondant la déréglementation, la
libéralisation des prix à l'échelle communautaire. Il
reste tout de même à déplorer l'absence d'une jurisprudence
communautaire consacrant cette liberté comme cela fut le cas en droit
comparé, dans l'affaire dite du «tabac, essence livre et du
cognac» où le juge européen rappelle que
« la fixation du prix d'un produit ou d'un service à un
niveau qui ferait obstacle aux importations ou aux exportations est interdite
en vertu du traité de Rome ».
En définitive, la libéralisation des prix - ou
du moins- l'un de ses aspects, c'est-à-dire leur
déréglementation, est fondée sur le plan externe par les
règles du libre échange qui se dégage du droit substantiel
de l'Organisation Mondiale du Commerce dans toutes ses composantes, mais aussi
sur l'ordre juridique communautaire visant à l'échelle
régionale, l'harmonisation, mieux, l'unification du droit des affaires.
A l'échelle sous-régionale, l'intégration au sein de la
Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale ne peut
qu'être compatible avec un tel processus. Cette
déréglementation, ainsi déductivement consacrée,
ressemblerait à une simple exhortation si elle ne se traduisait pas plus
concrètement dans le cadre de la législation nationale,
c'est-à-dire interne.
SECTION II : LES FONDEMENTS JURIDIQUES INTERNES
Plus encore que dans le cadre juridique externe, le processus
de déréglementation en général et celui des prix en
particulier tire ses sources de fondements juridiques, c'est-à-dire des
fondements tirés des actes des autorités étatiques
elles-mêmes, et non seulement réceptionnés à partir
du Droit international. Il faudrait cependant souligner que dans le cadre
interne, cette déréglementation est la résultante de
sources juridiques de natures diverses. En effet, elle est le fait de la
pratique, moins directement de la jurisprudence, mais sûrement de la
coutume. Pratique générale et pérenne, voire naturelle, la
discutabilité des prix se présente sous cet angle comme une base
incontestable, bien que sûrement lointaine à l'idée de
limitation de l'encadrement étatique des prix. Plus concrètement,
la déréglementation apparaît
39
comme la résultante de l'affirmation en droit interne
de deux principes de valeur constitutionnelle et législative à
savoir : le principe de la liberté de commerce et de l'industrie et le
principe de la liberté des prix. Ces principes qui entretiennent une
corrélation directe fondent en effet la déréglementation
en général de l'économie camerounaise et partant, celle
d'un de ses objets : le prix. Cette déréglementation, expression
même de la libéralisation, n'a donc pas connu qu'une onction
juridique internationale et communautaire, mais aussi interne à tous les
niveaux de la hiérarchie kelsenienne des normes juridiques83,
c'est-à-dire aussi bien constitutionnelle (Paragraphe I) qu'infra
constitutionnelle (Paragraphe II).
PARAGRAPHE I : LES BASES CONSTITUTIONNELLES
La libéralisation des prix au Cameroun est le
corollaire d'un principe dont la valeur constitutionnelle semble aller de soi,
tant il est devenu traditionnel de la classer dans cette
catégorie84 : le principe de la liberté du commerce et
d'industrie. Ce principe constitue la base fondamentale de la
libéralisation (A) et il se décline en sous principes qui en
constituent les bases dérivées (B)
A. LA BASE PRINCIPALE : LE PRINCIPE DE LA LIBERTE DU
COMMERCE ET DE L'INDUSTRIE
La constitutionalité de ce principe reste à
démontrer dans le contexte camerounais, même si sa portée
elle, reste constante à tous égards.
1. La constitutionalité du principe
Si la valeur constitutionnelle de ce principe est une
constante en droit comparé, ceci ne semble pas être le cas en
droit camerounais. La doctrine lui colle pourtant une valeur constitutionnelle
qu'elle n'a jamais démontrée, mais qu'elle a pris la
fâcheuse habitude d'affirmer en se fondant sur des textes et des
jurisprudences étrangères à notre ordre juridique
83 Lire KELSEN (H), Théorie pure du droit,
Dalloz, 2nd ed., traduction Charles EISENMANN, Paris 1962,496p.
84 Pour la totalité des auteurs, notamment de droit
comparé, la constitutionnalité de ce principe ne souffre d'aucune
contestation, en plus d'être un principe général de droit,
consacré tant par la jurisprudence que par la doctrine. CHENOT (B),
Organisation économique de l'Etat, Librairie Dalloz,, Coll.
Etude politique, économique et sociale, 2nd ed., Paris 1965,
p.479. ; DELAUBADERE (A) et DELVOLVE (P), Droit public
économique... Op. cit., p.59.
40
et ne pouvant, sauf à titre de droit comparé,
nullement être utilisées dans notre cadre ; encore séduite
est-elle aujourd'hui du monde occidental85. Des travaux importants
ont pourtant été effectués sur le sujet86. Le
plus surprenant reste de constater avec quelle aisance les origines de ce
principe ont été rattachées à l'histoire coloniale
de notre pays et à la loi du 27nov 1980
fixant l'orientation de l'activité
commerciale87 qui n'est pourtant pas de valeur constitutionnelle.
Cette dernière observation serait de nature à fonder la non
constitutionalité de ce principe dans le contexte camerounais. En effet,
nombre de considérations sont de nature à susciter de
réelles interrogations quant à la valeur constitutionnelle de ce
principe dans le contexte camerounais. En effet, sur le plan formel, aucun
texte constitutionnel ne le consacre expressément, ni directement ; et
quand bien même cela aurait été le cas, encore aurait-il
fallu s'accorder sur laquelle Constitution.
Il faudrait en effet se rappeler que la doctrine camerounaise
est divisée au sujet de la Constitution réellement en vigueur au
Cameroun. Les points focaux de cette controverse doctrinale tournent d'une part
autour du point de savoir si le texte constitutionnel du 18 janvier 1996
était une révision de la Constitution originelle de 1972, ou
l'écriture d'une nouvelle Constitution88. Et d'autre part, si
une ou deux Constitutions sont en vigueur au Cameroun89. Les
réponses à ces deux questions sont corrélatives, de sorte
que, de la première dépend la seconde. En effet, s'il est vrai
qu'au-delà des innovations assez importantes de la dernière
modification apportée à la Constitution en 1996, le texte
officiel parle lui-même de révision constitutionnelle, toute
interprétation de quelconque nature que ce soit peut paraître
abusive, surtout que, lesdites innovations ne semblent en réalité
qu'avoir renforcées sur le plan normatif et institutionnel, les bases de
la République et de l'Etat de droit alors jetées par le texte
originel. Sur cette base, la Constitution formellement en vigueur reste celle
de 1972, simplement révisée, mais dont la matière s'est
plus qu'enrichie. Or, le degré d'innovation apporté par le
nouveau texte ne peut que laisser perplexe, quant à une telle vision
puisque alors, sur le plan matériel, la Constitution de 1972 ne serait
plus tout à fait
85 MEBENGA (M), « Le droit et ses pratiques ... »Op.
cit., p.74.
86 OLANGUENA AWONO (U), La liberté du commerce et
de l'industrie au Cameroun, Th. Droit 3e Cycle, Orléans,
1982, 321p. Plus récemment encore, NYAMA (J-M) « La liberté
du commerce et de la concurrence... »Op. cit., pp.51-74.
87 OLANGUENA AWONO (U), La liberté du commerce et de
l'industrie au Cameroun...Op. cit., p.2.
88 KAMTO (M) « Révision constitutionnelle ou
écriture d'une nouvelle Constitution ? » Lex. lata,
n°23-24, 1996, p.19. ; MBOME (F.X) « Constitution du 2 juin
révisée, ou nouvelle Constitution ? », in La
réforme constitutionnelle du 18 janvier 1996, aspects juridiques et
politiques, Friedrich Ebert, Yaoundé, 1996, pp.16-33.
89 ONDOA (M), « La Constitution duale : recherche sur les
dispositions constitutionnelles transitoires au Cameroun », RASJ,
Vol. 12, Yaoundé, 2000, pp. 20-56. OLINGA (A.D), La Constitution de
la République du Cameroun, Presses de l'UCAC, ed. Terre africaine,
Yaoundé 2006, p.23.
41
logique avec elle-même, ne fut-ce que sur le plan de son
autorité. Au final, il s'est donc agi formellement d'une révision
constitutionnelle, mais matériellement de l'écriture d'une
nouvelle Constitution. C'est cela qui justifie que puisse être
soulevé le second problème ; à savoir celui du nombre de
Constitution actuellement en vigueur au Cameroun.
La question en elle même peut paraître absurde,
voire incongrue, tant il semble juridiquement établi qu'au sein d'un
seul et même Etat, ne peut être en vigueur qu'une seule
Constitution fondant l'ordre juridique dudit Etat90. L'idée
de plusieurs Constitutions cohabitant simultanément dans un même
ordre juridique ne laisse pas de surprendre. Cette curiosité
scientifique fort séduisante a été théorisée
par la Professeur Magloire ONDOA avec une rigueur scientifique, une
cohérence et une logique qui n'aura pu que convertir. Ceci d'autant plus
que l'idée d'une « Constitution duale
»91 ne reflète fort cruellement que la
réalité juridique et intelligiblement scientifique de notre
environnement constitutionnel. En réalité, la suspension de
l'application de certaines dispositions de la loi constitutionnelle du 18
janvier 199692, complétée à la non abrogation
formelle, ou mieux à la prolongation formelle de l'applicabilité
de nombre de dispositions de 1972, en vertu des articles 67 et 68 de la loi
constitutionnelle du 18janv 1996 n'aura pu que consacrer au sein d'un
même ordre juridique, deux instruments fondamentaux dont l'un
formellement en vigueur, mais non encore matériellement mis en
application dans son entièreté ; et l'autre, n'étant plus
formellement en vigueur en intégralité, mais demeurant
matériellement mis en application. Ceci apparaît comme une
conséquence logique du principe de progressivité auquel
n'échappe pas l'ordre constitutionnel lui-même en termes
d'entrée en vigueur des normes dans le temps. Il serait en
réalité absurde, voire intellectuellement inexact, d'affirmer que
la Constitution de 1972 n'est pas en vigueur, il le serait davantage s'il
fallait infirmer que le texte de 1996 n'est point en vigueur au Cameroun : il
cohabite donc inexorablement deux textes constitutionnels
s'interpénétrant, ne formant au final qu'un bloc de
constitutionalité comme norme fondamentale au sommet de l'ordonnancement
juridique interne.
Lequel bloc de constitutionalité intègre en son
sein - à travers la constitutionalité consacrée du
préambule de la loi constitutionnelle du 18 janvier 199693-
les normes internationales consacrant plus ou moins directement le principe de
la liberté de commerce et
90 OLINGA (A.D), « La Constitution ... », Op.
cit., p.24.
91 ONDOA (M), « La Constitution duale... » Op. cit.,
p.20-56
92 OLINGA (A.D) « L'article 67 de la Constitution lex
lata,n°3, mars 1997,pp.3-9
93 Article 55 de la Constitution.
42
d'industrie94. Encore que ce principe sur le plan
de l'histoire constitutionnelle de notre pays avait déjà
été consacré par un texte à valeur
constitutionnelle, notamment le préambule de la Constitution du 4 mars
196095, même si sa valeur juridique n'était pas encore
établie. Ce qu'il importe ici de constater est que le législateur
constitutionnel camerounais a octroyé dès l'aune de l'Etat
camerounais, une valeur constitutionnelle à ce principe.
La constitutionalité du principe de commerce et
d'industrie au Cameroun relève donc d'un bloc fluctuant et mouvant de
constitutionalité qu'on ne saurait nier, malgré la portée
limitée dudit principe.
2. La portée du principe
Si important que soit le principe de la liberté de
commerce et d'industrie ; en tant que garantie de l'existence d'une
liberté reconnue aux personnes morales et physiques, tant de Droit
public que de Droit privé national et étrangères d'exercer
une activité économique ou industrielle, il n'en demeure pas
moins un principe limité. Ainsi Monsieur OLANGUENA AWONO estime t-il
qu'en réalité, ce principe n'aurait pu être
appréhendé que par l'analyse de sa multitude de
limites96. En fait le principe de la liberté de commerce et
d'industrie au Cameroun évolue dans un océan de
dérogations et d'exceptions, à telle enseigne que la règle
s'est inversée en exception. Les dérogations sont
conventionnelles .Il en est ainsi des nombreuses clauses susceptibles de la
limiter telles que les clauses de non installation, de non
rétablissement, de non concurrence visant à interdire aux anciens
partenaires ou aux intervenants potentiels de développer une
activité commerciale ; ou des clauses d'exclusivité d'achat, de
fourniture ou d'établissement, visant à placer certains
débiteurs sous la dépendance du cocontractant afin de
l'empêcher de gérer à sa guise son activité. Le
principe admet également des exceptions légales telles que
certaines prescriptions réglementaires liées au respect de
l'ordre public, aux incompatibilités, aux exigences de
déclaration et autres incapacités, empêchant à
certaines catégories de personnes d'exercer l'activité
commerciale ou industrielle à leur guise, ou encore ne le permettant que
sous certaines conditions.
94 Les accords de l'Organisation Mondiale du Commerce,
la législation CEMAC, la Charte de La Havane.
95 Paragraphe 15 du préambule de la Constitution du 04
mars 1960, disposant clairement « la liberté de
constitution, de gestion et d'exploitation des exploitations syndicales et
sociétés, la liberté de circulation des personnes et des
biens, la liberté d'établissement et d'investissement, ainsi que
la non discrimination en matière juridique, financière, fiscale
et commerciale, sont reconnues à tous dans les conditions fixées
par la loi. »
96 OLANGUENA AWONO (U), La liberté du commerce
... Op. cit., p.6.
43
Ainsi, le principe de la liberté de commerce et
d'industrie constitue le moule constitutionnel sans lequel tout processus de
libéralisation n'aurait pu prendre forme en droit camerounais. Ce
principe jette les bases d'une libéralisation, voire d'une
libération des prix. Il se décline en des sous principes qui en
constituent le contenu et en deviennent ainsi des bases constitutionnelles
dérivées.
B. LES BASES DERIVEES : LES PRINCIPES DE LA LIBERTE
D'ENTREPRENDRE, D'EXPLOITER ET DE CONCURRENCE
En effet, une fois consacré, à quoi renvoie ce
principe, et comment agit-il sur les prix ? Ce principe signifie liberté
d'entreprendre et d'exploiter, mais aussi liberté de concurrence.
1. La liberté d'entreprendre et
d'exploiter
Ce double principe est la composante en effet de deux
principes qui peuvent être appréhendés
séparément, bien qu'entretenant en pratique un lien si
étroit qu'il devient logique de les regrouper tout en gardant à
l'esprit le sens respectif de chacun.
La liberté d'entreprendre signifie la
possibilité légalement ouverte à toute personne morale
comme physique, camerounaise ou étrangère de s'installer en
créant ou en acquérant une entreprise, quelle qu'en soit la
forme, et d'y exercer l'activité économique de son choix dans le
respect de la loi. Elle se traduit par les libertés : d'accès, du
choix, du mode d'organisation, d'exercer, d'établissement, ainsi que de
contracter. C'est elle qui devient en Droit communautaire la liberté de
circulation des personnes, des biens, des capitaux de même que celle
d'installation et d'établissement. Toutes choses qui traduisent l'option
du moins d'Etat en matière d'initiative commerciale et industrielle.
Ceci va jusqu'à la liberté de choisir sa propre politique
d'exercice de l'activité commerciale.
Le principe de liberté d'exploitation
justement renvoie à la possibilité de déterminer sa
propre politique de production, de distribution et de commercialisation,
c'est-à-dire liberté de gérer à sa guise son
entreprise en choisissant la politique, voire la stratégie commerciale
qui semble le mieux servir ses intérêts économiques. Dans
cette optique, le commerçant doit jouir de la possibilité de
manipuler et d'ajuster les prix au gré de ses intérêts
commerciaux.
44
Or, ceci n'est nécessaire, voire possible que si
l'activité commerciale se développe dans un cadre
concurrentiel.
1. Le principe de la liberté de
concurrence
Ce principe apparaît comme le corollaire principal,
l'application et même la condition du principe de la liberté de
commerce et d'industrie. Du fait de sa filiation avec ce dernier, il
bénéficie donc également de l'onction constitutionnelle.
Les rapports entre ces deux principes ne sont plus à
démontrer97 pour ce qui est du Cameroun. Ceci peut se
justifier par le fait que l'ancien code des investissements parle au même
titre que la loi régissant l'activité commerciale, exclusivement
de la liberté des activités économiques. Ce principe
signifie deux choses : en premier lieu, il signifie consécration de la
liberté des prix, c'est-à-dire liberté de fixer les prix
des biens et services uniquement par le libre jeu de l'offre et de la demande
sur le marché et donc en second lieu, interdiction, ou du moins exigence
de réduction de l'intervention de l'Etat dans la détermination
des prix. En clair, la liberté de concurrence renvoie à la
liberté de détermination de la politique commerciale en fonction
tant des intérêts de tout entrepreneur d'une part ; et d'autre
part, à l'observation du lien congénital qui existe entre la
concurrence et les prix98. Toute concurrence n'étant possible
que par les prix, libérer la concurrence signifie libérer les
prix. La consécration de ce principe pose donc avec onction
constitutionnelle les bases certes dérivées de la
déréglementation comme processus de libéralisation des
prix au Cameroun.
Au regard de ce qui précède, force est de
reconnaître que la déréglementation des prix est un
processus encadré au plus haut sommet de la hiérarchie des normes
juridiques. Cette consécration constitutionnelle quelque peu induite et
donc implicite se traduit plus concrètement dans les textes
législatifs et réglementaires, c'est-à-dire de valeur
infra constitutionnelle.
PARAGRAPHE II : LES FONDEMENTS INFRA
CONSTITUTIONNELS
97 NYAMA (J-M) « La liberté de commerce et la
concurrence ... » Op. cit., p.60.
98 Le principe de la liberté de concurrence et celui de
la liberté des prix sont consacrés dans le contexte camerounais
par l'article 12 de la loi n°90/031 du 10aout 1990, régissant
l'activité commerciale au Cameroun, qui dispose « Les prix des
produits et des services sont librement déterminés par le jeu de
la concurrence sur le marché ».
45
La libéralisation des prix à travers
l'affirmation constitutionnelle de tous ces principes libéraux,
principalement celui du commerce et de la concurrence et celui des prix repose
sur des textes aussi bien législatifs (A) que d'origine administrative
(B).
A. LES TEXTES JURIDIQUES A CARACTERE LEGISLATIF
Il ne s'agit pas ici d'évoquer tous les textes de
nature ou de valeur législative qui fondent plus ou moins directement le
processus de desserrement de l'étau étatique sur les prix. Seules
seront évoquées quelques lois pertinentes régissant
notamment des objets entretenant un lien consubstantiel avec les prix, à
l'instar de ceux régissant l'investissement, l'activité
commerciale, ou encore la concurrence.
1. Les lois régissant l'activité
commerciale au Cameroun
Les lois régissant l'activité commerciale sont au
coeur du processus de
transformation de l'économie camerounaise, d'une
économie administrée à une économie dite de
marché, c'est-à-dire ouverte à la concurrence et à
toutes les libertés sus évoquées. L'article 1er de la loi
n°80-25 du 27 novembre 1980 fixant l'orientation de l'activité
commerciale prévoyait déjà à cette époque la
liberté de l'activité commerciale en la République Unie du
Cameroun. Seulement, à cette époque, c'est avec la même
ferveur qu'elle affirmait le monopole de l'Etat sur l'encadrement de
l'activité commerciale. Encore que ladite affirmation était on ne
peut plus vague99.
Dix ans plus tard, l'option résolument libérale
de l'économie camerounaise se fait plus nette à travers la loi
n°90/031 du 10 août1990 régissant l'activité
commerciale au Cameroun. Laquelle loi réaffirme le principe en le
précisant davantage en son article 4 qui dispose que :
« toute personne physique ou morale, camerounaise ou
étrangère, est libre d'entreprendre une activité
commerciale au Cameroun, sous réserve du respect des lois et
règlements en vigueur ». Si cette dernière loi
gagne en précision quant à la personnalité juridique des
bénéficiaires du principe, de même que sur la nature de
l'étendue de l'activité commerciale, il n'en demeure pas moins
qu'elle limite elle aussi cette liberté de s'établir
99 « L'activité commerciale est libre en
République Unie du Cameroun... », Article
1er de la loi n°80-25 du 27 novembre 1980 fixant l'orientation
de l'activité commerciale au Cameroun.
46
dans le commerce de son choix et d'exploiter à sa guise
son activité par le respect des exigences liées à l'ordre
public et de la réglementation en vigueur. Le fondement de la
libéralisation découle ici de la reconnaissance d'une
liberté d'engager une activité commerciale alors même que
seul l'Etat semblait avoir cette faculté. L'article 6 de ladite loi
reconnaît la faculté à toute entreprise de
déterminer librement sa politique de production, de distribution et de
commercialisation. La liberté de l'importation et de l'exportation
découle quant à elle de l'article 7.Cet Ensemble de mesures
traduit, ou invite à un recul, à défaut du retrait de
l'Etat du secteur marchand. La disposition la plus décisive en termes
d'affirmation d'une déréglementation normative des prix se trouve
dans les dispositions de l'article 12 de ladite loi qui consacre formellement
le principe de la liberté des prix en ces termes « les
prix des produits et des services sont librement déterminés par
le jeu de la concurrence sur le marché ». Ce texte
prescrit, certes, sous réserve des interdictions frappant certaines
pratiques anticoncurrentielles, l'éradication de toute fixation
étatique des prix, et suite, l'avènement d'une libre
détermination en référence aux lois de l'offre et de la
demande. Ceci étant, le principe de la liberté de concurrence
trouve également sa consécration dans des textes
spécifiques en la matière.
2. Les lois relatives à la
concurrence
La concurrence renvoie à une
compétitivité économique se traduisant dans un cadre
commercial et libre. Aussi, stipule-t-elle une sphère de liberté
en termes de déploiement de moyens pour s'attirer le plus grand nombre
possible de clients, dans le respect certes des normes100. A cet
effet, la présence de l'Etat ne peut qu'être résiduelle et
la réglementation du commerce, marginale voire inappropriée. Tout
texte d'encadrement de la concurrence ne vise qu'à la rendre possible et
viable par la création de ses conditions de réalisation. Ces
textes sont donc consubstantiellement porteurs de libéralisation.
Aussi paradoxale que cela puisse paraître, il convient
de noter que la concurrence est formellement consacrée depuis
l'époque de la réglementation tous azimuts de l'économie,
par des dispositions pertinentes de l'ordonnance portant régime
général des prix au Cameroun. La section III du titre VII de ce
texte portant « dispositions annexes à la
réglementation des prix » est intitulée
« du maintien de la concurrence ». Elle
condamne toutes pratiques
100 CHAPUS (Y), le Droit de la concurrence, que sais-je
? PUF, Paris, 1988 P. 3.
47
anticoncurrentielles et les assimile à des pratiques
des prix illicites administrativement et juridictionnellement
sanctionnée comme telles101. Le souci d'adaptation de la loi
au contexte ambiant de libéralisation du commerce et des
échanges, a amené le législateur à adopter une loi
sur la concurrence en 1998102. Il faudrait cependant signaler
l'incomplétude de ladite loi qui ne réglemente que les accords
anticoncurrentiels, les abus de position dominantes, les fusions et les
acquisitions d'entreprise. Or, la concurrence va au-delà de ces quatre
situations, et englobe les pratiques restrictives de concurrence et nombre
d'autres pratiques de concurrences déloyales tant collectives
qu'individuelles.
Ce qu'il convient de retenir est que dans l'ordonnancement
juridique camerounais, nombre de textes de nature ou de valeur
législative consacrent la concurrence. Ce qui traduit son option pour
une économie de marché ouverte à l'investissement.
3. Les lois régissant l'investissement
Les différentes lois régissant l'investissement
au Cameroun reflètent la politique économique en vigueur à
chaque époque, Ainsi la loi N°84/002 du 04 Juillet 1984 portant
code des investissements en République du Cameroun, abrogeant le code
des investissements de 1960 avait le souci de donner la priorité aux
petites et moyennes industries (PMI/PME) orientées surtout vers la
transformation des produits primaires locaux. Ce code justifiait de fait
l'intervention de l'Etat comme locomotive du développement de
l'industrie. En revanche, le code des investissements N°90/007 du 8
Novembre 1990 préconisait l'option pour une politique libérale
certes imposée de l'extérieur.103 En effet, l'objet de
ce titre était de favoriser et de promouvoir les investissements
productifs à travers des mesures d'encouragement à la
création et au développement des activités
économiques104. Cette loi préconisait en outre la
promotion des exportations à travers la création des
régimes spéciaux procurant nombre d'avantages aux entreprises
parmi lesquels le régime de zone franche industrielle crée et
régie par l'ordonnance N°90/001 du 19 Janvier 1990 et
ratifiée par la loi N°90/023 du 10 Août 1990.
101 Articles 43 et 44 de l'ordonnance N°72 portant
régime général des prix.
102 Loi N°98/0 16 du 14 Juillet 1998 relative à la
concurrence.
103 TOUNA MAMA Op. Cit. P.95.
104 Article 2 alinéa 1 c'est-à-dire
activités commerciales et industrielles.
48
Ce dernier régime ouvrait en effet comme une zone et
des points « de non droit »105.
La loi N° 2002/004 du 19 Avril 2002 portant charte des
investissements en République du Cameroun actuellement en vigueur, a
abrogé les anciens codes autant que les régimes des zones
franches. Le changement de nomenclature n'est sûrement pas hasardeux. En
effet, si le code renvoie à un ensemble de textes normatifs
régissant une matière déterminée ou un domaine
spécifique, la charte en revanche, régissant certes aussi un
domaine spécifique, est emprunte, elle, de souplesse et de
flexibilité. La charte des investissements ressemble en
réalité à une série d'exhortation, de
sensibilisation, de programmation ou même d'incantation en faveur de
l'ouverture du marché, sans caractères véritablement
contraignants puisque sans sanctions, un véritable hymne au
libéralisme économique. Elle affirme le choix
pour« une économie du marché comme
mode d'organisation économique
privilégié »106, la reconnaissance
du rôle clé de l'entrepreneur, de l'investisseur, bref de
l'entreprise privée à côté toutefois du rôle
essentiel de l'Etat dans la promotion du développement économique
et social. La charte clarifie le rôle de l'Etat, celui du secteur
privé et de la société civile. Le respect de ces
rôles apparaît comme un gage de bonne gouvernance
économique. Elle préconise la formation d'un réel
partenariat entre l'Etat, le secteur privé et la société
civile, qu'elle considère comme la condition de recherche d'une
meilleure efficacité de l'économie. Ce texte par trop
libéral, préconise enfin la mise en place d'une fiscalité
incitative et attractive autant qu'un encadrement flexible et réversif
pour la compétitivité économique.
Dans cette logique, la charte réaffirme la
liberté d'entreprendre et d'investissement comme étant
« un principe général de droit
»107. Plus encore, la charte confirme la
liberté des prix à travers son article 13 qui dispose clairement
: « les mécanismes de l'offre et de la demande
s'appliquent aux services et biens offerts à la collectivité
». En d'autres termes, d'après la charte, l'Etat ne
devrait plus intervenir dans la détermination des prix. Il n'y a
guère meilleure argumentation pour fonder la
déréglementation des prix.
Au demeurant, le législateur camerounais mu par les
vents du libre échangisme ambiant, a usé de son pouvoir normateur
pour édicter des actes favorables à l'avènement d'un cadre
déréglementaire de prix. Ceci aura été le cas des
textes régissant autant l'activité
105 MEBENGA (M) Op.Cit. P.76.
106 Article 1er de la charte des investissements.
107 Titre 2 de la Charte.
49
commerciale que la concurrence et les investissements. Des
lois que sont chargées de mettre en application, des normes de valeur
infra législatives et de nature administrative.
B. LES ACTES NORMATIFS DE L'ADMINISTRATION
Trois catégories d'actes de l'administration
d'inégale forme juridique fondent l'ouverture du cadre économique
en général, et celui des prix en particulier. Il s'agit d'actes
réglementaires autonomes, non autonomes et d'actes non
réglementaires du tout.
1. Les actes réglementaires
L'encadrement des prix est un des domaines de
prédilection, de l'exercice du pouvoir réglementaire. Ce domaine
laisse en effet observer une véritable inflation réglementaire.
Ceci s'explique par les nécessités d'encadrement quotidien des
prix mais aussi par le fait que toute décongestion de cette
prolifération réglementaire trouve d'abord comme instrument
privilégié, des textes réglementaires. L'article 27 de la
loi de révision constitutionnelle du 18 Janvier 1996 reconnaît un
réel pouvoir normateur à l'Exécutif. Lequel pouvoir
génère des normes réglementaires autonomes d'égale
valeur juridique que la loi. Il s'exerce à travers le bras
séculier de l'Etat qu'est l'administration ; allant de ses composantes
politiques titulaire du pouvoir réglementaire originaire jusqu'aux
administrations jouissant d'un pouvoir réglementaire
dérivé en matière de prix. Il se traduit par
l'édiction de décrets, d'arrêtés, de circulaires, de
directives, de notes de service, voire de simples communiqués faisant
grief, avec tout ce que cela comporte comme problèmes
juridiques108.
Le pouvoir réglementaire non autonome est celui
d'application des lois, ou de mise en exécution d'une loi. Dans ce
cadre, nombre de textes à valeur réglementaire ont
été pris en application des lois de la libéralisation sus
évoquées. A l'instar du décret N°93/720/PM du 22
Novembre 1993 fixant les modalités de l'application de la loi
N°90/031 du 10 Août 1990
108 La valeur, la nature, et même la force juridique des
directives, des circulaires, des notes de service etc... sont en effet autant
de points qui divisent la doctrine. Lire CLIQUENOIS (M), D.P.E, Ellipse, Lille,
2001, P.247 et suivantes.
50
régissant l'activité commerciale au Cameroun. Ou
encore du décret N°2005/1362 portant organisation et fonctionnement
de la Commission Nationale de la concurrence en application de la loi relative
à la concurrence au Cameroun.
Il convient à ce niveau de s'interroger sur la force
réelle de ces actes d'application par rapport à la loi. Les
textes d'application des lois dégagent parfois plus de force juridique
que nécessaire. Ils suspendent l'exécution de la loi aux pouvoirs
discrétionnaires du Président de la République sans autre
recourt possible. C'est ainsi par exemple que le décret d'application de
la loi régissant l'activité commerciale sus évoquée
n'a été pris que trois ans après la loi .Ceux relatifs
à l'application de la loi sur la concurrence autant que la charte des
investissements restent en partie, inexistants. Cette situation soulève
l'épineux problème du pouvoir et de la sanction de
l'inexécution des actes législatifs. De même faut-il
constater un vide juridique quant à la classification dans une
catégorie d'actes de refus d'édiction des textes
réglementaires d'application des lois.
