2 CADRE DE L'ETUDE
Le Burkina Faso avec comme capitale Ouagadougou, est un pays
situé dans la boucle du Niger au coeur de l'Afrique occidentale. C'est
un pays enclavé couvrant une superficie de 274 200 km2. Il
partage ses frontières avec six (6) pays : le Mali au nord et à
l'ouest, le Niger à l'est, la Cote d'ivoire, le Ghana, le Togo et le
Bénin au sud.
Il comptait en 1998, 10 979 434 habitants avec un taux de
croissance annuel moyen de l'ordre de 2,4% ; c'est un pays classé parmi
les Pays les Moins Avancés (PMA), le Produit National Brut (PNB) par
habitant en 1997 était de 310 $, 44,5% de la population vivent en
dessous du seuil absolu de pauvreté estimé à 41099 Francs
de la Communauté France Afrique (FCFA) par adulte et par an (INSD 1996).
Son taux de scolarisation est parmi les plus bas de la sous région ; en
effet les statistiques scolaires donnaient un taux de scolarité national
de 41% pour l'année scolaire 1997-1998. 11
2.1 Système sanitaire national
Les données sur les infrastructures sanitaires, les
ressources matérielles, humaines et financières sont
tirées du document de politique sanitaire nationale
élaboré en septembre 2000 par le ministère de la
santé. 12
2.1.1 Infrastructures sanitaires
Sur le plan administratif, le système de santé
comprend le niveau central organisé autour du cabinet du ministre et du
secrétariat général, le niveau intermédiaire
comprenant les Directions Régionales de la Santé (DRS) et enfin
le niveau périphérique représenté par les districts
sanitaires qui sont administrés chacun par une Equipe Cadre de District
(ECD) qui est chargée de la gestion, des prestations cliniques et de la
recherche.
Le pays comptait en décembre 1999, 2 Centres
Hospitaliers Nationaux (CHN) (ils servent de cadre pour la formation des
différentes catégories de personnel et pour la recherche), 9
Centres Hospitaliers Régionaux (CHR), 25 Centres Médicaux avec
Antenne chirurgicale (CMA), 44 Centres Médicaux (CM), 759 Centres de
Santé et de Promotion Sociale (CSPS), 130 dispensaires et 21
maternités isolés. Le pays a connu ces dernières
années une expansion rapide des structures sanitaires privées
à but lucratif qui sont passées de moins d'une dizaine dans les
années 1970, à plus de 300 en 1999.
D'une manière générale, la couverture en
infrastructures sanitaires se caractérise par son insuffisance et une
inégalité dans la répartition des formations sanitaires
selon les régions. Le rayon moyen d'action des formations sanitaires de
base (CSPS) était de 9,69 Km en 1997.
2.1.2 Ressources matérielles
· Equipements
Les formations sanitaires périphériques sont
sous équipées en général mais ceci est encore plus
prononcé pour les CHR et les CHN. En plus de ce sous équipement,
des problèmes de gestion se posent à tous les niveaux ; en effet
les équipements médicaux et la logistique sont mal
gérés, mal entretenus et parfois inadaptés. L'insuffisance
de crédits, la diversité technologique des équipements
liée aux dons et à l'exigence de certains partenaires rendent
leur maintenance difficile.
· Médicaments et consommables médicaux
Pour faire face aux difficultés d'approvisionnement du
secteur public et à la faveur de la politique des médicaments
essentiels adoptée par le gouvernement, une Centrale d'Achat des
Médicaments Essentiels Génériques et des consommables
médicaux (CAMEG) a été mise en place pour appuyer
l'Initiative de Bamako (IB). La dévaluation du FCFA en janvier 1994 a
accéléré la création des dépôts de
Médicaments Essentiels Génériques (MEG) dans les
formations sanitaires.
