Constat 3 : Contournement des
méthodes à base communautaire lors de l'identification et de la
sélection des bénéficiaires des projets
La lutte contre la pauvreté est devenue le leitmotiv
d'une multitude d'ONG tant internationale que locale. À quelques
différences près, elles inscrivent leurs interventions dans
l'action humanitaire et la lutte contre les inégalités ou les
disparités. Du coup, elles investissent un champ social assez complexe
requérant des moyens financiers et du tact pour mener à bien
leurs objectifs. Du point de vue de la méthodologie de terrain, l'ONG
CARE exécute différents programmes selon la philosophie de ses
multiples bailleurs de fonds. Ainsi dans la mise en oeuvre (exécution)
des micro-projets, cet organisme de développement s'appuie sur des
logiques d'intervention et des méthodologies différentes et
parfois concurrentes mis à sa disposition et/ou exigé par les
différentes institutions finançant ses activités.
Les critiques portées contre l'approche dite du
`'dirigisme `'ou ''d'assistanat'' dans la méthodologie
de lutte contre le sous-développement ont abouti à la
révision de la démarche d'approche des structures d'appui au
développement, en matière de lutte contre la pauvreté.
Partant, dans la sélection des pauvres et leur localisation spatiale la
structure d'appui CARE revendique une démarche à base
communautaire et participative. La plupart des outils d'intervention (PIPO,
MARP dont les outils sont le diagramme préférentiel, le diagramme
de venn, l'arbre à problèmes et à solutions, le profil
historique ...), des logiques s'y référant, des outils d'analyse
(cadres de réflexion, instruments, concepts etc.) proviennent des
organismes de soutien à la lutte contre la pauvreté et de leurs
bailleurs de fonds dans la mise en oeuvre concrète de cette
méthodologie. Dans ces conditions, les communautés à la
base (à travers les comités installés par CARE dans les
villages) mettent du temps à les intégrer dans leur
manière de voir. Ainsi l'approche communautaire et participative- sur
laquelle s'appuie CARE- contribue à créer des tensions car les
comités mis en place au niveau local pour identifier et
sélectionner les bénéficiaires insèrent leurs
connaissances ou parents qui ne remplissent pas toujours les critères de
ciblage de l'ONG. Parfois, les populations contestent les critères
proposés par les projets auxquels elles substituent de nouveaux. Ces
nouveaux critères élargissent le champ social des
bénéficiaires potentiels en diluant le ciblage, distendant ainsi
le sens du concept de vulnérabilité à l'origine du projet.
Ces écarts ont conduit l'ONG CARE à travers le cabinet
d'étude privé ICC à se substituer aux populations dans
l'identification et le choix des bénéficiaires des projets lors
des premiers projets de CARE dans l'Ouest entre 2004-2005, notamment sur le
projet PARCI. Cette façon de contourner les difficultés
d'articulation des contraintes posait à terme le problème de
réclamations récurrentes des communautés
bénéficiaires des projets dans de tels contextes.
De ce constat, les questions suivantes sont soulevées :
si l'approche participative devait permettre de cibler les plus pauvres, qu'est
ce qui explique les contestations récurrentes des populations ? Pourquoi
l'approche communautaire et participative mobilisée par CARE et les
logiques des acteurs ne permettent pas d'atteindre les plus pauvres ? Comment
rendre plus efficace la méthode participative dans les politiques de
ciblages dans les projets de lutte contre la pauvreté ?
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