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Les conventions règlementées dans la société anonyme

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par Halimata BAGUIAN
Université de Ouagadougou - DESS Droit des affaires 2004
  

Disponible en mode multipage

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Emergence Burkina Faso

Juridique et Fiscal

Ministère des Enseignements Secondaires

Supérieurs et de la Recherche Scientifiques

-----------------------

Université de Ouagadougou

----------------------

Unité de Formation et de Recherche en Sciences

Juridiques et Politiques

Département de troisième cycle

THEME 

LES CONVENTIONS REGLEMENTEES

DANS LA SOCIETE ANONYME

Rapport de stage

Présenté et soutenu publiquement par

BAGUIAN Halimata

Pour l'obtention du Diplôme d'Etudes Supérieures

Spécialisées (DESS) en Droit des Affaires

Directeur de rapport Maître de stage

Pr. Filiga Michel SAWADOGO Amélie BAYALA/NEBIE

Membre du Conseil Constitutionnel Juriste Fiscaliste

Chef du Département du 3ème cycle

UFR Sciences Juridiques et Politiques

Année académique 2004-2005

AVERTISSEMENT

L'Unité de formation et de Recherche en Sciences Juridiques et Politique n'entend donner aucune improbation ni approbation aux opinions émises dans les rapports qui doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

DEDICACE

A mon père El Hadji BAGUIGNAN Boukaré

A ma mère GOUEM Salamata

A ma tante GOUEM Aïcha arrachée très tôt à notre affection

Puissent-t-ils voir ici le fruit de leur soutient inestimable.

REMERCIEMENTS

Qu'il nous soit permis d'exprimer notre gratitude envers tous ceux qui ont contribué à l'élaboration de ce rapport.

Nos remerciements s'adressent d'abord au professeur Filiga Michel SAWADOGO, notre directeur de rapport et à notre maître de stage Madame Amelie BAYALA qui ont bien voulu dirigé ce travail et nous aider à bien le mener.

Un grand merci à Monsieur Yves LAPEYRERE, associé-gérant du cabinet EMERGENCE BURKINA et à Madame TOE, Gérante du cabinet SECCAPI TDT Associés, ainsi qu'à l'ensemble des collaborateurs juristes et comptables.

Nous exprimons ensuite toute notre reconnaissance à tous les enseignants de l'UFR/SJP pour la formation et les conseils reçus.

Nous remercions enfin tous nos proches et amis pour leur aide durant ces deux années, avec une pensée particulière pour la famille DABRE et GOUEM, à nos amies et soeurs que sont DIASSO Kaliza et Amy Diarra, à Raymond NAON, Oussini BOUGMA et Flora TOE.

Que chacun d'eux trouve ici l'expression d'un attachement profond.

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS

Art. : Article

Al. : Alinéa

AUDSCGIE : Acte Uniforme portant sur le droit des sociétés

commerciales et du groupement d'intérêt économique

Bull. : civ.Bulletin civil

Bull CNCC : Bulletin de la compagnie nationale des commissaires

aux comptes

CA : Cour d'Appel

Cass. (fr.) com : Chambre Commerciale de la Cour de Cassation

Française

CE : Conseil d'Etat

C. : Contre

Ch. : Chambre

Chron. : Chronique

D. : Dalloz

éd. : Edition

Info. Rap. : Informations rapides

JCP : Jurisclasseur périodique

J. O. : Journal Officiel

Jur. : Jurisprudence

N. : Numéro

Obs. : Observations

Op. cit. : Opere citato (ouvrage déjà cité)

OHADA : Organisation pour l'Harmonisation du Droit

des Affaire en Afrique

P. : Page

Rec. : Recueil

SA : Société anonyme

Ss. : Suivant

Supra : Plus haut

T. : Tome

Vol. : Volume

Voy. : Voyez

INTRODUCTION

Le Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées (DESS) en droit des affaires est un programme universitaire de troisième cycle qui a pour ambition de former les étudiants sur le plan théorique, tout en leur donnant les bases pratiques nécessaires pour affronter la vie professionnelle.

Le programme ainsi suivi comporte un volet pratique, qui est effectué par l'étudiant au cours d'un stage d'une durée minimale de 45 jours en entreprise à l'issue duquel, il doit présenter un rapport de stage. C'est dans ce cadre qu'il nous ait été donné d'effectuer notre stage dans le cabinet EMERGENCE BURKINA FASO Juridique et Fiscal.

EMERGENCE BURKINA FASO Juridique et Fiscal, créé sous la forme de société à responsabilité limitée, est un cabinet de conseil spécialisé dans le domaine juridique et fiscal. Le cabinet était à l'origine, le département juridique du Cabinet d'Expertise Comptable SECCAPI. Pour répondre aux besoins du marché et au contexte juridique, la plupart des cabinets d'expertise comptable ont tendance aujourd'hui à dissocier leurs activités comptables des activités juridiques. SECCAPI n'a pas échappé à cette règle.

Il a été ainsi créé en 2002 le Cabinet SECCAPI Juridique et Fiscal qui change de dénomination, et devient EMERGENCE BURKINA FASO Juridique et Fiscal en 2004.

Le cabinet fait également partie du réseau Emergence Afrique Juridique et Fiscal. Ce réseau international est constitué de cabinets indépendants de conseil

juridique et fiscal qui fédèrent des professionnels ayant la volonté de répondre aux besoins des acteurs économiques dans un contexte de proximité et de dimension internationale.

Le cabinet comprend une direction, un secrétariat, un service comptable et administratif, ainsi qu'une cellule juridique. La direction est assurée par Monsieur Yves LAPEYRERE. Ainsi, en sa qualité de gérant, il supervise l'organisation et le fonctionnement du Cabinet. Il veille à mettre en oeuvre toutes les stratégies nécessaires au bon déroulement des missions et à la satisfaction des clients.

Les activités de conseil et d'assistance du cabinet couvrent plusieurs domaines du Droit :

- En droit des sociétés et d'une manière générale, en droit des affaires, le cabinet intervient dans la rédaction des contrats, la constitution de sociétés, les missions de secrétariat juridique, d'audit juridique et de législation communautaire, le droit financier, le droit de la concurrence, les marchés publics, la réglementation du commerce international, l'arbitrage, l'apport partiel d'actif et enfin des fusions de sociétés.

- En droit fiscal, le cabinet intervient surtout en matière de redressement fiscal et assiste les entreprises dans leur gestion quotidienne.

- Droit Social : le cabinet assiste des entreprises en leur apportant des conseils dans la gestion des Ressources humaines tels que : la rédaction des contrats de travail, les conventions collectives, les conditions de travail, le règlement intérieur, les modalités de communication, la Protection sociale (Sécurité sociale, retraite...), l'audit social, les contentieux sociaux, l'externalisation (paies, déclarations...).

Le cabinet publie en outre une revue dénommée «Droit des Affaires au Burkina Faso», qui procure aux abonnés l'information sur l'actualité fiscale, juridique, sociale ainsi que sur le Droit des affaires d'une manière générale. Cette revue est complétée d'un mémento fiscal, publié chaque année, et constitue un complément à la revue Droit des affaires.

Au cours de certaines missions du cabinet, il a été fait à plusieurs reprises un constat. De nombreuses entorses étaient faites à la procédure de contrôle des convenions réglementées tout simplement parce que la notion de conventions réglementées est mal maîtrisée ou inconnue des dirigeants, alors qu'elles sont d'une pratique courante dans les sociétés et impliquent des montants très élevés. Ce qui nous a conduit à l'adoption thème suivant : « Les conventions réglementées dans la société anonyme».

Notre rôle en tant que conseil est d'attirer l'attention de ces dirigeants (Président Directeur Général, Président du conseil d'administration, Directeur Général), ainsi que celle des personnes qui effectuent le contrôle sur l'importance du respect de la procédure des conventions réglementées.

Que recouvre la notion de conventions réglementées ?

La définition de la notion est capitale. Dans une approche positive, les conventions réglementées concernent toutes les conventions entre la société et ses dirigeants. C'est approche prend en compte le critère personnel qui est la présence d'un dirigeant dans la convention. Dans une approche négative, les conventions réglementées concernent toutes les conventions qui ne sont ni libres ni interdites. Cette approche prend en compte le critère objectif qui l'objet de la convention.

Cette procédure présente un intérêt capital dans le fonctionnement de la société. La gestion quotidienne des sociétés peut donner lieu à des abus de la part des dirigeants engendrant des risques majeurs, susceptibles d'affecter le patrimoine social. La prévention de tels abus ne peut se faire sans une maîtrise parfaite des mécanismes de contrôles.

La procédure des conventions réglementées participe au contrôle de gestion de la société, et permet de prévenir, voire de mettre en évidence, certaines fautes de gestion ainsi que des entorses à l'intérêt social. La mise en oeuvre de cette réglementation permet en outre d'éclairer les responsabilités induites par l'inobservation du dispositif de contrôle ainsi que les éventuelles sanctions y afférentes.