Le Burkina Faso a un système d'approvisionnement
fortement dépendant des importations provenant essentiellement des pays
européens. Le réseau de distribution du médicament s'est
amélioré de manière significative depuis 1993. Ce
réseau est organisé en distribution de gros et en vente au
détail ; la distribution de gros est assurée par trois
sociétés grossistes dont deux privées (Laborex et
Sonapharm) et une parapublique (CAMEG). La vente en détail des MEG est
assurée par les dépôts répartiteurs des districts,
les dépôts de vente des formations sanitaires.
Il existe une liste nationale de médicaments essentiels
par niveau de soins, qui est arrêtée depuis plusieurs
années (avant l'introduction des médicaments sous forme
générique) et est mise à jour régulièrement
par la Direction des Services Pharmaceutiques (DSPH) avec la collaboration du
Centre de Documentation et d'Information sur le Médicament (CEDIM).
2.1.3 Ressources humaines
· Situation du personnel
Les effectifs disponibles en personnel, du secteur sanitaire
public ne couvrent pas les besoins du pays. En plus, il y a une
disparité notable dans la répartition de ce personnel entre d'une
part les villes de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso et d'autre part le reste du
pays ; ces deux villes regroupent à elles seules 53,7 % des
médecins, 57,3 des sages-femmes, 59 % pharmaciens et 33 % des infirmiers
toutes catégories confondues, alors qu'elles n'abritent qu'environ 10 %
de la population du pays.
Soixante pour cent (60 %) des CSPS répondent aux
normes établies en personnel (1 infirmier, 1 personnel à
compétences obstétricales et 1 personnel auxiliaire), toutefois
les CMA et les formations sanitaires en zone urbaine ont un excédent en
personnel, sans satisfaire pour autant aux normes de manière
qualitative.
· Formation du personnel
La formation de base du personnel paramédical se fait
à L'Ecole Nationale de Santé Publique (ENSP) d'où
sortent annuellement environ 800 paramédicaux et aussi à la
Faculté des Sciences
de la Santé (FSS) qui comporte les filières de
médecine, de pharmacie et de techniciens supérieurs de
laboratoire (filière nouvellement créée) et d'où
sortent par an une moyenne de 30 médecins et de 15 pharmaciens. Les
différentes formations sont insuffisantes au regard des besoins du
ministère de la santé même si les contraintes
budgétaires ne permettent pas toujours d'absorber le personnel
formé par ces deux institutions.
La formation continue du personnel en service se fait
essentiellement par le biais de cours de perfectionnement ou de
séminaires de recyclage ; officiellement, ce sont les participants
déplacés qui ont droit aux perdiems, ainsi ils reçoivent
par jour 15000 FCA et 10 000 FCA respectivement pour les séminaires
organisés dans les deux principales villes (Ouagadougou et à Bobo
Dioulasso) et pour les formations réalisées dans les autres
villes. Mais des efforts sont entrepris néanmoins par les organisateurs
de séminaires pour motiver même les participants non
déplacés. Ces séminaires constituent des sources
importantes de revenus supplémentaires dans une situation marquée
par des salaires très bas (voir tableau I), pour mieux illustrer ceci,
un infirmier
d'état qui suit une formation de 5 jours peut recevoir au
total l'équivalent de son salaire.
Le manque de plan de formation et de suivi après
formation fait que toutes ces formations sont souvent mal planifiées et
ne correspondent pas toujours aux besoins prioritaires du département de
santé.
· Administration
L'administration et la gestion des ressources humaines sont
centralisées et non rationalisées ; le recrutement des agents se
fait sur titre ou sur concours avec un système de
rémunération caractérisé par sa rigidité. Un
tel système qui n'offre aucune possibilité de
rémunérer la performance ou la productivité, conduit le
plus souvent à décourager les initiatives et entraîne
à la longue une profonde démotivation dont les effets pervers
sont toujours difficiles à juguler.
TABLEAU I : Salaire moyen du personnel de
santé au Burkina Faso selon la qualificationannée 1998.
Qualification
|
Salaire moyen (en F CFA)
|
Garçon / fille de salle
|
30
|
000
|
Agent Itinérant de Santé /Accoucheuse
Auxiliaire
|
35
|
000
|
Infirmier Breveté
|
45
|
000
|
Infirmier Diplômé d'Etat/Sage Femme d'Etat
|
70
|
000
|
Médecin
|
130
|
000
|
|
Source : Direction des Affaires Financières du
Ministère de la santé 2003.
