Paragraphe 1. Analyse de la politique des nominations
et affectations
Au regard de l?organisation du Comité Judiciaire, la
composition de l?institution mérite d?être analysée sous un
angle particulier. L?examen des seules règles et pratique des
nominations (A) serait incomplet si on ne s?interroge pas sur la composition
des formations de jugement surtout à l?égard des pourvois venant
de Maurice (B) car le Comité Judiciaire, contrairement à la Cour
Suprême des Etats-Unis d?Amérique et le Conseil Constitutionnel
français, ne siège pas en assemblée plénière
pour rendre une décision, mais en sous- comité ad hoc
composé au cas par cas.
A. Les règles et la pratique des nominations
Peu de règles juridiques (a) déterminent les
conditions de nomination des membres du Comité Judiciaire429.
Le Comité Judiciaire recrute ses membres de la haute magistrature, au
sein de laquelle le critère de compétence (b) joue un rôle
déterminant.
a. Les règles juridiques relatives à la
composition du Comité Judiciaire
Le Comité Judiciaire est composé430
premièrement du Lord-Président du Conseil (Lord-President of
the Council) qui a rang d?un ministre d?Etat à la française
(senior minister). Le Lord-Président n?est pas un magistrat et
n?est pas inamovible. Il est membre du gouvernement britannique et son sort est
lié à celui du Cabinet, organe responsable devant le Parlement.
Il n?a pas besoin d?être un pair et il ne siège pratiquement pas
au Comité Judiciaire bien qu?il préside celui-ci. Sont aussi
membres du Comité Judiciaire les anciens Lords- Présidents du
Conseil et les Lords judiciaires (Law Lords). Le terme Lords
judiciaires désigne les membres juristes de la Chambre des Lords,
c'est-à-dire les anciens Lords-Chanceliers (former Lord
Chancellors), les Lords-Chefs-Juges
429 Il serait erroné de classer les membres du
Comité Judiciaire en groupe de membres nommés et membres de droit
tant les Lords-Juges d?Appel sont dans la pratique membres ex officio du
Conseil Privé.
430 On est en réalité nommé membre du
Conseil Privé (Privy Councillor) et non du Comité
Judiciaire. Le Conseil Privé comprend dans les 400 membres. Les membres
du Cabinet britannique, les principaux juges, les éminents politiciens,
les grandes personnalités du Commonwealth, dont l?ancien Premier
ministre de l?île Maurice, Sir Aneerood Jugnauth QC, en sont membres
à vie.
Les conseillers privés doivent prêter serment
d?allégeance à la Couronne et un serment de conseiller
privé. Ils bénéficient du titre de Très Honorable
(Right Honourable) et suivent les Chevaliers de l?Ordre de la
Jarretière (Knights of the Garter) dans les
cérémonies. Mais les Lords judiciaires, en raison de leur
dignité, ont préséance sur les chevaliers
précités.
à la retraite (Lord Chief Justices in
retirement), les Lords d?Appel en Ordinaire (Lords of Appeal in
Ordinary) à la retraite et en fonction, le Lord-Chancelier et le
Lord-Chef-Juge en fonction431. Les Lords-Juges d?Appel432
(Lord Justices of Appeal) sont aussi membres du Comité
Judiciaire mais n?y siègent pratiquement pas. Enfin, les autres membres
juristes du Conseil Privé, parmi lesquels un certain nombre de juges et
d?anciens juges des Etats du Commonwealth et des juges de la Haute Cour de
Justice anglaise, font partie du Comité Judiciaire. Leur nomination au
Conseil Privé dépend de la seule discrétion du
Souverain.
Toutefois, dans la pratique, l?activité
juridictionnelle est exercée principalement par des Lords d?Appel en
Ordinaire, c'est-à-dire, le même personnel que celui de la Chambre
des Lords. Ceux-ci ne constituent pas a priori un bloc de juges très
monolithique. Il est d?une convention constitutionnelle acceptée qu?au
moins deux Lords soient écossais433 et qu?un autre au moins
provienne de l?Irlande du Nord434. Mais ils constituent
néanmoins une petite élite de hauts magistrats435 bien
compacte, homogène et soudée436.
Dans des cas exceptionnels, un juge anglais de la Haute Cour
de Justice qui est membre du Conseil Privé437 ou un juge du
Commonwealth peut s?adjoindre aux Lords pour composer la formation de jugement
du Comité Judiciaire. Au temps où le Comité Judiciaire
était la juridiction suprême de l?Empire britannique, il
était composé régulièrement de hauts magistrats du
Canada, de l?Afrique du Sud, de l?Australie de la Nouvelle-Zélande et de
l?Inde. Aujourd?hui, seules la Nouvelle-Zélande, les Bahamas et la
Jamaïque y sont, peut-on dire, représentées438.
