4.1.4.2 - Sol (aptitudes)
La résolution des problèmes d'affectation des
sols requiert plus la connaissance de l'aptitude agronomique du sol pour
optimiser son usage plutôt que sa nature et ses caractéristiques.
Nous allons brièvement présenter les sols de
Gressier du point de vue physique et de façon détaillée
décrire leurs potentialités agronomiques.
La nature et les caractéristiques des sols de Gressier
varient suivant que l'on se trouve en montagnes ou en plaines.
Dans les montagnes et les plateaux, les calcaires massifs
donnent par altération une argile latéritique rouge à la
fois très poreuse et très perméable (BUTTERLIN, 1954).
Beaucoup de ces sols rouges se développant sur du calcaire sont des sols
à sesquioxydes d'alumines et renferment souvent des matières
tuffacées non altérées et sont donc impurs.
L'hypothèse d'une formation des sols rouges, à partir de
débris volcaniques pyroclastiques, en couches continues, ou
dispersées dans la masse calcaire est donc possible (COLMET-DAAGE et
al., 1969 ). Les calcaires crayeux, eux, sont recouverts d'une couche d'une
terre noire ou d'une croûte de "tuf" d'une perméabilité
moyenne.
Les sols de plaines de Gressier appartiennent dans leur
totalité à la catégorie des sols alluviaux. Ils sont
formés de dépôts fluviatiles et de composition
hétérogène allant des matériaux fins aux cailloux
calcaires arrondis. Ce sont en général des sols de couleur
brun-foncé. Leur texture va de limono-sableuse à
argilo-limoneuse. Leur pH légèrement alcalin oscille entre 7,0 et
8,0. Ils bénéficient dans leur majorité un excellent
drainage vertical sauf dans la partie basse à cause du haut niveau de la
nappe (NORRIS, 1983) cité par CÉRAQUI (2000).
L'expansion démographique, la nécessité
de nourrir une population croissante et la compétition économique
conduisent à devoir arbitrer l'affectation des terres agricoles en
fonction de leur potentiel productif. Il est donc souhaitable, au niveau d'une
région d'établir un document définissant les surfaces
d'une potentialité donnée pour une production ou un groupe de
productions (LEGROS, 1996). Ainsi, sur la base de la classification de la
United States Department of Agriculture (USDA, 1973), huit classes de
potentialités des sols ont été définies à
Gressier (Tableau 1). Les critères pris en compte dans la formulation de
cette classification sont multiples, on peut citer en autres : la texture
et la structure du sol à la profondeur qui influence l'environnement des
racines et le mouvement de l'air et de l'eau ; la susceptibilité
à l'érosion influencée par le type de sol, la pente et
l'effet de l'érosion sur l'occupation et la gestion du sol ;
engorgement continu ou périodique d'eau dans le sol causé par une
faible perméabilité et le matériel sous-jacent, niveau
élevé de la nappe, ou inondation ; la profondeur de sol
meuble aux couches limitant la pénétration racinaire ; les
sels toxiques à la croissance des plantes ; les obstacles physiques
tels les roches, de profonds ravins ; le climat (température et
humidité).
On doit toutefois rappeler que l'aptitude culturale d'un sol
est difficile à définir car ce n'est pas seulement un
problème technique (LEGROS, 1996). D'autres contraintes tels les
aléas économiques peuvent surgir. Mais dans le souci de
dégager les problèmes d'affectation du sol, il convient de
confronter ses usages actuels et ses potentialités pour faire des
propositions dans le but d'optimiser son usage. Or, comme le montre les figures
10 et 11, les usages actuels du sol ne correspondent pas à leurs
aptitudes. Des terres qui, selon la classification de l'USDA, ont de faibles
potentialités ou sont de qualité médiocre supportent des
cultures agricoles denses ou moyennement denses.
Tableau 1. Tableau résumant les aptitudes
agronomiques de Gressier
Classes de potentialités des sols
(USDA)
|
Aptitudes (indépendamment du climat)
|
Principaux caractères physiques (sauf
codification supplémentaire)
|
I
Excellentes
|
Grandes cultures mécanisées
Irrigation par gravité possible avec localement
drainage
Productivité élevée
|
Sols alluviaux bien drainés
Topographie plane (pentes 0-2%)
|
II
Très bonnes
|
Cultures mécanisées
Irrigation possible
Bonne productivité
|
Sols bien drainés, glacis ou collines douces (pentes
2-5%)
Sols alluviaux de textures lourdes (tendance vertique) ou
grossière
|
III
Bonnes
|
Petite mécanisation possible
Irrigation par aspersion avec précautions
anti-érosives
Productivité moyenne ou limitation dans le choix des
cultures
|
Sols de collines ou de glacis, de pente 5-8%, de profondeur
moyenne
Sols alluviaux très caillouteux ou hydromorphes en
profondeur
|
IV
Moyennes
|
Difficilement mécanisable
Petite irrigation de montagne localement
Agriculture traditionnelle avec mesures de conservation des
sols
|
Sols généralement peu profonds de collines et
bas mornes, de pente moyenne 8-15%
|
V
Limitées à la riziculture ou
Médiocres
|
Marécages, parcours
Sous réserve d'aménagements hydro-agricoles
importants (drainage, irrigation, protection contre les crues), riziculture et
cultures dessaisonnées à forte productivité
|
Marécages temporaires, sols temporairement hydromorphes
ou inondables, généralement assez argileux, parfois
salés
|
VI
Faibles
|
Petite agriculture de montagne très localement, petite
irrigation
Parcours, boisements
Parcours
Localement riziculture si déssalement des sols
possible
|
Sols de morne de profondeur variable, érodables, pente
moyenne 12-30%
Sols érodés sur matériaux tendres
Sols salins temporairement hydromorphes (nappe) ou
inondable
|
VII
Limitées
|
Cultures arboricoles
Petite agriculture avec conservation des sols
Parcours, boisement
Parcours
Drainage en général impossible
|
Sols de montagnes peu profonds, très érodables,
pente moyenne 30-60%
« Bad-lands » sur marnes
Sols hydromorphes permanents, salés, souvent
inondés
|
VIII
Très limitées
|
Forets, pas d'aptitude agricole à moyen terme
Mangroves, marécages côtiers
Lits grossiers, épandage de rivières
|
Sols de profondeur variable, pente supérieure à
60%, en voie d'érosion accélérée sous culture
(basalte)
Sols hydromorphes salés
Sols squelettiques caillouteux, inondables
|
Source : Carte de potentialités des
sols d'Haïti (BPDA, 1982)
L'occupation agricole du sol n'a pas beaucoup changé au
niveau des montagnes (figures 11 et 12). Celles-ci sont toujours
dominées par des systèmes agroforestiers. Par contre au niveau de
la côte, la mangrove et les cultures spécialisées (cocotier
par exemple) occupent une place moins importante.
|