2.1.4 Ressources financières
En 1999, le budget de la santé se répartissait
comme suit : 19 000 000 268 FCFA pour le fonctionnement et 19 000 002 639 FCFA
pour l'investissement, soit respectivement 49,70 % et 50,30 % du budget total.
La part de l'investissement extérieur dans l'investissement total du
secteur pour la même année était de 78,16 % (les
dépenses « investissements extérieurs » ne tiennent pas
compte des fonds venant de l'extérieur, il y a donc une sous
estimation).
En dehors du budget de l'état, les
collectivités locales, les ONG, les associations, les communautés
locales et les partenaires au développement interviennent dans le
financement de la santé.
2.2 Présentation de la zone du projet et
situation de base
2.2.1 Présentation de la zone du projet
La zone du projet épouse l'aire de la région
sanitaire de Fada qui est située à l'est du pays (voir annexe 1)
et s'étend sur une superficie de 460000 km2, soit 16,7% du territoire
national. Elle fait frontière avec trois (3) pays (Niger, Togo et
Bénin) et sur le plan administratif, la région est
composée de cinq (5) provinces (Gourma, Tapoa, Gnagna, Komandjari et
Kompienga); chaque province étant composée de
départements, de communes, de secteurs et de villages, est
dirigée par un Haut Commissaire.
La population de la région était estimée
en 1998 à 855394 habitants avec une densité de 19 habitants au
Km2.
L'économie, essentiellement rurale et de type
traditionnel repose sur l'agriculture et la pêche. La région est
un carrefour d'échanges commerciaux avec des grands marchés
(Namounou par exemple). Le tourisme est en plein essor grâce aux nombreux
campements de chasse (Namoungou, Ougarou).On note l'exode croissant des jeunes
pendant la saison des pluies dans les pays voisins à la recherche de
travail.
Sur le plan sanitaire, cette région se compose de 4
districts (Fada, Bogandé, Pama et Diapaga) coordonnés par le
Directeur régional de la santé de Fada.
Les formations sanitaires de la région se repartissent
comme ci-dessous:
TABLEAU II : Répartition des formations
sanitaires selon le type, de la région sanitaire de Fada
de l'année 1998
|
|
Type de formation Sanitaire
|
Nombre
|
Dispensaire isolé
|
4
|
Centre de Santé et de Promotion Sociale (C.S.P.S)
|
61
|
Centre médical (CM)
|
3
|
Centre Médical avec Antenne Chirurgicale (CMA)
|
3
|
Centre Hospitalier Régional (C.H.R)
|
1
|
Source : Statistiques de la DRS 1998
|
|
|
La couverture sanitaire de la région est insuffisante
; en effet si au plan national la norme est de 10 Km comme rayon moyen d'action
pour une formation sanitaire, au plan régional ce rayon varie de 16
à 20 Km.
Les ressources humaines (en dehors du personnel administratif et
de soutien) sont reparties de la manière suivante :
TABLEAU III : Répartition du personnel
technique de la région sanitaire de Fada selon la
qualification en 1998.
|
|
|
|
Qualification
|
Nombre
|
Ratio pour 100
|
Normes OMS pour
|
|
|
000 habitants
|
100 000 habitants
|
Médecin
|
16
|
1,87
|
10
|
Pharmacien
|
2
|
0,23
|
5
|
Infirmier d'Etat
|
69
|
8,07
|
20
|
Infirmier Breveté
|
132
|
15,47
|
50
|
Sage Femme d'Etat/ME
|
12
|
1,40
|
20
|
Accoucheuse auxiliaire/AIS/Matrone
|
116
|
13,56
|
ND
|
Technicien et aide de laboratoire
|
10
|
1,17
|
ND
|
|
ND= Non Défini ; ME= Maeuticien d'Etat ; AIS = Agent
Itinérant de Santé Source : Statistiques DRS 1998
2.2.2 Situation avant projet du problème des
IST/SIDA dans la région sanitaire de Fada.
