3. Les lendemains des SMSI et la création d'un Fonds
mondial de solidarité
numérique ou FSN
Des déclarations et plans d'actions de Genève
aux engagements de Tunis, les SMSI ont insisté sur les questions
inhérentes au développement, à la souveraineté
nationale, à la liberté d'expression, à
l'éducation, à la diversité culturelle ou encore au droit
international. Ces sujets ont été directement engagés et
privilégiés dans la profondeur des analyses par rapport à
la question de fond, celle de la réduction de la fracture
numérique autour de laquelle les débats ont tourné mais
sans jamais mieux faire que de s'arrêter à des engagements en lieu
et place des solutions concrètes attendues31. La
Déclaration de la société civile au SMSI, le 18
décembre 2005, intitulée « Bien plus aurait pu être
réalisé » résume le constat général que
le SMSI s'est achevé sans la résolution des deux principales
questions dont cette conférence des Nations Unies devait traiter : le
financement de l'infrastructure et des services pour « mettre les TIC au
service du développement » et la «gouvernance d'Internet
». Le sommet a néanmoins le mérite d'avoir
développé les réseaux humains Nord-Sud, d'avoir fait
naître de nouvelles collaborations et d'avoir créé des
opportunités d'affaires, en associant les pays, les gouvernements, la
société civile et les entreprises, à un débat
habituellement réservé aux décideurs des métropoles
technologiques. «Le tout premier résultat de cette grande messe de
l'information et de la connaissance, c'est le processus lui-même. Dans
l'esprit de ses initiateurs le SMSI devait sensibiliser les décideurs
des pays en développement à l'immense potentiel (des TIC) pour
l'expansion future des économies, l'amélioration du bien
être des populations, la cohésion sociale et l'extension de la
démocratie.»32 Le véritable point positif de ces
SMSI est donc la prise de conscience et la mobilisation internationale sur
l'urgence de trouver des réponses concrètes à la fracture
numérique. Ces Sommets n'ont pas servi essentiellement de tribune aux
discours technocratiques sur les TIC, mais ils constituent le point de
départ d'un processus participatif de réflexions et d'engagements
sur les mécanismes de financement de l'économie de la
connaissance et sur les nouveaux modes de coopération entre le Nord et
le Sud en matière d'information et de communication pour le
développement.
31 Le SMSI était considéré comme
le « Sommet des Solutions », en référence aux propos de
Yoshio Utsumi, alors Directeur de l'UIT.
32 RENAUD Pascal, SMSI :
Avancée symbolique, résultats modestes, in Sciences au Sud,
n°33.
L'un des aboutissements de ce processus a été la
création du Fonds de Solidarité Numérique.
Idée33 chère à Abdoulaye Wade (Chef d'Etat du
Sénégal) et présentée sous forme d'une proposition
des pays en développement, le fonds de solidarité
numérique a pris corps dans l'un des principes de la Déclaration
de Genève en 2003 : « Nous reconnaissons que
l'édification d'une société de l'information inclusive
exige de nouvelles formes de solidarité, de partenariat et de
coopération entre les gouvernements et les autres acteurs,
c'est-à-dire le secteur privé, la société civile et
les organisations internationales.» De Genève à Tunis, le
principe s'est transformé d'abord en un pacte de solidarité
numérique, puis s'est mué en engagement à Tunis en 2005.
Sa validation a conduit à l'inauguration, en mars 2005, du Fonds Mondial
de Solidarité Numérique (FSN) basé à Genève.
Le rôle de ce fonds est de financer des actions et des projets de terrain
liés à l'application des TIC dans des champs de
développement (Santé et télémédecine ;
éducation et e-learning, environnement et recyclage des déchets
informatiques,... etc) tout en respectant les principes de solidarité
numérique validés lors du SMSI.
L'Agence Mondiale de solidarité numérique,
organisme d'accueil de mon stage, a été créée dans
cette même dynamique, pour servir de bras opérationnel au FSN.
L'Agence prend en charge les volets importants de concrétisation de la
solidarité numérique tels que les projets de coopération
décentralisée en matière de TIC et d'e-gouvernance,
l'instruction des dossiers de demande de financement, et bien d'autres
démarches témoignant de l'engagement volontaire de la ville de
Lyon dans la lutte contre la fracture numérique.
« La solidarité numérique se
veut une approche positive de la coopération visant à
déployer toutes les potentialités de l'Internet et du
Multimédia auprès de tous les publics concernés. La
solidarité peut s'exercer à travers le transfert de ressources
financières, matérielles et humaines. Elle permet de mettre en
place des projets et des réseaux d'acteurs partout dans le monde. (...)
En effet donner du matériel informatique ne constitue pas, en soi, un
projet de solidarité numérique. Il manque
précisément au don les dimensions d'apprentissage,
d'appropriation, de création de contenus et d'usages qui donnent son
véritable sens à la solidarité numérique.
»34
33 « J'ai toujours pensé qu'une
société de l'information plus équilibrée et plus
harmonieuse devrait être fondée sur une
généralisation de l'accès à l'outil informatique
pour éviter aux pays en retard dans ce domaine les risques d'une
marginalisation irréversible. Donner à tous la possibilité
de se connecter, d'être à l'écoute, de se faire entendre et
de suivre la marche du monde: tel est le sens fondamental du Fonds de
solidarité numérique.»
Maître Abdoulaye Wade, Président du
Sénégal.
34 Guide de la Coopération
décentralisée pour la solidarité numérique, 2008,
p.2 1.
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