Il est regrettable que l?île Maurice soit toujours tenue à
l?écart quant à sa représentation alors que cinq anciens
Chefs-Juges de la Cour Suprême de Maurice sont à la retraite. La
compétence technique des
431 Autrement dit, les Lords judiciaires sont les pairs qui ont
occupé ou qui occupent une haute fonction dans la magistrature et
détiennent leur dignité à titre viager.
432 Les Lords-Juges d?Appel sont membres de la Cour d?Appel,
juridiction de deuxième degré.
433 Actuellement, en sus de la convention, l?actuel
Lord-Chancelier, Lord Mackay of Clashfern, est d?origine écossaise.
434 Un peu comme à la Cour Suprême des Etats-Unis
d?Amérique, la représentation géographique des juges y est
très respectée. V. WALKER T. et EPSTEIN Lee: «The Supreme
Court of the United States», New York, St. Martin?s Press, 1993, 207 p.,
v. p. 37-38.
435 BLOOM-COOPER Louis et DREWRY Gavin: «Final Appeal: a
study of the House of Lords in its judicial capacity», Oxford, Clarendon
Press, 1972, 584 p., v. p. 153-54.
436 Les Lords judiciaires n?ont pas d?assistant de recherche et
ont peu d?aide de secrétariat. JOLOWICZ J. A: «Les décisions
de la Chambre des Lords», RIDC, 1979, pp. 521 à 537.
437 Dans les affaires mauriciennes, par exemple, ont
siégé, Sir Robert Megary et Sir Micheal Hardie Boys.
438 «In spite of the express provisions allowing
representation of Dominion Judges on the various boards of the Privy Council...
cases before the Privy Council have been heard almost exclusively by English
and Scottish law Lords», MC WHINNEY Edward: «Judicial review in the
English speaking world», University of Toronto Press, 1965, 244 p., v. p.
50.
hauts magistrats mauriciens, jugée peut-être non
suffisante, explique sans doute leur absence au prétoire du
Comité Judiciaire.
La composition du Comité Judiciaire demeure très
britannique. Les juges du Commonwealth sont rarement désignés
à siéger. Le facteur géographique ne permet pas qu?ils
soient régulièrement sollicités. En somme, les membres
réellement actifs du Comité Judiciaire sont globalement de quinze
à vingt, c'est- à-dire les onze Lords judiciaires en fonction et,
éventuellement, les autres juges des tribunaux britanniques et du
Commonwealth. Ce nombre de juges est légèrement
dérogatoire à la tendance des juridictions constitutionnelles
à ne comporter qu?un nombre restreint de juges mais s?explique par le
caractère même du Comité Judiciaire.
b. Le critère de compétence
Le Comité Judiciaire appartient à la
catégorie des cours de Common Law quant au mode de recrutement de ses
membres. Les cours de Common Law sont composés d?anciens grands
praticiens du droit, tandis que les cours de droit commun du modèle
romano-germanique sont composés de magistrats de carrière. Le
système judiciaire britannique ne prévoit aucun système de
déroulement de carrière pour les titulaires d?une fonction au
sein de la magistrature439. Pour être nommé juge de
première instance à la Haute Cour de Justice de Londres, il faut
être un avocat disposant d?au moins de dix années de pratique au
barreau de l?Angleterre et du Pays de Galles440. Les nominations
sont effectuées par le Souverain sur proposition du
Lord-Chancelier441. Le Lord-Chancelier apprécie la
performance des avocats selon les avis qu?il reçoit des juges sur leurs
activités et réputations. Le ministre de la justice anglais
assure une véritable notation des avocats contenue dans un dossier
désigné par sa couleur, le jaune (the yellow book).
L?avocat ne fait pas acte de candidature à la fonction de juge. Il est
invité par le gouvernement à accepter sa nomination. Ce mode de
sélection des juges est hautement élitiste et s?apparente
à la cooptation. Ce sont les juges qui nomment les juges, leurs
successeurs et en général ils choisissent ceux qui leur
ressemblent. Ils donneront un avis négatif sur l?avocat qui paraît
déroger aux
439 «... the British judiciary is not a career service.
No young law student can actually set out to become a judge, since there is no
special school nor any competitive or other examination for entry to the
judiciary», KINDER-GEST Patricia, cité note 58, v. p. 400.
440 «The system of recruitment which has prevailed up to
the present day has always assumed that a good barrister will automatically
make a good judge and therefore that he had no need of any particular in-depth
training to prepare him for his new position», ibid., p. 401.