On sait que dans les pays de la zone OHADA, on déplore depuis de longues années le laxisme et les abus de nombreux dirigeants ainsi que l'absence de transparence dans la gestion des sociétés aussi bien privées que publiques. Or ces lacunes expliquent très largement les contre-performances de nos entreprises. Cette situation n'incite pas à la création d'entreprises, alors que nos Etats ont besoin de ces entreprises pour leur développement. Ces entreprises contribuent pour une grande partie au budget de l'Etat et participe à la lutte contre le chômage.

La maîtrise du dispositif des conventions réglementées s'impose, de ce point de vue, comme une nécessité absolue. En effet cette réglementation constitue avec le dispositif de contrôle légal des comptes sociaux, le centre des mécanismes de contrôle de la gestion des sociétés, car sa mise en oeuvre effective garantit une plus grande transparence des décisions des organes dirigeants des sociétés.

Plusieurs raisons expliquent le choix de la société anonyme. C'est le type de société qui en raison de son mode de fonctionnement est sujette à de nombreux abus. En outre elle permet de mettre en exergue toutes les étapes de la procédure surtout en ce qui concerne l'intervention du commissaire aux comptes. En effet, la présence du commissaire aux comptes n'est obligatoire que dans les sociétés anonymes et dans les grandes sociétés à responsabilité limitée (lorsque le capital social atteint 10 millions). De plus la réglementation des conventions ne concerne que les sociétés anonymes et les sociétés à responsabilité limitée.

Pour une approche pratique du sujet, il a été examiné des rapports de commissaires aux comptes et mené des enquêtes auprès de certains commissaires aux comptes.

Les rapports des commissaires aux comptes nous ont permis de savoir que la conclusion des conventions entre la société et ses dirigeants est une pratique courante. L'objet de ces conventions est très varié. Les conventions les plus usuelles dans la pratique porte sur les baux, les conventions de mise à disposition de personnel, les conventions d'approvisionnement divers, des conventions de représentation commerciale, des conventions de vente et de prestations de services, des conventions d'assistance etc.

L'enquête a eu pour objet de préciser la manière dont les commissaires aux comptes effectuaient leur mission, ainsi que les difficultés qu'ils rencontrent. Cela nous a permis de faire des propositions en vue de l'amélioration des procédures de contrôle.

Le sujet tel que présenté évoque de nombreuses questions à savoir celle de la nature des conventions concernées par la procédure, les différentes étapes de la procédure, son efficacité, le rôle du commissaire aux comptes, ainsi que la responsabilité des administrateurs. Afin de mieux cerner le sujet, l'on se propose d'abord de déterminer les conventions concernées par la réglementation (chapitre 1), et ensuite évoquer le déroulement de la procédure (chapitre 2).

CHAPITRE I : LA DETERMINATION DES CONVENTIONS

SOUMISES A LA PROCEDURE

DE CONTROLE

L'entreprise pour les besoins de son fonctionnement est amenée à conclure des actes avec des partenaires divers. Ses partenaires peuvent être des tiers, des associés ou même des dirigeants de la société. Concernant cette dernière catégorie de partenaires, il est à relever, qu'ils sont en mesure, de par les prérogatives que leur reconnaît la loi, de causer un dommage à la société ou plus subtilement, d'imposer à celle-ci des transactions qui leur sont favorables, mais qui se révèlent inopportunes pour la société qu'ils dirigent.

Un tel risque de voire les dirigeants servir leurs intérêts au détriment de la société est plus accru, lorsqu'il n'existe aucun mécanisme de contrôle au sein de la société. C'est ainsi que le législateur OHADA a institué une procédure de contrôle des conventions entre la société et ses dirigeants.

La procédure ainsi instituée vise la protection des actionnaires de la société et de l'intérêt social de façon générale. Cependant son efficacité repose sur la connaissance des conditions préalables à l'existence de la procédure par les dirigeants.

Quelles sont les conditions à l'existence préalable des conventions réglementées ?

La condition est double. La première condition positive, suppose que la convention concerne un dirigeant ou une personne assimilée (section 1). La seconde condition négative, suppose que la convention ne doit pas être libre ou interdite (section 2).

Section I : La condition positive : la convention concerne un dirigeant

ou une personne assimilée

Les conventions soumises à la procédure de contrôle dans la société anonyme sont celles qui interviennent directement entre la société et ses dirigeants. La procédure s'applique également lorsque la société contracte avec lesdites personnes indirectement ou par personne interposées.

Paragraphe I : La convention doit être conclue directement avec un dirigeant de la société

L'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique (AUDSCGIE) énumère limitativement la liste des personnes concernées.

Ainsi, dans les sociétés anonyme de type classique, l'article 438 AUDSC, soumet à la procédure de contrôle, les conventions intervenant directement entre la société et un ou plusieurs de ses administrateurs, directeurs généraux, et directeurs généraux adjoints.

De même sont concernées par la procédure des conventions réglementées les conventions intervenant entre la SA et une entreprise ou une personne morale, si l'une des personnes sus-mentionnées est propriétaire de l'entreprise, associé indéfiniment responsable, gérant, administrateur, administrateur général, administrateur général adjoint, directeur général, directeur général adjoint de la personne moral contractante. En effet l'administrateur peut avoir intérêt à désavantager sa société au profit d'une entreprise dans laquelle sa participation est plus importante.

Cette disposition élargit considérablement le champ d'application de la procédure qui joue fréquemment dans les groupes de sociétés ayant des dirigeants communs. L'analyse des rapports de commissaire aux comptes en annexe permet d'affirmer que ces conventions sont très courantes dans les sociétés anonymes ayant des dirigeants communs. Le cas des conventions entre la SN-CITEC, le groupe et la SOCOMA illustre parfaitement ces propos.

Il faut préciser que les représentants permanents des personnes morales administrateurs sont soumis au même régime que les administrateurs en leur nom propre.

Dans la SA avec administrateur général, la personne principalement visée est l'administrateur général. L'article 502 AUDSCGIE soumet, en effet, à la procédure de contrôle les conventions intervenues directement ou indirectement ou par personne interposée entre l'administrateur général et la société. Sont également soumis à la procédure les conventions conclues avec une personne morale dont l'administrateur général est propriétaire, associé indéfiniment responsable ou plus généralement dirigeant1(*). Si une telle société anonyme comporte un administrateur général adjoint, ce dernier sera soumis aux mêmes dispositions.

La formule limitative consacrée par le législateur est insuffisante et ne permet pas un large contrôle des conventions réglementées. Les dirigeants sont ils les seul à pouvoir mettre en péril l'intérêt social ? Cette question se pose dans la mesure où les conflits d'intérêt entre actionnaire sont d'actualité et sont en partie responsable de la faillite de beaucoup d'entreprises. A l'heure actuelle dans la réglementation OHADA les lacunes de la réglementation n'ont pas encore été comblées comme tel est le cas en France.

En France, avec la réforme du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques dite loi NRE, le législateur a comblé ce vide juridique. L'article L.225-38 du code de commerce soumet désormais à autorisation préalable du conseil d'administration la conclusion de telles conventions lorsque l'actionnaire détient plus de 5% des droits de vote2(*). Ce Seuil est porté à 10% depuis 2003.

La loi NRE va plus loin, en soumettant également les conventions conclues directement ou par personne interposée entre la société et une société contrôlant une société actionnaire qui détient plus de 10 % des droit de vote3(*). La procédure s'applique même si les deux sociétés en cause n'ont pas de dirigeants communs. En guise d'illustration, si dans une société A, une société B détient plus de 10% des droits de vote et B est contrôlée par une troisième société C, si une convention est conclue entre A et C , elle doit être soumise à la procédure des conventions réglementées.

Si ces dispositions soumettent à la procédure de contrôle des conventions réglementées les conventions intervenues directement entre la société et ses dirigeants en raison des risques qu'elles présentent, qu'en est-il du cas des conventions conclues indirectement ou par interposition avec la société ?

Paragraphe II : Les conventions conclues indirectement ou par personne interposées

Dans la pratique des sociétés, il ressort que certains dirigeants peuvent conclure indirectement ou par personne interposées des conventions avec la société qu'ils dirigent. L'AUDSCGIE qui reconnaît de telles situations soumet également à la réglementation ces conventions.

Cependant l'AUDSCGIE est muet sur la définition de l'intérêt indirect et de l'interposition de personne. La jurisprudence OHADA ne s'est pas également prononcée sur la question à notre connaissance. C'est à la doctrine et la jurisprudence française que reviennent le mérite de la définition des deux notions (A) et les applications qui en sont faites (B).

A. Les notions d'intérêt indirect et d'interposition

de personnes.

