CHAPITRE TROTS
LIMITES DE L'INTERNET ET
SUGGESTIONS DE SOLUTION
3.1 Introduction
Cette section est consacrée aux limites de
l'Internet en termes d'accès et d'utilisation optimale de la population
Camerounaise ainsi que des propositions de solutions. Le travail se base sur
l'expérience personnelle et les éléments recueillis sur le
terrain (ANTIC, MINPOSTEL, CUTI/UY1, Université de Yaoundé 1,
CAMTEL).
3.2 Limites de l'Internet
3.2.1 Cadre juridique et réglementaire
inadéquat
Sur le plan juridique, s'il fallait comparer le
Cameroun à la France qui est dotée du CNIL (Commission Nationale
de l'Informatique et des Libertés), nous dirons simplement que nous
vivons une situation de vide juridique. En effet nous notons :
- l'absence des lois appropriées pour lutter
contre les délits informatiques et cybernétique, la protection et
la sécurité des données, la liberté d'accès
à l'information;
- l'absence de loi concernant les intrusions non
autorisées ;
- la principale loi portant réglementation des
télécommunications [28] ne fait pas d'allusion à
l'accès à l'Internet;
- l'inexistence d'une législation relative au
commerce en ligne ou à l'échange de données
informatisées (EDI). Cette législation devrait pourtant donner
une reconnaissance juridique à la signature électronique et
favoriser la mise en place des transactions en ligne.
3.2.2 Insuffisance et coût élevé des
offres
Nous notons dans cette section les points suivants
:
- les redevances de l'Internet restent encore
très élevés par rapport au niveau de vie pour une offre
avec un débit acceptable ce qui constitue un frein supplémentaire
à la demande de l'Internet dans les ménages;
une grande disparité (géographique, niveau
de revenu, niveau d'instruction) dans l'accès à
l'Internet;
l'offre est pratiquement restreinte à l'Internet
bande étroite, de plus cette bande est rarement garantie;
une forte concentration des opérateurs en milieu
urbain au détriment de l'arrière pays.
3.2.3 Insuffisance d'offres en services
- de nombreux sites webs d'entreprises et des
administrations ne sont qu'à titre figurative avec une publication
pauvre et dans certains cas rarement mis à jour;
- la majorité des bases de données
constituées dans la plupart des services publics et privés est
dans une phase de développement embryonnaire. Ce qui contraste avec les
exigences de gestion moderne des structures, des infrastructures et des
services.
- sur le plan de la santé par exemple le constat
est le suivant :
o- inexistence de la notion de dossier médical
personnalisé pour les patients exploitable en ligne entre les
différents centres de santé.
o- système d'information sanitaire
embryonnaire
o- absence de la notion d'assurance maladie universelle
ne favorisant pas l'usage public à grande échelle dans ce
domaine.
- les plates formes fédératrices
d'application sectorielles et territoriales, facilitant le travail collaboratif
en ligne des différents acteurs sont presque inexistantes.
- l'infrastructure de collecte, de traitement et de
diffusion en ligne de l'information (banque de données) est encore
rudimentaire; il n'existe pas à proprement parler de véritables
systèmes d'informations dans la plupart des administrations et
entreprises.
3.2.4 Problème de souveraineté et de
sécurité nationale
- des services sont fournis par voie hertzienne sans
l'autorisation formelle de l'administration, il en est de même des
boucles locales sans fil.
- le choix de nommage est dans beaucoup de cas
incohérent, en effet très peu de nom de domaine ont une extension
«.cm »y compris pour les institutions
républicaines.
- l'absence de législation en matière de
cybercriminalité, la non dotation des services de sécurité
des moyens (structure et personnels spécialisés) pour la
prévention et la répression des actes criminels exposent le
Cameroun à toute forme de perversion dans ce domaine. Nous citerons
à titre d'exemple l'accès non autorisé aux systèmes
d'informations des entreprises et institutions publiques avec
possibilité de détérioration de données et
d'atteinte aux bonnes moeurs.
- les renseignements personnels et l'information sociale,
juridique et économique détenus par les entreprises et
institutions sont stockés et traités à l'extérieur
du pays.
- la non disponibilité ou l'obsolescence des
renseignements sur le Cameroun dans les sites webs officiels entraîne la
dépendance des chercheurs de ces renseignements vis-à-vis des
informations produites par les étrangers.
