4.2.
3. Effets de la hausse de CO2 dans l'atmosphère sur les cultures
maraîchères
L'augmentation des concentrations atmosphériques en
dioxyde de carbone pourrait être
bénéfique. Les plantes croissent en raison de la
photosynthèse dont la cadence serait stimulée par des taux plus
élevés de dioxyde de carbone. Ainsi, la cadence de croissance et
la productivité des plantes pourraient augmenter.
La plupart des cultures développées dans des
régions fraîches et tempérées répondent
positivement à une plus grande concentration de dioxyde de carbone,
c'est le cas de la majorité des cultures maraîchères
d'origine européenne.
Ainsi, les différents types de plantes ont
différents mécanismes de fixation du carbone, ce processus qui
fait que durant la photosynthèse le CO2 est converti en
carbone organique. Sans entrer dans les détails, disons que pour
certaines plantes, ce mécanisme passe par la synthèse de
composés à trois atomes de carbone. C'est ce qu'on appelle la
photosynthèse C3 qui implique les plantes dites plantes
C3 localisées dans leur majorité en zone
tempérée (cas de nombreuses cultures maraîchères).
Il y a aussi la photosynthèse C4, impliquant des
composés à quatre atomes de carbone, et conséquemment les
plantes C4 localisées dans les zones tropicales.
De nombreuses études tendent à prouver qu'une
augmentation du CO2 serait donc bénéfique aux plantes
C3 car il jouerait un rôle de fertilisant.
Cependant, ces résultats sur une augmentation de
CO2 doivent être largement nuancés puisque
l'interaction avec d'autres facteurs est à prendre en compte en
effet :
· Une hausse du taux de CO2,
accompagnée d'une augmentation modérée de la
température, si les ressources en eau sont suffisantes,
entraînerait alors une production globale plus forte
· Une hausse du taux de CO2,
accompagnée d'une augmentation modérée de la
température et des pluies, peut mener à une petite
augmentation de la production globale.
· Une hausse du taux de CO2,
accompagnée d'une augmentation de température d'environ 3°C
et d'une diminution des pluies de 20%, conduira à une
réduction de rendement pour toutes les cultures de
champs.
· Une hausse du taux de CO2,
accompagnée d'une augmentation importante de la température et
d'une augmentation modérée des pluies raccourcira la
période de croissance, et à terme entraînera une
baisse de la production.
Ainsi, il ne faut pas prendre en compte la variation d'un
unique paramètre, mais faire intervenir les interactions qui peuvent
exister entre toutes les composantes de variation du climat. (AMPHOUX M. et al
2003).
A ce niveau aussi, il existe de nombreuses lacunes et on
dispose de peu d'informations sur des études réalisées sur
le comportement des cultures maraîchères par rapport à
l'accroissement du taux de CO2 dans l'atmosphère au niveau de
pays africains.
En résumé, l'accroissement des
températures et du dioxyde de carbone serait beaucoup plus favorable aux
cultures maraîchères dans les zones tempérées car il
faciliterait le dégel et accroîtrait la période
végétative des plantes. Par ailleurs, l'accroissement de CO2
dans l'atmosphère faciliterait la croissance de la majeure partie
des cultures maraîchères qui sont des plantes C3.
Toutefois, des évènements imprévisibles
tels que la variabilité climatique ou l'apparition de nombreux insectes
avec l'accroissement des températures devrait tempérer cet
optimisme.
L'augmentation des températures et du CO2
serait beaucoup plus problématique pour les cultures
maraîchères en zone tropicale puisqu'une telle situation
accroîtrait l'évaporation, l'évapotranspiration et
accroîtrait par ricochet les besoins en eau des plantes alors que les
différents modèles climatiques prévoient un accroissement
du stress hydrique dans cette zone consécutivement à une baisse
générale de la pluviométrie. En fait, le facteur
déterminant ici reste la disponibilité de l'eau pour la pratique
de l'activité maraîchère dans un tel contexte.
C'est pourquoi dans le cadre de futurs travaux de recherche
nous comptons travailler sur la problématique
« changements climatiques et incidences sur la
disponibilité d'eau pour la pratique de l'activité
maraîchère dans la province du
Sanguié ».
Les raisons qui sous tendent un tel choix se retrouvent
partiellement dans les données de la DGPSA. En effet, selon cette
institution, l'activité maraîchère couvre l'ensemble des 45
provinces du Burkina Faso. Cependant, celles - ci n'ont pas le même poids
en termes de production maraîchère et d'effectifs
maraîchers. Ainsi, du point de vue de la production, en 2004 - 2005, les
provinces les plus importantes sont respectivement: le Yatenga, le Sanmatenga,
l'Oubritenga et le Sanguié qui totalisent 59 539 tonnes de produits
maraîchers, soit 36% de la production maraîchère du Burkina
Faso. Ces quatre provinces comptent aussi 43 973 maraîchers, soit
26 % de l'effectif des maraîchers du Burkina. A ce niveau, le
Sanguié vient en première position avec 16 298
maraîchers soit environ 10 % des effectifs maraîchers du Burkina
Faso.