Au-delà de ces dernières considérations
et au regard de ce qui précède, force est de reconnaître
qu'il n'est pas jusqu'aux textes réglementaires aussi bien autonomes que
d'application des lois qui ne fondent la libéralisation de
l'économie et donc des prix. Ceci est également l'objet d'actes
administratifs de valeur réglementaire.
2. Les actes non réglementaires
Nombre d'actes de l'administration ne sont pas classés
dans la catégorie des actes réglementaires, parce que
n'étant pas contraignants, ou ne faisant pas grief c'est-à-dire
n'affectant pas les droits et les devoirs des concernés, ou encore, ne
répondant pas simplement aux critères de définition d'un
acte administratif unilatéral. Dans cette catégorie, il convient
d'évoquer ici, les programmes généraux des échanges
(P.G.E) ainsi que la majorité d'autres programmes sectoriels. En effet,
le P.G.E de 1994, qui est le dernier en date et n'est plus formellement en
vigueur puisqu'il a été remplacé par la charte des
investissements. Il prévoyait déjà très clairement
à cette époque « la libéralisation des
prix » comme gage d'une plus forte libéralisation de
l'économie en général. Ce document met en exergue la
volonté de l'Etat de se dégager au maximum de la
réglementation du secteur productif. L'optique d'une économie
plus libéralisée a d'ailleurs été confirmée
dans le cadre du Programme National de la Gouvernance (P.N.G) dont le volet
économique se veut extrêmement libéral. Si tant est
51
que la valeur juridique de ces documents n'est pas certaine,
il n'en demeure pas moins vrai qu'ils sont d'une manière ou d'une autre
contraignants.
L'ensemble des considérations qui
précèdent, traduit assez explicitement l'option résolument
libérale depuis le milieu des années 1990, laquelle option se
dégage aisément de l'adhésion du Cameroun au cadre
normatif libéral tant international que communautaire. Ainsi que de
l'affirmation dans l'ordonnancement juridique interne de principes
économiques libéraux. La déréglementation de
l'économie camerounaise en général et celle des prix en
particulier bénéficie donc d'une onction juridique plus ou moins
affirmée mais donc le contenu reste à préciser.
52
CHAPITRE II LE CONTENU DE LA DEREGLEMENTATION
DES PRIX
L'adhésion du Cameroun aux principes
multilatéraux et libre-échangistes de l'OMC, sa prise en compte
des exigences de l'intégration régionale et communautaire,
l'édiction dans le cadre interne de principes libéraux ainsi que
dans une large mesure les programmes d'ajustement structurels l'ont
résolument ancré dans le giron de l'économie
libérale109. Sa politique économique en a
été fondamentalement modifiée. Elle est passée d'un
interventionnisme exacerbé à un libéralisme tatillon. De
nombreuses opérations ont ainsi été engagées avec
pour dénominateur commun le désengagement de l'Etat du secteur de
l'économie110. Ce vaste mouvement s'est traduit par un large
champ de réduction et où d'adaptation de la
réglementation. La déréglementation, ainsi amorcée
dans les années 1990 et juridiquement encadrée, a
épousé un contenu pour le moins précis en matière
de prix. Elle a en effet consisté dans l'ensemble, en un mouvement
généralisé de désengagement de l'Etat du processus
de détermination des prix sur le marché (section
1ère) permettant de plus en plus une prise en compte des lois
du marché dans ladite détermination (Section2).
SECTION I LE DESENGAGEMENT DE L'ETAT
Contesté, dénoncé et même
indexé111, l'interventionnisme de l'Etat a cédé
le flan à un mouvement pour le moins brutal de réduction, ou de
transformation de l'action de l'Etat dans le secteur économique. De
nouvelles frontières112 ont ainsi été
fixées à l'Etat dans ce secteur suivant plusieurs
modalités (paragraphe 1) donc les implications sur les prix (paragraphe
2) restent d'une très grande portée.
109 Les Professeurs TOUNA MAMA et ses collèges y
trouvent plutôt comme cause la crise économique, qui aurait
conduit à l'adoption des politiques de déréglementation et
n'ayant épargné aucun secteur de l'économie. Lire TOUNA
MAMA (Ss. Dir. Op. Cit. P. 19.
110 Ceci est le cas de l'adoption par exemple d'une vingtaine
de textes de lois visant à libéraliser systématiquement
l'activité économique nationale. Voir à ce propos
Cameroun, Droits et libertés, recueil des textes nouveaux, SOPECAM,
Yaoundé, 1990, 396 P.
111 De GAUDUSSON (D) « Crise de l'Etat interventionniste et
libéralisation de l'économie » Op.Cit. P.6.
112 HÜLSEMEYER (A), « Les nouvelles
frontières de l'Etat », les problèmes économiques
N° 2.680, `'l'Etat - régulateur : où en est
l'intervention de l'Etat ? », Septembre 2000 PP.28-32.
53
PARAGRAPHE I : LES MODALITES DU DESENGAGEMENT
Le désengagement de l'Etat du secteur productif s'est
traduit par une vaste restructuration de secteurs entiers de l'économie
(A) au nombre desquels la, une progressive réforme du secteur public et
parapublic (B).
A- LA LIBERALISATION DE SECTEURS DE L'ECONOMIE
La libéralisation a concerné les secteurs de
l'agriculture, du commerce et de l'industrie ainsi que des monopoles
publics.
1- La libéralisation du secteur de
l'agriculture113
Ayant opté pour une politique
développementaliste, fondée sur l'idéologie de la
construction nationale au lendemain des indépendances, et conscient de
ses atouts naturels et environnementaux, le Cameroun se lancera dans un vaste
mouvement de promotion de l'agriculture sous la houlette de l'Etat. La forte
présence de l'Etat dans ce domaine sera manifeste à travers
l'encadrement de ladite agriculture par des structures publiques, centrales, ou
décentralisées, déconcentrées et même
techniques parmi lesquelles des coopératives créées par
l'Etat. Les subventions à la production à l'exploitation et
l'octroi de crédits le financement de la recherche, l'entretien des
points de collecte, la production par des sociétés d'Etat, la
réglementation de la commercialisation, la création gestion des
marchés et espaces de commercialisation, le contrôle de la
qualité du transport ; la fixation, la stabilisation, et le
contrôle des prix des produits agricoles d'exploitation par décret
ministériel sur proposition de l'Office National de Commercialisation
des Produits de Base (O.N.C.P.B), expriment à souhait la présence
multi formelle et multifonctionnelle de l'Etat.
Cette présence va cependant s'accompagner de nombreux
dysfonctionnements notamment aux conflits de compétence entre
différentes institutions publiques. L'échec de
l'interventionnisme étatique dans le domaine qui justifiera l'adoption
des politiques de déréglementation, synonyme de
« modification des termes de l'intervention de l'Etat
»114.
113 Pour d'amples développements, lire KAMGNIA DIA (B)
« Crise économique et déréglementation dans le
secteur de l'agriculture » in TOUNA MAMA (Ss. Dir) Op. Cit PP. 23-89.
114 Idem.
54
Cette politique de déréglementation passe par
une réactivation de l'entreprenariat privé, la rénovation
des mécanismes de stabilisation ainsi que le rétablissement de
l'équilibre financier et institutionnel que commanderont la liquidation
et même la transformation de plusieurs structures étatiques
d'encadrement de l'agriculture115. A cet effet, la rénovation
du mécanisme de stabilisation se fera par la mise en place d'un
mécanisme plus dynamique, flexible et adaptatif de l'évolution
mondiale des prix et sous tendu par des fonds de stabilisation dans les
filières porteuses et stratégiques.
2- La libéralisation du secteur de l'industrie et
du commerce
Conséquence pratique de l'affirmation du principe de la
liberté de commerce et d'industrie, la libéralisation dans ce
secteur poursuit également l'objectif d'ouverture aux lois du
marché. Avant cette libéralisation, l'environnement
institutionnel de l'Etat en la matière était constitué du
FOGAPE, du CAPME, et de la SNI.
Cette dernière est créée dans le but de
promouvoir l'investissement et l'entreprenariat public ; du fait de
l'inexistence du secteur privé. Elle doit donc financer le
développement industriel. Le portefeuille de l'Etat s'en trouvera
lourdement enrichi (cent quatre-vingts entreprises publiques à la fin
des années 1990). L'aide à la création était quant
à elle l'oeuvre du FOGAPE et du
CAPME.
L'environnement normatif était fondé des codes
des investissements de 1960, de 1984 et marqué par la reconnaissance de
la place centrale de l'Etat dans l'économie. Celui de 1990 apportera un
souffle nouveau qui sera entériné par la charte des
investissements de 2002, elle-même, conforme à la charte des
investissements de la CEMAC116. La politique
économique, ayant désormais comme cheval de bataille la relance
de la croissance, passe forcément par la promotion de l'industrie
locale. C'est ce qui explique la création d'un département
ministériel spécialement chargé des petites et moyennes
entreprises l'édiction des mesures d'assainissement de l'environnement
des affaires en vue de l'attraction des Investissements Directs Etrangers
(IDE). L'adhésion à l'OHADA s'inscrit dans cet
ordre
115 Liquidation de l'O.N.C.P.B, avènement de L'Office
National du Cacao et du Café, (l'O.N.C.C) ; du Comité
Interprofessionnel du Cacao et du Café (C.I.C.C) etc...
116 Règlement N° 17/99/CEMAC-020-CM-03 relatif
à la charte des investissements. CEMAC, recueil de textes de droit
communautaire de la CEMAC, 2nde éd. GIRAF, AIF 2002
P.106.
55
d'idées ainsi que l'édiction des lois de la
libéralisation sus évoquées dont l'objectif ultime est le
démantèlement des secteurs monopolistiques.
3- La libéralisation des secteurs
monopolistiques
Plusieurs monopoles d'Etat ont été
libéralisés à la faveur de certaines lois.
Le secteur de l'eau traditionnellement géré
à titre exclusif par une société d'Etat : la
Société Nationale des Eaux du Cameroun (SNEC) a fait l'objet
d'une ouverture significative, à la faveur de la loi N°98/005 du 14
Juillet 1998 régissant le secteur de l'eau au Cameroun, la privatisation
de cette structure qui en a découlé, faisant suite à la
libéralisation du secteur de l'énergie électrique. En
effet, conformément à la lettre de la loi N° 98/022
régissant le secteur de l'électricité au Cameroun, la
Société Nationale de l'Electricité (SONEL) a
été transformée en AES SONEL, une société
privée qui cogère ce secteur avec la société
chargée de l'électrification rurale. C'est donc cette loi qui
ouvre ce secteur à la concurrence. Elle est censée
prévenir et juguler les risques de concurrence déloyale à
travers la création d'une agence de régulation du secteur de
l'électricité (ARSEL)117. Une agence similaire a
été créée dans le cas des
télécommunications.
Le secteur des télécommunications a fait lui
aussi l'objet d'une réforme118 allant dans le sens de la
libéralisation119. Cette activité s'est ainsi ouverte
à la participation du secteur privé. Elle apparaît
aujourd'hui comme celle dans laquelle la libéralisation est le plus
visible. En effet, une forte disparité des tarifs
téléphoniques pratiqués par les différents
opérateurs est notable.120La concurrence dans ce secteur est
garantie par l'agence de régulation des télécommunications
(ART).
Le transport n'a pas échappé au vent de la
libéralisation. Le transport maritime a été ouvert
à la concurrence par décret, tandis que le transport
aérien l'a été par la loi. Le transport
117 Article 22 de la loi régissant le secteur de
l'électricité
118 PEKASSA NDAM (G), « La réforme du secteur des
postes et télécommunications au Cameroun », RASJ.
Vol 1, 2000, UY, PP. 97-104.
119 MVOGO BELIBI (M.V), la libéralisation du secteur des
télécommunications au Cameroun Op. Cit. P.101.
120 Sur le terrain en effet, les tarifs
téléphoniques de la Cameroun Télécommunications
(CAMTEL) de MTN et Orange Cameroun sont différents en termes de
coûts téléphoniques. La communication informelle
découlant de la pratique des « Call box » permet d'observer
à côté d'un opérateur dudit secteur affichant «
100F /Mn», un autre affichant « 75F/Mn » et même un
troisième affichant « 125F/Mn »
56
terrestre, certes libéralisé, fonctionne en
corporation alors que le transport ferroviaire a fait l'objet d'une
privatisation de la REGIFERCAM (Régie des chemins de Fer du Cameroun)
devenue CAMRAIL. Dans cet esprit, les aéroports du Cameroun (ADC) sont
aujourd'hui parapublics ; les ports autonomes libéralisés, et le
transport urbain libre. Il en est de même du commerce des produits
pétroliers121 .
Cet ensemble de mesures de libéralisation de secteur de
l'économie générale poursuit l'objectif de
désétatisation du cadre économique, et de la
restructuration des entreprises du secteur public et parapublic.
B- LA RESTRUCTURATION DES ENTREPRISES DU SECTEUR PUBLIC
ET PARAPUBLIC
La restructuration des entreprises du secteur public et
parapublic en 1999122 était un prélude au souci de
soumettre la boulimie institutionnelle étatique à un
régime sans précédent. A cet effet, plusieurs
modalités ont été engagées sur la base d'un cadre
juridique approprié. Le résultat est nuancé.
1- Le cadre juridique de la restructuration
La restructuration du secteur public repose sur un certain
nombre d'instruments juridiques tant normatifs qu'institutionnels.
Sur le plan institutionnel, cette réforme est
principalement confiée à un organe, à savoir la mission de
réhabilitation des entreprises du secteur public et parapublic
instituée par décret N°86/656 du 30 Juin 1986. Son but est
d'analyser les motivations ou les raisons du désengagement de l'Etat des
secteurs productifs en vue d'accroître la participation du secteur
privé123. Elle est composée d'un organe de
décision et d'un organe technique. Le Comité
interministériel, organe de décision, et composé d'une
dizaine de membres. Il est appuyé par une sous Commission chargée
de la privatisation créée par décret N°90/428 du 27
Février 1990 composée d'experts, et parfois, de consultants
nationaux et internationaux. La
121
122 Ordonnance N°99/016 du 22 décembre 1999
portant régime général des établissements du
secteur public et parapublic au Cameroun.
123 TAMBA (I), et TOUNA MAMA « Crise
économique et déréglementation dans le secteur des
entreprises publiques et parapubliques » In TOUNA MAMA (Ss. Dir.) Op.
Cit. p.147.
57
Commission technique de privatisation et de liquidation
(C.T.P.L) est l'organe technique. Il est placé sous l'autorité du
Ministre de l'Economie de la Planification et de l'Aménagement du
Territoire, il est composé d'experts nommés en raison de leurs
compétences et de leurs expériences pratiques. Cette Commission
bénéficie de l'assistance technique de la Banque mondiale et peut
faire appel à tout autre consultant. Il est à noter que ce cadre
institutionnel administratif et public ne favorise pas une participation du
secteur privé au processus de privatisation.
Sur le plan normatif, la réforme des entreprises
publiques repose sur un nombre impressionnant des textes
juridiques124 chaque jour enrichis, notamment pour ce qui concerne
la privatisation. En effet, la liquidation/ dissolution autant que la
réhabilitation n'ont pas connu la même production normative
à l'instar de la privatisation.
2- Le processus de la restructuration
La restructuration du secteur public et parapublic a
épousé essentiellement trois modalités : la
réhabilitation, la liquidation et la privatisation.
La réhabilitation contient des mesures de nature
à accroître le rôle du marché dans le processus
d'allocation des ressources et à clarifier le rapport entre l'Etat et
les entrepreneurs125. La liquidation quant à elle aboutit
à une ouverture aux lois du marché par l'action des acteurs
privés qui vont s'accaparer du secteur concerné. Elle est
différente de la privatisation en ceci que cette dernière offre
la possibilité à l'Etat de rester présent sans plus
être exclusif. Les prix ou les tarifs dans les secteurs concernés
ne sont forcément plus administrés.
La privatisation constitue au Cameroun la modalité par
excellence de réduction de l'omniprésence étatique du
secteur productif. Elle a épousé au Cameroun nombre de
procédés. Elle est précédée d'une phase de
préparation et d'évaluation objective et complète des
entreprises concernées. En fait de technique, il s'agit des cessions
totales ou partielles d'actions ou d'actifs au secteur privé ; d'une
location-gérance des actifs ou du fonds de commerce des entreprises
publiques par des personnes physiques ou morales de droit privé ou
124 Idem.
125 Ibid. P 160.
58
alors de la signature de contrats de gestion des entreprises
à participation publique par des personnes de droit privé. Bref,
l'Etat a procédé à la vente des entreprises non
stratégiques mais à la cession des entreprises dites
stratégiques.
Le processus ainsi enclenché et réalisé
ne va pas sans difficultés. Il se heurte à de nombreuses
contraintes techniques, institutionnelles, financières, sociales et
même idéologiques126. Elle s'est avérée
particulièrement coûteuse et conflictuelle127, allant
jusqu'à mettre en évidence un flou caractéristique du
législateur camerounais qui aurait tant à gagner s'il avait
entretenu la clarté et surtout la flexibilité pour ce qui
concerne des opérations d'une telle nature. Malgré quelques
points positifs, le bilan reste nuancé.
3- Le bilan nuancé de la
restructuration
Quatre buts essentiels étaient visés, à
savoir améliorer les finances publiques, promouvoir l'entreprenariat
privé par l'ouverture de la gestion des entreprises publiques ou secteur
privé et à l'application des techniques des droits des affaires.
L'accroissement du rôle du marché par une restauration de la
concurrence entre acteurs du secteur privé et entre ces derniers et le
secteur public constituait le troisième objectif. Le dernier, connexe
à tous les autres, était la stimulation et la relance de la
croissance. Un regard rétrospectif du processus amène à
constater que ces objectifs n'ont que relativement été atteints.
La liquidation, la privatisation et même la réhabilitation, non
encore achevée, n'ont que relativement ouvert la concurrence dans les
secteurs jadis publics aujourd'hui libéralisés. En effet, le
passage a le plus souvent été d'un monopole, de droit public
à un monopole sinon à un oligopole de droit privé. L'Etat
n'a pas perdu la maîtrise des reines de l'économie et demeure
inexorablement la locomotive du développement au détriment d'un
secteur privé encore fragile. Le partenariat secteur public/secteur
privé demeure par ailleurs embryonnaire. En outre, la pauvreté,
la corruption et toutes autres formes de vicissitudes sociales y ont fait leur
nid. Ce qui dénote de l'échec même de ladite
restructuration dont l'objectif social était l'amélioration de la
quantité et de la qualité de service.
126 NGUIHE KANTE (P), « Les contraintes de la
privatisation des entreprises publiques et parapubliques au Cameroun),
Juridis périodique N° 48 Octobre 2001 PP. 79-90.
127 MANGA ZAMBO (E), Op.Cit. p.155.
59
Les mesures engagées en vue de décongestionner
les circuits tant de production que de commercialisation des biens et services,
matérialisent le désengagement de l'Etat des secteurs
économiques. Ce désengagement permet la recherche et la
réalisation du juste prix dans les opérations et les transactions
commerciales. Ce qui emporte sur le plan de la réglementation des prix
de nombreuses implications.
PARAGRAPHE II : LES IMPLICATIONS DU DESENGAGEMENT
Parmi les manifestations de la présence étatique
dans le secteur productif, la réglementation et le contrôle des
prix occupent une place de choix. Le désengagement de l'Etat a
entraîné une réduction substantielle du champ de la
réglementation (A) des prix dont le corollaire principal a
été une restriction de pouvoir de contrôle des prix (B).
A- LA REDUCTION DU CHAMP DE LA REGLEMENTATION DES
PRIX
Le régime général des prix jadis en
vigueur consacrait la réglementation comme étant la règle
en matière de prix, elle est, du fait de la
déréglementation devenue aujourd'hui l'exception.
1- Le régime originel des prix ou la
réglementation comme règle
Bien avant l'indépendance, existait déjà
au Cameroun un régime des prix découlant d'un décret
français de 1937 ayant pour objet la prévention et la
répression de toutes augmentations illicites des prix dans les colonies,
pays de protectorat ou sous mandat128. Un
128 LEUNYOU (M), « Le problèmes des prix sur les
marchés et la responsabilité du commerçant »,
CCIMA réunion de la section commerce Yaoundé Juin 2006
P. 5.
60
décret du 14 Mars 1944 portant réglementation
des prix en Afrique équatoriale et au Cameroun français renforce
la répression de la réglementation des prix129 . Au
lendemain des indépendances, la loi N° 61/07 du 18 Avril 1961 et
plus tard le décret N° 68-DF-486 du 18 Décembre 1968 portant
régime général des prix au Cameroun ainsi que les autres
textes modificatifs réceptionnent dans le cadre interne l'esprit mais
non intégralement la lettre des textes de la période
post-indépendance. Mais, le véritable socle normatif en
matière de prix au Cameroun ne sera pris qu'à l'occasion de
l'avènement de l'Etat unitaire en1972.
L'ordonnance N°72/18 du 17 Octobre 1972, portant
régime général des prix et ses textes
modificatifs130 constituent la véritable bible de la
législation sur les prix au Cameroun bien qu'ayant partiellement
été abrogée par la loi N°90/031 du 10 Août 1990
régissant l'activité commerciale au Cameroun. L'analyse de ce
texte de base permet de constater qu'avant les textes libéraux
« la totalité des prix des biens et services
était réglementé » au
Cameroun131 . La réglementation se traduit
concrètement à cette époque par une fixation
administrative de tous les prix des produits et services ainsi que celle des
marges bénéficiaires. Elle se justifie alors par de nombreuses
raisons essentielles132 , mais emporte de nombreuses
conséquences133. Sa mise en oeuvre entraîne des
lourdeurs administratives et trop souvent des conflits avec l'Etat. Elle a
rigidifié le système rendant les entreprises incapables de
s'adapter aux besoins d'ajustement des marchés et inaptes au
développement de la compétitivité134.
Force est cependant de reconnaître que la
réglementation des prix n'était ni absolue, ni inviolable bien
que générale et intégrale. Il s'est en effet
développé un marché informel qui lui échappait. Le
désengagement de l'Etat du secteur productif a ainsi
entraîné une mutation substantielle de la réglementation
des prix en la faisant passer du général au particulier mais
surtout de la règle à l'exception.
129 Idem.
130 Loi N°79/11 du 30 Juin 1979 modifiant certaines
dispositions de l'ordonnance N°72/18 et loi N° 89/011 du 28 Juillet
1989 modifiant e complétant certaines dispositions de la loi sus
citée
131 ESTEGUET (P.E), « élaboration et mise en
application d'une législation de la concurrence adaptée aux
conditions des pays en voie de développement : expérience de la
République du Cameroun », CNUCED Cession du groupe
d'experts intergouvernementaux sur le droit de la concurrence, Genève
Octobre-Novembre 2006.
132 Maîtrise de l'inflation, stabilisation des prix,
organisation des marchés agricoles tels que le Cacao et le Café,
amorce des chocs de la dévaluation monétaire, amorce des
problèmes liés à l'instabilité des prix des
matières premières sur le marché mondial tel que le
pétrole, surveillance promotion et protection de la concurrence,
contrôle des multinationales, répartition objective des marges
bénéficiaires entre opérateurs économiques
promotion de l'investissement et protection du pouvoir d'achat des
consommateurs...
133 Elle crée en effet une mentalité d'assister
qui s'avère décourageante de l'effort et de l'imagination des
opérateurs économiques elle est coûteuse et
budgétivore. En bref, la réglementation des prix freine l'essor
industriel par le recule des investissements et même sur le plan
économique, l'affaiblissement de la monnaie sans oublier son effet
retardataire.
134 ESTEGUET (P.E) « Elaboration et mise en application...
Op. Cit. P. 3.
61
2- Le régime actuel des prix ou la
réglementation devenue exception
Avec la promulgation du principe de la liberté des prix
comme règle régissant l'activité commerciale au Cameroun,
leur réglementation devient ipso facto une exception.
Considérablement réduite, elle ne concerne plus que les produits
soumis à la procédure d'homologation préalable et à
la fixation temporaire des marges bénéficiaires. Seulement,
à bien y regarder, l'Etat n'a rien perdu comme pouvoir
réglementaire en matière des prix. Son pouvoir a tout au plus
été conditionné. L'article 2 de l'ordonnance N° 72,
conforté par l'article 32 du décret d'application de la loi
régissant l'activité commerciale au Cameroun, confirme le pouvoir
du Ministre chargé des prix à réglementer la
détermination et la fixation des prix au différents stades de la
commercialisation, de la vente et de la circulation des marchandises et des
services ainsi que des pratiques qui peuvent avoir pour effet de provoquer une
hausse spéculative des prix à la consommation ou d'empêcher
leurs hausses justifiées et les pratiques portant sur les autres
catégories de vente. L'article 62 alinéas 1 du même
décret d'application va dans le même sens ainsi que les
réserves émises par l'alinéa 2 de l'article 12 de la loi
N° 90/031 consacrant les principes de la liberté de concurrence et
des prix. Cet article précise que l'Etat détient ce pouvoir
«en tant que de besoin» l'exercice du
pouvoir est donc désormais conditionné par la survenue de facteur
conjoncturel et circonstanciel dont l'Etat reste seul juge.
La limitation d'un tel pouvoir découle toutefois de
l'alinéa 2 dudit article qui précise que de telles mesures
doivent être justifiées, limitées dans le temps et donner
lieu à une large publicité ainsi qu'à une large
information des opérateurs économiques et du public. Sous cet
angle, la réglementation apparaît comme une menace permanente, un
moyen de pression et même d'oppression contre les opérateurs
économiques entre les mains du Ministre en charge des prix, une
véritable épée de Damoclès sur la liberté
ainsi fragilisée des prix. A tout moment, et sur n'importe quel
prétexte discrétionnaire, l'Etat peut procéder à la
fixation des prix limites, à la production de même qu'à
tout stade du circuit économique par voie réglementaire.
La réglementation des prix semble donc formellement
réduite alors qu'elle reste matériellement illimitée. Ceci
d'autant plus qu'au-delà de cet aspect et en ne s'en tenant
qu'à
62
la seule analyse des prix des produits, biens et services
limitativement énumérés comme échappant à
l'emprise de la liberté des prix parce que soumis à la
procédure d'homologation préalable, il est loisible d'affirmer
que la variété desdits produits, mais surtout leur
variabilité, limite considérablement l'esprit de la
déréglementation. En effet, les différents textes fixant
ou actualisant la liste des prix des produits soumis à la
procédure d'homologation des prix entretiennent l'arbitraire du pouvoir
discrétionnaire de l'Etat dans la fixation desdites listes135
en lui laissant la latitude d'y inclure tout service ou produit. Quelques
précisions sur la nature des produits et biens concernés ont
cependant été apportés par l'arrêté
N°0035. D'après l'article 1er dudit arrêté,
il s'agit des biens et services offerts par les monopoles publics ou
privés réels de fait136. La seconde catégorie
est constituée des biens et services subventionnés par
l'Etat137 et enfin des biens et services, sujets à des
tensions inflationnistes persistantes ; services et biens dits
« de grande consommation » « ou de consommation de
masse »138. Il convient en su de noter que cette
énumération n'est ni exhaustive ni définitive puisqu'en
réalité, il existe des régimes particuliers non
prévus dans les listes à l'instar du régime
spécifique des prix agricoles comme le Cacao et le Café il s'agit
donc de listes flottantes donc variables d'une année à une
autre139. Aussi, est-il observable une augmentation constante des
prix des produits concernés
Contrairement à l'esprit de la loi140, la
réglementation des prix n'a donc pas disparue. Seules les nouvelles
frontières de l'Etat ont été tracées,
réduisant la réglementation à quelques produits et
services limitativement énumérés. Jadis la règle,
elle est devenue l'exception. Toutefois, une analyse profonde des textes de
même que l'observation de la pratique laisse bien voir que sur le plan
matériel la réglementation non seulement demeure, mais elle est
susceptible d'agrandir son champ par une permanente possibilité de
suspendre l'exercice de la liberté des prix. Aussi, le non respect de
l'ordre public ainsi que toute
135 Arrêté N° 7 /MINDIC/DPPM/SPD du 12
Janvier 1991, arrêté N° 007 /MINDIC/DPPM du 29 Juin 1990
arrêté
N°0402/MINEFI/CAD du 21 Août
2001,Arrêté N°002/A/MINEDIC/DPPM du 23 Janvier 2003,
Arrêté N°036/A/MINDIC/DPMPC/SDEL/SCR du24 Juin 2004 et
actuellement arrêté N°0035/MINCOMMERCE/CAB du 08 Novembre
2005, portant tous fixation de la liste des produits et services donc les prix
et tarifs sont soumis à la procédure d'homologation
préalable
136 L'eau, l'électricité et les services y
afférents, le ciment portland, les services d'auxiliaire des transports
maritimes les services des ports autonomes du Cameroun.
137 Les médicaments et consommables hospitaliers, le Gaz
domestique, les logements sociaux
138 Fer à béton, sucre, logements scolaires et
Universitaires, livres et manuels scolaires, huile de palme brute, poisson
congelé importé, farine de froment importée, service
offert par les hôtels et établissements touristiques.
139 Cette variabilité découle du
caractère révisable des listes en vue de les adapter au contexte
socio-économique prévalant. Il trahi la précarité
de toute limitation des prix puisqu'il existera toujours les produits et
services offerts par des monopoles, ou soumis à des tentions
inflationnistes.
140 De 19 produits en 1990, La liste est passée
à 16 en 1991 puis à 8 en 1994 et même à 5 en 1998
remontée à 11 en 2001, elle se situe actuellement à 18
produits de service.
63
violation de la réglementation ou de la police des prix
justifie l'application encore aujourd'hui des sanctions découlant d'un
contrôle des prix tout aussi formellement réduit.
B- LA RATIONALISATION DU POUVOIR DE CONTROLE DES PRIX
Marque caractéristique d'un régime
général répressif, le contrôle des prix n'a pas
disparu sous la déréglementation, mais il a été
substantiellement et formellement transformé et surtout restreint. Deux
actions s'en sont suivies, à savoir le rétrécissement de
l'objet ou de la matière du contrôle des prix, et la
rationalisation de l'étendue du pouvoir des organes de contrôle
des prix141.
141 Cette rationalisation découle
particulièrement de la circulaire N°003/MINCOMMERCE/DPC du 13 Juin
2007, portant rationalisation des contrôles effectués par les
structures chargées de la protection du consommateur.
1- 64
Le rétrécissement de la matière du
contrôle
La conséquence directe et logique de la
réduction du champ de réglementation est la réduction du
champ de contrôle. Le contrôle est essentiellement une
modalité de vérification de la mise en oeuvre normale et
régulière de la réglementation en vigueur. Couvrant jadis
tous les biens et services, le contrôle des prix dont la pertinence
demeure et se traduit par le souci de faire respecter la réglementation
afin de protéger le consommateur et de laisser s'installer et nourrir
une « véritable culture de la concurrence142
», ne concerne désormais plus que les prix
pratiqués sur les produits et prestations de service encore soumis
à la procédure d'homologation préalable ou faisant encore
temporairement l'objet d'une fixation administrative des marges
bénéficiaires. Toute violation de ces dernières
réglementations exceptionnelles sont constitutives tantôt de
majoration illicite des prix et réprimée par les articles 6 et 8
de l'ordonnance N°72/016 portant régime général des
prix ; tantôt de pratique de prix illicite telle que prévu par
l'article 7 de ladite ordonnance.
