CHAPITRE Il : MIGRATIONS ET LOTISSEMENT
Le lotissement entendu comme un fait de l 'homme sur l'espace,
est en relation avec la migration qui agit sur le lotissement. Il faut de ce
fait rechercher les causes et la source des migrations ainsi que les
motivations du lotissement dans la ville de Goma.
2. I.
MIGRATIONS VERS LA VILLE DE GOMA
La migration est un phénomène social
étant donné qu'elle touche une organisation: la famille, le
village, le quartier.
Elle est une source de transformations des structures sociales
existantes tant dans le milieu de départ que dans celui
d'arrivée. Elle est en outre un phénomène
économique en tant qu'elle est motivée par diverses raisons
lucratives (emploi, commerce, études...) et qu'elle provoque un
déséquilibre dans le circuit économique des milieux
concernés.
Dans la ville de Goma, la migration est visible comme partout
ailleurs - par la présence de nouvelles gens dans les quartiers et dans
divers secteurs de travail. Ce qui nous fait dire que la migration est aussi un
symbole de déplacement de gens des milieux ruraux vers le milieu urbain
- exode rural et déplacement forcé des paysans - ou encore du
milieu urbain supposé marginalisé ou dépendant
économiquement vers la ville de Goma, supposée propice à
diverses activités.
Nous abordons ce point parce que « la migration est
reconnue comme un instrument d'analyse privilégié du processus
d'urbanisation » (E. LEBRIS, 1988/89) et les migrations
représentent bien la croissance urbaine et sont une des composantes de
la croissance urbaine et un signe de la dynamique de la ville concernée.
Nous ne pouvons pas aborder le lotissement sans
préciser les milieux qui déversent leur population sur la ville
de Goma et les raisons de ces migrations. Nous allons aussi présenter
l'évolution de la population du milieu d'étude durant les cinq
dernières années et les raisons qui motivent l'extension de la
ville de Goma.
2. I.
I. Origine et causes des migrations
La ville de Goma accueille une population migrante
diversifiée qui provient de diverses provinces de la République
Démocratique du Congo et de différents pays. La population qui
immigre dans la ville de Goma provient des villes de BUKVU, KISANGANI, GISENYI,
KIGALI; des centres commerciaux de LODJA, SANKURU,
KALEMIE et des villages avoisinant les différentes
villes et centres précités ainsi que ceux reliés à
la ville de Goma.
Faute des documents à ce sujet, nous n'avons pas pu
réunir les statistiques y afférentes. La ville de Goma subit
ainsi une pression démographique conduisant à des occupations
anarchiques de l'espace. Diverses raisons sont à la base de cette
migration parmi lesquelles: les raisons économiques, socioculturelles et
politiques.
2. I. I. I. Les raisons économiques
La ville de Goma, par son ouverture commerciale, est
interconnectée à d'autres villes soit par l'aéroport, soit
par le lac, soit par la route.
La circulation monétaire y est jugée intense,
profitable et favorisant toute initiative à entreprendre. Ce jugement
est rendu par les migrants en comparaison avec leur milieu de départ.
La ville de Goma constitue aussi un centre de transition et de
négoce des produits agricoles et des minerais venant des milieux ruraux
pour les autres centres urbains. Ainsi, il est estimé que les produits
de premières nécessité y coûtent moins cher que dans
d'autres villes précitées.
Notons aussi, parmi d'autres raisons, la configuration
géographique qui n'exige pas, pour certains, des frais de transport ;
les moyens de transport qui sont faciles à trouver et à utiliser
pour d'autres et la recherche de l'emploi pour bon nombre de la population
rurale qui émigre.
En somme, disons que les raisons sont soit commerciales; pour
ceux qui viennent des centres commerciaux et villes suivant le rang social;
soit professionnelles pour ceux qui viennent des milieux ruraux. Dans ce
dernier cas, ne trouvant pas d'emploi, les émigrants s'orientent dans le
secteur informel.
2. I. I. 2. Les raisons socioculturelles
Partant de la diversité culturelle et la socialisation
de fait, caractéristiques socioculturelles des villes; la ville de Goma
n'est pas hostile aux nouveaux venus, surtout parce qu'il n'y a pas de mesures
restrictives légales.
Toutefois, avec le système de « Nyumba Kumi
», ces entrées sont contrôlées à ce niveau sans
être enregistrées au niveau de l'Etat-civil.
Les migrants, citadins et ruraux viennent dans la ville de
Goma après avoir repéré un membre du clan, de la tribu, de
la famille ou un ami qui sera considéré comme « parrain
» dans la ville. Le fait d'avoir un lieu d'arrivée est une raison
sociale considérable.
Notons que l'émigration vers la ville de Goma est
provoquée par la détérioration des conditions de vie, de
la productivité des sols et de la sécurité des populations
rurales, par le mirage d'une vie facile, sécurisée et sans
contraintes diverses et par la poursuite des études dans des bonnes
écoles (infrastructures et potentialités humaines ).
Ainsi, les formes et les causes des migrations proviennent
souvent de la différence ou de la détérioration des
rapports sociaux dans le milieu ou dans la famille d'origine.
2. I. I. 3. Les raisons politiques
Une des réalités congolaises est que les
campagnes sont des entités laissées pour compte par les pouvoirs
politiques et administratifs.
Dans les milieux de RUTSHURU, de MASISI et de MINOVA où
sévissent depuis des années, des conflits de règlement de
compte et de démonstration de pouvoir ou de force entre des ethnies et
entre des personnes,..., les populations, vivant sans politique d'encadrement
rural et commercial, se déplacent de ces zones à haut risque vers
des zones sans risque ou à moins de risque dont la ville de Goma.
En gros, ce sont les disparités
socio-économiques et politiques - entre provinces, entre milieu urbain
et milieu rural et entre - pays qui peuvent porter une justification globale
des migrations vers la ville de Goma. Celle-ci, lieu de transition et de
liaison ; commerciale disposant des infrastructures assez considérables,
se trouve ainsi ouverte à l'accueil continu des migrants venant de
divers centres urbains et milieux ruraux.
D'abord abrités par les proches au nom de la
solidarité sociale africaine, les émigrants se cherchent ensuite
un terrain dans le souci d'avoir un « chez-soi ». Ils occupent alors
des zones qui leur sont accessibles et favorables.
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