CHAPITRE V : PRATIQUE ET CONTRIBUTION DE
L'AGROBIOLOGIE A
LA PRESERVATION DES EQUILIBRES ECOLOGIQUES DE BASE
5.1. Pratique de l'agriculture biologique
5.1.1. Origine
Selon la Revue Agridoc (2003,) l'agriculture biologique
est l'aboutissement d'une série de réflexions et de
résultats du développement de plusieurs méthodes de
production agricole alternative initié depuis le début du
siècle, essentiellement en Europe du nord. Il convient en particulier de
mentionner ici trois (3) courants de pensées :
- l'agriculture biologique dynamique ; apparue en Allemagne,
sous l'impulsion de Rudolf Steiner ;
- l'agriculture organique (organic farming) née en
Angleterre des thèses développées par Sir Howard dans son
testament agricole (1940) ;
- L'agriculture biologique, développée en Suisse
par Hans Peter Rusch et H. Muller.
Ces différents mouvements, à l'origine, dans
certains des termes protégés par la réglementation
communautaire, tenaient pour essentiel le lien entre l'agriculture et la nature
ainsi que le respect des équilibres naturels, et se distanciaient donc
d'une approche plutôt dirigiste de l'agriculture, maximalisant les
rendements au moyen d'interventions multiples, avec différentes
catégories des produits de synthèse. Malgré l'existence et
la vigueur de ces courants de pensée, l'agriculture biologique est
longtemps restée embryonnaire en Europe.
5.1.2. Développement
Tout au long des années 50, l'objectif principal
assigné à l'agriculture était de satisfaire, grâce
à une augmentation très importante de la productivité
agricole, les besoins immédiats en nourriture et d'augmenter la
qualité alimentaire dans la communauté européenne,
dès lors que l'agriculture conventionnelle ait eu du mal à
obtenir un écho favorable.
En revanche, la fin des années 1970 correspond
à l'émergence d'une prise de conscience importante au niveau de
la protection de l'environnement, à laquelle l'agriculture biologique
pouvait donner une réponse adéquate. Des nouvelles associations
se sont créées et ont développé leurs propres
cahiers de charge. C'est autour des années 80 qu'elle a prises un
véritable essor et partout à travers le monde, l'agriculture
biologique est pratiquée par un nombre croissant des agriculteurs.
5.1.3. Les bases scientifiques
Les bases scientifiques sont fondées
sur les observations directes sur le terrain. L'agriculture biologique parait
comme une agriculture empirique que scientifique. Car, il est difficile de
donner des explications scientifiques à partir des seules données
recueillies sur le terrain.
Cependant, l'agriculture biologique fait appel
tout comme l'agriculture conventionnelle aux découvertes les plus
récentes dans le domaine de la biologie des sols et de la physiologie
végétale et animale. C'est surtout en matière de nutrition
des plantes, de la biologie des sols et de la lutte anti-parasitaire que
l'agriculture biologique utilise les données de la science d'une
manière qui lui est propre.
La nutrition des plantes :
L'agriculture biologique admet que les graminées cultivées en
association avec les légumineuses sont capables d'absorber des acides
aminés excrétés par les racines des légumineuses.
De nombreuses autres substances organiques peuvent être ainsi
absorbés par les racines des plantes. Ces faits montrent
l'intérêt qu'ont les agriculteurs de baser la fertilisation sur
les apports organiques qui contiennent tous les oligo-éléments
présents dans la matière vivante et qui nourrissent les micro
organismes capables de synthétiser les molécules organiques
absorbés par la plante.
En agriculture biologique, la nutrition des plantes
est basée sur les engrais organiques qui livrent au sol des substances
qui aident les plantes à pousser ou à résister aux
maladies. Ces substances sont comme des remèdes que l'on prend en petite
quantité, mais qui sont favorables à la santé. Sur un sol
riche en matière organique, les plantes résistent mieux aux
maladies, aux attaques d'insectes et à la sécheresse.