En dehors des cas sus évoqués, le
contrôle s'exerce sur les prix certes fixés par les lois du
marché mais faisant l'objet de pratiques anticoncurrentielles de nature
à altérer la capacité d'appréciation ou de choix du
consommateur143. Il s'agit ici de toute infraction à la
réglementation sur la publicité des prix et les conditions de
vente, des pratiques discriminatoires des prix des ventes à perte, du
refus de vente, des ventes conditionnées avec primes liées, des
actions concertées, des ententes et conventions non autorisées
ainsi que les abus de positions dominantes et autres concertations manifestes
sur la politique des prix. A l'analyse de cette énumération non
exhaustive, force est de constater que matériellement le contrôle
des prix semble s'être également étendu. Seul son exercice
et ses pouvoirs ont été rationalisés.
2- La délimitation des pouvoirs de
contrôle
Il s'agit des pouvoirs des organes chargés du
contrôle et des prérogatives légales.
142 ESTEGUET (P.E), «Elaboration et mise en application
d'une législation de la concurrence adaptée aux conditions des
pays envoie de développement : expérience de la République
du Cameroun » CENUCED Genève Juillet 2003 P. 7.
143 Article 43 de' l'ordonnance N°72 et article 31
(nouveau de la loi N°89/011 du 28 Juillet 1989 modifiant certaines
dispositions de la même ordonnance.
65
Sur le plan organique, la direction des prix et de la
métrologie a cédé la place à la direction de la
protection du consommateur. Cette direction est l'organe central chargé
du contrôle des prix. Elle est appuyée par des organes
déconcentrés que sont les brigades de contrôle et de
répression des fraudes commerciales à l'échelle
provinciale et départementale. Cette transmutation nomenclaturale
révèle que désormais l'ère n'est plus au primat de
la réglementation des prix mais plutôt de la saine et loyale
concurrence. La direction de la protection du consommateur est
compétente à l'échelle nationale et assure la surveillance
ainsi que la coordination des activités des services
déconcentrés. Les brigades provinciales de contrôle et de
la répression des fraudes sont chargées du contrôle des
prix, des pratiques anticoncurrentielles et de l'assainissement des
marchés au niveau des grossistes et des grandes surfaces de la province.
A titre exceptionnel, elles exercent un contrôle sur le détaillant
qui relève normalement de la compétence de la brigade
départementale. Chacune de ces structures est placée sous
l'autorité d'un Chef de brigade.
Le contexte de libéralisation et la recherche d'une
intervention efficace et efficiente des unités d'exécution des
contrôles ont justifié une forte rationalisation des pouvoirs,
cette fois-ci entendue comme prérogative reconnue aux organes
chargés du contrôle des prix. Ceci a été notamment
le cas pour ce qui est de l'initiative des contrôles, de leur
déroulement ainsi que de leur aboutissement.
L'initiative des contrôles appartient désormais
au seul directeur de la protection du consommateur pour ce qui est des services
centraux et exclusivement aux chefs des brigades provinciales et
départementales au niveau des services déconcentrés.
Lesquelles initiatives sont conformes à des programmes d'actions
périodiques portées à la connaissance du Directeur de la
protection du consommateur. Le respect du pouvoir hiérarchique commande
désormais une montée de la base au sommet des rapports et des
bilans. L `exécution des contrôles a été
également réglementée144 ainsi que la
distribution et la tenue des documents de travail. Les agents de contrôle
ont droit à la communication, et à l'accès à tout
local en
144 Les descentes sur le terrain se font à la suite
d'une note de service précisant l'objet du contrôle et indiquant
les noms, prénoms des personnes appelées à
l'exécuter ; les noms du ou des Chefs d'équipe ainsi que la
durée de celle-ci. Les agents retenus doivent avoir prêtés
serment conformément aux dispositions de l'article 14 de l'ordonnance
N°72/018 portant régime général des prix. Le Chef
d'équipe doit présenter une note de service précisant
l'objet de la mission aux représentants des lieux visités. La
carte professionnelle doit être présentée, la fiche de mise
en demeure aussi, le respect des heures légales observé de
même que la consignation sur procès verbal de toutes les
infractions constatées conformément aux articles 12 et
16del'ordonnance N° 72/018 suscité. Il doit en outre être
expliqué aux contrevenants les différentes infractions
constatées dans son établissement, le mode de calcul des amendes,
ainsi que les références législatives et
réglementaires qui soutendent cette démarche. Les fiches de mise
en demeure peuvent en cas de non contestation remplacé lesdits
procès verbaux sous condition de contenir les mêmes informations
et d'être signées par les contrevenants. Sous réserve que
de fortes présomptions de litiges n'existent point entre le contrevenant
et l'agent verbalisateur.
66
fonction des besoins. La présence d'un responsable de
l'établissement est érigée en règle substantielle.
Les agents peuvent se faire assister par les autorités civiles et
militaires aux fins de constatation des infractions. Le contrôle ainsi
peut aboutir soit au prononcé d'amendes145, soit à la
prise des mesures conservatoires146. La fermeture
d'établissement et la saisie des marchandises ne peuvent être
valable que dans les cas de récidive, de refus de payement de la
pénalité ou exceptionnellement pour contraindre l'assujetti
à répondre à la convocation. Encore faudrait-il même
dans ces derniers cas, non seulement qu'elle soit préalablement
autorisée par le supérieur hiérarchique direct au niveau
de la province ou du département et par le Directeur de la protection du
consommateur en ce qui concerne les services centraux ; mais aussi et surtout
qu'elle le soit par écrit.
Le désengagement de l'Etat de secteurs entiers des
économies ne pouvait qu'être favorable à une ouverture
à l'influence des lois du marché dans la détermination des
prix.
SECTION II : L'OUVERTURE AUX LOIS DU MARCHE
Le désengagement de l'Etat du secteur productif par un
mouvement de démonopolisation et de privatisation s'est
accompagné d'un desserrement de l'étau réglementaire sur
les prix, les ouvrants à l'action, au contrôle, mieux à la
réglementation des prix147. Tant il est vrai que sur tous ces
aspects, la présence exclusive de l'Etat était fortement visible
pour ce qui est de la détermination et de l'encadrement des prix. Il ne
s'agit pas d'un affranchissement total des prix au profit du marché mais
d'une ouverture aux lois du marché dans leur détermination.
Le concept « loi du marché »
procède de la reconnaissance « d'un droit
naturel économique fondé sur les valeurs et les contraintes du
marché qui accompagne et prétend légitimer le mouvement en
cours de libéralisation et de mondialisation des échanges
»148.
145 Les amendes calculées font l'objet de notification
sur la mise en demeure ayant suivi le contrôle ou à travers un
ordre de recettes pour ce qui est des commerçants grossistes ou des
prestataires de service. L'incapacité de payer lesdites amendes ou la
divergence de point de vue entre les agents de contrôle et le
contrevenant font l'objet des procès verbaux dressés par l'agent
verbalisateur. Cet état de chose peut fonder l'assujetti à
adresser une demande de transaction aux supérieurs de l'agent
notificateur de l'amende.
146 Il peut s'agir d'une part de la saisie des marchandises
qui seront vendues aux prix licites en présence du contrevenant à
qui le fruit de la vente sera restitué après retrait du montant
de l'amende payée, d'autre part à la fermeture de
l'établissement.
147 Le vocabulaire juridique de Gérard CORNU
définit le marché comme étant un lieu d'échange
commerciaux, une aire géographique au sein de laquelle se
développent les relations commerciales, la possibilité
périodique de vendre et d'acheter en vue de la vente. Ou encore
l'ensemble des opérations commerciales relatives à une
catégorie de biens sur une place ou dans une zone géographique
donnée
148 FRIDMAN (B ) et HAARSCHER (G), « Le partage des biens
» in philosophie du droit, Dalloz , 2nd ed ,2002 ,
p35
67
C'est d'ailleurs pourquoi un souci de réception de ce
concept par le droit, qui se veut absorbant de tout phénomène
social, s'avère nécessaire comme processus de naturalisation des
droits « au-delà de l'Etat » et/ou
« en dehors de l'Etat »149. Le
sempiternel débat : Droit naturel/Droit positif a pour
intérêt pratique la nécessaire conciliation des deux. Il en
est de même du conflit entre l'Etat et le marché qui a toujours
opposé les libéraux aux interventionnistes alors même que
l'interventionnisme n'a jamais été aussi fort que dans des
périodes ou des zones dites libérales et vice
versa150. La société, en perpétuelle mutation
alterne et même conjure les deux mouvances en faveur de
l'émergence d'un droit économique de plus en plus
libéral151. La prise en compte des lois du marché dans
la détermination des prix se traduit par la reconnaissance d'un
rôle primordial aux acteurs du marché dans la détermination
des prix (paragraphe I) en référence aux lois dudit
marché.
PARAGRAPHE I : LA PRESEANCE DES ACTEURS DU MARCHE
L'article 5 du décret fixant modalités
d'homologation des prix dispose « les prix des biens et
services non soumis à la procédure d'homologation
préalable des prix sont établis et
appliqués même restrictivement par les personnes physiques ou
morales assurant la production ou l'importation de ces biens et services
». Ainsi, sous réserve du respect de
l'ordre public, les prix de biens et services sont librement
déterminés sur le marché. L'Etat ne les fixe ni ne les
impose plus, excepté ceux des produits soumis à homologation. Les
prix pratiqués sur le marché condition fondamentale du contrat de
vente commerciale sont l'expression de la volonté des acteurs libres du
marché qu'il convient d'identifier (A) pour en mieux comprendre l'action
(B).
A- IDENTIFICATION DES ACTEURS DU MARCHE
Le théâtre du marché permet de distinguer
deux catégories d'acteurs : le vendeur ou prestataire de service et
l'acquéreur ou bénéficiaire de service correspondant
respectivement aux rôles d'offreur et de demandeur.
149 MEBENGA (M), « Le droit et ses pratiques... » Op
cit pp 78 et 79
150 TOUNA MAMA (Ss.dir) Op cit p 10
151 REMICHE (B), « Droit économique, marché
et intérêt général » philosophie du droit
et droit économique quel dialogue ? Mélanges FARJAT, Frisson
- roche, p258.
1- 68
Le vendeur ou prestataire de service
Le vendeur concerne le commerce des marchandises alors que le
prestataire renvoie au commerce des services. Le point de jonction entre ces
deux catégories est essentiellement le fait d'être pourvoyeur de
service ou de biens c'est-à-dire celui qui propose l'objet du contrat de
vente. Le vendeur et même le prestataire du service peut épouser
le concept de commerçant tel que défini et
réglementé par l'Acte uniforme sur le droit commercial OHADA. Il
peut ainsi s'agir dans un sens large du producteur, de l'intermédiaire
ou du distributeur. Le vendeur peut être grossiste ou détaillant,
personne morale ou physique, du secteur formel ou informel, public ou
privé. Sous cet angle, l'Etat n'en est pas moins lui aussi acteur du
marché ayant les mêmes droits et obligations que tous les autres
opérateurs. L'Etat ne doit pas mettre en oeuvre ses prérogatives
exorbitantes de puissance publique. Il n'est plus en fait le despote
éclairé, omniscient et omnipotent d'hier. Il est devenu un acteur
ordinaire du marché, soumis aux lois du marché et
bénéficiant aussi des vertus de la liberté de commerce et
de l'industrie en tant que liberté d'entreprendre, d'exploiter et de
concurrence. L'Etat peut également être acquéreur.
2- L'acheteur ou le bénéficiaire du
service
Le vendeur et le prestataire ont pour interlocuteur respectif
l'acheteur et le bénéficiaire du service. L'acheteur étant
défini par Gérard CORNU comme « celui qui dans
le cadre d'un contrat de vente acquiert à titre onéreux »
c'est-à-dire contre le paiement d'un prix, un bien, une
marchandise ou un service. A partir de là, ce qui distingue le
bénéficiaire du service de l'acheteur, c'est l'objet du commerce
concerné. Le premier concerne le commerce des marchandises alors que le
second concerne celui des services. Les deux peuvent être confondus dans
la notion de consommateur. Cette dernière notion intègre
également l'Etat qui se trouve être d'ailleurs le plus grand
acquéreur des biens et produits, en tant qu'employeur et
bénéficiaire de services. Dans l'un et l'autre cas, l'Etat
participe à la détermination du prix en tant que partie au
contrat de vente commerciale. Il faudrait d'ailleurs rappeler que les contrats
que l'Etat signe, dans ce cadre, constituent des contrats de droit
privé.
69
Le prix apparaît ainsi comme le consensus des acteurs du
marché, quelle que soit la nature dans la transaction commerciale.
Lesdits acteurs bénéficient tous d'un réel pouvoir en
matière de détermination des prix.
B- LA FONCTION DES ACTEURS DU MARCHE
Les acteurs du marché, parties au contrat de vente
doivent tous participer à la détermination du prix. Il s'agit
d'un consensus ou d'une adhésion relevant du droit dont disposent
à la fois le vendeur et l'acquéreur de proposer le prix, de le
refuser ou de le discuter.
1- Le droit de proposer le prix en fonction
d'intérêts propres
La discutabilité des prix est un attribut du principe
de la négociation commerciale traditionnellement admis comme principe
général de droit commercial. Pour que la transaction soit
valable, les parties doivent avoir été d'accord sur les prix. Le
principe de la liberté des prix laisse la latitude aux vendeurs de
proposer le prix et de le soumettre à la discussion de
l'acquéreur, excepté dans certains secteurs tels que les grandes
surfaces commerciales, les supermarchés, les magasins, les boulangeries,
les agences de voyage et autres quincailleries où la publicité
des prix est de mise, à titre d'information, sans autoriser aucun
débat sur les prix. Dans cette hypothèse, l'acquéreur ne
peut valablement pas exercer son droit de proposer le prix en fonction de son
pouvoir d'achat ou de ses intérêts. Dans le cas inverse, il
s'engage une discussion sur le prix au cours de laquelle règne un
« jeu de dupes » sans
précédent ; l'objectif ultime pour chacun étant de tirer
le maximum de profit dans l'affaire.
Dans ce rôle, il est important de relever que l'Etat en
tant qu'acteur ordinaire du marché, entre lui aussi en
négociation des prix avec tout fournisseur sur la base de son
référentiel, à savoir la mercuriale des prix.
Dans ce document, chaque année renouvelée en fonction de la
conjoncture économique, l'Etat se fixe une fourchette des prix maxima
au-delà de laquelle le contrat ne peut être signé. Le
fournisseur adhère au prix de la fourchette et gagne le marché,
ou refuse de le faire et perd le marché, ne fusse que sous la
considération du prix. Ceci démontre à suffisance que
l'Etat n'a pas perdu son pouvoir sur les prix du fait de
70
leur libéralisation, mais qu'il ne les impose plus, ne
serait - ce que dans la conclusion de ses contrats. Il convient cependant de
signaler ici, et pour le déplorer, que les prix découlant de la
mercuriale ne soient généralement pas ceux du marché. Ils
sont dans la plupart des cas presque injustement
doublés152.
2- La liberté de refuser ou de discuter le prix en
fonction des besoins propres
L'aboutissement logique de la négociation commerciale
au contrat de vente commerciale ou de prestation de service est la conclusion
d'un prix. Aussi le prix n'est plus l'objet d'un règlement imposé
aux acquéreurs autant dans les surfaces publiques que dans les milieux
privés, mais le fruit des propres acteurs du marché en fonction
des facteurs déterminants ou des éléments constitutifs
d'un prix. Le prix s'avère donc être une expression du
caractère volontariste et consensualiste du contrat commercial. Cette
conclusion par les acteurs même du marché, dénote de
l'effectivité de la liberté des prix sur le marché de
même que du pouvoir réellement détenu par ces acteurs dans
la conclusion d'un contrat commercial tant oral qu'écrit, aussi bien
privé que public.
Il reste cependant que la conclusion dudit prix n'advient
généralement qu'après moult transactions favorisant
toujours l'une des parties au détriment de l'autre, qui se trouve
généralement être le consommateur qui est tenaillé
par la nécessité du bien ou du service.
La détermination du prix par les acteurs du
marché se décline en la faculté reconnue à ces
derniers de fixer, le prix au gré de leurs intérêts. L'Etat
bénéficie lui aussi de cette prérogative en tant qu'acteur
économique ordinaire, et donc dépouillé de sa puissance.
De fait les prix ne sont pas ou plus fixés en référence
exclusivement à la réglementation en vigueur, mais en fonction
également des lois dictées par le marché.
PARAGRAPHE II : LA REFERENCE AUX LOIS DU MARCHE
152 Ceci constitue une officialisation de la sur taxation
favorisant une hémorragie injustifiée du budget de l'Etat.
71
Le principe de la liberté des prix expressément
proclamé dans l'ordonnancement juridique camerounais, et fondant la
déréglementation des prix signifie que les prix sont librement
déterminés par les lois du marché. Lesquelles lois du
marché ne peuvent se mouvoir que dans le cadre d'une possible, saine et
loyale concurrence. Ainsi donc, la fixation des prix par les acteurs du
marché se fait en fonction des lois de l'offre et la demande (A) dans un
contexte conditionné par l'existence du libre jeu de la concurrence sur
le marché (B).
A- L'INFLUENCE DES LOIS DE L'OFFRE ET DE LA DEMANDE
La prise en compte des lois du marché apparaît
comme la manifestation même du règne de l'économie du
marché, favorisée par la montée vertigineuse de la
pensée libérale, et traduite par le processus de
déréglementation. Lequel processus est né sous le
Président REAGAN des Etats-Unis d'Amérique du Nord ;
intensifié par le Premier ministre TCHATER de Grande Bretagne et
répandu aujourd'hui à travers le monde à la faveur des
travaux de l'analyse économique du droit. La branche extrême de
l'école dite « de Chicago » non
contente de scander l'existence « d'un ordre juridique naturel
»153, va jusqu'à affirmer la
prégnance d' « un ordre du marché
»154 apparaissant comme « une
norme fondamentale qui, loin de constituer une simple grille d'analyse, va
jusqu'à prescrire à l'intention des
individus, des entreprises, des organisations internationales et même des
Etats »155. Cette école fustige la
réglementation et préconise une déréglementation
tous azimuts, l'Etat ne devant se réduire qu'à ses fonctions
régaliennes de protection de l'intérêt
général et de sécurisation des échanges. Pour HAYEK
de l'école autrichienne, le marché présente l'avantage
d'être totalement spontané, neutre et insensible à tout
déterminisme volontariste. L'administration coûte et gène
par ses règlements autant que par sa présence au moyen du secteur
public156.
Pour les auteurs libéraux, néolibéraux et
même ultralibéraux, renforçant les idées des
classiques, l'Etat doit « laisser faire », « laisser
aller » de sorte que seule la loi de l'offre et de la
demande puisse déterminer le prix. Ces lois sont des facteurs
économiques fondamentaux de détermination des prix des produits
et des biens en fonction des types de
153 FRYDMAN ( B ) et HAARSCHER ( G ) Op cit p 46
154 Idem
155 Ibid p 47
156 Pour SERVOIN ( E ), le secteur publique est non seulement un
non sens, mais également antagoniste à la notion de
liberté publique. Il rejoint en cela DELVOLVE ( P ) « Service
public et liberté publique » RFDA 1985, Pari P 1
72
marché157. Ces données se comportent
donc en véritable règles s'imposant à «
l'homo-economicus » comme le
seraient les lois de l'Etat pour « l'homo-juridicus »
; d'où leur dénomination de lois. Curieuses lois
cependant que celles sans législateur ni sanctions réelles
pourtant prétendument au dessus du droit étatique dont elle
serait le socle ou du moins la référence.
Les lois de l'offre et de la demande du marché sont des
déterminants logiques et pratiques du prix ; quand bien même il
serait fixé par l'Etat. Elles définissent toute la politique par
exemple de lutte contre l'inflation, mais demeure consubstantielles à
l'existence d'un cadre concurrentiel.
B - L'EXISTENCE D'UN LIBRE JEU DE LA CONCURRENCE
L'article 12 de la loi régissant l'activité
commerciale au Cameroun laisse entendre que les prix sont fixés en
fonction du « libre jeu de la concurrence ».La loi ne définit
pas ce concept qui renvoie pourtant à l'exigence légale d'une
libre, saine et loyale concurrence. Libre concurrence ne signifie pas
concurrence sauvage158. La concurrence doit être possible,
c'est-à-dire n'être pas rendue volontairement insuffisante,
inexistante ou impraticable entre opérateurs, ou entre ces derniers et
les consommateurs. Elle doit être uniquement exercée par et sur
les prix. Autrement dit, toutes les autres formes de concurrence en dehors des
prix sont exclues. La liberté des prix est placée au coeur du
processus concurrentiel et en est la référence autant que la
manifestation.
La loyauté de la concurrence vise à
empêcher qu'elle cesse d'être l'âme du
commerce159. La concurrence ne doit pas être déloyale,
c'est-à-dire contraire aux usages honnêtes en matière
commerciale. Aucun opérateur ne doit donc créer la confusion,
discréditer un concurrent par dénigrement, parasitisme et
même désorganisation du marché interne ou
générale160. La concurrence doit par ailleurs
être licite, c'est-à-dire ne pas passer par des
procédés interdits par la loi, tels que la publicité
erronée ou son absence, les méthodes de vente prohibées
à l'instar des ventes conditionnées ou forcées. La
permanence et même la récurrence de ces pratiques sur le
marché dénotent de l'insécurité juridique à
laquelle sont
157 Des analyses propres à la science économique
permettent de se rendre compte que le prix augmente ou baisse suivant que
l'offre et la demande sont en situation d'équilibre ou non
158 CHAPUS ( Y ), Le droit de la concurrence, que - sais
- je ? , PUF, Paris 1988 P 37
159 Ibid P 68
160 NYAMA (J M ) Elément du droit des affaires...
P 254 et suivantes
73
exposés les acteurs du marché, du fait de ces
propres lois du marché. Cet état des choses ne pouvant que
justifier un nécessaire recours, mieux, un retour à
l'intervention de l'Etat dans une optique certes conciliante et donc de
régulation en matière économique.
74
CONCLUSION PARTIELLE
Ainsi donc, consacré tant dans le cadre juridique
interne qu'externe, la déréglementation des prix au Cameroun, la
forme d'une ouverture à la prise en compte considérable des
règles du marché ; consécutives au vaste mouvement de
désengagement de l'Etat. Ceci favorise naturellement une plus
significative action des acteurs du marché dans la détermination
des prix, sur la seule base des lois de l'offre et de la demande. Cet
état des choses expose cependant lesdits acteurs à une
insécurité juridique permanente du fait des insuffisances et de
la nature imprévisible des fluctuations du marché de même
que de l'instrumentalisation nocive des principes libéraux
affirmés. La déréglementation des prix se
révèle être à cet égard, un facteur permissif
de la concurrence déloyale, un mécanisme incitatif de
spéculation sauvage. La concurrence déloyale n'étant
possible et même nuisible que par les prix, la liberté des prix
mal comprise et mal exercée peut conduire à des résultats
éloignés de ses finalités ou de son objet.
Le contenu de la déréglementation, ainsi
dégagé après son affirmation, révèle son
caractère transitoire, mais surtout incomplet. Ses inconvénients,
ou du moins ses corollaires, sont de nature à fonder - fort
paradoxalement - les bases d'un besoin vital, de la présence
étatique en matière de prix. Une présence aux contours
cependant redéfinis en vue d'une adaptation de l'Etat aux exigences de
la déréglementation, une présence qui s'incarne
aujourd'hui sous la forme de la régulation des prix.
75
SECONDE PARTIE
76
La déréglementation est définie par
Gérard CORNU comme l'action de régler un phénomène
évolutif en général, et plus spécifiquement comme
une action économique, mi-directive, mi-corrective, d'orientation,
d'adaptation et de contrôle exercée sur les autorités par
un marché donné qui, en corrélation avec le
caractère mouvant, divers et complexe de l'ensemble des activités
dont l'équilibre est en cause, se caractérise par sa
finalité, la flexibilité de ses mécanismes et sa position
à la jointure de l'économie et du droit161. Elle
apparaît comme l'expression de la transformation de l'ordre public
camerounais, marque explicite de l'avènement de l'Etat régulateur
ayant conduit à la consécration d'un ordre public
régulatoire162 caractérisé par le passage de la
réglementation des prix à l'avènement de la
régulation des prix163, un véritable défi du
droit164.
La régulation entretient les rapports connexes voir
complexes avec la réglementation et se confond parfois avec elle
lorsqu'elle en fait un instrument165. Ainsi, la régulation
n'équivaut pas à un retour à l'interventionnisme, mais
simplement à un procédé de transformation de cet
interventionnisme. L'Etat n'a en fait pas l'intention de se retirer de
l'activité économique. La régulation apparaît alors
comme un point de rencontre entre l'idéologie libérale, le
néolibéralisme, voire l'ultralibéralisme et les
idéaux de l'interventionnisme keynésien. Elle est la
résultante consciente d'une approche participative et synergique
d'organes et d'actions, autant contradictoires que complémentaires
rendus nécessaires après le processus d'ouverture
opéré par la déréglementation des prix. Remise
en
cause de la réglementation, aspect, et corollaire de la
déréglementation des prix, la régulation constitue une
technique d'encadrement des prix procédant d'un souci non seulement
d'adapter la réglementation aux réalités et exigences
sociales mais aussi de favoriser la prise en compte de toutes les acteurs du
marché dans l'encadrement des prix. Elle
161 CORNU (G) Op. cit p. 778
162 MOHAMED MAHMOUD MOHAMED SALAH, « Les transformations
de l'ordre public, économique vers un ordre public régulatoire ?
», philosophie du droit et droit économique, mélanges
FARJAT, frison-roche, PRINCIPE 261-289
163 COHEN (E), « De la réglementation à la
régulation : histoire d'un concept », problèmes
économiques `l'Etat régulateur 'N°2.85. sept. 2000,
PP1-4
164 Le mouvement régulatoire né aux Etats-Unis
d'Amérique du Nord et amplifié en Grande Bretagne au
siècle dernier a imposé la régulation comme forme
privilégié moderne et contemporaine d'encadrement de la
société. Elle est l'objet d'étude de tout un courant
économique élaborant dans le cadre de la science
économique toute une théorie de la régulation sans cesse
renouvelée dont le contenue est différent de la régulation
telle qu'est appréhendée dans les facultés de droit. Elle
apparaît en effet comme un véritable défi du droit.
165 Les deux notions ont en effet des relations
étroites. Elles se départissent pourtant. Alors que la
régulation constitue un mode de gestion souple dévolu à
des personnes plus ou moins indépendantes du pouvoir politique et du
milieu sur lequel elles exercent leur contrôle. La réglementation
elle, relève du privilège exclusive et souverain de l'Etat et se
caractérise principalement par sa rigidité.
77
préconise ainsi le paradigme du
réseau166 au détriment de celui de la
hiérarchique. Au lieu de s'interroger sur le point de savoir si la
régulation irrigue le Droit économique camerounais, il serait
plutôt pertinent de rechercher les justifications (Chapitre I) qui sous
tendent cette technique d'encadrement des prix, afin de mieux en
appréhender les manifestations dans l'ordre juridique (Chapitre II).
166 Le paradigme du réseau est d'une importance
capitale dans la logique régulatoire. Il reconnaît certes
l'exclusivité de l'Etat en tant que générateur du droit,
mais admet des limites quant à l'exclusivité étatique de
l'interprétation de ce droit et même de son exécution.
L'Etat ne peut ni tout faire, ni faire seul. Dans cet environnement tous
azimuts de libéralisation des échanges. Cette dynamique
entraîne un changement de moyens visant une adaptation au changement
d'objectif et se caractérise par l'ouverture voire l'intégration
de toutes les autres forces sociales dans le processus d'encadrement juridique
tout en reconnaissant la place de chef d'orchestre à l'Etat. La
régulation apparaît donc comme un moyen de gouvernance
économique caractérisé par l'ouverture, la
flexibilité, la « soft law », la pluralité,
l'orientation, la coordination, et même la juridictionnalisation. Tout ce
mouvement au détriment de l'autorité, de l'ordre, de la
rigidité, de l'intangibilité, de l'unilatéralité,
du commandement qui résume la réglementation.
78
CHAPITRE I : LES JUSTIFICATIONS DE LA REGULATION
Forme actuelle d'encadrement social, la régulation
couvre nombre de domaines de l'économie, y compris les prix. Elle
apparaît comme une technique de gestion des prix, associant des acteurs
aux fondements d'actions et finalités égoïstes parfois
antagonistes, mais tous mus par un objectif, à savoir la protection de
leurs intérêts économiques167. La
finalité de la régulation se trouve ainsi être le devoir de
protection étatique de ces intérêts. En effet, les
intérêts particuliers contrastent avec l'intérêt
général. Aussi, la recherche de l'équilibre entre ces deux
types d'intérêts, contradictoires mais parfois
complémentaires amènent-elles la régulation à
concilier entre la nécessité de protection de
l'intérêt général (Section II) avec
l'impératif de préservation des intérêts
catégoriels (Section I).
SECTION I : LA PROTECTION D'INTERETS ECONOMIQUES
PARTICULIERS.
La vraisemblable redondance du concept
intérêt économique168particulier
n'enlève rien au fait qu'il concerne, non pas l'ensemble de la
communauté, mais deux catégories spécifiques d'acteurs,
généralement distingués en matière de
commercialisation. En effet les intérêts ici
protégés sont ceux du consommateur (paragraphe I) et ceux de
l'opérateur (paragraphe II).
PARAGRAPHE I : LA PROTECTION DES INTERETS DU
CONSOMMATEUR
La notion de consommateur varie suivant que l'on
considère le commerce des marchandises ou des services. Pour le commerce
des marchandises, il s'agit de celui qui les utilise, pour satisfaire ses
propres besoins et ceux des personnes à sa charge, non pas pour les
revendre, les transformer ou les utiliser dans le cadre de sa profession. Pour
le commerce des services, il s'agit de tout bénéficiaire d'une
prestation169. Contre les manoeuvres frauduleuses
167 Entendu dans le cadre de ce devoir comme l'ensemble des
droits, avantages, et prérogatives légalement garantis aux
différents acteurs sur le plan économique.
168 En effet étant en matière économique les
intérêts évoqués ici ne peuvent qu'épouser
cette nature.
169 Cette définition apparemment simple et claire
pèche pourtant par une certaine imprécision. Notamment, pour ce
qui est du sens du concept « Propre besoin ». Ce concept aussi vague
qu'ambigu laisse à l'acquéreur du bien le pouvoir de lui donner
la direction en termes d'usage au gré de ses intérêts. Le
danger étant de pouvoir y dissimuler la vente, la transformation et
l'usage professionnel.