Par rapport à la principale source d'eau pour la
production maraîchère :
- 82% des maraîchers du Sanguié utilisent l'eau
des puits traditionnels ;
- 64 % des maraîchers de l'Oubritenga utilisent l'eau de
barrages ;
- 51% des maraîchers du Yatenga utilisent l'eau de
barrages ;
- 44% des maraîchers du Sanmatenga utilisent l'eau de
barrages.
Ainsi, en termes d'effectifs et surtout de l'origine de la
principale source d'eau pour la production maraîchère, les
producteurs du Sanguié semblent les plus vulnérables avec les
changements climatiques qui se confirment au fil des ans. Les producteurs du
Sanguié contrairement à ce qui se passe dans les autres zones de
production maraîchère disposent de peu de réserve d'eau de
surface pour l'activité maraîchère.
Or, selon le SP/CONNED (2008), le Burkina Faso sera dans une
situation de stress hydrique permanent à l'horizon 2010-2015. C'est
pourquoi dans le cadre de futurs travaux de recherche, il serait
intéressant de travailler sur cette problématique au niveau du
Sanguié dont l'économie dépend essentiellement de
l'activité maraîchère.
L'objectif général visé à travers
une telle étude est de vérifier si la province du Sanguié
disposera de l'eau nécessaire à la pratique de l'activité
maraîchère avec les changements climatiques qui s'annoncent. Pour
atteindre un tel objectif, nous allons chercher à :
- analyser la tendance générale de la
pluviométrie au niveau de la province au cours des cinquante (50)
dernières années ;
- vérifier la capacité de mobilisation de
ressources en eau de la province ;
- évaluer l'évolution du niveau de la nappe
phréatique ;
- évaluer les besoins en eau de la province sur une
période des trente (30) prochaines années
L'analyse de toutes ces données devrait dégager
les tendances générales en rapport avec la disponibilité
de la ressource eau au niveau de la province du Sanguié pour les
années à venir.
Au terme de notre étude
dont l'objectif général était d'identifier les incidences
des changements climatiques en cours sur les cultures maraîchères,
que pouvons nous retenir ?
Il faut d'abord rappeler que pour mener à bien un tel
travail nous avons adopté une méthode de travail qui a
consisté dans un premier à définir le cadre
théorique de notre travail et à procéder à un revue
de la littérature assez poussée qui nous a permis de collecter
des données aux plans : national, régional et même
mondial en rapport avec la thématique. Nous avons ensuite traité
les différentes données collectées en vue d'identifier les
différentes réponses qui étaient apportées aux
questions spécifiques que nous avions poussées. A ce niveau, nous
nous sommes beaucoup inspirés des différents travaux du GIEC qui
est la principale autorité mondiale reconnue de nos jours en
matière de prévision climatique. De ces différents
travaux, il est de plus en plus admis que des changements sont en cours au
niveau du climat mondial. Ces principaux changements sont :
- le réchauffement climatique ;
- la fonte des calottes glaciaires ;
- la fréquence d'extrêmes climatiques tels
que : les inondations, les sécheresses, la violence des ouragans
et tempêtes, etc.
- l'accroissement des niveaux de gaz à effet de serre
dans l'atmosphère ;
- la modification des modèles de précipitations,
etc.
Toutes ces différentes modifications ont
été prouvées scientifiquement et on a même
établi une corrélation entre le réchauffement climatique
et l'accroissement des gaz à effet de serre. Cette corrélation a
permis de démontrer la responsabilité des actions anthropiques
sur le réchauffement climatique en cours à travers la forte
émission des gaz à effet de serre.
Ensuite, nous avons tenté d'identifier les incidences
que pourraient avoir les changements climatiques sur la disponibilité de
l'eau. A ce niveau, il faut avouer que les grandes tendances qui se dessinent
confirment qu'on assistera jusqu'à l'horizon 2050 à un
accroissement des précipitations dans les zones de hautes et moyennes
latitudes et à une libération de millions d'hectares de terres
arables à travers la fonte de la neige. Toutes choses qui devraient
être favorables à la pratique des cultures
maraîchères dans ces zones.
