II. Les BIFs de la Kedia d'Ijil II.1 Introduction
Les BIFs (Banded Iron Formation) de la Kedia d'Ijill et les
BIFs du Tiris appartiennent à un domaine métallogénique
qui a été formé dans la Dorsale de Reguibat. Les gisements
de la formation de Tiris sont considérés comme étant des
dépôts sédimentaires clastiques originaires des BIF
archéennes du type Algoma. Cependant les gisements de fer de
la formation de Kedia d'Ijil sont des BIF de type lac
Supérieur qui ont étés formées dans le
Protérozoïque après la formation des gisements de fer de
Tiris dans l'archéen.
II.2 Cadre géologique
La Kedia d'Ijil correspond à une série
d'unités qui ont été charriées sur le socle
archéen de la province de Tiris, et dont l'unité de Tazadit est
composée de formations sédimentaires détritiques contenant
des BIFs (partie précédente). Ces formations sédimentaires
sont interprétées comme étant une succession de
séquences sédimentaires ou les BIFs sédiments chimiques,
clôturent chaque cycle de dépôts (Bronner et al. 1979).
II.3 Minéralogie
Du point de vue minéralogique, l'étude en lames
minces des roches de la Kedia d'Ijil montre une minéralogie simple avec
quartz, oxydes de fer, et des alumino-silicates en accessoires
(stilpnomélane parfois transformé en kaolinite). Quatre
faciès d'oxyde de fer, interprètés comme quatre
faciès successifs. Il s'agit :
Des magnétites, dont les tailles varient fortement d'un
échantillon à un autre ; de petite hématite
conservé dans les lits de cherts (BIF) et à l'origine du
micro-litage ; de la martite qui se développe au sein de la
magnétite et qui marque une première phase d'altération et
enfin, de l'hématite secondaire, reprécipitée dans des
fissures, qui résulte d'une deuxième phase d'altération en
conditions oxydantes avec de forts enrichissements en fer (Bronner et al.
1992).
Par ailler, nous avons effectuée une étude
métallographique, elle porte sur les différents faciès
ferrifères de gisement de F'Derik, notamment, BIFs, quartzite
ferrugineux et brèche. Elle a pour but de préciser les
associations minéralogiques de ces faciès, en essayant de
déterminer la chronologie des phases minéralisatrices qui ont
abouti à ce type de gisement.
II.4 Géochimie
II.4.1 Eléments majeurs et en traces
La composition en éléments majeurs et en
éléments traces sont reportées dans les tableaux 2 et 3.
La caractérisation géochimique principale de ces BIFs est leur
richesse en fer. La teneur en Fe2O3 varie de 43% à 60% et en
silice (SiO2 varie de 37% à 55%). Les autres
éléments chimiques majeurs sont très
faiblement représentés. Les roches ont subi des remobilisations
successives conduisant à un enrichissement en fer, depuis des valeurs
moyennes initiales d'environ 46% (Bronner et al., 1992) jusqu'à des
valeurs élevées d'environ 60% (Henry, 1994). De la même
façon, la fraction alumineuse varie de 0.03 à 0.69% en Al2O3.
Tableau 2 : Composition chimique des BIFs (Kedia d'Ijil) en
éléments majeurs exprimés en pourcentages de poids
d'oxydes (%wt) (CRPG, Henry, 1994).
|
SiO2
|
Al2O3
|
Fe2O3
|
MgO
|
CaO
|
Na2O
|
P2O5
|
P.F.
|
Tot.
|
It2b
|
45.04
|
0.24
|
53.71
|
0.46
|
0.03
|
0.00
|
0.28
|
0.27
|
100,12
|
It8b
|
41.25
|
0.69
|
57.17
|
0.08
|
0.03
|
0.02
|
0.22
|
0.86
|
99,76
|
It8c
|
48.73
|
0.27
|
49.76
|
0.38
|
0.03
|
0.00
|
0.27
|
0.78
|
99,37
|
It40c
|
83.84
|
0.20
|
15.57
|
0.17
|
0.08
|
0.00
|
0.20
|
0.48
|
100,3
|
It41
|
39.46
|
0.10
|
59.00
|
0.52
|
0.02
|
0.08
|
0.24
|
0.38
|
100,17
|
It50a
|
45.57
|
0.50
|
52.21
|
0.05
|
0.00
|
0.04
|
0.17
|
0.63
|
100,03
|
It70a
|
37.32
|
0.14
|
61.54
|
0.54
|
0.04
|
0.01
|
0.26
|
0.20
|
99,9
|
It83b
|
39.34
|
0.44
|
58.29
|
0.43
|
0.06
|
0.00
|
0.24
|
0.55
|
99,13
|
Iem12
|
42.39
|
0.14
|
57.17
|
0.12
|
0.10
|
0.00
|
0.24
|
0.00
|
100,22
|
Iem13
|
45.96
|
0.07
|
53.19
|
0.08
|
0.00
|
0.00
|
0.19
|
0.41
|
100,54
|
Tableau 3 : Composition chimique des BIFs (Kedia d'Ijil) en
éléments traces (ppm), (CRPG, Henry, 1994).
