Le traitement médiatique de l'anorexie mentale, entre presse d'information générale et presse magazine de santé( Télécharger le fichier original )par Audrey Arnoult - Institut d'Etudes Politiques de Lyon 2006 |
c) Un actant sujet essentiellement fémininLes mots employés pour qualifier l'anorexique sont peu nombreux ce qui montre encore une fois que le quotidien ne parle pas vraiment de l'anorexie. Seuls deux articles nous mentionnent que l'anorexie fait « des ravages chez les jeunes femmes des pays riches »248(*) et qu'elle « atteint majoritairement les filles, le plus souvent des adolescentes »249(*). Le terme de « garçon » ou « adolescent » n'apparaît jamais. Nous pouvons noter une différence dans la tonalité de ces deux phrases qui peuvent aisément s'expliquer. La première provient du discours propre du journal tandis que la seconde est issue des propos d'un expert (P. Jeammet) rapportés au discours indirect libre. Par le terme de « ravage », le journal veut insister sur l'augmentation des « cas d'anorexie » durant ces dernières décennies, « il y en aurait trois fois plus »250(*) et c'est environ « une jeune fille sur cent »251(*) qui en souffre. Notons que les données chiffrées sont moins nombreuses et moins précises que dans Le Monde et La Croix, ce qui témoigne d'une faible rigueur. Dans un autre article, le quotidien insiste sur le taux de mortalité et précise que « pis 10% des adolescentes anorexiques en meurent chaque année ». L'anorexie est donc bien une maladie grave puisque mortelle, pourtant Le Figaro y consacre peu d'articles. Nous pensons que le taux de mortalité que donne le quotidien est erroné. En effet, « la mortalité globale [...] est très variable d'une étude à l'autre, de nulle à plus de 10% »252(*), d'autre part un médecin précise que « la mortalité globale de l'anorexie mentale a été récemment estimée à 0,5-1% par année d'évolution »253(*), il n'y a donc pas 10% d'anorexiques qui meurent chaque année. Comme dans les quotidiens précédemment étudiés, l'actant sujet est individualisé à deux reprises. L'un des discours du quotidien évoque la mort de Laurence, 15 ans, la fille de B. Chirac et un autre de Malika, 26 ans. Le Figaro ne s'attache pas à dresser le portrait des anorexiques comme le montre la seule indication que nous ayons trouvé : l'adolescente est « perfectionniste »254(*). Les discours du Figaro se distinguent de ceux de La Croix et du Monde sur différents points. S'il considère bien que l'anorexie est une maladie grave, il insiste beaucoup moins sur cet aspect. De plus, il mentionne bien que cette pathologie affecte principalement les filles, ce qui sous-entend que des garçons sont également concernés cependant, le terme en lui-même n'apparaît pas. Ensuite, ses propos sont beaucoup moins rigoureux : la terminologie employée pour désigner la maladie est peu variée et les indications concernant la prévalence de l'anorexie sont faibles. De plus, certains propos sont erronés comme le taux de mortalité ou la répartition socioculturelle de la maladie. Enfin, il semble que le quotidien opère une confusion entre anorexie et malnutrition, ce qui laisse croire qu'il connaît mal cette pathologie. Pour terminer, il ne dit quasiment rien de la personnalité des anorexiques, un aspect pourtant important puisque comme nous l'avons montré la maladie ne survient pas chez n'importe qui. * 248 Le Figaro, 25 juin 1997. * 249 Le Figaro, 25 avril 1997. * 250 Le Figaro, 25 avril 1997. * 251 Le Figaro, 26 février 2003. * 252 ALVIN, [2001], p. 30. * 253 Idem. * 254 Le Figaro, 25 juin 1997. |
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