79
ou véreuses des commerçants et les exigences
liées à la politique économique de l'Etat, le consommateur
doit être protégé et défendu. C'est ce qui a
justifié en droit camerounais la consécration du droit à
la protection du consommateur (A) quand bien même son corollaire, le
droit à la défense (B) n'a reçu aucune
considération similaire.
A- LE DROIT A LA PROTECTION DU CONSOMMATEUR.
Le droit à la protection du consommateur est
consacré au Cameroun à la faveur de la loi régissant
l'activité commerciale au Cameroun, et il est
réitéré par son texte d'application. La Charte des
investissements oblige le secteur privé à exercer ses
activités avec le souci de préserver les intérêts et
la santé des consommateurs et des usagers. Les droits du consommateur
doivent donc être préservés en matière de prix, de
même doivent-ils être préservés contre les pratiques
et manoeuvres visant à entamer sa liberté contractuelle.
1- La garantie des droits du consommateur.
Le mouvement consumériste né, aux Etats-Unis,
s'est répandu sur le reste du monde. Il n'a pas épargné le
Cameroun. Sur le plan interne ce droit est consacré depuis
1990170 sur le plan interne. A l'échelle communautaire, un
acte sur les contrats de consommation demeure en étude. La faiblesse
économique du consommateur justifie l'envol du législateur
à son secours. En dehors de la protection par les règles communes
du droit des contrats, le consommateur est protégé par des textes
spécifiques. Il s'agit du droit à l'information, à travers
la publicité des prix et le respect des règles liées
à la facturation171
a- Le droit à l'information à travers
la publicité des prix
Dans tout contrat, la période précontractuelle
ouvre droit à l'obligation d'information entre les parties172
afin d'éviter le dol ou l'erreur. Cette exigence va d'ailleurs
jusqu'à l'exécution du contrat. Le droit à l'information
du consommateur se décline également en
170 Le Titre 4 de la loi de 1990 régissant
l'activité commerciale au Cameroun est intitulé « De la
protection des consommateurs ».
171 La protection de la santé et de la
sécurité du consommateur relève de la
réglementation des normes, poids et mesures.
172 NYAMA (JM), Eléments du droit des
affaires.... Op-cit P 261
80
obligation de renseignement sur les prix. Cette obligation
apparaît d'ailleurs comme une condition essentielle à la
transparence du marché et au jeu de la concurrence173. Cette
obligation repose, outre, sur les caractéristiques du produit, les
garanties du service après vente, principalement sur la publicité
des prix174. La publicité doit se faire par voie de marquage
et d'étiquetage, d'affichage, ou par tous autres moyens
appropriés. Elle doit être juste et réelle. À
défaut, elle devient mensongère175, et donc
susceptible de sanction quelque soit la voie. Par ailleurs, toute information
sur les prix doit faire apparaître « le prix unitaire
» et le prix réellement ou effectivement payé.
Le défaut de publicité en lui-même est constitutif de
délit d'autant plus que la publicité doit être faite ou
peut être faite par tout moyen d'information possible (écrit,
oral, audiovisuel), sans considération du lieu de diffusion. Toute
violation de la réglementation sur la publicité des prix est
sévèrement réprimée sans considération de
l'auteur réel, qu'il s'agisse donc d'un professionnel ou d'un simple
annonceur. S'adressant à des professionnels, à des
ménages, à des personnes physiques ou morales, la
publicité mensongère est condamnée en vue de
protéger les droits du consommateur, parmi lesquels, le droit à
la facturation.
b- Le droit à la facturation
Le consommateur à également droit à la
délivrance d'une facture à l'occasion de toute vente de produits
ou de toute prestation de service176. Quelque soit la destination du
produit, l'obligation de délivrance de la facture est
conditionnée par l'exigence de sa demande par le
consommateur177. Ceci paraît toutefois anormal au regard des
obligations comptables qui pèsent sur le commerçant autant que
pour la sécurité du consommateur en termes de preuves de la
transaction. La facture prouve et scelle d'ailleurs le contrat de vente tacite
ou verbal. Elle n'est valable qu'à condition de renfermer un certain
nombre de renseignements au nombre desquels le prix occupe une place de choix.
La facture est rédigée en double exemplaire, l'original
étant remis à l'acheteur. Elle a une validité de cinq ans
à compter de la
173 Article 20 de la Loi N°90/031 et Arrêté
N°009/MINDIC/DPPN réglementant la publicité des prix
à l'égard du distributeur, détaillant et du
consommateur.
174 Idem
175 Alinéa 2 Article 22 de la Loi N°90/031 «
toute publicité comportant sous quelques formes que se soit des
allégations, indications ou présentation fausse, ou de nature
à induire en erreur est interdite.
176 Le droit à la facturation est consacré depuis
l'ordonnance N°72/018 portant régime général de
l'Etat en ses articles 40 à 42.
177 Article 28 de la Loi N°90/031
81
date d'émission. Il convient cependant de noter que
dans la majorité des cas et particulièrement dans les grandes
surfaces commerciales, la facture est systématique alors qu'elle ne
l'est pas pour un certain type de commerce. Tel est le cas dans les
boulangeries, les stations services, les ventes occasionnelles courantes
qu'englobe le secteur informel. Un secteur dans lequel nombre de pratiques
portent atteinte à la liberté contractuelle du consommateur.
2- La sauvegarde de la liberté contractuelle du
consommateur.
Le consommateur à droit à la liberté de
conclure un contrat et de choisir le contenu dudit contrat.
a- La liberté de contracter ou de ne pas
contracter
Le consommateur doit librement contracter, soit par sa propre
initiative, soit à la suite d'une proposition. Toujours est-il que son
consentement doit être volontaire et en toute connaissance de cause. A
cet effet, la loi interdit certains procédés de vente qui
altèrent cette liberté tout en réglementant d'autres. Sont
interdites par la loi régissant l'activité commerciale au
Cameroun, les ventes à la boule de neige (Article 25), les ventes
soumises à conditions liées (Article 26), le refus de vente
(Article 24), la vente par envoi forcé (également
condamnée par l'article 26 du Code Pénal camerounais), les ventes
jumelées, la vente des produits falsifiés (Article 258 du Code
Pénal camerounais).
Les ventes à crédit, les ventes en solde, le
démarchage (Article 30 de la Loi régissant l'activité
commerciale) et dans une certaine mesure les ventes avec primes ont
été réglementées178. Cet encadrement des
procédés de vente ne vise qu'à protéger le
consommateur. Il lui garanti de ne payer un prix, uniquement que parce qu'il
l'a voulu et qu'il a décidé de le faire. Il s'agit
également d'une modalité de rationalisation de la
publicité commerciale aux effets néfastes en vue d'en
atténuer l'influence sur le consommateur. Le rôle des pouvoirs
publics est de prévoir toute restriction de nature à obliger le
consommateur contre son gré par les effets contraignants de la
publicité.
178 Voir pour d'amples développements, NYAMA (JM),
Eléments du Droit des Affaires.... Op-cit, P264 et HEMAR (J),
« Droit de la concurrence et protection des consommateurs
», Gazette du Palais 97e année N°6,
Nov-Dec 1971, PP 575-581.
82
b- La liberté de choisir ou de discuter le
contenu du contrat
La liberté contractuelle du consommateur se
décline également en droit de choisir le contenu du contrat, ou
d'en discuter les clauses. Ce droit est pourtant généralement
limité par la pratique des contrats d'adhésion
c'est-à-dire des contrats ne laissant aucune possibilité de
discuter sur les clauses. Ce type de contrat est fondé sur la faiblesse
économique du consommateur. Dans ce contexte, face à la puissance
du commerçant ou du professionnel, la protection du consommateur devient
un impératif. C'est ce qui a amené le législateur de 1990
à interdire et même à sanctionner de telles clauses. Aux
termes de l'article 27 de la Loi régissant l'activité commerciale
au Cameroun, il s'agit de contrats conclus entre professionnels et
consommateurs ; les consommateurs étant en fait obligés d'y
adhérer du fait de leur dépendance économique. Ces
contrats confèrent un avantage excessif aux professionnels en leur
permettant de se soustraire pour partie ou en totalité de leur
obligation légale ou contractuelle. La loi prévoit que ces lois
sont « réputées non écrites
», c'est-à-dire qu'elles sont frappées
d'inexistence avec tout ce que cela entraîne comme effets juridiques.
Cette sanction est fondée sur la théorie de l'abus de droit car
en effet, c'est à partir de leur puissance économique ou de leur
pouvoir que les professionnels imposent lesdites clauses aux consommateurs, qui
vulnérables doivent être protégés et même
défendus.
B- LE DROIT A LA DEFENSE DU CONSOMMATEUR
La défense du consommateur est un droit reconnu
à la suite du droit à la protection du
consommateur179. Il n'est cependant pas expressément
constaté en l'état actuel du droit camerounais. De même, il
reste attendu dans le cadre du droit communautaire. Il renvoie à
l'ensemble des moyens d'actions juridictionnelles et ou administratives visant
à faire valoir les intérêts des consommateurs auprès
des autorités compétentes. Ce droit pose le problème de
son titulaire et de ses conditions.
1- Les titulaires du droit de la défense du
consommateur.
179 CAS (G), La défense du consommateur, Q-S-J ? PUF,
Seconde édition, Paris, 1980, 126P.
83
Ce droit est assuré par le consommateur lui-même,
les associations de défense des droits du consommateur, mais
également l'Etat.
Le consommateur lorsqu'il est mécontent d'un service,
insatisfait d'un produit ou d'un contrat, a le droit de se plaindre
auprès soit de l'administration, soit du juge par une action
individuelle. Le meilleur moyen reste cependant l'adhésion à une
association de défense des droits du consommateur. Les associations de
défense des intérêts des consommateurs obéissent
à la réglementation en vigueur en matière
d'association180. Elles peuvent en plus de leurs propres
intérêts, dénoncer les infractions visées par la loi
auprès de l'administration ou du juge. L'article 216 du Code
Pénal camerounais leur interdit toute substitution à
l'administration pour ce qui est de la répression desdites infractions.
Elles peuvent se plaindre par action civile au nom du consommateur sur la
qualité, la quantité et surtout le prix d'un produit ou d'un
service. Lorsqu'elles empruntent la voie administrative, les mesures
conservatoires peuvent être prises par l'administration des prix.
Il faudrait cependant noter pour le regretter que l'action de
ces associations reste déficiente et inefficace. En effet, ces
associations sont constituées de groupuscules de personnes, sans grande
envergure et légitimité sérieuse, qui défendent le
plus souvent des intérêts individuels ou égoïstes.
Dans la plupart des cas, leur délégué ou leur
président manque de légitimité populaire. La grande
majorité de consommateurs ne se reconnaissant pas en eux. En pratique,
ces derniers ou du moins leur majorité ne vise qu'à tirer profit
des droits et avantages que leur concède leur poste auprès de
l'administration avec laquelle, ils sont permanemment en contact et tacitement
de connivence.
L'administration chargée des prix directement ou
indirectement, a le droit, mieux le devoir de protéger le consommateur
des abus et des excès du marché181. C'est dans cette
logique que l'ancienne direction des prix et de la métrologie
s'est muée en direction de la protection du consommateur
avec une sous direction spécialement chargée des questions
de protection du consommateur.
2- Les conditions d'exercice du droit de la
défense du consommateur.
180 Loi n°090/053 du 19 Décembre 1990, portant
liberté d'association.
181 Article 62 Décret d'application de la Loi
régissant l'activité commerciale au Cameroun.
84
Comme pour toute action administrative ou juridictionnelle, le
droit à la protection du consommateur doit obéir à
certaines règles générales et particulières pour
être exercé. En effet, quelque soit celui qui l'exerce, le
titulaire du droit de la défense du consommateur doit avoir
qualité et intérêt pour agir.
Naturellement, l'association doit être légalement
instituée et légalement habilitée à
représenter le consommateur afin de défendre ses
intérêts ou à intenter une action juridictionnelle dans
l'intérêt collectif des consommateurs. L'action peut être
civile ou en suppression des clauses abusives. L'association des consommateurs
peut également intenter une action en représentation conjointe
lorsque le préjudice, affectant individuellement plusieurs consommateurs
a été causé par un même professionnel. En bref les
conditions de forme et de fond dans la procédure en défense des
droits du consommateur, obéissent aux règles habituelles en
matière de requête administrative ou juridictionnelle. Cependant,
il faudrait noter que l'association de protection des droits du consommateur
engage sa responsabilité si elle cause par son action injuste, un
dommage aux producteurs.
L'administration des prix légalement habileté
à défendre les intérêts du consommateur
déploie, pour se faire en cas de besoin, ses prérogatives de
puissance publique en vue de prendre des mesures conservatoires ou
répressives.
Au final, la régulation des prix vise en premier lieu
la protection et la défense des droits du consommateur, en tant
qu'acteur central, mais vulnérable du marché, dont la faiblesse
économique s'est renforcée à la faveur de la
déréglementation. La cohabitation d'acteurs multiples
s'avère donc salutaire dans ce contexte puisqu'elle tient compte des
intérêts particuliers du marché au nombre desquels ceux de
l'opérateur économique.
PARAGRAPHE II : LA PREVENTION DES INTERETS DE
L'OPERATEUR.
La notion d'opérateur, sous entendu opérateur
économique, doit être comprise sous un aspect
générique. Elle englobe ici le producteur, le distributeur, le
fournisseur, le commerçant bref toute entité intervenant dans le
circuit économique en dehors le commerçant. Il s'agit de toute
personne exerçant une activité commerciale ou industrielle en vue
de se procurer un bénéfice. L'ouverture à la concurrence
interne et internationale crée une situation
85
de permanente insécurité des opérateurs,
qui de ce fait, doivent être soutenus par l'Etat ainsi que par toute
autre force interne, même non étatique. Le processus de
normalisation de la concurrence (A) s'avère à cet égard
nécessaire, comme une action régulatrice pour le soutien de
l'industriel local (B).
A- LA NORMALISATION DE LA CONCURRENCE
Normaliser renvoie à rendre à nouveau normal ou
du moins à réglementer un secteur anarchique afin de le remettre
dans l'ordre182. Le cadre concurrentiel découlant de la
réglementation et la nourrissant, est lui même porteur de nombreux
abus qui justifient l'incrimination des pratiques anticoncurrentielles de
même que l'institution d'un organe de surveillance et de contrôle
de la concurrence.
1- L'incrimination des pratiques anticoncurrentielles
liées aux prix.
Le droit de la concurrence en vigueur au Cameroun permet
d'identifier et de sanctionner les pratiques portant atteinte au principe de la
libre concurrence.
a- Identification des pratiques anticoncurrentielles
liées aux prix.
Le droit de la concurrence est consacré au Cameroun
depuis le texte fondamental en matière de prix de 1972 dont la section 3
porte sur le maintient de la libre concurrence. Actuellement la loi
principalement compétente en la matière définit les
pratiques anticoncurrentielles comme « toute pratique qui
aurait pour effet d'empêcher, de fausser ou de restreindre de
manière sensible l'exercice de la concurrence au niveau du marché
intérieur ».183 Cette définition
gagne autant en précision qu'en ambiguïté par rapport
à l'Arrêté n° 008/MINDIC/I/PM du 7 mars 1991 relatif
aux pratiques anticoncurrentielles. Elle étend en effet ces pratiques en
n'exigeant plus que les pratiques soient de nature «
commerciale » et en incluant dans cette catégorie les
pratiques restrictives (l'Arrêté n'évoquait que les
pratiques déloyales). Seulement, la loi semble écarter les
présomptions
182 CORNU (G), Op-cit, P607
183 Article 3 de la Loi n° 98/013 du 18 juillet 1998
relative à la concurrence.
86
basées sur une pratique « susceptible
de restreindre la concurrence ». En plus, elle introduit des
notions vides de sens telles que « de manière sensible
» qu'elle ne précise pas. Cette loi permet de
considérer comme pratiques anticoncurrentielles, entre autres, les
accords et ententes conclus entre entreprises, les abus de positions dominantes
des entreprises ainsi que les fusions et acquisitions. En cela, la loi n'a
réglementé que les pratiques restrictives de la concurrence en
omettant celles déloyales184, même si elle a
apporté certaines précisions. Il convient, de ce fait, de se
référer aujourd'hui à la loi n°90/031
régissant l'activité commerciale au Cameroun qui n'a
été abrogée par la loi de 1998 sur la concurrence que dans
ses dispositions qui lui sont contraires. L'article 12 de ladite loi ayant
affirmé le principe de la libre concurrence précise que ce
principe est exercé « sous réserve des
interdictions ci-après frappant certaines pratiques anticoncurrentielles
sur le marché ». L'Arrêté n°93
portant application de ladite loi en son article 38 énumère et
prohibe expressément « en application des articles 13
(a), 14, 16 et 17 de la loi ; les pratiques anticoncurrentielles liées
aux prix ». Il s'agit de la publicité
mensongère et du défaut de publicité, de la pratique des
prix discriminatoires, de la vente à perte dite dumping lorsqu'elle
n'est pas justifiée par les atteintes aux qualité ou
quantité du produit telles que la fin de série des produits
périssables et la liquidation pour cause de fermeture, les pratiques de
vente à des prix différents de ceux affichés, l'usage de
fausse dénomination ou de toute manoeuvre en vue de la vente d'un
produit de qualité inférieure au prix d'un produit similaire mais
de qualité supérieure, la vente à un prix imposé de
manière non justifiée par le grossiste, le refus de vendre en vue
de provoquer la hausse des prix ainsi que toute action concertée,
entente horizontale et conventions sur le marché dans l'optique d'une
imposition verticale des prix illicites. La pratique de ces différentes
manoeuvres est sanctionnée conformément à la
législation en vigueur en matière de prix.
b- Les sanctions des pratiques anticoncurrentielles
liées aux prix.
Toutes les infractions sues évoquées sont
constitutives de pratiques illicites des prix aux yeux de la loi. Elles sont
sanctionnées à ce titre après constatation par les
autorités compétentes. La répression desdites infractions
liées aux prix donne lieu à des sanctions
184 NYAMA (JM) « Arrêté n°
008/MINDIC/DPPM, du 07 mars 1991, relatif aux pratiques antis concurrentielles.
Commentaires », juridis périodique, n° 7,
juillet-septembre 1991, PP29-31.
87
suivant qu'il s'agit de pratiques restrictives à la
concurrence ou de pratiques déloyales en général.
Les pratiques restrictives de la concurrence sont
régies par la loi de 1998 sur la concurrence. Elles sont
sanctionnées sur la base du titre 4 de ladite loi par la Commission
nationale de la concurrence, qui d'ailleurs est compétente pour la
constatation desdites infractions. En gros, les sanctions consistent en des
amendes, des injonctions de mettre fin aux pratiques incriminées, des
astreintes et éventuellement le paiement des dommages et
intérêts. Elle varie suivant l'infraction. Ainsi les accords,
ententes, abus de position dominante et fusion sont passibles d'amende
égale à 50% du bénéfice ou 20% du chiffre
d'affaire. Cette amende est doublée en cas de récidive et peut
s'étendre aux infractions qui ont cessé de courir. La peine ne
peut être collective. Le non paiement dans les délais de l'amende
expose à des pénalités dont le montant par jour de retard
est égal au centième de l'a mende initiale. En ce qui concerne
exclusivement les chaînes de production des produits mis en cause, la
fermeture temporaire des établissements peut être ordonnée,
le paiement des dommages et intérêts aussi à condition
cependant de justifier d'un lien de causalité entre la pratique
allégué et le dommage subi.
En ce qui concerne les pratiques anticoncurrentielles
déloyales, énumérées par la loi régissant
l'activité commerciale au Cameroun, elle reste sous l'empire de
l'ordonnance de 1972 et consiste en des saisies des produits, objet de
l'infraction. Une transaction peut être ouverte et imposée dans un
délai de 30 jours par le Ministre chargé des prix aux
contrevenants185. Lequel Ministre peut également porter
plainte après avis de la CNC186. L'Administration peut
également procéder à la fermeture de l'entreprise ou
mettre le contrevenant en demeure de régulariser sa situation dans un
délai maximum de 30 jours. Elle peut en vertu de l'alinéa 4 de
l'article 34 de ladite loi « décider après avis
de la CNC des mesures tendant au rétablissement de la concurrence dans
le cas des ententes et abus de position dominante ». Des
confiscations, injonctions, destruction des marchandises, interdiction
d'exercer la profession peuvent ainsi être engagées. L'article 35
de la loi de 1990
185 Articles 17 à 22 de l'ordonnance n°72/18, les
amendes forfaitaires prévues par l'article 31 (nouveau) de la loi
n° 89/011 du 28 juillet 1989 modifiant et complétant certaines
dispositions de la loi n° 79/12 du 30 juin 1972 modifiant certaines
dispositions de l'ordonnance n°72/18 du 17 octobre 1972 portant
régime général des prix
186 Article 33 (b), de la loi régissant l'activité
commerciale au Cameroun.
88
punit également l'outrage à fonctionnaire. Les
peines principales et accessoires du Code Pénal sus
énumérées en matière de violation de la
réglementation des prix peuvent être prononcées.
La normalisation de la concurrence consiste donc en
l'identification des pratiques anticoncurrentielles tant restrictives que
déloyales en vue de leur éradication. La sanction desdites
pratiques est subordonnée à leur constatation par un organe de
surveillance et de contrôle de la concurrence.
2- L'institution d'un organe de contrôle : la
Commission Nationale de la Concurrence.
La police de la concurrence est exercée au Cameroun par
la Commission Nationale de la Concurrence. Créée en 1998,
187 elle n'a effectivement été mise en place que le
1er novembre 2006, soit un an après le décret qui en fixe la
composition et les modalités de fonctionnement188
a- Organisation de la Commission Nationale de la
Concurrence.
En fait d'attributions, la Commission exerce une fonction
consultative, une fonction répressive et une fonction
para-juridictionnelle. Elle est chargée d'examiner et d'émettre
un avis sur toutes les pratiques relatives à la pratique de la
concurrence ainsi que sur les projets de textes législatifs et
réglementaires susceptibles d'influencer l'exercice de la concurrence
187 La commission nationale de la concurrence a été
créée par la loi n° 98/013 du 14 juillet 1998 relative
à la concurrence en son article 22. Cette loi abroge ou annule le
Conseil national de la concurrence alors prévu par la loi n°
90/031. Ceci emporte des conséquences sur un triple plan juridique,
économique et théorique.
Sur le plan juridique, le remplacement d'un conseil par une
commission rend sans objet le débat sur la nature juridique du conseil.
La CNC apparaissant comme un simple prolongement technique du Ministère
en charge de la concurrence conformément à l'article 2. Bien que
spécialement composée et bénéficiant d'une
personnalité juridique propre, la nature des relations entre la
commission et le Ministère du commerce n'est pas aisée. Rapport
hiérarchique ou de tutelle ? la composition, le fonctionnement et
même le financement de la commission de même que son suivi ne
permettent pas de trancher.
Sur le plan économique la commission exige peu de moyens
de fonctionnement puisque ne bénéficiant ni d'une autonomie de
fonctionnement, ni d'une autonomie financière comme cela aurait
été le cas pour le conseil. Les financements de la commission en
effet font partie des lignes budgétaires du Ministère en charge
du commerce. Ce qui altère de facto son indépendance.
Sur le plan théorique enfin et non des moindres, le
Cameroun en optant pour une commission démontre s'il en était
encore besoin, l'autonomie de son droit public en général et en
particulier de son droit public économique ; non seulement
vis-à-vis du droit privé, mais aussi du droit français.
Faut-il rappeler, en France cette fonction est exercée par une
espèce d'autorité administrative indépendante
dénommée : Le Conseil National de la Concurrence
188 Décret n° 2005/PM du 06 mai 2005.
89
sur le marché intérieur189.
L'importance de la Commission sera fonction du poids de ses avis comme le
soulignait déjà à propos du Conseil le Dr. Jean-Marie
NYAMA190. Une analyse de l'esprit ayant présidée
à la création de cet organe amène à conclure qu'il
s'agit d'avis conformes. En France par exemple l'organe équivalent donne
formellement ses avis pour l'autorisation de l'entente et des
concentrations.
La Commission exerce par la suite, une fonction
répressive. Elle a un pouvoir d'investigation, de poursuites et
même de sanctions des pratiques anticoncurrentielles
considérées dans leur sens extensif. A ce niveau, elle se heurte
à la concurrence d'autres organismes ayant également des
compétences en matière de concurrence telles que les agences de
régulation191 et les services chargées du
contrôle des fraudes commerciales.
Le CNC joue enfin un rôle para-juridictionnel qui se
décline en rôle de consultation pré-juridictionnelle,
d'assistance judiciaire en matière concurrentielle, et une fonction
quasi juridictionnelle192.
La composition de la CNC permet de distinguer des membres
permanents et des membres éventuels. Les membres permanents sont au
nombre de 16 représentant l'administration publique (cinq
ministères : Commerce, Concurrence, PME, Industrie, Finances et
Justice), le secteur privé à travers les organes
socioprofessionnels (CCIMA, Chambre d'Agriculture d'Elevage et des
Pêches, GICAM, représentant du syndicat des commerçants
importateurs et exportateurs du Cameroun, le barreau du Cameroun, l'Ordre des
experts comptables, le Comité de compétitivité), et la
société civile (représentants des organisations de
défense des droits du consommateur). La composition ainsi
présentée permet de noter la prépondérance du
Ministère du commerce, actuellement en charge de la concurrence et des
prix, représenté par quatre membres au moins.
Les membres éventuels relèvent du pouvoir
discrétionnaire du président de la Commission, qui «
peut faire appel à toute personne physique ou morale, en
raison de ses compétences, pour assistance aux travaux
» en fonction de la spécificité des
problèmes dont il est saisi. Ces derniers n'ont que voix
consultative193. Cette prérogative reconnu au
189 Article 2 (1) du décret n°2005 en fixant les
modalités de composition.
190 NYAMA (JM), `La liberté de commerce et d'industrie
.... » Op-cit, P74.
191 Voir ESTEGUET (PE), « Relations entre l'autorité
de concurrence et les autorités sectoriels de réglementation : en
particulier en ce qui concerne les abus de position dominante ».
7e session du groupe d'experts intergouvernementaux sur le droit et
la politique de la concurrence, CNUCED, Genève, oct-nov 2006,
(Ministère du Commerce).
192 Infra, p.103
193 Article 3 du décret n° 2005.
90
Président, assurément nécessaire, laisse
tout de même la porte ouverte à une composition pour le moins
subjective de la Commission.
Sous l'angle organique, la Commission peut se subdiviser en
sous Commission conformément à l'article 4 en fonction des
domaines de compétence. Elle est assistée d'un secrétariat
technique dont la direction est également confiée à un
expert en matière de concurrence nommé par le Ministre
chargé de la concurrence. Les procès-verbaux de la Commission
sont cosignés par le président de la Commission et le
secrétaire technique. La loi n'indique pas ce qu'il adviendrait si par
exemple, le secrétaire technique refusait de signer. Ainsi,
l'organisation des membres et des structures qui composent la CNC facilite la
réalisation de ses attributions.
b- Le fonctionnement de la Commission Nationale de
la
Concurrence.
Le fonctionnement de la CNC pose le problème de la
procédure et de ses pouvoirs.
Pour ce qui est de la procédure de la CNC, il faut
noter qu'elle est compétente pour connaître de toutes les
pratiques anticoncurrentielles, entendues comme pratiques ayant pour effet,
d'empêcher, de fausser ou de restreindre de manière sensible
l'exercice de la concurrence sur le marché intérieur. Il s'agit
de toutes celles principalement énumérées par la loi
relative à la concurrence autant que de celles réprimées
par celle régissant l'activité commerciale. La CNC est tout
autant compétente pour la concurrence dans les domaines
spécifiques194.
La Commission, outre le pouvoir d'auto-saisine, est ouverte
à l'actio popularis. Elle peut être en
réalité saisie par toute personne physique ou morale, publique
comme privée, qui s'estime victime d'une pratique anticoncurrentielle,
ainsi que par tout organisme ou toute administration concernée. La
Commission est saisie par une requête adressée à son
président. Elle se réunit aussi souvent que les circonstances
l'exigent et au moins deux fois par trimestre sur convocation du
président195. Ceci semble pour le moins
incompréhensible au regard de la
194 MVOGO BELIBI (RM), La libéralisation du secteur des
télécommunications au Cameroun..., mémoire, Op-cit P
86.
195 Article 10 et 8 du décret n° 2005.
91
récurrence et même de la permanence des pratiques
et des plaintes sur les pratiques anticoncurrentielles. Ce domaine est
extraordinairement prolifique et dynamique. Il devrait justifier la mise sur
pied d'une structure tout autant stable et permanente, ayant un siège
permanent et déconcentré sur la carte administrative, avec des
membres permanents disponibles et devant statuer sur les infractions
constatées à la majorité simple des membres
présents avec prépondérance de la voix du président
ou de son représentant en cas d'égalité. Ainsi, un quorum
ne doit pas être exigé pour que la Commission siège. La
Commission gagnerait à fonctionner en sous Commissions
spécialisées de sorte que les infractions soient traitées
en fonction de la spécificité de chaque sous Commission. La
permanence du siège serait salutaire pour plus de certitude du lieu de
rencontre et moins de dépenses en location de salles de réunions
de même que la multiplication des affaires, toutes aussi importantes les
unes que les autres, serait de nature à rendre difficile la convocation
et même la distribution des documents de travail huit jours au moins
avant la date de réunion comme cela est exigé par l'article 9 du
décret.
Cet ensemble de considérations dénote d'un
excès de formalités et formalisme pouvant avoir un effet
négatif l'efficacité de la Commission dans la mise en oeuvre de
ses pouvoirs.
Les pouvoirs de la Commission, au regard de la loi, sont d'une
double nature. La Commission détient un pouvoir de décision et un
pouvoir de sanction. Son Président détient des pouvoirs propres.
En termes de décisions, la CNC, à travers ses résolutions,
peut émettre des injonctions de mettre fin aux pratiques
incriminées conformément à l'article 13 (2) du
décret196. Pour ce qui est des sanctions, l'article 13
prévoit que la Commission peut donner des amendes prévues par les
articles 27 et 28 de la loi n°98/013 du 14 juillet 1998 relative à
la concurrence197. Ces injonctions peuvent également
être assorties d'astreintes ou du paiement des dommages et
intérêts, suivies de la publication des résolutions de la
Commission dans les délais du recours dans deux journaux nationaux
à fort tirage et par voie de radio, aux frais du contrevenant. Le
recours contre les décisions du Comité peut être, le cas
échéant, fait en appel
196 Quand l'on se souvient du principe de droit public suivant
lequel il ne peut être adressé d'injonctions à
l'administration par le juge, il y a lieu de s'interroger sur les pouvoirs de
la commission face à l'Etat, en tant qu'acteur économique
susceptible de pratiques ou de manoeuvres déloyales voire restrictives
de la concurrence. Encore que les membres de la commission ne sont pas des
juges.
197 Concrètement, il s'agit d'amendes de 50% du
bénéfice ou de 20% du chiffre d'affaire réalisé au
cours de l'exercice précédant l'année durant laquelle
l'infraction a été commise. Les amendes doubles en cas de
récidive et leur non paiement peut donner lieu a la fermeture de l
établissement.
