Les anciennes puissances coloniales et la résolution des conflits en Afrique( Télécharger le fichier original )par Netton Prince TAWA Université de Cocody - DEA Droit Public 2006 |
Paragraphe 2 : L'action africaine dans la résolution des conflitsMis devant leurs responsabilités, les dirigeants africains vont mettre à contribution la diplomatie continentale ou, plus exactement, "le système diplomatique africain182(*)", selon l'expression d'Augustin KONTCHOU KOUOMEGNI, en vue de résoudre les conflits qui ravagent leur continent. Aussi des actions de deux ordres sont-elles entreprises. Certaines visent à endiguer le conflit (A) quand il éclate, avant de parrainer les accords (B) de paix en vue d'une résolution définitive du conflit. A : L'engagement constant pour l'endiguement des conflits L'endiguement des conflits constitue à ce stade dans le processus de résolution, en des mesures conservatoires. Il est question de mesures urgentes pour contenir le conflit, le gérer afin d'en amoindrir les effets immédiats. Si le cadre institutionnel émane de l'organisation continentale183(*), on doit la paternité de l'initiative aux organisations sous-régionales, notamment la CEDEAO. En effet, le conflit libérien qui éclate en décembre 1989 a offert le cadre à cette organisation sous-régionale d'ouvrir un autre chapitre de sa coopération, qui jusque là se limitait au domaine économique. La création de l'ECOMOG pour surveiller le cessez-le-feu obtenu entre protagonistes du conflit libérien marque le début de cette initiative africaine184(*). L'expérience du Liberia ayant montré ses résultats, la CEDEAO va la répéter dans l'Etat voisin185(*), lui aussi aux prises à un conflit interne. Cette action de la CEDEAO va faire écho et sera importée dans les autres sous-régions africaines, pour être entérinée par la nouvelle organisation continentale qui va d'ailleurs prévoir un organe spécial de prévention, de gestion et de résolution des conflits africains186(*). A cet engagement en vue d'endiguer le conflit va succéder le parrainage des accords de paix. B : Le parrainage des accords de paix L'endiguement du conflit constitue dans le processus un préalable à de sérieuses médiations afin de trouver une issue définitive au conflit en cours. Aussi, ce préalable obtenu, les efforts africains s'étendront-ils jusqu'à la signature d'accords de paix dont le respect pourrait à terme consacrer le retour à la normalité. Sous cet aspect, l'engagement africain est spectaculaire. Le conflit libérien a vu se succéder des accords entre protagonistes dont le célèbre est appelé les « Accords de Yamoussoukro ». Quand au conflit sierra léonais, on note deux grands accords signés par les différents acteurs au conflit sous les auspices de dirigeants africains187(*). Au Rwanda, même si l'accord d'Arusha n'a finalement pas apporté la paix aux rwandais, il faut signaler qu'il est d'initiative africaine. L'engagement africain dans la résolution du conflit en RDC a permis la signature des accords de Sun City en 2002 entre protagonistes au conflit en Afrique du sud. Mais en la matière, l'un des acquis africains qui fera jurisprudence est l'accord signé entre les principaux protagonistes au conflit ivoirien le 4 mars 2007. Cet accord est signé à l'issue d'un dialogue entre les principaux protagonistes du conflit et qualifié de « dialogue direct » et parrainé par le Burkina voisin, dont le Président exerçait la présidence tournante de la CEDEAO. De ce qui précède, on pourrait être tenté de conclure que les initiatives africaines sont suffisantes pour mettre fin aux conflits qui déchirent le continent. Que non ! D'autres acteurs, par leurs actions apportent un concours inestimable. Nous les étudions dans la suite de cette étude. SECTION II : DE NOUVEAUX ACTEURS DANS LA RESOLUTION DES CONFLITS AFRICAINS Si à l'analyse, les anciennes puissances coloniales apparaissent comme acteurs principaux de la résolution des conflits africains, d'autres entités interviennent, dont les actions sont tout aussi salvatrices. Il faut le souligner. Il s'agit de l'Union européenne (Paragraphe 1) et des organisations non gouvernementales (Paragraphe 2). * 182 Pour l'auteur, au lendemain des indépendances, les dirigeants africains ont mis en place un véritable système diplomatique. Voir à ce sujet son ouvrage intitulé Le système diplomatique africain, Paris, Pedone, 1977, 279 p. * 183 Par la déclaration du Caire de juin 1993, la Conférence des chefs d'Etat et de Gouvernement a décidé de créer un instrument à l'échelle continentale, le « Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits », de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) dont la direction et la coordination des activités entre les sessions ordinaires de la Conférence des chefs d'Etat et de Gouvernement étaient assurées par l'organe central. * 184 Il faut tout de même souligner que l'OUA a tenté d'intervenir lors des différents conflits tchadiens. * 185 Il s'agit en l'occurrence de la Sierra Leone. Il faut aussi signaler que la CEDEAO est à l'origine du cessez-le-feu intervenu dans le conflit ivoirien le 17 octobre 2002. Mieux, pour marquer son implication dans la gestion de ce conflit, le cessez-le-feu est intervenu entre l'organisation et le mouvement rebelle, le MPCI. Sur l'implication de le CEDEAO dans la résolution des conflits en Afrique de l'ouest, lire Niagalé, BAGAYOKO-PENONE, « Le rôle de la CEDEAO dans la gestion des conflits en Afrique de l'ouest », in Jocelyn COULON (sous la dir. de), Le Guide du Maintien de la paix, Montréal, Athéna Editions, 2005, p. 126 et suiv. * 186 Cet organe spécial est le Conseil de paix et de sécurité (CSP) de l'Union africaine. Sur ce point, lire Delphine LECOUTRE, « Le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine, clef d'une nouvelle architecture de stabilité africaine ? », Afrique contemporaine, Eté 2004, pp.131-162. * 187 Le premier accord dit « Accord d'Abidjan » est signé le 30 novembre 1996 entre le Président KABBAH et le caporal Foday SANKOH, chef de la rébellion. Cet accord prévoit la conversion du RUF en parti politique, son désarmement et l'amnistie pour ses combattants. Le second est signé le 7 octobre 1999 à Lomé lors d'un sommet de cinq présidents ouest-africains. Il est signé entre les autorités sierra léonaises et la rébellion et prévoit l'entrée du RUF au gouvernement. |
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