3.2.5 Insuffisance en ressources humaines
Le Cameroun ne dispose pas de la masse critique minimale
de spécialiste permettant de soutenir son développement dans les
technologies Internet. Comme raison nous pouvons énumérer : - le
système éducatif où :
o- la quasi-totalité des établissements
d'enseignement primaire et secondaire ne dispose pas de salle multimédia
et Internet.
o- la plupart des laboratoires de recherches en milieu
universitaire ne disposent pas d'une connexion Internet et lorsque cela existe,
le débit est peu praticable et la connexion pas toujours
permanente.
o- la production scientifique électronique est
embryonnaire et très peu visible sur le réseau. o- la production
et l'usage des contenus pédagogiques interactifs sont pratiquement
inconnus
o- très faible présence des centres de
formations en technologie Internet
l'exode massif des spécialistes vers
l'étranger à cause du traitement et d'une absence de
perspective de carrière attrayante dans les
administrations et les entreprises locales.
3.2.6 Déficit organisationnel
- faible coordination entre les différents
acteurs : la mise en place des réseaux se fait de manière non
concerté à l'intérieur d'un même secteur
(administration publique par exemple). Cela entraîne une duplication des
actions et une incompatibilité des choix technologiques qui finalement
conduit dans certains cas à l'impossibilité d'échanges
d'informations interréseaux.
- gestion manuelle d'allocation des adresses IP : Les
adresses IP dont la réserve s'épuise déjà sont
parfois attribuées de façon manuelle en dehors d'un gestionnaire
d'adressage IP, ce qui conduit à la duplication des adresses et donc des
conflits sur le réseau. [8]
3.3 Suggestions de solutions
3.3.1 Mise en place d'un cadre réglementaire
approprié
Il est nécessaire de mettre en place un cadre
réglementaire et juridique approprié, pour d'une part faire face
aux contentieux relevant du domaine (Cybercriminalité, atteinte aux
bonnes moeurs), mais aussi lancer les bases de services nouveaux (Commerce
électronique par exemple).
3.3.2 Réduction des coûts d'exploitation et
d'acquisition
L'acquisition et l'exploitation de l'Internet au
Cameroun demeure relativement très coûteux. Cela est à
l'origine d'une télédensité Internet très faible.
L'Etat peut améliorer cette situation en réduisant les taxes
vis-à-vis des FAI.
3.3.3 Amélioration de l'accès,
Rationalisation de l'utilisation
Il s'agit d'améliorer l'accès et de
rationaliser l'utilisation de l'Internet dans le secteur de l'éducation
et de la recherche
- mise en place d'un centre virtuel interuniversitaire de
ressources documentaires accessible en ligne et régulièrement mis
à jour.
- multiplication au niveau des campus des
établissements d'enseignement secondaire, des points d'accès
gratuit ou à coût accessible au grand nombre.
- création des espaces enseignants sur les
sites web des institutions universitaires et scolaire où les
étudiants/élèves pourront accéder aux ressources
(Cours, Travaux dirigés, épreuves des sessions
antérieurs).
- développement et vulgarisation des centres
Internet dans les établissements du secondaire sur toute
l'étendue du territoire national
- dotations des institutions éducatives en
véritable système d'informations permettant l'accès,
l'exploitation, la collecte et la diffusion des ressources
éducatives.
- développement des centres de formation
spécialisés en technologie Internet (à l'image des
académies CISCO, Acerfi) sur l'ensemble du territoire
national.
- consolidation du réseau RIC.
- création de technopoles.
3.3.4 Développement d'un backbone national
à haut débit
- interconnexion de tous les chefs lieux de
département
- finalisation du projet de connexion des grandes villes
au moyen des 12 points de sortie de la fibre optique le long du pipeline
Tchad-Cameroun
- privilégier les technologies d'accès par
voie hertzienne pour les zones rurales (Car sont moins onéreuses que le
déploiement d'un réseau filaire)
- développement des accès communautaires
en zone rurale (Télécentres communautaires). - diversification
des sources d'approvisionnement du pays pour éviter la panne du
câble SAT3 qui au mois de novembre 2007 avait plongé le pays
pendant quinze jours dans l'isolement.
3.3.5 Implication de l'Etat dans la gouvernance de
l'Internet au niveau local
- développement des noeuds nationaux
d'interconnexion des réseaux nationaux et mise en place des points
d'échanges Internet (IXP)
- mise en place d'une structure chargé de
définir les normes, les standards et les bonnes pratiques
nationales
- élaboration et vulgarisation des codes
éthiques en matière de TIC en général.
- formation des forces de l'ordre en ressources humaines
et matérielles dans la lutte contre la
cybercriminalité
- l'Etat doit contrôler les bandes de
fréquence utilisées par les opérateurs nationaux et
Internationaux dans la fourniture de la connexion par voie hertzienne (Tout
doit se passer dans le cadre d'une Licence dûment délivré
par l'institution en charge).