92
auprès du Tribunal de Première Instance ou de
Grande Instance sans effet suspensif de l'exécution des
résolutions de la Commission.
Les pouvoirs propres du président de la Commission sont
consacrés par l'article 14 du décret. Il peut, à titre
conservatoire et pour une période de 15 jours, ordonner la cessation
d'une pratique anticoncurrentielle régulièrement
constatée, et en cours d'instruction, lorsque ladite pratique cause, ou
est susceptible de causer, un préjudice à l'économie
nationale. La convocation d'urgence de la Commission au cours de la
période considérée pour connaître de l'affaire
étant exigée, une prolongation de trente jours de ladite
période peut à cette occasion être opérée. La
reconnaissance de ces pouvoirs au Président est salutaire pour une
réaction prompte et spontanée en cas de nécessité.
Mais, elle expose également à des abus possibles de la part du
président de la Commission, seul juge du préjudice réel ou
éventuel à l'économie nationale en l'espèce.
La CNC est donc l'organe chargé, par excellence, de la
concurrence au Cameroun. La nature juridique de cet organe reste cependant
imprécise, puisque le législateur se contente de parler d'un
organe « rattaché au ministère chargé de
la concurrence ». La nature même de ce rattachement
n'est nullement précisée.198 L'efficacité de la
CNC est également menacée par le nombre assez élevé
de ses membres autant que la présence des représentants du monde
des affaires de nature à empêcher une auto-sanction, mais surtout
à empêcher les sanctions contre les opérateurs
contrevenants.
La répression des pratiques anticoncurrentielles et la
répression de la CNC constituent, le volet organique de la normalisation
de la concurrence au Cameroun. Qu'en est-il du souci de protéger
l'opérateur c'est-à-dire l'industriel local.
B- LA PROTECTION DE L'INDUSTRIEL LOCAL
Par industriel local il faut entendre, tout opérateur
s'activant dans le domaine de la production et de la transformation. Ces
opérations ont sous l'angle économique, une portée
198 Une analyse des articles 15 et suivants permet de se rendre
compte que les dépenses de fonctionnement de la commission sont
rattachées au budget dudit ministère qui fixe par ailleurs le
montant des indemnités des personnes appelées à titre
consultatif. Mais également la commission doit adresser des rapports au
Ministre en charge du commerce. Ceci pourrait permettre de conclure à un
rapport hiérarchique, faisant de la CNC le prolongement de
l'administration centrale chargée de la concurrence. Ce qui jette du
coup une ombre de suspicion sur cet organisme.
93
certaine en matière de détermination des prix.
Or le contexte de la concurrence, favorisé par la
déréglementation, contraste avec l'impuissance économique
de ces entités. Il s'impose alors la nécessité d'une
intervention conjuguée de l'Etat et des forces du marché pour
venir à bout des problèmes liés aux prix. Dans cette
optique, la régulation des prix vise à la fois la lutte contre
l'inflation et la multiplication des mesures de soutien à
l'industrialisation.
1- Les mesures de lutte contre l'inflation.
L'inflation consiste en la création de moyens de
paiement en excédent par rapport aux besoins de l'économie ayant
pour conséquence de provoquer une hausse générale et
continue des prix. D'après le Vocabulaire juridique, l'inflation se
présente comme un véritable cancer des économies
étatiques, « une véritable gangrène de
l'économie, nuisible aux opérateurs économiques
», pour reprendre les propos de Maurice
FLAMMANT199. Au Cameroun, la loi fait de la protection de l'espace
économique national, la sécurité économique du pays
et la gestion des situations économiques conjoncturelles, un devoir de
l'Etat.200 La poursuite de cet objectif explique les relevés
des prix effectués par les services compétents du
ministère en charge des prix, d'où l'action pertinente de
l'Institution National de la Statistique. Les relevés de prix ainsi
effectués permettront à l'Etat de prendre des mesures efficaces
de lutte contre l'inflation. Il pourrait s'agit des politiques
budgétaires201, des politiques
monétaires202, de la politique des revenus par une
modération de la hausse des rémunérations, mais surtout
l'Etat peut passer par le contrôle des prix au moyen de subventions de
soutien aux prix, d'importations pour faire chuter les prix ou enfin la
pratique des prix minimums. Cette dernière mesure nécessite le
plus souvent encore plus de contrôle des prix ainsi qu'une rigoureuse
pression fiscale, malheureusement désincitative des investissements.
L'impératif de protection du consommateur contre les
prix insoutenables et celui de protection de l'opérateur
nécessitent souvent des mesures de soutien aux prix, à la
production, à la transformation, à la distribution et même
à la commercialisation ; bref, à tous les stades
199 FLAMMANT (M), l'inflation, Q-S-J ? , PUF, Paris 7e
édition, 1987.
200 Article 62 du Décret d'application de la loi
régissant l'activité commerciale au Cameroun.
201 Agir sur l'équilibre budgétaire, prendre les
décisions en matière fiscale de nature à juguler
l'inflation.
202 Réduction des liquidités au niveau de la
planche à billets encore appelée ponction budgétaire.
Cette mesure est généralement impopulaire et difficile à
réaliser.
94
du processus économique. Ceci apparaît en gros
comme une mesure de soutien à l'industrialisation.
2- Les mesures de soutien à
l'industrialisation.
La «jungle» dans laquelle le
libéralisme introduit les Etats du tiers-monde, dans ce contexte de
mondialisation des échanges, exige de fort grands moyens de production
et de transformation pouvant permettre à l'Etat, de pratiquer sur le
marché, le juste prix. Il s'agit du prix qui, sans léser le
consommateur ne nuit pas à l'opérateur. Ceci nécessite un
niveau d'industrialisation dont ne sont malheureusement pas dotés les
pays du Sud. L'industrialisation demeure embryonnaire au Cameroun. Le contexte
est tel qu'à défaut d'abandonner ses activités,
l'opérateur fait subir au consommateur, le surplus des ses coûts
de production. Dans le but de protéger le consommateur et d'encourager
l'industriel, des mesures régulatrices épousent les contours
multiformes de l'aide aux prix. A cet égard, des subventions directes ou
indirectes sont accordées aux opérateurs économiques ; des
exonérations d'impôts et taxes fiscales, des bonifications
d'intérêts, des garanties de prêts ou des conditions
particulièrement favorables de fourniture de biens à titre
préférentiel ainsi que la couverture des pertes d'exploitation et
plusieurs autres mesures sont envisagées203. Toutefois, la
réglementation CEMAC ne permet que « les aides à
caractère social accordées sans discrimination liée
à l'origine du produit ainsi que les aides qui peuvent contribuer au
développement économique d'un Etat membre ou de la sous
région »204
En fait, l'institution d'un cadre juridique et judiciaire
incitatif et favorable aux affaires à travers la promulgation de la
charte des investissements de 2002, autant que l'édiction d'un nouveau
régime financier de l'Etat205 participent de cet objectif.
Ceci se traduit sur le plan normatif par la création d'un
département ministériel spécialement chargé de la
création de petites et moyennes entreprises autant que du retour
à l'existence d'un ministère spécialement chargé
des affaires économiques, séparé du Ministère des
finances, une des actions fortes en faveur d'une industrialisation au Cameroun
avait été cependant l'institution des zones franches et des
points francs, soustraits à tout contrôle des prix.
203 ACDIC
204 Article 2 du règlement 004/99/UEAC-CM-639 portant
réglementation des pratiques étatiques affectant le commerce
entre les Etat membres de la zone CEMAC.
205 Loi n° 2007/006 du 26 décembre 2007 portant
régime financier de l'Etat
95
La suppression de ce régime a laissé la place
à d'autres mesures instituées par la nouvelle charte des
investissements telles que les zones économiques et les codes sectoriels
formés afin de rendre plus incitatif l'investissement et favoriser le
développement de l'industrie locale.
La protection d'intérêts économiques
particuliers, et notamment ceux de l'opérateur et ceux du consommateur
constituent donc le light motiv de la régulation des prix,
comme technique d'encadrement social mettant en commun des entités
parfois antagonistes du secteur privé et du secteur public dans une
synergie dont l'objectif ultime, reste somme toute, la préservation de
l'intérêt économique général.
SECTION II : LA PRESERVATION DE L'INTERET ECONOMIQUE
GENERAL.
Les enjeux de la mondialisation et de la libéralisation
internationale des échanges ne sont plus à
démontrer206. Les défis liés à la faible
puissance économique des Etats, la volonté de puissance des
firmes multinationales de plus en plus présente et la
préservation de l'intérêt général se posent
comme un impératif de sécurité économique national.
Le cadre commercial local est en effet menacé de disparition, à
défaut, d'instrumentalisation à la gloire économique tant
des entreprises que des Etats étrangers, inexorablement
L'impératif souverain de protection de l'espace économique
national dans ce contexte de concurrence internationale, de plus en plus
déloyale, oblige l'Etat à activer des mesures de défense
commerciale (Paragraphe II), pour contrecarrer toute pratique reconnue nocive
à l'économie nationale. (Paragraphe I).
PARAGRAPHE I : L'INCRIMINATION DES PRATIQUES NOCIVES A
L'ECONOMIE NATIONALE
La régulation juridique vise en effet l'encadrement des
pratiques déloyales aussi bien des entreprises que des Etats en
matière de prix. Les entreprises développent en
réalité la pratique du dumping (A), alors que les Etats, non
seulement subventionnent nuisiblement leurs produits à l'importation,
mais également peuvent excessivement et volontairement importés
vers le Cameroun dans un but de désorganisation du marché
intérieur (B). Toutes ces
206 Lire ADDA (J), La mondialisation de l'économie,
Op-cit, TAMBA (I), Les enjeux de la mondialisation sur
l'économie camerounaise, Op-cit.
96
manoeuvres sont prohibées dans l'ordonnancement
juridiquement interne, conformément aux règles de
l'OMC207.
A- LA CONDAMNATION DU DUMPING DOMMAGEABLE.
Une bonne appréhension du caractère dommageable
du dumping, suppose une préalable élucidation sémantique
de ce concept.
1- Elucidation sémantique du dumping.
Attribut de la liberté du commerce et de la
concurrence, le dumping est réglementé tant sur le plan interne
qu'international. L'Arrêté du 07 mars 1991 définissant les
pratiques anticoncurrentielles en fait une pratique déloyale, entendue
comme vente à perte (titre 2 conformément à l'article 14
de la loi régissant l'activité commerciale au Cameroun). Sous
l'angle international, le dumping renvoie à une pratique
orchestrée par les entreprises étrangères, situées
ou non, au Cameroun sur la base de liberté des politiques commerciales.
Elle est définie par l'Accord de Marrakech sur le dumping
dommageable208 comme le fait d'introduire « sur le
marché d'un autre pays à un prix inférieur à sa
valeur normale, [un produit] si le prix à l'exportation de ce produit,
lorsqu'il est exporté au cours d'opérations commerciales
normales, par le produit similaire destiné à la consommation dans
le pays exportateur est supérieur ». Cette
définition est assurément la meilleure qui permet de comprendre
ce concept. Elle l'est d'autant de plus que, celle retenue dans le cadre de la
loi relative au dumping et à la commercialisation des produits
d'importation subventionnés209 permet de tirer des
conclusions plus déconcertantes. En premier lieu, cette
définition semble complexe et inutilement longue. Elle nécessite
par ailleurs des éclaircissements quant au
207 Mme FONE née NDONTSA (A-M), « la loi n°98/12
du 14 juillet 1998 relative au dumping et à la commercialisation des
produits d'importation subventionnés : une loi entre protectionnisme et
libre échange », juridis périodique n°43,
juil-Sept 2000, PP97-103
208 Il s'agit en fait de l'accord sur la mise en oeuvre de
l'article 4 du GATT (Accord Général sur les Tarifs douaniers et
le Commerce) de 1994
209 Article 3 de la loi n°98/012 du 14 juillet 1998 relative
au dumping et à la commercialisation des produits d'importation
subventionnés « le dumping consiste à introduire dans le
marché intérieur, un produit à l'importation, acquis
auprès d'un fournisseur étranger à un prix
inférieur à la valeur normale pratiqué par le fournisseur
au cours d'opérations commerciales normales par ce produit ou un produit
similaire destiné à la consommation dans le pays exportateur
»
97
concept de « valeur normale
», d'« opération commerciale normale
», de « produit similaire
», etc.210
Cette définition laisse entendre que les produits non
destinés à la consommation ne sont pas concernés par le
dumping, alors même que les effets du dumping, concernent davantage les
entreprises que les consommateurs. Par ailleurs, la loi amène à
se demander ce qui est constitutif de dumping entre le fait d'introduire sur le
marché intérieur un produit acquis dans les conditions
décrites, et le fait de l'avoir acquis auprès d'un fournisseur
étranger à un prix inférieur à la valeur dite
normale, pratiqué par le fournisseur au cours d'opérations
commerciales normales. Sous cet angle, la loi semble condamner le moyen
plutôt que les effets. En fait, ni l'une ni l'autre de ces deux
hypothèses ne peut prospérer. Ce n'est nullement le fait
d'introduire sur le marché un produit qui en fait un dumping. Même
cette introduction peut être entendue comme la vente. C'est plutôt
le prix par lequel ce produit est introduit sur le marché qui doit
être considéré. Ce n'est non plus l'acquisition à un
prix inférieur à un prix normal, qui est
répréhensible mais plutôt la revente à un prix
inférieur au prix d'acquisition.
En clair, le dumping apparaît comme le fait pour une
entreprise, de vendre sur le marché intérieur, un produit
étranger, à un prix inférieur à son prix
d'acquisition ou à celui pratiqué par la même entreprise
dans les mêmes conditions et pour le même produit dans son pays
d'origine ou dans un autre pays. Toutefois, ce n'est point le dumping en
lui-même qui est répréhensible. Seul son caractère
dommageable l'amène à devenir répréhensible.
2- L'incrimination du dumping.
Seul le caractère dommageable du dumping justifie sa
répression. Cette répression obéit à certaines
conditions déterminées par l'article 5 de la loi de 1998,
relative au dumping211. Les conditions que dégage cet article
sont conformes à celles de l'accord même s'ils ne précisent
pas à partir de quel critère le marché intérieur
peut être considéré comme étant normal. Le
préjudice ainsi exigé peut être éventuel ou
réel, mais il doit être certain sur une branche de production
nationale, ou en retarder le développement. Il doit être personnel
et
210 Le décret d'application n°2005/1362/PM du 06 mai
2005 fixant la composition, les modalités de fonctionnement et de
saisine du comité antidumping et de subvention apporte sur ces points
d'importants éclaircissements à l'article 13 al (1) et (2).
211 La pratique du dumping est interdite « lorsqu'elle
entame le fonctionnement normal du marché intérieur. Soit en
causant ou menaçant de causer un dommage important à la
production nationale, soit en retardant la création d'une production
nationale des produits similaires ou directement concurrents ».
98
réel. La loi définit la branche de production
nationale comme étant l'ensemble des producteurs nationaux des produits
similaires dont les productions additionnées constituent une proportion
majeure de la production nationale totale de ces produits. Le décret
n° 2005/1362 précise que la proportion est au moins de
25%.212 De même définit-elle en son article 13 (2), la
notion de produit similaire. Il s'agit en effet d'après ladite loi de
produits identiques, semblables à tous égards aux produits
considérés ou, en l'absence d'un tel produit, tout autre produit
non semblable à tous égards présentant les
caractéristiques similaires. Cette conception apparaît comme une
contribution majeure du législateur camerounais, à la recherche
du critère de similarité si problématique en droit
international économique. Elle ne peut, malheureusement que faire long
feu. Car en effet, il aurait fallu qu'elle intégra dans son champ
sémantique, l'interchangeabilité des produits qui peuvent en
matière d'utilisation se suppléer. L'importance du dumping et
l'effectivité de son caractère dommageable s'apprécient en
fonction de la marge de dumping213 par rapport à la
considération d'un certain nombre d'éléments, au nombre
desquels, la comparaison à un niveau commercial tant avec un prix de
référence à l'exportation du produit similaire vers un
pays tiers, qu'à son coût de production dans les pays d'origine,
majoré des frais généraux et du bénéfice.
Le caractère dommageable du dumping se dégage de
la considération des éléments fondés sur
l'importance et l'évolution du volume des produits, objets de dumping
tel que l'effet desdites importations sur le prix d'un produit similaire ou
l'incidence desdites importations sur la production nationale du fait de leur
subventionnement, ou du fait de leur quantité nuisiblement accrue par
l'Etat importateur.
B- L'INCRIMINATION DES SUBVENTIONS INTERDITES ET
D'IMPORTATIONS EXCESSIVES.
La régulation des prix ne vise pas uniquement la
pratique déloyale des entreprises, elle vise également à
encadrer les pratiques des Etats, découlant d'une manipulation des prix
ou du moins ayant un effet sur les prix. Le but poursuivi est celui de la
prohibition de certaines subventions mais surtout le contrôle des
importations.
212 Article du décret n° 2005/1362.
213 Article 12 du décret 2005/1362 qui définit la
marge de dumping comme la différence établie à un niveau
commercial entre le prix fournisseur étranger et la valeur normale
comparable pratiquée par le fournisseur au cours d'opérations
commerciales normales par un produit de même nature destiné
à la consommation du pays exportateur.
99
1- l'interdiction de subventions nuisibles.
Conformément à l'accord sur les subventions et
les mesures compensatoires de l'OMC, toutes les subventions ne sont pas
interdites. Seules sont prohibées celles ayant un effet
défavorable sur les produits du pays d'accueil du fait de l'écart
des prix entre ce dernier et les produits importés214. Ainsi,
l'article 9 de la loi n°98 relative au dumping et à la
commercialisation des produits d'importation subventionnés conformes
à l'article 5 de l'accord sur les subventions et les mesures
compensatoires, permet à l'Etat d'engager une action contre
l'écoulement d'un produit importé subventionné, lorsque
ladite subvention cause ou menace de causer un dommage à
l'économie nationale. Cependant, seules les subventions nuisibles sont
interdites aussi bien à l'échelle nationale, communautaire
qu'international. Ainsi, un produit certes subventionné mais ne causant
aucun tort à l'économie nationale ne pourrait être
condamné. L'article 10 de la loi n° 98 sus-cité est sans
ambiguïté. Les subventions pouvant donner lieu à une action
contre l'écoulement d'un produit importé sont celles ayant fait
l'objet d'une spécificité au sens des dispositions de l'accord
sur les subventions de l'OMC. Il s'agit notamment des subventions
subordonnées en droit ou en fait, exclusivement ou avec d'autres
conditions, au résultat à l'exportation, les subventions
subordonnées exclusivement ou avec d'autres conditions à
l'utilisation des produits nationaux, de préférence à des
produits importés, et enfin, des subventions accordées
expressément à certaines entreprises par les pouvoirs publics.
2- La prohibition des subventions excessives
nuisibles.
Sous réserve de quelques mesures prévues soit
par les lois et règlements, soit par les traités et accords
internationaux régulièrement ratifiés par le Cameroun, les
exportations et les importations sont libres215. Ainsi, la mouvance
libre-échangiste a trouvé un écho favorable au Cameroun.
C'est ce qui explique l'envahissement du marché local par les
commerçants étrangers de tous bords. Ces derniers sont libres
d'importer en qualité et en quantité au gré de
214 L'Article 9 de la loi n°98 relative au dumping et la
commercialisation des produits d'importation subventionnés. Dispose que
« lorsque la distribution des produits d'importation subventionnés
causent ou menacent de causer à la production nationale, ou à une
branche de celle-ci, des effets défavorables, consécutifs
à l'écart des prix entre les produits locaux et les produits
importés, un droit compensateur peut être imposé auxdits
produits afin d'annuler ses effets ».
215 Article 42 du décret de 1993 portant application de la
loi régissant l'activité commerciale au Cameroun.
100
leurs intérêts et de leur puissance
économique216. Ainsi, les producteurs étrangers
bénéficient du principe de la liberté de choix des
stratégies de commercialisation. L'exercice de ce principe, peut
favoriser la pratique d'importations en quantité tellement accrue par
rapport à la production nationale qu'elle en désorganiserait le
marché .Il peut causer au passage un dommage grave à la branche
de production nationale des produits similaires ou directement concurrents.
L'article 12 de la loi n°98/012 qui se veut formellement conforme à
l'article 2 de l'accord sur les sauvegardes autant que l'article 13 conforme
à l'alinéa1 (a) dudit accord, dégage le souci de
précision qui anime le législateur camerounais. Ce dernier
définit en effet le dommage grave comme étant une
dégradation générale notable de la situation d'une branche
de production nationale tel que défini à l'article 7 sus
évoqué. Les conditions du dommage grave et du lien de
causalité régit par l'article 18 du décret sont les
mêmes que pour le dumping et les subventions.
Le souci de protection de l'économie nationale
correspond à une fonction d'arbitrage ou de conciliation des
intérêts tant des consommateurs que des producteurs locaux. Ces
derniers en appellent à plus de protectionnisme de l'Etat face à
cette déferlante que constitue pour eux la concurrence internationale.
Le rôle régulateur de l'Etat l'amène à identifier
conformément au cadre normatif des échanges internationaux, le
dumping dommageable, les subventions interdites, et les importations excessives
comme constituant des pratiques orchestrées autant par les Etats que par
les entreprises, nocives à l'économie camerounaise. Toutes choses
qui justifient, une prévision d'un ensemble de mesures de défense
commerciale en vue de sauvegarder l'économie locale.
PARAGRAPHE II : LA PREVISION DE MESURES DE DEFENSE
DE
L'ECONOMIE NATIONALE.
La prolifération de pratiques déloyales de la
société économique internationale justifie la mise sur
pied de mesures de défense commerciale. Ceci se traduit par la mise sur
pied de mesures aussi bien préventives que répressives, tant
normatives qu'organiques. Au Cameroun, cela épouse la forme de la
prévision sur le plan normatif, de mesure de protection
216 Cette situation cristallise l'éternel contraste
entre une libéralisation acceptée par les consommateurs qui en
bénéficient quantitativement et parfois qualitativement, et un
protectionnisme de plus en plus revendiqué par les producteurs locaux
menacés par les affres de la concurrence internationale.
101
de l'économie nationale (A) et sous l'angle organique,
de l'institution d'un organe chargé des enquêtes (B).
A- L'EDICTION DES MESURES PREVENTIVES DE DEFENSE
COMMERCIALES.
Les mesures de défense commerciale prévues dans
les textes de l'OMC et les dispositions communautaires sont reprises dans le
cadre des législations internes217. Ces mesures sont
respectivement ; la pratique du dumping, les subventions interdites et les
importations excessives dommageables à l'économie. Il s'agit de
l'institution des mesures antidumping, de l'imposition de droits compensatoires
et de mesures de sauvegarde.
1- Les mesures antidumping.
Lorsque la pratique du dumping est établie, le ministre
chargé des prix peut instituer pour les produits concernés
conformément à l'article 6 de la loi n°98/012, les droits
antidumping. Ces droits apparaissent comme une mesure de réparation du
dumping dommageable sur la base de la responsabilité découlant de
la théorie de l'abus de droit mais également de la
responsabilité civile délictuelle fondée sur l'article
182. Les droits antidumping peuvent être définitifs ou
provisoires.
Lorsqu'ils sont définitifs, ils doivent être
égaux à la totalité ou à une partie seulement de la
marge de dumping. Ils doivent être recouvrés sans discrimination
sur les importations dudit produit, toute provenance confondue. C'est une
application de la « règle de la non
sélectivité »218 dont le «
principe de sélectivité mesurée
»219 constitue une exception notable.
217 L'article 12 du traité instituant la CEMAC pour des
raisons de balances de paiement des mesures de sauvegarde spéciales ne
pouvant excéder six mois. L'article 12 du code de l'UDEAC reconduit dans
le cadre de la CEMAC prévoie à cet effet l'application des
surtaxes atteignant jusqu'au double des droits du tarif général,
ou égal à la valeur de la marchandise. Sur les importations en
provenance des pays qui appliquent au produit originaire des Etats membres, des
surtaxes ou des droits élevés, ou un traitement moins favorable
que le traitement de la nation la plus favorisée. Des taxes et autres
mesures peuvent être appliquées pour des considérations de
réciprocité.
218 Les mesures ne doivent pas être prises à
l'encontre du seul pays exportateur en cause, dont les importations ont le plus
augmentées, mais à l'ensemble des pays exportateurs dudit
produit.
102
Les droits antidumping restent en vigueur le temps
nécessaire à la neutralisation du dommage causé à
la branche de production même s'il faut s'interroger sur la personne
compétente pour être juge de cette neutralisation. Tout compte
fait, ces droits ne peuvent être appliqués pendant plus de huit
ans à compter de la date à laquelle ils ont été
imposés. Par ailleurs, leur taux ne doit pas dépasser la
différence des prix aux marges de dumping lorsque ce droit suffit
à le faire disparaître conformément à la
règle « du moindre droit »
dégagé par l'article 9 alinéa (1) de l'accord et
fondé dans le cadre interne par l'article 6 alinéa (3) de la loi
n°98/013 régissant l'activité commerciale au Cameroun.
Les mesures antidumping provisoires sont une innovation
majeure du décret n°2005/1362/PM du 06 mai 2005 fixant la
composition et les modalités de fonctionnement du Comité
antidumping et des subventions. Elles semblaient en effet nécessaires.
Leur fixation obéit à une triple condition et épouse des
formes variées. Elles peuvent être suspendues lorsque
l'exportateur ou les pouvoirs publics du pays d'origine prennent l'engagement
d'éliminer les effets défavorables du dumping ou à
augmenter les prix de manière satisfaisante ou encore à ne plus
exporter vers le pays lésé.
Lorsqu'ils sont définitifs les droits antidumping sont
consécutifs à une enquête effectuée
préalablement par le Comité antidumping et des subventions.
L'enquête est déclenchée par le Comité, au moyen
d'une requête écrite de l'ensemble des producteurs nationaux des
produits mis en cause ou ceux d'entre eux dont la production représente
au moins 25% de la production nationale ainsi que toute association
professionnelle légalement reconnue représentant les
filières concernées ou à la demande du ministère
chargé du commerce. La requête est adressée au
président du Comité, avec copie à l'exportateur
incriminé et aux autorités compétentes. Ladite
requête précise tous les éléments d'informations
nécessaires, à l'appréciation des faits incriminés
et du dommage subi. Il faudrait cependant signaler que ces droits font l'objet
de plus en plus de possibilités de contournements tels que l'assemblage
du produit dans un pays intermédiaire à celui qui a engagé
la plainte. Ces possibilités font heureusement déjà
l'objet de nombreuses mesures anti-contournement.
219 La sélectivité mesurée apparaît
comme une exception au principe de non sélectivité permettant que
des mesures soient prises à l'encontre du seul Etat dont les
importations du produit ont le plus augmentées lorsqu'il est
établit que ces importations ont augmenté de façon
disproportionnée par rapport à l'ensemble des importations
d'origines différentes du même produit sur la période
considérée.
103
Mesures d'urgence contre une manipulation déloyale des
prix du fait de la libéralisation, les droits antidumping jamais
activés au Cameroun n'en restent pas moins une mesure de défense
commerciale légalement prévue au même titre que les droits
compensatoires et les mesures de sauvegardes.
2- Les droits compensatoires et les mesures de
sauvegarde.
Ces deux mesures ont en commun d'être des manoeuvres
étatiques. Elles donnent lieu à l'imposition de droits
antisubventions et à l'application des mesures de sauvegarde.
a- L'imposition des droits
antisubventions.
L'article 9 de la loi n°98/012 conforme à
l'article 5 de l'accord de Marrakech sur les subventions prévoit
l'imposition des mesures de sauvegarde dans les conditions sus
évoquées. Cependant, il faut relever que conformément aux
articles 12 du GATT de 1994 une procédure amiable avec le pays
exportateur doit être engagée. Cette exigence a été
prise en compte par le décret n°2005/1362 contrairement à la
loi n°98/012 (article 21). Cette procédure amiable conditionne
toute saisine de l'Organe de Règlement des Différends (ORD) de
l'Organisation Mondiale du Commerce. Lorsqu'elle aboutit à un
arrangement entre les deux Etats, l'ORD ne peut donc être saisie. Ceci
peut être le cas lorsque l'Etat exportateur s'engage à ne plus
subventionner ses produits ou à les limiter à défaut de
les réviser dans le but de faire disparaître l'effet dommageable
de la subvention.
Une fois saisie, l'ORD met sur pied un groupe spécial
chargé notamment de prendre toutes les mesures appropriées pour
éliminer les effets défavorables, ou retirer la subvention. A
défaut, il autorise le plaignant à prendre les mesures
demandées.
Il est important de souligner l'existence désormais en
droit camerounais220, de mesures provisoires conformément aux
règles de l'OMC venant combler le vide qui y était patent jusque
là. Ces mesures provisoires répondent aux mêmes conditions
et à la même nature qu'en ce qui concerne les droits antidumping.
Pour ce qui est des mesures définitives, elles sont conditionnées
par le caractère positif des résultats de l'enquête.
L'existence de la subvention autant que son caractère dommageable
doivent être établis. Le droit compensateur
220 Chapitre 4 du décret n° 2005/1362, Section I.
104
doit être égal à la totalité ou
à une partie de la subvention. Il ne reste en vigueur que le temps
nécessaire à la neutralisation du dommage causé à
la branche de production. Il ne peut en aucun cas être appliqué
à plus de huit ans à compter de la date à laquelle il a
été imposé. L'article 19, alinéa 2 de l'accord sur
les subventions soumet également les droits compensateurs «
à la règle du moindre coût »
même s'il faut reconnaître en pareille hypothèse que leur
efficacité risque d'en être considérablement
affectée. Le préjudice pouvant regrettablement s'avérer
plus grand que lesdits droits dans ces conditions.
b- L'application des mesures de
sauvegarde
L'article 7 de la loi n°90/031 de 1990régissant
l'activité commerciale au Cameroun prévoyait déjà
en son alinéa (b) qu' « afin de permettre le
développement ou le maintien des activités de production,
particulièrement exposée à la concurrence déloyale
internationale, des mesures de sauvegarde peuvent être prises par voie
réglementaire concernant les produits similaires à ceux
fabriqués au Cameroun ». L'article 12 de la loi de
1998 va dans le même sens221. Les mesures de sauvegarde ne
font pas l'objet d'une liste définitive, ni totale. Elles sont
également consécutives à une enquête
préalable du Comité et obéissent à toutes les
conditions de forme et de fond connues pour les droits antidumping et pour les
droits compensatoires. Elles sont également soumises à la
règle de non sélectivité. Les mesures de sauvegarde
peuvent être définitives ou provisoires. Lorsqu'elles sont
provisoires, elles épousent une majoration des droits provisoires ne
pouvant excéder six mois et devant être remboursées si les
résultats de l'enquête, ne confirment pas que le dommage grave
causé ou menaçant d'être causé à la branche
de production nationale est consécutif à l'accroissement des
importations. Au cas contraire les mesures de sauvegarde définitives
sont prises sous forme de restriction quantitative, de suspension de
concessions ou autres obligations. Elles ne peuvent dans tous les cas
être appliquées que pour la période nécessaire, pour
prévenir ou réparer le dommage grave et faciliter l'ajustement de
la branche de production nationale en cause. Même s'il convient de
s'interroger sur l'objectivité des Etats, seul juge dudit état de
nécessité. L'application ne peut aller au delà de huit ans
(08). La levée d'une mesure provisoire se fait de manière
progressive et à intervalle régulier. L'article 21 exclut du
221 Article 12 de la loi n°98/012 « lorsqu'un
produit importé en quantité accrue par rapport à la
production nationale, cause ou menace de causer un dommage grave à la
branche nationale des produits similaires ou directement concurrents, des
mesures de sauvegarde notamment une restriction quantitative ou une suspension
des concessions ou d'autres obligations peuvent être appliquées
à ce produit, conformément de l'accord de l'OMC sur les
sauvegarde »
105
bénéfice d'une nouvelle mesure de sauvegarde sur
un produit en ayant déjà fait l'objet avant une période de
deux (02) ans suivant la levée de la première mesure. Ceci
apparaît comme une limitation injustifiée et dangereuse parce que
favorisant la récidive entre temps de l'exportateur avisé.