A1. La notion d'intérêt indirect

L'article 438 alinéa 2 AUDSCGIE, soumet à la procédure de contrôle les conventions auxquelles un administrateur, un directeur général, ou un directeur général adjoint est indirectement intéressé.

L'intérêt indirect est également pris en compte par l'article 502 AUDSCGIE en ce qui concerne les sociétés anonymes avec administrateur général.

Que faut-il alors entendre par intérêt indirect ?

Il y a intérêt indirect lorsqu'un administrateur, directeur général, ou un autre dirigeant de la société doit tirer profit d'un marché d'une entreprise sans toutefois y être partie4(*).

Mais la notion n'étant pas définie dans les textes OHADA, il va sans dire que son appréciation sera relativement souple. L'intérêt indirect doit présenter certaines caractéristiques pour pouvoir être pris en compte. En toute logique, l'intérêt indirect doit être sérieux et devra être assez significatif pour infléchir la conduite du dirigeant intéressé et faire peser sur la convention une légitime suspicion. Son appréciation se fera au cas par cas.

De toute évidence, l'intérêt indirect devrait être pris en compte dans le cas d'une convention conclue entre une société anonyme et une autre société dont l'un des administrateur de la société anonyme possédera le contrôle5(*).

A2. Notion d'interposition

Les articles 438 et 502 AUDSC disposent que la procédure de contrôle des conventions réglementées s'applique également aux conventions dans lesquelles les dirigeants ou associés visés par les textes traitent avec une personne interposée.

Les conventions par interposition de personnes sont celles qui interviennent sous le couvert d'une personne physique ou morale qui sert de prête-nom aux dirigeants de la société anonyme bénéficiaire en définitive de ces conventions.

D'une manière générale, une présomption d'interposition de personne pourrait frapper les membres de la famille, en particulier le conjoint, les ascendants et les descendants. On observera néanmoins que l'interposition de personnes s'apprécie in concreto et doit toujours être démontrée.

Pour les personnes physiques autres que les membres de la famille, il n'existe en principe aucune présomption d'interposition. Cependant lorsque, pour la conclusion d'une convention, il a été recouru à un prête-nom, cette convention constitue un cas indéniable d'interposition de personnes.

Ainsi défini, on remarque que ces deux notions sont très apparentées. Quelles applications la jurisprudence fait-elle de ces deux notions ? C'est à l'examen de cette question qu'il convient de s'atteler.

B. Les applications faites de ces deux notions par la jurisprudence

L'intérêt indirect et l'interposition de personnes sont deux notions certes très proches et sont, sans doute pour cette raison invoquées cumulativement. C'est ainsi que la cour de cassation a confirmé la décision d'une cour d'appel d'avoir jugé qu'une promesse de vente consentie par une société à l'épouse de son président, bénéficiait « indirectement » à celui-ci dans la mesure où les époux, quoique séparés de biens, cohabitaient dans le logement faisant l'objet de la promesse, de sorte que la société avait « en fait contracté par personne interposée » avec le président lui-même.6(*)

De même, dans une autre affaire, pour rejeter le pourvoi reprochant à un arrêt d'avoir soumis à autorisation une convention d'exclusivité conclue entre une SA et une SARL dont les seuls associés étaient les fils du président de la SA, la chambre commerciale s'est bornée à rappeler les termes de l'article 101 alinéa 2 du code de commerce, sans préciser si cette convention présentait pour le président un intérêt indirect ou si elle devrait être considérée comme conclue avec lui-même par personne interposée 7(*).

Quant à la doctrine, elle expose volontiers que « l'interposition de personne n'est que le révélateur d'un intérêt indirect »8(*), ou qu'elle « implique celui-ci »9(*)

Cependant, les deux notions ne se confondent pas. L'intérêt indirect, en effet, est plus large que l'interposition de personne, de sorte que le recours à cette notion permet dans les sociétés anonyme, d'élargir notablement le champ d'application du contrôle des conventions. C'est ce qu'illustre parfaitement un arrêt, rendu par la cour de Paris le 20 novembre 1998, qui présente au surplus l'intérêt de procéder à une application non pas cumulative mais successive de l'interposition de personne et de l'intérêt indirect. Les juges considèrent, en effet, que le président de société anonyme est indirectement intéressé par le bail consenti à la société par une société de construction immobilière dès lors que le dirigeant était « par interposition de personne morale écran (...) associé de la société bailleuse ». Ayant ensuite constaté que la conclusion du n'entrait pas dans le cadre de l'activité habituelle de la société et stipulait au surplus des conditions excessives au préjudice celle-ci, l'arrêt a prononcé logiquement l'annulation de cette convention qui ne constituait pas une opération courante conclue à des conditions normales, et comportait pour la société des conséquences dommageables.

Il ressort des développements ci-dessus que ce sont les conventions conclues directement, indirectement ou par interposition de personne entre la société anonyme et ses dirigeants qui sont soumises à la procédure de contrôle des conventions réglementées. Cependant certaines d'entre elles y échappent puisque dans la réglementation les conventions libres ou interdites sont exclues de la procédure de contrôle. C'est la condition négative de l'existence des conventions réglementées.

Section II : La condition négative : la convention ne doit être ni interdite

ni libre

En principe toutes les conventions entre la société anonyme et ses dirigeants sont soumises à la procédure de contrôle. En raison du niveau des risques liés aux contrats en cause, certaines conventions sont interdites (paragraphe 1), tandis que d'autres sont libres (paragraphe 2).

Paragraphe I : Les conventions interdites

Les conventions interdites sont celles qui présentent un risque majeur pour le patrimoine social. L'article 450 et 507 AUDSCGIE énumèrent limitativement la liste des opérations interdites. Mais cette énumération comporte aussi des exceptions.

A. Les opérations visées par l'interdiction

Les opérations interdites sont :

- Les prêts consentis par la société à ses dirigeants quelle qu'en soit la forme, et la loi cite notamment les emprunts et les découverts en compte courant. Il est nécessaire de faire quelques observations à ce niveau. Cette disposition n'interdit pas la conclusion d'une convention de compte courant entre la société et l'un de ses administrateurs suivant la procédure des conventions réglementées. Mais l'administrateur ne pourra se faire consentir un découvert dans le fonctionnement du compte.10(*).

- Les cautionnements et avals par la société des engagements des administrateurs et personnes assimilées envers les tiers11(*). La loi a voulu mettre fin aux crédits âprement sollicités et abusivement consentis par une société à ses administrateurs ou à ses principaux actionnaires12(*). L'interdiction vise aussi bien les engagements de caution personnelle, que le cautionnement réel, opération par laquelle la caution garantit la dette en hypothéquant un immeuble ou en constituant un gage. La formule utilisée par législateur OHADA est aussi limitative que celle utilisée dans le code de commerce français qui ne vise que les avals et les cautions, ce qui est bien restrictif13(*). Mais un dirigeant qui se ferait accorder par la société une autre garantie risquerait de commettre le délit d'abus de biens ou de crédit de la société (art. L. 225-43 et L 225-91).

Les conventions conclues au mépris de ces interdictions sont nulles. Tout comme en droit français, la nullité a un caractère absolu. On connaît les conséquences traditionnelles d'une telle sanction. La convention irrégulière ne saurait faire l'objet d'une confirmation ultérieure. En outre la nullité peut être invoquée par toute personne intéressée et la prescription est de 30 ans14(*).

La jurisprudence française s'est prononcée sur le fondement de cette sanction de nullité absolue. La chambre mixte de la cour de cassation a dans un arrêt du 10 juillet 1981, en effet, justifié cette sanction par la nécessité de protéger les intérêts des actionnaires et des créanciers de la société, dont les biens constituent le gage général de leurs créances. Cette sanction a pour objectif également de moraliser l'administration des sociétés par l'interdiction de pratiques risquant de nuire au crédit de la société et aux rapports commerciaux de celle-ci.

Cependant, une partie de la doctrine et de la jurisprudence françaises15(*) estiment que la nullité des actes interdits est relative. Elle justifie sa position par le fait que l'intérêt protégé est spécifique et se limite aux intérêts privés des associés et non l'ordre public. De ce fait, la société qui est la principale victime d'une telle opération a l'option d'abandonner ou de demander la nullité en justice. De plus, on peut admettre que la nullité de la convention interdite a pour effet d'obliger le contractant à rembourser immédiatement les sommes qui lui avaient été avancées. De ce fait, le bénéficiaire d'un prêt par exemple doit restituer à la société les sommes empruntées et majorées des intérêts.

Il convient de souligner qu'à la nullité absolue pourra s'ajouter une condamnation civile à des dommages et intérêts du dirigeant ou associé responsable pour compenser le préjudice subi par la société.

