Partant du constat que les précédents
engagements sous-régionaux et continentaux étaient lettre morte,
le président congolais Dénis Sassou NGUESSO a proposé un
projet suffisamment élaboré visant à répondre
à la violence en Afrique d'où qu'elle vienne. Pour le
gouvernement de la République du Congo, le pacte panafricain contre
l'agression serait « un code de bonne conduite entre Etats africains qui
viendraient opportunément en appui au cadre tracé par le conseil
de paix et de sécurité de l'UA ».
Le pacte de non agression, texte de référence,
fondateur d'une nouvelle vision entre les Etats africains, à vocation
être le pilier de la sécurité de l'UA. A ce titre, il
précise les conditions d'une réponse à 100% africaine
à tout type d'agression qu'il s'agisse d'actes hostiles d'un pays
à l'encontre d'un autre ou d'une tentative de déstabilisation
d'un pouvoir démocratiquement élu par une rébellion. Il
est aussi une manifestation devant le monde entier de la volonté des
Etats de se soutenir mutuellement, de ne plus laisser les conflits internes ou
externes ruiner leur développement et meurtrir leur population.
L'auteur de ce pacte pense que le temps est arrivé
pour l'Afrique de s'investir sur la sécurité collective de
façon réelle : « cet état de fait ne peut plus durer.
Je le pense très sincèrement, il est temps que l'Afrique reprenne
le contrôle de son avenir et cesse de subir son sort en réagissant
si peu ou si tard. Je l'ai solennellement déclaré en maintes
occasions, il est temps qu'elle regarde la réalité en face et
comprenne que les incertitudes sur la paix et la sécurité en
Afrique sont trop nombreuses pour ne pas mettre tout en oeuvre pour la
défendre.
En d'autres termes, il est temps que l'Afrique prenne en main
son destin et qu'elle se donne les moyens diplomatiques et militaires de
répondre à la violence qu'elle qu'en soit la forme et d'où
qu'elle provienne, dans l'intérêt du continent tout entier
».
La pertinence de ce pacte est qu'il débouche sur une
politique de défense commune. Le projet de pacte de non agression
comprend de grandes idées devant structurer un système de
sécurité collective en Afrique, au regard des expériences
dramatiques qu'a connues le continent : Rwanda, Somalie, Liberia, Sierra
Léone...
Fondé essentiellement sur le droit, il comprend cinq
chapitres.
Le premier chapitre porte sur les définitions, en
particulier celle de l'agression, qui reprend sensiblement la résolution
3314 adoptées en 1974 par l'Assemblée générale des
Nations Unies.
L'innovation se trouve au niveau de la définition de la
« sécurité humanitaire » concept novateur dont le pacte
dit qu'elle signifie la sécurité de l'individu eu égard
à la satisfaction de ses besoins fondamentaux. Elle comprend
également la création des conditions sociales,
économiques, politiques, militaires, environnementales et spirituelles
nécessaire a la survie et la dignité de l'individu, y compris la
protection et le respect des droits humains, la bonne gouvernance et la
garantie à chaque individu des opportunités et des choix pour son
plein épanouissement.
Le chapitre trois énumère les nombreuses
obligations des Etats parties au pacte, dont la principale est l'engagement
à considérer toute agression ou menace d'agression contre un Etat
partie comme une menace contre tous les autres. Dans le cadre de l'engagement
des Etats africains contre l'agression, ils se doivent mutuellement assistance
en cas d'agression, ils s'engagent à réagir par des moyens
militaires à tout acte d'agression et à ne pas reconnaitre toute
acquisition territoriale qui en résulterait. Ils s'engage encore
à promouvoir des politiques de développement durable propre
à assurer le bien être des populations y compris la dignité
et les droits fondamentaux de toute personne humaine dans le cadre d'une
société démocratique. Tout cela implique l'engagement
à résoudre les différends de manière
spécifique, tout en insignifiant la lutte contre le terrorisme
international. Chaque Etat devrait ainsi empêcher l'utilisation de son
territoire d'un autre Etat partie. Les auteurs de tels actes d'agression seront
arrêtés et déférés devant la justice.
Enfin, les Etats s'engagent à fournir l'assistance
qu'ils jugent légitimes aux opérations militaires
décidées par le conseil de paix et de sécurité de
l'UA. A terme, les pays de l'UA s'engagent à constituer une armée
africaine en prenant en considération lé degré
d'intégration du continent sur la base des contingents en attente, selon
un délai à déterminer par la confiance des chefs d'Etas et
de gouvernements.
Le pacte justifie une attention plus particulière
notamment dans la perspective d'une mise en oeuvre concrète et de
l'adaptation de mécanismes et outils ad hoc. Ainsi, l'article 2 fixe
l'objectif général du pacte et, ce faisant, met l'accent sur la
coopération entre les Etats membres ? L'article 5 quant à lui,
porte sur la nécessaire collaboration des Etats parties en
matière de lutte contre le terrorisme international et
toute autre forme de criminalité transnationale. Les articles 7 ,8 et 9
traitent de la responsabilité individuelle et collective des Etats
membres dans les domaines de renseignement, des capacités
opérationnelles des forces armées ainsi que celle des
institutions africaines de recherche d'information et de formation.