|
Ba
|
Co
|
Cr
|
Cu
|
Ga
|
Ni
|
Sr
|
V
|
Y
|
Zn
|
Zr
|
It2b
|
< 5
|
13
|
11
|
18
|
19
|
16
|
5
|
36
|
< 5
|
< 5
|
< 5
|
It8b
|
24
|
16
|
22
|
11
|
27
|
28
|
5
|
47
|
< 5
|
< 5
|
< 5
|
It8c
|
77
|
12
|
12
|
17
|
19
|
17
|
14
|
29
|
15
|
< 5
|
< 5
|
It40c
|
54
|
< 5
|
6
|
6
|
< 5
|
< 5
|
16
|
8
|
41
|
< 5
|
< 5
|
It41
|
< 5
|
15
|
36
|
17
|
9
|
23
|
< 5
|
36
|
< 5
|
< 5
|
< 5
|
It50a
|
< 5
|
12
|
16
|
13
|
24
|
17
|
< 5
|
37
|
< 5
|
< 5
|
< 5
|
It70a
|
< 5
|
13
|
13
|
16
|
10
|
14
|
< 5
|
35
|
< 5
|
< 5
|
< 5
|
It83b
|
54
|
13
|
15
|
17
|
16
|
21
|
56
|
37
|
< 5
|
< 5
|
< 5
|
Iem12
|
93
|
15
|
14
|
10
|
18
|
20
|
10
|
36
|
< 5
|
< 5
|
< 5
|
Iem13
|
< 5
|
14
|
15
|
11
|
24
|
16
|
< 5
|
36
|
< 5
|
< 5
|
< 5
|
Le traitement des données analytiques des BIFs
(éléments majeurs et traces) et leur comparaison avec les
données de références, nous permet de faire les
observations suivantes :
> Dans les BIFs de la Kedia d'Ijil seuls deux
éléments sont largement représentés : Fe, Si. Si
l'on tient compte de tous les échantillons, on constante que ces deux
éléments sont corrélés négativement. Dans un
échantillon (It40c), le plus riche en silice et cependant plus pauvre en
fer (19.17), sa richesse en Ca est en fait, probablement liée à
une phase silico-carbonatée. Sa composition chimique l'exclue, toutefois
des BIFs.
> A l'exception du Fer qui montre une faible variation dans
tous les échantillons, tous les éléments ont des
concentrations inférieures aux Clarke (TAYLOR, 1964).
> Aucune corrélation nette n'apparait entre le
Fe2O3 et les autres éléments majeurs. La variation de
leur teneur est aléatoire vis-à-vis du fer. (Fig.17).
Figure18 : variation des éléments en traces en
fonction de Fe2O3 de BIFs de Kedia la d'Ijil
Figure19 : variation des éléments en traces en
fonction de Fe2O3 de BIFs de la Kedia d'Ijil II.3.2 Terres
rares
Les concentrations de quelques éléments de
terres rares (REE : Rare Erth Elements) des concentrations des BIFs sont
présentées dans le tableau 4. La normalisation de ces teneurs en
REE a été faite par rapport aux teneurs de ces
éléments dans les North American Shale (Composite NASC, Gromet et
al., 1984). Les spectres des REE de ces BIFs qui en découlent sont
représentés dans le diagramme de la figure 20.
Excepté l'échantillon It83b à spectre
particulier montrant un fractionnement différent des autres
échantillons avec un enrichissement en LREE et appauvrissement en HREE,
les autres échantillons montrent pratiquement les mêmes allures de
spectre avec une anomalie positive en Eu bien nette, (Fig.20).
