V. Traitement :
Le traitement curatif du PT associe un traitement
général basé sur les antituberculeux et un traitement
local faisant appel au drainage pleural et à la
kinésithérapie respiratoire.
La chirurgie est réservée aux cas d échec du
drainage et à d autres complications (formes chroniques avec
pachypleurite importante, cas de fistulisations etc).
1. Evacuation de l épanchement pleural
:
C est le premier geste à faire, en l absence duquel l
évolution ne peut se faire que vers l aggravation.
Classiquement les malades présentant un PT
représentent une indication quasisystématique au drainage pleural
[13]. Néanmoins, certains auteurs [8, 20]
admettent qu au cours des petits épanchements même
mixtes, on peut tenter la simple exsufflation et la ponction de l
épanchement liquidien, mais la mise en place d un drain thoracique reste
une alternative fréquente.
Dans les meilleures conditions, le drainage thoracique est
souvent guidé par un repérage échographique lorsque l
épanchement est mixte ou s il existe une fistule broncho-pleurale ce qui
pourrait permettre de raccourcir la durée du drainage
[17]. Le drainage sera d emblée aspiratif d autant plus
lorsque le pneumothorax est suffocant. Il doit être le plus
précoce possible car c est le seul moyen qui permet de fermer la fistule
pleuro-pulmonaire en amenant le poumon à adhérer à la
paroi. Le retardement du drainage n a aucun intérêt et au
contraire il expose au défaut de réexpansion du moignon
pulmonaire rétracté [8].
Les man uvres endopleurales telle que les lavages-aspiration
par sérum physiologique quotidiens et répétés, et l
utilisation parfois de fibrinolytiques ont l intérêt de
réduire des poches pleurales, certains auteurs [12]
recommandent d éviter ces man uvres lorsque le
drainage-aspiration a amené rapidement le poumon à la paroi car
elles pourraient favoriser le décollement pleural. D autres
auteurs [16, 20] pensent que l instillation d
antiseptiques (Polyvidone iodée (Bétadine*), Rifocine*) ou encore
d antibiotiques antituberculeux (Rifampicine, Streptomycine) peut amener une
négativation bacteriologique plus rapide du liquide pleural et aider
à la fermeture de la fistule broncho-pleurale.
L efficacité du drainage (retour du poumon à la
paroi) est variable au cours du pneumothorax tuberculeux. Elle était de
76 % dans la série de Rachdi M [8] et seulement 30 %
dans la publication de Blanco-Perez J [13]. Dans notre
série, un retour du poumon à la paroi a été obtenu
chez deux tiers des patients drainés.
La durée du drainage est variable de quelques jours
à quelques semaines et dépend essentiellement du maintien en
permanence du poumon à la paroi. Le drain sera retiré quand une
tentative de clampage maintenu quelques jours a montré la
stabilité de la réexpansion pulmonaire. Ces essais de clampage
doivent être contrôlés par des radiographies et la
réaspiration est rétablie lorsque le décollement
réapparaît. Dans la série de Rachdi M [8],
l ablation du drain n a pu être faite qu après une moyenne de 48
jours et maximale de 94 jours. Dans notre série, la durée moyenne
du drainage était de 29 jours (extrêmes 3 et 90 jours).
La période du drainage est très critique et
plusieurs complications parfois fatales peuvent émailler l
évolution sous drainage [16]. Ces complications restent
dominées par les greffes bactériennes pleurales ou
pleuro-pariétales avec développement parfois d empyèmes de
nécessité ou de fistules cutanées [20].
Les surinfections sont favorisées par les man uvres de lavage pleural et
les germes les plus rencontrés sont ceux nosocomiaux genre staphylocoque
et bacille pyocyanique et à une moindre fréquence d autres
bacilles gram négatif [16].