Outre la sanction civile, la conclusion d'une convention interdite peut-elle conduire à des sanctions pénales ? Quand bien même le législateur OHADA n'a pas énoncé de sanctions pénales spécifiques, la solution pourrait à notre sens, être justiciable de l'incrimination d'abus de biens sociaux, si les conditions énoncées à l'article 891 AUDSC sont réunies, à savoir que les organes dirigeants aient fait des biens ou du crédit de la société un usage contraire à l'intérêt social ; qu'ils aient agi de mauvaise foi ; qu'ils aient eu connaissance que leur acte était contraire à l'intérêt social, qu'ils aient agi dans leur intérêt personnel, direct ou indirect. Si toutes ces conditions sont remplies, la sanction pénale devient applicable. En France, l'usage abusif du crédit de la société est un délit (art. 242-6)16(*)

Toutefois la loi a prévu deux exceptions. La prohibition ne concerne pas les opérations conclues dans des conditions normales avec un dirigeant par une société qui exploite un établissement bancaire et les dirigeants, personne morale des sociétés.

B. Les exceptions au principe d'interdiction

La première exception au principe d'interdiction est relative aux établissements bancaires qui peuvent consentir des prêts ou accorder des garanties à leurs dirigeants. Les articles 450 et 507 AUDSCGIE prévoient que ces opérations doivent avoir un caractère courant compte tenu de l'activité de l'établissement et être conclues à des conditions normales. Il aurait, en effet, été injuste de traiter les dirigeants moins biens que les tiers. Ils peuvent donc obtenir du crédit dans les mêmes conditions que le personnel de la banque.

Parallèlement à cette disposition, l'article 35, alinéa 1 de la loi bancaire de 1996 dispose qu'il « est interdit aux banques d'accorder directement ou indirectement des crédits aux personnes qui participent à leur direction, administration, gérance, contrôle ou fonctionnement, pour un montant global excédent un pourcentage de leur fonds propres effectifs qui sera arrêté par une instruction de la banque centrale. »

L'alinéa 3 du même article dispose que : « Quel qu'en soit le montant, tout prêt ou garantie consenti par une banque à ses dirigeants, à ses principaux actionnaires ou associés ou aux entreprises privées dans lesquelles les personnes visées ci-dessus exercent des fonctions de direction, d'administration ou de gérance ou détiennent plus du quart du capital social, devra être approuvé à l'unanimité par les membres du Conseil d'Administration de la banque et sera mentionné dans le rapport annuel des commissaires aux comptes à l'assemblée des actionnaires ».

Ce pourcentage est fixé par le dispositif prudentiel applicable aux banques et établissements financiers entré en vigueur depuis janvier 2000 à 20 % de leurs fonds propres effectifs.

L'alinéa premier de l'article 35 de la loi bancaire de 1996 apporte d'abord une limitation au montant des prêts que la banque peut consentir à ses dirigeants alors que l'AUDSCGIE ne prévoit pas de telles limites sauf que les opérations doivent revêtir le caractère courant et normal. Cette limitation est égale aux 20% des fonds propres effectifs de ces établissements bancaires et financiers. Cela semble signifier au premier abord que de telles conventions sont libres lorsque leurs montants n'atteignent pas les 20% des fonds propres effectifs de la banque.

Cependant à la lecture l'alinéa 3 de la loi bancaire précitée, la réponse en est tout autre. En effet, ce texte dispose que quel qu'en soit le montant, tout prêt consenti par la banque à l'un des ses dirigeants, doit être approuvé à l'unanimité par les membres du conseil d'administration de la banque et être mentionné dans le rapport annuel du commissaire aux comptes à l'assemblée des actionnaires. Cette disposition signifie en définitive que toute convention entre un établissement bancaire un l'un des ses dirigeants est soumise à la procédure de contrôle des conventions réglementées.

Il se pose alors une question de conflit de norme. Les dispositions de la norme UEMOA peuvent-elles déroger à la norme OHADA? L'AUDSCGIE est-il au dessus des lois internes ? La loi bancaire de 1996 est-elle une loi interne ordinaire ?

La réponse à la première question est donnée par l'AUDSCGIE en son article 916 qui dispose que : « le présent acte n'abroge pas les dispositions législatives auxquelles sont assujetties les sociétés soumises à un régime particulier». L'activité bancaire est soumise à un régime particulier. La réglementation des conventions entre la société et ses dirigeants a pour but essentiel de protéger l'intérêt social. Et comme l'article 35 de la loi bancaire protège plus les intérêts de la société, il est logique que ce texte puisse déroger aux dispositions de l'acte uniforme sur cette question.

L'AUDSCGIE est-il au dessus des lois internes ? La réponse à cette question est à rechercher dans l'esprit des textes OHADA. Rappelons que l'OHADA a été créé dans le but d'harmoniser le Droit des Affaires dans les pays membres. En effet c'est par le biais des Actes uniformes que le droit des affaires doit être unifié. Constitue un Acte uniforme, le texte qui est pris pour l'adoption des règles communes aux Etats parties. Ils ont un régime juridique semblable à celui des règlements en droit communautaire, c'est-à-dire qu'il s'agit d'un acte de portée générale, obligatoire dans tous ces éléments et directement applicables dans tous les Etats parties selon l'article 10 du Traité (à rapprocher de l'article 189 alinéa 2 du Traité de Rome). Ainsi est affirmée leur force obligatoire et leur supériorité sur les normes juridiques existantes et futures. Ils se substituent sans aucune procédure aux règles de droit interne applicables dans les Etats membres ce qui leur donnent un caractère supranational. Les Actes uniformes prévaudront dans la hiérarchie des normes sur les lois et décrets pris par les Etats membres.

La deuxième exception est prévue en faveur des administrateurs personnes morales. Compte tenu de cette exception, une société mère peut emprunter à sa filiale et réciproquement. Il faudra alors respecter la procédure des conventions réglementées, sauf s'il s'agit d'une convention conclue à des conditions courantes et normales auquel cas la loi n'impose aucun formalisme. En effet de telles opérations sont habituelles entre sociétés d'un même groupe, parce qu'elles évitent les frais d'un recours au financement bancaire. Par conséquent l'aide financière est licite entre des sociétés dont l'une est administrateur de l'autre ou encore entre sociétés ayant des dirigeants communs.

En dehors de ces conventions interdites, la loi a prévue une autre catégorie de conventions qui échappent à la procédure de contrôle en raison de l'absence de risques qu'elles présentent pour la société lorsqu'elles sont conclues sous certaines conditions.

Paragraphe 2 : Les conventions libres

Les conventions libres sont celles qui sont soustraites à la procédure de contrôle des conventions réglementées. Il s'agit de celles portant sur des opérations courantes (A) et conclues à des conditions normales (B). Il convient de présenter ces deux conditions.

A. La convention doit porter sur une opération courante

Aux termes des articles 439 et 502 de l'AUDSCGIE, constituent des opérations courantes celles qui sont effectuées par une société d'une manière habituelle dans le cadre de ses activités17(*).

L'opération courante est celle qui entre en droit dans le cadre de l'activité sociale constitue en fait une opération habituelle pour la société.

Peuvent être considérés comme courantes la vente des produits fabriqués par l'entreprise18(*), ou la vente par le PDG à la société des bungalows lui appartenant dès l'instant où il s'agit d'une opération semblable à celle effectuée par la société d'une manière habituelle et dans le cadre de ses activités.

Pour que la convention puisse échapper à la procédure de contrôle, il faut que l'opération soit courante. Elle doit également être réalisées à des conditions normales.

B. La convention doit être conclue à des conditions normales

Les opérations sont considérées comme conclues à des conditions normales lorsqu'elles sont effectuées par la société aux mêmes conditions que celles qu'elle pratique habituellement dans ses rapports avec les tiers. Il convient également de tenir compte des conditions dans lesquelles sont habituellement conclues les conventions semblables non seulement dans la société en cause, mais aussi dans les autres sociétés du même secteur d'activité.

Sont donc des conditions normales les conditions habituellement conclues par la société et généralement pratiquées dans un même secteur d'activité. Par condition, il faut entendre les clauses principales de la convention telles que l'objet et le prix, ainsi que les clauses accessoires comme les délais de paiement et les garanties accordées.

De toute évidence, les conditions ne seront pas jugées normales si la convention est assortie d'une clause de faveur. Tel peut être le cas d'une convention mettant en présence deux sociétés ayant des intérêts communs si l'une d'elle accorde à l'autre des conditions particulières différentes de celles consenties habituellement à la clientèle.

Par ailleurs, un prix de vente qui serait fixé à son coût de revient ne paraît pas revêtir un caractère normal, sauf si des conditions identiques sont applicables à l'égard des clients ordinaires de la société, par exemple lors d'une campagne promotionnelle. Encore faut-il que, dans ce dernier cas, la transaction objet de la convention porte sur des quantités comparables à celles habituellement traitées par la société avec les tiers19(*).