Comparons les engrais organiques et minéraux
dans la vie d'une plante au moyen des images. Sur une première table,
(celle des engrais organiques), il y a une multitude de plats consistants et de
bols de sauces. Les convives choisissent parmi cette multitude de plats les
aliments dont ils ont besoin ; selon leur faim et leur état de
santé. Sur une seconde table, (celle des engrais chimiques NPK), il y'a
trois plats ; une sauce et un pot de sel. On constate que les convives
n'ont pas grand choix. Ils se contentent de ce qu'il y'a, même s'ils
voudraient bien trouver un autre aliment dont ils ont besoin pour leur
santé.
Les engrais organiques sont pour la plupart, une
nourriture plus riche que les engrais minéraux. Il s'agit du fumier
(mélange de crottes d'animaux et de paille), du compost (mélange
des déchets végétaux pourris en tas), des engrais verts
(plantes semées et ensuite enfouies dans le sol pour y pourrir), le
purin (excréments liquides du bétail)...
La biologie des sols : Elle
joue un rôle important. Les micros organisme transforment la
matière organique et les minéraux insolubles en substances
assimilables par la plante. La fixation microbienne de l'azote de l'air est une
source essentielle d'azote en agriculture biologique puisque les apports
azotés chimiques sont exclus. Cette fixation est
développée et favorisée par l'activité biologique
du sol et de plus par l'introduction fréquente des légumineuses
dans la rotation.
Il existe pour chaque type de sols, une succession
d'équilibres qui lui est propre de la roche mère en voie
d'altération. Au sein de ces équilibres, les micros organismes
utilisent 60% à 80% de l'apport énergétique que
représentent les débris végétaux et animaux.
La lutte anti-parasitaire :
Selon le Mémento de l'agriculture biologique, en
agrobiologie, on s'efforce de rechercher et de supprimer les causes du
parasitisme, la recherche des moyens de lutte n'étant qu'un palliatif.
Il est démontré par un chercheur du nom F. Chaboussou
que le niveau des attaques parasitaires sont d'autant plus importantes que les
végétaux sont riches en substances solubles (sucre; substances
azotées non protéique). En agriculture biologique, on essaie de
rétablir l'équilibre en assurant une fertilisation
équilibrée par l'apport d'azote sous forme assimilable, en
stimulant l'activité biologique du sol, en supprimant les traitements
chimiques, il en résulte qu'en l'absence de toute intervention directe
contre les parasites, ceux ci deviennent moins envahissants.
En agriculture biologique, les parasites sont
attaqués par leurs ennemies : insectes prédateurs, oiseaux,
insectivores, bactéries, virus... L'association des cultures peut lutter
contre l'attaque des cultures par les insectes. Par exemple, l'association du
choux et de la tomate. Cependant, toutes les associations culturales ne sont
pas nécessairement bénéfiques, certaines peuvent
même être favorables à l'extension des parasites qu'on veut
combattre; elle maintient le sol très humide et crée des
conditions propices au Champignon Phytophtora infestans qui est
l'agent causal du mildiou.
5.1.4. Les bases techniques
La fertilisation
organique : Elle est basée sur les matières
organiques (MO) et a pour objectif d'enrichir le sol en humus et de fournir aux
plantes des sels minéraux, de l'azote et une partie des autres
éléments dont les plantes ont besoin. On y utilise du fumier, des
engrais verts, du compost, du paillage... Ces produits sont destinés
à fournir aux sols du carbone et ils sont pauvres en azote.
Il y a aussi des fertilisants qui
fournissent de l'azote et d'autres éléments aux plantes. Ce sont
des MO pauvres en carbone et riches en azote comme les déchets de
l'abattoir (sang, os broyé, des cornes, des sabots, des plumes...), du
purin... Il faut aussi des engrais verts.
La fertilisation
minérale : On emploie en agriculture biologique que les
produits naturels n'ayant pas subit des traitements chimiques.
Selon le Dictionnaire de
l'Agriculture, pour lutter contre l'acidité du sol
on utilise la MO ou le calcaire ou bien la cendre qui neutralise et
rende inactifs les ions hydrogènes. Le Lithothamnium est aussi
utilisé en raison de sa teneur en Magnésie. L'agriculture
biologique admet l'utilisation des scories de déphosphoration. D'autres
sources de potasse comme les cendres de bois ; les roches siliceuses sont
aussi utilisées.