D autre part, la fistule broncho-pleurale est une complication
évolutive grave réalisant une communication entre la
cavité pleurale et les voies respiratoires [17]. Elle
est fréquemment suspectée sur l expectoration de pus pleural
ainsi que la persistance du bullage du drain sans retour du poumon à la
paroi. Elle peut être
mise en évidence par le test d injection intrapleurale
de Rifampicine ou de Bleu de méthylène (on retrouvera la couleur
de la solution injectée dans les secrétions bronchiques à
la fibroscopie et ensuite dans l expectoration). Dans certains cas on pourrait
s aider de la tomodensitométrie ou encore de la thoracoscopie.
Son évolution est marquée par une
morbidité traînante et lourde [40] et sa cure
chirurgicale reste très souvent nécessaire et faisant recourir
parfois à des gestes de thoracoplastie [41].
Dans sa thèse, Taeib J M [12] rapporte
que deux de ses patients (sur un total de sept) sont
décédés sous drainage par complications infectieuses.
Rachdi M [8] rapporte le décès de 4 patients
(sur un total de 24), ils étaient tous sous drainage thoracique. Dans
notre série, certains des malades drainés ont
présenté des complications liées au drainage thoracique ;
il s agit dans quatre cas d un échec du drainage avec indication d un
traitement chirurgical : deux cas de surinfection avec fistulisation à
la peau, un cas de surinfection avec fistulisation broncho-pleurale et un cas
de suppuration pariétale. Chez deux autres malades, le drainage n a pas
pu être continué vu la constitution d un pyopneumothorax
chronique. Au cours du drainage on n a pas déploré de
décès.
Il faut souligner que le drainage thoracique du PT reste en
lui même un geste nécessitant beaucoup de vigilance tant sur le
plan technique que les conditions d asepsie rigoureuse et de surveillance
rapprochée. Il mobilise un personnel médical et
paramédical compétant et disponible. La durée d
hospitalisation s en trouve nécessairement très prolongée
par rapport à celle des tuberculoses pulmonaires et un taux de recours
au traitement chirurgical en cas d échec qui reste
élevé.
De nouvelles techniques de drainage se sont avérées
très rentables en matière d épanchement thoracique
purulent en particulier tuberculeux, il s agit du drainage
chirurgical précoce soit par thoracotomie directe
[13, 42] soit par pleuroscopie [37, 43].
L utilisation de nouvelles techniques endoscopiques comme la
thoracoscopie vidéo-assistée pour le drainage précoce, le
débridement et le lavage de la cavité pleurale permettra d
améliorer les résultats thérapeutiques [44, 45,
46].
2. Chimiothérapie antituberculeuse :
La polychimiothérapie antituberculeuse
générale constitue la thérapeutique étiologique
sans laquelle les résultats de la prise en charge du pneumothorax
tuberculeux seraient aléatoires. Les règles
générales du traitement antituberculeux doivent toujours
êtres respectées : association d antituberculeux, bilan
préthérapeutique, surveillance au cours du traitement, dose et
durée suffisantes, éducation du malade [19,
47].
Le traitement antituberculeux doit être institué
dés qu on a la preuve de l origine tuberculeuse, il est parfois prescrit
d emblée sans attendre la preuve quand il y a une forte
présomption épidémiologique, clinique et radiologique d
une tuberculose sous-jacente [48].
Les protocoles préconisés dans la
littérature sont de deux types : classiques et courts. Dans notre
série, un régime thérapeutique de courte durée (6
mois) a été instauré chez 21 patients, le protocole
classique de durée de 9 mois a été instauré chez
deux malades. Chez un malade porteur d une hépatite virale B on a
dû introduire les antituberculeux hépatotoxiques (Isoniazide,
Rifampicine, Pyrazinamide) un par un tout en surveillant le bilan
hépatique. Une patiente a développé une surdité de
perception ce qui nous a amené a arrêter la Streptomycine.
Dans notre étude, on n a pas été
confronté au problème de résistance aux antituberculeux,
par contre, la durée du traitement antituberculeux a dû
être
prolongée par rapport à celles standards pour
quatre malades avec une durée maximale de 14 mois. Certains auteurs
[8, 12], rapportent que la prolongation de la cure
antituberculeuse peut atteindre 18 à 24 mois.