La vente à un dirigeant à un prix identique à celui pratiqué pour la clientèle mais avec des délais de paiement plus longs n'est pas une convention conclue à des conditions normales. L'absence de garanties généralement demandée aux tiers serait considérée comme anormale pour un dirigeant dont le crédit est incertain.

La similitude avec des conventions habituelles conclues avec les tiers n'est pas donc un critère absolue de la normalité. Dans le cas précédent, par exemple, il est nécessaire de tenir compte des situations financières respectives du dirigeant et des tiers pour apprécier le caractère normal ou anormal de la non demande de garantie.

Lorsque les conventions réglementées sont déterminées suivant les conditions édictées plus haut, elles doivent être soumise à une procédure de contrôle dont la maîtrise des étapes est nécessaire pour l'efficacité de la réglementation juridique.

CHAPITRE II : LA PROCEDURE APPLICABLE AUX

CONVENTIONS REGLEMENTEES

Lorsqu'un dirigeant contracte avec la société qu'il dirige, il doit respecter la procédure de contrôle des conventions réglementées. Le non respect de cette procédure peut conduire à la mise en cause de la responsabilité du dirigeant concerné.

Cependant, force est de constater que dans de nombreuses sociétés la procédure est méconnue des dirigeants qui concluent des actes avec leurs sociétés au mépris de la réglementation en vigueur.

La réglementation mise en place par le législateur s'efforce d'assurer une information suffisante dans les sociétés anonymes et de maintenir ou le cas échéant de restaurer l'équilibre contractuel. C'est un dispositif de contrôle complexe qui se déroule en 4 étapes (section 1) et donne un rôle important au Commissaire aux comptes qu'il convient d'examiner (section 2).

Section I : Les étapes de la procédure de contrôle

La procédure est décrite par l'article 440 AUDSCGIE. Ainsi, le dirigeant intéressé est tenu d'informer le conseil d'administration dès qu'il a connaissance d'une convention à laquelle la réglementation s'applique. La convention est soumise à l'autorisation préalable du conseil d'administration. Le Président du Conseil d'Administration donne avis au commissaire aux comptes de toute convention autorisée qui présente un rapport sur ces conventions. Le rapport est soumis à l'assemblée Générale pour approbation.

Paragraphe 1 : L'information du conseil d'administration

L'article 440, alinéa 1er, AUDSCGIE dispose que «  l'administrateur intéressé est tenu d'informer le conseil d'administration dès qu'il a connaissance d'une convention soumise à autorisation ».

L'AUDSCGIE ne précise pas la forme de la déclaration. En l'absence d'une telle précision, l'on peut penser que l'information à fournir au conseil d'administration n'obéit à aucune forme. Elle peut être écrite ou verbale. Lorsque la déclaration est verbale, la preuve peut être établie par tout moyen. De même, le conseil d'administration peut en être informé à l'occasion de sa réunion. Dans ce cas, il est préférable d'en faire mention au procès-verbal de la séance.

Cette obligation d'information peut surprendre au premier abord. Pourquoi en effet avertir la société puisque, par hypothèse celle-ci sera partie au contrat ?

La remarque n'est exacte que si le contrat est conclu par le dirigeant lui-même. En revanche, l'information par le dirigeant est nécessaire lorsqu'il y a interposition de personne ou intérêt indirect. La société n'a pas toujours les moyens de savoir qu'elle traite indirectement avec un dirigeant, ou ne pourrait la découvrir qu'au moyen d'une recherche systématique, inconciliable avec la pratique des affaires.

Une fois informé, le conseil d'administration délibère pour autoriser ou non la convention envisagée.

Paragraphe II : L'autorisation préalable du Conseil d'Administration

Aux termes des dispositions de l'article 440AUDSCGIE précité, toute convention soumise à la procédure de contrôle des conventions réglementées doit faire l'objet d'une autorisation préalable du conseil d'administration par un vote auquel l'intéressé s'il est administrateur, ne peut pas prendre part.

L'autorisation du conseil d'administration doit être préalable. Elle doit en effet être donnée avant la conclusion de la convention dans le cadre d'une véritable délibération du conseil d'administration. Cette autorisation ne saurait en conséquence avoir un effet rétroactif.

Il faut, en outre, déduire des dispositions de l'article 440 AUDSCGIE précité que l'autorisation préalable du conseil d'administration est spécifique à la convention soumise au conseil et ne saurait en aucune manière être considérée comme une autorisation générale et de principe, indéfinie dans sa durée et son objet, au risque d'être purement et simplement annulée. L'autorisation doit être spéciale pour chaque convention afin que le contrôle soit effectif.

La convention conclue sans l'autorisation du conseil d'administration est nulle. Mais cette nullité, qui est facultative, ne peut être prononcée que si la convention a eu des conséquences dommageables pour la société (article 444 AUDSCGIE).

Les articles 445 et 446 AUDSCGIE soumettent le prononcé de la nullité à une action devant la juge. L'action en nullité se prescrit par trois ans à compter de la date de la convention. Toutefois, si elle a été dissimulée, le point de départ du délai de prescription est reporté à la date où la convention a été révélée.

Cependant, la nullité peut être couverte par un vote de l'assemblée générale ordinaire selon les modalités prévues à l'article 447 AUDSCGIE, délibération à laquelle l'administrateur ou le directeur général intéressé ne participe pas. Ce vote intervient sur le rapport du commissaire aux comptes exposant les raisons de l'absence de l'autorisation préalable.

La nullité est-elle également encourue en cas d'exécution intégrale d'une convention non préalablement autorisée ?

La jurisprudence OHADA n'a, semble-t-il pas à ce jour statuée sur cette question précise à la différence du juge français, qui a adopté une solution de principe raisonnable. En effet, pour la cour suprême française, même si l'action en nullité est prescrite, celui qui est mis en demeure d'exécuter l'acte irrégulier peut s'y opposer en invoquant l'exception de nullité, laquelle est imprescriptible tant que le contrat n'a pas été exécuté. Cette exception de nullité devient inopérante au cas où le contrat vicié a été exécuté20(*).

En définitive, dans le cas où le conseil d'administration autorise la convention, le commissaire aux comptes doit en être avisé.

Paragraphe III : L'information du commissaire aux comptes

Lorsqu'une convention est autorisée par le conseil d'administration, l'article 440 AUDSCGIE exige que le président du conseil d'administration donne un avis au commissaire aux comptes, dans le délai d'un mois à compter sa conclusion. De même lorsque l'exécution des conventions conclues au cours d'exercice antérieur a été poursuivi au cours du dernier exercice, le président du conseil d'administration informe le commissaire aux comptes de cette situation dans le délai d'un mois à compter de la clôture de l'exercice. La procédure connaît le plus souvent des blocages à ce niveau. En effet, dans la pratique, les dirigeants ne respectent pas cette étape. Le commissaire aux comptes n'est pas informé de l'existence des conventions. Ce qui constitue une difficulté à son niveau car il n'a pas à rechercher l'existence des conventions au cours de sa mission.

Cependant l'Acte uniforme ne précise pas la forme selon laquelle l'avis doit être donné. Il peut être donné sous une forme quelconque, mais pour éviter toute contestation, il est préférable qu'il soit donné par lettre recommandée avec accusé de réception.

Quelles sont les conséquences du défaut d'information du commissaire aux comptes ?

Le législateur OHADA est muet sur la question de la sanction du défaut d'avis ou d'information donné au commissaire aux comptes. Néanmoins, la possibilité de sanction n'est pas totalement exclue dans l'esprit des textes OHADA. A cet égard, le rôle primordial du commissaire aux comptes paraît ouvrir la voie à d'éventuelles sanctions.

Dans les sociétés anonymes, en vertu des dispositions de l'article 441 AUDSCGIE, les commissaires aux comptes sont tenus de dénoncer, dans le cadre de leur intervention, toute violation de la procédure des conventions réglementées, ce qui peut conduire à établir certaines responsabilités. En conformité avec les dispositions de l'article 441 précité, les commissaires aux comptes doivent, en effet, signaler dans leur rapport à l'assemblée générale annuelle les conventions autorisées portées à leur connaissance, ainsi que celles qui ne leur auraient pas été signalées et qu'ils auraient découvertes dans l'exécution de leur mission.

En droit français, l'annulation d'une convention pour défaut d'information au commissaire aux comptes paraît exclue. La sanction retenue par la jurisprudence réside dans l'obligation pour les intéressés de supporter les conséquences préjudiciables que peut avoir la convention pour la société21(*).

En effet, la nullité n'est envisagée que dans les hypothèses d'absence d'autorisation préalable par le conseil d'administration et de fraude à l'occasion de la conclusion de la convention.