441 Dans la pratique, le Lord-Chancelier demeure en fonction
plus longtemps que les autres ministres et peut effectuer ou proposer de
nombreuses nominations. A titre indicatif, Lord Hailsham of St. Marylebone fut
Lord-Chancelier de 1979 à 1987. Lord Makay of Clashfern est en fonction
depuis 1987.
moeurs de la profession442. Le choix du
Lord-Chancelier porte sur les quelques sept cent cinquante avocats en exercice
ayant obtenu le titre honorifique de Conseiller de la Reine (Queen's
Counsel), c'est-à-dire, le titre d?avocat
émérite443. En moyenne les éminents avocats
sont nommés à la Haute Cour de Justice444 à
l?âge de cinquante ans445. Certains, après une
expérience de huit à dix années seront promus à la
Cour d?Appel qui comprend vingt-sept Lords-Juges. Ceux-ci sont nommés
par le Souverain sur recommandation du Premier ministre446. Une
petite minorité d?entre eux seront nommés à la Chambre des
Lords et deviendront, en tant que Lords judiciaires447, membres
actifs du Comité Judiciaire. Les magistrats britanniques ne sont
élevés à la pairie avant d?avoir atteint en moyenne
soixante-deux ans, c?est-à-dire, un niveau de maturité
élevé. Ce modèle de recrutement des juges est
qualifié de «professionnel» par rapport à celui dit
«bureaucratique» du système continental, dans lequel les juges
sont choisis par concours ouvert aux jeunes étudiants après leurs
études universitaires. Le recrutement au Comité Judiciaire est
donc centré sur des juristes de profession comme prôné par
Hans Kelsen à propos des juridictions constitutionnelles448
(voir tableau 6 en annexe). La Grande-Bretagne recherche dans ses hauts
magistrats une grande expérience des problèmes pratiques
plutôt que de la compétence théorique449.
On peut, par contre, s?interroger sur la dépendance du
système britannique de recrutement sur le bon vouloir de
l?exécutif, du Lord-Chancelier en particulier, qui conseille le
souverain à cet effet. Mais les moeurs et les usages propres à
l?Angleterre font que le juge, une fois investi dans ses fonctions, oublie
l?autorité qui l?a nommé pour ne penser qu?à sa charge
442 «A man or woman whose social or personal habits are
unconventional or uncertain is not likely to be risk», GRIFFITH J. A. G.:
«The politics of the judiciary», Londres, Fontana Press, 1991, 4e
édition, 352 p., v. p. 29.
443 La Loi de 1990 sur les cours et le service judiciaire
(Court and legal services Act 1990) prévoit que les
avoués (Solicitors) de grande expérience pourraient
être recrutés comme juges.
444 La Haute Cour de Justice, tribunal de première
instance, comprend quelques quatre-vingt- cinq juges et est unique en
Angleterre.
445 «La nomination à une fonction judiciaire dans
une cour supérieure est toujours considérée comme le signe
d?une éclatante réussite et le couronnement d?une carrière
poursuivie avec succès au barreau», DAVID René: «Le
droit anglais», PUF, Que sais-je ?, 1975, 126 p., v. p. 24.
446 A ce stade, les juges seront membres du Conseil Privé,
mais y sont peu actifs.
447 Les Lords bénéficient d?une image de
prestige et sont largement décorés. Leur statut leur permet
d?incarner le respect qu?il faut pour la justice.
448 KELSEN Hans: «Le contrôle de la
constitutionnalité des lois: une étude comparative des
constitutions autrichienne et américaine», RFDC, 1990, pp. 17
à 30 et du même auteur: «La garantie constitutionnelle de la
Constitution», RDP, 1928, pp. 197 à 257. Il soutient que: «Il
est de plus grande importance d?accorder à la composition de la
juridiction constitutionnelle une place adéquate aux juristes de
profession... Le tribunal a en effet le plus grand intérêt
à renforcer lui-même son autorité en appelant à lui
des spécialistes éminents», ibid., pp. 227.
449 Les théoriciens du droit (academic
lawyers) ne sont jamais affectés à la haute magistrature. V.
SHETREET Shimon: «Judges on trial, a study of the appointment and
accountability of the English judiciary», Oxford, North-Holland Publishing
Company, 432 p., v. p. 58 et s.
éminente450. Il faut néanmoins se
méfier de croire qu?avec ce système la Grande- Bretagne ne permet
l?infiltration d?éléments politiques dans le judiciaire. Le
Lord-Chancelier, juriste de formation, est un homme politique451.
Aussi, certains Lords judiciaires ont été nommés en
considération de leurs engagements politiques
antérieurs452 ou de leur affinité idéologique
avec le parti au pouvoir.
