II. 2. La loi portant
Régime Foncier Rural
Adoptée en 1984, la Réorganisation Agraire et
Foncière (RAF) avait pour vocation d'une part, de remédier au
flou imposé par le régime dualiste de gestion des terres
post-coloniales et d'autre part, de promouvoir le développement
économique et social. En dépit de ses relectures successives
(1991 et 1996), la RAF n'a pas permis d'aboutir à des réponses
appropriées à la question de sécurisation des acteurs
ruraux. Les insuffisances constatées de la RAF sont, soit liées
à l'inadaptation de certaines de ses dispositions aux contextes
socio-économique et politico juridique, soit à des
inconvénients révélés par leur mise en pratique. La
RAF régit plus le foncier urbain que le foncier rural.
Fort de ce constat, les autorités publiques ont
décidé de l'élaboration d'une loi qui va régir
spécifiquement le foncier rural. Le projet de loi portant régime
foncier rural est le fruit d'un long processus participatif ayant
impliqué l'ensemble des acteurs ruraux intéressés,
notamment les producteurs, les organisations professionnelles agricoles, les
responsables coutumiers et traditionnels, les responsables religieux, les
organisations de femmes, ainsi que la société civile, les
services de l'Etat et les responsables des collectivités territoriales.
C'est au terme de ce processus que l'Assemblée Nationale a
procédé à l'adoption du projet de loi, le 16 juin 2009.
La loi portant régime foncier rural comprend six titres
et cent douze articles. Cette nouvelle loi introduit un certain nombre
d'innovations juridiques importantes. Elle consacre l'existence de trois
propriétaires fonciers plutôt qu'un seul : l'Etat, les
collectivités territoriales et les particuliers. Cette loi se veut
être également souple dans son application. Elle prévoit
l'élaboration de chartes foncières locales qui sont des
conventions dont l'objectif est d'adapter les dispositions de la loi à
la diversité des us et coutumes et pratiques foncières locales.
En outre, c'est une loi de même dimension que le code forestier, le code
de l'environnement, le code de l'eau, la loi d'orientation sur le pastoralisme,
etc.
III. LE CONTEXTE DU DEPARTEMENT DE PADEMA
Mise en oeuvre dans un contexte marqué par une
insécurité foncière prononcée, l'opération
pilote avait pour but de pacifier la zone de Padéma.
III. 1. Le diagnostic de la
situation foncière
Selon le diagnostic initial de la situation foncière
réalisé dans le cadre de la mise en oeuvre de l'opération
pilote en 2004, le département de Padéma se caractérise
par une instabilité et une précarité foncières.
L'insécurité foncière se manifeste par la montée
continue des tensions et conflits entre différents groupes d'acteurs aux
intérêts souvent contradictoires: autochtones et migrants,
agriculteurs et éleveurs, autochtones et autochtones, migrants et
migrants, etc.
Plusieurs facteurs expliquent cette situation d'ensemble. On
peut retenir :
ü la remise en cause des accords fonciers anciens
passés entre les autochtones et la première
génération de migrants ;
ü l'inadaptation et la non appropriation locale des
réglementations nationales, la RAF notamment ;
ü l'absence de cadres ou espaces réels de
régulation foncière locale ;
ü la multiplicité des centres de décision
et de gestion foncière ;
ü et l'émergence de nouvelles formes de
transactions foncières telles que la location et la vente de terre.
Les conséquences sont multiples:
insécurité foncière grandissante, opacité des
transactions foncières, recrudescence des conflits entre acteurs locaux,
timidité des interventions de l'administration locale.
C'est dans ce contexte qu'est intervenue la mise en oeuvre de
l'opération pilote de sécurisation foncière en 2004.
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