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Evaluation du régime d'imposition des traitements, salaires, pensions et rentes viageres

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par Moutaa Amin El waer
Institut Superieur de Comptabilité et d'Administration des Entreprises - Maitrise en Sciences Comptables 2005
  

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CH I. L'application de la réglementation par l'administration fiscale:

Introduction :

Selon P. Marchessou «L'interprétation stricte consiste, en présence d'un texte clair et précis, à adapter ses dispositions à l'espèce, sans leur donner une portée plus large ou plus étroite que ne leur permet le contenu formel»53(*)

L'administration fiscale intervient dans la vie des contribuables d'une manière systématique -voir même journalière pour certains d'entre eux- comme l'un des représentants du pouvoir exécutif, «L'administration fiscale est male vue par l'opinion publique. Elle est en rapports fréquents avec les contribuables pour recevoir, vérifier les déclarations, effectuer les contrôles sur pièce et sur place.»54(*). Comme l'indique son non, son rôle se limitera théoriquement à exécuter la réglementation émanant du pouvoir législatif, mais cette affirmation n'est pas aussi évidente qu'elle n'en a l'air d'être, d'où la nécessité d'expliquer un peu les aspects principaux régissant la relation entre les deux pouvoirs.

Juridiquement la tache confiée à l'organe chargé du gouvernement de l'Etat «était limitée à l'exécution des lois et c'est à ce titre qu'on lui donne le nom de pouvoir exécutif.», sauf que «le terme « exécution » était entendu d'une façon suffisamment souple pour autoriser les initiatives du gouvernement. Cependant, si larges que fussent celles-ci, elles ne pouvaient intervenir que dans le cadre des lois préexistantes.»55(*).

L'article 34 de la constitution tunisienne laisse le soin à la loi de définir : l'assiette imposable, le taux d'imposition, les procédures de recouvrement des contributions de chacun, et les sanctions en cas d'infraction. Elle reconnaît en plus de ça, la délégation du pouvoir de la chambre des députés au gouvernement. Mais les dispositions légales peuvent être parfois imprécises et laissent traîner des doutes sur les solutions qu'elles apportent ou bien elles peuvent déléguer expressément le pouvoir d'adopter les dispositions adéquates à l'administration. L'administration se retrouve dans ce cas à la fois face à une obligation d'interpréter la loi et de l'appliquer, cette obligation est

soit d'ordre pratique (combler un vide juridique rencontré lors de l'application d'une loi due à son imprécision), soit d'ordre légal (disposition expresse de la loi, exemple : Art 53 code de l'IRPP). Un risque naît de cette situation à cause de ce cumule de fonctions, il est donc très important de protéger le contribuable contre toute possibilité d'abus de pouvoir, de mauvaise interprétation de la loi ou d'une prise de position allant à l'encontre de l'esprit de la loi en question ou des orientations générales du pays (économiques, sociales...).

C'est à ce point (le degré d'intervention du pouvoir exécutif dans le champ de compétence du pouvoir législatif en matière fiscale) qu'on accordera le plus important de notre attention, et plus particulièrement, aux garanties offertes aux contribuables en matière de contentieux fiscaux, pour les protéger contre tout abus de pouvoir possible par l'administration. Les justifications de ce choix sont multiples, mais on peut citer à titre indicatif, l'importance primordiale voire même vitale de la fiscalité pour l'existence même de l'Etat, d'où la difficulté retrouvée lorsqu'on essaie de limiter à quel point serait-il acceptable de légitimer une attitude agressive de l'administration fiscale, lorsqu'elle tranche sur des questions pour lesquelles il existe une divergence au niveau de l'interprétation de la loi, et ce d'une manière à favoriser la rentabilisation de la recette générale au détriment du contribuable. Ainsi Habib Ayadi parle même de la prévalence de la doctrine administrative sur la loi56(*).Le second argument qu'on peut citer comme exemple, est que les lois et réglementations qui portent sur des questions d'ordre économique et financier, sont toujours sujets à des problèmes dans l'application surtout entre les privées que dire que si la relation réglementée est entre l'Etat et les particuliers.

L'intérêt de l'étude de la relation entre l'administration fiscale et le contribuable en générale et avec ceux de la catégorie T.S.P.Rv réside dans son spécificités d'une part au niveau de la dispersions de l'assiette dans le temps ou entre les mains de plusieurs personnes.