B. La composition des formations de
jugement
La composition des formations de jugement (Boards) du
Comité Judiciaire présente une particularité qu?il
convient de mettre en relief. Il appartient au Lord-Chancelier de
désigner pour chaque affaire les membres du Conseil qui composeront le
comité ad hoc qui la jugera453. Dans la pratique, il semble
que le Lord-Chancelier veille à une certaine régularité et
stabilité dans le choix des juges (a). Nous verrons ensuite si ce
principe est respecté à l?égard de l?île Maurice
(b).
a. La stabilité dans le choix des juges
Les théoriciens du droit du Commonwealth n?avaient pas
manqué d?être très critiques à l?égard de
tout changement fréquent de personnel composant le Comité
Judiciaire en séance454 et de l?appel aux juges qui ne
possédaient pas une connaissance approfondie du système juridique
concerné455. Le changement de personnel avait provoqué
une instabilité de la jurisprudence vérifiée dans
l?interprétation de la Constitution canadienne de 1867456.
Selon la composition du tribunal londonien, la Constitution canadienne faisait
l?objet soit d?une interprétation décentralisante, favorisant les
droits et pouvoirs des provinces, soit d?une interprétation
centralisante protégeant le pouvoir central du Canada.
450 PERROT Roger: «Institutions judiciaires»,
Monchrestien, 1995, 7e édition, 599 p., v. p. 302.
451 Aucun texte de loi ne prescrit les modalités de
recrutement du Lord-Chancelier. Mais la tradition veut qu?il soit issu des
avocats ayant exercé les fonctions d?officier de justice de la couronne,
avocats du ministère public, ou de la haute magistrature.
452 «Atkinson and Shaw were appointed by Balfour and
Asquith because they were party men, and party men were needed to ensure that
the appellate functions of the House were handled from the appropriate
political view point», STEVENS Robert: «Law and politics, the House
of Lords as a judicial body 1800-1976», The University of North California
Press, 1978, 701 p., v. p. 246.
453 Le Lord-Chancelier exerce une fonction similaire à la
juridiction de la Chambre des Lords.
454 «To imagine that we shall ever get consistent and
reasonable judgments from such a casualty selected and untrained court (as the
Judicial Committee) is merely silly», SCOTT F. R.: «The consequences
of the Privy Council decisions», CBR, 1937, pp. 485 à 494, v. p.
494.
455 BURNS P.: «The Judicial Committee of the Privy
Council: constitutional bulkmark or colonial remnant ?», OLR, 1984, vol.
15, n°4, pp. 503 à 522.
456 Un juriste canadien avait écrit que le
Comité Judiciaire fut: «a court of fluctuating personnel
characterised by the appearance and quick disappearance of many members, a fact
which has not been conducive to familiarity with our Constitution or
conditions, and which has also led to the dominance of a few personalities
whose attendance was more regular and prolonged», MAC DONNALD Vincent:
«The Privy Council and the Canadian Constitution», CBR, 1951, pp.
1021 à 1037, v. p. 1024. Un autre juriste parlait d?un «shifting
body of judges» à propos du Comité Judiciaire. V. CAIRNS
Alain: «The Judicial Committee and its critics», RCSP, 1971, pp. 301
à 345, v. p. 331.
Le tandem des Lords Waston et Haldane protégeait les
provinces de toute immixtion du pouvoir fédéral dans leur champ
de compétence alors que Lord Sankey adoptait une approche
inverse457.
En dehors du cas canadien qui ne présente plus qu?un
intérêt historique, il nous est possible d?affirmer que le
Lord-Chancelier choisit des spécialistes de la matière en
instance pour siéger dans le comité ad hoc
(panel)458 et le même groupe de juges est
appelé à composer le Comité Judiciaire en séance
pour juger des affaires similaires. Le Lord-Chancelier assure une mission
complexe. Il veille à l?unicité de la jurisprudence. En
même temps, il est soucieux du développement de la jurisprudence.
C?est ainsi qu?il peut parfois solliciter l?assistance des Lords judiciaires
à la retraite ou des rares juges du
C o mm on w e alt h 459.
Il est utile de faire remarquer que ce mode de
sélection des juges permet à une cour de Common Law tel que le
Comité Judiciaire, qui a une compétence générale,
de se doter d?une certaine spécialisation interne de facto et donc d?une
division fluide du personnel de la cour460.
b. Le cas mauricien
La composition du Comité Judiciaire dans les affaires
mauriciennes reflète la même tendance du maintien de la
stabilité461. La spécialisation de certains Lords en
droit public mauricien est marquante Lord Keith of Kinkel, d?origine
écossaise, a siégé pendant quinze années, de 1977
à 1992 et une fois sur deux dans les formations de jugement statuant sur
des affaires relevant du droit public mauricien (voir tableau 7 en annexe). De
même, Lord Templeman siège depuis 1982 et apparaît
également en moyenne une fois sur deux.