La rotation, l'association et
l'assolement : Elles sont les conditions sine qua none de la
réussite en agriculture biologique. Elles permettent de maintenir
à long terme la fertilité du sol, le contrôle des mauvaises
herbes sans herbicides et pour que les plantes aient une alimentation
azotée sans engrais azoté chimique.
La lutte contre les
adventices et les parasites : Les mauvaises herbes sont
contrôlées par des moyens préventifs. L'amélioration
de la structure et l'activité biologique du sol ainsi que son
enrichissement en humus conduit à une régression importante des
mauvaises herbes envahissantes en agriculture biologique.
En prévention par exemple, pour lutter contre
les chenilles qui attaquent les choux, il faut dans le champ cultiver le choux
et de la tomate : pour cela il faut faire les rangs des choux entre ceux
des tomates. Un autre exemple, pour que le striga n'attaque pas le champ de
mil, il faut associer au mil soit du soja ou de l'arachide dans le même
champ. On utilise également la lutte biologique contre les
nématodes : le champignon prédateur ou ovicides. Ces
champignons ont la propriété de tuer les oeufs des
nématodes.
Pour lutter contre les parasites, on emploie des
moyens de lutte peu ou pas toxiques pour l'environnement. On utilise des
préparations à base des plantes : décoction, poudrage
des minéraux broyés, insecticides végétaux
(graines de neem, feuilles des papayers, gousses d'ail, les petits
piments...)
Les Cendres sont utilisées
comme désinfectants ou insectifuges. L'efficacité du cendrage
dépend beaucoup plus de la finesse des cendres. C'est pourquoi il est
intéressant de les sécher et de les piler avant d'épandre.
Elles sont utilisées aussi en poudrage sur les feuilles ou à
même le sol. Il faut veiller à ce que le poudrage soit
correctement réalisé. Car les cendres mal reparties sur le
feuillage occasionnent les brûlures des feuilles ou des
bourgeons.
Les poudres de Kaolins et celles de la
latérite mélangées aux stocks de semence protégent
celle-ci durablement. Cependant, le mécanisme par lequel ces poudres
protégent les semences n'est pas bien compris.
Tableau
XIII : quelques plantes insecticides ou
insectifuges
Noms d'espèces
|
Organes utilisés
|
Poudre ou décoction
|
Dose appliquée
|
Caractères
|
Mode d'emploi
|
Neem (Azadirachta indica)
|
Feuilles, fleurs, fruits
|
décoction
|
5 kg /ha
|
Insecticides ou insectifuges
|
pulvérisation
|
Pommier cannelle
|
Feuilles fraîches
|
décoction
|
5 kg / ha
|
insectifuge
|
pulvérisation
|
Citronnelle, Basilic
|
Feuilles sèches
|
poudre
|
6 kg / ha
|
insectifuge
|
épandage
|
pyrèthre
|
Coque de noix et écorce
|
décoction
|
4 kg / ha
|
Insecticide et insectifuge
|
pulvérisation
|
Eucalyptus
|
feuilles
|
décoction
|
5 kg / ha
|
insectifuge
|
épandage
|
Tabac
|
feuilles
|
poudre
|
5 kg / ha
|
Insecticide
|
épandage
|
Ail
|
Feuilles et gousses
|
décoction
|
4Kg /ha
|
Insectifuge et insecticide
|
pulvérisation
|
5.1.5. Les produits au « label
bio »
Tout produit agricole destiné à
être exporté avec le label produit bio doit être sous tendu
d'un certificat d'exportation dont la durée de validité est de
douze (12) mois à compter de la date de signature du certificat.
L'obtention du certificat est conditionnée par
le suivi d'une démarche à cinq (5) étapes incontournables
diligentées par Ecocert international , un
organisme dont le rôle est de certifier le produit agricole
bio.
5.1.5.1 Les cinq (5) étapes de la
certification
- Etape 1 : Questionnaire de
pré enquête : L'opérateur décrit son
activité et son outil de production et/ou de transformation et/ou
d'importation et/ou d'exportation.