Le premier chapitre est consacré au rapport entre l'administration fiscale et les contribuables en mettant l'accent sur quelques problèmes relatifs à des prises de position administrative (Section II), après avoir présenté d'une manière brève les garanties offertes aux contribuables en matières de contentieux fiscaux (Section I) .

Section I . Les garanties offertes aux contribuables en matières

de contentieux fiscaux :

D'après Abdelhamid Ben Jaballah les garanties essentielles contre l'abus de pouvoir de l'administration résultent de :

«- avant tout, des règles générales de droit ainsi que des termes mêmes de la constitution qui n'autorise le paiement de l'impôt que sur la base de l'équité et qui accordant au contribuable le préjugé favorable d'innocence et de bonne foi tant qu'il n'y a pas de charge contre lui. Il est clair que la constitution exempte le contribuable de toute imposition tant que sa culpabilité de fraude fiscale ou d'omission de l'un quelconque des éléments d'imposition n'est pas prouvée.

- Et ensuite, des dispositions de l'article 24 du code de la comptabilité publique qui interdisent tout encaissement d'une somme indue.

- Et enfin, des termes de la législation fiscale qui ne permet aucune perception d'une somme indûment. Aussi d'après certains juristes, le code n'apporte aucune garantie supplémentaire à celle déjà existantes.»57(*).

Vue le déséquilibre flagrant dans les rapports entre l'administration fiscale et le contribuable, le législateur tunisien - conformément au P.A.S décrit par les directives de l'F.M.I et de la B.M - a codifié les droits et obligations de chaque partie. De ce fait, le contentieux fiscal en Tunisie a été codifié depuis la promulgation du code des droits et des procédures fiscaux par la loi n° 2000-82 du 9 Août 2000 qui est entré en vigueur le 1 Janvier 2002, et dans une certaine mesure, revus par la loi n° 2002-1 du 8 Janvier 2002 qui a apporté un assouplissement des procédures fiscales. Les garanties qui nous intéressent sont celles relatives au formalisme des procédure (§ 1), au droit de défense (§ 2), et le double degré de juridiction (§ 3).

§ 1 . Le formalisme des procédures :

L'un des buts de la promulgation le 9 Août 2000 du C.D.P.F est de protéger le contribuable contre tout comportement injuste de la part de l'administration à son égard, et aussi pour délimiter dans la mesure du possible les droits respectifs de l'administration fiscale et du contribuable.

Le code sus-visé a essayé donc de formaliser cette relation, en définissant clairement la procédure à suivre par le contribuable qui estime être victime d'une injure administrative du à une mauvaise interprétation de la loi par exemple, de la phase de conciliation jusqu'à la phase contentieuse. Ce qui va donner beaucoup plus de légalité à cette relation.

§ 2 . Le droit de défense :

le C.P.D.F garantie au contribuable tout au long du contentieux juridictionnel le droit de se défendre, tout d'abord dans l'existence même d'une procédure contentieuse, c'est qu'on connaît au contribuable le droit de protester contre des faits (pratiqués par l'administration) qu'ils jugent abusifs.

Le droit de ce défendre par soi même, par l'intermédiaire d'un représentant ou un mandataire est garantie par le C.D.P.F tout au long des différentes étapes de la procédure contentieuse.

2.1 Devant le tribunal de 1er instance :

L'article 57 du CDPF stipule que « le contribuable peut poursuivre le déroulement de l'instance par lui-même ou par un mandataire désigné à cet effet conformément à la loi... ».

D'après l'article sus-visé le contribuable a le droit de poursuivre le déroulement de l'instance, les articles 60 et suivants garantissant ce droit pendant les différentes phases à savoir la phase de conciliation « Le président du tribunal remet l'affaire au juge rapporteur...le contribuable peut se faire assister durant les audiences de conciliation par une personne de son choix... en cas d'absence du représentant de l `administration ou du contribuable, l'audience est ajournée une seule fois ...» (Art 60), et la phase contentieuse « les audiences sont publiques sauf...sur demande motivée du contribuable ou de son mandataire... » (Art 63) ce qui suppose que s `il est autorisé à demander que les audiences ne soient pas publiques donc le mandataire est autorisé sans aucun doute à assister le contribuable.