L'édiction des ces différentes mesures de
défense commerciales apparaît comme une action préventive
de protection de l'économie nationale vis-à-vis des pratiques
déloyales tant des Etats que des entreprises. L'activation de ces
mesures dépend toutefois des conclusions, des enquêtes et des
examens menés par ce qui apparaît comme une mesure de
défense commerciale de nature organique : le Comité antidumping
et des subventions.
B- L'INSTITUTION D'UN COMITE ANTIDUMPING ET DES
SUBVENTIONS
L'institution de ce Comité par l'article 22 de la loi
n°98/012 apparaît comme une mesure régulatoire allant dans le
sens de la surveillance, certes a posteriori, de la pratique déloyale
des Etats. En effet, après le rôle et la place non moins
importante des structures des douanes, du Guichet unique et de la
Société Générale de Surveillance (SGS), il s'est
avéré nécessaire d'instituer un organe consultatif pouvant
permettre à l'Etat d'avoir une lecture globale du processus
économique depuis l'accès au marché jusqu'à la
commercialisation des produits en vue de lutter contre les pratiques
déloyales des acteurs économiques internationaux. L'analyse du
régime juridique de cette structure permet de mieux en dégager la
portée.
1- Le régime juridique du
Comité.
Régi par le décret n°2005/1362/PM du 06 mai
2005 en fixant la composition et les modalités de fonctionnement, le
Comité antidumping et de subvention est un organe consultatif
chargé exclusivement d'émettre des avis sur les pratiques de
dumping, les dossiers relatifs aux subventions ou aux importations, causant ou
menaçant de causer un dommage grave à une branche de production
nationale. A cet effet, le Comité obéit à une certaine
composition et fonctionne selon des modalités
réglementées.
Du point de vue de sa composition, le Comité est
présidé par le ministre en charge des prix ou son
représentant. Il est composé de seize (16) membres permanents
représentant l'administration publique, le secteur privé et la
société civile organisée. Des personnes
106
morales et physiques tant internes qu'internationales peuvent
également y être associées en fonction de la
spécificité des problèmes dont le Comité est saisi
et de leur expertise technique ou financière. Ces derniers
relèvent de la discrétion du Président. Ils assistent aux
travaux avec voix délibérative. La composition du Comité
est constatée par arrêté du ministre chargé des
prix. Le Comité est assisté d'un Secrétariat assuré
par un haut fonctionnaire désigné par le ministre chargé
des prix. Les modalités d'assistance de ce secrétariat dans
l'accomplissement des missions du Comité n'ont cependant pas
été précisées.
Pour ce qui est de son fonctionnement, le Comité peut
être saisi par requête écrite de l'ensemble des producteurs
nationaux des produits mis en cause, ou ceux d'entre eux dont la production
représente au moins 25% de la production nationale, les associations
professionnelles légalement reconnues représentant la
filière concernée ainsi que le ministre chargé du commerce
ou des prix. La requête est adressée au président du
Comité avec copie à l'exportateur incriminé et aux
autorités compétentes. Tous les éléments
d'informations nécessaires à l'appréciation des faits
incriminés et du préjudice subit autant que les justificatifs et
les éléments de preuves énumérés par
l'article 9 alinéa (2) de la loi n°98/012 sur le dumping et la
commercialisation des produits d'importation subventionnés doivent
être précisés. L'activité fondamentale du
Comité est donc de mener des enquêtes dans le but de rechercher
les éléments d'appréciation d'un dommage ou de ses effets
dommageables sur la production nationale ou à une branche de celle-ci.
Dans ce cadre, les enquêteurs du Comité bénéficient
d'un certain nombre de pouvoirs, à savoir le droit à la
communication de tout document professionnel, le droit d'accès à
tout local d'usage professionnel en vue d'y recueillir les renseignements
recherchés conformément à la législation en
vigueur. En bref, le Comité jouit des attributs d'un pouvoir
inquisitorial et d'investigation sous le respect de la légalité.
Les enquêtes du Comité respectent d'ailleurs le principe du
contradictoire222. Le Comité a un devoir de communication qui
l'oblige à publier la couverture d'enquête ainsi que les rapports
desdites enquêtes au moyen des avis au public, de même qu'à
fournir à toute personne intéressée tout renseignement
exigé. Les dépenses de fonctionnement du Comité sont
inscrites au budget du ministère chargé des prix, lequel
ministère adresse au Premier Ministre un rapport d'activités sur
le fonctionnement du Comité à la fin de chaque exercice.
222 Toutes les parties peuvent être attendues par le
comité au cours de confrontations organisées à cet effet.
Le Comité permet également au pays exportateur de
présenter par écrit les éléments de preuves qu'il
jugera pertinent dans un délai légalement
déterminé.
107
La nature juridique, la composition et les modalités de
fonctionnement du Comité ainsi déterminé au regard
particulièrement de ses rapports avec l'administration centrale
suscitent quelques réflexions sur sa portée réelle.
2- La portée relative du
Comité.
S'il semble hâtif au regard de sa nouveauté,
d'essayer d'évaluer la portée du Comité antidumping et des
subventions, il n'en demeure pas moins que les textes qui l'instituent, offrent
de réelles raisons d'interrogations. Trouver que cette portée est
relative, revient à reconnaître que les missions qu'elle a,
pourraient avoir une incidence certaine pour la défense commerciale
à condition que soit levé un certain nombre de
préoccupations sur son organisation et ses modalités de
fonctionnement.
Il faudrait en effet se rappeler que le Comité a
été mis sur pied le 1er novembre 2006. Il ne s'est
pourtant pas encore réuni jusqu'ici. Cette ineffectivité
n'illustre en fait qu'une part de son inefficacité consubstantielle. Les
fonctions assignées au Comité semblent limitatives de l'objectif
réellement recherché par son institution. L'esprit
général ayant présidé à la création
de cet organisme par la loi sus citée aurait en réalité
justifié la mise sur pied d'un organisme totalement indépendant
et non rattaché à l'administration centrale. Or la
dépendance financière de la structure à l'administration
centrale des prix est patente et elle fonde des suspicions sur cet organisme.
C'est l'efficacité du Comité qui s'en trouve limitée. Sous
cet angle, le pouvoir inquisitorial dont bénéficie cet organisme
ne s'explique point. En fait, le Comité aurait été
indépendant, qu'au-delà de ses simples fonctions consultatives,
il aurait pu être doté d'un pouvoir de décision et
même de sanction. Sous cette optique, le Comité aurait pu
également bénéficié d'un pouvoir d'auto-saisine. Ce
qui lui aurait permis d'assurer une fonction de surveillance permanente de la
situation des prix, sans être conditionné et donc limité
par l'exigence d'une saisine préalable. Cet ensemble d'hypothèses
permettrait de prévenir, de réagir ou d'alerter à temps
les pouvoirs publics afin que les mesures provisoires puissent être
préventives, et donc davantage, opportunes.
Le Comité présente également quelques
risques de dysfonctionnement par le nombre assez élevé de ses
membres, ensuite par leur nature et leurs intérêts
substantiellement contradictoires, et enfin, par des lourdeurs et lenteurs dans
l'action. Il s'avère par ailleurs nécessaire de fixer un
siège permanent et des commissions spécialisées
chargées respectivement des questions de dumping, de subventions et
d'importations fonctionnant
108
également de manière permanente. Ce n'est que
sous ces conditions limitativement évoquées que le Comité
pourrait être efficace et efficient.
La régulation des prix apparaît ainsi comme un
impératif non seulement étatique, mais aussi et surtout collectif
de préservation de l'intérêt général, en
termes de protection de la production nationale ou des branches de celle-ci
à travers l'incrimination des pratiques déloyales des agents
économiques mais aussi au moyen de la prévision des mesures de
défense commerciales. Cette mobilisation normative et institutionnelle
doit pour le moins être conforme aux règles du commerce
international.
Mouvement conciliatoire d'intérêts antagonistes
par excellence, la régulation en général et celle des prix
en particulier, apparaît comme un corollaire de la
déréglementation des prix. Elle tire ses justifications du devoir
de protection étatique tant des intérêts particuliers, que
de préservation de l'intérêt général en
matière économique et commerciale. En cela «
elle créé les conditions d'une conciliation de
l'intérêt général avec le marché, voire d'une
substitution à celui-ci lorsqu'il est défaillant ou
court-termiste »223. Cette protection
apparaît comme le substratum idéologique, théorique et
téléologique de toute action de l'Etat en matière de prix,
dans un contexte consacré, de libertés de prix. Mais cela semble
davantage l'expression de ce qu'en réalité, l'Etat ne s'est
jamais retiré et ne le fera sûrement jamais. Seules la marge, la
nature et surtout la forme de sa présence et de son action se trouvent
transformées dans un souci d'adaptation à une donne
libérale contrastant avec la pérennité, et même, le
renforcement de ses devoirs. Ce souci d'adaptation des moyens à un
contexte dynamique, par rapport à une finalité restée
statique, ne pouvait qu'aboutir à ce mouvement régulatoire,
caractérisé par une approche fortement participative dont on a
peine à capter l'étendue des manifestations tant sur l'angle
général que pour ce qui concerne spécifiquement les prix
au Cameroun.
223 COLSON (JP), Droit public économique,
Op-Cit, P4.
109
CHAPITRE II LES MANISFESTATIONS DE LA REGULATION
DES PRIX
Le sempiternel challenge entre l'ordre étatique et ce
qu'on a appelé l'ordre du Marché ne s'est jamais
soldé par la victoire de l'un ni par l'échec de l'autre. Cette
confrontation a plutôt abouti à l'avènement d'un ordre
hybride, mi-étatique, mi-libéral à savoir l'ordre
régulatoire224. Ainsi, loin de se retirer, l'Etat a vu son
action se transformer en
224 MOHAMED MAHMOUD MOHAMED SALAH Op. Cit. PP. 261-289.
110
vue de la prise en compte de nouvelles exigences et des
acteurs du marché225. La régulation se pose et
s'impose actuellement comme la forme la plus appropriée d'encadrement
social favorisant une flexibilisation poussée du cadre normatif et
institutionnel226. En effet, les sphères de prise de
décision permettent désormais l'adhésion d'autres forces
génitrices sinon interprétatrices du droit227. Le
phénomène de naturalisation, c'est-à-dire de positivation
de ce droit naturel s'en trouve accentué228 d'autant plus
qu'il ne s'agit pas d'écarter le droit pour le remplacer par les
considérations expurgées de toute essence juridique, mais
plutôt de « renforcer le droit en se débarrassant
des risques de ses effets pervers »229 pouvant
rendre inefficace son application du fait d'une non-adaptation aux
réalités socioéconomiques d'un monde de plus en plus -
voire - inexorablement libéral.
La régulation est caractérisée
essentiellement par la logique de la participation et du réseau au
détriment de la logique de la hiérarchie. Elle apparaît en
fait comme une technique de gouvernance économique opérant une
distribution des rôles entre l'Etat et moult d'autres forces du
marché. Le droit devenant dynamique en fonction des changements sociaux.
C'est une expression « du moins - mieux d'Etat
» réaffirmant le rôle essentiel de l'Etat pour
la promotion du développement économique et social230
mais insistant sur le fait que ce rôle ne peut plus lui être
exclusif.
En matière de prix particulièrement, cette
ouverture s'observe autant par le déploiement d'institutions multiformes
issues d'un mouvement de démocratisation de l'encadrement des prix
(section1), que par le développement d'opérations multiples et
variées en matière de prix ; illustration parfaite de la
flexibilisation de leur encadrement (section 2).
SECTION I LA MULTILATERALISATION DE L'ENCADREMENT DES
PRIX
L'optique d'un réel partenariat entre l'Etat et les
autres acteurs du marché trouve un écho favorable en
matière de prix au Cameroun. L'ouverture à la participation
d'autres entités
225 CHAVALLIER (J), « Vers un droit post modèle ?
Les transformations de la régulation juridique », RDP, LGDJ,
Mai-Juin 1998 Paris, P. 660.
226 Idem, P.269. Cette flexibilisation se traduit sur le plan
normatif par une prolifération de code, de charte, de contrat, au
détriment de textes normatifs plus fermement contraignants.
227 CHEVALLIER (J), Op. Cit. P. 673.
228 MEBENGA (M), Op. Cit. P. 78 et suivant.
229 CROZIER (M), « Le problèmes de la
régulation dans la société complexe moderne » In
CHAZEL (F) et COMMAILLE (j), (Ss Dir) normes juridiques et régulations
sociales. LGDJ Paris, 1991, P. 135.
230 Article 2 de la charte des investissements.
111
s'illustre aussi bien par le déploiement d'acteurs
étatiques (paragraphe I) que para et non étatiques (paragraphe
II) dans l'encadrement des prix.
PARAGRAPHE I : LA MOBILISATION D'INSTITUTIONS
PUBLIQUES231
Les institutions publiques chargées de la
régulation des prix recouvrent non seulement l'administration
économique compétente à titre général ou
spécial en matière de prix (A) mais aussi, la justice des prix
(B).
A- L'ADMINISTRATION DES PRIX
L'organisation économique de l'Etat permet en effet de
dégager l'existence d'une administration des prix232. Cette
administration permettant de distinguer autant les institutions-personnes que
les institutions-organes ; se décline en administration centrale et
administration périphérique des prix.
1- L'administration centrale
L'administration centrale des prix est soit politique, soit
technique.
a- L'administration politique
Il s'agit des autorités politiques notamment le
Président de la République, le Gouvernement à travers son
Chef, et le Conseil Economique et Social (CES).
Le Président de la République est le Chef de
l'administration économique de l'Etat233. Il dispose à
cet effet de nombreux pouvoirs tant implicites qu'explicites. Les
231 Seront considérés dans le cadre de cette
recherche comme institutions publiques toutes celles relevant de l'Etat en tant
que personne morale de droit public
232 ORSONI (G), L'administration de l'économie, LGDJ,
Paris, 1995. P. 183 et svtes. 233MOMO (B), Op. Cit. P. 12.
112
pouvoirs explicites découlent de l'article 5,
alinéa 1 de la loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996 qui
reconnaît au Président de la République le pouvoir de
conception de la politique de la nation y compris donc en matière
économique. Il peut en plus se substituer au pouvoir législatif
en vertu de l'article 28. De même peut-il directement empêcher au
parlement d'arriver à faire passer une loi en matière
économique à travers le pouvoir discrétionnaire dont-il
bénéficie du fait de la promulgation des lois234 . Le
Président de la République peut influencer sur les prix par son
seul pouvoir financier et budgétaire235. Par ailleurs, les
grandes lignes du programme économique social et financier
présenté par le Premier Ministre à l'occasion des sessions
budgétaires du parlement sont tracées par le Président de
la République. Faut-il rappeler en plus que le régime
général des prix au Cameroun repose sur une ordonnance ?
L'analyse des pouvoirs économiques du Président de la
République a amené le Dr Bernard MOMO à dégager les
pouvoirs implicites qu'il détient en la matière236.
Le Premier Ministre joue un rôle primordial en
matière économique qui pourrait amener dans une certaine
interprétation, à le considérer comme l'autorité
des prix. Son pouvoir, tant hiérarchique que tutélaire sur les
institutions chargées des prix, lui confère en effet
d'énormes prérogatives en la matière237. Il
coordonne par ailleurs l'action du gouvernement et donc, des
départements ministériels en charge des prix ou concernés
par les prix. Son pouvoir réglementaire permet d'évoquer nombre
de textes juridiques238 . Il veille sur l'efficacité de
l'administration technique des prix, au côté du Conseil
économique et social.
Le Conseil économique et social (CES) est un organe
consultatif en matière économique et social,
constitutionnellement institué. Il est composé de 45 membres
désignés par le Président de la République qui en
détermine également le programme de travail. Ses membres
représentent divers secteurs et diverses sensibilités de la
nation. Le Conseil
234 Cependant, le Président de l'Assemblée
Nationale peut en vertu de l'article 31, alinéa 2 de la loi
constitutionnelle du 18 Janvier 1996, se substituer au Président de la
République après avoir constaté sa carence. Il faudrait
souligner ici que ce pouvoir n' »est en fait qu'une faculté mais
aussi que la constitution n'a pas précisée les conditions
à partir desquelles l constat de la carence du Président de la
République devrait être opérée. Ceci dénote
d'un vide juridique expressément ou inconsciemment orchestré par
le législateur constitutionnel de 1996.
235 Cela a été par exemple le cas, ou du moins
l'objectif de l'ordonnance N°2006/001 du 28 Septembre 2006, portant
révision de la fiscalité applicable à certains produits de
première nécessité, avec répercutions sur les prix
desdits produits sur le marché.
236 Dans le cadre de la présidence du conseil des
Ministres, des messages à la nation, de la réfection des
délégations étrangères des bailleurs de fonds, de
la représentation de l'Etat auprès d'organisation internationale
à vocation économique. Pour ce faire, le Président de la
République dispose des services internes et rattachés. MOMO (B),
Op. Cit. P. 13 et svtes.
237 Ces institutions doivent généralement lui
dresser un rapport en fin d'exercice avec un volet important sur
l'évolution les litiges ou les problèmes liés au prix.
238 Entre autres, décret N° 93/720/PM du 22
Novembre 1993, fixant les modalités d'application de la loi
régissant l'activité commerciale au Cameroun. Décret
N° 2005/1362/PM du 06 Mai 2005 fixant la composition, des modalités
de fonctionnement et de saisine du comité antidumping et des
subventions. Décret N° 2005/1363/PM du 06 Mai 2005 fixant la
composition et les modalités de fonctionnement de la Commission
Nationale de la Concurrence etc....
113
économique et social fonctionne en sections, au nombre
desquelles la section économique qui y occupe une place centrale, bien
que ses avis ne lient ni le Gouvernement, ni le parlement239. Le CES
exerce également une fonction quasi-contentieuse en matière
économique. Ses avis, quels qu'en soient les cas, restent d'une
importance certaine dans l'encadrement des prix au même titre que les
institutions de l'administration technique.
b- L'administration technique
Parler d'administration technique revient à
évoquer les départements ministériels directement ou
même incidemment concernés par les prix au Cameroun. Il s'agit de
ceux chargés principalement de mettre en oeuvre les orientations donner
par l'administration politique en la matière. Sous ce dernier registre,
il convient de relever la prépondérance du ministère en
charge du Commerce240, sans toutefois négliger la place
importante des autres départements ministériels dont le
rôle n'est pas moins important dans la régulation des prix. Il
faudrait à cet effet, reconnaître à la suite du Dr Bernard
MOMO, citant Monsieur De LAUBADERE que «Tous les
Ministères présentent un aspect économique
»241 et par ricochet, sont concernés
directement ou indirectement par les prix. C'est d'ailleurs ce qui explique que
les commissions des Comités tournant autour de la gestion des
problèmes du prix ont généralement une composition
interministérielle. Le Conseil des Ministres, formation
interministériel par excellence, constitue également une
structure centrale d'encadrement des prix à cet égard.
2- L'administration
périphérique
239 Le Dr Bernard MOMO souligne que le CES « offre le moyen
au pouvoir public de connaître le point de vue de chacune des grandes
catégories professionnelles. Il est le lieu de confrontation des points
de vue et de rencontres des personnes de différentes horizons»
Op.Cit P.26.
240 La relative instabilité de l'organisation et de la
nomenclature des institutions gouvernementales dans le temps ne rend cependant
pas facile toute tentative de classification ou de hiérarchisation des
départements ministériels concernés par la
problématique du prix. Le Ministère chargé des prix a en
effet changé de casquette entre le Ministère du
Développement Industriel (MINDIC) et le MINEFI Ministère de
l'Economie et des Finances.
241 MOMO (B), Op. Cit. P.16.
114
Suivant que le rôle des institutions centrales est
fondé sur un pouvoir hiérarchique, ou de tutelle, les
institutions périphériques en charge des prix sont
déconcentrées ou décentralisées.
a- L'administration
déconcentrée
La déconcentration de l'administration des prix est
soit technique, soit territoriale. Sur le plan horizontal, il faut noter la
fonction des services provinciaux et départementaux qui abritent en leur
sein des brigades de contrôle des fraudes commerciales. La
déconcentration verticale quant à elle permet d'évoquer
ici le rôle des gouverneurs de province et celui des Préfets dans
la procédure par exemple d'homologation préalable des prix. Les
commissions des prix tant centrales que provinciales participaient de ce qui
aurait pu être appelée une déconcentration technique
spécialisée242, malgré le fait que leur
mode de fonctionnement aurait pu militer en faveur de leur classification au
sein des structures publiques décentralisées chargées des
prix à titre principal ou accessoire. A côté de ces deux
commissions, qui n'existent plus, il existe aujourd'hui les commissions
spéciales prévues par l'article 3 de l'ordonnance et
organisées par décret. Tel est le cas de la commission
spéciale et nationale du médicament chargée de
l'homologation et de la mise sur le marché des produits
pharmaceutiques243
b- L'administration
décentralisée
Il s'agit à ce niveau de mettre en évidence
l'action d'organes plus ou moins rattachés à l'Etat, mais
jouissant d'une autonomie fonctionnelle et financière. Ces structures
exercent généralement une fonction consultative en matière
des prix. Certaines agissent cependant de façon directe sur les prix.
Au nombre des structures agissant directement sur les prix, la
Caisse de stabilisation des prix des hydrocarbures (CSPH) occupe une place de
choix. Etablissement public crée par
242 En effet, elles ne sauraient relever de la
décentralisation malgré leur spécialisation ; parce que
relevant directement du département ministériel en charge des
prix. Il s'agit d'organe technique respectivement chargé d'assister le
Ministre du commerce et le Gouverneur dans l'application de la politique
gouvernementale des prix, en proposant des mesures sur l'orientation de ladite
politique et en donnant obligatoirement leurs avis pour l'homologation des
prix
243 Cf. Loi N°90/035 du 10 Août 1990, relative
à l'exercice de la profession de Pharmacien. Décret
n°88/465/PM du 22 octobre 1998 fixant les modalités d'homologation
et de mise sur le marché des produits pharmaceutiques.
115
décret N°74/458 du 10 Mai 1974 et
réorganisé par décret présidentiel N°98/165 du
26 Août 1978, la CSPH est chargée d'une mission spécifique
de régulation des prix des produits pétroliers en vue d'assurer
la sécurité du consommateur face aux fluctuations des cours sur
le marché international des produits pétroliers244.
L'objectif primordial de la Caisse est donc la lutte contre l'inflation. Sa
tutelle est assurée par le Ministère en charge des prix. Cet
organisme joue également un rôle d'arbitrage entre les acteurs du
secteur et le règlement pré juridictionnel des conflits. La CSPH
gagnerait en inefficacité si elle ne pouvait s'en tenir qu'à son
rôle de régulateur rendu nécessaire après le vaste
mouvement de libéralisation du secteur des produits pétroliers
opérés depuis les années 1990245.
La libéralisation des prix a justifié la
suppression de plusieurs Caisses de stabilisation ou du moins leur
réorganisation. Tel a été le cas dans le domaine du
café et du cacao en particulier du secteur agricole en
général246.
Sous le même registre, doivent être pris en compte
les institutions telles que les agences de régulation qui jouent un
rôle très important en matière de régulation de la
concurrence et des prix ou tarifs des produits et services dans les domaines
dont ils ont spécifiquement247 la charge. Il faudrait
également évoquer ici l'existence des structures spéciales
compétentes en matière de prix tels que l'Observatoire du prix du
médicament, les Brigades spéciales de contrôle des prix des
logements universitaires248.
Les structures décentralisées
expressément constituées en matière des prix sont
légion. Il s'agit en majorité de commissions, de Comités
tripartites ou paritaires. Certaines ont une nature publique à l'instar
de l'Institut National de la Statistique (INS) qui fournit des
244 Elle prend en charge partiellement ou totalement les
augmentations des prix dans la mesure des ses possibilités
financières et intervient subsidiairement dans toutes les
opérations de nature à stabiliser les prix et à les
péréquer
245 Ce secteur était des plus monopolistiques. Le
régime des prix des produits pétroliers était soumis
à un système d »'homologation et de fixation administrative
des marges bénéficiaires. Depuis les années 1990,
plusieurs mesures de libéralisation a ont été prises : La
démonopolisation de la Société Nationale des Hydrocarbures
de la (SNH) en matière de livraison du pétrole brute à la
Société Nationale de Raffinage (SONARA) et l'élimination
de la subvention associée à cette livraison en 1995 ;
l'élimination du monopole de la SONARA en matière de fourniture
de produits pétroliers au marché local du fait d »'une
libéralisation progressive des importations depuis le 1er
Juillet 1998 ; l'élimination du monopole de la Société
Camerounaise des Dépôts Pétroliers (SCDP) en matière
de stockage des produits pétroliers en 1998, et la libéralisation
des prix et des marges de distribution des produits pétroliers depuis le
1er Juillet 1999 et enfin d'importantes modifications au niveau de
la fiscalité pétrolière allant dans le même sens.
Toute chose justifiant la création d'un organe de régulation tel
que la CSPH.
246 (L'ONCPB), l'Office National de Commercialisation des
Produits de Base a été liquidé et remplacé en
matière de cacao et du café par l'ONCC (Office National du Cacao
et du Café) et la CICC (Commission Interprofessionnelle du Cacao et du
Café) qui conjuguent leur effort avec la Société de
Développement du Cacao (SODECAO) Lire pour d'amples
développements TOUNA MAMA (Ss. Dir Op. Cit. P.66 et svtes.
247 Agence de Régulation du Secteur de
l'Electricité (ARSEL), Agence de Régulation des
Télécommunications (ART) Autorités portuaires...etc.
248 Arrêté préfectoral
N°0083/AP/JOT/BRP/2 du 13 Juin 2007 constatant la composition de l'antenne
locale de la brigade spéciale des logements d'étudiants de
l'Université de Yaoundé II à SOA.
116
renseignements statistiques aux services centraux et
déconcentrés du ministère en charge des prix dans le cadre
de la surveillance ou de la maîtrise du marché en
général, et spécifiquement de la lutte contre
l'inflation.
A côté de cette structure, doit être
évoquée la chambre de commerce, d'industrie et des mines du
Cameroun rebaptisée en 2001 « Chambre de commerce,
d'industrie, des mines et de l'artisanat » en
abrégé CCIMA249. Assurant des missions
d'intérêt professionnels et des missions de service public en tant
qu'organe de liaison entre l'Etat et les milieux d'affaires privé dans
plusieurs domaines économiques, la CCIMA est placée sous la
tutelle du Ministère du commerce. Elle a un pouvoir d'enquête
économique et elle doit, d'une manière générale,
émettre des avis sur toutes les questions intéressant
l'économie nationale .Cette structure participe aux rencontres des
commissions et Comités auquel le secteur privé est
impliqué. C'est d'ailleurs à ce titre qu'elle assure la
coordination de la participation du secteur privé au Comité
interministériel élargie au secteur privé (CIESP).
La régulation des prix se caractérise ainsi par
l'éclatement de l'administration publique des prix en diverses
institutions plus ou moins directement compétentes en la matière.
Elle ne s'incarne pas uniquement dans ces structures non contentieuses. Elle
épouse aussi les contours d'une justice des prix.
B- LA JUSTICE DES PRIX
La justice des prix renvoie à l'ensemble des
institutions tant judiciaires que non judiciaires chargées de trancher
les litiges relatifs aux prix. Elle procède d'une juridictionnalisation
du prix et pose le problème de l'identification du juge des prix puisque
ce dernier partage cette fonction avec de nombreuses structures à
vocation juridictionnelle.
1- Le juge des prix
L'identification du juge des prix permet de mieux
délimiter ses pouvoirs.
249 Article2 du décret N° 2001/380 du 27 Novembre
2001 portant changement de nomination et réorganisation de la chambre de
commerce d'industrie et des mines du Cameroun.
117
a- Identification du juge des prix
La notion de juge de prix est un emprunt aux notions
similaires telles que celles de juge de l'impôt, de juge du contrat ou
encore de juge de la concurrence. Elle désigne ici, toute
catégorie de juge incidemment ou directement compétent en
matière de prix. L'intervention du juge pour connaître les litiges
en matière des prix est consacrée depuis 1972250.
Suivant les ordres de juridiction, le juge peut être judiciaire ou
administratif, le juge de droit commun des prix est le juge judiciaire
conformément à l'article 41 de la loi N°90/031
régissant de l'activité commerciale au Cameroun en tant que
composante de la justice commerciale à tous les
degrés251. Il peut être saisi pour plusieurs
causes252. Le juge des prix peut également être le juge
administratif à l'occasion notamment du contentieux de la concurrence ou
des voies de fait administratives. Le juge administratif est donc
compétent en matière de prix de façon incidente.
En dehors de ces aspects internes, le juge des prix peut
également être international, communautaire tel le juge de la cour
commune de justice et d'arbitrage de la CEMAC, le juge dans le cadre de
l'organe de règlement de différends (ORD) ; dans le cadre du
centre international de règlement des différends liés
à l'investissement (CIRDI).
Le juge des prix peut également épouser la forme
d'un arbitre. L'arbitrage est un mode alternatif de règlement des
différends consacré en matière commerciale au Cameroun
tant pour ce qui est du plan international que du plan
interne253.
Il importe de souligner que l'évolution contemporaine
du monde des affaires soumis à de nombreuses mutations juridiques et
économiques, révèle l'incapacité des juges actuels
à s'adapter à la vitesse des exigences de la mondialisation des
échanges. La non appréhension de la complexité du droit
OHADA, est fortement révélatrice de cette incapacité du
juge. D'où une nécessaire spécialisation du juge des
affaires, qui sera à même de résoudre les problèmes
relatifs à des domaines aussi techniques que les prix254. La
création de tribunaux de
250 Article 12 et 14 de l'ordonnance N°72/018 portant
régime général des prix.
251 Lire « la justice commerciale » In NYAMA
(JM), éléments du droit des affaires OHADA Cameroun Op. Cit. PP.
