5.2.
Caractéristiques cliniques
5.2.1.
Antécédents personnels et familiaux
Parmi les sujets de l'étude, 80% avaient un
antécédent d'HTA et 26% un antécédent de
diabète. L'antécédent familial d'HTA était
également présent dans 18% des cas. Nos constats rejoignent ceux
des travaux consacrés à l'AVC en Afrique subsaharienne qui
montrent que l'HTA et le diabète sont les principaux facteurs de risque
(29). Plus précisément, l'HTA est impliquée dans 32,3%
à 68% des infarctus cérébraux et dans 44% à 93,1%
des hémorragies intracérébrales (75-78). Le diabète
est le second facteur de risque, associé aux infarctus
cérébraux dans 3,2% à 37,3% des cas (75-80). De
même, ce profil des facteurs de risque est comparable à celui
retrouvé dans plusieurs études en dehors de l'Afrique. En Espagne
par exemple, Alzamora et al. (81) ont rapporté les
facteurs de risque ci-après : HTA (66%), antécédent
d'AIT (6%), Dyslipidémie (31%), diabète sucré (34%),
apnée du sommeil (5%). Dans le même ordre d'idées, dans
leur étude sur le rôle du stress psychologique sur la survenue de
l'AVC ischémique, Jood et al. ont rapporté un lien significatif
entre l'HTA, le diabète et le stress psychique perçu (82).
5.2.2. Manifestations
psychiatriques
Dans le cadre de cette étude, 56% des sujets
présentaient un trouble psychiatrique à l'examen clinique. Il
s'agissait d'un trouble dépressif (34%), d'un trouble
anxio-dépressif (10%), d'un trouble anxieux (10%) ou d'un trouble
délirant (2%). Ces résultats montrent que les TPPAVC sont
fréquents à Kinshasa et confirment que le risque de
développer un trouble neuropsychiatrique après un AVC est
élevé (48).
5.2.2.1. Troubles dépressifs
La dépression est le trouble psychiatrique le plus
fréquent dans les suites d'un AVC. Les fréquences
observées varient selon l'échantillon (population
générale, structure hospitalière, structure de
réhabilitation), le moment de l'évaluation par rapport à
la survenue de l'AVC (phase précoce ou tardive) mais aussi en fonction
des outils de diagnostic clinique utilisés (85). Pour Carota et
al. , la fréquence de la DPAVC varie comme suit : 6 à
22% dans les deux premières semaines post-AVC, 22 à 53% à
3 mois post-AVC, 16-47% à un an, 9-41% à 3 ans, 35% à 4,9
ans et 19% à 7 ans (36).
Dans cette étude, la DPAVC a été
retrouvée chez 44% des patients. Nos observations rencontrent celles
généralement notées car la prévalence de la DPAVC
varie entre 18 et 60% voire plus dans le monde (31). Dans le même sens,
Kotila et al. (66) ont rapporté une prévalence de 41% et de 54% 3
mois après l'AVC selon que les patients bénéficiaient ou
non d'un suivi après l'hospitalisation. Sinyor et al. quant à eux
rapportent une prévalence de 50% (83), pendant que Chatterjee et al.
observent 67,5% des cas de dépression (64). Srivastava et al. (63) ont
rapporté une prévalence de 35,29%. Ce chiffre s'élevait
à 56% dans l'étude de Haq et al. (84).
Il est important de noter que l'évaluation des DPAVC
repose sur l'entretien clinique ; mais il peut être avantageusement
complété par une évaluation des fonctions
neuropsychologiques et par l'utilisation d'échelles spécifiques
validées pour l'évaluation de la symptomatologie affective
survenant au décours d'accidents cérébraux (85-88). Dans
le cadre de cette étude, deux échelles ont été
utilisées pour l'évaluation de la DPAVC. Le score
« Hospital Anxiety Depression Scale de Sigmond et Snaith
(HAD) » a été appliqué à 32 des 50
patients : la moitié d'entre eux - 16 patients -
présentait un état dépressif certain, ce qui correspond
à 32% du total des sujets (50 patients); 5 patients
présentaient un état dépressif douteux soit 10% de
l'effectif total. Dix-huit patients ont été soumis au Stroke
Aphasic Depression Questionnaire. Seize sujets étaient
déprimés soit 32% du total des patients. En considérant
les résultats de ces deux échelles, on arrive à un total
de 32 patients déprimés soit 64 % du total de
l'échantillon. Il apparait à ce niveau une différence
entre la prévalence trouvée à l'évaluation clinique
(44%) et celle trouvée par l'utilisation des échelles (64%). En
effet, plusieurs éléments peuvent interférer avec le
diagnostic de la DPAVC. Même si le langage et l'attention ne sont pas
profondément atteints, les patients peuvent avoir du mal à
répondre adéquatement aux questions lors de l'entretien (89).
L'apathie est souvent présente en cas de dépression
endogène. Après un AVC, l'apathie peut-être présente
sans forcément être associée à une dépression
(36). Ceci peut expliquer la différence des fréquences
observées selon que l'on utilise ou non une échelle pour le
diagnostic de la DPAVC. Ceci se rapproche du constat de Haq et al. qui ont
utilisé le Patient Health Questionnaire (PHQ 9) et ont observé
une prévalence de 58% (84). Cette valeur s'élevait à 28%
lors de l'évaluation clinique sans échelle. Ces auteurs ont
conclu qu'il était important de disposer d'un outil de diagnostic pour
le suivi des patients en post-AVC.
Les rapports entre les maladies
cérébrovasculaires et la dépression sont de plus en plus
discutés ; et il semble que ceux-ci sont plutôt complexes et
pas forcément unidirectionnels. La dépression est de plus en plus
considérée comme un facteur de risque de survenue d'un AVC
(90 -91) en même temps que les troubles
cérébrovasculaires sont considérés comme cause
potentielle de dépression surtout chez les patients âgés
(92-95). Le fait que la dépression apparaisse fréquemment en
post-AVC est un des arguments évoqués sur l'origine vasculaire de
la dépression surtout chez la personne âgée. Du reste, un
certain nombre des patients déprimés présentent des
stigmates radiologiques d'AVC passés inaperçus (96).
Il faut noter que l'antécédent d'AVC est un des facteurs
de risque de DPAVC aux côtés du sexe féminin, de
l'isolement social et de l'antécédent de dépression
(97-101).
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