Pour ce qui est des moyens, de preuves et conformément à l'article 64 C.D.P.F, leurs charges incombent au contribuable au cas où il invoquerait l'exagération de l'impôt mis à sa charge. Le contribuable ne peut dans ce cas obtenir la décharge ou la réduction de l'impôt mis à sa charge qu'en apportant la preuve de la sincérité de ses déclarations, de la réalité de ses ressources ou du

caractère exagéré de son imposition58(*). Toutefois, la charge de la preuve incombe à l'administration chaque fois qu'elle affirme une situation telle que le contribuable ne peut apporter la preuve négative59(*).

Il en est de même lorsque l'administration rejette une comptabilité, c'est à elle d'apporter la preuve de son inexactitude60(*). Les moyens de preuve sont ceux prévus par l'article 427 du C.O.C, Cependant le serment et la preuve testimoniale sont exclus en tant que moyens de preuve.

2.2 Lors du recours à l'appel et au pourvoi en cassation:

L'article 68 du C.D.P.F ayant les droits acquis au niveau de l'article 63 relatifs à la défense, à la procédure d'appel, « les dispositions des articles...63...du présent code sont applicables à l'appel ». Il en est de même pour le pourvoi en cassation devant le tribunal administratif, si on prend en considération la loi organique n°72-40 du 1er juin 1972 qui prévoit que le ministère d'avocat auprès du tribunal administratif est obligatoire pour le contribuable.

§ 3 . Le double degré de juridiction :

Le recours à la justice est une garantie pour le contribuable pour attaquer l'administration fiscale, mais le double degré de juridiction et aussi important.

Les articles 53 jusqu'à 66 du C.D.P.F traitent la procédure devant les tribunaux de première instance, les articles 66 et 67 traitent de l'appel et enfin l'article 69 traite le pourvoi en cassation.

3.1 le recours devant les tribunaux de 1er instance :

Pour intenter une action auprès du tribunal de première instance territorialement compétent, le contribuable a un délai de 60 jours à compter de la date de la notification sujette de sa contestation. La procédure devant cette instance suit deux voies : la conciliation et le contentieux.

Avant d'entrer dans une phase contentieuse proprement dite, le président du tribunal de première instance remet l'affaire au juge rapporteur pour un arbitrage. A la fin de la période de conciliation qui ne peut dépasser les 90 jours (sauf dans le cas d'une demande faite par le juge rapporteur d'allonger ce délais 30 jours de plus), et dans la mesure où les deux parties ne sont pas parvenues à retrouver un arrangement à l'amiable, l'affaire suit son cours et c'est l'entré effective dans la phase contentieuse.

Le jugement du tribunal est prononcé après avoir délibéré, cette délibération est secrète. Les jugements sont rendus par trois magistrats à la majorité des voix, le jugement qui doit être motivé ne revêt la forme astreignante qu'après la prononciation du verdict en audience publique en présence des trois magistrats et ce dans un délais de 6 mois à compter de la date de l'enrôlement de l'affaire ou de la date de prise en charge par le dit tribunal pour prononcer son jugement.

3.2 Le recours devant la cour d'appel :

Le jugement rendu par le tribunal de première instance, est susceptible d'appel devant le cours d'appel territorialement compétant et ce dans un délais 30 jours, à compter de la date de signification du jugement de première instance, la procédure suivie en appel est conforme à celle prévue par le code de procédure civile et commerciale, sous réserve des dispositions particulières prévues par le code.

L'appel n'est pas suspensif de l'exécution du jugement rendu en première instance en faveur de l'administration. Dans ce cas, l'avance de 20 % ou de 100 % est acquise au trésor et le cas échéant le complément d'impôt est exigible61(*).

3.3 Le recours devant la cour de cassation :

L'article 11 de la loi organique n°72-40 du 1er juin 1972 modifiée par la loi n°96-39 du 3 juin 1996 relative au tribunal administratif indique que le tribunal administratif statue par voie de cassation sur les recours intentés contre :

- Les jugements rendus en dernier ressort, relatifs au contentieux de l'assiette des impôts et taxes revenants à l'Etat et aux collectivités locales ;

- Les jugements rendus en dernier ressort concernant la restitution des dits impôts et taxes.

