Section 2: Les variables explicatives
Investir, c'est avant tout faire un pari sur l'avenir. De ce
fait, les dépenses engagées n'auront des effets que plusieurs
mois ou années après la prise de décision. Ainsi, le
niveau de la demande anticipée, les profits attendus, les conditions
financières, le niveau de la dette publique, la variation du taux de
change, le risque et l'incertitude sont autant d'éléments
déterminants pour la décision d'investir. L'adaptation aux
données de l'économie tchadienne nous conduit à retenir
trois variables exogènes : le déficit public, la dette publique
et la taxation.
a. Le Déficit Public (SB)
Le déficit public rapporté au PIB est la
variable qui représente le solde financier des administrations
publiques. Plus précisément le déficit public est la
différence entre les recettes totales hors don et les dépenses
totales hors intérêt de la dette. Il permet en principe de mesurer
le niveau des dépenses publiques par rapport aux recettes, ce qui
amène à l'estimation du besoin de financement de l'Etat.
Les études récentes (ALESINA, ARDAGNA, PEROTTI
et SCHIANTARELLI, 2002 ; GUIDICE et al, 2003) ont montré que les
politiques budgétaires de consolidation (réduction des
déficits publics par la baisse des dépenses) n'ont pas d'effets
restrictifs sur la demande intérieure. Est-ce que cela se vérifie
dans tous les cas ?
15
Financement de l'investissement public par
emprunt/2009-2010 Graphique n°2 : Evolution du ratio
déficit public en pourcentage du PIB
Source: Banque mondiale
(World Development Indicators, CD-ROM, 2007).
Le graphique 2 semble en effet confirmer que l'emprunt a bien
un impact keynésien sur l'investissement au cours de la période
allant de 1990 à 2004. On observe ainsi, en moyenne annuelle, une
détérioration du solde budgétaire, accompagnée
d'une hausse de l'investissement public.
En revanche, au cours de la période
d'amélioration du solde budgétaire (2004-2008), la performance du
Tchad en termes d'investissement public est inférieure à celle de
la période 1990-2004, puisque l'évolution positive du solde
budgétaire s'est accompagnée d'une baisse de l'investissement.
b. La Dette Publique (DP)
Elle est également exprimée en ratio par rapport
au PIB et représente les engagements financiers bruts des
administrations publiques. Il existe assurément un lien entre le
déficit budgétaire et la dette, car l'excès des
dépenses sur les recettes a été souvent financé par
un accroissement de la dette (ENGONE, 2002).
Des travaux empiriques récents (LAUBACH, 2003 ;
PEROTTI, 2004) montrent que les paramètres associés aux chocs
budgétaires dans la fonction d'investissement dépendent du niveau
atteint par le ratio dette publique sur
92 94 96 98 00 2 04 06 08
PIB. Un ratio élevé a des effets
défavorables sur l'investissement privé à travers deux
principaux canaux :
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1°) celui des ressources utilisées pour le
paiement du service de la dette publique, qui peuvent évincer les
investissements publics dans les domaines où des
complémentarités importantes existent entre les dépenses
publiques et privées en capital ;
2°) celui par lequel les agents domestiques
préfèrent transférer leurs fonds à
l'étranger plutôt que d'épargner, à cause de la
crainte que les engagements d'impôts futurs servent à financer le
service de la dette.
Graphique 3. Evolutions du ratio de la
dette publique en pourcentage du PIB
Source: Banque mondiale
(World Development Indicators,CD-ROM, 2007).
Deux périodes peuvent être distinguées :
La première période allant de 1990 à 2004
est marquée par la hausse du ratio stock de la dette publique en
pourcentage du PIB. Trois facteurs majeurs retiennent notre attention :
1) cette hausse pourrait être expliquée par
l'arrivée au pouvoir d'un nouveau régime politique et
l'instabilité politique récurrente qui s'en est suivie ;
2) l'organisation de la conférence nationale et son
financement en 1993;
3) enfin, la construction du pipe-line Tchad-Cameroun pour
l'exploitation du pétrole de Doba.
Le financement quasi-total de ces facteurs par l'emprunt
extérieur conjugué aux organisations des élections
justifient cette hausse de la dette publique au Tchad.
La seconde période et la dernière est
marquée par une baisse drastique du ratio suite aux remboursements
anticipés de la dette vis-à-vis de la Banque Mondiale et qui se
stabilise en deçà de 30 % du PIB.
Ainsi, pour des niveaux relativement élevés de
dette publique (période allant de 1990 à 2004), on est enclin
à admettre que des agents économiques tchadiens ont des
comportements non keynésiens, puisque la corrélation dette
publique/investissement est négative.
c. La Variable de Taxation (TX)
La variable taxation représente les recettes totales
des administrations publiques d'origine fiscale et non fiscale ; elle est aussi
exprimée par rapport au PIB. L'introduction de Cette variable taxation
permet de prendre en compte l'effet non linéaire des taxes sur
l'investissement public (VILLIEU, 2007).
Graphique 4 : Evolution du ratio de la
taxation sur le PIB
Source: Banque mondiale
(World Development Indicators,CD-ROM, 2007).
Le graphique ci-dessus montre que, de 1990 à 1995, la
pression fiscale tchadienne est restée relativement faible. Ce pourrait
s'expliquer par
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un retournement de la conjoncture économique au
lendemain des deux chocs pétroliers. Après cette période
(1996-2007), on assiste à une augmentation de la pression fiscale qui
coïncide avec l'évolution positive du déficit
budgétaire. Cette hausse peut s'expliquer en partie par l'exploitation
du pétrole tchadien.
SPECIFICATION DU MODELE
CHAPITRE II:
Dans ce chapitre, nous voudrions tout d'abord présenter
le modèle théorique (section 1), avant de procéder
à sa spécification à des fins d'estimation (section 2).
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