L'identité en débat - Représentations et idéologies dans les discours sur l'immigration au sein de l'espace public( Télécharger le fichier original )par Jean-Marie GIRIER Université Lyon II - Université Lyon III - ENS-Lsh Lyon - Master 2 recherche en Sciences de l'information et de la communication 2007 |
La pression pré-électorale des mouvements associatifsLe temps de la campagne présidentielle influe également sur le rapport des acteurs politiques avec les acteurs et militants associatifs. En observant le fort mouvement d'associations plutôt proches de la gauche, nous avons constaté que leur discours s'est orienté principalement vers les parlementaires PS et PCF alors que les groupes politiques élaboraient leur programme présidentiel. Nous interprétons cela comme une transposition de l'enjeu électoral dans le débat qui permit l'instauration au sein de l'espace public d'une véritable opération de lobbying. Comme le rapporte Libération, cet enjeu influe directement sur le cours du débat : « A l'approche de la présentation de l'avant-projet de loi à l'Assemblée, le PS va pourtant devoir se positionner. Le collectif Uni(e)s l'y pousse, qui a besoin des députés socialistes pour mener la bataille contre ce texte. « Le Parti communiste est à nos côtés, c'est important, mais si le PS ne se mouille pas davantage qu'en 2003, on peut dire que c'est fichu...» prévient Catherine Teule, vice-présidente de la Ligue des droits de l'Homme37(*) ». Les associations ont de fortes attentes envers le premier parti d'opposition, et lui font savoir par la médiation de la presse. Les quotidiens, en produisant une information sur les motivations des collectifs associatifs, deviennent un carrefour de médiation au sein de l'espace public. Ainsi, dès qu'une manifestation est organisée, Libération interpelle ostensiblement les dirigeants politiques : « Verra-t-on les ténors du Parti socialiste, dimanche, place de la République à Paris, pour le premier grand rassemblement organisé par le collectif « Uni(e)s contre une immigration jetable » opposé au projet de loi Sarkozy relatif à l'immigration et à l'intégration ? Ce serait une première. Pour l'instant, la présence des dirigeants du PS lors des précédentes manifestations a été, en effet, plus que discrète ». Par ailleurs, les grandes associations nationales ont effectué un important travail au niveau local afin de faire pression sur les parlementaires de gauche. A titre d'exemple, le Réseau éducation sans frontières (RESF) a interpellé par une lettre ouverte l'ensemble des élus PS, PCF, Verts de Clermont-Ferrand pour obtenir leur soutien. Le succès de l'ensemble de ces actions cumulées se retrouve dans les interventions au Parlement. Ainsi, Serge Blisko souligne la collégialité de sa démarche : « Nous avons procédé à des consultations auprès des syndicats et des associations, notamment le collectif « Non à l'immigration jetable ». Et il faut bien voir que derrière ces chiffres, il y a des situations humaines concrètes : des individus vont devoir remplir des objectifs quantitatifs pluriannuels déterminés par le gouvernement ». Noël Mamère (Les Verts) renvoie pour sa part le seul recul du gouvernement sur un article du projet de loi à une nouvelle victoire de l'opinion publique : « Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, nous ne pouvons que nous féliciter de voir le gouvernement reculer sous la pression non seulement des Églises, mais aussi des 461 associations et partis politiques réunis dans le collectif « Uni(e)s contre une immigration jetable ». Nous avons eu raison de nous mobiliser pour alerter l'opinion publique et attirer l'attention - comme nous l'avons fait hier soir et ce matin encore - sur ce qui n'est qu'un bricolage idéologique ». Les associations ont apporté une valeur ajoutée à l'identité politique des partis parlementaires en mettant en avant des analyses de terrain et des propositions pour la société. Les appartenances politiques n'apparaissent plus basées sur une appartenance à une catégorie sociale, mais se concentrent autour d'un projet politique commun sur la thématique de l'immigration. Elles transcendent les partis politiques dans la mesure où elles regroupent un ensemble d'acteurs engagés de manière individuelle et ajoutent une communication influente dans le débat public. En outre, la formation des identités politiques associatives a été rendue possible grâce à l'incarnation par Nicolas Sarkozy de l' « adversaire idéal ». * 37 COROLLER, Catherine, Un PS bien discret sur le projet de loi Sarkozy, dans Libération, le 1er avril 2006. |
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