La jurisprudence OHADA ne fournit pas à notre connaissance une illustration au problème de la sanction de ce défaut d'information du commissaire aux comptes. Il y a tout lieu de penser que la sanction pourrait être également fonction de l'existence ou non d'un préjudice subi par la société.

Le commissaire aux comptes, une fois avisé de l'existence de la convention, est tenu d'établir un rapport qui sera soumis à l'approbation de l'assemblée des actionnaires.

Paragraphe IV : L'approbation des conventions par l'assemblée

des actionnaires

La résolution de l'assemblée générale approuvant ou désapprouvant la convention qui lui est soumise constitue la dernière phase de la procédure de contrôle, qui demeure un contrôle posteriori puisque les conventions peuvent être exécutées aussitôt après l'autorisation du conseil d'administration.

L'assemblée générale statuant sur le rapport spécial du commissaire aux comptes, doit nécessairement délibérer. En effet, à l'instar de l'autorisation préalable du conseil d'administration, l'approbation de l'assemblée générale ne doit pas résulter de l'accord donné individuellement par chaque actionnaire, mais plutôt d'une véritable délibération.

Par ailleurs, il faut signaler que dès l'instant où il existe plusieurs conventions concernant des administrateurs différents, chaque convention devra faire l'objet d'un vote séparé. L'assemblée générale doit approuver séparément chaque convention qui doit faire l'objet d'une résolution particulière.

Mais quelle est l'incidence de l'intervention de l'assemblée générale sur le sort des conventions ?

Pour répondre à cette question, il faut distinguer deux hypothèses : celle où l'assemblée approuve et celle où elle désapprouve la convention préalablement autorisée par le conseil d'administration.

Concernant la première hypothèse, l'article 443 AUDSCGIE prévoit qu'en l'absence de fraude les conventions approuvées produisent leurs effets à l'égard des tiers cocontractants. Elles produisent leurs effets même si elles ont eu des conséquences préjudiciables pour la société, sous réserve de la responsabilité de la personne intéressée.

L'appréciation de la fraude dans ce cas ressort des règles du droit civil qui exigent la mauvaise foi et l'intention de nuire. Il faut entendre par fraude tout fait résultant d'une tromperie destinée à induire en erreur le commissaire aux comptes et l'assemblée des actionnaires22(*).

La fraude peut correspondre aussi à l'utilisation d'un complice comme personne interposée, à des affirmations mensongères, et à tous les éléments qui peuvent intervenir lors de la conclusion du contrat23(*).

Certains auteurs estiment que la fraude peut intervenir lors de la conclusion du contrat ou lors du déroulement de la procédure d'autorisation du conseil d'administration ou de l'approbation par l'assemblée des actionnaires24(*).

D'autres pensent que la fraude ne peut être celle résultant de la conclusion du contrat, car il ne suffira pas dans ce cas de faire application des règles du droit civil. En effet, les règles de protection du consentement suffisent à prévenir ou sanctionner la fraude à ce stade. Pour ces derniers, seule la fraude ayant entaché l'autorisation préalable est prise en compte25(*).

Concernant la deuxième hypothèse où l'assemblée générale désapprouve la convention autorisée, il résulte des dispositions de l'article 443 AUDSCGIE que ces conventions produisent leurs effets.

Ces conventions ne peuvent être annulées car elles ont le plus souvent commencé à être exécutées26(*). Par contre, les conséquences préjudiciables des conventions désapprouvées peuvent être mises à la charge de l'administrateur intéressé et éventuellement des autres membres du conseil d'administration.

On constate ainsi que la responsabilité de l'administrateur ainsi que celle des autres membres du conseil d'administration ne peut être engagée qu'en cas de fraude. Il faut remarquer que la fraude exigée dans ce cas est la même que celle qui est visée en cas d'approbation de la convention par l'assemblée générale.

Ainsi, on peut soutenir que l'approbation par l'assemblée des actionnaires n'est pas une condition de validité des conventions. En effet l'assemblée générale ne peut pas remettre en cause la validité des conventions préalablement autorisées par le conseil d'administration. La chambre commerciale de la cour de cassation française, dans un arrêt rendu le 23 juillet 1985, a précisé que l'approbation de l'assemblée des actionnaires n'était pas une condition de validité des conventions autorisées par le conseil d'administration, puisque celles-ci produisent leurs effets malgré une désapprobation.

Les procédures instituées par le législateur pour veiller à la régularité des conventions réglementées ne peuvent être efficaces que si le commissaire aux accomplit sa mission telle que prévue par la loi. Il doit présenter un rapport spécial qui va permettre à l'assemblée des actionnaires de juger du bien fondé de la convention. Cette intervention mérite d'être évoquée.

Section II : L'intervention du commissaire aux comptes

Il convient de rappeler que la procédure des conventions réglementées répond à la nécessité d'assurer la transparence des opérations sociales effectuées avec les dirigeants. Ainsi les opérations conclues entre la société et ses dirigeants sont soumises à l'approbation de l'assemblée générale. Dans le cadre de cette procédure, la loi met à la charge du commissaire aux comptes l'obligation de présenter un rapport spécial sur les conventions réglementées (paragraphe 1). Sa responsabilité peut être engagée dans le cadre de cette mission (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le rapport du commissaire aux comptes

Aux termes des dispositions de l'article 440 AUDSCGIE, le commissaire aux comptes présente un rapport spécial sur les conventions réglementées, destiné à informer les membres de l'organe délibérant appelé à les approuver.

Son indépendance et sa compétence doivent permettre aux actionnaires d'avoir une information objective et complète. Il met en oeuvre certaines diligences en vue de l'établissement de son rapport.

A. Les diligences du commissaire aux comptes

L'AUDSCGIE est très laconique en ce qui concerne les diligences du commissaire aux comptes. Dans la pratique, les experts comptables se réfèrent aux normes de travail prévues par la compagnie nationale des commissaires aux comptes français (CNCC).

Dans le cadre de sa mission, le commissaire aux comptes n'a pas à effectuer des recherches systématiques pour découvrir les conventions non autorisées. Il reste cependant vigilant lors de ses travaux à leur existence possible27(*). Il peut ainsi avoir connaissance lors de sa mission générale ou de ses autres interventions des conventions qui auraient du être soumises à la procédure de contrôle. Ainsi, la communication par le président aux membres du conseil d'administration et au commissaire aux comptes de la liste et de l'objet des opérations conclues à des conditions normales constitue une source d'information permettant au commissaire au compte d'identifier, le cas échéant, compte tenu de sa connaissance générale de l'entité et de ses activités, les conventions dont l'objet est manifestement non courant.

Aussi, lors de l'examen des informations fournies par la direction concernant l'identification des parties liées et les opérations réalisées avec celles-ci, le commissaire aux comptes peut avoir également connaissance d'opérations réalisées avec des personnes intéressées et pouvant constituer des conventions réglementées ou non. Il effectue les rapprochements utiles lui permettant de recouper entre elles les diverses informations qui lui ont été communiquées.

Lorsque le commissaire aux comptes a été avisé de la conclusion des conventions ou qu'il en a découvertes, il recherche les informations28(*) à fournir dans son rapport à savoir:

- l'énumération des conventions soumises à l'approbation de l'assemblée générale ;

- le nom des administrateurs ou des directeurs généraux intéressés,

- la nature et l'objet des dites conventions ;

- les modalités essentielles de ces conventions, notamment l'indication des prix ou tarifs pratiqués, des ristournes et commissions consenties, des délais de paiement accordés, des intérêts stipulés, des sûretés conférées, et, le cas échéant, toutes autres indications permettant aux actionnaires d'apprécier l'intérêt qui s'attachait à la conclusion des conventions analysées;

- l'importance des fournitures livrées ou prestations de services fournies ainsi que le montant des sommes versées ou reçues au cours de l'exercice en exécution des conventions conclues et autorisées au cours d'exercices antérieurs et dont l'exécution s'est poursuivie durant l'exercice.

Le commissaire aux comptes rappelle aux dirigeants, notamment lors de l'établissement de sa lettre de mission, la nature des informations qui doivent lui être fournies sur les conventions afin de lui permettre l'établissement de son rapport spécial.

En outre, le commissaire aux comptes vérifie la concordance de ces informations avec les documents de base dont elles sont issues. Il effectue les rapprochements nécessaires avec les vérifications réalisées dans le cadre de son audit, lorsque le montant enregistré dans les comptes est significatif. Ainsi, le commissaire aux comptes peut examiner les documents suivants :

- une copie de la convention (prêt, garantie, rémunération...) ;

- la délibération du conseil d'administration autorisant la convention ;

- les pièces comptables qui permettent le suivi de l'exécution de la convention et le chiffrage des sommes versées ou reçues au cours de l'exercice.

Lorsqu'au cours de ses travaux, le commissaire aux comptes découvre une convention, il met en oeuvre les diligences décrites ci-dessus et demande aux dirigeants, lorsqu'une procédure d'autorisation est prévue, les circonstances en raison desquelles celle-ci n'a pas été suivie.