36 à 39
252 Actions civiles en réparation du dommage
causé par l'une des infractions à la loi commerciale.
Défaut ou refus du paiement du prix, défaut ou refus de paiement
d'amende suite à un procès verbal en bonne et due forme de
l'administration, réception de la prestation de serment des agents
assermentés compétents en matière de prix, défaut
de publicité des prix, etc...
253 Articles 11 et 12 de la charte des investissements
254 Il devient tout à fait pratiquement impossible, ou
du moins peut efficace que le même juge connaissant des matières
pénales, criminelles et même administratives se retrouve à
trancher des affaires emprunt de technicité et complexité telle
qu'en matière des prix.
118
commerce, distincts du Tribunal de Grande Instance (TGI) et du
Tribunal de Première Instance (TPI), au premier degré tout au
moins, semble s'imposer comme un impératif de la gouvernance
économique. A défaut, les efforts de formation, de diffusion et
de recyclage en matière de droit Organisation pour l'Harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires. Toutes choses qui rendraient davantage efficaces
les pouvoirs du juge des prix.
b- Les pouvoirs du juge des prix
Comme tout juge, le juge des prix détient
principalement un pouvoir disciplinaire et un pouvoir normateur. Le pouvoir
normateur du juge se dégage de son activité de création
à travers ses décisions dans les matières non
réglementées par le législateur. Son pouvoir disciplinaire
se résume en sa capacité à prononcer des sanctions suivant
le cas. Le titre 5 de l'ordonnance N°72/018 prévoit à cet
effet des sanctions judiciaires. Le juge des prix peut donc appliquer des
sanctions pénales, civiles, privatives de liberté,
pécuniaires, principales ou accessoires prévues par la
législation en vigueur255. La loi régissant
l'activité commerciale au Cameroun en ses articles 38 a
réglementé les sanctions du juge en matière d'infraction
sur les prix. Il faudrait relever qu'en matière de prix, les pouvoirs
des juges sont limités. En premier lieu, le juge ne peut s'auto-saisir
malgré l'abondance du contentieux des prix. En second lieu, l'action du
juge reste dépendante soit de l'aboutissement heureux de la transaction
entre le justiciable et l'administration des prix, soit simplement du paiement
de l'amende contestée. Cet état des choses subordonne le juge
à la volonté de l'administration ou du contrevenant. Mais ce qui
limite davantage le pouvoir du juge des prix, c'est l'action concurrente
d'autres institutions ayant vocation juridictionnelle en matière de
prix.
2- Les institutions à vocation juridictionnelle
en matière de prix
Il s'agit de toute institution ayant un rôle dans la
réalisation de la justice sur les prix. Nombre d'institutions en effet
interviennent dans ce cadre. Elles s'imposent comme auxiliaire du juge ou
à défaut d'en être des concurrents. Ceci permet de
distinguer les institutions pré-juridictionnelles et les institutions
quasi-juridictionnelles.
255 Une panoplie d'articles d'origine diverse fonde en effet
le pouvoir des sanctions du juge. Le code pénal prévoit
l'application suivant les cas, des articles154,155,156,157,216, 252,
256,257,258et 326 en tant que peine principale et les articles
30,34,35,36,37,39, 40 comme peine accessoire.
a- 119
Les institutions
pré-juridictionnelles
Il s'agit d'institutions appelées à agir avant
que le juge n'intervienne ou afin qu'il rende une décision juste. Sous
ce dernier aspect, peuvent être évoqués les Officiers de
Police Judiciaires (OPJ) en tant qu'auxiliaire du juge. Ils peuvent en effet
participer à la constatation des infractions relatives au
prix256 sous réserve de l'exigence d'aviser
immédiatement l'agent assermenté du service de commerce, des prix
ou de la concurrence.
Certains organismes doivent en effet se prononcer avant toute
saisine du juge. Il en est ainsi dans la plupart des cas du Comité
antidumping et des subventions, et de la commission nationale de la
concurrence. Cette institution joue un rôle d'expertise judiciaire en
termes d'assistance du juge à la prise des décisions en
matière de concurrence conformément à l'article 2,
alinéa 3 du décret fixant sa composition et ses modalités
de paiement qui reprend lui-même l'article 28 de la loi relative à
la concurrence. Il faudrait d'ailleurs noter que pour certaines infractions, la
plainte de l'autorité de tutelle doit obligatoirement requérir
l'avis de ladite commission conformément à l'article 18 de la loi
régissant l'activité commerciale au Cameroun. La CNC peut donc,
par l'absence de son avis empêcher la saisine du juge ou la rendre
irrégulière mais également, conditionner la
décision du juge par son expertise257. Dans le même
sillage, il faudrait se souvenir du rôle de la CNPH au sein duquel sont
réglés tous les conflits relatifs aux produits pétroliers
avant tout recours devant les tribunaux. Ces institutions
pré-juridictionnelles, non exhaustivement
énumérées, connaissent la concurrence d'institutions
quasi-juridictionnelles.
b- Les institutions
quasi-juridictionnelles
Ce sont les institutions statutairement habilitées
à trancher les litiges en matière de concurrence et donc
forcément de prix ou de tarif des services. Des structures diverses, ont
été en réalité créées à la
faveur de la libéralisation de l'économie. Elles disposent des
mêmes
256 Article 31, loi N° 90/031.
257 Il faudrait cependant regretter le manque de
précisions du législateur quant aux modalités de cette
assistance judiciaire. Est-elle subordonnée à la demande du juge,
ou des parties au litige ? A-t-elle des axes particuliers ou des
limites ? Est-elle systématique ? Le mutisme de la loi sur ces questions
est autant regrettable que la concurrence de ces fonctions de la CNC, avec
l'action d'autres institutions.
120
prérogatives que le juge. C'est ainsi que la CNC et
l'administration centrale sont chargées de rechercher, de
contrôler et le cas échéant, de poursuivre et de
sanctionner les pratiques anticoncurrentielles. Il s'agit des agences et des
autorités de régulation258 (ARSEL, AER, ART, AACC
etc.). Les agences de régulation ont effet compétence pour
connaître, dans leurs secteurs d'activités respectifs, des
différends nés entre différents agents
économiques.
La CNC entre également dans ce registre ; en tant
qu'organe de règlement des différends sur toute question relative
à la concurrence, au même titre que le juge. Seulement, ses
décisions sont des actes administratifs susceptibles de recours devant
le juge. A ce niveau, la CNC apparaît comme une instance de premier
degré dont les décisions sont connues en appel devant le juge qui
les tranche en premier et dernier ressort. La hiérarchie entre le juge
et la CNC semble donc nette. Reste toutefois à souligner que la saisine
du juge n'est nullement suspensive des injonctions adressées par la CNC.
En plus, au détriment de ce dernier, la CNC jouit d'un pouvoir
d'auto-saisine. Ceci ne peut que créer d'une part des conflits de
compétence entre la CNC et les agences de
régulation259 et entre elle et le juge. La nature tumultueuse
des relations entre ces autorités sectorielles et l'autorité
nationale de la concurrence que constitue la CNC tire ses origines de plusieurs
raisons260. Par rapport au juge, les conflits peuvent
découler de la divergence d'opinion entre ses décisions et celles
des agences de régulation. Mais, tous comptes faits, le juge garde le
dessus puisque connaissant, en appel et en dernier ressort, des
opérations desdites instances.
La multilatéralisation de l'encadrement des prix par la
régulation a ainsi consisté au renforcement, ou mieux, à
la précision du rôle et de la place des institutions publiques,
administratives ou juridictionnelles et même para juridictionnelles en
matière de prix. La marque même de la régulation est
désormais la participation systématique des institutions non
publiques ou quasi-publiques à l'encadrement des prix.
258 Dont la nature juridique a soulevé un controverse
doctrinal sur le plan local .un vrai- faux débat ; puisque le
législateur à pris le soin de déterminer la nature
juridique desdites institutions. En réalité, la doctrine ne peut
créer de catégories juridique ou, ne peut le faire que sous forme
de conjectures ; pour susciter une réaction du législateur ou du
juge .lequel juge ne peut lui-même le faire que lorsque le flou ou le
vide juridique laissé par le législateur l'exige.
259 ESTEGUET (P.E), « Relations entre l'autorité de
concurrence et les instances sectorielles de régulation... »Op.
Cit. 10. P.
260 La CNC est sous tutelle du MINCOMMERCE alors que les
agences sont sous tutelle des Ministères en charge des secteurs
concernés. Les agences sectorielles de régulation sont
financièrement dépendantes des redevances perçues sur le
chiffre d'affaire des opérateur exerçant dans leur secteur il y a
donc conflit d'intérêt dans la mesure où lesdits secteurs
se réduisent dans la plupart des cas en monopole ou en oligopole ; le
caractère récent et donc forcément mal
appréhendé du droit de la concurrence dans le paysage
économique camerounais ; le retard dans la mise en place de la CNC et
surtout l'absence d'un cadre de concertation entre ces différentes
autorités. Lire à ce propos ESTEGUET (P.E), Op.Cit. P.6.
121
PARAGRAPHE II : LA PARTICIPATION D'INSTITUTIONS QUASI
ET NON PUBLIQUES
La distinction privée/publique n'est pas du tout
étanche, il n'en demeure pas moins qu'une classification
académique est généralement opérée, sinon
tolérée, qui permet de distinguer les institutions organiquement
ou fonctionnellement privées de celles dites publiques. Les institutions
privées sont considérées comme celles ne concernant que
les intérêts personnels et particuliers alors que les institutions
publiques sont fondamentalement caractérisées par la recherche de
la satisfaction de l'intérêt général. La
difficulté provient de l'existence de structures ne pouvant être
rigoureusement rattachées à aucune de ces catégories. La
régulation de l'économie en général et celle en
particulier des prix est prolifique de formations participatives dont la nature
juridique reste une énigme parce qu'associant l'Etat et les autres
acteurs sociaux dans le processus d'encadrement (A) et de plus en plus l'Etat
laisse agir des structures avec lesquelles il n'a aucun lien (B).
A- LA PROLIFERATION D'INSTITUTIONS DE COLLABORATION DE
NATURE HYBRIDE
En matière d'encadrement des prix, l'Etat ne
décide plus seul. Il s'efforce désormais de tenir compte, de
nombreuses formations ou structures, de nature juridique hybride ou incertaine,
l'associant de plus en plus au secteur privé et à la
société civile conformément à la charte des
investissements261.
1- Le foisonnement d'institutions tripartites
261 Article 28 de la charte des investissements.
122
La démocratie participative n'est plus un leurre dans
le cadre de la gouvernance économique au Cameroun. L'Etat se met sur la
table de consultation et même de négociation avec les autres
acteurs sociaux que sont respectivement, le secteur privé262
et la société civile organisée263. Cette
optique qui participe de la régulation économique en
général a une influence forte sur l'encadrement des prix. La
concertation est de mise au moyen de formation à composition
tripartites, quelle que soit leur nature, leur finalité ou leur
fonction. Ce qui importe ici, c'est la composition multi-originelle de leurs
membres. Sans prétention aucune à l'exhaustivité, peuvent
entrer dans cette catégorie les chambres consulaires, le Comité
de facilitation du commerce extérieur, le Conseil de régulation
et de compétitivité, l'agence de promotion des investissements,
l'agence de promotion des exportations, les Comités consultatifs au sein
des ports autonomes, le Comité de compétitivité, et
même le Comité antidumping et de subvention autant que la CNC.
Bref, toute cette panoplie de Comités associe l'Etat, la
société civile et le secteur privé.
L'efficacité de cette démarche collective et
englobante reste pourtant tributaire de nombreuses considérations.
D'abord cette collaboration dans tous les cas se heurte aux problèmes de
représentativité, et donc, de légitimité de la
société civile. Ensuite, le risque d'instrumentalisation de
ladite société reste fort en sorte qu'elle peut servir de
prétextes pour l'Etat, quand elle ne se transforme simplement pas en
complice de celui-ci, alors qu'elle ne devrait qu'en être un partenaire.
Dans cette hypothèse et même dans toute hypothèse,
l'observation démontre que la consultation de la société
civile et du secteur privé par l'Etat, ou encore l'association des trois
dans des structures tripartites tardent à porter les fruits
escomptés en matière de développement de la
démocratie participative sur le plan économique. Il s'impose
alors la nécessité de mettre sur pied un cadre juridique
renforçant les capacités d'une société civile
organisée. Le fait marquant demeure donc simplement, la volonté
manifeste de l'Etat d'accorder plus de place aux autres entités du
marché, en réservant ne fusse que légalement
déjà, une place de choix au moins, au secteur privé.
2- Le renforcement du partenariat secteur public -
secteur privé
262 Le vocabulaire juridique de Gérard CORNU le
définit comme « l'ensemble des biens, activités et
entreprises qui appartiennent aux particuliers »
263 Entendu ici, comme l'ensemble d'institutions organes et
d'institutions personnes ne relevant pas du secteur public mais ne poursuivant
pas forcément des intérêts particuliers.
123
Ce partenariat en matière économique trouve son
expression la plus marquante en l'existence d'un Comité
interministériel élargi au secteur privé (CIESP). Cette
formation constitue le cadre par excellence de la concertation, et de
consultation avec le secteur privé regroupant le patronat, les
opérateurs économiques, les dirigeants des chambres consulaires
et les regroupements socioprofessionnels. A côté de ces structures
figure en bonne place le Comité de compétitivité
créé en 1997 pour améliorer l'environnement des affaires
et de compétitivité de l'économie par la promotion du
dialogue secteur privé/Etat. Ce Comité appuie le Conseil de
régulation et de compétitivité en tant que partenaire
stratégique et technique. Cette collaboration entre le secteur
privé et le secteur public, appelée de tous ses voeux par le
chapitre 3 de la charte des investissements, se traduit également en
l'exigence faite par cette dernière, d'une composition tripartite des
organes chargés de la promotion de l'initiative privé donc le
rôle est justement de Conseiller le gouvernement en matière de
développement industriel264. Ces institutions, dans leur mise
en place effective, risquent subir les effets du laxisme
généralisé qui caractérise la mise en place des
institutions nouvelles, à l'ère dite du Renouveau. En dehors de
ce cadre formel, l'Etat et le secteur privé travaillent également
de concert à travers de nombreuses Commissions et de Comités
paritaires. Le secteur privé agit parfois sur les prix de manière
isolée.
B- L'ACTION D'INSTITUTIONS NON PUBLIQUES
Il s'agit de la participation autonome des autres acteurs du
marché dans l'encadrement des prix c'est-à-dire en dehors de
toutes implications de l'Etat. Lesquels organes sont regroupés autour
des structures relevant du secteur privé ou de la société
civile.
1- L'action libre du secteur privé
La fonction ou le rôle du secteur privé dans
l'encadrement des prix en dehors de tout cadre de concertation avec l'Etat est
réel. La structure pilote de ce secteur se trouve être le
264 La charte des investissements crée à cet
effet le conseil de partenariat industriel, l'institut de l'entreprenership,
l'observatoire de l'industrie et du commerce, l'agence des normes et des
qualités et un centre de propriété intellectuelle.
124
groupement inter patronal du Cameroun (GICAM). Cette structure
d'essence privée, défend essentiellement les
intérêts des opérateurs réunis en son sein. Elle est
composée de cent quarante entreprises, quinze associations
professionnelles relevant ainsi que plusieurs représentations des
activités commerciales du secteur informel. Elle est
concurrencée, ou du moins secondée, par la chambre de commerce
d'industrie des mines et de l'artisanat (CCIMA), ainsi que par plusieurs autres
syndicats du secteur industriel camerounais. Ces structures, d'une
manière ou d'une autre, influencent sur la gestion des problèmes
économiques en général, celle des prix en particulier dans
le cadre des sessions internes au cours desquelles sont formulées les
recommandations et directives adressées à l'Etat. Elle dispose
par ailleurs et en général, de structures internes de
règlements de différends entre opérateurs
économiques. Le rôle des structures tels que le Comité
inter professionnel du cacao et du café (CICC) en matière
d'encadrement des prix dans des domaines spécifiques tels que le cacao
et le café ; celui des coopératives, des syndicats et autres
fédérations nationales de petites et moyennes entreprises (PME)
représentant des filières, peut également être
évoqué. La participation - certes indirecte - de ces
différentes structures à l'encadrement des prix est
indéniable en tant que représentant du secteur privé,
lorsqu'ils ne sont simplement pas membre de la société civile.
2- Le rôle autonome de la société
civile
La société civile, constituée de tous
organismes ne relevant en rien de l'Etat et ne faisant pas toujours partie du
secteur privé, participe à l'encadrement des prix qu'elle
influence et même oriente par un lobbying fort. Les
représentations syndicales, les associations de protection des
intérêts économiques, les organisations non
gouvernementales concernées, au même titre que les médias
nationaux et internationaux, ainsi que l'opinion publique, participent tant
bien que mal à l'encadrement des prix. La société civile
joue un rôle de dénonciation, de pression ou d'orientation. En
indiquant les tendances qui s'imposent dans le choix des politiques des prix
aussi bien vis-à-vis de l'Etat que les autres acteurs sociaux. Elle
informe, forme et même transforme les politiques publiques en
matière de prix dans le cadre de la régulation publique. Reste
qu'un cadre normatif et institutionnel permettant un réel essor de cette
société civile, pleine de potentialités, s'avère
nécessaire et devrait être envisagé.
125
Ainsi, l'un des points saillants de la régulation des
prix au Cameroun se traduit par la multilatéralisation, mieux, la
démocratisation de l'encadrement des prix. Jadis la chasse gardée
de l'Etat, l'encadrement est désormais opéré à
travers une approche participative, tant sous l'angle institutionnel que
normatif. A cet effet, l'encadrement des prix à l'origine rigide et
unilatéral, a subi une dose de flexibilisation dont on n'a pas fini de
cerner la rationalité.
SECTION II LA FLEXIBILISATION DE L'ENCADREMENT DES
PRIX
La démarche participative, favorisée ou
occasionnée par la déréglementation, a
considérablement transformé l'encadrement des prix, le faisant
passer du primat de la réglementation à celui de la concertation,
de la consultation voire de la négociation des prix. L `encadrement
unilatéral et impératif est devenu exceptionnel (paragraphe I),
à la faveur de la systématisation d'un encadrement
multilatéral et participatif (paragraphe II)
PARAGRAPHE I : L'EXCEPTIONNALITE DE L'ENCADREMENT
VERTICAL
L'encadrement dit vertical est celui qui vient du haut vers le
bas ; du centre vers la périphérie, bref, de l'Etat pour
s'imposer aux acteurs du marché par des actes unilatéraux et
autoritaires, c'est-à-dire, la réglementation étatique. La
déréglementation l'a en effet rendue exceptionnelle sans
l'exclure. Mais elle en a même fait un moyen de régulation des
prix. Aussi, observe-t-on désormais une régulation des prix au
travers d'une réglementation atypique (A) autant que de la
multiplication d'opérations réglementaires spécifiques
(B).
A- LA REGULATION PAR UNE REGLEMENTATION ATYPIQUE
Loin de disparaître, la réglementation des prix a
plutôt subi une cure lui ayant donné un régime tout
à fait spécial. Elle est devenue exceptionnelle dans
l'encadrement direct des prix, et incidente comme moyen l'encadrement indirect
des prix.
1- 126
La spécialité d'une réglementation
directe des prix par des actes autoritaires
La déréglementation n'a pas enlevé
à l'Etat les attributs de son pouvoir réglementaire en
matière d'encadrement des prix. Si la matière de ladite
réglementation a été réduite à une liste et
à la fixation exceptionnelle des marges bénéficiaires, il
faudrait se souvenir que la liste n'est ni définitive, ni limitative. Ce
qui laisse la latitude au Ministre en charge des prix de manipuler à sa
guise et dans le sens voulu par le gouvernement ladite liste. Cet état
des choses ne remet pas en cause la liberté des prix mais participe
justement de leur régulation, c'est-à-dire de leur encadrement
flexible en vue d'une adaptation aux réalités des situations qui
se présentent. Le complément logique et pratique de la survivance
de cette réglementation est un contrôle tout aussi spécial
des prix. Il faudrait rappeler en effet que les brigades de contrôles des
prix en elles-mêmes n'existent plus mais elles ont été
transmuées en brigade des fraudes commerciales. Les brigades, dites de
contrôle des prix, qui subsistent en la forme, sont pour la plupart,
revêtues des attributs de la spécialité. Tel est le cas par
exemple des brigades spéciales de contrôle des logements
d'étudiants auprès des Universités d'Etat, ou encore
l'observatoire national du prix du médicament. Les mesures
réglementaires appliquées à d'autres domaines ou à
d'autres objets de politiques économiques mais participant indirectement
à la réglementation des prix peuvent être
considérées également comme des mesures spéciales
d'encadrement desdits prix.
2- La réglementation indirecte des prix par
d'autres objets de politique économique
Les prix constituent en matière économique la
colonne vertébrale de tout le tissu des échanges à telle
enseigne que toute action sur les prix se répercute sur l'ensemble des
domaines, des secteurs des acteurs, et des composantes de l'économie. Le
schéma inverse n'est pourtant pas moins vérifiable, et l'Etat qui
en est conscient en profite bien, par une action indirecte, consciente ou
inconsciente, mais certaine sur les prix au moyen de la réglementation
de nombreux autres objets de politique économique. A cet égard,
toute réglementation concourant à la lutte contre l'inflation
participe de cet objectif. La réglementation du commerce
extérieur, de la concurrence, de l'investissement, la fiscalité
de
127
porte, et surtout de la fiscalité interne constitue
d'excellents moyens d'encadrement des prix. Toutes ces différentes
mesures réglementaires ne visant pas formellement la
réglementation des prix, se présente pourtant comme d'excellents
moyens d'influencer les prix et le marché. Monsieur Michel BOUVIER
reconnaît en effet que « le système fiscal
participe à l'autorégulation du marché économique
et financier
»265.
Tel était l'objectif - malheureusement non atteint - de
l'ordonnance N°2006/001 du 28 Septembre 2006, portant révision de
la fiscalité applicable à certains produits de première
nécessité. D'autres mesures spécifiques d'encadrement des
prix s'illustrent à travers l'activation d'opérations
spécifiques de soutien du pouvoir d'achat des citoyens.
B- LA REGULATION PAR DES OPERATIONS SPECIFIQUES
Certains produits particulièrement sensibles ou
stratégiques266 font l'objet d'une réglementation
particulière, consistant en des opérations techniques et
unilatérales sur les prix, en vue de leur maîtrise. Il s'agit de
la stabilisation et de la péréquation des prix.
1- La stabilisation des prix
Opérations ayant pour objet de mettre fin aux
variations dans le pouvoir d'achat, d'une monnaie267, la
stabilisation des prix est le fait soit de l'administration en charge des prix,
soit d'organismes spécialisés en la matière.
Dans le premier cas, les départements
ministériels en charge directement ou indirectement des prix exercent
leur pouvoir réglementaire en fixant des prix minima ou maxima sur les
produits à forte tendance spéculative. Ceci s'accompagne des
mesures rigoureuses de contrôle des prix. L'Etat peut également
procéder à la signature de contrats d'engagement avec les
opérateurs268 ou simplement subventionner la production, la
distribution, ou la commercialisation. La stabilisation des prix participe
également de la sauvegarde des entreprises locales ne pouvant survivre
qu'à cette condition, au-delà de l'objectif de soutien au pouvoir
d'achat des consommateurs.
265 BOUVIER (M), Introduction au droit fiscal
général et à la théorie de l'impôt,
7e éd., LGDJ, Paris 2005 P. 167.
266 Produits de première nécessité de
grandes consommations ou soumis à des tensions inflationnistes sur le
marché au gré des situations de celui-ci à l'instar des
produits pétroliers.
267 CORNU (G), vocabulaire juridique P. 890.
268 Articles 2 et 4 de l'ordonnance N°72/018portant
régime général des prix.
128
La stabilisation par des organismes spécialisés
ou mieux, les Caisses de stabilisation à l'instar de la CSPH poursuivent
essentiellement l'objectif de maîtrise de l'inflation dans leur domaine
d'intervention. Dans le domaine des produits pétroliers justement, la
CSPH a été créée à l'origine pour stabiliser
les prix dans ce secteur269. Son intervention en amont empêche
en effet la fluctuation ou la montée du prix en aval. L'intervention des
Caisses est multifonctionnelle et multi-formelle, le souci étant pour
l'essentiel d'empêcher que les fluctuations internationales ou les
aléas internes, n'influencent négativement les prix à la
consommation grâce à la prise en charge d'une part, des
suppléments des coûts de transport, et d'autre part du
différentiel des prix à rétrocéder, aux
opérateurs en cas d'importation du gaz dans l'optique
d'approvisionnement du marché intérieur. La CSPH est garante du
respect de la structure des prix tant au niveau de la
rémunération des différents intervenants qu'en ce qui
concerne la protection des intérêts du consommateur.
Le problème généralement rencontré
par ces organismes est lié au manque de moyens financiers ou aux
problèmes de la dispersion mieux, du détournement des fonds de
stabilisation vers d'autres objectifs que celui de stabilisation ou de
péréquation des prix.
2- La péréquation des prix
Mesure de régulation des prix visant à unifier
sur l'ensemble du territoire le prix de certains produits sensibles, la
péréquation est un moyen de stabilisation des prix. Elle consiste
en le souci de faire en sorte que le prix de certains produits de service soit
le même partout sans considération du lieu de
commercialisation270. Tel est par exemple le cas du ciment, du
carburant, du pétrole lampant, des matériaux de construction,
mais surtout du gaz domestique. On peut en effet observer que sur l'ensemble du
territoire et quel que soit le moment, le prix du gaz est identique. Ceci est
rendu possible grâce au mécanisme de la péréquation
qui repose sur des bases juridiques. Concrètement, et pour s'illustrer
toujours de la CSPH, la péréquation se traduit par le fait que
les frais de transport des produits pétroliers sont supportés par
cette structure. La péréquation des prix poursuit donc le
même objectif que la
269 De ce rôle de stabilisation, il ne reste aujourd'hui
à la CSPH que ses fonctions de soutien des prix du pétrole
lampant et du Gaz domestique.
270 La distance entre certains centres de production et la
situation géographique des centres de commercialisation, devrait
être de nature à justifier une augmentation des prix, du fait de
la répercussion des frais de transport.
129
stabilisation et elle en est un moyen de réalisation.
Cet objectif est la maîtrise des prix à la consommation des
ménages, la maîtrise des coûts de production, de la lutte
contre l'inflation.
La déréglementation demeure de fait, un
mécanisme, sinon le mécanisme privilégié
d'encadrement des prix, même si la déréglementation en a
considérablement réduit le champ en la rendant exceptionnelle
voire spéciale, en tant que mode vertical d'encadrement alors même
qu'un encadrement horizontal, c'est-à-dire multilatéral et
participatif s'affirme chaque jour par sa récurrence.
PARAGRAPHE II : LA SYSTEMATISATION D'UN ENCADREMENT
HORIZONTAL
L'encadrement horizontal des prix renvoie au
développement des mesures tant multilatérales que
participatives271. La systématisation elle, découle de
la permanence d'une détermination multilatérale des prix (A)
conjuguée à la récurrence d'une détermination
participative (B).
A- LA PERMANENCE DE MESURES MULTILATERALES
Consacrée depuis l'origine de la réglementation
des prix au Cameroun, la procédure d'homologation préalable est
aujourd'hui l'une des modalités synallagmatique de détermination
des prix.
1- La procédure d'homologation
préalable
Elle est consacrée par l'ordonnance N°72/18 du 17
Octobre 1972, portant régime général des prix au Cameroun
en son article 4, alinéa c. L'article 3 de la même ordonnance
désigne, comme autorité et organisme compétent en la
matière, le Ministre en charge des prix, les Gouverneurs des provinces,
les Préfets, les organismes publics agréés par le
ministère en
271 La différence entre multilatéral et
participatif se situe au niveau d'implication des concernés au
processus.
L'encadrement est multilatéral au regard du nombre
d'acteurs en scène. Elle devient participative lorsque le poids
réel de chacun des acteurs dans la prise de décisions devient
substantiel.
130
charge des prix, ainsi que les Commissions centrales,
provinciales et spécialisées. Ces différentes
autorités édictent des arrêtés, décisions ou
notes d'homologation.
Il convient ici de souligner que, dans le cadre de
l'ordonnance, homologation signifiait fixation autoritaire des prix par
l'administration englobant alors, tous les produits et services à cette
époque. Avec la promulgation de loi N°90/031 régissant
l'activité commerciale au Cameroun, seuls certains produits de service
sont aujourd'hui soumis à cette procédure dans les
modalités fixées par décret. Ces mutations ont
justifié le changement de la notion même d'homologation.
L'homologation s'entend désormais comme « l'approbation
des prix proposés par l'opérateur économique (à
l'administration des prix) qui a ainsi l'obligation de justifier toute hausse
»272. Sous cet angle, elle cesse d'être un
acte unilatéral de l'administration, pour devenir un acte
synallagmatique, mettant en scène l'opérateur (qui propose le
prix), et l'Etat (qui autorise). Cette procédure entraîne un
contrôle des produits et services auxquels elle s `applique encore.
Désormais, seuls les services centraux de la direction de la protection
du consommateur sont compétents pour l'homologation des prix et tarifs
encore soumis à ce régime273.
2- Le régime de la liberté
surveillée
En précisant que le dépôt des
barèmes ou des tarifs peut se faire avec l'approbation ou non de
l'administration, l'article 4 alinéa c del'ordonnancede1972 consacrait
formellement le régime de la liberté surveillée. Ce
régime oblige des entreprises qui doivent s'y soumettre à
déposer au Ministère chargé des prix la liste des prix
à pratiquer chaque fois qu'il y a un changement. Il s'agit dans ce
cadre, plus d'une mesure de surveillance au moyen d'une maîtrise des prix
grâce à l'information, que d'une modalité d'autorisation.
En effet, l'autorisation n'est point requise ici. La
multi-latéralité découle du fait que, bien que libre de
déterminer et de manier les prix, les entreprises concernées sont
obligées d'intéresser
272 ESTEGUET (P.E), procédure d'homologation des prix
au Cameroun, MINCOMMERCE, Ss direction des études et de la
législation, semaine de recyclage du personnel de la direction des prix
et de la métrologie Yaoundé, Mars 2004.
273 Chapitre II paragraphe A de la circulaire
N°0025/MINEFI/DPM/SDEL du 30 Janvier 2001, portant fonctionnement des
services chargé du contrôle des prix et de la
métrologie.
131
l'administration en l'informant. L'impact ici est dissuasif,
et la portée la même que dans le cadre d'homologation
préalable à un degré certes moindre. L'exigence permanente
de la publicité des prix participe en outre de ce régime.
Ainsi, la régulation des prix se traduit, par le
maintien de mesures synallagmatiques de contrôle des prix, ainsi que par
les mesures de collaboration plus poussées encore dans leur
détermination.
B- LA RECURRENCE DES PROCEDES PARTICIPATIFS
Deux procédés se développent en termes
d'encadrement participatif des prix. La multiplication des cadres de
négociation de prix entre l'Etat et les opérateurs, aboutit
finalement au développement de la technique contractuelle.
