Les contradictions des politiques de ciblage dans les projets de lutte contre la pauvreté dans l'ouest montagneux ivoirien( Télécharger le fichier original )par Alexis KOFFI Université de Bouaké - DEA 2009 |
Constat 2 : Cumul de microprojets dans certaines localités.La région de l'Ouest de la Côte d'Ivoire a été particulièrement affectée par le conflit armé du 19 septembre 2002 au point où presque tous les villages et villes se sont appauvris5(*). La destruction des biens et/ou l'abandon des exploitations et autres activités humaines semblent caractériser la zone. Dans la phase du soutien humanitaire, de reconstruction et de réhabilitation post-conflit, toutes les communautés de la zone souhaitent avoir le même traitement de la part des humanitaires. Cependant, certaines localités ou zones de la région, comme le canton Zou dans le département de Duékoué, reçoivent de façon régulière des interventions tandis que d'autres ne bénéficient d'aucun projet véritable. En effet, du mapping des interventions des organismes de soutien à la lutte contre la vulnérabilité, il semble qu'il est plus intéressant de mener des projets dans certaines localités que dans d'autres, alors que le taux de pauvreté est relativement identique à l'échelle régionale. La raison de ce choix vient du fait que les bailleurs de fonds sont plus prompts à financer des projets exécutés dans certaines zones que d'autres. C'est ainsi que certaines localités de l'ouest montagneux agglutinent de nombreux micro-projets quelquefois de même genre financés par différents bailleurs de fonds et exécutés par plusieurs prestataires de services. Parfois, des structures de même nature à l'instar de CARE, GTZ, IRC et CARITAS mènent dans les mêmes villages plusieurs projets au détriment d'autres villages présentant apparemment les mêmes états de pauvreté et de vulnérabilité. L'ONG CARE a contribué dans ces conditions à la mise en place de micro-projets de diverses natures : réhabilitation de maison, distribution de kits, réalisation de cultures vivrières et maraîchères, acquisition et l'installation de décortiqueuses, la réhabilitation de fermes piscicoles, mise en place de micro-unités de fabrication de savon artisanal `'Kabacrou'', réhabilitation de pompes qui bénéficient la plupart du temps aux mêmes communautés. Par ailleurs, CARE se trouve confrontée à la concurrence d'autres ONGs telle IRC qui a entrepris la mise en oeuvre de micro-projets similaires à ceux qu'elle exécute. Dans cette dynamique concurrentielle, ces structures d'appui développent des projets capables d'améliorer les conditions de vie des communautés. Les groupes généralement ciblés sont les personnes âgées, les femmes et les jeunes. Or certains membres de ces communautés visées pratiquent des inscriptions multiples dans plusieurs projets. Ainsi ils captent les projets ou les fonds de démarrage des activités lorsqu'ils sont retenus sur ces programmes, puis finalement ne s'attachent à aucun micro-projet en particulier. Il y a donc très souvent un abandon des micro-projets par leurs bénéficiaires. Ce cumul et/ou cette superposition de micro-projets de même nature dans les mêmes communautés participent à la réduction des résultats attendus dans la mise en oeuvre des programmes de lutte contre la pauvreté. En effet, en raison du caractère concurrentiel des méthodologies d'intervention des ONGs et de leurs structures techniques de sous-traitance ; il y a un ciblage des mêmes individus dans certaines communautés ou des mêmes villages réduisant ainsi la chance des autres membres de bénéficier des projets de lutte contre la pauvreté. L'on a pensé que la présence de plusieurs ONGs et structures d'appui auprès des populations, leur serait bénéfique d'autant plus que cela permettrait de faire profiter à plusieurs individus avec des moyens conséquents. Il ressort des préoccupations soulevées par ce deuxième ordre de constat les questions suivantes : En quoi les politiques différentiées de ciblage des agences sont-elles des causes de cette agglutination finalement inefficace pour les populations parfois désorientées ? Dans quelle mesure les rapports concurrentiels entre agences influencent-ils l'orientation et les stratégies développées par les bénéficiaires ? * 5 Selon le rapport final du DSRP 2009, la pauvreté de la zone Ouest de la Côte d'Ivoire qui était de 64,4% en 2002 est passée à 63,2% en 2008. |
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