La République tchèque : analyse de son "retour à l'Europe"( Télécharger le fichier original )par Audrey Arnoult Université Lyon 2 - Master 2 en Sciences de l'Information et de la Communication 2007 |
B. L'Humanité : l'économie tchèque, une économie fragileLes discours de L'Humanité présentent la République tchèque comme un pays intégré économiquement dans l'UE, dont le principal partenaire est l'Allemagne. L'expression « le plus riche des pays de l'Est »261(*) semble signifier que la situation économique du pays est satisfaisante. Néanmoins, le journal nuance cette sanction dans le reste de l'article en s'appuyant sur différents indicateurs macro-économiques. Par exemple, il précise que les investissements directs à l'étranger sont en baisse. La République tchèque est « de moins en moins attractive » et les investisseurs se tournent vers des pays à la main d'oeuvre moins coûteuse. Depuis 2002, « la tendance serait plutôt au rapatriement des dividendes » dans les pays occidentaux. Ce manque d'attractivité de la République tchèque, associé aux « difficultés » avec l'Allemagne, a entraîné une baisse la croissance qui « s'est considérablement ralentie ». Parallèlement, le « déficit public a explosé » et le chômage est « en hausse ». Le quotidien précise qu'il « touche presque 11% de la population »262(*). Cette situation économique n'est pas assez solide pour adopter la monnaie unique. Le journal conclut donc : « l'adhésion à l'euro n'est pas envisagé avant 2010 ». Ce cadrage économique de la République tchèque appelle plusieurs remarques. Le quotidien ne dit rien de la transition et de toutes les réformes mises en oeuvre par le pays pour répondre aux exigences européennes en terme d'économie de marché. En outre, les termes employés sont tous dépréciatifs et parfois renforcés par des adverbes (« considérablement ») ou des comparatifs d'infériorité (« de moins en moins »). La sanction n'en est que plus forte. Enfin, L'Humanité s'appuie sur des chiffres de 2004 sans établir de comparaison avec les performances économiques des années précédentes ce qui, d'un point de vue économique, est peu significatif. De même, les indicateurs présentés ne sont pas mis en parallèle avec les performances des autres pays membres, ce qui donne un aperçu « biaisé » de la situation. Cet exemple est assez révélateur de la façon dont un quotidien peut utiliser les chiffres. Les différents indicateurs présentés permettent de pointer du doigt le ralentissement de l'économie tchèque ainsi que ses difficultés. Comparé aux autres pays candidats, la République tchèque est un pays riche néanmoins, cela ne suffit pas à sanctionner de façon positive sa transition économique. L'Humanité procède de la même façon pour présenter la situation sociale du pays. Il énumère les différentes mesures prises par le gouvernement, des mesures qualifiées de « très impopulaires »263(*) « qui mécontentent une grande partie de la population »264(*). Le terme « impopulaires » révèle bien la sanction que porte une nouvelle fois le quotidien. L'énumération produit un effet d'accumulation et tend à accentuer les difficultés du pays. Là encore, rien n'est dit des mesures prises par les différents gouvernements au cours du processus d'adhésion qui ont permis d'améliorer le système de protection sociale tchèque. A l'heure de l'entrée dans l'UE, c'est un pays économiquement faible, avec des difficultés économiques et sociales que nous dépeint L'Humanité. Cette sanction négative est peut être une façon de souligner que l'intégration de la République tchèque ne sera pas bénéfique pour l'UE, du moins au plan économique. En outre, elle peut contribuer à renforcer les craintes de l'opinion publique française. En effet, il faut rappeler que les Français craignent que les Tchèques « envahissent » leur marché du travail mais aussi émigrent pour bénéficier de meilleures conditions de vie. La situation du pays telle que la présente L'Humanité peut donc difficilement démythifier ces craintes. * 261 L'Humanité, 26 avril 2004, p. 11 * 262 L'Humanité, 18 mai 2004, p. 9 * 263 L'Humanité, 26 avril 2004, p. 11 * 264 L'Humanité, 18 mai 2004, p. 9 |
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