3.3.6 Utilisation rationnelle et optimale des ressources
humaines disponibles
- promotion de la formation et du recyclage des personnes
en activité dans l'administration et les entreprises
privés;
- valorisation du statut professionnel des
spécialistes (bonne perspective de carrière, recyclage par
exemple) pour réduire la fuite massive de ces derniers vers
l'étranger;
- implication du genre féminin surtout dans les
zones en dehors des grandes villes.
3.3.7 Amélioration des services administratifs par
le biais de l'Internet
- mise en oeuvre d'un Intranet gouvernemental
sécurisé qui facilite la gestion et la circulation des
données administratives
- développement des systèmes d'informations
pour la collecte (numérisation) et la diffusion en ligne des
données publiques
- mise en place d'un réseau mutualisé de
l'administration publique
- développement de l'archivage électronique
pour désengorger les institutions publiques, faciliter les recherches et
la publication des ressources en ligne.
3.3.8 Vulgarisation de l'Internet dans les secteurs
porteurs de l'économie
Mise en place de sites webs dédiés pour
les secteurs porteurs de l'économie Camerounaise en occurrence
l'agriculture. Ces sites doivent être interactifs et doivent diffuser des
informations pertinentes et régulièrement mises à jour
pour permettre d'adapter les méthodes, les techniques et l'organisation
de la production à l'évolution de l'offre et de la
demande.
3.3.9 Développement du commerce
électronique
- implantation d'une infrastructure a clé publique
- création d'une autorité de certification nationale
3.3.10 Développement du
télétravail
Le télétravail signifie en plus simple
le travail pour une entreprise en dehors de ses locaux. On pourrait alors
travailler de chez soi pour une entreprise qui se trouve a l'étranger
par exemple. Cette disposition rend possible la création de nombreux
emplois, cependant un cadre juridique approprié devrait être
élaboré et l'accès Internet a domicile devrait aussi
être facilité.
3.3.11 Développement des réflexes
sécuritaires par les utilisateurs
Le réseau Internet regorge des menaces en tout
genre allant de l'arnaque (phishing, vol d'identité par exemple) a la
destruction des données de l'internaute par des virus
dédiés. L'internaute doit par conséquent développer
des reflexes sécuritaires pour échapper a ces menaces. Parmi ces
reflexes sécuritaires nous pouvons citer :
- se renseigner régulièrement sur les mises
a jour sécuritaires des logiciels et systèmes d'exploitation
utilisés
- disposer d'un antivirus efficace et
régulièrement mis a jour
- faire preuve de vigilance lorsqu'un site web propose
des gains en tout genre (beaucoup de ces sites web sont écrit dans un
Anglais ou un Français vulgaire et contenant des fautes. De plus
l'adresse e-mail fourni n'a souvent rien a voir avec l'entreprise ou
l'organisme qui prétend proposer les gains).
- faire preuve de vigilance lorsqu'un site web demande
des informations d'identité de l'internaute (mot de passe, numéro
de carte de crédit par exemple).
3.3.12 Gestion efficace des adresses IP
utilisation systématique des utilitaires de
gestion de l'adressage IP (IPAM) pour leur allocation et leur suivi (exemple :
IPplan, Easy-IP, efficient IP, myIPs 500).
etude du passage a la norme IPV6 (Version 6 de
l'adressage IP)
o- formation du personnel
o- audit de l'infrastructure avec pour objectif de
vérifier la capacité a supporter ou non l'adressage
IPV6
o- mise a jour des serveurs DNS
o- remplacement des pilotes des machines
3.4 Conclusion
Au terme de cette partie consacrée a l'Internet
au Cameroun nous constatons que l'Internet n'est pas encore exploité de
façon optimale et bénéfique pour la société
camerounaise. De nombreux services d'intérêt public a grande
échelle restent encore a implémenter.Le taux d'accès a
grande échelle n'est pas encore satisfaisante, les raisons peuvent
être : un réseau filaire très peu développé
(moins de 200 000 lignes téléphoniques fixes, beaucoup plus
concentré en villes et vétustes), les coûts d'accès
a domicile restent encore élevés par rapport au niveau de vie du
camerounais moyen, des systèmes d'informations très peu
développés.
L'Internet au moyen de technologies
énumérées dans cette section peine encore a toucher
tout
le monde. Le réseau de téléphonie
mobile qui affiche une progression spectaculaire pourrait constituer une
solution, avec le débarquement sur le segment de l'Internet des
opérateurs de la téléphonie mobile. De plus le
téléphone mobile est aujourd'hui vulgarisé au Cameroun. De
cela nous en parlerons dans la deuxième partie de notre
travail.
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