2. 3.
LE LOTISSEMENT ET SON APPLICA TION DANS LA VILLE
DE
GOMA
2. 3. I. Généralités
« Le lotissement est la division d'une
propriété foncière en vue de l'implantation des
bâtiments, lorsque cette division a pour effet de porter à plus de
deux le nombre de terrains qui en seront issus, dans les 10 ans à venir
». (R. LAFFONT, 2000). Et, l'urbanisation « est l'organisation
spatiale d'habiter la ville, une structure d'équipements publics, une
sphère de développement d'activités spécifiquement
urbains,... » (G. MASSIAH et al., ...op. cit. p. 99).
Nous pouvons dire, en ce qui nous concerne que le lotissement
est inséparable de l'urbanisation car, quand on veut urbaniser un
quartier, on doit faire le lotissement qui est entendu, selon les responsables
des services de l'urbanisme, comme un morcellement du terrain en
prévoyant la surface de l'habitat, de la voirie et de l'espace vert
ainsi que les équipements collectifs et les zones à reboiser.
Le lotissement cherche - comme susmentionné - à
résoudre le problème de surpopulation urbaine en agissant sur les
espaces encore disponibles.
Pour l'Etat, le lotissement est inscrit dans la logique du
développement du pays tandis que pour la population, le lotissement est
le passage de la propriété foncière collective à la
propriété foncière individuelle qui vient déranger
l'organisation locale au profit des services fonciers.
Pour les agents des services fonciers, c'est une question
technique comprise comme « un ensemble de dispositifs
physico-institutionnels destinés à assurer l'ordre sur l'espace
(occupation) ou au moins à lutter contre les désordres de tout
genre » (G. MASSIAH et al., ...op. cit).
Toutefois, le lotissement s'inscrit dans un cadre juridique au
sujet des normes à respecter pour les zonages de la ville: quartiers
industriels, quartiers résidentiels, Il est prévu une
procédure légale de lotissement et/ou de l'urbanisation qui ne
peut pour autant être appliquée dans tous les sens
(ETAT-POPULATION) et à ses côtés fonctionne une
procédure illégale et viciée qui est une source de
conséquences néfastes sur la vie de la population.
2.3.2. Procédure légale du
lotissement
D'après la législation foncière
congolaise, « le sol est une propriété exclusive,
inaliénable et imprescriptible de l'Etat »(loi foncière de
1973, art. 52) ».
L'Etat s'étant approprié toutes les terres
(rurales et urbaines), les particuliers - citoyens deviennent soit tenants et
jouissants d'un droit foncier, soit des concessionnaires.
De ce fait c'est l'Etat qui peut procéder à tout
transfert de la propriété du sol. Pour le lotissement, la
procédure légale est résumée ci-après:
1. Le maire de la ville, après constat du
problème de peuplement dans la ville, s'adresse au gouverneur de
province qui instruit les services techniques (urbanisme et cadastre) de
concevoir un plan de lotissement.
2. Les services techniques conçoivent le plan qu'ils
déposent au gouverneur - après approbation de la mairie - qui
l'approuve par arrêté. Le lotissement revêt alors son
caractère juridique.
3. Le plan est transmis au C.T.1. par le gouverneur pour
procéder à la vente des parcelles après tous les travaux
de bornage, de mesurage et enregistrements. Et ce, conformément au prix
arrêté par le gouverneur. Précisons que le C.T.I. est
l'agent de l'Etat habilité à faire ce travail et ses erreurs en
matière foncière sont imputables à l'Etat.
4. Le C.T.1. reçoit alors les demandes de terre des
populations et où ces dernières indiquent leur identité,
le genre de construction envisagé et la source des financements de la
construction. S'en suivent alors les opérations administratives qui
débouchent à l'obtention du contrat de location où l'Etat
est bailleur et au certificat d'enregistrement après mise en valeur.
5. Afin d'éviter l'aliénation des populations
locales - généralement rurales - l'Etat doit les déplacer
vers un autre milieu rural et doit, de ce fait, les indemniser et encadrer leur
première production en leur fournissant des semences, des outils
aratoires et autres intrants agropastorales nécessaires et leur donner
des frais d'installation.
Nul n'ignore que - particulièrement - la
dernière condition d'indemnisation et d'encadrement n'a jamais
été rempli par l'Etat. Par contre, ce dernier contraint la
population locale à se conformer aux règles urbaines en
matière foncière sans aucune éducation et
préparations préalables.
Ces dérèglements renforcent les
conséquences néfastes socio-économiques, culturelles et
politiques du lotissement sur la vie de la population et motivent alors d'une
façon ou d'une autre la procédure illégale de fait de
lotissement.
2.3.3. Application actuelle du lotissement dans la
ville de Goma
Compte tenu de l'inefficacité de l'Etat, le lotissement
est effectué suivant une procédure illégale au point de
dire que le lotissement, tel que pratiqué actuellement à Goma,
est une procédure barbare et hétaïrique.
Le plan de lotissement est tracé sans aucune
enquête préalable des occupants. Cette opération devient
alors un déclic pour la population. Celle-ci constatant que les terrains
sont mesurés, sans une consultation quelconque, et seront donc
spoliés par les « agents de cadastre », se met à
transférer la « terre occupée » à ses fils et
à en vendre des portions à des personnes demanderesses des
parcelles.
Ces allogènes avertis, passent au service foncier pour
des documents légaux y afférents. Ce qui devient un autre
déclic cette fois pour les agents des services fonciers. Ceux-ci entrent
dans le jeu et commencent la vente des parcelles dans le bureau, et donc sur
papier.
L'Etat considère les autochtones qui sont sous titre
foncier comme des occupants clandestins illégaux qui ne peuvent rien
réclamer et estime que ces sont des terrains vides malgré
l'existence des statistiques et d'une pseudo-administration locale : le
quartier.
Après cette confusion, même après
construction et occupation de l'espace, on sollicite et dépose la
demande de terre auprès du C. T .1., on sollicite les travaux cadastraux
pour le bornage et mesurage pour ensuite poursuivre les procédures
bureaucratiques afin d'obtenir le contrat de location (trois ans
renouvelables).
En somme, actuellement, le lotissement dans la ville de Goma
devient une affaire de la population locale qui, malheureusement, se met seule
hors circuit et des agents de service foncier qui s'enrichissent sur le dos de
la population et au détriment de celle-ci et de l'Etat.
La population autochtone des quartiers
périphériques concernés subit des pressions de toute part
et cherche une solution, soit en s'adaptant à la situation, soit en
introduisant des réclamations auprès des institutions
provinciales mais souvent en vain, soit en cherchant un autre lieu de
résidence loin du quartier, voire même au village.
Succinctement, la pression que subit la population autochtone
des quartiers périphériques et les espaces peut être
représentée par la figure ci-après :
Fig 3 : Les structures et mouvement de pression Qui
envahissent les Quartier périphériQues et
leurs populations
SERVICES TRECHNIQUES FONCIERS
POPULATION
(des quartiers habités)
POPULATION MIGRANT
AUTORITES POLITICO-MILITAIRES
AUTORITE ADINISTRATIVES
ORGANISATION SOCIALES ET OPERATEURS ECONOMIQUES
POPULATION AUTOCTONE
(Terre suburbaine environnant)
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