1- La concertation ou la négociation des
prix
La démocratie participative, impulsée par les
bailleurs de fonds internationaux et réceptionnée dans le cadre
interne, n'a pas laissé de surprendre par son action dans la
transformation des habitudes et des pratiques publiques au Cameroun. Cette
approche est en effet aujourd'hui en vogue et elle s'observe en matière
d'encadrement des prix. Le département ministériel principalement
en charge des prix a particulièrement développé cette
technique sous l'ajustement structurel. Les vertus du dialogue
économique sont explorées à tous les niveaux de la
chaîne économique et à la moindre possibilité. La
réglementation autoritaire et l'imposition de mesures
unilatérales cèdent la place à la concertation, à
la consultation, à la négociation, à l'exhortation,
à la sensibilisation, à la reddition des comptes. Même la
technique des boîtes à suggestions qu'il ne faille
considérer participe de cette logique.
En fonction des problèmes conjoncturels
circonstanciels, ou ponctuels, les différents acteurs des
filières concernées sont appelés à la table de
négociation par l'Etat pour une résolution collective desdites
situations. Ceci participe d'un double souci. Il est question en premier lieu
d'impliquer les différents intervenants afin que, se sentant
impliqués, ils s'y reconnaissent et soient donc tenus de respecter de
bonne foi les engagements pris. Cette
132
approche offre en second lieu, une tribune importante
d'expressions, pour une meilleure prise en compte des préoccupations de
tous les acteurs. Mais surtout, elle permet d'être solidaire du
gouvernement car elle légitime ses actions et ses décisions.
La négociation des prix reste cependant plus formelle
que réelle. L'administration abandonne assez difficilement ses
prérogatives de puissance publique pour traiter d'égal à
égal avec les opérateurs274. Ces négociations,
lorsqu'elles ne portent pas sur les difficultés de leur mise en oeuvre,
aboutissent parfois à la signature de protocoles d'accords sur les
prix.
2- La contractualisation ou les protocoles d'accords
à la mode
Monsieur Thomas BIDJA NKOTTO, en affirmant que «
l'existence des conventions des prix n'est pas établie au
Cameroun »275semblait avoir ignoré que les
conventions en matière de prix ont été consacrées
dans l'ordonnance N°72 en l'alinéa c de l'article 4.276
soit trente ans avant ses travaux de recherche. La conventionnalisation n'est
donc pas une nouveauté de l'ère de la libéralisation. Elle
est simplement plus à la mode aujourd'hui avec la prolifération
de protocoles d'accords signés entre l'Administration et les
opérateurs économiques. Ces protocoles d'accords sont variables
en fonction des domaines277. Il se pose le problème de leur
nature et de leur force juridique.
Pour le premier problème, force est de constater que
leur nature juridique est incertaine parce que rendant vaine, toute tentative
de classification dans une catégorie juridique du droit des contrats.
Ils ne sont rigoureusement ni contrats privés, ni contrats
publics278 pour Monsieur BIDJA NKOTTO, reprenant une décision
du Conseil d'Etat « en présence d'accords entre
l'administration et les représentants de la profession [l'accord
est
274 L'administration maintien comme une épée de
Damoclès, sur la tête des opérateurs ; l'arsenal juridique
de mesures contraignantes que lui reconnaît la loi, bien que consciente
de ce que l'efficacité de leur mise en oeuvre serait incertaine dans la
plupart des cas
275 BIDJA NKOTTO (T), Les contrats de l'Administration au
Cameroun, Thèse droit public, Paris-Panthéon-Sorbonne,2000,
p.270 .
276 L'alinéa c de l'article 4 de l'ordonnance N°72
prévoit en effet la détermination des prix « par convention
avec les sociétés ou les secteurs professionnels, garantissant
une stabilité globale et relative des prix ».
277 Protocole d'accord entre le gouvernement de la
République du Cameroun et les opérateurs économique de l
filière poisson congelé importé, de la filière riz,
de la filière sel brute du 3 Octobre 2006 communiqué de presse
N°0380/CP/MINCOMMERCE/CAD sur la concertation avec les opérateurs
et professionnels de filières de l'édition et de la vente du
manuel scolaire d'une part, et de la confection des tenues scolaires d'autre
part du 13 Août 2007 ; protocole d'accord entre le gouvernement de la
République et la filière agricole du 15 Décembre 2006,
protocole d'accord tripartite entre le Ministère du Commerce, les
fournisseurs et les responsables des supermarchés portant
modalités d'exécution de la campagne promotionnelle des produits
de grandes consommation pendant les fêtes de fin d'année 2006 et
de nouvel an 2007etc...
278 La présence de l'Etat, l'existence de normes
exorbitantes de droit public, l'objectif de réalisation d'un besoin
d'intérêt général cohabite avec l'absence des
différents critères de définitions d'un contrat
administratif.
133
qualifié de] décision
unilatérale à caractère réglementaire prise en
accord avec la profession ». Cette assertion ne peut que
surprendre tant elle semble contradictoire. Il apparaît assez subtil de
considérer qu'une opération mettant en scène deux acteurs
puisse être unilatérale quelque soit le degré d'implication
de l'un ou de l'autre. En réalité, ces protocoles peuvent
être considérés comme des codes de conduite épousant
le contenu des contrats d'engagement avec obligations de moyens et non de
résultats. Ceci se justifiant par le caractère synallagmatique de
l'acte et par son caractère relativement contraignant.
La force juridique d'un acte, considérée comme
la capacité à s'imposer ou à se faire respecter,
paraît être l'enfant pauvre des protocoles d'accords. Ceci
participe de deux raisons. Premièrement, les opérateurs qui
prennent ces engagements manquent dans leur grande majorité de
légitimité en termes de représentation des
filières. Mais aussi les protocoles d'accords semblent ne pas tenir
compte de la structure des prix, des autres éléments entrant dans
la structure du prix. Au-delà de ces considérations, il faudrait
ne pas oublier les effets de la mondialisation de l'économie sur les
modalités internes d'encadrement des Etats.
Au regard de ce qui précède, l'encadrement des
prix apparaît comme le maître mot des manifestations de la
régulation des prix. Il apporte transformation au niveau des
détenteurs du pouvoir d'encadrement à travers le
phénomène de démocratisation de celui-ci et aussi une
transformation dans la substance même de l'encadrement au travers d'un
processus de flexibilisation de celui-ci. L'option - sous l'effet de la
libéralisation - d'une approche participative favorise un encadrement
concerté et souple des prix.
CONCLUSION PARTIELLE
Loin d'écarter l'Etat, la régulation en offre un
cadre technique d'actions modernes, qui l'oblige certes, à transformer
ses modes d'intervention traditionnels en matière de prix, mais
renouvelle sa présence dans le secteur économique279.
Cette transformation s'inscrit dans un mouvement de réception des
règles de soft law en matière des prix. Le droit de
l'encadrement des prix s'est ainsi flexibilisé par une ouverture aux
règles plus conciliatoires que réglementaires, plus
participatives qu'impératives. Sur le plan institutionnel, la
transformation ne traduit qu'assez l'option pour une traduction effective de la
démocratie participative, au moyen d'une prise en compte des forces du
marché dans l'encadrement des prix. Une chose est cependant
restée constante dans l'encadrement des prix, elle a d'ailleurs
survécu à toutes les mutations, c'est la justification de la
présence de l'Etat en matière des prix à travers la
préservation de l'intérêt général qui
rivalise d'adresse avec la protection d'intérêts particuliers.
134
279 COLSON (JP), Op.Cit P.5.
135
CONCLUSION GENERALE
136
La libéralisation des prix au Cameroun s'explique par
le souci de s'ouvrir aux influences du marché, tout en prenant en compte
les nécessités de l'intervention étatique en
matière de détermination et d'encadrement des prix. Elle
correspond en effet à l'adoption de deux techniques juridiques tendant
à réduire la marge de manoeuvre de l'Etat. Il s'ensuit une
transformation substantielle de l'ordre public économique. D'essence
réglementaire, l'ordre public a pris un essor
régulatoire280, expression par excellence du règne du
marché281 . La déréglementation des prix
correspond dans cette logique à une prise en compte des lois du
marché dans la détermination des prix tandis que la
régulation incarne une technique d'ouverture de l'encadrement des prix
à la participation des autres acteurs du marché.
La déréglementation est la résultante
d'un mouvement généralisé des échanges à
l'échelle internationale282. Au niveau régional et
sous régional, l'adoption ou l'édiction de conventions à
effet direct a servi de relais pour leur application immédiate dans le
cadre interne des Etats. La réception de ce courant normatif, d'essence
libérale dans l'ordre juridique interne, s'observe de façon
inégale à tous les échelons de la hiérarchie des
normes. La consécration des principes de la liberté du commerce
et de l'industrie, de la concurrence et des prix en constitue la plus forte
illustration. Cette déréglementation se traduit par un mouvement
de retrait de l'Etat du processus de détermination des prix au moyen de
la privatisation des entreprises du secteur public, de la libéralisation
de secteurs entiers de l'économie qui justifiait alors l'administration
des prix. La conséquence de ce vaste désengagement de l'Etat des
secteurs productifs est le recul du champ réglementaire, du
contrôle étatique283, et corrélativement
l'exposition aux caprices des fluctuations de l'offre et de la demande. Dans
cette logique, l'Etat devient un agent économique ordinaire.
Ne pouvant faire fi du devoir de protection qui lui incombe
vis-à-vis des particuliers et des intérêts
économiques nationaux, l'Etat doit désormais conjuguer avec les
forces du marché dans l'encadrement général des prix et
même dans leur détermination. Les
280 MOHAMED MAHMOUD MOHAMED SALAH Op.Cit. PP. 261-289.
281 REMICHE (B) Op.cit. P. 254.
282 ADDA (J) La mondialisation de l'économie Op.cit. P.
3
283 La réglementation est en effet devenue l'exception
en matière d'échanges commerciaux la liberté des prix
étant devenue la règle.
137
fondements et les finalités de la présence
étatique en matière économique ne sont plus les
mêmes qu'à l'aube des indépendances. Aussi les
modalités de la présence étatique sont en effet
redéfinies. Ce qui l'amène désormais à opter pour
la régulation.
La régulation apparaît comme le mode
d'encadrement le plus approprié. Il est le procédé qui
permet de concilier les intérêts le plus souvent contradictoires
des forces économiques, inexorablement appelées à agir
ensemble en matière d'encadrement des prix. Technique juridique
favorisant la participation de toutes les forces du marché dans
l'encadrement des prix, la régulation est un moyen de démocratie
participative dans le cadre d'une bonne gouvernance économique. Elle
favorise en effet une démocratisation de leur encadrement et une
flexibilisation dudit encadrement avec la participation du secteur privé
et de la société civile dans le cadre de formations paritaires ou
tripartites. L'action de ces derniers est rendue possible grâce à
l'ouverture des tribunes de consultation et de confrontation, voire de
négociation sur les prix. Reste cependant à déplorer
l'inefficacité, et pourquoi pas la futilité d'une telle
démarche284, qui ne se traduit pas toujours dans les faits
par une réelle prise en compte des résolutions et des
recommandations qui s'en dégagent. Le fruit de cette dynamique
participative se trouve dans la prolifération des `'protocoles
d'accords» sur les prix signés après concertations,
discussions et négociations entre les opérateurs
économiques et l'Etat, représenté par ses
départements ministériels pertinents. Même s'il faut
constater que cette forme contractuelle, d'encadrement des prix ne
récolte pas toujours les fruits escomptés.
L'encadrement des prix au Cameroun s'explique par le souci
d'adapter les moyens aux objectifs de conciliation des intérêts
particuliers avec l'intérêt général.
L'étude sur la libéralisation des prix au
Cameroun est un sujet à vocation intemporelle. Il s'agit d'un sujet
d'actualité constante s'inscrivant dans un contexte d'inflation
permanente au Cameroun, et revivifiant la problématique du choix entre
l'interventionnisme et le libéralisme qui a cristallisé
l'opposition Etat /Marché au début du
284 Le foisonnement d'institutions diverses aux pouvoirs
à géométrie variable, aux intérêts
antagonistes et aux compétences a priori enchevêtrées ne
constituent-il pas le mal consubstantiel de cette démarche en terme
d'efficacité et d'efficience ? De sorte qu'une réflexion sur le
moyen d'une nécessaire centralisation de la régulation des prix
dévient pertinente .Il pourrait s'agir d'un organe doté de
l'autonomie financière, organique et fonctionnelle ; bref,
indépendant. Jouissant d'énormes pouvoirs et d'un spectre
illimité d'action sur les prix. L'Observatoire National des Prix ainsi
appelé de tous ses voeux se voulant un centre d'intelligence, de
réflexion et entre autre de prospection donc ; de régulation
technique nationale des prix. Fonctionnant à la manière des
agences de régulation américaine. Ceci dégage dès
lors la nécessité d'engager dans ce souci une
dérégulation organique de l'économie camerounaise en
générale et particulièrement dans le domaine des prix.
Dérégulation entendus ici comme processus de réduction et
de réorganisation des organes de régulation en vue de passer d'un
trop de régulation à un mieux de
régulation
138
21e siècle, riche champ d'investigation
scientifique jamais totalement ni définitivement exploré. Le
débat scientifique sur le «mieux le moins ou le
plus»285 d'Etat revient au goût du jour, et pose
au-delà du problème de la consistance de l'interventionnisme au
21e siècle, celui de sa pertinence.
L'évolution du régime juridique des prix au
Cameroun était en effet le reflet des options politiques et
économiques du pouvoir depuis les indépendances. Ces politiques
économiques permettent de dégager une attitude constamment
indécise des pouvoirs publics sur le choix entre l'idéologie
libérale et l'idéologie interventionniste286. Ce qui
fonde l'intérêt et la nécessité d'une étude
plus générale sur l'ensemble du processus de
libéralisation de l'économie camerounaise. Si les fondements
théoriques, juridiques, les enjeux et même l'étude de
quelques matières de la libéralisation au Cameroun ont fait
l'objet d'importantes études287, il reste que ce processus
n'a jamais été abordé dans sa globalité. Une
recherche allant dans ce sens serait d'autant plus pertinente qu'elle
amènera à se demander si la libéralisation ne constitue
pas en réalité un moyen de renforcement de l'interventionnisme
déguisé, la dissimulation d'une présence étatique
forte mais savamment habillée aux couleurs du libéralisme. En
définitive, quel que soit le poids du libéralisme, toujours
demeurera l'interventionnisme.
285 HUBRETH (H.G), Op. Cit. P.3.
286 Cette indécision se dégage des politiques
parfois contradictoires telles que « libéralisme
communautaire », « libéralisme
autocentré », « libéralisme
planifié ».
287 ONDOA (M), « Ajustement structurel et reforme du
fondement théorique des droits africains postcoloniaux... » Op.
Cit. pp. 75-118. MANGA ZAMBO (E), « Les fondements et les enjeux de la
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139
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entre les états membres ; commentaire »,
Juridis-périodique n° 54, Avril Juin 2003, pp 84-101.
4. RAPPORTS ET ETUDES
- Amadou NCHOUWAT, « Les chances de
développement de l'Afrique avec l'OMC », séminaire
organisé par l'QNG Afrique en devenir, douala 12-13 mai
2005.
- Association Henri Capitant,
«L'organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des
affaires», les petites affiches n°205, 13 octobre 2004, 66 p.
- Commission Afrique du barreau de paris,
Arbitrage OHADA, revue camerounaise de l'arbitrage, acte du colloque
22 Février 2000.
- La réorganisation mondiale des
échanges, colloque de Caen, paris 1996.
- Maurice LEUNYOU, « Le problème
des prix sur le marché et la responsabilité du commerçant
». CCIMA, réunion de la section commerce, juin 2006.
- OMC, examen de politique commerciale
Cameroun 2001.
- Pamphile EDGAR ESTEGUETE, «
Procédure d'homologation des prix au Cameroun »,
séminaire de recyclage des personnels de la direction des prix
et de la métrologie, Min commerce mai 2004.
« Elaboration et mise en application d'une
législation de la concurrence adaptée aux conditions des pays en
voie de développement : expérience de la république du
Cameroun », CENUCED 5ème
session du groupe d'experts intergouvernementaux sur le droit et la politique,
Genève, 02-4 juillet 2003.
« Relation entre les autorités de concurrences et
les instances sectorielles de réglementation en ce qui concerne l'abus
de position dominante », CENUCED 7ème session du groupe
intergouvernementaux sur le droit et la politique de la concurrence,
Genève 30 octobre-2 novembre 2006.
- Société française pour le
droit international, Un accord multilatéral sur
l'investissement : d'un forum de négociation à un autre,
journée d'étude paris, 1999.
145
5. LEXIQUES ET RECUEILS
Lexiques
- Dictionnaire de la langue française petit
Larousse 2006.
- Gérard CORNU, Vocabulaire
juridique, PUF, 7ème éd, association Henri
CAPITANT, 2005.
- Raymond GUILLIEN et Jean
Vincent, Lexique des termes juridiques, Dalloz, Paris,
13ème éd, 2001.
- Rémy CABRILLAC, Dictionnaire du
vocabulaire juridique, col LITEC, Paris 2004.
Recueils
- Cameroun, Droit et liberté, recueil
des nouveaux textes, Sopecam, Yaoundé Décembre
1990.
- CEMAC : recueil de textes de droit
communautaire de la CEMAC, 1ère éd, Girafe,
agence intergouvernementale de la francophonie, 202.
- OMC, Les textes juridiques ;
résultats des négociations commerciales multilatérales
du
146
cycle de Uruguay, Secrétariat de l'OMC
2003.
6. TEXTES JURIDIQUES
- Ordonnance n°72/18 du 17 octobre 1972,
portant régime général des prix et ses
modifications subséquentes.
- Loi n°90/031 du 10 Août 1990
régissant activité commerciale au Cameroun et modifications
subséquentes.
- Décret n°93/720/PM du 22
novembre 1993, fixant les modalités d'applications de la
loi n°90/031 du 10 août 1990 régissant l'activité
commerciale au Cameroun.
- Loi n°98/012 du 14 Juillet 1998
relative au dumping et à la commercialisation des produits
d'importations subventionnés.
- Loi n°98/013 du 14 juillet relative
à la concurrence.
- Loi n°2002/004 du 19 Avril 2002
pourtant charte des investissements en la république
du Cameroun.
- Décret n°2005/1362/PM du 6 mai
2006 fixant la composition, les modalités de fonctionnement et de
saisine du Comité antidumping et des subventions.
- Décret n°2005/1363/PM du 6 mai
2006 fixant la composition et modalité de fonctionnement de la
Commission Nationale de la Concurrence.
- Circulaire n°003/DPC du 13 juin 2007
portant rationalisation du contrôle effectué par les structures
chargées de la protection du consommateur.
- Textes sur l'homologation des prix et
autres lois, ordonnances, arrêtés et décrets sur
le contrôle et le régime des prix.
147
ANNEXES
1. Ordonnance n°72/18 du 17 octobre
1972 portant régime général des prix ;
2. Loi n°90/031 du 10 août 1990
régissant l'activité commerciale au Cameroun ;
3. Loi n°98/012 du 14 juillet 1998
relative au dumping et à la commercialisation des produits d'importation
subventionnés ;
4. Loi n°98/013 du 14 juillet 1998
relative à la concurrence ;
5. Décret n°2005/1362/PM du 06
mai 2005 fixant la composition, les modalités de fonctionnement et de
saisine du Comité Antidumping et des Subventions ;
6. Décret n°2005/1362/PM du 06
mai 2005 fixant la composition, les modalités de fonctionnement de la
Commission Nationale de la Concurrence ;
7. Arrêté n°00035/MINCOMMERCE/CAB
du 08 novembre 2005 portant fixation des produits et services dont les
prix et les tarifs sont soumis à la procédure d'homologation
préalable ;
8. Circulaire n°00000003/MINCOMMERCE/DEPENDANCE
du 13 juin 2007 portant rationalisation des contrôles
effectués parles structures chargées de la protection du
consommateur.
148
TABLE DES MATIERES
a.
|
|
Définition des termes clés
|
10
|
|
?
|
Libéralisation:
|
10
|
b.
|
|
Délimitation de l'étude
|
12
|
|
?
|
Délimitation matérielle de
l'étude
|
12
|
|
?
|
Délimitation temporelle de l'étude
|
13
|
c.
|
|
Contexte de l'étude
|
14
|
149
? Le contexte sociopolitique 14
? Le contexte socio-économique
15
d. Intérêt du sujet 16
? Intérêt scientifique
16
? Intérêt pratique 17
e. Problématique 18
f. Idée générale 19
g. La démarche méthodologique
19
h. Ebauche de raisonnement
20 PREMIERE PARTIE : LA DEREGLEMENTATION DES PRIX
CHAPITRE I : LES FONDEMENTS JURIDIQUES DE LA
DEREGLEMENTATION DES PRIX 24
SECTION I : LES FONDEMENTS JURIDIQUES EXTERNES
24
PARAGRAPHE I : LES FONDEMENTS INTERNATIONAUX
24
A. LA DEREGLEMENTATION DES PRIX DANS LE SYSTEME NORMATIF
DE
L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE 25
1. Les principes dégagés des accords de
l'Organisation Mondiale du Commerce
relatifs au commerce 25
2. Les accords pertinents de l'Organisation Mondiale du
Commerce relatifs à
l'investissement 28
B. LA DEREGLEMENTATION DES PRIX SUR LA BASE DE
L'AJUSTEMENT
STRUCTUREL 29
1. L'ajustement structurel comme fondement
théorique des droits économiques 30
2. L'ajustement structurel comme fondement
quasi-conventionnel 31
PARAGRAPHE II : LES FONDEMENTS REGIONAUX ET
SOUS-REGIONAUX 32
A. LA DEREGLEMENTATION DES PRIX DANS L'HARMONISATION DU
DROIT DES AFFAIRES EN AFRIQUE 32
1. Le traité OHADA 33
2. L'Acte Uniforme relatif au Droit commercial
général 34
B. L'ENCADREMENT COMMUNAUTAIRE DE LA DEREGLEMENTATION
DES PRIX 34
1. Les textes généraux de la CEMAC en
matière économique et commerciale 35
2. Les textes spécifiques de la CEMAC en
matière économique et commerciale 36
SECTION II : LES FONDEMENTS JURIDIQUES INTERNES
38
PARAGRAPHE I : LES BASES CONSTITUTIONNELLES
39
A. LA BASE PRINCIPALE : LE PRINCIPE DE LA LIBERTE DU
COMMERCE
ET DE L'INDUSTRIE 39
1. La constitutionalité du principe
39
2. La portée du principe 42
B. LES BASES DERIVEES : LES PRINCIPES DE LA LIBERTE
D'ENTREPRENDRE, D'EXPLOITER ET DE CONCURRENCE
43
1. La liberté d'entreprendre et d'exploiter
43
1. Le principe de la liberté de concurrence
44
PARAGRAPHE II : LES FONDEMENTS INFRA CONSTITUTIONNELS
44
A. LES TEXTES JURIDIQUES A CARACTERE LEGISLATIF
45
1. Les lois régissant l'activité
commerciale au Cameroun 45
2. Les lois relatives à la concurrence
46
150
3. Les lois régissant l'investissement
47
B. LES ACTES NORMATIFS DE L'ADMINISTRATION 49
1. Les actes réglementaires 49
2. Les actes non réglementaires 50
CHAPITRE II LE CONTENU DE LA DEREGLEMENTATION
DES PRIX 52
SECTION I LE DESENGAGEMENT DE L'ETAT 52
PARAGRAPHE I : LES MODALITES DU DESENGAGEMENT
53
A- LA LIBERALISATION DE SECTEURS DE L'ECONOMIE
53
1- La libéralisation du secteur de l'agriculture
53
2- La libéralisation du secteur de l'industrie et
du commerce 54
3- La libéralisation des secteurs monopolistiques
55
B- LA RESTRUCTURATION DES ENTREPRISES DU SECTEUR PUBLIC
ET
PARAPUBLIC 56
1- Le cadre juridique de la restructuration
56
2- Le processus de la restructuration 57
3- Le bilan nuancé de la restructuration
58
PARAGRAPHE II : LES IMPLICATIONS DU DESENGAGEMENT
59
A- LA REDUCTION DU CHAMP DE LA REGLEMENTATION DES PRIX
59
1- Le régime originel des prix ou la
réglementation comme règle 59
2- Le régime actuel des prix ou la
réglementation devenue exception 61
B- LA RATIONALISATION DU POUVOIR DE CONTROLE DES PRIX
63
1- Le rétrécissement de la matière
du contrôle 64
2- La délimitation des pouvoirs de contrôle
64
SECTION II : L'OUVERTURE AUX LOIS DU MARCHE
66
PARAGRAPHE I : LA PRESEANCE DES ACTEURS DU MARCHE
67
A- IDENTIFICATION DES ACTEURS DU MARCHE 67
1- Le vendeur ou prestataire de service 68
2- L'acheteur ou le bénéficiaire du
service 68
B- LA FONCTION DES ACTEURS DU MARCHE 69
1- Le droit de proposer le prix en fonction
d'intérêts propres 69
2- La liberté de refuser ou de discuter le prix
en fonction des besoins propres 70
PARAGRAPHE II : LA REFERENCE AUX LOIS DU MARCHE
70
A- L'INFLUENCE DES LOIS DE L'OFFRE ET DE LA DEMANDE
71
B - L'EXISTENCE D'UN LIBRE JEU DE LA CONCURRENCE
72
DEUXIEME PARTIE : LA REGULATION DES PRIX
CHAPITRE I : LES JUSTIFICATIONS DE LA REGULATION
78 SECTION I : LA PROTECTION D'INTERETS ECONOMIQUES
PARTICULIERS. 78
PARAGRAPHE I : LA PROTECTION DES INTERETS DU
ONSOMMATEUR 78
A- LE DROIT A LA PROTECTION DU CONSOMMATEUR. 79
1- La garantie des droits du consommateur.
79
a- Le droit à l'information à travers
la publicité des prix 79
b- Le droit à la facturation
80
2- La sauvegarde de la liberté contractuelle du
consommateur. 81
a- La liberté de contracter ou de ne pas
contracter 81
b- La liberté de choisir ou de discuter le
contenu du contrat 82
151
B- LE DROIT A LA DEFENSE DU CONSOMMATEUR 82
1- Les titulaires du droit de la défense du
consommateur. 82
2- Les conditions d'exercice du droit de la
défense du consommateur. 83
PARAGRAPHE II : LA PREVENTION DES INTERETS DE
L'OPERATEUR. 84
A- LA NORMALISATION DE LA CONCURRENCE 85
1- L'incrimination des pratiques anticoncurrentielles
liées aux prix. 85
a- Identification des pratiques anticoncurrentielles
liées aux prix. 85
b- Les sanctions des pratiques anticoncurrentielles
liées aux prix. 86
2- L'institution d'un organe de contrôle: le
Conseil National de la Concurrence 88
a- Organisation de la Commission Nationale de la
Concurrence. 88
b- Le fonctionnement de la Commission Nationale de
la Concurrence. 90
B- LA PROTECTION DE L'INDUSTRIEL LOCAL 92
1- Les mesures de lutte contre l'inflation.
93
2- Les mesures de soutien à
l'industrialisation. 94
SECTION II : LA PRESERVATION DE L'INTERET ECONOMIQUE
GENERAL 95
PARAGRAPHE I : L'INCRIMINATION DES PRATIQUES NOCIVES
A
L'ECONOMIE NATIONALE 95
A- LA CONDAMNATION DU DUMPING DOMMAGEABLE. 96
1- Elucidation sémantique du dumping.
96
2- L'incrimination du dumping. 97
B- L'INCRIMINATION DES SUBVENTIONS INTERDITES ET
D'IMPORTATIONS EXCESSIVES. 98
1- l'interdiction de subventions nuisibles.
99
2- La prohibition des subventions excessives
nuisibles. 99 PARAGRAPHE II : LA PREVISION DE MESURES DE
DEFENSE DE
L'ECONOMIE NATIONALE. 100
A- L'EDICTION DES MESURES PREVENTIVES DE DEFENSE
COMMERCIALES. 101
1- Les mesures antidumping. 101
2- Les droits compensatoires et les mesures de
sauvegarde. 103
a- L'imposition des droits antisubventions.
103
b- L'application des mesures de sauvegarde
104
B- L'INSTITUTION D'UN COMITE ANTIDUMPING ET DES
SUBVENTIONS 105
1- Le régime juridique du Comité.
105
2- La portée relative du Comité.
107
CHAPITRE II LES MANISFESTATIONS DE LA REGULATION
DES
PRIX 109 SECTION I LA MULTILATERALISATION DE
L'ENCADREMENT DES PRIX
110
PARAGRAPHE I : LA MOBILISATION D'INSTITUTIONS PUBLIQUES
111
A- L'ADMINISTRATION DES PRIX 111
1- L'administration centrale 111
a- L'administration politique 111
b- L'administration technique 113
2- L'administration périphérique
113
a- L'administration déconcentrée
114
b- L'administration décentralisée
114
152
B- LA JUSTICE DES PRIX 116
1- Le juge des prix 116
a- Identification du juge des prix
117
b- Les pouvoirs du juge des prix
118
2- L'institution à vocation juridictionnelle en
matière de prix 118
a- Les institutions pré juridictionnelles
119
b- Les institutions quasi juridictionnelles
119 PARAGRAPHE II : LA PARTICIPATION D'INSTITUTIONS
QUASI ET NON
PUBLIQUES 121
A- LA PROLIFERATION D'INSTITUTIONS DE COLLABORATION DE
NATURE HYBRIDE 121
1- Le foisonnement d'institutions tripartites
121
2- Le renforcement du partenariat secteur public -
secteur privé 122
B- L'ACTION D'INSTITUTIONS NON PUBLIQUES 123
1- L'action libre du secteur privé
123
2- Le rôle autonome de la société
civile 124
SECTION II LA FLEXIBILISATION DE L'ENCADREMENT DES PRIX
125
PARAGRAPHE I : L'EXCEPTIONNALITE DE L'ENCADREMENT
VERTICAL 125
A- LA REGULATION PAR UNE REGLEMENTATION ATYPIQUE
125
1- La spécialité d'une
réglementation directe des prix par des actes autoritaires
126
2- La réglementation indirecte des prix par
d'autres objets de politique
économique 126
B- LA REGULATION PAR DES OPERATIONS SPECIFIQUES
127
1- La stabilisation des prix 127
2- La péréquation des prix
128 PARAGRAPHE II : LA SYSTEMATISATION D'UN ENCADREMENT
HORIZONTAL 129
A- LA PERMANENCE DE MESURES MULTILATERALES
129
1- La procédure d'homologation préalable
129
2- Le régime de la liberté
surveillée 130
B- LA RECURRENCE DES PROCEDES PARTICIPATIFS
131
1- La concertation ou la négociation des prix
131
2-
119
ANNEXES
TABLE DES MATIERES 126
...
La contractualisation ou les protocoles d'accords
à la mode 132 SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES
|