Le délai est de 30 jours de la date de signification de l'arrêt de la cour d'appel. Il est possible à la demande de l'une des parties, que l'assemblée plénière, en plus des moyens de droit qui peuvent être invoqués pour contrôler l'existence matérielle des faits sur lesquels le jugement attaqué s'est fondé, mais il est impossible de recevoir de nouveaux moyens de preuve sauf dans le cas d'atteinte à l'ordre public.

Section II . Quelques cas de Doctrines administrative à étudier :

Dans son ouvrage « Les impôts en Tunisie » Abderaouf Yaïch cite quelques anomalies détectées entre les dispositions du code de l'IRPP et de l'IS et quelques doctrines administratives au niveau de la catégorie T.S.P.Rv., de sa part Habib Ayadi explique dans son ouvrage « Droit fiscal : Impôt sur le revenu des personnes physiques et impôts sur les sociétés », un autre cas de la même nature.

Ces anomalies varient de l'incompatibilité avec des choix économique du pays (§ 4) vers l'erreur d'interprétation (§ 1 & 2 & 3).

§ 1 . La rente viagère à titre onéreux :

La rente viagère peut être consentie soit à titre gratuit, soit à titre onéreux et donc en payant un prix donné ou une transaction. La rente viagère est dite à titre onéreux lorsqu'elle est reçue contre des biens mobiliers ou immobiliers en contrepartie de la rente. Elle représente dans ce cas «une modalité de paiement du prix d'acquisition des biens reçus en contrepartie.»62(*), et de ce fait «L'imposer en tant que revenu dans sa globalité équivaut à confondre prix de cession et revenu.»63(*).

Cette position de l'administration est critiquable d'après ce qui a été dit puisque le prix de cession ne peut dans aucun cas être considérer comme un revenu, donc l'imposer intégralement en tant que telle va priver les titulaires de ces sommes de déduire leurs dettes, ce qui est inacceptable et injuste, et même l'abattement prévue dans l'article 26 du code de l'IRPP et l'IS qui est forfaitaire (25 % du montant de la rente) ne peut dans aucun cas remplacer la somme versée par le bénéficiaire de la rente (le revenu ne peut pas atteindre dans un cas normale 75 % d'un prix), mais même si dans le cas particulier où cela se réalise le problème reste grave dans la dimension légale car c`est une erreur d'interprétation.

D'un point de vue purement économique, l'annuité de la rente viagère peut être décortiquée en deux éléments : l'un correspondant au remboursement de la dette en principal et le restant dû est assimilé en quelque sorte à un intérêt implicitement calculer.

Les rentes viagères ont été imposées d'après l'article 25 du code de l'IRPP et de l'IS dans la même catégorie que les traitements et les salaires, et le même article n'apporte aucune modération au caractère imposable des rentes viagères.

Abderraouf Yaïch indique dans le même ouvrage cité plus haut qu'une «telle interprétation de la loi qui amène à imposer un remboursement de capital en tant que revenu semble manifestement inéquitable.», ce qui peut être expliqué comme un essai de démontrer que l'équitable serait d'imposer seulement le surplus perçu comme un intérêt implicite.

* 53 Marchessou (P), «l'interprétation des textes fiscaux», Economica 1980 p148.

* 54 GEST (G) et TIXIER (G), op. cit. p 268.

* 55 GEORGE (B), «Loi», Universalis 2004

* 56 Ayadi (H), op. cit. p 219.

* 57 BEN JABALLAH (A), «le contribuable face aux fisc: droits, obligations et procédures fiscales», 2002. p 107.

* 58 Arrêt du T.A n° 237 du 14/07/1983 in Arrêts et jurisprudence du T.A 1982-1984 CREA, et Arrêt du T.A n°835 du 30/07/1987 in Arrêts et jurisprudence du T.A 1985-1987 CREA. Cité par BEN JABALLAH (A), op. cit.

* 59 Arrêt du T.A n° 823 du 19/02/1990 in Arrêts et jurisprudence du T.A 1988-1990 CREA, Cité par BEN JABALLAH (A), op. cit.

* 60 Décision de la C.S.T.O n° 161 BODI n°5, 1°r trimestre 1970, Cité par BEN JABALLAH (A), op. cit.

* 61 Ben Jaballah (A), op. cit. p 127.

* 62 YAICH(A), «Les impôts en Tunisie», Ed Raouf Yaïch 2004, p 87.

* 63 YAICH(A), Lok. cit. p 87.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus