3.2.3. Validité économique des
coefficients
Adéquation d'ensemble du
modèle
Dans le cas des modèles à variables
dépendantes discrètes ou limitées, l'adéquation
du modèle est indiquée par l'indice du ratio de vraisemblance
aussi appelé le R2 de Mac Fadden.
Son expression est donnée par R2 = 1 -
|
L 1
L0
|
avec L1 la vraisemblance du modèle avec
|
variables de valeur -90,7843 et L0 la vraisemblance du
modèle sans variables de valeur - 199,4597. L'adéquation d'un
modèle permet de rendre compte de la pertinence du modèle
spécifié et estimé. L'indice du ratio de vraisemblance
donne donc le pourcentage de la variation de la variable dépendante du
fait de la présence des variables explicatives. Dans ce sens,
R2 = 0,5448 signifie que 54,48% des variations de la
probabilité d'adopter un nombre donné de technologies CES sont
expliquées par l'ensemble des variables explicatives incluses dans le
logit multinomial. Etant donné ce type de modèle, l'on peut dire
que le modèle spécifié est adéquat dans son
ensemble.
Le test de vraisemblance du modèle est également
utilisé pour mesurer l'adéquation d'ensemble du modèle.
Le principe de ce test est basé sur le test de l'hypothèse que la
« moins double log vraisemblance » est nulle (Ho : -2LL = 0). La
démarche consiste à tester
l'hypothèse que la différence entre la -2LL du
modèle sans variable et la -2LL du modèle à tester est
nulle. En calculant la différence des « moins double log
vraisemblance » entre ces deux modèles, l'on obtient que la valeur
calculée vaut 217,3507 tandis que la valeur théorique est de
20,01 lue sur la table de la loi de Chi2 avec 8 degrés de liberté
au seuil de 1%. La valeur calculée étant supérieure
à la valeur théorique à ce seuil, l'on rejette alors
l'hypothèse de nullité de la différence entre les deux
-2LL. En conclusion, le modèle est donc adéquat dans son
ensemble
Significativité statistique des coefficients du
modèle
La méthode utilisée pour tester la
significativité individuelle des coefficients du modèle consiste
à comparer la valeur de la probabilité de significativité
de chaque coefficient au seuil de significativité retenu. Ce seuil est
fixé à 1%, 5% et 10% respectivement pour les coefficients
très significatifs, moyennement significatifs et significatifs à
la limite.
Pour la probabilité que les ménages adoptent une
seule technologie CES, les coefficients des variables cout et taille sont
significatifs respectivement au seuil de 1% et de 10%. Les coefficients des
autres variables ne sont significatifs à ces seuils.
Concernant la probabilité d'adopter deux technologies, les
coefficients des variables cout, superficie sont significatifs à 1%
alors que le coefficient de escompt est significatif à 5%. Quant
à la probabilité que les ménages adoptent trois
technologies CES, les coefficients des variables cout et taille sont
significatifs respectivement au seuil de 1% et de 10%.
Enfin, les coefficients de la variable cout et de utilite sont
significatifs respectivement au seuil de 1% et de 10% pour la
probabilité que les ménages adoptent quatre technologies. Par
contre la probabilité que le ménages adoptent cinq mesures CES,
seul le coefficient de cout est significatif au seul de 1%.
Interprétation économique des
coefficients
L'intérêt de cette partie porte sur les variables
pour lesquelles les coefficients sont statistiquement significatifs. De plus,
il s'agit de prendre en compte les signes des différents coefficients
des variables ainsi que de leurs effets marginaux. Rappelons que les
coefficients estimés du modèle ne sont pas directement
interprétables, ils servent plutôt à donner orientation sur
la nature de la relation entre la variable expliquée et la variable
explicative en question. Seuls les effets marginaux du modèle
estimé sont interprétés en se référant
aux
coefficients de la modalité de référence,
celle de la non adoption. Il faut également souligner que l'analyse se
mène en se référant à la moyenne de
l'échantillon. En d'autres termes, c'est l'impact de la variation de
chaque variable sur le comportement du ménage moyen qui est
analysé.
Remarquons que pour l'adoption d'une seule technologie CES, le
coefficient de la taille du ménage est négatif de même que
son effet marginal. Cela signifie que la taille des ménages a un effet
individuel négatif sur la probabilité d'adopter une seule
technique toutes choses égales par ailleurs. Autrement dit, lorsque la
taille du ménage augmente d'une personne supplémentaire, la
probabilité que ce ménage adopte une seule technique baisse de
0,0027 points. Ce résultat s'explique par le fait que l'arrivée
d'un nouveau membre dans le ménage accroît la consommation globale
du ménage. Celui-ci doit accroître sa production afin de
répondre à ce besoin additionnel. Le ménage serait alors
peu incité à rester sur l'utilisation d'une seule technique si
celle-ci ne lui permet pas d'atteindre son nouvel objectif d'accroître sa
production. Ce résultat est conforme à la théorie
décrite plus haut.
La variable cout a également un coefficient de signe
négatif de même que son effet marginal. Autrement dit, le
coût d'adoption des CES a un effet négatif sur la
probabilité que les ménages adoptent une seule technologie sur
son exploitation. Ainsi, lorsque ce coût s'accroît de 1%, toutes
choses égales par ailleurs, la probabilité que les ménages
continuent à adopter une technique de conservation des eaux et des sols
baisse de 0,0345point. Cela s'explique par le fait que la seule technique
utilisée par le ménage peut être déjà
coûteuse comme le zaï dont la réalisation sur un seul hectare
a un coût estimé à 723 000 Fcfa (Rijks et al, 1997). Si ce
coût doit encore s'accroître, il est clair que certains
ménages seront peu motivés à adopter cette technique.