Tableau.4 : Concentrations en terres rares (ppm) Henry 1994.
|
La
|
Ce
|
Nd
|
Sm
|
Eu
|
Gd
|
Dy
|
Er
|
Yb
|
It2b
|
4.25
|
7.19
|
4.09
|
0.77
|
0.26
|
0.90
|
0.69
|
0.47
|
0.50
|
It8c
|
15.74
|
19.62
|
6.91
|
1.12
|
0.33
|
1.32
|
1.52
|
1.13
|
0.86
|
It41
|
4.42
|
6.16
|
3.00
|
0.51
|
0.22
|
0.52
|
0.25
|
0.15
|
0.18
|
It83b
|
14.95
|
37.86
|
26.37
|
6.16
|
1.55
|
5.60
|
3.04
|
0.75
|
0.35
|
Figure 20 : Profils de terres rares où les concentrations
sont normalisées par rapport aux NASC.
Les formations ferrifères de la dorsale Réguibat
y compris celle de la Kedia d'Ijil ont fait l'objet de plusieurs études
géochimiques : Besnus et al., (1969), Bronner et al., (1990a) et Henry
(1994). Ce dernier (1994), a axé son investigation sur l'âge, sur
les sources des BIFs présumés birimiens [Bronner et al., 1979] du
groupe d'Ijil, l'environnement sédimentaire, les caractères de la
sédimentation clastique et chimique, l'importance de la participation
mantellique, érosion et le recyclage du fer des BIFs archéens
pendant la sédimentation du protérozoïque inférieur.
Les conclusions de Henry (1994) se présentent comme suit :
> L'âge birimien de la formation de la Kedia d'Ijil est
précisé par les âges modèles Nd à 2,1 #177;
0,2 Ga ;
> Les profils des terres rares et les compositions
isotopiques du couple Sm-Nd démontrent un mélange
sédimentaire entre, d'une part, une phase authigène marine et,
d'autre part, un composant détritique archéen ;
> La signature isotopique des phases authigènes (Nd=
2,1 Ga + 2,5 #177; 0,5) montre la participation importante d'entrées
hydrothermales, à signatures mantelliques, dans les teneurs des terres
rares de l'océan birimien. Les phases détritiques
représentent le recyclage d'une croûte archéenne bimodale
d'âge modèle de 3,0 #177; 0,2 Ga [Abouchami, 1990 ; Abouchami et
al., 1990 ; Boher, 1991 ; Boher et al., 1992] ;
> Le cotexte de ces sédiments chimiques est un
contexte de plate-forme en marge du continent archéen ;
> la source du fer semble être mixte, fer
hydrothermal (hypothèse de Jacobsen et al., 1988a et b) et fer
dérivé d'érosion de la croûte continentale
archéenne qui contient elle-même de nombreux BIFs
(hypothèse de Bronner et al., 1979).
Quatrième partie :
Gisement de F'Derik ; géologie et
étude microscopique
Quatrième partie : Gisement de F'Derik
;
Géologie et étude
microscopique
Les premières investigations ont tout naturellement
débuté sur les affleurements de minerais riches situés
dans la bordure Nord de la Kedia d'Ijil en 1948 et 1949, où le premier
sondage de reconnaissance a été implanté en 1952 dans le
gisement de F'Derik. Un riche gisement de minerai de fer est découvert.
Cinq ans plus tard, La Société des Mines de Fer de Mauritanie
(MIFERMA) a commencé l'exploitation de ce gisement pendant 16 ans pour
en extraire 20 MT de minerai riche et 3 MT de minerai siliceux.
Plus de 20 ans plus tard, la SNIM a lancé une active
campagne de recherche pour estimer les réserves de minerais existante au
fond de l'ancienne fosse d'exploitation ainsi que l'extension Est du
gisement.
Nous examinerons successivement:
- Le contexte géologique local du gisement de F'Derik ;
- La morphologie du gisement, les caractères du minerai
;
- Une étude microscopique qui porte
particulièrement sur les faciès ferrifères ;
I. Situation géographique et contexte
géologique local I.1Situation géographique
Le gisement de F'Derik est situé à
l'extrémité Ouest de la bordure Nord de la Kedia d'Ijil. Par la
route, F'Derik se trouve à 3 Km au NW et, Zouerate à 23 Km
environ vers le NE de ce gisement, (Fig.21). Notons que les gisements de la
région sont reliés au port minéralier de Nouadhibou, par
un chemin de fer à voie normale de 750 Km.
Figure 21 : Carte schématique montrant la succession de
gisements de la bordure nord de la Kedia d'Ijil (SNIM).
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