3. Kinésithérapie respiratoire
:
Au cours du PT, la kinésithérapie respiratoire
doit être au début pendant la période aiguë
prophylactique où on essayera d éviter la symphyse du diaphragme
en position haute, en demandant au malade de se coucher sur le
côté sain. La rééducation active et sous
contrôle d un kinésithérapeute débute dés que
l épanchement pleural aura perdu tout caractère d
évolutivité franche. Les séances sont quotidiennes et
courtes de 10 à 15 minutes au début et en fonction de l
évolution, la durée est plus prolongée en cas d apparition
de séquelles pleurales [49].
L intérêt de la kinésithérapie
respiratoire au cours du PT même dans sa forme simple (sans
épanchement liquidien associé) est certain pour tous les auteurs
[49]. Dans notre série, elle a été
entreprise chez 18 patients avec des résultats satisfaisants chez deux
tiers des cas. Dans les cas restants, les mauvais résultats peuvent
être expliqués par la mauvaise observance des patients ou le
cloisonnement et l épaississement rapide de la plèvre pendant la
période aiguë.
4. Traitement chirurgical :
Le traitement chirurgical du pneumothorax tuberculeux concerne
les malades pour lesquels le traitement médical conduit pendant quelques
mois n a pu réussir à obtenir la fermeture de la brèche
pleurale ou lorsque subsistent des poches pleurales surinfectées et
irréductibles aboutissant à un véritable tableau de
suppuration. Dans notre série, le délai de l intervention
chirurgicale était de 91 jours variant de 11 à 298 jours et il a
concerné cinq malades. Le tableau suivant compare les fréquences
du traitement chirurgical dans certaines études de la
littérature.
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Discussion
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Tableau XV - Fréquence du traitement chirurgical
au cours du PT selon les auteurs.
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Auteurs
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Fréquence du traitement chirurgical (en
%)
|
Blanco Perez J [13]
|
36,3
|
Sharma T N
|
[16]
|
13,9
|
Rachdi M
|
[8]
|
4,1
|
Taeib J M
|
[12]
|
14,2
|
Yagi T
|
[11]
|
15,2
|
Notre étude
|
|
21,7
|
La décortication pleurale plus ou moins associée
à une exérèse pulmonaire avec parfois une thoracoplastie
représentent les modalités du traitement chirurgical du PT
[50, 51, 52].
La décortication pleurale :
Il s agit d une pleurectomie réalisée par
thoracotomie. Elle représente le traitement chirurgical minimum et le
plus pratiqué [16]. Elle est indiquée lorsqu il
y a absence de réexpansion du poumon avec constitution d un
épaississement pleural. Elle a été indiquée pour
deux patients de notre série qui ont présenté un
échec du drainage (absence de réexpansion du poumon) avec
complication par surinfection pleuro-pariétale et fistulisation
cutanée.
Les résections pulmonaires :
Elles consistent en une segmentectomie, lobectomie voire
pneumectomie. Elles sont nécessaires lorsqu il s agit de lésions
de destruction parenchymateuse et plus encore une fistule broncho-pleurale
importante, on y associe une exérèse plus ou
moins étendue de la plèvre
[53].
Dans notre série, les résections
parenchymateuses ont concerné trois malades avec pneumectomie chez deux
malades et une bisegmentectomie associée à une
décortication indiquée pour un malade porteur d une fistule
broncho-pleurale avec surinfection.
Autres méthodes du traitement chirurgical :
Une fenêtre ouverte par thoracostomie a
été proposée par certains auteurs [54] en
cas d empyème persistant associé à une fistule
broncho-pleurale. D autres auteurs [41] ont
suggéré une myoplastie (transposition du muscle pectoral) pour
traiter la fistule broncho-pleurale. Enfin, la chirurgie par thoracoscopie
(technique relativement récente) est utile et efficace pour traiter les
adhérences pleurales, réaliser une décortication voire
pratiquer des résections pulmonaires avec de bons résultats
thérapeutiques [37, 55].
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