L'identité en débat - Représentations et idéologies dans les discours sur l'immigration au sein de l'espace public( Télécharger le fichier original )par Jean-Marie GIRIER Université Lyon II - Université Lyon III - ENS-Lsh Lyon - Master 2 recherche en Sciences de l'information et de la communication 2007 |
Repli identitaire, peur, et identité nationaleLe « choc des civilisations » résumerait-il le terreau idéologique actuel sur lequel fleurit l'identité nationale ? Cette formule destinée à l'Amérique du libéralisme permet de comprendre une nouvelle représentation du monde. L'État-Nation, porteur de la souveraineté populaire, est aujourd'hui dépassé par des éléments transnationaux. La mondialisation bouscule ainsi les repères identitaires et laisse émerger une phobie de l'Autre. Dans un processus de repli sur la culture, elle porte l'imaginaire de l'existence d'un dernier élément collectif national. Cette peur, soutenue par un renouveau des pratiques populistes, se traduit par l'extrait de débat ci-dessous dans lequel l'exemple du miroir correspond parfaitement à cette situation identitaire dans laquelle des individus recherchent un reflet pour exprimer un fantasme d'identité, confondant sujet singulier et acteur collectif, et formulent la place de l'Autre dans le phénomène migratoire : « - M. Jérôme Rivière (UMP). Mais j'ajouterai, monsieur le ministre, que quelle que soit la force morale d'un pays, il existe un seuil d'immigration à partir duquel un pays se regarde dans le miroir sans se reconnaître. - M. Jean-Pierre Brard. Si c'est vous qu'il y voit, il est évident qu'il ne se reconnaîtra pas ! - M. Jérôme Rivière. Ce seuil est aujourd'hui largement atteint en France. » Il n'est pas étonnant de retrouver le développement de ce thème dans l'objet que nous abordons. Le débat autour du projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration, en construisant une représentation de l'immigré, a élaboré par antagonisme un discours sur les représentations de l'identité nationale89(*). Dans cette structure binaire d'opposition, l'identité nationale n'est jamais définie que par rapport à un Autre incarné par une figure imaginaire d'étranger. L'imaginaire de la peur semble ainsi conduire à un retour sur le terme allemand « kultur » développé par Johan Gottfried Von Herder et fondé sur le sol, le sang et l'instinct. Il abouti à la construction d'une identité nationale de « réaction ». Cela expliquerait alors que l'on soit passé de l'axiome « lutter contre l'immigration clandestine pour mieux intégrer les immigrés réguliers » à un axiome anti-immigration pour éviter tout désordre social, c'est-à-dire tout objet qui ne s'inscrit pas dans la sociabilité attendue et qui provoque dès lors un déséquilibre des identités. * 89 LIPIANSKY, Edmond Marc, L'identité française : représentations, mythes, idéologies, 1991. |
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