Par contre, la situation au niveau des zones tropicales risque
d'être catastrophique puisque les différents modèles
climatiques prévoient une baisse des précipitations au niveau de
ces latitudes. Par ailleurs, de nombreux cours d'eau verront leurs
débits baisser ou même pourraient disparaître. Tout cela va
accroître la problématique d'accès à l'eau dans des
pays qui font déjà face au stress hydrique. Cette situation aura
des répercussions sur la pratique de l'activité
maraîchère pour de millions de producteurs qui auront de plus en
plus accès difficilement à l'eau pour la pratique de leur
activité. Toutefois, il faut avouer que ces différentes tendances
sont d'ordre général et que d'énormes travaux de recherche
restent à faire au niveau régional et même local pour
identifier les incidences des changements climatiques sur la
disponibilité de l'eau aux niveaux régional et même
national. Par ailleurs, les modèles climatiques ne prennent pas en
compte d'une part le processus d'adaptation des populations face aux
changements en cours. D'autre part, la recherche évolue et pourrait
mettre à la disposition des producteurs des semences résistantes
au stress hydrique. Tout cela permettra d'atténuer les
conséquences probables des changements climatiques sur l'activité
maraîchère.
Il a été démontré aussi au cours
de cette étude que l'accroissement de la température pourrait
avoir des répercussions sur l'activité maraîchère. A
ce niveau, les résultats montrent que les pays des hautes et moyennes
latitudes pourraient tirer profit de l'accroissement des températures
sur les cultures maraîchères puisqu'une telle situation
favoriserait le dégel et accroîtrait également la
période végétative des plantes. En revanche,
l'accroissement des températures pourrait entraîner l'apparition
d'insectes inconnus à ces latitudes et qui seraient nuisibles aux
cultures.
L'accroissement des températures aura des
répercussions négatives sur l'activité
maraîchère dans les zones tropicales en ce sens qu'il
accroîtrait l'évaporation, l'évapotranspiration et
provoquerait par ricochet un accroissement des besoins hydriques des plantes
alors que les modèles climatiques prévoient une difficulté
d'accès à l'eau dans ces latitudes au cours des prochaines
décennies. A ce niveau aussi, des efforts d'adaptation sont
déployés par les populations pour faire face à la
montée des températures. On a cité le cas des populations
du nord du Burkina qui pratiquent l'activité dans une zone où les
températures moyennes vont au-delà des 35°C en
développant les techniques de paillage qui conservent l'humidité
et qui atténuent la hausse des températures. La recherche
également oriente ses efforts vers des plantes résistantes aux
hausses de température.
Enfin nous avons essayé aussi d'appréhender les
incidences de l'accroissement du niveau de CO2 sur la croissance des
cultures maraîchères. En rappel, il semblerait qu'on distingue au
niveau des plantes :
- les plantes C3 disposant de trois atomes de
carbone pour la photosynthèse et qui répondraient favorablement
à une augmentation du niveau de CO2 qui jouerait un
rôle de fertilisant à leur niveau. La majeure partie de ces
plantes est localisée dans les pays tempérés et une grande
partie aussi des cultures maraîchères d'origine
européenne répondrait à ce critère ;
- les plantes C4 disposant de quatre atomes pour la
réalisation de la photosynthèse et qui ne tireraient pas profit
d'une éventuelle augmentation du niveau de CO2 dans
l'atmosphère et localisées essentiellement dans les zones
tropicales.
A ce niveau aussi, d'importantes nuances sont à
apporter quant aux bénéfices tirés pour les plantes et
relatifs à une éventuelle augmentation du niveau de CO2
puisque l'interaction avec d'autres facteurs tels que les
précipitations et la température sont à prendre en
compte.
En fait, au cours de cette étude, il est ressorti que
l'eau reste le facteur clé qui va conditionner l'activité
maraîchère au cours des prochaines décennies.
Malheureusement, les travaux sur les incidences des changements climatiques sur
ce facteur au niveau régional voire national restent insuffisants c'est
la raison pour laquelle nous comptons dans le cadre de futurs travaux de
recherche nous plancher plus spécifiquement sur la problématique
« changements climatiques et incidence sur la
disponibilité d'eau pour la pratique de l'activité
maraîchère dans la province du Sanguié »
Un tel choix se justifie par le fait que d'une part la
province du Sanguié occupe la quatrième position en termes de
production maraîchère. D'autre part, elle paraît être
la plus vulnérable aux changements climatiques compte tenu du fait qu'au
niveau de l'origine de la principale source d'eau pour la production
maraîchère, 82% des maraîchers du Sanguié utilisent
l'eau des puits traditionnels. Ce chiffre est le plus élevé de
l'ensemble des quatre premières provinces productrices de cultures
maraîchères et qui sont respectivement : le Yatenga,
l'Oubritenga, le Sanmatenga et le Sanguié.
|