457 «The vagaries of judicial interpretation of the
Canadian Constitution are indeed an excellent index to the uncertainty of
tenure of the personnel of the Privy Council», MC WHINNEY Edward,
cité note, v. p. 52.
458 Le Lord-Chancelier est conseillé dans cette
tâche par son secrétaire permanent (permanent secretary),
le clerc principal du ministère de la justice (principal clerk of
the judicial office) et le clerc du Conseil Privé (judicial
clerk of the Privy Council).
459 «Past pattern of practice as to the constitution of
such boards of the Privy Council indicates a remarkable element of consistency
and regularity in the actual choosing of the judges, the same judicial names
tending to recur, year after year, for the same general categories of cases and
being determined either by technical backgrounds or by expressed personal
preference... or by original casual accident of choice», MC WHINNEY
Edward: «Supreme Courts and judicial law making: constitutional tribunals
and constitutional review», Martinus Nijroff Publishers, 1986, 305 p., v.
p. 29.
460 Les Lords provenant de la division de la chancellerie
(Chancery Division) de la Haute Cour ne siègent que dans les
affaires commerciales et non dans des affaires pénales et
administratives réservées à ceux venant de la division du
Banc de la Reine.
461 A titre de comparaison, trente personnes ont
été membres du Conseil Constitutionnel français de 1977
à 1994 alors que trente-deux membres du Conseil Privé ont
participé aux affaires mauriciennes de droit public durant la même
période.
La pratique veut que chaque comité ad hoc de jugement
comprenne deux ou trois juges d?un noyau dur de quatre à cinq Lords. Par
exemple, de 1982 à 1991, au moins deux des Lords Keith of Kinkel,
Brandon of Oakbrook, Templeman, Bridge of Harwich et Roskill ont
participé aux formations de jugement statuant sur des affaires de droit
public mauricien. Le même phénomène réapparaît
entre 1987 et 1988 sur les six affaires jugées durant cette
période. Le noyau dur était composé des Lords Griffiths et
Akner et de Sir John Stephenson. Aussi, sur les sept arrêts
prononcés de 1992 à 1993 trois des quatre Lords judiciaires
Jauncey, Goff of Chieveley, Lowry et Oliver y étaient
présents.
Toutefois, la spécialisation et la
régularité apparaissent moins nettement en matière de
droit pénal bien que les mêmes principaux Lords judiciaires,
à savoir Lords Templeman, Keith of Kinkel, Bridge of Harwich, Oliver,
Jauncey of Tullichettle et Brandon forment les comités de jugement (voir
tableau 8 en annexe). Mais la présence de quelques chevaliers du
Conseil, dont des juges de la Nouvelle-Zélande, sont à noter dans
les affaires pénales462. A ce titre Sir Maurice Casey y est
particulièrement régulier.
On insistera, enfin, sur les avantages que représente
le mode de composition des formations de jugement du Comité Judiciaire.
Le système présente deux bienfaits. Il assure avec la longue
durée d?exercice des Lords, l?autorité de l?institution et
évite, par le renouvellement constant, les ruptures brutales au profit
d?une évolution souple. Les nouveaux Lords qui entrent en fonction dans
les affaires mauriciennes apprennent progressivement leur métier au
contact des anciens tout en questionnant toute jurisprudence que ces derniers
pouvaient considérer comme acquise ou clairement évidente. Dans
la pratique, le système retenu par le Conseil Privé peut
être rapproché du renouvellement triennal du Conseil
Constitutionnel français.
Paragraphe 2. Analyse sociologique et empirique de la
composition du Comité Judiciaire
Notre analyse du recrutement des juges du Comité
Judiciaire ne serait intégrale si nous ne procédons à une
étude sociologique et empirique de la composition de la Haute Instance
londonienne (A).
462 Le fait d?adjoindre des juges néo-zélandais
répond, semble-t-il, à un souci de prise en considération
des difficultés rencontrées en général par les
autorités publiques des pays du Commonwealth sur le plan
procédural aux procès pénaux, notamment sur le
problème des délais à respecter, vérifiées
dans les arrêts publiés.
Par ailleurs, il nous apparaît opportun de comparer le
Comité Judiciaire, du moins dans sa composition, à la fois avec
une grande juridiction et une cour constitutionnelle (B).
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