En considérant l'adoption de deux techniques CES, les
coefficients des variables cout, superficie et escompt sont respectivement
négatif, positif et négatif. Leurs effets marginaux sont
également de même signe et significatifs à 1% pour la
variable cout, 10% pour la variable superficie et 5% pour la variable escompt.
Ainsi, lorsque le coût d'adoption s'accroît de 1%, la
probabilité qu'un ménage adopte une combinaison à deux
techniques CES baisse de 0,3603 point toutes choses égales par ailleurs
en comparaison avec la situation de non adoption des CES. Ce résultat
confirme l'hypothèse sur le signe du coût d'adoption par rapport
à l'adoption des CES. En effet, dans l'estimation de ce coût,
l'effort physique et financier est pris en compte. Plus ce coût est
élevé, moins les ménages seront à mesure d'adopter
deux techniques coûteuses.
Concernant la superficie aménagée, lorsqu'elle
augmente d'un hectare, la probabilité que les ménages adoptent
deux techniques s'accroît de 0,0081 point en considérant les
autres facteurs constants et par rapport à la situation de non adoption.
L'on peut expliquer ce résultat par le fait que le gain d'un nouvel
espace non aménagé de terre augmente la chance que les
ménages adoptent la combinaison de deux techniques toutes choses
égales par ailleurs. En effet, dans la zone d'étude où la
disponibilité en terre est rare, tout espace additionnel acquis par un
ménage serait automatiquement mis sous mesures CES en vue de
prétendre à un rendement de l'activité de production.
Quant aux rendements escomptés, si les ménages
escomptent que ceux-ci vont s'accroître de 1% par rapport la situation
où ils utilisent aucune technique CES, la probabilité d'adopter
deux techniques CES baissent de 0,2737 points cétéris paribus. En
effet, si les ménages espèrent plus en la technologie
adoptée des rendements satisfaisant à ses attentes, ces
ménages seront peu motivés à utiliser une combinaison de
deux techniques sur leur exploitation.
Pour l'adoption de la combinaison à trois technologies,
le coefficient de la variable cout et celui de la variable taille sont positifs
de même que leurs effets marginaux. Ainsi, lorsque le coût
d'adoption de ces techniques augmente de 1%, la probabilité que les
ménages adoptent cette combinaison s'accroît de 0,1466 points tous
les autres facteurs restants constants.
Ce résultat va en contradiction avec le signe
théorique attendu de l'effet de cette variable sur la probabilité
d'adopter un certain nombre de techniques. En effet, cela paraît
paradoxal que les ménages adoptent davantage de techniques CES alors que
leurs coûts de mise en oeuvre augmentent. Cependant, l'on peut comprendre
ce fait lorsqu'on relâche une des hypothèses fondamentales du
modèle. Cette hypothèse stipule que dans le plateau central,
l'adoption des techniques de conservation des eaux et des sols est
individuelle. Selon cette hypothèse, la mise en oeuvre des cordons
pierreux et des autres techniques est effectuée par le ménage
luimême.
Or, une des remarques importantes est que dans les
localités qui ont été retenues pour la collecte des
données de l'enquête, le point commun à celles-ci est
qu'elles sont toutes situées sur les bassins versants (PS-CES/AGF).
Ainsi, lors de l'enquête, l'on a remarqué notamment dans la
province du Passoré que les paysans sont organisés en groupement
villageois créant de la sorte un système d'entraide mutuelle
entre eux. Ceci leur permet d'effectuer des travaux difficiles à
réaliser individuellement comme la casse des pierres en vue de
l'obtention des moellons pour la mise en oeuvre des cordons pierreux. De plus,
des projets de développement existent dans la zone à l'instar du
programme de développement rural durable (PDRD) qui
apporte une assistance technique et matérielle au
groupement de paysans. L'assistance matérielle concerne la fourniture
des groupements en matériel de casse des moellons, de camions de
transport des moellons. L'ensemble de cette aide diminue les coûts
réels d'adoption au niveau des ménages qui peuvent alors adopter
des combinaisons avec un plus grand nombre de technologies. De ce fait, sous
l'effet de l'action collective la probabilité que les ménages
adoptent trois techniques augmente lorsque les coûts d'adoption
s'accroissent. Remarquons aussi que 39,56% des ménages, soit 53 sur un
effectif de 134, des deux provinces adoptent trois techniques CES.
Pour l'adoption de quatre et de cinq techniques, seul le
coût d'adoption a un coefficient significatif à 1% et son effet
marginal est négatif et significatif à 1% dans le cas de la
combinaison à quatre techniques et non significatif dans le cas de la
combinaison à cinq techniques. L'accroissement du coût d'adoption
des mesures CES de 1% entraîne donc toutes choses égales par
ailleurs une baisse de la probabilité que les ménages utilisent
cinq techniques sur leur exploitation. De même, la perception de
l'utilité des techniques CES a un coefficient positif ainsi que son
effet marginal. L'on peut dire que lorsque le ménage perçoit un
passage du degré d'utilité de la technologie du niveau faible au
niveau moyen ou du moyen au élevé, la probabilité
d'adopter une combinaison de quatre technologies augmente de 0,0347 point
toutes choses égales par ailleurs. L'explication possible à ce
résultat est que plus le ménage voit en la technologie le
stimulateur de sa productivité, il sera mieux motiver à vouloir
se l'approprier. Ce résultat est conforme à celui obtenu par
Davis (1986). Noter que cette dernière combinaison de technique CES est
faiblement adoptée (0,75% de l'effectif total) par les ménages
qui ont été interviewés du fait du manque de
l'indisponibilité en terre dans la région.
A travers cette analyse des impacts des différentes
variables explicatives sur la variable dépendante, il serait important
de connaître les implications sous-tendues par ces résultats.
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