- Etape 2 : L'engagement
concernant le mode de production Biologique : L'Ecocert
établit un devis personnalisé à l'opérateur pour le
ou les contrôle (s) la ou les analyse (s) éventuelle (s) de
l'année en cours. A ce devis est joint un contrat de prestation
comprenant un engagement concernant le mode de production Bio entre l'Ecocert
et l'opérateur. En signant, l'opérateur s'engage notamment
à accepter :
- les visites de contrôles annoncées
ou inopinées sur l'ensemble des lieux de
production destinées ou non au monde de production
biologique ;
- le prélèvement
d'échantillons en vue d'analyse de conformité ;
- l'accès des contrôleurs à
la comptabilité, aux éléments de preuve et enregistrements
y afférents ;
- à sa charge tout contrôle
supplémentaire demandé par le comité de
certification suite à la non conformité grave aux
règles de production bio prévues dans la grille des
sanctions ;
- signaler à Ecocert par pli
recommandé avec accusé de réception, par fax ou E-mail
toute intervention non autorisée, toute modification très
importante par rapport aux règles de production bio sur l'outil de
production et/ou de préparation ou sur les produits ;
- à l'avance toute opération de
transformation des produits bios réalisés par un tiers ou lui
même, si elle est effectuée de manière
irrégulière.
- Etape 3 :
L'évaluation : Dès réception du
contrat et du règlement de 50% du montant du devis, Ecocert mandate un
auditeur qui prend rendez-vous pour une première visite. Des visites
inopinées peuvent être réalisées en plus de cette
première évaluation.
- Etape 4 : La certification :
Après contrôle, le dossier est transmis à un
responsable de dossier puis éventuellement au comité de
certification pays tiers. Cette dernière adresse
à l'opérateur une fiche de décision de certification
accompagnant le rapport d'inspection. Lorsque la décision de
certification est acceptée et la prestation réglée par le
client, alors Ecocert émettra un certificat mentionnant la liste des
produits par situation.
- Etape 5 : La surveillance : les
années suivantes, une surveillance est effectuée par des
contrôles approfondis et/ou inopinés. L'opérateur doit
informer à temps réel Ecocert de toute modification de son
système de production ou de sa gamme de produit à certifier. Le
bureau Ecocert des sous régions Afrique est installé à
Douala au Cameroun.
5.1.5.2. Étiquetage et logo
- L'étiquetage :
L'étiquetage, ainsi que la publicité ne peuvent faire
référence au mode de production bio que si ces indications
mettent en évidence qu'il s'agit d'un mode de production agricole. Le
produit concerné doit par ailleurs respecter les dispositions du
règlement (CEE) No 2092/91. Ainsi l'étiquetage et la
publicité d'une denrée alimentaire ne peuvent faire
apparaître, dans la dénomination des ventes, une
référence au mode de production bio que lorsque le produit
contient au moins 95% d'ingrédients issus du mode de production bio. Ces
produits peuvent donc contenir jusqu'à 5% d'ingrédients de
production conventionnelle, pour autant qu'il s'agisse des produits non
disponibles tels que certains fruits exotiques par exemple.
- Le Logo et l'indication de
contrôle :
Un logo spécifique au mode de
production biologique est soumis au régime du contrôle. Le logo
ainsi mis en place n'est pas obligatoire. C'est donc à titre volontaire
que les producteurs peuvent l'utiliser dès lors que leurs produits
remplissent les conditions posées.
5.1.5.3 Libre circulation, inspection et mesures de
contrôle
Tous les produits respectant les dispositions de la
réglementation communautaire relative à l'agriculture biologique
peuvent circuler à travers le monde entier. Compte tenu de l'importance
d'assurer la plus haute crédibilité du secteur, le
règlement a introduit plusieurs mesures relatives à l'inspection
des opérateurs actifs dans le secteur. C'est ainsi que tout
opérateur qui produit doit notifier cette activité à
l'autorité compétente de l'Etat dans lequel cette activité
est exercée. Cette autorité a l'obligation de superviser ces
organismes afin de s'assurer de leurs capacités.
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