Lorsque le commissaire aux comptes n'a pas été avisé de la conclusion de convention et lorsqu'il n'en a pas découvert, il peut se faire confirmer par les dirigeants l'absence de convention.

Lorsqu'au cours de sa mission, il relève des faits délictueux, il est tenu de les déclarer au procureur de la République.

Ces diligences évoquées ci-dessus doivent aboutir à la présentation du rapport spécial destiné à l'approbation de l'assemblée générale.

B. L'établissement du rapport spécial

L'article 440 AUDSCGIE fait obligation au commissaire aux comptes de présenter un rapport sur les conventions réglementées dans lequel il fait figurer les informations qu'il a acquises au cours de ses diligences.

Dans son rapport spécial, le commissaire aux comptes ne donne en aucun cas une opinion sur l'utilité, le bien-fondé ou l'opportunité des conventions, ce qui aurait pour effet de substituer son jugement à celui des membres de l'organe délibérant qui restent seuls maîtres de leur appréciation. Il peut demander aux dirigeants des informations complémentaires.

Le rapport spécial porte sur les conventions dont le commissaire aux comptes a été avisé29(*) ou qu'il a découvertes à l'occasion de ses travaux. Lorsqu'il existe des conventions approuvées au cours des exercices antérieurs dont l'exécution se poursuit, le commissaire aux comptes rappelle leur existence et peut limiter ses indications à celles qui sont nécessaires pour les identifier. De plus, pour ces conventions, il indique les renseignements jugés nécessaires .Ces conventions sont présentées dans un paragraphe distinct du rapport.

Dans l'établissement de son rapport, le commissaire aux comptes peut être confronté aux situations suivantes :

- absence de convention réglementées, soit parce qu'il n'a pas été avisé de leur existence, soit parce qu'il n'en a pas découvert, Dans cette situation, il établit un rapport spécial indiquant cette situation.

- existence de conventions non réglementées : les conventions portant sur des opérations courantes conclues à des conditions normales ne sont pas mentionnées dans le rapport spécial ;

- convention non autorisée portée à la connaissance du commissaire aux comptes par le conseil d'administration qui entend la soumettre à l'assemblée générale pour couvrir sa nullité : le commissaire aux comptes, conformément aux normes comptables, mentionne dans son rapport spécial les circonstances en raison desquelles la procédure d'autorisation n'a pas été suivie ;

- convention pour laquelle le conseil a estimé qu'elle ne relevait pas de l'article 438AUDSCGIE : si le conseil d'administration a estimé que certaines conventions ne relevaient pas de la procédure d'autorisation préalable et si le commissaire aux comptes ne partage pas cette analyse, il mentionne cette position dans son rapport spécial, que le conseil d'administration décide ou non de soumettre ces conventions à l'assemblée générale ;

- cas particulier du « déclassement » d'une convention : le conseil d'administration décide de déclasser une convention soumise à la procédure de contrôle ou une convention non soumise. Quelle doit être l'attitude du commissaire aux comptes notamment s'il est en désaccord avec le déclassement? Doit-il la considérer comme étant une convention qui s'est poursuivie ou une convention non autorisée ? Dans cette hypothèse, la compagnie nationale de commissaire aux comptes en France a eu une position raisonnable30(*). Selon elle, si le conseil d'administration a estimé que la convention n'est pas soumise à la procédure d'autorisation, c'est parce qu'il s'agit à son avis, d'une convention courante, conclue à des conditions normales. Lorsque le commissaire aux comptes estime que ces deux conditions ne sont pas remplies, il doit s'expliquer dans son rapport spécial en donnant toutes les précisions justifiant sa position. L'intervention du consultant juridique s'avère nécessaire à ce niveau car il permet de trancher la controverse entre le conseil d'administration et le commissaire aux comptes.

Le rapport doit être précis et être déposé 15 jours au moins avant la tenue de l'assemblée générale ordinaire. Il doit être également daté et signé.

A titre d'observation générale sur la présentation des rapports des commissaires aux comptes qui ont été examinés, il ressort que le contenu est très sommaire à tel point que l'on se demande s'il remplit sa fonction. Ces rapport permettent-ils effectivement à l'Assemblée générale d'avoir un avis éclairé sur le bien-fondé de la convention ?

Au vue des responsabilités qui incombe aux commissaires aux comptes, notamment celle de veiller sous sa responsabilité à l'observation des dispositions des articles 438 à 448 AUDSCGIE et d'en dénoncer toute violation, nous pensons que le rapport du commissaire aux comptes doit aller au delà des simples constatations et être plus explicatif pour atteindre sa finalité. Le manquement à ses obligations peut entraîner la mise en cause de sa responsabilité.

Paragraphe 2 : La responsabilité du commissaire aux comptes

Le commissaire aux comptes peut voir sa responsabilité être engagée en cas de manquement à ses obligations. Cette responsabilité peut être engagée au plan civil, pénal et disciplinaire. Concernant sa responsabilité disciplinaire, elle ne fait pas échec aux deux autres. Dans le cadre de cette étude, cette dernière sera négligée.

A. La responsabilité civile

Elle peut être retenue dans deux hypothèses.

A1. L'absence de rapport du commissaire aux comptes

Plusieurs situations peuvent être distinguées :

- Cas des conventions autorisées portées à la connaissance du commissaire aux comptes : lorsque dans ce cas, le commissaire aux comptes omet de présenter un rapport, sa faute est présumée. En effet, bien que le commissaire aux comptes ne soit tenu que d'une obligation de moyens, on considère dans ce cas qu'il est tenu exceptionnellement à une obligation de résultat. S'il y a faute du commissaire aux comptes, le demandeur devra prouver, pour que la responsabilité du commissaire aux comptes soit retenue, une faute, un préjudice, un lien de causalité entre la faute et le préjudice. Dans ce sens, un arrêt de la cours de cassation de Versailles a estimé que le préjudice peut résulter de la nullité de la délibération de l'assemblée pour violation d'une disposition impérative de la loi31(*).

- Cas des conventions découvertes par le commissaire aux comptes : dans ce cas, le commissaire aux comptes présente également un rapport. Mais il n'est alors tenu que d'une obligation de moyens et c'est au demandeur qu'incombe la charge de prouver que le commissaire aux comptes, bien qu'ayant eu connaissance de la convention, n'a pas établi de rapport. II convient de rappeler que l'obligation du commissaire aux comptes n'est pas de rechercher des conventions.

A2. L'insuffisance de rapport du commissaire aux comptes

Le rapport du commissaire aux comptes peut ne pas remplir sa fonction informative et être considéré comme insuffisant. On peut imaginer alors qu'un minoritaire agisse contre le commissaire aux comptes en soutenant que son rapport était insuffisant et ne lui a pas permis « d'apprécier l'intérêt qui s'attachait à la conclusion des conventions analysées »32(*).

Rappelons cependant que le commissaire aux comptes n'a pas à donner son opinion sur l'utilité, le bien-fondé ou l'opportunité des conventions. En tout cas, la question ne se poserait plus si l'insuffisance du rapport était telle qu'elle serait assimilable à une absence de rapport »...

B. La responsabilité pénale

La responsabilité pénale n'intervient que dans le cadre d'abus de biens sociaux ou de crédit de la société. Cependant, le risque pénal d'être condamné pour abus de biens sociaux ou de crédit, concerne au premier chef les dirigeants sociaux.

Le commissaire aux comptes pourrait-il être poursuivi pour complicité d'abus de biens sociaux ou d'abus de pouvoirs ?

Sa condamnation ne pourrait qu'être tout à fait exceptionnelle. En effet, la complicité n'a lieu que lorsque le commissaire a conscience de commettre les faits et qu'il sait qu'il s'associe à un acte délictueux, tel qu'il est déterminé par la législation et qu'il enfreint ainsi les prohibitions légales. Le risque essentiel, pour le commissaire aux comptes, est celui d'être poursuivi pour non-révélation des faits délictueux. Cette condamnation pourrait être demandée en prouvant la connaissance par le commissaire aux comptes du fait délictueux ainsi que sa mauvaise foi.

CONCLUSION

Au terme de ce rapport sur les conventions réglementées dans la société anonyme, les conclusions suivantes peuvent être faites.

D'abord, les conventions réglementées sont celles qui sont conclues entre la société et ses dirigeants (PCA, PDG, DG, DGA...). Ce sont également toutes les conventions entre la société et ses dirigeants, à l'exception des conventions libres ou interdites. La réglementation des conventions entre la société et ses dirigeants, a pour mérite de prémunir la société contre les abus auxquels peuvent se livrer les dirigeants sociaux. Cependant, l'évolution dans la pratique des affaires a fait que le domaine d'application de la réglementation n'arrive pas à faire face aux nouvelles situations. Aussi, il est souhaitable que le législateur OHADA, à l'instar du législateur français en 200333(*), se lance dans une reforme de ses textes pour une extension du domaine d'application de la procédure.