Les articles 11, 12, 13 et 15 donnent un sens aux
résolutions précédentes par : la création au sein
du tout récent CPSUA de l'Union d'un comité africain de
renseignement et d'une commission africaine du droit international ;
l'importance accordée au développement de l'Académie
africaine pour la paix et du centre d'étude et de recherche sur le
territoire. Pour ce qui est du rôle des ensembles régionaux, le
CPSUA aura en charge la mise en oeuvre du pacte et le développement des
mécanismes devra davantage s'inspirer de l'OTAN. L'importance du
renseignement se repose dans le projet du pacte à l'intention
affichée de l'UA de se doter d'un comité de renseignement qui
impérativement doit concrétiser dans les faits.
Le pacte se présente comme un éveil de
l'Afrique aux réalités du monde moderne et à sa
volonté d'assumer en propre ses responsabilités. L ouvre des
voies de coopération interafricaine qui répondent, bien que de
manière trop diplomatique, aux exigences de sécurité du
continent et aux conditions fixées par le G8 pour aider l'Afrique
à surmonter ses handicaps économiques et sociaux. Car
l'éradication des conflits tribaux religieux ou de voisinage est, et
restera le préalable indispensable à l'accession des pays
africains à la modernité.
En outre, l'auteur de ce pacte, l'article autour de trois
volets : engagement des Etats contre l'agression ; principes africains de
prévention des conflits et instruments de prévention et de
résolution des conflits.
Le premier volet amorce le principe « d'assistance
mutuelle assurée » de tous les Etats signataires du pacte en cas
d'agression de l'un d'eux, ce qui réduirait les motivations du pacte des
Etats désireux d'agresser les autres. Cette assistance n'est pas
limitée au seul cas d'agression, vu la définition de ce concept
« emploi de la force armée contre la souveraineté,
l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un
autre Etat ou de toute autre manière incompatible avec la charte
».28 Mais elle est aussi valable dans le cas d'un conflit
interne laissant le pays dans l'incapacité d'assurer sa
sécurité : c'est le collapsus étatique. Ce premier volet
intègre également la menace terrorisme et de l'intégration
économique.
Le second volet est celui de la diplomatie préventive,
du maintien et du rétablissement de la paix. Dans son Agenda pour la
paix du 30 janvier 1992 BOUTROS BOUTROS-GHALI, alors Secrétaire
général de l'ONU définissait la diplomatie
préventive comme un ensemble de méthodes ayant pour objet :
d'éviter que les différents ne surgissent entre les parties ;
d'empêcher qu'un différend existant ne
dégénère en conflit ouvert ; de faire en sorte, au cas
où un conflit aurait néanmoins éclaté, qu'il
s'étende le moins possible aux régions voire aux pays voisins.
Cette définition trace un canevas dans le mécanisme de
prévention, de gestion et
28 . Résolution 3314 du 14.12.1974 de l'AG de
l'ONU
de règlement des conflits. La prévention dans
ce volet comporte deux variantes, la précoce et la prévention
ultime.
S'agissant de la prévention précoce, elle est
celle qui consiste à éviter qu'un différend ne surgisse,
J.H DUNANT disait : « si l'on m'avait soigné plut tôt,
j'aurais pu vivre, tandis que ce soir je serai mort » le soir il
était mort.29 Cette prévention est possible par la
mise en place d'un mécanisme d'alerte au niveau africain.
Une fois le conflit déclenché, c'est la
deuxième variante qui s'applique, la prévention ultime, faisant
de sorte que le conflit ne s'étende pas aussi longtemps que possible.
Ces deux variantes de prévention conduisent au maintien
de la paix.
Le troisième volet inscrit les instruments de
prévention et de résolution des conflits. A ce niveau,
l'instrument privilégié est l'Union Africaine, avec la
création d'un réseau panafricain d'analyse et de
prévision, car « la connaissance la plus exacte possible à
la réalité est un préalable à toute action
politique qu'elle qu'en soit la nature »30 Ce volet tient
également compte de la coopération militaire, pour aboutir
à la création d'une force panafricaine de paix à l'instar
des casques bleus de l'ONU, de l'OTAN et bien d'autres. Un point important est
mentionné dans ce volet, celui du pré positionnement des forces
afin de stabiliser les frontières interafricaines.
La question des frontières interafricaines a jadis
été réglée sur le plan juridique par les chefs
d'Etats africains après les indépendances, en considérant
les frontières issues de la colonisation. De nos jours l'explosion
démographique et la chasse aux richesses du sol amènent certains
pays à agresser les autres. Du fait que le pacte panafricain proscrit
l'agression , l'Angola, le Congo et la RDC signe un accord tripartite dans le
cadre de la sécurité des frontières donc la
sécurité collective, qui est retenu par les pays d'Afrique
centrale vise la réalisation d'une paix durable et englobe des
éléments de réponse aux causes profondes des conflits de
cette sous-région.
C'est ainsi qu'aux mesures de confiances politiques et
militaires imaginés par le comité s'ajoutent d'autres mesures
relatives aux droits de l'homme, la démocratie, à la
coopération juridique et problèmes humanitaires. 31
Notre démarche dans cette deuxième partie,
consiste à exposer sur les stratégies et procédures
d'application de cet accord.
29 J.H Dunant cité par Eric David in principes
de droit des conflits armés 1999, p36
30 Dénis Sassou NGUESSO, « pour un pacte panafricain
de non agression » Géopolitique Africain, le 10 avril 2003
»
31 M. MABIALA, « coopérer pour la paix en Afrique
centrale », UNIDIR , 2003, p 7
DEUXIEME PARTIE
LE MECANISME DE L'ACCORD TRIPARTITE
DE
SECURITE