Dans la ville de Fada lors d'une enquête nationale
menée en 1994 - 1995 et qui avait concerné les femmes
enceintes, on avait trouvé des prévalences du VIH et de la
syphilis respectivement à 6,5% et à 2,5%.4 La
région ne disposait pas de données récentes fiables sur la
situation
épidémiologique des IST/SIDA du fait de la sous
notification des cas et des difficultés rencontrées dans la
collecte des données. Cependant, le fait que cette région soit
frontalière avec trois (3) pays et qu'elle soit traversée par une
grande route commerciale, laissait supposer une prévalence
élevée des IST. Effectivement dans la pratique on a
constaté que les IST constituaient un motif important de consultation et
occupaient le 3ème rang parmi les priorités perçues par la
Direction Régionale de la Santé dans son plan d'action 1998.
Dans la région sanitaire de Fada il n'existait pas de
structure spéciale de lutte contre les IST/SIDA, les activités de
prévention et de prise en charge des IST faisaient partie des
activités de routine des centres de santé.
Parmi les prestataires de soins, huit (8) dont deux (2)
médecins et six (6) paramédicaux avaient été
formés en prise en charge syndromique des IST lors d'une session de
formation nationale qui avait été organisée à
Ouagadougou en 1997.
· Au niveau du premier échelon
Il n'existait pas une approche standardisée de prise
en charge des IST (absence d'algorithmes de diagnostic et de traitement). Des
médicaments comme la spectinomycine et l'erytromycine étaient
totalement inexistants dans les différents dépôts de la
région et même ceux qui étaient disponibles
n'étaient pas à l'abri des ruptures de stock.
Les centres de santé de Piéla et de Madaaga qui
sont confessionnels privés possédaient en leur sein des
laboratoires.
Les formations sanitaires étaient mal
équipées pour la prise en charge adéquate des IST
(spéculum, table gynécologique, source de lumière, eau de
javel de bonne qualité...).
· Au niveau du deuxième échelon
Des épreuves de laboratoires comme le Frais, le Gram,
le Giemsa et le Rapid Plasma Reagin (RPR) y étaient effectuées.
Théoriquement les CMA et les CM grâce à leurs laboratoires,
devraient constituer des centres de référence pour les CSPS en
matière de prise en charge des IST; mais leurs laboratoires
étaient confrontés à des ruptures fréquentes de
réactifs et à un problème d'alimentation permanente en
électricité.
· Au niveau de l'hôpital régional de Fada
Le laboratoire à ce niveau était marqué
par des insuffisances en matériel technique et en personnel technique
ainsi que par de ruptures fréquentes en réactifs ; il n'y avait
pas aussi de conduites standardisées pour le diagnostic
étiologique des IST courantes.
· Au niveau du système d'information sanitaire
Le système de surveillance des IST n'était pas
adapté ; la notification des cas d'IST au niveau
périphérique était sous forme étiologique alors
qu'à ce niveau il existait rarement des possibilités de
diagnostic étiologique.
· Première enquête IP6/IP7
Pour disposer d'indicateurs de départ du niveau de
prévention de l'infection à VIII et de pouvoir mesurer à
la fin l'évolution de la qualité de la prise en charge des IST
dans la zone du projet, nous avons réalisé du 15 au 31 mars 1999
la première enquête IP6/IP7. Cette enquête a montré
que le nombre moyen d'IST par mois et par centre de santé dans la
région sanitaire était de 4 cas, que les femmes
représentaient 71% des consultants IST et que leur age moyen
était de 29 ans ; 88% des patients IST étaient mariés. Les
principaux motifs de consultation des patients IST ont été les
leucorrhées, les douleurs pelviennes, les douleurs mictionnelles, le
prurit génital et l'écoulement urétral. Cette étude
a donné des scores IP6 et IP7 respectivement de 9,8% et de 11,8%.
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