Ensuite, la procédure de contrôle prévue par le législateur est une procédure complexe. Elle se déroule en quatre étapes et donne une place importante à l'intervention du commissaire aux comptes. Ces étapes consistent l'information et l'autorisation préalable de la convention par le conseil d'administration, à l'information du commissaire aux comptes qui présente un rapport spécial et à l'approbation de l'assemblée générale. Le respect de ces étapes est nécessaire pour assurer l'efficacité de la réglementation. Si la procédure n'est pas respectée, la convention n'est pas nulle. Elle ne sera annulée que si la convention a eu des conséquences dommageables pour la société ou s'il y a eu fraude. Il est souhaitable que les entreprises fassent appel aux services d'un consultant juridique pour les éclairer, lorsqu'elles envisagent la conclusion d'une convention avec un dirigeant. Elles peuvent également initier des sessions de formation sur les conventions réglementées à l'endroit des dirigeants.

Enfin le non respect de la procédure dans certaines sociétés s'explique par le fait que le législateur OHADA n'a édicté des sanctions sévères. La crainte d'être sévèrement sanctionné aurait entraîné une moralisation des comportements des dirigeants et plus de transparence dans la gestion de la société.

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Cour d'appel de Paris, 06 février 1998, Chambre numéro 5 C, SA Cerus, Compagnies européennes contre Géniteau, JCP E Semaine Juridique (édition entreprise), n°19, 07/05/1998, pp.753-756 ;

LEGISLATION

- Traité relatif à l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA), signé à Port-Louis le 17 octobre 1993 (ratifié par décret 94-473 du 28 décembre 1994, ratification autorisée par la loi 39-94 ADP du 16 novembre 1994, promulguée par décret 94-459 du 22 décembre 1994, J.O.BF. spécial n° 5 du 4 novembre 1997) ;

- Acte Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique, JO BF spécial n° 5 du 4 novembre 1997 ;

- Loi n°12-96 ADP du 2 mai 1996 portant réglementation bancaire : article 35 ;

- Le code de commerce ;

- Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (dite loi RNE) ;

- La loi de Sécurité financière n°2003-706 du 1er août 2003 ;

- Dispositif prudentiel applicable aux banques et établissements financiers de l'UEMOA ;

- Les normes de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes (CNCC).

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE 1

CHAPITRE I : LA DETERMINATION DES CONVENTIONS

SOUMISES A LA PROCEDURE

DE CONTROLE 6

Section I : La condition positive : la convention concerne un dirigeant

ou une personne assimilée 7

Paragraphe I : La convention doit être conclue directement avec un dirigeant

de la société 7

Paragraphe II : Les conventions conclues indirectement ou par personne interposées 10

A. Les notions d'intérêt indirect ou d'interposition de personnes 10

A1. La notion d'intérêt indirect 10

A2. La notion d'interposition 11

B. Les applications faites de ces deux notions par la jurisprudence 12

Section II : La condition négative : la convention ne doit être ni interdite

ni libre 14

Paragraphe I : Les conventions interdites 14

A. Les opérations visées par l'interdiction 15

B. Les exceptions au principe d'interdiction 18

Paragraphe II : Les conventions libres 21

A. La convention doit porter sur une opération courante 21

B. La convention doit être conclue à des conditions normales 22

CHAPITRE II : LA PROCEDURE APPLICABLE

AUX CONVENTIONS REGLEMENTEES 24

Section I : Les étapes de la procédure de contrôle 24

Paragraphe I : L'information du Conseil d'Administration 25

Paragraphe II : L'autorisation préalable du Conseil d'Administration 26

Paragraphe III : L'information du Commissaire aux Comptes 27

Paragraphe IV : L'approbation des conventions par l'Assemblée

des actionnaires 29

Section II : L'intervention du Commissaire aux Comptes 32

Paragraphe I : Le rapport du Commissaire aux Comptes 33

A. Les diligences du Commissaires aux Comptes 33

B. L'établissement du rapport spécial 36

Paragraphe II : La responsabilité du Commissaire aux Comptes 39

A. La responsabilité civile 39

A1. L'absence de rapport au Commissaire aux Comptes 39

A2. L'insuffisance de rapport du Commissaire aux Comptes 40

B. La responsabilité pénale 41

CONCLUSION 42

BIBILOGRAPHIE 44

ANNEXES

* 1 Le terme « dirigeant » est très vague. Il appartient à la jurisprudence de dire si au-delà des mandataires sociaux, il englobe tous les directeurs techniques ou seulement certains d'entre eux.

* 2 Ce seuil de 5% fixé par la loi NRE est porté à 10 par la loi de Sécurité financière du 1er août 2003.

* 3 Pour une interpretation plus large, cf BCNCC n°126-2002, p261 ; compar. BCaillaud, les conventions conclues entre une société anonyme et une société contrôlant une société actionnaire detenant plus de 5% de vote de la SA. JCP éd. E.2002, n° 272.

* 4 Mercadal et Janin, Memento des sociétés commerciales, Francis Lefèbre 2003, n° 8365.

* 5 Didier Loukakou, les conventions réglementées dans les sociétés commerciales de l'espace OHADA, Penant n°884, juillet-septembre 2004.

* 6 Cass.ch. com. 23 janvier 1968 Bull. civ. IV, n°38.

* 7 Cass. Ch. Com. 23 octobre 1990 Revue Société 1991, 1992, note Y Guyon

* 8 Y. Guyon note précitée.

* 9 B. Mercadal et P. Janin, Mémento pratique Francis Lefèbre, Sociétés commerciales, 1998, n°1384.

* 10 Voy. Dijon, 26 janvier 1983 BCNCC, 1983, 89.

* 11 Paris, 19 novembre 1974, Gaz Pal, 1975 1 286 RDC,1975, 547, observations HOUIN.

* 12 M. Dagot et C. Mouly, l'usage personnel du crédit social et son abus : rev. Soc., 1988, 1. Urbain-Parléani, les comptes courants d'associés, n° 183, Paris, 1986.

* 13 Cass. Ch. Com. 26 avril 2000 : J.C.P, 2000, 1234, note Y. Guyon : rev. soc., 2000, 531, note B. Petit.

* 14 Cozian et Viandier, Droit des sociétés, éd LITEC 2001, n°722, p 261.

* 15 Pierre André Moreau et Jean Guyenot : op.cit. p : 337.


· Tribunal de grande instance de Seine, 27 novembre 1962, D 1964, p : 730, Rev Trim. Dr.

Cam. 1974, p : 110, n° 9, obs. crit. Houin.

* 16 Cass. Ch. Crim. 10 nov. 1964 : D, 1965.43.

* 17 Les conventions entre les sociétés commerciales et leurs dirigeants, éd Economica, 1973, p58, Bull CNCC. N°31, septembre 1978, p. 361.

* 18 N'est pas courante la convention conclue entre deux sociétés d'expertise comptable qui a eu pour conséquence une véritable sous traitance de l'objet social de l'une d'entre elles.

* 19 Bull.. CNCC n°108, déc. 1997, p. 216.

* 20 Cass. 2e Ch civ, 3 avril 2003, com 6 juin 2001, cass 3e ch. Civ 25 mars 1998, 1er décembre 1998 et 10 janvier 1978, com 13 décembre 1976.

* 21 Cf cass. Com. 23 juillet 1985, Bull joly 1985, cass. Comm. 5 November 1991, RJDA 3/92, n°254, Paris, 6 juillet 1993, Droit des Sociétés 1993, n°190 ;obs. Le Nabasque.

* 22 Youssef KNANI op.cit.

* 23 Encyclopédie des études juridiques, op cit. p. 70.

* 24 Migeon Nelson « les conventions entre la société et leurs dirigeants » les petites affiches, n°89.

* 25 Note, Y Balensi, op. cit., p 168 et 169.

* 26 Nebila Mezhani, cours de Droit commercial, 1984, 15e éd p 114.

* 27 CA Lyon, 21 janvier 1986, Bull CNCC n°62, mars 1986 p. 182.

* 28 Article 440, alinéa 4. AUDSCGIE

* 29 Le commissaire aux comptes peut être avisé d'une convention pour laquelle une autorisation n'est pas prévue.

* 30 Bull CNCC n° 97, mars 1995, p.104.

* 31 Cass. Com., 2 juillet 1997.

* 32Voir Étude juridique du CNCC français « la responsabilité civile du commissaire aux comptes » - mai 1995 p. 15 et 16.

* 33 Il s'agit de la loi NRE qui a prévue que les conventions entre la société et actionnaires disposant de 10% du capital social soient soumises à la procédure des conventions réglementées.






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